Espagne/Grande-Bretagne/France : où en est la gauche ?

Malgré la fronde de la majorité parlementaire du parti travailliste britannique contre Jeremy Corbyn, ce dernier s’est renforcé à la tête du parti. Les élections régionales espagnoles en Galice et au Pays basque ont montré une légère poussée de la droite et de Podemos au détriment des autres partis. En France, la décomposition des partis de la gauche de la gauche se poursuit. Seule, pour l’instant, la candidature de Jean-Luc Mélenchon suscite un espoir à gauche. Mais tout cela s’effectue dans le cadre d’un effondrement prévisible de la gauche toute entière (gauche de la gauche et gauche gouvernementale). La question se pose donc de savoir si on peut éviter un deuxième tour « droite versus extrême droite ».

Grande-Bretagne

Avec 77 % de participation au sein du parti travailliste britannique, 61,8 % des voix, soit 313.209, sont allées à Jeremy Corbyn, contre 193 229 à Owen Smith, le candidat de la majorité des députés de la formation. A noter que Jeremy Corbin a fait 61 000 voix de plus qu’en 2015.

Pour comprendre l’enjeu politique, il faut savoir que la majorité des députés et Owen Smith sont des néolibéraux, européistes alors que la base sociale ouvrière du parti travailliste a voté le Brexit. Ce scrutin était devenu nécessaire depuis que la majorité des députés avaient reproché à Jeremy Corbyn d’avoir soutenu avec peu de ferveur l’option de rester dans l’Union européenne. La majorité puissante qu’a obtenue Jeremy Corbyn est due au soutien des syndicats, des ouvriers, des employés et des jeunes qui ont voulu rompre avec les politiques néolibérales de la direction d’avant 2015. (suite…)

 Vers une nouvelle crise paroxystique ?

Comme le dit le personnage incarné par l’acteur Jeremy Irons dans le film Margin call de Jeffrey C. Chandor, le capitalisme ne peut survivre qu’avec des crises successives d’importance diverse, certaines locales, d’autres mondiales, certaines conjoncturelles, d’autres structurelles, certaines élémentaires, d’autres systémiques, : 1637, 1720, 1788, 1792, 1797, 1810, 1819, 1825, 1836, 1847, 1857, 1866, 1873, 1882, 1890, 1893, 1907, 1923, 1929, 1966, 1971, 1974, 1979, 1980, 1982, 1985, 1987, 1989, 1990, 1992, 1993,1994, 1997, 1998, 2000 ,2001, 2002, 2007-2008, 2009, 2010, 2015… Sans compter les guerres qui sont également un moyen de faire de l’économie et de la politique par d’autres moyens, en permettant de surmonter une crise systémique au profit de l’oligarchie capitaliste et contre les intérêts des peuples…

A chaque fois, «  les chiens de garde  » médiatiques de l’époque participent à l’obscurcissement de la compréhension du réel à l’aide de nombreux livres et journaux qui visent à le rendre invisible derrière le rideau idéologique tendu par le mode de production de la société et qui empêche que l’on comprenne spontanément les causes des maux qui nous assaillent. Cela va jusqu’à l’école, dont les programmes sont modifiés pour n’entraîner in fine que la compassion et l’indignation sans compréhension des causes réelles des phénomènes auxquels nous réagissons.

Alors, nous voici environ 8 ans après la chute de Lehmann Brothers le 15 septembre 2008. Que s’est-il passé durant ce temps ? Beaucoup de choses. Ainsi, la crise des crédits hypothécaires s’est transformée en crise de la dette publique, puisque c’est l’argent public qui a soldé les pertes privées, crise de la dette qui a légitimé les politiques anti-salariales : hausse des impôts sur les ménages, casse des services publics et de la protection sociale, etc.. Mais la crise du profit, c’est-à-dire l’incapacité du capital à produire suffisamment de richesse réelle pour se valoriser en salariant des travailleurs, cause profonde de la crise systémique, est toujours là. Afin de se reproduire en reproduisant le capitalisme, l’oligarchie est ainsi tenue de chercher à restaurer ledit profit en ponctionnant la masse des salaires via l’intensification des politiques d’austérité et en baissant les prélèvements fiscaux sur les entreprises, et de tenter de solidifier autour d’elle les couches moyennes supérieures et intermédiaires.

