Chronique d'Evariste
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En finir avec sarkozy, mais après ?

par Évariste
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Quand François Mitterrand et la gauche gagnèrent en 1981, nous y avons cru pendant 1 an et demi. Nous avons fermé les yeux sur la naissance de la première franchise anti-sociale, le forfait hospitalier. Nous n’avons rien dit quand François Mitterrand refusa de revenir sur la loi de 1973 limitant fortement la possibilité du financement de l’État par la Banque de France. Nous avons été peu à critiquer le tournant néolibéral de 1983 qui permit aux capitalistes de modifier la répartition des richesses en faveur du profit et en défaveur des salaires.
Quand François Mitterrand et la gauche revinrent au pouvoir en 1988, peu dirent que cela serait pire que pendant la période 1983-1986. Et pourtant, François Mitterrand refuse de revenir sur l’autorisation administrative de licenciement ou sur la décision de Chirac-Seguin de désindexer les retraites sur les salaires pour les indexer sur les prix alors que c’est la raison principale de la baisse des retraites aujourd’hui. Pire, le livre blanc de Michel Rocard sur les retraites augure de ce que fera la droite dès 1993 à son retour au pouvoir.
Quand Lionel Jospin et la gauche gagnent de nouveau en 1997, personne ne croit qu’il va appliquer pour des millions de salariés (les ouvriers et les employés) une baisse de salaires1. Personne ne croit qu’il va faire la CMU pour les très pauvres en abandonnant les pauvres dans l’accès aux soins (ceux qui gagnent au-dessus du plafond de la CMU et moins de 1,3 SMIC) dont une partie va faire de la renonciation de soins pour cause financière et rejoindre le vote d’extrême droite. Personne ne croit qu’il va dire que l’État ne peut rien contre les licenciements de Renault alors que la part de l’État dans cette société faisait qu’elle avait le pouvoir. Personne ne croit qu’il va signer la stratégie de Lisbonne, transformer le Code de la mutualité solidaire en code assurantiel, etc., etc., etc.
Alors quid du 6 mai 2012 ? Notre journal fera tout pour tourner la page de Nicolas Sarkozy et de sa politique néolibérale. Mais nous souhaiterions que cela soit pour une vraie rupture. Et là, nous avons quelques craintes. Car nous sommes dans une situation plus que préoccupante.
Trois chercheurs suisses, Stefania Vitali, James B. Glattfelder et Stefano Battiston de l’École polytechnique fédérale de Zurich, spécialistes en réseaux complexes, ont publié, le 26 octobre dernier dans la revue scientifique en ligne américaine PlosOne, un article qui montre que les participations de 737 firmes mondiales dans les autres entreprises du réseau leur permettent de contrôler 80 % de la valeur (mesurée par le chiffre d’affaires) de la totalité du réseau. Et que 147 firmes contrôlent 40 % de cette valeur totale. Même si une polémique se développe sur cette étude en arguant par exemple que cette étude sous-estime l’influence de certains États sur les grandes firmes par exemple, tout le monde est d’accord pour conclure à un accroissement de la concentration du pouvoir dans le monde.
Un nouveau rapport de l’Internationale de l’éducation (membre de la Confédération syndicale internationale CSI) intitulé Global Corporate Taxation and Resources for Quality Public Services (Taxation des sociétés au niveau mondial et ressources pour des services publics de qualité) a rendu public à Londres, les énormes pertes de revenus pour les gouvernements dues à l’évasion fiscale des entreprises et surtout des multinationales.
Arrêtons notre liste. Nous pourrions montrer des centaines d’études décrivant la réalité matérielle que nous cachent le 20 h de TF1 et de France 2 et dont on n’entend pas beaucoup parler par les dirigeants de la gauche.
Mais ces exemples sont suffisants pour montrer que les difficultés deviennent plus fortes et qu’une gauche digne de ce nom doit prendre à bras le corps dès le 7 mai 2012 au matin en cas de victoire que nous souhaitons ardemment.
Tout cela pour dire que la gauche si elle ne veut pas une fois de plus décevoir le peuple devra engager sur le temps court une rupture contre la finance libéralisée, contre le libre
échange, contre l’austérité salariale et contre la contre-révolution fiscale. C’est même une condition de la sortie de crise y compris celle de la dette publique.
Les promesses faites par François Hollande, acceptées par le PS et les écologistes d’EELV, de 50 milliards d’économies en 2012-2013, d’une taxation sur les transactions financières de 0,05 % (José Manuel Barroso, président de la Commission européenne propose 0,1 % !), d’autoriser que la BCE rachète des emprunts d’État (ce qu’elle fait déjà à hauteur de 140 milliards d’euros, mais seulement sur le marché secondaire alors qu’il faudrait que la BCE le rachète directement aux États et donc désobéir à l’article 123 du Traité de Lisbonne), de refuser la retraite à 60 ans, ne sont manifestement pas à la hauteur des enjeux et refusent en fait les ruptures nécessaires de temps court. Alors que dire des nécessaires ruptures de temps long pour aboutir aux 4 ruptures et à l’application des 10 principes de la république sociale que nous appelons de nos voeux…
Pourtant, l’euphorie des 3 millions de votants aux primaires socialistes devrait laisser place à un peu de lucidité. Tout d’abord, les 4 et 3 millions de votants respectivement des deux primaires italiennes n’ont pas empêché le désastre programmé de la gauche italienne. Puis, le problème politique majeur est de combler le fossé entre la gauche et les couches populaires (ouvriers, employés, représentant 53 % de la population) sans quoi toute transformation sociale et politique n’aura pas lieu. Et sur ce point, une étude de l’IFOP du 4 janvier montre bien que la primaire socialiste a surtout mobilisé les populations âgées et diplômées et a été boudée par la grande majorité des jeunes, des ouvriers et des employés. Même Arnaud Montebourg n’a pas réussi à toucher la France du « non ». Il a plutôt fait ses voix dans les départements droitiers (en dehors de son fief) et « tertiarisés » du quart sud-est alors que Martine Aubry a plutôt fait ses voix dans le Nord et François Hollande a fait de bons résultats en Corrèze et dans le quart sud-ouest.
Pierre Moscovici, directeur de campagne de François Hollande, a pourtant assuré que « l’électorat populaire ne sera pas oublié ». Cela nous rassurerait si nous ne savions pas qui est Pierre Moscovici. Beaucoup se posent des questions sur sa capacité d’être toujours là dans les avant-postes du pouvoir.
Et bien disons-le derechef, il est le vice-président du Cercle de l’Industrie, un des plus importants lobbies patronaux du CAC 40. Vous avez bien lu. Et, bien oui, le directeur de campagne du candidat socialiste est un des dirigeants d’un des plus importants lobbies du CAC 40. Il n’est pas neutre d’être dans les conseils d’un candidat socialiste à la présidentielle et en même temps d’être co-responsable des politiques néolibérales dans la finance internationale ou dans les directions des multinationales. Vous me direz, c’est comme Karine Berger qui coordonne les experts, Emmanuel Macron, Stéphane Boujenah,Henri de Castries, André Martinez, Élie Cohen, Jean-Hervé Lorenzi, Jean-Paul Fitoussi, etc. Tous des dirigeants du monde des affaires. Conflits d’intérêts à tous les étages. Donc la question se pose, que font tous ses patrons ou ex-patrons qui ont codirigé les politiques néolibérales dans la période passée. Déjà le portugais José Sócrates, l’espagnol José Luis Zapatero, le grec George Papandréou et le belge Elio Di Rupo nous avaient habitués à cogérer le néolibéralisme dans leurs pays respectifs avec le patronat. On a vu les résultats.2
Nous y allons un peu fort ? Non, on recherche la vérité ! Raison de plus pour soutenir votre journal ReSPUBLICA qui a besoin de votre soutien financier et de soutenir son partenaire le Réseau Éducation Populaire (REP) qui sillonne la France avec ses 150 initiatives annuelles d’éducation populaire tournées vers l’action pour armer les citoyens pour que tous ensemble, nous puissions reprendre le chemin de l’émancipation et de la transformation sociale et politique.

