Chronique d'Evariste
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Ce que révèle le 3e plan d'austérité de Sarkozy  : fiscaliser la protection sociale pour détruire les institutions salariales

par Évariste
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Le MEDEF est aux anges, il peut faire couler le champagne. En une demi-année, voilà le troisième plan de rigueur et d’austérité de l’ordolibéralisme français. Les ménages et notamment les couches populaires (53% de la population française) et les couches moyennes intermédiaires (24% de la population française) seront les principaux payeurs, alors qu’ils ne sont en rien responsables de la triple crise actuelle. Le capital, qui est la cause de la triple crise, ne sera appelé à contribuer que de façon très minime et seulement après les présidentielles…
Et, de surcroît, les mesures annoncées manifestent le mépris des citoyens et de la démocratie.
Rendez-vous compte, la négociation entreprise par entreprise sera supérieure à la loi, c’est la destruction de la possibilité de l’émancipation par la loi. C’est ouvertement anti-républicain.
Après avoir attribué la délivrance du permis de construire aux communes - ce qui est une des causes de la ghettoïsation depuis 1982 -, voilà que l’ordolibéralisme supprime le permis de construire pour toute construction supplémentaire inférieure à 30% de l’existant. Les communes ne peuvent s’y opposer qu’en votant ouvertement contre ! C’est donner un pouvoir exorbitant à 13 millions de propriétaires contre les représentants élus au suffrage universel. C’est un déni de démocratie. Nous ne sommes plus en République.
Quant à la banque pour l’industrie, la mise de fonds de l’Etat est très faible et la taxe sur les transactions est repoussée après la présidentielle.
Mais le point capital est l’augmentation de 1,6 % de la TVA et de 2 % de la CSG sur les revenus financiers, le tout pour supprimer une partie importante de la cotisation sociale. La mission Bur (du nom du député UMP qui souhaite supprimer les cotisations sociales) voit ses conclusions mises en route. Tout est fait pour pousser au maximum l’avantage pour le MEDEF et les deux déciles les plus riches avant la présidentielle. Le Front national tente de s’y opposer mais son programme vise aussi à la fiscalisation de la protection sociale; quant aux socialistes, ils critiquent fortement mais sans trop entrer dans les sujets car ils sont aussi pour la fiscalisation de la protection sociale mais via la CSG (avec fusion, de plus en plus lointaine, avec l’impôt sur le revenu) au lieu de la TVA.

Toute l’offensive de l’ordolibéralisme aujourd’hui vise à détruire les institutions salariales et à intégrer le budget de la Sécurité sociale (supérieur de plus de 30% au budget de l’Etat) dans le budget de l’Etat. Et cela en vue de faire reculer la seule alternative (initiée par le Conseil national de la résistance, lire à ce sujet le texte de Denis Kessler, ancien n° 2 du MEDEF le 4 octobre 2007 dans la revue Challenges où il dit qu’il faut “défaire méthodiquement tout le programme du Conseil national de la résistance”) qui vise à développer les institutions salariales (dont la Sécurité sociale) à partir des besoins sociaux. Même en cas de changement de majorité, tout ne sera pas perdu car en général les socialistes au pouvoir gardent 80 % des mesures régressives de la droite (1988 et 1997 sont des exemples).
Pour nous, partisans de la République sociale, la ligne stratégique est claire : il faut d’abord chasser Nicolas Sarkozy et le futur allié de la droite néolibérale, le Front national. Pour cela, il faut deux choses : un vote Front de gauche le plus haut possible et une discipline républicaine sans faille pour gagner au deuxième tour. Et pendant ce temps-là, il faut faire auprès des citoyens le travail d’éducation populaire tournée vers l’action nécessaire pour qu’une victoire de la gauche tout entière n’aboutisse pas aux mêmes résultats qu’en 1988 et en 1997 mais, au contraire, que la mobilisation de la société pousse la gauche tout entière à rompre avec les politiques régressives (comme en 1936). C’est le mouvement social qui alors sera la clé. Nous reviendrons sur tous ces points.