(suite…)

Baisse du déficit de la Sécu : le gouvernement se gargarise, les pauvres trinquent !

« Je suis en mesure de vous annoncer que les résultats de 2016 seront encore meilleurs que ce qu’on avait envisagé en juin grâce aux efforts que nous poursuivons. L’horizon du rétablissement complet de la Sécu, de l’équilibre des comptes de la Sécu, ce n’est plus une utopie, il est à portée de main (…), pas pour 2016, mais très vite », ainsi s’est exprimée Marisol Touraine avec une emphase digne de Mme El Khomri lorsqu’elle défendait le caractère émancipateur de sa loi.

D’après les prévisions de la Commission des comptes de la Sécurité sociale (CCSS), la branche Retraites serait excédentaire de 500 millions, la branche AT-MP de 500 millions, la branche Famille aurait un déficit de 1 milliard et l’Assurance-maladie d’environ 5,2 milliards. Le déficit total serait alors le plus faible de ces dernières années.

En fait, il y a deux façons de lutter contre le « trou de la Sécu », par le haut en répondant aux besoins sociaux (1)Voir nos ouvrages sur https://www.gaucherepublicaine.org/librairie , soit par le bas en augmentant les inégalités sociales de santé et de protection sociale.

En fait, le mouvement réformateur néolibéral fait le second choix car il a inventé la solution à tous les problèmes de déficit : il suffit de restreindre les dépenses utiles et nécessaires pour les citoyens et leurs familles aux fins d’augmenter les inégalités sociales de revenus, de logement, de santé, de retraites, et d’une façon générale de toute la protection sociale. Comme depuis trente-trois ans, chaque gouvernement a fait pire pour les travailleurs que le précédent, on, voit bien là le projet commun aux néolibéraux solfériniens et de la droite.

Après le BIP 40 et les travaux de l’IRDES, voici le baromètre « IPSOS-Secours populaire »

Au moment même où Mme la ministre développait sa méthode Coué, le baromètre IPSOS-Secours populaire était publié. Et là il y a de quoi alimenter la contre-offensive contre ces ministres néolibéraux qui font passer toute aggravation des politiques austéritaires pour une mesure émancipatrice.

La moitié des Français gagnant moins de 1 200 euros net par mois renonce ou repousse une consultation chez le dentiste (+ 22 points par rapport à 2008 !), 39 % ont renoncé ou repoussé une consultation chez un ophtalmologiste (+ 9 points par rapport à 2008 !), 64 % estiment avoir eu des difficultés pour payer des actes médicaux mal remboursés par la Sécu, 53 % ont des difficultés à payer leur complémentaire santé, 48 % n’ont pas une alimentation saine. (suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 Voir nos ouvrages sur https://www.gaucherepublicaine.org/librairie

Le débat actuel sur le burkini est aussi l’arbre qui cache la forêt

Bien que tout débat qui se développe dans la société civile mérite une réponse appropriée pour ceux qui luttent pour une transformation sociale et politique, il arrive qu’un débat justifié (l’arbre) soit placé là par l’oligarchie capitaliste (FN compris), alliée aux idiots utiles des communautaristes de gauche et d’extrême gauche, pour cacher la forêt. (suite…)

Qui est à la hauteur des enjeux dans la lutte contre l’islamisme djihadiste ?

La succession des meurtres de masse perpétrés par l’islamisme djihadiste en général et par Daech en particulier montre l’incapacité de l’offre politique française et internationale d’assumer ce nouveau type de guerre.

Pour l’extrême droite, pour les ténors de la droite et pour le gouvernement solférinien, il faut à chaque meurtre de masse un renforcement de l’état d’urgence et une nouvelle loi antiterroriste, inopérants, inefficaces et donc inutiles, ce qui a pour unique conséquence d’accélérer le déclin de la démocratie et le passage à la « démocrature ». Tout au plus pouvons-nous voir comme seule différence que les uns développent leur ultra-laïcisme anti-laïque et raciste et que pour les autres, il s’agit de se distinguer par une surenchère imbécile.

