WASHINGTON – Une poignée de femmes musulmanes ont risqué l’arrestation dimanche en voulant prier dans la salle principale utilisée par les hommes au Centre islamique de Washington, la grande mosquée de la capitale américaine dans le quartier des ambassades, a constaté l’AFP.“Nous voulons faire tomber les barrières et que les femmes soient autorisées à prier derrière les hommes dans la salle de prière principale”, affirme Fatima Thompson, une musulmane américaine convertie depuis 18 ans, qui a conduit l’initiative de ce groupe de femmes musulmanes progressistes.
“Nous sommes contre la ségrégation des sexes. Ce n’est pas sain et cela ne reflète pas notre société”, a-t-elle ajouté, entourée de cinq autres femmes. C’est la deuxième fois que ces musulmanes tentent de prier dans la salle principale de la mosquée de Washington. En février, elles avaient été une vingtaine.
Foulards sur la tête, le petit groupe est entré par la grande porte, traditionnellement utilisée par les hommes, et s’est installé à l’arrière de la salle, alors qu’une vingtaine d’hommes étaient présents à l’avant. A la mosquée de Washington, les femmes et les enfants doivent normalement rejoindre par une petite porte un recoin adjacent à la salle, caché derrière un paravent.
“Si vous êtes Noir dans ce pays, on ne vous dit pas d’aller vous asseoir dans un coin. Mais si vous êtes une femme, c’est permis”, a expliqué Asra Nomani, une musulmane féministe qui a déjà participé à des mouvements de ce genre aux Etats-Unis.
L’imam qui officie le week-end a interrompu au micro la prière “dans l’attente que la police vienne parce que des gens sont venus perturber la prière”, a-t-il déclaré. En quelques minutes, trois officiers de police sont intervenus pour évacuer les femmes. “Vous devez partir ou vous allez être arrêtées”, a déclaré un officier.
“En Indonésie d’où je viens, ça ne se passe pas comme ça. Les femmes peuvent prier dans la même salle que les hommes”, explique une des jeunes femmes, qui préfère taire son nom, en sanglots parce qu’elle se sent humiliée. “Nous ne verrons peut-être pas cela de notre vivant, mais nous faisons cela pour nos filles”, lui a soufflé une autre participante, Jannah Hannah, convertie à l’islam depuis 25 ans et déterminée à rééditer l’initiative.
Le groupe de femmes a obtempéré et continué sa prière sur le trottoir face aux grilles de la mosquée sous les yeux des policiers avant de se disperser sans incident.
Interrogé par l’AFP, l’imam, qui n’a pas souhaité dire son nom, a dénoncé “ces gens qui viennent ici et ne respectent pas la loi”.
“C’est dégoûtant !”, a éructé un homme en sortant de la mosquée. “Si elles sont musulmanes, elles doivent suivre les règles”. “Construisez votre propre mosquée !”, a dit un autre.
Après un bref échange à la sortie de la mosquée, un seul homme a laissé tomber: “ce sont les coutumes qui gèrent l’islam maintenant, ce n’est pas l’islam”, a déclaré Bachir Kardoussi, maître de conférence en religion comparée à l’Université de Constantine.