  1. « travailler moins pour gagner moins »  pourrait être l’adage de la 2e loi Aubry ce qui permettra à Nicolas Sarkozy de produire le slogan « Travailler plus pour gagner plus » tout aussi anti-social ! []
  2. Pour ceux qui veulent plus de renseignements, nous les renvoyons à la lecture de ]
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Une collection de livres en appui à l'éducation populaire tournée vers l'action

par le REP
Réseau Éducation Populaire
http://www.reseaueducationpopulaire.info

 

Plusieurs membres du Réseau Éducation Populaire (REP) sont à l’origine d’une nouvelle collection de livres intitulée « Osez la République sociale ». Un éditeur, un directeur de collection, de nombreux auteurs travaillent sur ce nouveau chantier. Plusieurs caractéristiques en font une initiative singulière et d’abord le mode de production intellectuelle de la réflexion, sur un mode collectif, en parallèle avec la production d’autres outils, comme les diaporamas issus des séminaires de cohérence organisés au sein du REP.
La pluralité des compétences s’accompagne d’une volonté de cohérence et de globalité de l’analyse, notamment en n’écartant pas les angles morts de la pensée de la gauche (par exemple la critique des complémentaires santé souvent occultée du discours).
Chaque ouvrage ouvre des pistes alternatives sans dissimuler qu’un modèle politique alternatif est nécessaire, tant vis-à-vis des politiques néolibérales que du capitalisme lui-même. Ce modèle alternatif, celui de la République sociale (qui n’est en rien un programme ni un projet électoral :  l’éducation populaire laisse s’en charger ces deux autres piliers de l’émancipation et de la transformation politique et sociale que sont les partis et les syndicats) est nommé dans le titre de la collection lui-même. Les principaux jalons de la République sociale née de la Révolution de 1848 sont la Commune de Paris, la construction de la IIIe République avec les amis de Jean Jaurès - unificateur de la gauche et premier directeur de l’Humanité -, 1936, la Résistance et le Conseil national de la Résistance qui reste un modèle non épuisé, contrairement à plusieurs autres modèles nés après lui.
Une dizaine de livres sont prévus durant l’année 2012. Deux de ces livres seront à disposition chez l’éditeur1 dès le 20 janvier 2012 et dans les bonnes librairies début mars 2012. Ils se veulent accessibles à tous et largement utilisables à l’appui des initiatives d’éducation populaires :

« Néolibéralisme et crise de la dette » de Bernard Teper2 et Michel Zerbato3 .

Les économistes se trouvèrent fort dépourvus quand la crise fut venue. En guise de science, ils invoquèrent la cupidité des uns (banquiers et managers) ou l’impéritie des autres (gouvernants et autorités de régulation), qui avaient laissé se constituer une sphère financière autonomisée et irrationnelle. Ce petit livre d’économie politique explique la crise financière par les lois du système capitaliste et les politiques successivement mises en œuvre pour éluder leur manifestation depuis qu’à la fin des années soixante, la crise du fordisme fut combattue par l’inflation. Lorsque la stagflation fit opter à la fin des années 70 pour des politiques néo-libérales, dérégulation et financiarisation permirent de restaurer les profits rentiers, en gonflant des bulles d’argent fictif. La dernière, généralisée, vient d’éclater. La nécessaire démondialisation sonne l’heure de la République sociale.

 

 

« Contre les prédateurs de la santé » de Catherine Jousse4, Christophe Prudhomme5 et Bernard Teper.


La guerre contre la santé solidaire, ou dit autrement, la guerre pour la marchandisation et la privatisation des profits des secteurs rentables de la santé et pour la socialisation des pertes des secteurs non rentables pour les actionnaires, est entrée dans une phase cruciale. Rappelons que les dépenses de santé représentent 11,1 % du PIB. Les prédateurs ne se cachent plus pour attaquer la santé et l’assurance-maladie, ils disent ce qu’ils font et font ce qu’ils disent. De Warren Buffet, deuxième homme le plus riche du monde, jusqu’à Denis Kessler, actuel président de la SCOR, en passant par Guillaume Sarkozy, le patron de Médéric-Malakoff, tous assument ouvertement cette guerre. Devant cette offensive unie et bien organisée, y a-t-il une résistance à la hauteur des enjeux ? Que nenni ! La confusion règne. Beaucoup sont instrumentalisés par les prédateurs y compris des dirigeants politiques et des organismes complémentaires. Bien qu’il ait eu une accélération de la prédation décrite à partir de 2002 avec même un passage en turbo depuis la dernière présidentielle, il sera montré que cette logique prévaut depuis au moins 43 ans (depuis les ordonnances de 1967) et que les gouvernements de gauche ne l’ont guère enrayée et que la gauche elle-même a aussi mis la main à la pâte à ce processus. Le livre se termine par une proposition alternative d’un nouveau système solidaire de santé et d’assurance-maladie et appelle à une insurrection des consciences.