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Annonce : Dix vidéos exclusives de Jean-Luc Mélenchon réalisées par ReSPUBLICA

Jean-Luc Mélenchon a reçu une équipe de 4 personnes de RESPUBLICA dont deux vidéastes pendant près d’une heure pour nous entretenir de plusieurs sujets en répondant à nos questions. Les sujets sont variés : laïcité, république, nouveaux droits dans l’entreprise, l’école, les services publics, la santé et l’aménagement du territoire, la planification écologique, etc.
Nous avions pris la décision de laisser libre cours à Jean-Luc Mélenchon pour lui permettre d’aller plus loin dans le discours sur certains points précis.
Nous publierons ces vidéos deux par deux dès la semaine prochaine pendant 5 semaines. Puis, vous pourrez les revoir en allant sur notre site www.gaucherepublicaine.org

Laïcité
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Si François Hollande veut vraiment constitutionnaliser la laïcité, il doit revoir sa copie !

par Charles Arambourou
militant au Front de Gauche ; praticien des finances publiques.

 

François Hollande s’était engagé à « inscrire les principes fondamentaux de la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution ». Malheureusement, le programme du candidat, publié le 26 janvier, fait apparaître une proposition 46, au mieux rédigée par des amateurs, au pire sournoisement anti-laïque :

« La République assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et respecte la séparation des Églises et de l’État, conformément au titre premier de la loi de 1905, sous réserve des règles particulières applicables en Alsace et Moselle. »

Sous couleur de défendre la laïcité, on graverait dans le marbre le Concordat napoléonien en Alsace-Moselle ? Même Jean Baubérot s’en est justement ému1… Explications, et conseils.

Pas de laïcité sans séparation des cultes et de la puissance publique !

On se réfèrera à une définition autorisée, donnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme2:

« …la véritable clé de voûte de la laïcité française est la loi du 9 décembre 1905, dite loi de séparation de l’église et de l’État (…). Son article 1er énonce : « la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. » Le principe de séparation est affirmé à l’article 2 de la loi : « La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. »

Le principe de séparation, objet explicite de la loi de 1905 (son titre), constitue la substance même de la laïcité, rompant avec le Concordat (voir encadré ci-après). S’il libère les pouvoirs publics de l’obligation de subventionner les cultes, il représente aussi une chance pour la liberté de religion, qui ne peut plus être soumise aux dictats des politiques.

Pourquoi il faut consolider juridiquement le principe de séparation

Or, c’est justement le principe de séparation qui est aujourd’hui mis à mal, parce que contredit par des normes juridiques d’égale valeur. Son talon d’Achille ? La loi de 1924 réintégrant l’Alsace-Moselle à la République, en maintenant le régime du Concordat dans ces départements3. Mais n’oublions pas les territoires ex-coloniaux où la loi de 1905 ne s’applique pas4 : les collectivités d’outre-mer5, sauf Saint-Barthélémy et Saint-Martin, les départements des Antilles et de la Réunion, mais Mayotte comprise, avec mention spéciale pour la Guyane6. La proposition 46 les omet : préparation insuffisante ?

Comment ces dérogations sont-elles compatibles avec l’article 1er de la Constitution de 1958 (hérité de celle de 1946) : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique, et sociale. (…) » ? Le raisonnement suivi par le Conseil Constitutionnel et le Conseil d’État est le suivant :

  • la loi de 1905 ne s’applique pas intégralement sur le « territoire de la République », des régimes ignorant la séparation ayant subsisté, nonobstant les Constitutions de 1946 et de 1958 ;
  • ergo, la portée du caractère constitutionnel « laïque » de la République est réduite au « plus petit commun dénominateur » du territoire : obligation de neutralité des pouvoirs publics et d’égalité de traitement à l’égard des cultes7, excluant donc le « principe de séparation » !8

Tant que la valeur constitutionnelle du principe de séparation reste contestée, l’article 2 de la loi de 1905 peut à tout instant être remis en cause, y compris en « France de l’intérieur », par une loi nouvelle, telle l’ordonnance de 2006 étendant les Baux emphytéotiques administratifs à la construction de lieux de culte9.

