Les amis bientôt dévoilés du facteur

« Ni loi, ni voile », c’était en 2004, la position de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). Il n’était alors pas question de présenter une candidate voilée. Le débat qui ressurgit aujourd’hui au NPA (Nouveau parti anticapitaliste) n’avait pas été tranché lors de son congrès fondateur.

C’est en 2004 également que Chris Harman, dirigeant du Socialist Workers Party (SWP), principal mouvement d’extrême gauche britannique, exposait dans un texte, Le prophète et le prolétariat, les conditions d’une alliance tactique avec les islamistes. « Là où les islamistes sont dans l’opposition, notre règle de conduite doit être : ‘avec les islamistes parfois, avec l’État jamais’ ». Pour le militant trotskiste, cette attitude devait être la stratégie à adopter en France et en Grande-Bretagne. « Sur certaines questions nous serons dans le même camp que les islamistes contre l’impérialisme et contre l’État ».

Cette tendance est présente aujourd’hui dans l’actuel NPA, comme elle l’était déjà en janvier 2004 à la LCR, après l’adhésion du courant Socialisme par en bas (Speb) soutenu par le SWP. La correspondance tenue entre Chris Harman et le mouvement Speb français est d’ailleurs très instructive sur la façon dont le SPEP devait séduire les militants musulmans et réussir son entrisme à la LCR.

Socialisme International, autre organisation révolutionnaire française, avait intégré la LCR dès 2002. Elle décrit aujourd’hui « l’islamophobie » comme « une des formes les plus importantes du racisme » et préconise comme « souhaitable », « un travail commun avec des organisations musulmanes ». Une lecture surprenante de Marx.

Depuis, le mariage improbable ne cesse de nous surprendre. Comme celui des emblèmes faucille, marteau, Coran et kalachnikov à Paris en 2006, durant les bombardements au Liban : les drapeaux rouge de la LCR se mêlaient alors aux drapeaux jaunes du Hezbollah sur tout le boulevard de Magenta, comme en janvier 2009, lors des bombardements de Gaza.

A l’extrême gauche, seuls les anarchistes et Lutte ouvrière refusent de jouer les idiots utiles de l’islamisme en troquant leurs convictions anti-totalitaires au nom de leurs sympathies palestinienne et antilibérale. Pour la LCR, dont nombre de militants ont déjà noué des liens avec les Indigènes de la République, le Hezbollah semble incarner avant tout la « résistance ». Le projet de société islamiste, lui, se voit totalement gommé.

La LCR signera même avec la section France du Parti communiste libanais, allié du Hezbollah, une déclaration commune de refus de déploiement des forces internationales et de refus de l’application de la résolution 1559 sur le désarmement du Hezbollah. L’affaire du voile « féministe et laïque » que Besancenot semble presque décrire comme un accessoire de mode, n’est que le reflet de la confusion idéologique qui règne aujourd’hui dans les rangs du NPA. Une clarification est nécessaire.

in Le Courrier de l’Atlas, mars 2010