Les autres titres prévus, dont plusieurs déjà en chantier sont (avec des titres donnés à titre indicatif) :« Pourquoi les Allemands payent-ils leurs loyers moins cher que les Français », « Une alternative à la crise: la République sociale », « Des outils de compréhension pour le combat laïque », « Après l’oligarchie, la démocratie ? », « Penser une alternative pour la protection sociale », « Pour un féminisme social et républicain », « Rétablir et développer les services publics », « Une école républicaine est une école pour la liberté », « Pour une écologie républicaine », etc.

Pour tout contact : Bernard Teper 06.08.10.44.52

  1. Pour obtenir un envoi direct, il convient de contacter l’éditeur à l’adresse suivante : Osez la République sociale, Le parc des vignes, rue Panhard et Levassor - 78570 Chanteloup les vignes – tél. 01 39 74 67 32 & 06 07 34 98 15 []
  2. Bernard Teper, co-animateur du Réseau Éducation Populaire (REP), membre du Haut conseil de la famille, co-animateur des Etats généraux de la santé et de l’assurance-maladie (EGSAM), animateur d’une manifestation nationale décentralisée contre les franchises sur les soins pour le 27 septembre 2007, coordinateur d’un livre paru aux éditions Mille et une nuits intitulé Santé-Assurance-maladie : quelles alternatives au néolibéralisme. []
  3. Michel Zerbato, maître de conférences en sciences économiques, enseigne l’économie politique à l’université de Bordeaux et est chercheur au LAM (Les Afriques dans le monde, UMR 5115 du CNRS) de Sciences Po Bordeaux []
  4. Catherine Jousse, chargée de mission dans une mutuelle, co-animatrice du Réseau Éducation Populaire (REP), ancienne secrétaire générale de la Fédération CGT des organismes sociaux, ancienne membre de la Commission exécutive nationale de la Confédération CGT []
  5. Christophe Prudhomme, médecin urgentiste au SAMU de Seine-Saint-Denis, membre de la commission exécutive de la Fédération CGT de la santé et de l’action sociale, membre du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM), porte-parole de l’Association des médecins urgentistes (AMUF) []
Politiques familiales
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Oui, il faut tourner la page du quotient familial, mais uniquement dans le cadre global d'une réforme fiscale

par Bernard Teper

 

Comme toujours le débat s’installe dans le pour ou contre de telle ou telle mesures sans la remettre dans le contexte général de son environnement. Même si l’on fait l’analyse des « gagnants » et des « perdants » en cas d’application de telle ou telle mesure, il est nécessaire de mettre en lumière les interdépendances dans le système global, car ce qui compte pour les citoyens et les salariés (et leurs familles), c’est le résultat global et non le résultat par « tranche de saucisson ». Et de façon générale replacer ce débat dans l’analyse générale de l’état des lieux en s’appuyant sur des critères objectifs : inégalités sociales de toutes nature, refus de soins pour causes financières, pauvreté, précarité, chômage, pouvoir d’achat,etc. Il est nécessaire de replacer tout débat dans une diachronie historique et de questionner cette diachronie avec les arguments des uns et des autres.
Last but not least (en dernier lieu sans que cela soit le moindre), ne pas raisonner en fonction de sa divine personne, mais aussi, parce que nous sommes des partisans de la République sociale, en regardant les effets des différentes politiques sur la majorité du peuple (53 %)— je nomme par là les couches populaires composées des ouvriers et des employés.
Ce propos liminaire étant fait, démontons un par un tous les discours des « belles âmes » qui cachent mal soit une volonté de défendre les intérêts de la grande bourgeoisie soit de défendre un dogme obscurantiste via la doctrine sociale de l’église.

1) Que pensez du discours suivant « Toucher à ces quotients mettrait à mal la politique familiale française qui permet un taux de fécondité des femmes exceptionnel eu Europe » ?
Partons de deux mesures positives de la gauche-plafonnement du quotient familial en 1981 et durcissement de ce plafonnement en 1998. Est-ce que ces deux mesures ont fait diminuer l’indice conjoncturel de fécondité ? Non, puisque celui-ci est passé de 1,95 en 1981 à 2,04 aujourd’hui. Les organisations qui prennent pour vraie la « doctrine sociale de l’église » en sont pour leurs frais quand le débat est libre. Denis Clerc d’Alternatives économiques a raison de renvoyer tout citoyen qui souhaite être éclairé au tableau ASF 022DD1de l’INSEE, qui porte sur les taux de fécondité dans l’UE depuis 1960 et de mettre en exergue le fait que le nombre de familles avec enfants est passé de 8,7 millions à 9,2 de 1999 à 2008.
1-0 pour les partisans de la République sociale.

Et si l’on veut améliorer la politique familiale de la France, les partisans de la République sociale ont un projet comportant une politique globale à savoir le rétablissement des 104.000 places de crèches supprimées par la droite depuis 10 ans, un programme quinquennal de création de 300.000 places de crèches collectives et familiales, le déplafonnement de la prestation de service des crèches, un service public d’accueil du jeune enfant incluant un « vrai » droit opposable lié au « vrai » libre choix du mode d’accueil et la garde d’enfants à domicile pour permettre à toute femme qui subit la charge mentale de la parentalité de pouvoir sortir le soir à sa guise, un service public d’accueil des handicapés et des personnes âgées dépendantes avec un « vrai »droit opposable lié au « vrai » libre choix de la résidence, des sanctions pour les employeurs pour toute inégalité de salaire entre hommes et femmes qui ont la même qualification, une « vraie » politique de création de logements sociaux basée sur la construction annuelle de 100.000 logements sociaux supplémentaires par an (au-delà des 360.000 logements construits par an actuels), une nouvelle loi de criminalisation des violences faites aux femmes, un service public de soutien aux familles monoparentales (96 % autour de femmes) pour contrer l’augmentation exponentielle de la pauvreté dans cette catégorie avec création des logements sociaux d’accueil immédiat,

2) Que pensez du discours suivant : « Remplacer le quotient familial au profit d’un crédit d’impôt par enfant serait une “folie” (Nicolas Sarkozy) » ou « un “coup de massue pour les classes moyennes” (Valérie Pécresse) »
Quand on sait que les couches populaires-ouvriers et employés- représentent 53 % de la population, que les couches moyennes intermédiaires représentent 24 % de la population, on peut affirmer que ces couches sociales là seraient soit gagnantes soit ne serait pas perdantes de la modification. Les familles perdantes se recruteraient essentiellement à partir du 8e décile des revenus1. Ne seraient perdants que les deux derniers déciles qui ne regroupent que l’oligarchie et la majorité des cadres.
2-0 pour les partisans de la République sociale.

