Nos lecteurs réagissent et analysent

1/ Point de vue sur le rapport sur l’intégration

Ce rapport n’est pas au fond d’un tiroir de Jean-Marc Ayrault: il est sur le site de Matignon, c’est loin d’être le cas de tous les rapports qu’il reçoit. Quand un gouvernement commande un rapport, ce n’est pas au hasard, c’est pour entendre un certain type de réponses qui lui permettront d’avancer dans le sens qu’il souhaite; quand il commande un rapport sur la compétitivité des entreprises, ce n’est pas pour s’entendre dire que ça va très bien comme ça, que nos entreprises sont assez compétitives; dans ce cas particulier, il savait bien que les gens qu’il avait choisis pour faire ce rapport feraient ce type de réponses; s’il avait voulu des réponses inverses, il aurait nommé des « experts » chevènementistes et des défenseurs ardents de la laïcité, type la remarquable Jeannette Bougrab. « Choisir le conseiller, c’est choisir le conseil », disait Lénine.
Ce rapport rompt avec l’intégration et propose un tournant majeur axé sur la conflictualité. Il veut bouleverser la société française et part du principe que la France est coupable et raciste et qu’il faut tout remettre en cause. Il prône une société multiculturelle alors que c’est un modèle conflictuel, où il n’y a pas de normes.
Dans le détail, je reproche à ce rapport particulièrement trois points. D’abord, sa volonté de remettre en cause la suprématie de la langue française en voulant reconnaître « la place essentielle » de la langue parlée en famille. Ensuite, ce rapport vise à modifier le contenu des programmes d’histoire en voulant intensifier la transmission de l’histoire colonialiste et esclavagiste. Or, ce sont des thèmes qu’il faut replacer dans leur contexte. Ce rapport veut élever les enfants issus de l’immigration contre la France.
Enfin, la proposition de supprimer la loi sur le voile est une provocation pure et simple. C’est très grave. Cette loi pacifie justement les écoles et fait qu’un enfant est considéré comme un élève, pas comme un religieux.

Maurice (17/12/13)

2/ Sur le créationnisme

En 2008, le journal ReSPUBLICA a publié une recension de Monique Vézinet (UFAL) consacrée aux livre Les créationnismes. Une menace pour la société française ? (Syllepse, 2008) que j’ai coécrit avec Cyrille Baudouin.
Nous étions très heureux de cette diffusion car notre travail s’inscrit pleinement dans les luttes que mène ReSPUBLICA, en particulier en ce concerne la laïcité et l’enseignement.
Nous n’avons pas cessé de travailler sur le sujet et je me permets de vous informer que nous avons publié chez Belin un nouveau livre plus conséquent et beaucoup plus complet intitulé
Enquête sur les créationnismes. Réseaux, stratégies et objectifs politiques. Vous trouverez plus d’informations ci-dessous. Toutes les recensions dont l’ouvrage a fait l’objet depuis sa parution ainsi que l’introduction et la table des matières sont disponibles sur la page www.tazius.fr/les-creationnismes/.
Je signale d’ailleurs que Catherine Kintzler dont les articles sont régulièrement mis en avant par Respublica a publié cet été sur son blog Mezetulle une recension de l’ouvrage.

Olivier BROSSEAU (21/11/13)

3/ Contre la charte des langues régionales

NDLR – Deuxième réaction dans ce sens : la position de ReSPUBLICA est claire à cet égard. Nous relayons régulièrement les appels à ce sujet et nous rejoignons l’analyse de Françoise Morvan dans le texte signalé ci-dessous, qui conclut : « Se référant désormais aux directives au Conseil de l’Europe, certains élus de gauche tiennent à l’égard de la France des discours haineux que l’on dirait calqués sur ceux de l’extrême droite ethnorégionaliste. Ils rejoignent par là le puissant lobby patronal breton de Locarn [voir dans le récent édito d’Evariste « Les prémisses des bonnets rouges »] qui appelle de ses vœux une ”Europe des tribus”. La charte est l’un des outils destinés à la faire advenir. »

Je n’ai pas vu évoquée sur votre site la décision de M Ayrault de ratifier la charte des langues régionales et minoritaires.
Il me semblerait pour le moins nécessaire que vous preniez résolument position contre. Je me permets de vous signaler l’excellent article que vous trouverez ici:
http://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/240413/contre-la-charte-des-langues-regionales. En espérant que vous mobiliserez vos adhérents et sympathisants sur cette question et surtout contre cette charte.
Le
CO.U.R.R.I.E.L http://www.courriel-languefrancaise.org/ (COllectif Unitaire Républicain pour la Résistance, l’Initiative et l’Emancipation Linguistique) (18/12/13)