Comme nous l’avons écrit précédemment10: « tant que la loi de 1905 reste confinée au bas de la hiérarchie des normes légales, la disposition législative de 2006 l’abroge partiellement. », souhaitant alors « une modification de la Constitution introduisant une fois pour toutes une référence à la loi de séparation…».

Bourde ou manœuvre ?

La proposition du candidat du PS, sous sa forme présentée à la presse, loin de répondre à cette exigence, aboutirait ainsi à constitutionnaliser l’exception d’Alsace-Moselle (contrairement d’ailleurs au principe constitutionnel d’indivisibilité de la République) ! On ne peut faire pire.

S’agit-il seulement d’un oxymore juridique issu d’un travail trop rapide, voire perturbé par des considérations électoralistes de dernière minute ? Les plus critiques pourraient bien rapprocher cette disposition du « cheval de Troie » introduit par la proposition de loi sénatoriale du 17 janvier 2011, autorisant, au nom de la laïcité, le subventionnement public des crèches confessionnelles ! Sortons donc de l’ambiguïté.

François Hollande, encore un effort pour être vraiment laïque !

Accordons ici au candidat socialiste à la présidentielle le bénéfice du doute, car il a le mérite politique d’aborder le sujet. Mais disons-lui tout net : « Renoncez à constitutionnaliser le statut dérogatoire des cultes en Alsace-Moselle, sinon vous affaiblissez définitivement la laïcité ! »

Qu’est-ce qui empêche de prévoir pour l’Alsace-Moselle un régime légal transitoire, étalé sur une période suffisante (cela peut prendre une génération…) pour éviter un traitement brutal (épargnons le chômage aux « ministres des cultes reconnus »), et précédé d’une concertation ? Cette disposition relève de la loi organique, supérieure aux autres lois, et ne peut avoir pour objet que l’extinction de tout régime des cultes autre que celui de la loi de 1905. Précisons que seules seraient touchées les dispositions concernant le Concordat et les « articles organiques » de Bonaparte, en aucun cas les autres spécificités de ces départements (régime social, juridique, cadastre, etc.).

L’unification devra inclure explicitement tous les territoires non concernés par la loi de 1905, sous une forme adaptée. Elle paraît immédiatement applicable à la plupart des collectivités relevant des décrets Mandel, mais demandera également une période transitoire au moins pour la Guyane, du fait du subventionnement et du salariat actuels du culte catholique. Les lois organiques devront en outre être prises pendant la législature, la constitutionnalisation figurant parmi les mesures immédiates…

Proposition de reformulation

Risquons donc la proposition suivante -bien évidemment ouverte à toute amélioration :

« La République assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et respecte la séparation des Églises et de l’État, conformément au titre premier de la loi du 9 décembre 1905. Des lois organiques fixent, avant le 1er janvier 2017, les modalités d’extinction des autres régimes des cultes subsistant sur le territoire de la République.»

Constitutionnaliser la laïcité demande, comme l’écrit Caroline Fourest 11: « bien plus que du cran. Un sacré courage ! » -un courage qui a manqué à tous les gouvernements depuis 1924. Ajoutons : et un peu de travail juridique cohérent…

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RAPPEL : LE RÉGIME CONCORDATAIRE

Une mainmise de l’État sur certains cultes en échange de leur reconnaissance et de leur subventionnement…

L’État reconnaît en Alsace-Moselle quatre cultes : catholique, luthérien, calviniste, israélite, ce qui exclut l’Islam, pourtant largement représenté. Par conséquent, il rémunère leurs prêtres, contrôle leur désignation, nomme leurs dignitaires ; l’enseignement du catéchisme est obligatoire à l’école publique sauf demande déposée en début d’année ; des professeurs de religion passent un CAPES spécifique (créé sous le gouvernement de Lionel Jospin) ; les lieux de culte sont officiellement subventionnés et entretenus aux frais du public, etc.