Les petits malins qui auront le courage d’aller lire à partir de la page 201 du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires auront tous les chiffres nécessaires pour asseoir la position suivante à savoir que les deux tiers des 10,1 milliards de réductions d’impôts liés à l’application du quotient familial injuste ne bénéficient qu’aux 11 % les plus aisés des foyers fiscaux.
3-0 pour les partisans de la République sociale.

Faites un sondage en demandant au peuple s’il préfère le quotient familial qui avantage les deux déciles les plus aisés de la population ou s’il préfère le crédit d’impôt de 607 euros par enfant (qui correspond à la somme totale de réductions d’impôts actuellement effectuée suite à l’application du quotient familial) ?
4-0 pour les partisans de la République sociale

Mais il ne suffit pas d’avoir raison, encore faut-il créer le rapport des forces pour passer aux actes. Il est de notre responsabilité de renforcer les partisans de la République sociale pour pouvoir passer du raisonnement aux actes.
Il n’y a aujourd’hui que trois pays européens qui appliquent le quotient familial, système hérité de la doctrine sociale de l’église : la France, le Luxembourg et la Suisse. Il serait donc temps que la gauche française redevienne le lieu du combat contre les inégalités sociales du salaire réel et donc qu’elle supprime le quotient familial qui ne favorise que les deux déciles les plus aisés de la population.

  1. ]
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Suppression du quotient conjugal, ça sent le Sapin !

par Nicolas Gavrilenko
Membre du Bureau National de l'Union des FAmilles Laïques (UFAL)
http://www.ufal.org

 

1, elle avait au moins le mérite de remettre la question de l’impôt et surtout de sa fonction redistributive au cœur de la campagne. Alors que pendant le quinquennat 2012-2017 nous fêterons les cent ans de l’impôt sur le revenu et que celui-ci, à coup de niches fiscales et autres suppressions de tranches d’imposition, pèse de moins en moins dans le budget de l’État, il était temps que la gauche s’y réintéresse. Las, Michel Sapin a aussi annoncé l’abandon de la suppression du quotient conjugal.

Le quotient conjugal, c’est quoi ?

C’est le fait, pour un couple (Marié ou Pacsé) de faire une seule déclaration d’imposition et de voir administration fiscale les imposer non pas sur le revenu total du couple, mais sur la moyenne des revenus du couple, résultat multiplié par 2.

Prenons un exemple pour être plus clair :

Un couple où A gagne 24 000 € par an et B 6000 €, l’impôt n’est pas calculé sur 30 000 €, mais sur 15 000 € (revenus moyens du couple) puis le résultat est multiplié par deux pour arriver à l’impôt à payer. Bref, l’administration ne tient pas compte de la disparité de revenus et dans le cadre d’un impôt sur le revenu progressif cela favorise les couples mariés ou pacsés avec disparité de revenus par rapport aux autres couples. Cela revient à discriminer les autres formes de couples !

Le quotient conjugal, ou la traduction fiscale du patriarcat

Mais cela favorise également, le conjoint avec les revenus les plus élevés dans le couple, et devinez quoi, c’est très majoritairement des hommes. Cela a plusieurs conséquences :

  • Cela défavorise le travail des femmes2 car cela augmente leur taux marginal d’imposition quand elle travaille et quand elle souhaite reprendre une activité3.
  • Cela ne réduit pas le rapport de force économique au sein du couple. Et cela n’est pas neutre sur l’égalité hommes-femmes. Pour reprendre l’exemple de notre couple formé par A et B, où A est presque toujours un homme, on a un « rapport de force économique » de 4, A gagne 4 fois plus que B4, or avec une individualisation de l’impôt, ce rapport tombe à environ 3, A payant 3000 € d’impôts et B percevant 1000 € de prime pour l’emploi. L’impôt compense donc en partie une inégalité à l’intérieur du couple.

Or quand vous avez des décideurs dans les entreprises qui sont presque tous des hommes, mariés, la cinquantaine, faisant donc partie d’une génération où le travail des femmes était moins généralisée et encore plus sous-payé que maintenant, et que ces hommes vivent cette situation fiscale, il n’est pas compliqué de comprendre que cela ne les incite pas à voir le salaire des femmes de leur entreprise comme un salaire d’appoint pour leur mari respectif. En conséquence, cela freine l’égalité salariale hommes-femmes.

Il est donc important que la gauche se saisisse de cette question, à la fois pour améliorer l’égalité entre tous les couples (et donc ne pas favoriser certaines formes d’union) et pour améliorer l’égalité hommes-femmes.

Il est important que cela se fasse dans une réforme globale pour qu’on puisse en mesurer toutes les conséquences avec comme objectif de redistribuer des plus riches vers les classes populaires.

Mais pour cela, il faut des candidats qui ne reculent pas à la première bourrasque…

 —  — 

Pour aller plus loin, un document du Haut Conseil à la Famille :

HCF-ANNEXE_3_Tresor-2 (Annexe de “ARCHITECTURE DES AIDES AUX FAMILLES: QUELLES EVOLUTIONS POUR LES 15 PROCHAINES ANNEES ?) : les simulations sur la suppressions du quotient conjugal sont pages 91 et suivantes.