La partie munichoise de la gauche de la gauche demeure incapable de proposer un idéal au peuple puisqu’elle cultive en la matière le déni du réel. Comment peut-elle alors « partir du réel pour aller vers l’idéal » (Jean Jaurès) ? Si elle a raison de nous dire qu’il ne faut pas faire d’amalgame entre l’islamisme djihadiste et la grande majorité des musulmans, encore faudrait-il qu’elle soit capable de nommer la menace car « mal nommer les choses ajoute au malheur du monde » (Camus). À chaque fois, la partie munichoise de la gauche de la gauche nous « bassine » avec l’idée que le ou les meurtriers ne sont que des déséquilibrés, des abrutis, des victimes du système et que cela n’a rien à voir avec l’islam. Il faudrait cesser ce « psychologisme » apolitique à deux sous. Même la revendication du meurtre de masse par Daech ne les fait pas changer d’avis. Pourtant de nombreux théologiens musulmans comme Soheib Bencheikh par exemple disent le contraire, à savoir que cela a à voir avec l’islam comme la Manif pour tous a à voir avec l’église catholique et que l’extrême droite juive en Israël a à voir avec le judaïsme ! (suite…)

Mitterrand et Rocard : les idolâtrer ou tourner la page ?

Quand un néolibéral, situé à gauche de l’éventail politique, décède, les médias entonnent tous l’hommage du grand homme sans qui nous ne serions pas aussi heureux que nous le sommes. Le décès de Michel Rocard (23 août 1930-2 juillet 2016) a ouvert un concert de louanges dans lesquelles toute critique politique était absente. On se serait cru dans le cadre d’une canonisation de saint bien qu’il soit protestant.

Première gauche mitterrandiste contre deuxième gauche rocardienne : accepter ce conflit est à terme rompre avec la gauche de gauche

On oublie trop souvent que c’est la première gauche mitterrandiste qui assume le tournant libéral de 1982-83 et qui ouvre grandes les portes du néolibéralisme en France. On oublie trop souvent que la deuxième gauche fut organisé en trois pôles : le groupe politico-intellectuel organisé autour de Rocard, la CFDT comme pôle syndical, et la Fondation Saint-Simon comme centre de réflexion. Nous voyons donc où a mené cette deuxième gauche aujourd’hui : au soutien inconditionnel à la loi El Khomri. Et c’est bien parce que Chevènement et Motchane décident de considérer la bataille entre la première gauche et la deuxième gauche en 1978 comme la bataille principale que le Ceres rompt avec la perspective historique qu’il s’était tracée jusque-là.

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De quoi le « Brexit » est-il le nom ?

En simplifiant à l’extrême, il s’agit d’une « sortie de secours » de l’Europe… mais par la droite.

Pour paraphraser le vieux Marx, tout matérialiste se doit d’abord de manier la dialectique. En suivant cette méthode, le « Brexit » indique, en fait, qu’une fraction significative de la classe bourgeoise anglo-saxonne ne retrouve plus son compte dans son alliance avec la micro-couche financière. La contradiction interne à la bourgeoisie est telle qu’elle remet en cause le dispositif de pouvoir en Europe.

Le cliquet ayant sauté, nous allons donc assister à une accélération de la décomposition de l’institution européenne dans les mois et les années à venir. L’alliance de classe est rompue. Car la récession est passée par là depuis dix ans : après les couches populaires et intermédiaires, la petite-moyenne bourgeoisie commence aussi à souffrir, en particulier en raison de l’effritement des revenus de son épargne et de ses rentes, et cela dans tous les pays d’Europe. Les injections de liquidités (QE), les taux négatifs, sont certes indispensables pour sauver le système financier et bancaire, mais cela engendre une dévalorisation des actifs au détriment de la classe bourgeoise classique. Bref, la micro-couche financière saigne le rentier !

Hélas, dans cette fin de cycle historique, la droite dispose d’une énorme longueur d’avance. Nous payons cash le « refus devant l’obstacle » de Tsipras et du gouvernement grec de Syriza en juillet 2015. Car la sortie de l’Europe par la gauche est pour le moment encore introuvable. La droite mène la danse dans l’espace occidental ! A Londres avec Boris Johnson et à Washington avec Donald Trump, un projet cohérent de gouvernance droite/extrême droite est en passe de se mettre en place.