4/ Sur la prostitution

NDLR – Nous comprenons bien le point de vue d’André mais, comme il l’indique, ce n’est pas ce type de prostitution « traditionnelle » que vise au premier chef la loi désormais votée. Tout pointe, dans les débats qui ont précédé celle-ci, sur l’aggravation du profil de la prostitution en raison des nouvelles formes de traite et d’exploitation. Les remarques de Christian le signalent bien. Nous pouvons partager son scepticisme si, en effet, les moyens nécessaires ne sont pas mis en œuvre

Nous avons au voisinage, un bar de prostituées. […] Nous n’avons jamais constaté la moindre contrainte ni misère chez ces prostituées mais au contraire beaucoup de bonne humeur et de dignité. Nous comprenons que ce ne sont pas elles que vous visez mais d’autres formes de prostitutions. Ce n’est toutefois pas une raison pour empêcher ces personnes qui sont nos voisines de vivre comme elles l’entendent. C’est une question élémentaire de liberté. Il faut craindre que l’enfer soit peuplé de bonnes intentions ; et plus encore d’ignorance. A moins que, pire, ce soit d’un ordre moral… Je précise que j’ai été président de la Ligue des Droits de L’Homme, section de Toulon, plusieurs années et que, à cette occasion, j’ai beaucoup travaillé avec le Mouvement du Nid.
André B. (17/12/13)

La prostitution c’est en plus de facteurs personnels, deux éléments stucturants, qui ne sont en réalité nullement pris en compte :
– la pauvreté, qui encourage le recours à cette pratique, et qui ne va pas disparaître demain, même si on accorde le RSA aux “repenties”,
– le trafic d’êtres humains, qui nécessite des moyens très importants, alors que la Police nationale et la Gendarmerie ont perdu 10 % de leurs effectifs sous Sarko, et la Douane 25 % (Sarko + Hollande); sans parler de la coopération policière internationale, qui doit progresser… Outre le recrutement de moyens conséquents (qui a publié une pétition pour demander le renforcement des moyens policiers ? Personne !), on aurait peut-être pu d’abord de façon pragmatique tenter d’encourager les clients à coopérer avec la force publique pour combattre ce trafic… mais on fait le choix inverse !
Au final on est loin du compte, et la loi votée n’aura guère d’effet à court terme, sinon incantatoire. C’est bien dommage : une occasion manquée.
Christian V. (18/12/13)

5/ Questions…

Posées par Jean C :
– Quelles critiques et quelles luttes menez-vous contre le libre échange et pour un certain protectionnisme national ?
– Quel avenir pour l’Union européenne et l’euro ?

NDLR – Sur la seconde question, nous renvoyons notre (nos) lecteur(s) à un texte récent qui fait le tour des positions en la matière, et indique celle que nous privilégions : https://www.gaucherepublicaine.org/chronique-devariste/leuro-les-six-positions-en-presence/6863
Quant au libre-échange et au protectionnisme, nous avions il y a plusieurs années déjà promu l’idée d’un protectionnisme « écologique et social » (pour lutter contre les inégalités de protection sociale et écologique, avec subventionnement de caisses spécifiques ad hoc des structures du pays exportateur, à distinguer donc du “protectionnisme solidaire” de J. Sapir qui ne vise qu’à réduire les inégalités des salaires directs). La situation de crise actuelle, à commencer par celle d’un ensemble européen de moins en moins homogène, rend l’application d’un tel principe plus complexe encore à mettre en oeuvre : comment y parvenir a fortiori au niveau mondial ? Il ne s’agit pas de cloisonner
pour protéger des rentes de situation. Des « écluses » à vocation temporaire sont-elles susceptibles de permettre de gérer la situation ? ’En ce qui concerne la concurrence entre pays « développés » et « émergents », il ne s’agit pas de protéger ses seuls « pauvres » mais d’obliger de part et d’autre à une nouvelle redistribution de la richesse. Cela est-il possible dans le cadre du capitalisme actuel ? nous ne le pensons pas, mais c’est en effet une question sur laquelle il nous faudra revenir.