  1. fiscalisation d’une partie du financement de la protection sociale par la fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu par exemple, échelle de progressivité de l’impôt trop faible, etc. []
  2. qui n’a jamais entendu : « ma femme a arrêté de travailler, car son salaire partait en impôt et en coût de garde pour les enfants » []
  3. l’exemple caricatural étant celui d’une femme qui reprend une activité à temps partiel avec un conjoint gagnant 5 SMIC : son salaire sera proche de ce qu’elle faisait « économiser » en impôts et en plus elle n’a pas le droit à la Prime pour l’Emploi []
  4. 24 000 €/6 000 €, si peu de personnes font ce type de calcul, cela est très loin d’être neutre en terme de domination []
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Standard&Poor's dégrade la notation de la France. Jean-Luc Mélenchon excelle jeudi soir sur France 2.

par Bernard Teper

 

Alors qu’une agence du néolibéralisme vient de dégrader la note financière de la France, nous faisons le lien avec la belle prestation de Jean-Luc Melenchon sur France 2. Cela vous surprend ? Sans doute. Pourtant ces agences du néolibéralisme font de la « haute politique » : elles ont été laxistes et n’ont pas réagi en 2007 contre les banques privées à but lucratif pour les actionnaires. Mais là, elles participent à la mise au pas des États pour que ces derniers augmentent leur politique austéritaire contre les peuples. Et secondairement, elles viennent de montrer qu’une partie des néolibéraux ne croient plus dans les gesticulations de Sarkozy et préfèrerait peut-être une alternance (sans alternative) avec un néolibéralisme de gauche.
C’est pourquoi la prestation de Jean-Luc Mélenchon jeudi sur France 2 prend force et vigueur dans la mesure où il devient de plus en plus évident qu’il faille engager une rupture avec ce système-là.

L’approfondissement de la crise et la perte de confiance en Sarkozy jusque dans son camp appellent un sursaut de la gauche. Jean-Luc Mélenchon a répondu présent. C’est à François Hollande maintenant de dire s’il est prêt à ce sursaut où comme ses prédécesseurs et ses collègues européens, s’il reste sur une position néolibérale présentée plus soft que Nicolas Sarkozy, mais sans rupture sur l’essentiel. Nous pensons qu’il n’y a plus de place pour un débat entre le centre gauche et le centre droit. Et que le débat va devenir la gauche contre la droite et l’extrême droite.

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Marine Le Pen utilise le mot laïcité pour un projet anti-laïque

par Bernard Teper

 

Naguère une extrême droite nauséabonde utilisait le mot « socialiste » dans le nom de leur parti le qualifiant de « national-socialiste ».
D’une façon générale, l’extrême droite païenne a l’habitude de prendre à la gauche des mots, de les vider de leurs sens puis de les recycler contre leur sens initial.
Le Club de l’horloge et d’autres succursales de l’extrême droite ont continué cette stratégie d’emprunt de mots pour en changer le sens.
L’utilisation par Marine Le Pen du mot « laïcité » pour l’utiliser dans un discours anti-laïque se situe dans cette dernière stratégie. Il convient donc la dénoncer une fois de plus et de combattre avec la plus grande énergie la résurgence de cette stratégie dans notre pays.

La laïcité doit rester un principe qui promeut :

  • la liberté de conscience (donc y compris celui d’être athée, agnostique,musulman, chrétien, juif ou autre)
  • l’universalité des droits (sans qu’une communauté en soit exclue)
  • la stricte séparation entre la société civile et les sphères de l’autorité politique et de constitution des libertés (école, santé et protection sociale, services publics). Et que dans les services publics, et contrairement à l’école (car là les élèves ont moins de 18 ans) l’interdiction des signes religieux n’est requise que pour les agents de ces services publics (et non de ses usagers).

Une fois de plus, les partisans de la république sociale doivent donc se battre sur deux fronts : celui du communautarisme d’une part et de l’ultra-laïcisme qui tous deux tournent le dos au principe de laïcité.

Bernard Teper

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Le communautarisme a son candidat a la présidentielle : Éva Joly !

 

La proposition d’Éva Joly de reconnaître certaines religions en créant deux nouveaux jours fériées (pour Kippour et l’Aïd-el-Kebir) pour celles-ci constitue une violation supplémentaire du principe de laïcité dont l’application fait que la République tout en connaissant toutes les communautés n’en reconnaît aucune.

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De plus, la proposition d’Éva Joly est, même de son point de vue, inégalitaire puisqu’elle ne donnerait dans son projet qu’une journée aux juifs et une journée aux musulmans contre 5 jours aux catholiques et 4 aux protestants, et 0 à toutes les autres religions.

En réalité, la solution laïque revient au contraire à laïciser le calendrier français, c’est-à-dire de supprimer les 5 jours fériés chômés catholiques et de donner à tous 5 jours de congé supplémentaires. Comme cela, l’égalité des citoyens sera respectée. Chaque croyant pourra utiliser ces 5 journées pour 5 fêtes de sa religion et les athées et les agnostiques pourront utiliser ces 5 jours à leur guise.

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Les écologistes ont un "Gro" problème avec la République

 

On pensait avoir tout vu et tout entendu de la part d’Eva Joly, la candidate d’Europe Écologie Les Verts (EELV) à la présidentielle de 2012. Après avoir proposé de supprimer le défilé du 14 Juillet, symbole de “la France guerrière”, après avoir voulu gommer la mémoire de la première guerre mondiale en faisant du 11 Novembre une “journée européenne de la paix” car il faut arrêter “de penser que c’est l’Allemagne qui a perdu la guerre”, après avoir considéré que Jeanne d’Arc était un “symbole ultra-nationaliste”, l’ancienne juge d’instruction a créé la polémique en proposant le 11 Janvier de créer deux nouveaux jours fériés : un pour la fête musulmane de l’Aïd-el-Kebir et un autre pour la fête juive du Kippour.

Annoncée au cours de la “nuit de l’égalité”, cette proposition vise à faire en sorte que “chaque religion ait un égal traitement dans l’espace public”. Selon Gro (c’est son véritable prénom), si cette mesure venait à être appliquée, “égalité et la laïcité auront avancé dans notre pays”. Une fois de plus, la pêche aux voix des “minorités” s’est transformée en véritable dérive communautariste. À ceci près que la candidate d’EELV n’a pas simplement répondu  à une demande des “représentants” des “communautés” musulmanes ou juives (à part quelques extrémistes, peut-être, personne ne proposait un tel changement), elle a anticipé leurs revendications.

Une situation qui n’en finit pas d’embarrasser les principaux intéressés : Moché Lewine, porte-parole du grand rabbinat de France, a ainsi tenu à  préciser que “ni le Consistoire juif, ni le Grand rabbinat ne sont à l’origine de revendications en ce qui concerne un jour férié”. De son côté, Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a exprimé des doutes sur la pertinence de cette initiative : il ne pense pas qu’elle puisse “trouver une traduction dans le cadre législatif français”.