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Les enseignements de notre agenda culturel, social et politique

Six éléments principaux retiennent notre attention dans la période : le sens de la lutte contre la loi El Khomri, la continuation de la poussée de l’extrême droite européenne, la politique anti-sociale du gouvernement grec, le référendum britannique pour ou contre le Brexit, les élections espagnoles, et la campagne présidentielle française.

Approfondissement de la crise sociale en France

La poussée populaire de la manifestation du 14 juin contre la loi El Khomri montre les deux aspects de cette lutte sociale : d’abord la persistance du mécontentement populaire dans la rue et dans l’opinion, dans la volonté de dénoncer ce nouveau palier dans la destruction des conquis sociaux par la gauche néolibérale solférinienne, ensuite le fossé culturel grandissant entre les élites néolibérales et le peuple.
L’acharnement et les mensonges médiatiques ne suffisent plus à décontenancer le mouvement social. Le fait que plusieurs syndicats de policiers (dont un de droite !) aient ouvertement critiqué le gouvernement et la hiérarchie policière pour avoir instrumentalis
é les « casseurs » afin décrédibiliser le mouvement social, les laissant agir sans faire intervenir les forces de l’ordre pour procurer des images au 20 heures télévisé et ensuite les faire intervenir sauvagement sans distinguer les « casseurs » et les manifestants, cela aura largement fait contrepoint à l‘acharnement médiatique des « nouveaux chiens de garde ». Il est donc de plus en plus probable que ce fossé culturel avec le gouvernement ne sera plus comblé d’ici l’élection présidentielle française.

Nouvelle poussée de l’extrême droite en Europe

L’élection présidentielle autrichienne a montré une nouvelle fois la poussée de l’extrême droite en Europe. Nous rappelons ici notre analyse, maintes fois présentée dans ReSPUBLICA : cette poussée est due à la conjonction de la crise économique systémique du capitalisme et des politiques austéritaires (qui en sont la conséquence) de plus en plus massives des gérants du capital que sont les élites néolibérales patronales, nationales et européennes. (suite…)

5 juin 2016 : une nouvelle étape politique

Il est de plus en plus clair que la seule réponse de l’oligarchie capitaliste et de ses gouvernements à toute demande sociale et politique est, d’une part, l’intensification des politiques d’austérité et, d’autre part, la tentative de criminalisation de toutes les contestations : essayons de comprendre les réactions possibles à cette situation.

Comprenons d’abord que le capitalisme n’est plus capable de maintenir des taux de profit élevés grâce aux innovations, à des hausses de productivité, à l’intensification du travail, ou même à la destruction de capital par la guerre. Sa seule survie possible réside donc dans le maintien des taux de profit par la baisse de la masse des salaires et donc par l’intensification des politiques d’austérité. Et que la globalisation financière et les associations régionales (de type Union européenne) ne servent qu’à cela.

Comprenons ensuite que la criminalisation des contestations n’est qu’une suite logique de ce qui précède. Les politiques actuelles de la police et de la justice doivent être mesurées à cette aune-là. On ne rappellera jamais assez qu’une partie des lois scélérates utilisées par le régime de Vichy ont été votées par la Chambre des députés élue au moment du Front populaire. Neuf mois fermes pour les Goodyear, l’utilisation des nouvelles techniques guerrières par la police (les grenades de désengagement entre autres) sont des symboles qui préfigurent malheureusement le régime qui risque de suivre. Si on ajoute – d’après la dernière étude du Cevipof – que les gardiens de la paix sont passés des années 80-90 à aujourd’hui d’une majorité « gauche républicaine » à 70 % de votants pour le FN aux dernières régionales, on voit clairement les dégâts des politiques néolibérales de droite et de gauche au ministère de l’Intérieur dans cette période.