C’est précisément pour mettre fin à cette confusion du politique et du religieux, et supprimer le « budget des cultes » (il y avait –déjà !- mieux à faire des fonds publics…) que la loi de 1905 a procédé à la « séparation » (son titre !), rupture radicale avec le Concordat !

Et pourtant, le Conseil d’État, bravant la logique et l’histoire, n’a pas hésité à voir dans le Concordat en Alsace-Moselle « une forme particulière de l’organisation des rapports et de la séparation (sic) des Églises et de l’État »12. Autrement dit, la subordination ou la séparation, c’est la même chose !

  1. « Mettons en avant les libertés laïques », Le Monde du 27 janvier 2012. []
  2. Arrêts Kervanci c. France et Dogru c. France, du 4 décembre 2008. []
  3. Avis n° 188.150 des sections réunies du Conseil d’Etat, adopté le 24 janvier 1925 : « le régime concordataire est en vigueur dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin, et de la Moselle. » Etait déjà invoquée la fiction d’un « accord international » avec « le Saint-Siège » (sic) -valant en fait « reconnaissance d’un culte »-, …comme elle le fut en 2009 pour les « accords Vatican-Kouchner » (reconnaissance des diplômes ecclésiastiques). []
  4. Voir circulaire NOR/IOC/D/11/21265C du 25 août 2011 (Ministres de l’intérieur et de l’outre-mer). []
  5. Régime des décrets-lois Mandel des 16 janvier et 6 décembre 1939, reconnaissant les « missions religieuses ». []
  6. Cumulant les décrets Mandel et l’ordonnance de Charles X du 27 août 1828 (toujours en vigueur) : le seul culte catholique voit ses prêtres salariés et ses édifices subventionnés par le département (dépenses obligatoires). []
  7. Obligation uniquement à l’égard des cultes, alors que la liberté de conscience inclut celle « de ne pas croire » : même l’article 1er est remis en cause… []
  8. Raisonnement spécieux, puisqu’en énonçant le principe de laïcité de la République, les rédacteurs de la Constitution de 1946 pouvaient difficilement se référer à autre chose qu’à la loi de 1905, y compris son article 2 ! []
  9. Location d’un terrain public pour 18 à 99 ans, en contrepartie d’une redevance modique (par ex. 1€), à une association cultuelle qui y construit un édifice de culte, lequel deviendra propriété publique à l’expiration du bail. []
  10. « Conseil d’Etat 5 ; laïcité zéro », blog Mezetulle.net de Catherine Kintzler, août 2011 ; UFAL-INFO n° 45, septembre 2011. []
  11. « Loi de 1905, la Constitution et le courage », Le Monde, 28 janvier 2012. []
  12. Rapport public 2004 « Réflexions sur la laïcité », page 269. []
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Laïcité et concordat : l'exception doit-elle être érigée en règle ?

par Catherine Kintzler
Auteur de "Qu'est-ce que la laïcité", publié chez Vrin, 2007.
http://www.mezetulle.net

Source de l'article

 

La rédaction du numéro 46 des 60 propositions de François Hollande donne des signes de précipitation et de confusion dont on espère que la campagne qui va se poursuivre les éclaircira ou les abolira - en attendant un mandat présidentiel que beaucoup souhaitent et qu’il faudra le cas échéant, et comme toujours, « avoir à l’œil »1 !

Pleine de bonnes intentions, elle propose en effet de constitutionnaliser certains principes de la loi de 1905 portant séparation des églises et de l’Etat, mais le rédacteur ajoute aussitôt  « sous réserve du statut particulier d’Alsace-Moselle ».