Alors que la campagne peine à démarrer, en raison de l’omniprésence de la crise et de la paralysie des candidats du oui au référendum de 2005 face à l’échec de la monnaie unique, les prétendants (qu’ils soient “petits” ou non) tentent d’exister par l’intermédiaire de “coups médiatiques” : un bon mot (“capitaine de pédalo”), une menace ridicule (Accoyer qui compare l’arrivée de la gauche aux affaires à la guerre) ou comme nous le voyons ici des propositions volontairement provocatrices. Le débat de fond se fait attendre…

En cette période de bouleversements majeurs, l’irruption du fait religieux en pleine campagne présidentielle n’est pas de nature à apaiser les esprits. On peine à voir l’intérêt de cette intervention dans un pays où la  laïcité demeure une valeur essentielle et profondément ancrée. Fort heureusement, la quasi-totalité de la classe politique a dénoncé ces propos, y compris chez ses alliés d’hier et de demain : Michel Sapin l’a ainsi encouragée à “se souvenir toujours du principe de laïcité” et le P.R.G. a regretté qu’elle “confonde laïcité et clientélisme communautariste”. A l’intérieur même d’EELV la grogne monte et Pascal Durand y voit, lui aussi, “une atteinte au principe de laïcité”.

Focalisée sur ce seul problème, l’opinion publique a en revanche totalement ignoré une autre annonce, tout aussi déplorable, si ce n’est plus : la volonté de créer des “statistiques de la discrimination”, un “instrument utile pour permettre demain un même accès à l’emploi, à la santé, au logement, voire aux responsabilités politiques”. On peut deviner que derrière cet enrobage sémantique se cache le désir de remettre au goût du jour la notion de “discrimination positive”, pratique qui, rappelons-le, consiste à donner des droits supplémentaires à des individus en fonction de leur couleur de peau, de leurs habitudes sexuelles, de leur religion ou de toute autre caractéristiques considérée comme discriminante, au mépris de la notion d’égalité républicaine.

L’idée de lutter contre les discriminations en les institutionnalisant, en les officialisant et en leur donnant tous les attributs d’une base légale n’est pas nouvelle à gauche. Dans “Refaire société”, Magali Bessone proposait ainsi de définir un référentiel “racial” afin de mesurer puis de corriger les inégalités de traitement entre les différentes “races”. Si cette proposition absolument choquante n’a, fort heureusement, pas eu beaucoup d’écho au moment de la publication de l’ouvrage, l’idée n’en demeure pas moins “dans l’air”, comme en témoignent les paroles d’Eva Joly. Il s’agirait inévitablement d’une atteinte sérieuse aux valeurs de notre République, qui ne reconnaît que des citoyens et non des communautés établies arbitrairement. La publication de “statistiques ethniques” - pour prendre l’exemple le plus parlant - pourrait, par ailleurs, s’avérer le meilleur moyen de dresser les Français les uns contre les autres.

Les dispositions contenues dans l’accord PS-EELV révélé en Novembre avaient de quoi inquiéter. Plusieurs personnalités socialistes, parmi lesquelles François Hollande et Arnaud Montebourg ont, fort heureusement, pris leurs distances avec ce texte fantaisiste. La dernière sortie de la candidate écologiste montre que les verts sont engagés sur une pente dangereuse, celle du communautarisme et du différentialisme. Ces attaques répétées contre nos idéaux républicains nous imposent un devoir de vigilance vis à vis des propositions émanant de cette “secte fanatique”.

Tunisie
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Menaces sur l'eau ?

par Mohamed Larbi Bouguerra
Chimiste et universitaire tunisien.

 

L’eau est un bien commun, propriété de la Nation. Notre Constituante devrait l’inscrire dans la future Loi Fondamentale du pays comme cela se fait dans de nombreux pays. Bien commun, les sociétés privées n’ont alors rien à faire dans sa production, sa distribution et son assainissement. De plus, l’Assemblée Générale des Nations Unies en a fait, en juillet 2010, un droit de l’homme, opposable à l’Etat dans certains pays. Après les inondations qui ont frappé notre pays et entraîné des pertes en vie humaine et des dégâts considérables et face à le formidable engouement des Tunisiens pour l’eau en bouteille et aux manœuvres de certains, la question de l’eau, cette ressource vitale et irremplaçable doit être à l’ordre du jour de nos gouvernants et de nos concitoyens.

Latifa Hénia et Abdallah Chérif, deux éminents experts, nous rappellent qu’ « en Tunisie, la ressource est très modeste, pour ne pas dire rare, très fragile et très convoitée, de ce fait, le problème de l’eau se pose aujourd’hui avec une particulière acuité. » Confirmant ce constat, les projections de l’UNESCO mettent la Tunisie sur la liste des pays qui feront face à de graves difficultés dès 2025.

C’est pourquoi, à notre humble avis, le nouveau gouvernement doit prendre à bras le corps, maintenant, la problématique Eau qui commande aussi bien notre bien-être et notre santé, notre avenir économique, notre environnement et les générations futures. Il devrait décréter que la gestion de l’eau soit citoyenne, écologique et responsable.

La pénurie d’eau…et les souffrances de nos concitoyens :

Notre pays souffre sur le plan hydrique. Mais, il ne s’agit pas de provoquer la panique… car nombreux sont ceux qui veulent faire de l’eau… une vache à lait ! Il faut donc séparer le bon grain de l’ivraie mais, déjà, en juin 2008, M. Loïc Fauchon, président du Conseil Mondial de l’eau sis à Marseille, un think tank des multinationales de l’eau, avait été reçu par M. Ghannouchi, alors Premier Ministre - qui présidait le comité chargé de la privatisation- pour lui vanter probablement – on communiquait peu à cette époque- « le modèle français de l’eau » qui promeut la privatisation des services de l’eau. Or, le « modèle français » a du plomb dans l’aile : face aux scandales répétés comme celui qui a conduit en 1995 le maire de Grenoble M. Alain Carignon en prison pour corruption, une bonne centaine de collectivités territoriales (Paris –excusez du peu !- puis Rouen, Castres, Saint Malo, Cherbourg, Montbéliard, Annonay, Digne….) ont rompu leur contrat avec les multinationales de l’eau comme Véolia, Suez…pour revenir à la gestion publique et ont ainsi, pu baisser le prix du mètre cube de 10 à 40% voire supprimé parfois l’abonnement. Curieusement, les 28 et 29 juin dernier, s’est tenue à Tunis une réunion sur la question de l’eau, sous l’égide du PNUD et avec la participation de Véolia- un des majors de l’eau dans le monde- du Ministère français des Affaires Etrangères, de Loïc Fauchon et de l’ex-sénateur Oudin, auteur d’une loi visant à propager dans le monde le savoir-faire français en matière d’eau. Face à ces manœuvres, en Tunisie, il nous faut faire de la SONEDE « un grand service public national de l’eau » doté d’un conseil d’administration ouvert sur l’Université et la société civile, moderniser ses capacités techniques et établir des partenariats avec les universitaires et les chercheurs. Si les Tunisiens se précipitent sur l’eau en bouteille- préjudiciable à l’environnement- c’est qu’il y a probablement une crise de confiance..ou l’œuvre de la publicité ! Mais l’eau en bouteille transportée sur un camion sans la moindre précaution, exposée aux rayons du soleil dans son emballage plastique peut constituer un vrai danger pour la santé. Il est vrai que l’eau de robinet, elle, ne bénéficie d’aucune publicité à la télévision ou ailleurs ! Mais il faut raison garder, l’expert Christophe Courtin assurait en 2004 que «la sécurité hydrique ne sera pas le problème majeur du XXIème siècle. Cette menace potentielle est généralement agitée par les pays riches car ils craignent de voir remis en cause leur mode de consommation. »