Le spectacle politicien se met en place

La droite néolibérale croit son heure venue. Pour gagner la présidentielle, vu la poussée du FN et l’écroulement actuel du soutien populaire aux solfériniens, il suffit d’être présent au second tour et d’appeler les socialistes à faire ce qu’ils ont fait aux régionales (qui n’auraient été qu’une répétition générale pour la présidentielle) en PACA et dans les Hauts de France, c’est-à-dire voter pour la droite néolibérale. Alors que la droite néolibérale dévoile un programme pire pour les travailleurs que celui du gouvernement Hollande-Valls !
Pour s’en convaincre, il suffit de regarder les amendements votés par le Sénat à la loi El Khomri et les projets des candidats à la primaire de la droite, Bruno Le Maire, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy et François Fillon. La tendance s’affirme dans la période pour chaque gouvernement néolibéral, de droite ou de gauche, de devoir être plus dur que le précédent. (suite…)

La résistance syndicale est de retour contre la loi El Khomri

L’oligarchie capitaliste mène la lutte des classes avec vigueur. Warren Buffett, l’une des plus importantes fortunes du monde, déclarait il y a quelques années : “There’s class warfare, all right, but it’s my class, the rich class, that’s making war, and we’re winning.” (Il y a une lutte des classes, évidemment, mais c’est ma classe, la classe des riches qui mène la lutte. Et nous sommes en train de gagner.)
Pour faire mentir ce membre éminent de l’oligarchie, encore faut-il que la résistance syndicale sans laquelle rien n’est possible soit à la hauteur des enjeux. Déjà, à contre-courant des commentateurs qui répètent la doxa néolibérale, ReSPUBLICA avait noté la rupture opérée lors du congrès de la CGT d’avril 2016 (1)https://www.gaucherepublicaine.org/respublica/apres-son-congres-2016-ou-en-est-la-cgt/7397986. Une fois passé ce congrès, il est vite apparu aux forces vives de la CGT que les manifestations « saute-mouton » étaient de moins en moins efficaces vu la situation difficile que vivent les travailleurs tant de la classe populaire ouvrière et employée (53 % de la population française) que des couches moyennes intermédiaires (24 % de la population française). A noter que les camarades du privé de Sud-Solidaires sont sur ce point en accord avec leurs camarades de la CGT.
Eh bien, disons-le sans détours : la résistance syndicale est de retour. Et autour d’une partie du secteur privé, ce qui est nouveau sous notre soleil et très intéressant à la fois. Les assemblées salariales ont voté la grève reconductible dans le secteur des raffineries, suivi par le secteur des centrales nucléaires. (suite…)

Comment les gérants du capital préparent-ils la présidentielle de 2017 ?

Les trois partis du système (LR, PS et FN) se préparent activement à la présidentielle de 2017. C’est normal d’abord parce qu’ils sont favorables soit au statu quo institutionnel, soit au renforcement de la puissance présidentielle. Ensuite parce que LR et le PS sont aux affaires pour gérer le capital et parce qu’ils aspirent soit à rester au pouvoir, soit à y accéder avec le même objectif. Jusqu’ici, le mouvement réformateur néolibéral qui a pris le pouvoir politique en 1983 en France jouait de l’alternance sans alternative entre le PS et LR dès que le peuple était mécontent. A chaque alternance depuis 1983, chaque gouvernement a fait pire pour le peuple que le précédent. Mais l’oligarchie capitaliste savait que leurs intérêts seraient toujours promus à chaque alternance. Ils n’écoutaient donc pas trop le contenu des campagnes électorales du PS ou de LR dans la mesure où pour les néolibéraux, la formule de Pasqua s’applique à savoir que « les promesses n’engagent que ceux qui y croient ». Quant au FN, il attend en embuscade comme tous les partis d’extrême droite en période de crise que le patronat donne le feu vert à une alliance entre la droite et l’extrême droite comme au tout début des années 30 dès qu’il estimera que l’alternance centre gauche et centre droit ne permet plus l’intensification des politiques d’austérité, intensification absolument nécessaire à la survie du modèle réformateur néolibéral. Car le problème n’est pas de savoir s’ils sont gentils ou méchants ou s’il faut changer un méchant président par un gentil, mais bien de comprendre que la formation sociale capitaliste a des lois tendancielles qui l’obligent de baisser la masse salariale pour continuer à faire fonctionner le système. Dit de façon analogique, si on veut envoyer une fusée sur la lune et la faire revenir sur terre, il faut tenir compte des lois de la gravitation universelle et de la relativité générale. (suite…)

Nouveau seuil atteint dans le processus de décomposition du PCF

Les résultats du vote en vue du prochain congrès du PCF sur le texte du conseil national et sur les quatre textes alternatifs ont été rendus publics.