En voici le texte, repris sur le site Projet présidentiel François Hollande :

Je proposerai d’inscrire les principes fondamentaux de la loi de 1905 sur la laïcité dans la Constitution en insérant, à l’article 1, un  deuxième alinéa ainsi rédigé :  «  La République assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice des cultes et respecte la séparation des Églises et de l’État, conformément au titre premier de la loi de 1905, sous réserve des règles particulières applicables en Alsace et Moselle. »

D’abord que doit-on entendre par l’expression  « règles particulières applicables en Alsace et Moselle » ? S’agit-il du statut local de protection sociale qu’il serait effectivement opportun de préserver ? ou bien du régime concordataire dérogatoire à la loi de 1905, régime qui est contraire aussi bien à la liberté de conscience qu’à la liberté  des cultes, ainsi qu’au principe de non-reconnaissance et de non financement public des cultes2 ? Car s’il s’agit de réaffirmer ce régime, on ne peut qu’admirer le tour de passe-passe qui graverait dans le marbre constitutionnel ce qui n’est que dérogatoire et ferait dire à un texte constitutionnel « J’énonce un principe et je dis aussitôt qu’il ne s’appliquera pas ici et là ; je dis que la République est une, mais je dis aussi qu’elle ne l’est pas » ! Dans ce cas, on souhaite bien du plaisir aux constitutionnalistes chargés de rédiger un texte sérieux pour le soumettre à un Congrès.

Pendant qu’on y est, on pourrait aussi faire la longue liste des détournements, dévoiements et dérogations par lesquels maints élus, maintes collectivités territoriales, ont contourné la loi de 1905, particulièrement son article 2, et s’autoriser de toutes ces exceptions pour réclamer qu’elles deviennent la règle ? C’est sur ce type de manoeuvre que s’appuient de nombreuses tentatives de toilettage de la loi de 1905.

Mais les politiques de tous bords nous ont habitués à ces manœuvres : confier à quelques obscurs rédacteurs (je devrais plutôt dire : à quelques petits malins) le soin de donner les petits coups de cuillère qui dénaturent une proposition en proclamant les principes pour mieux les piétiner. On en a vu naguère un exemple avec la commission Gerin qui, reprenant le rapport Machelon, proposait ingénument un financement public des lieux de culte.

On a donc l’habitude. Mais de même que, au rugby, les matches ne se gagnent pas avec des petites entourloupettes du genre des « cuillères », mais avec une bonne grosse mêlée où s’engage un pack solide, de même les combats politiques supposent qu’on mette autre chose dans la mêlée que quelques petits malins qui rédigent des textes faits d’une dentelle cousue de fil blanc.

On se doute que François Hollande a d’autres chats à fouetter en ce moment et qu’il recouvrira d’un édredon salutaire de telles mesquineries. A présent il importe avant tout de faire obstacle à l’actuel locataire de l’Elysée. La question, si elle réapparaît ultérieurement, fera forcément l’objet d’un débat : ce n’est pas rien que de réunir un Congrès. Alors, patientons - chaque chose en son temps.
On vous a à l’œil, et on vous retourne la proposition : peut-être bien que « la République vous rattrapera » !

  1. L’Observatoire international de la laïcité contre les dérives communautaires a rédigé un second communiqué après avoir pris connaissance du détail de la proposition 46.]
  2. Voir ]
Politiques familiales
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La République doit-elle promouvoir le mariage ?

par Monique Vézinet

 

