Pour la droite catholique, la théorie du genre se limite à : « duos habet et bene pendentes »

À la faveur de la rentrée scolaire, le feu qui couvait depuis deux mois sur l’affaire de l’intégration de la théorie du genre dans les manuels scolaires se ravive. Ce que compte l’Assemblée nationale comme députés de la droite catholique vient de signer une pétition pour le retrait des manuels scolaires en question. Ces 80 députés viennent compléter les 37.000 signatures recueillies par leur courroie de transmission dans l’institution familiale : Familles de France.
La raison de tout ce tapage : des manuels de Sciences et Vie de la Terre qui osent évoquer, très succinctement, l’idée selon laquelle notre identité sexuelle n’est pas seulement biologique, mais également une construction socioculturelle et psychique.
La belle affaire, ils devraient également proposer l’interdiction de l’étude des civilisations antiques grecques et romaines par exemple, car les élèves risquent à tout moment de découvrir le pot aux roses : les mœurs, la sexualité, le rôle des hommes et des femmes ont varié considérablement au cours de notre Histoire, et cela contredit totalement l’idée de deux identités sexuelles immuables. C’est donc bien ces députés qui veulent introduire de l’idéologie au sein des manuels scolaires contrairement à ce qu’ils affirment : ils veulent continuer à imposer la vison de deux sexes purement biologiques (1)il est à noter que la biologie n’arrive pas toujours à déterminer clairement le sexe d’une personne renvoyant à des rôles immuables depuis… Adam et Ève. L’hétérosexualité étant la norme indéfectible.

En lisant la lettre envoyée par Famille de France au Président de la République pour lui demander d’interdire les manuels en question, on est vite édifié : parler de quelque chose en rapport avec le sexe à des élèves de 1re revient à les corrompre, ou, pire, à « être responsable de plus de grossesses précoces et de cas d’infections sexuellement transmissibles ». Et d’ailleurs, les élèves « ont bien d’autres préoccupations à avoir en Première ». Quand le professeur Henri JOYEUX prend sa plume, on est jamais déçu du résultat !
Il réussit même le tour de force de nous faire la leçon, « estim[ant] que le principe de l’Ecole républicaine s’appuyant sur la prévalence de la raison est remis en cause. En effet la mission de l’école, dans ses enseignements scientifiques, ne peut s’appuyer que sur une méthodologie rationnelle, et non pas sur des opinions ou des croyances quelconques, encore moins des idéologies. »

Reste qu’il est intéressant que les élèves en SVT comprennent que tout n’est pas inné, que nous avons aussi des caractères acquis, fruits de notre histoire, de notre environnement, de notre psychisme et de nos choix, qu’il n’y a pas de normes, et qu’il n’y a aucune raison pour hiérarchiser d’un point de vue moral les différentes identités sexuelles.

Non le genre, la sexualité, les rôles dans la société ne sont pas déterminés totalement par la biologie, ce n’est pas aussi simple que d’avoir duos habet et bene pendentes (2)« il en a deux, et bien pendantes » est une phrase rituelle concernant le moment de la vérification que le futur pape est bien un homme. Cette phrase, et cette vérification font partie de la légende de la papesse Jeanne qui raconte comment une femme est devenue pape au 9e siècle en cachant son identité sexuelle. Si cette papesse n’a sans doute jamais existé, on peut au moins dire que cette légende a travaillé le christianisme pendant plusieurs siècles et que les identités et/ou pratiques sexuelles de la papauté, pendant les 9e, 10e et 11e siècles, ont été pour le moins… troubles.

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 il est à noter que la biologie n’arrive pas toujours à déterminer clairement le sexe d’une personne
2 « il en a deux, et bien pendantes » est une phrase rituelle concernant le moment de la vérification que le futur pape est bien un homme. Cette phrase, et cette vérification font partie de la légende de la papesse Jeanne qui raconte comment une femme est devenue pape au 9e siècle en cachant son identité sexuelle. Si cette papesse n’a sans doute jamais existé, on peut au moins dire que cette légende a travaillé le christianisme pendant plusieurs siècles et que les identités et/ou pratiques sexuelles de la papauté, pendant les 9e, 10e et 11e siècles, ont été pour le moins… troubles.