  • 14.942 voix (51,2 % des exprimés) pour le texte du conseil national qui devient la base commune amendable dans la deuxième phase du congrès pour la phase finale début juin. Deux départements ont donné plus de 80 % à ce texte (Corse du Sud et Côtes d’Armor).
  • 6.910 voix (23,68 % des exprimés) pour les partisans du Front de gauche (texte alternatif 1). Ce texte est majoritaire de façon absolue dans 6 départements dont la Vendée avec 67 %.
  • 1.575 voix (5,4 % des exprimés) pour le texte Alternative 2 mené par le groupe trotskiste La Riposte (elle-même filiale d’un petit groupe international Tendance marxiste internationale). Ce courant dépasse 15 % dans 3 départements dont la Côte d’Or avec plus de 21 %.
  • 3.755 voix (12,87 % des exprimés) pour le texte Alternative 3 des bastions municipaux orthodoxes (Pas-de-Calais, Vénissieux, les amis de JJ Karman, etc.). Ce courant dépasse 30 % dans 5 départements avec 45 % dans les Ardennes et plus de 78 % dans le Pas-de-Calais.
  • 2001 voix (6,86 % des exprimés) pour le texte ultra-orthodoxe réuni au tour de Dang Tran. Ce texte fait plus de 20 % dans 8 départements, plus de 30 % dans 5 départements, avec 47 % dans l’Aisne et plus de 75 % en Haute-Saône.

Analyse concrète du scrutin interne du PCF

D’abord sur le plan général, la chute des cotisants officiels est acté (64.000 en 2013, 51.000 en 2016). La chute des votants également (34.600 en 2013, 29.183 en 2016). La chute d’influence du texte du conseil national est manifeste (73 % en 2013, 51,2 % en 2016), d’autant plus que les quatre textes alternatifs sont opposés au texte aujourd’hui base commune. Nous sommes revenus en 2003 avec une configuration à peu près équivalente. Nous y reviendrons plus loin. (suite…)

Après son congrès 2016, où en est la CGT ?

Nouvelle bifurcation pour la CGT. La radicalisation du discours est manifeste. L’unification de la centrale sur le retrait de la loi El Khomri en est le ciment. Le « syndicalisme rassemblé » sur les bases de la CFDT, c’est comme Capri, c’est fini. Le virage par rapport à l’ère Thibault-Le Paon est enfin pris.
Un congrès animé qui a vu suivant les scrutins une abstention d’environ 10 % et des votes contre de 25 à 30 %. La raison principale est la « neutralité » du rapport d’orientation qui n’a pris à bras-le-corps aucun sujet important, en dehors de celui du fonctionnement des structures CGT.
Mais Philippe Martinez et son équipe ont pris la mesure de ce mécontentement par un discours d’ouverture plus « punchy » que le rapport d’orientation. Ils ont tenu compte des débats du congrès, puisque le secrétaire général a appelé dans son discours de conclusion du congrès à des grèves massives le 28 avril, précisant même que la possibilité de la reconduction du mouvement serait soumise aux travailleurs comme cela fut demandé par un nombre significatif de délégués.
Les votes massifs pour la désignation de la direction confédérale montrent que le congrès fut satisfait des inflexions que nous résumons ici et que de nombreux délégués critiques ont apporté leurs mandats à la direction confédérale. Ce fut un congrès vivant, et non un congrès stalinien comme celui de la CFDT, par exemple. (suite…)

De quoi « Nuit debout » est-il le nom ?