La secrétaire d’État chargée de la famille, Claude Greff, en présentant sa politique de soutien à la parentalité vient d’affirmer : « Le mariage est un acte républicain porteur des valeurs de ”liberté, égalité et fraternité”… Pour la République, la création d’une union entre deux personnes soucieuses de fonder une famille est une démarche fondamentale. »  Notons d’abord que si cette définition du mariage civil, orienté vers la procréation légitime et les avantages et obligations en découlant, correspond bien à l’état de la société française napoléonienne, celle du code civil et de l’obsession de la transmission patrimoniale et patriarcale, elle n’est plus – sauf en partie dans la jurisprudence – celle des textes et moins encore celle de la majorité des citoyens, qui refuse comme le montre l’évolution des pratiques le caractère sacralisé de la famille : nous ne reviendrons pas sur les chiffres du divorce (un mariage sur deux) ni sur ceux du pacs (deux dissolutions sur trois si l’on considère les années 2005-2009 par rapport à 2000-2004), ni sur les relents d’homophobie que dégage cette insistance en faveur du mariage civil (1).
Si nous combattons la fiction, appuyée par les cléricalismes, de la famille comme « cellule de base de la société », nous ne pouvons que défendre l’idée d’une égale reconnaissance des différentes formes d’union hétéro- ou homosexuelle (mariage civil, pacs, union libre) et d’un traitement identique des enfants qui en naissent ou sont adoptés. Mais il s’agit avant tout d’admettre que le citoyen, la citoyenne, priment à cet égard sur tout modèle culturellement ou historiquement établi, dans des choix librement fixés par des adultes entre les formes d’union, et sans laisser planer l’idée qu’ils seraient moins responsables à l’égard de leur conjoint ou de leur descendance du fait de ne pas être passés devant M. le Maire. Et sans poser par principe que les unions doivent durer alors qu’elles génèrent des situations de souffrance.
Mme Greff conclut à la production d’un livret destiné à rappeler les droits et obligations des futurs mariés, bien. Mais pourquoi ne pas ouvrir l’information à l’ensemble des formes d’union en termes de filiation, d’adoption et d’héritage, de façon à comparer objectivement et – à terme peut-être -  remettre à plat l’ensemble des solutions existantes ?
La question de la célébration du mariage est également abordée. Il est légitime que certains souhaitent donner à leur union une forme festive et ouverte, et il est vrai que dans les métropoles les mariages « à la chaîne » du samedi ont parfois un caractère frustrant. Si l’on ne peut demander aux mairies de s’adapter à toutes les convivialités ethniques ou religieuses, il reste que des rituels républicains existent et peuvent apporter un  « supplément d’âme » laïque pour ceux qui le souhaitent ; et que déjà certaines municipalités acceptent  la reconnaissance des pacs dans les murs de la mairie, ne se bornant pas à être de simples bureaux d’enregistrement de l’état-civil.

Des familles durables pour se substituer à la solidarité nationale ?
Partant de la notion de famille « durable », et en passant par un rapport de députés UMP menés par Hervé Mariton, le ministère de Roselyne Bachelot accouche donc de la souris Greff : promouvoir le mariage civil. Mais au-delà de ce qui relève de l’ordre moral, il faut décrypter des objectifs en phase avec la politique néolibérale : une stratégie pour que soit assumé dans le champ de la solidarité et des transferts familiaux ce que l’on s’apprête à détruire dans le champ de la politique sociale et des transferts de l’État providence. Les annonces en 2010/2011 concernant le rôle des aidants familiaux à l’égard des personnes âgées en perte d’autonomie (la solidarité intergénérationnelle) en ont été un signe. Le projet de fiscalisation des prestations familiales va dans le même sens.

Allons, Madame Greff, laissez-nous apprécier la forme et la durée de nos unions et parlez-nous des questions qui relèvent de la république sociale : l’attribution des allocations familiales dès premier enfant, une politique socio-fiscale plus juste, l’amélioration de la situation des familles monoparentales… par exemple.

(1)  Mme Claude Greff préside le comité de patronage de la récente Fondation de la Famille dont les liens avec le mouvement familialiste le plus conservateur sont évidents.

Lutter contre le néo-libéralisme
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La médecine du travail est un acquis à sauvegarder

par SLMT
Groupement National « SAUVONS LA MEDECINE DU TRAVAIL »
http://www.slmt.fr/

 

La médecine du travail est un acquis de la Libération, conçue par le CNR et crée à l’unanimité du parlement de l’époque par la loi du 11 /10/1946.

Depuis cette époque cette discipline médicale est devenue une spécialité. Son exercice exclusivement préventif au bénéfice de tous les salariés est assuré encore actuellement dans une pratique de masse par plus de 5000 professionnels.

