Rapport 2015 de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme : une révélation, vraiment ?

Oui la réalité est bien là : jamais les opinions tolérantes n’ont été si fortes en France. Elles ont même progressé en 2015, année de deux attentats djihadistes majeurs. Les actes racistes progressent (et en leur sein il y a bien deux fois plus d’actes antisémites que d’actes anti-musulmans), mais ils sont le fait d’infimes minorités : 2.034 actes recensés en une année (dont 429 actes anti-musulmans et 808 actes antisémites) dans cet horrible pays raciste de 65 millions d’habitants ! Pour donner un ordre de comparaison, en 2014, selon l’Office National de la Délinquance et des Réponses Pénales (ONDRP), 568.000 ménages en France ont été victimes d’un cambriolage…

Le Monde qui publie des extraits de ce rapport dans son édition datée du 3 mai avoue son embarras. Ah mais que s’est-il passé ? Nos « intuitions » n’étaient pas les bonnes s’étonne la journaliste ! C’est vrai, quoi ! Comment se fait-il que les mêmes Français qui étaient favorables à 85 % à la déchéance de nationalité pour les terroristes soient, selon la CNCDH, « plus ouverts qu’avant » ? Lewis Carroll, au secours !

Que vont dire ceux qui nous expliquent depuis des années, notamment dans nombre de tribunes et éditoriaux du Monde, que la France a versé en bloc dans le racisme et la xénophobie et que c’était même pour cela que les Français sondés soutenaient massivement l’état d’urgence et la déchéance de nationalité ?

Que va dire Emmanuel Todd lequel, dans Qui est Charlie (Seuil, 2015), diffamait les défilés du 11 janvier 2015 en y voyant une manifestation de « catholiques zombies » forcément anti-musulmans, ces méprisables moutons frappés « d’hystérie » ayant été de surcroît « convoqués par le gouvernement »?

Que va dire Alain Badiou qui, dans Notre mal vient de plus loin (Fayard, 2016), affirmait que la classe moyenne était, « prise dans son ensemble, poreuse au racisme à la xénophobie, au mépris de démunis » et dénonçait une « fascisation rampante »? Qui sont les vecteurs de cette fascisation ? Mais nous bien sûr, odieux Français moyens ! Et l’immense philosophe d’asséner : « je pense qu’on peut appeler fasciste la subjectivité populaire générée et suscitée par le capitalisme ».

Et Edwy Plenel, qui dans Pour les musulmans (La découverte, 2015), voyait resurgir rien moins qu’un vichysme en marche, « la guerre d’une France contre une autre » (la France des cathos contre celle des musulmans ?) et affirmait que c’était « nous », par nos « mises en scène islamophobes » qui avions alimenté « la montée de l’intolérance anti musulmane » ?

Oui, que vont-ils trouver  ?

Simple : d’une part que c’est grâce à eux, à la virulence de leurs dénonciations, que le racisme a reculé. Une secte était ainsi retombé sur ses pattes, par un communiqué publié quelques jours après celui de la fin du monde qu’elle avait prédit : c’était l’intensité et la ferveur des prières de la secte qui avaient fait renoncer le Tout-puissant à son funeste projet. Les affaires pouvaient continuer.

Les champions de la dénonciation de l’islamophobie ajouteront également que les actes anti-musulmans ont progressé – ce qui est exact – mais en oubliant de signaler qu’en 2015 y a eu quand même deux fois plus d’actes antisémites que d’actes anti-musulmans d’après la CNCDH. Ce sont les actes les plus nombreux, ce sont aussi les actes les plus meurtriers (d’Ivan Halimi au magasin Casher de Vincennes en passant par Merah à Toulouse en 2012) depuis 10 ans. Et cela vise une communauté numériquement bien plus faible que la communauté musulmane.

C’est ainsi.

Lisons Que sont mes amis devenus ? de Brigitte Stora (éd. du Bord de l’eau, 2016). Un livre qui braque une lampe-torche sur la faillite de toute une fraction du mouvement dit antiraciste. Celle qui a carrément raté la montée raciste la plus préoccupante en France, quantitativement et qualitativement : celle de l’antisémitisme. Et d’une partie de l’extrême gauche – celle qui a substitué la lutte contre les discriminations à la lutte des classes. Ils ont découpé l’antiracisme en tranches, la noble et la moins noble, et c’était une défaite de la pensée, une occultation de la réalité. IIs se sont aussi lourdement trompés sur l’état d’esprit de la masse des Français.

Mais rien ne peut réfuter une logique sectaire. Rien. Les yeux fermés le demeureront.

Par contre, faire en sorte que la fable de l’islamophobie galopante (souvent reprise dans les médias anglo-saxons) convainque de moins en moins de monde, ça, oui, on y peut quelque chose. En commençant par ouvrir les yeux. En luttant à armes égales contre tous les actes racistes. Et en bataillant contre le dégoût du peuple instillé par les cercles de la gauche élitiste qui donne le ton depuis trop longtemps.