La lente décomposition de la gauche de la gauche et de l’ensemble de ses organisations politiques sans exceptions, l’implosion programmée des néolibéraux solfériniens devait bien susciter de nombreuses nouvelles pratiques sociales. Nous avions déjà relaté la poussée de la demande sociale d’éducation populaire par des structures locales des associations, des partis, des syndicats, des collectifs, des universités populaires, des MJC, des écoles, des universités. D’autant que ces demandes vont de moins en moins vers les responsables nationaux de ces organisations mais bien vers des centres de ressources (1)Le Réseau Education Populaire, par exemple, intervient plus de 400 fois par an. ou des intellectuels.

Par ailleurs, une multitude d’initiatives locales voient le jour dans des domaines très différents dans des secteurs très différents comme l’écologie, le féminisme, l’action solidaire, la laïcité, etc.

Sur le plan électoral, la candidature de Jean-Luc Mélenchon est pour l’instant la seule qui à gauche fait son chemin.

Mais voilà, une nouvelle pratique voit le jour : « Nuit debout ». Au commencement fut le verbe de François Ruffin et de Frédéric Lordon. Lors de l’avant-première du film « Merci Patron » réalisé par Ruffin, fondateur du journal Fakir, à la salle Olympe de Gouges à Paris, c’est Lordon, qui fixa un premier rendez-vous à la Bourse du travail le 23 mars pour débattre de ce qui pourrait « faire peur » à l’oligarchie. Plusieurs réunions se sont alors succédé au même endroit. La décision fut alors prise de ne pas se coucher après la manifestation du 31 mars contre la loi El Khomri à Paris. Le mouvement « Nuit debout » sur la place de la République est alors lancé. (suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 Le Réseau Education Populaire, par exemple, intervient plus de 400 fois par an.

D’Auroux à El Khomri en passant par Aubry, assouplissement des contraintes patronales et inversion de la hiérarchie des normes Une constante depuis plus de 30 ans

Imposée par l’Union européenne ((La dernière injonction en date est l’avis du conseil de l’Union européenne au Plan national de réforme (PNR, document obligatoire depuis la stratégie de Lisbonne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment en son article 121, paragraphe 2, et son article 148,…

Bruxelles : contre la terreur de masse, des principes et des armes

Après Paris, c’est au tour de Bruxelles de vivre l’épouvante créée par le total-terrorisme islamiste en action. La guerre injuste et ignoble menée par Daech aux prolétariats européens continue.
Non, le djihadisme n’est pas causé par « nos guerres ». Indécence de ce déplacement de responsabilité. Voyageurs de Zaventem, travailleurs coincés dans le métro de Maelbeek, foules de toutes les capitales, nous ne sommes pas responsables de leurs agissements ignobles : nous sommes des victimes, point à la ligne. Les fous de Dieu sont en guerre contre ce que nous sommes, pas contre ce que nous faisons. C’est pourquoi ils tuent partout, là où ils le peuvent, du Moyen-Orient aux villes européennes, et sans aucun égard puisqu’à leurs yeux, nous sommes tous et définitivement coupables.
Cette force immonde est en marche. Elle ne sera pas arrêtée, nous le savons, par des pétitions de principe. Contre elle, il faut des principes et des armes. (suite…)

Point d’étape sur la présidentielle de 2017 : Jean-Luc Mélenchon entre en lice

Le 10 février dernier, Jean-Luc Mélenchon propose sa candidature. Depuis, le débat fait rage autour de cette proposition. Nous proposons aujourd’hui, d’abord d’analyser le réel, puis de mieux comprendre les analyses des protagonistes de ce débat, et enfin, à partir des conditions du soutien populaire, de situer la place de la présidentielle dans le combat général pour l’émancipation.

Quel est le réel populaire aujourd’hui ?

60 % des ouvriers et des employés s’abstiennent, ce qui empêche tout rassemblement populaire propulsif. Dans la minorité qui vote, le FN est largement en tête. La gauche de la gauche est bonne dernière. Normal, elle est en en voie de décomposition avancée après avoir perdu en quelques années, une bonne partie des voix qui se sont portées sur le candidat Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2012. Depuis, le fossé s’est creusé entre cette gauche de la gauche et le peuple. D’abord, parce que les discours, les pratiques et la stratégie de la gauche de la gauche sont plus en phase avec les demandes des couches moyennes radicalisées qu’avec celles des intérêts des ouvriers et des employés. Dommage, les ouvriers et les employés représentent objectivement 53 % de la population et les couches moyennes salariés seulement 39 % (24 % pour les couches intermédiaires et 15 % pour les couches moyennes supérieures).