Il n’en demeure pas moins que de nombreux pays ont un manque patent d’eau pour répondre aux besoins de l’agriculture, de l’industrie, des villes du fait de la démographie, du développement économique, de l’explosion de la demande urbaine et de l’évolution des modes de vie. Le changement climatique risque d’aggraver les choses notamment pour les pays en développement comme on l’a vu à Durban, la semaine passée. Mais l’eau doit demeurer sous le contrôle régalien de l’Etat et des citoyens : en Inde, le colonialisme britannique s’est arrogé le droit de distribuer l’eau et le sel et Gandhi commencera la marche pour l’Indépendance en combattant ces monopoles. L’eau doit échapper aux privatisations prônées par le néolibéralisme ambiant et la Banque Mondiale. En aucun cas, elle ne saurait devenir une marchandise livrée aux jeux de la spéculation boursière et des multinationales de l’eau qui ne sont guère intéressées par les zones rurales par exemple et qui ont montré leur inefficacité de la Bolivie (où il y a eu mort d’homme) à l’Argentine et du Vietnam au Maroc. Le 09 décembre 2011 en effet, d’importantes manifestations ont eu lieu précisément à Casablanca devant le siège de la Lydec, la filiale marocaine de la multinationale française de l’eau Suez, qui assure notamment la distribution de l’eau et de l’électricité, l’assainissement… Les manifestants dénonçaient la faillite de la privatisation de l’eau, les détournements de fonds, la non-construction du réseau d’assainissement et son absence d’entretien et des factures trop élevées. A Ouarzazate, les Marocains organisent « des marches de la soif » pour dénoncer l’accaparement de l’eau par les sociétés minières à participation royale. Le 13 juin dernier, en Italie, le référendum populaire, né d’une initiative citoyenne – et non du gouvernement- a dit un non catégorique à la marchandisation de l’eau et fait mordre la poussière aux politiques néolibérales du gouvernement Berlusconi. Dans de nombreux pays, l’eau sert à de bien sordides « combinazzioni » politicards. Philippe Bernard écrit (Le Monde, 13 avril 2011, p.7) : « En confiant, en 1990, la concession de l’eau et de l’électricité de Côte d’Ivoire à Martin Bouygues, ami de Nicolas Sarkozy, Alassane Ouattara est devenu un proche du futur président français….Laurent Gbagbo, qui veut se maintenir au pouvoir au-delà de la fin de son mandat le 31 octobre 2005, cherche à la fois à affaiblir l’axe Outtara-Bouygues et à amadouer Paris en favorisant les industriels amis de l’Elysée. Il y parvient en renouvelant, quelques jours avant cette échéance, les concessions de Bouygues (aujourd’hui minoritaire dans la distribution de l’eau et de l’électricité en Côte d’Ivoire)…. »

En France, le Conseil Constitutionnel s’est prononcé le 08 juillet 2011 en faveur du Conseil général du département des Landes et contre la multinationale de l’eau ; en faveur d’une gestion publique de l’eau afin que les usagers bénéficient d’un prix le plus bas possible. C’est pourquoi en Tunisie, il nous faut être vigilant car la question de l’eau ne saurait être traitée en dehors du cadre de l’éthique et de la justice d’autant que, prétendent certains, « l’eau représente la troisième industrie mondiale après le pétrole et l’électricité mais son caractère vital et sa raréfaction accélérée vont en faire, à court terme, la première ressource potentielle de profits à la surface du globe. » (Emission de la chaîne Arte le 18/11/2008)

Discours et promesses…à tout vent :