C’est la dernière médecine préventive qui demeure. C’est la seule discipline médicale dont l’objet exclusif est les relations entre la santé et le travail. Les médecins du travail sont les seuls médecins à connaître le monde du travail. Ce sont les seul qui placés dans l’entreprise par la loi ont pour mission “d’éviter l’altération de la santé des salariés du fait de leur travail”. Leur fonctionnement est placé sous le contrôle des représentants des travailleurs dont ils sont les conseillés de même que de l’employeur en matière de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.

Le MEDEF vient de réussir à faire voter (non sans mal) la loi du 20 juillet 2011 qui détruit cet acquis social, médical et professionnel. Le décret d’application qui va prochainement être publié met en place cette dénaturation.

Cette opération se déroule sans que les vraies questions soient posées.

Est-il raisonnable de charger les managers ou les employeurs de concevoir, mettre en place et diriger, la prévention médicale des risques professionnels, dont ils sont eux mêmes responsables ?
Est-il efficace de charger de cette surveillance des non médecins, sans statut protégé ou des médecins non spécialistes et ou de limiter l’intervention des médecins du travail à la gestion des expositions professionnelles dangereuses (en abandonnant la prévention primaire) ?
Est-il concevable de donner aux employeurs ou à leurs mandants la charge de lutter contre la toxicomanie ou l’alcoolisation de leurs salariés, sans leur accord et en dehors des postes dits de sécurité ?
C’est ce que mettent en place la loi et son décret.

Depuis leur création en 1946 la plupart des employeurs se sont attachés à discréditer leurs médecins du travail auprès des travailleurs dont ils s’occupent. Cette constante a, le double avantage d’éloigner les salariés de la connaissance des risques dus à l’organisation du travail et de trouver un bouc émissaire exonérant les chefs d’entreprise de leurs responsabilités fussent-elles accablantes comme dans l’exemple de l’amiante.

En 2009 le patronat a trouvé une situation favorable pour se débarrasser de cette médecine gênante (qui se mêle de ses affaires). La pénurie de médecin qu’il a organisée avec les gouvernements successifs depuis les années 1990 peut lui servir de levier pour imposer la démédicalisation des structures qui organisent la prévention médicale des risques professionnels pour 93% des salariés du privé : les Services Interentreprises de Santé au Travail (SIST). La loi de juillet 2011 et son décret à paraître réalisent cette liquidation.

Les réactions ont été vives notamment à l’Assemblée et au Sénat lors des discussions et des votes. Mais ces derniers n’ont pu être obtenu qu’avec l’aide des directions nationales des deux organisations syndicales majeures de notre pays la CGT et la CFDT.

Notre groupement SLMT qui réuni dans un appel national plus de 800 médecins du travail d’opinions et d’appartenances variées, demande l’abrogation de la loi du 20 juillet 2011 et une réelle mise à plat de la question dans l’intérêt exclusif de la protection de la santé au travail des salariés.

Nous estimons que depuis 2009 les médias et particulièrement ceux classés “a gauche” n’ont pas pu promouvoir dans l’opinion ni l’information ni les discussions nécessaires au débat démocratique sur cette question.

Il ne s’agit pas d’une démarche corporatiste d’abord parce qu’elle concerne directement l’intérêt de santé de plus de 20 millions d’hommes et de femmes. Ensuite parce que la démédicalisation inscrite dans la loi une fois installée sera irréversible. Car c’est la perte des connaissances de terrain dans le domaine des relations entre la santé et le travail et l’abandon des possibilités d’actions médicalisées concrètes sur ces relations qu’i est en cause. Enfin c’est, donner aux employeurs des moyens médicaux dont ils sont pour le moment privés pour la sélection d’embauche, la réduction de l’absentéisme, l’exclusion des moins productifs ainsi que la gestion des expositions dangereuses dans leurs intérêts.

Ce n’est pas une défense corporatiste car après la disparition des médecins du travail seront menacés d’autres acquis de la Libération notamment la gestion des accidents du travail et des maladies professionnelles. Qui la connaît pour la défendre et la moderniser ?