Par ailleurs, la gauche de la gauche s’est largement vautrée dans le sillage d’une politique visant tout au plus à un gauchissement du communautarisme anglo-saxon contre le principe d’organisation sociale de la République sociale qu’est la laïcité. (suite…)

Le coup de cœur d’Evariste : un nouveau journal, un vrai !

Evariste n’est pas en vacances sur les pistes enneigées, il se repose en rêvant à un projet… et ce n’est pas le sien, c’est celui d’une bande de jeunes. On a assez dit dans le temps que les jeunes étaient dépolitisés ; depuis, des hordes d’abstentionnistes, de déçus ou de transfuges sont apparues dans toutes les tranches d’âge. Pourtant Evariste, dans ses contacts et dans les actions d’éducation populaire dont il est témoin, dans celles du REP dont il est partenaire, assiste à l’éclosion de projets chez des militants qui ont moins de trente ans, mais avec une façon peut-être différente d’aborder le politique dans l’action. ReSPUBLICA tentera de mettre en exergue ces initiatives pour les encourager et les faire partager.

Nous commençons aujourd’hui avec Le Progrès social, un quotidien papier sur abonnement.

Vous pensez que c’est fou de lancer un quotidien national d’opinion engagé et indépendant ? Eux aussi ! Pourtant, ces militants associatifs, syndicaux ou politiques engagés dans la construction du progrès social et dans l’éducation populaire ont décidé de se jeter dans l’aventure.

Nous savons pouvoir leur faire confiance : lire dans ce numéro les articles qu’ils signent sur le travail du dimanche, la réforme Macron du droit du travail, et l’entrevue avec la militante kurde Nursel Kiliç .

Il y a plus, alors que nous sommes un journal électronique parmi tant de publications électroniques en nombre exponentiel et que la crise de la presse imprimée (de sa distribution, de sa crédibilité) s’approfondit, nous partageons le constat selon lequel la lecture sur papier entraîne une meilleure attention, et sans doute un autre engagement du lecteur.

Alors, nous vous proposons cette complémentarité, et tout de suite car, tenez-vous bien, la parution du numéro 1 est prévue pour le 9 mars 2016.

Le modèle économique qui permette la professionnalisation, l’équipe du Progrès Social a dû y réfléchir : un journal sans aucune publicité et financé uniquement par les abonnements. Trois mille abonnements annuels sont nécessaires pour garantir l’équilibre financier du projet. Sur https://fr.ulule.com/le-progres-social/ on trouve des détails et le moyen de rentrer dans le financement participatif du projet. Chaque souscription compte ! (suite…)

Néolibéralisation de l’école

Dans la bataille pour l’hégémonie culturelle indispensable pour se mettre à la hauteur des enjeux de l’émancipation humaine, il est crucial de mettre en lumière les conséquences sur l’école du mouvement réformateur néolibéral. Les citoyens et les familles attachent à l’école une grande importance car la qualité de l’enseignement qui est dispensé et le niveau que l’élève qui la fréquente peut atteindre, déterminent pour une grande part le passage des droits formels aux droits réels dans la vraie vie. Que la gauche de la gauche ne s’en préoccupe pas beaucoup est une des raisons de sa décomposition actuelle.

L’école est l’un des marqueurs de la république. Il y a un lien dialectique entre le niveau émancipateur de la république et le niveau d’autonomie de pensée et de formation critique donné à l’ensemble de la population par l’école. On peut même considérer que l’école n’est pas un simple service public mais un organe central du dispositif républicain. C’est encore plus vrai si on souhaite monter d’un cran et promouvoir la République sociale. Nous en sommes loin aujourd’hui.

Nous savons tous que les républiques populaires n’étaient en rien républicaines et qu’il en est de même aujourd’hui de la République islamique d’Iran. Mais qu’en est-il de notre Ve République ? (suite…)