Sous le proconsulat de Ben Ali, pas un jour sans que l’on annonce un prêt ou un don international en faveur de l’adduction d’eau ou de l’assainissement. De plus, rares sont les discours dans lesquels le président déchu ne mentionnait pas qu’il allait « ordonner », tel Moïse, que l’eau atteigne telle ou telle partie du territoire. Preuve que l’eau est un problème lancinant – que le pouvoir ne pouvait plus faire semblant d’ignorer - pour bien de nos concitoyens et singulièrement ceux habitant les zones rurales ! Le Président déchu alla même jusqu’à appeler à la création d’un Conseil Islamique de l’eau lors de la 4ème Conférence Islamique des Ministres de l’Environnement qui s’est tenue à Tunis en octobre 2010. De leur côté, les journaux n’arrêtaient jamais de nous noyer sous les fameux et fallacieux « Projets Présidentiels » : la Presse du 05 janvier 2005 -relayée par Assabah du 11 janvier 2005- s’interrogeait sur l’avancement du projet d’adduction d’eau potable dans la région du Krib. Assabah publiait parfois des lettres de citoyens réclamant de l’eau potable ( de l’Ariana le 04 juillet 2003, d’El Hissiène à Zarzis le 29 mai 2005, du gouvernorat de Kasserine le 14 avril 2006). Parfois aussi, la presse osait parler de la qualité de l’eau. Ainsi, le Temps du 22 août 2008, mettait en évidence la salinité de l’eau dans les nappes de Nabeul, de Kébili, de Sfax et de Tozeur, Assabah allant même jusqu’à titrer en première page ce jour là : «  Pour quelle raison, le goût et la qualité de l’eau de robinet ont-elles changé ? » mais rassurait aussitôt  le bon peuple en annonçant le lancement d’« un plan à long terme allant jusqu’en 2030 pour assurer de l’eau potable aux générations futures » ! Mais certains médias faisaient entendre un tout autre son de cloche. Ainsi, le site Tunisnews rapportait le 23 février 2010 qu’à Nefta, l’eau de robinet était souillée par de la terre depuis la mi-février car « le réservoir n’avait pas été nettoyé par la SONEDE ». Le même site affirmait le 01 avril 2007 que les habitants de Boulaâba (gouvernorat de Jendouba) étaient contraints de boire l’eau d’une source où pullulent insectes, batraciens et algues. Quant à Radio Kalima, elle annonçait le 5 octobre 2010, que les protestations des habitants de Nasria (délégation de Balta Bouaouane) au sujet de l’eau potable avaient contraint le délégué et deux membres du Comité Central du RCD à recevoir une délégation de citoyens. La même radio rapportait, le 19 septembre 2010, que la contamination de l’eau potable dans la région de Safiha (délégation de Bouficha) avait rendu malades vingt enfants et tué l’un d’entre eux. Le mensuel Mouatinoun (novembre 2010) a publié une pétition des habitants de Menzel Chaker (gouvernorat de Sfax) qui se plaignaient de ne pas avoir d’eau potable de mars à octobre. Bien plus inquiétante est la nouvelle de l’apparition, à Thala, de 1000 cas d’hépatite A dont a fait état le site Tunisnews le 28 novembre 2010. Or, cette affection ne peut être transmise que par l’eau souillée par les matières fécales. De plus, annonce ce site, le Dr Mahjoub Ahmed El Kahri, qui a rendu publique cette grave épidémie, était l’objet de poursuites disciplinaires pour avoir divulgué « le secret médical » ! De son côté, El Mawkèf du 23 mai 2008 (p.8 ) affirmait que des familles d’Om El Ksab, dans la région de Redeyef se sont réfugiées en Algérie car « elles n’ont ni eau potable, ni dispensaire, ni cours complémentaire ». Depuis le 14 janvier, les sit-in pour l’eau sont légion et la télévision nationale nous a montré quelques exemples poignants de localités où la qualité et la quantité de l’eau – pour ne rien dire de son éloignement et des conditions de son transport- laissent grandement à désirer comme elle a mis le doigt sur les souffrances de nos concitoyens face au manque cruel d’eau qui les touche dans leur dignité et leur humanité même. De plus, il est facile de voir, dans les zones minières, les dégâts provoqués par les rejets des eaux de lavage, rejets que relèvent tous les touristes à bord du train le Lézard Rouge comme il est facile de voir dans la région de l’Enfida et dans bien des régions oléicoles les rejets de margines dans le lit des ouèds. La lutte contre la pollution tant par les industriels (de la conserve alimentaire et des industries laitières, du cuir, des huileries.. ) que les particuliers doit être une des priorités du futur gouvernement et le laxisme et la corruption de l’ancien régime en la matière doivent être résolument bannis.

La Révolution doit concerner… la gestion de l’eau aussi :

A l’heure où notre pays accomplit sa magnifique Révolution, la gestion et la gouvernance de l’eau doivent être repensées. L’eau dans les sociétés modernes fait face à deux défis majeurs : l’accès à l’eau potable et la préservation de la qualité de l’eau. Il est essentiel et urgent de doter tous les Tunisiens, où qu’ils habitent, de l’eau potable et d’un assainissement correct. Il s’agit là d’un investissement nécessaire. Le Financial Times du 20 octobre 2008, note qu’« un dollar dépensé pour l’eau et l’assainissement rapporte un retour sur investissement de 8 à 10 dollars ». De plus, la moitié des emplois dans le monde dépendent de l’eau. Notons aussi que l’adage médical affirme que « l’homme boit 80% de ses maladies » et le Dr Halfan Mahler, ancien directeur général de l’OMS, disait que « le nombre de robinets par millier de personnes deviendra un meilleur indicateur de santé que le nombre de lits d’hôpitaux. » et le Dr Mahmoud El Materi réclamait, dès 1931, que l’Etat mette l’eau à disposition de tous les Tunisiens, « indistinctement ». Il faudrait, par exemple, que les municipalités et la société civile s’impliquent dans cette gestion et procèdent à des analyses régulières de l’eau potable, par des laboratoires indépendants, pour les microorganismes et les contaminants chimiques (métaux lourds, pesticides, nitrates, résidus de médicaments qui deviennent un vrai problème avec le vieillissement de la population…). La démocratie doit aussi faire son entrée dans les associations d’irrigants et pour faire cesser certaines pratiques préjudiciables à l’économie et à l’environnement comme on le voit par exemple au Jérid. Il faut enfin éduquer la population pour qu’elle économise l’eau et il faut combattre sans relâche les fuites. Ce qui hélas n’est pas toujours fait par la SONEDE et les utilisateurs. Prenons exemple sur Tokyo, Lausanne, les capitales scandinaves où les pertes sont maintenues à 3% ! Mais l’eau potable ne doit pas nous faire perdre de vue l’assainissement et son importance. Souvenons-nous : l’épidémie mondiale de grippe aviaire de 2004 partie d’Asie est due à la fuite d’une toilette située au 7ème étage d’un immeuble de Hong Kong !

Un proverbe anglo-saxon dit crûment : « Water flows uphill to money » (L’eau suit sa pente et remonte vers l’argent). Pour l’immense majorité des pays en développement où la question de l’eau se pose, on pourrait étendre à cette ressource ce que dit des famines le Prix Nobel d’économie Amartya Sen : « Les famines ne sont pas le résultat du manque de nourritures mais de démocratie. Car la liberté d’opinion et la presse obligent les pouvoirs politiques à rendre des comptes et à agir. »

En mars prochain, à Marseille, se tiendra le 6ème Forum Mondial de l’Eau qui réunira les experts de 190 pays. La société civile sera aussi présente dans une manifestation parallèle : le FAME pour défendre l’idée que l’eau est un bien commun qui doit échapper aux manipulations du marché. Notre nouveau gouvernement doit réaliser que la manifestation qui aura lieu de l’autre côté de la mer est capitale pour l’avenir et le devenir de la ressource dans notre pays et partant, pour nos jeunes et pour la démocratie en Tunisie.