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Oui, il faut tourner la page du quotient familial, mais uniquement dans le cadre global d’une réforme fiscale

Comme toujours le débat s’installe dans le pour ou contre de telle ou telle mesures sans la remettre dans le contexte général de son environnement. Même si l’on fait l’analyse des « gagnants » et des « perdants » en cas d’application de telle ou telle mesure, il est nécessaire de mettre en lumière les interdépendances dans le système global, car ce qui compte pour les citoyens et les salariés (et leurs familles), c’est le résultat global et non le résultat par « tranche de saucisson ». Et de façon générale replacer ce débat dans l’analyse générale de l’état des lieux en s’appuyant sur des critères objectifs : inégalités sociales de toutes nature, refus de soins pour causes financières, pauvreté, précarité, chômage, pouvoir d’achat,etc. Il est nécessaire de replacer tout débat dans une diachronie historique et de questionner cette diachronie avec les arguments des uns et des autres.
Last but not least (en dernier lieu sans que cela soit le moindre), ne pas raisonner en fonction de sa divine personne, mais aussi, parce que nous sommes des partisans de la République sociale, en regardant les effets des différentes politiques sur la majorité du peuple (53 %)— je nomme par là les couches populaires composées des ouvriers et des employés.
Ce propos liminaire étant fait, démontons un par un tous les discours des « belles âmes » qui cachent mal soit une volonté de défendre les intérêts de la grande bourgeoisie soit de défendre un dogme obscurantiste via la doctrine sociale de l’église.

1) Que pensez du discours suivant « Toucher à ces quotients mettrait à mal la politique familiale française qui permet un taux de fécondité des femmes exceptionnel eu Europe » ?
Partons de deux mesures positives de la gauche-plafonnement du quotient familial en 1981 et durcissement de ce plafonnement en 1998. Est-ce que ces deux mesures ont fait diminuer l’indice conjoncturel de fécondité ? Non, puisque celui-ci est passé de 1,95 en 1981 à 2,04 aujourd’hui. Les organisations qui prennent pour vraie la « doctrine sociale de l’église » en sont pour leurs frais quand le débat est libre. Denis Clerc d’Alternatives économiques a raison de renvoyer tout citoyen qui souhaite être éclairé au tableau ASF 022DD1de l’INSEE, qui porte sur les taux de fécondité dans l’UE depuis 1960 et de mettre en exergue le fait que le nombre de familles avec enfants est passé de 8,7 millions à 9,2 de 1999 à 2008.

Et si l’on veut améliorer la politique familiale de la France, les partisans de la République sociale ont un projet comportant une politique globale à savoir le rétablissement des 104.000 places de crèches supprimées par la droite depuis 10 ans, un programme quinquennal de création de 300.000 places de crèches collectives et familiales, le déplafonnement de la prestation de service des crèches, un service public d’accueil du jeune enfant incluant un « vrai » droit opposable lié au « vrai » libre choix du mode d’accueil et la garde d’enfants à domicile pour permettre à toute femme qui subit la charge mentale de la parentalité de pouvoir sortir le soir à sa guise, un service public d’accueil des handicapés et des personnes âgées dépendantes avec un « vrai »droit opposable lié au « vrai » libre choix de la résidence, des sanctions pour les employeurs pour toute inégalité de salaire entre hommes et femmes qui ont la même qualification, une « vraie » politique de création de logements sociaux basée sur la construction annuelle de 100.000 logements sociaux supplémentaires par an (au-delà des 360.000 logements construits par an actuels), une nouvelle loi de criminalisation des violences faites aux femmes, un service public de soutien aux familles monoparentales (96 % autour de femmes) pour contrer l’augmentation exponentielle de la pauvreté dans cette catégorie avec création des logements sociaux d’accueil immédiat,

2) Que pensez du discours suivant : « Remplacer le quotient familial au profit d’un crédit d’impôt par enfant serait une “folie” (Nicolas Sarkozy) » ou « un “coup de massue pour les classes moyennes” (Valérie Pécresse) »
Quand on sait que les couches populaires-ouvriers et employés- représentent 53 % de la population, que les couches moyennes intermédiaires représentent 24 % de la population, on peut affirmer que ces couches sociales là seraient soit gagnantes soit ne serait pas perdantes de la modification. Les familles perdantes se recruteraient essentiellement à partir du 8e décile des revenus (1)http://www.hcf-famille.fr/IMG/pdf/ANNEhttp://iehost.net/pdf/ANNEXE_3___Tresor.pdfXE_3___Tresor.pdf, p. 44. Ne seraient perdants que les deux derniers déciles qui ne regroupent que l’oligarchie et la majorité des cadres.

Les petits malins qui auront le courage d’aller lire à partir de la page 201 du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires auront tous les chiffres nécessaires pour asseoir la position suivante à savoir que les deux tiers des 10,1 milliards de réductions d’impôts liés à l’application du quotient familial injuste ne bénéficient qu’aux 11 % les plus aisés des foyers fiscaux.

Faites un sondage en demandant au peuple s’il préfère le quotient familial qui avantage les deux déciles les plus aisés de la population ou s’il préfère le crédit d’impôt de 607 euros par enfant (qui correspond à la somme totale de réductions d’impôts actuellement effectuée suite à l’application du quotient familial) ?

Mais il ne suffit pas d’avoir raison, encore faut-il créer le rapport des forces pour passer aux actes. Il est de notre responsabilité de renforcer les partisans de la République sociale pour pouvoir passer du raisonnement aux actes.
Il n’y a aujourd’hui que trois pays européens qui appliquent le quotient familial, système hérité de la doctrine sociale de l’église : la France, le Luxembourg et la Suisse. Il serait donc temps que la gauche française redevienne le lieu du combat contre les inégalités sociales du salaire réel et donc qu’elle supprime le quotient familial qui ne favorise que les deux déciles les plus aisés de la population.

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