Nous sommes pris dans une tenaille. Pour en sortir, les propositions contradictoires fusent. Nous vivons alors un grand conflit des priorités. Comme tout se dégrade en même temps : le pouvoir d’achat, les salaires, l’école 1er budget de l’État, les services publics, la Sécurité sociale et ses 5 branches ; pour 680 milliards d’euros (contre 500 milliards pour l’ensemble de l’État tous ministères confondus) : santé assurance-maladie (260 milliards d’euros), retraites (300 milliards d’euros via la Sécu et 80 milliards hors Sécu), la branche famille et sa vingtaine de prestations précarité, logement, pauvreté, familiales, animation sociale des centres sociaux, etc. (60 milliards d’euros), la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles (17 milliards d’euros) et la branche autonomie (42 milliards d’euros).
Ce sont donc aux citoyens de faire les choix. Et à personne d’autre. Et les médias dominants participent joyeusement au capharnaüm. La France n’a plus de majorité sociale ni de majorité politique. La tripartition en silos montre l’incapacité de notre Constitution d’aider à la résolution des problèmes. L’urgence de la lutte contre le dérèglement climatique et la chute de la biodiversité est toujours aussi forte. L’augmentation de la misère et de la pauvreté dans notre pays va de pair avec une montée pour l’instant inexorable des inégalités sociales.
Mais, en plus, le taux de pauvreté a augmenté depuis 2017 à 14,4 % (dont 31,4 % pour les familles monoparentales). Idem pour le nombre de jeunes sans emploi ni en formation qui, depuis la réélection de Macron, a grimpé de 11 % à 12,8 %. 4, 2 millions de mal-logés ; Emmanuel Macron a oublié de dire que ce sont les plus aisés qui ont profité des baisses des impôts (ISF supprimé, flat tax, etc.). Mais pour le plus grand nombre, c’est la TVA, dite improprement sociale, qui va augmenter. C’est-dire avec le moyen le plus anti-redistributif possible : ce sont les gens d’en bas qui paieront pour les gens d’en haut.
Nous savons que toute solution passe par le développement de la sphère de constitution des libertés, l’école, les services publics (dont la poste) et la Sécurité sociale.
Nous savons que toute solution passe par le développement de la sphère de constitution des libertés, l’école, les services publics (dont la Poste) et la Sécurité sociale. Quant à notre système économique, nous pouvons commencer à le questionner. On nous dit qu’il n’y a pas d’argent pour l’école, les services publics et la Sécurité sociale, mais le montant des dividendes des grandes entreprises est du même ordre que le montant des aides aux entreprises, sans contreparties, mais payées par le peuple. Ce fait relance le débat sur le ruissellement financier, qui s’effectue aujourd’hui du bas vers le haut de la hiérarchie sociale. Ce sont les gens d’en bas qui financent les gens d’en haut. On peut donc se poser la question : « Qui a le plus de droits dans notre État de droit » ?
Face à ce constat, disons-le tout de go, nous ne participons pas à la petite musique médiatique, à savoir que le seul moyen d’avancer serait la baisse des dépenses sociales, la baisse de qualité du service public et l’extinction progressive de la sphère de constitution des libertés formée par l’école, les services publics et la Sécurité sociale qui sont nos biens communs. Nous pensons au contraire que notre avenir se situe dans le cadre d’un modèle politique de République sociale avec comme priorité la défense et la promotion de cette sphère de constitution des libertés.
Nos principes sont connus : liberté, égalité, fraternité, démocratie, laïcité, solidarité, sûreté et sécurité, universalité concrète, souveraineté populaire et développement écologique et social. Et pour les services publics : égalité d’accès, continuité et mutabilité. Nous nous insurgeons donc des fréquentes attaques contre la recherche scientifique et technologique, la justice, et d’une façon générale contre la sphère de constitution des libertés que je viens de définir. Les puissants de ce monde, grand patronat, oligarchies financières, bureaucratiques et médiatiques, sont unifiés sur leurs propositions. En France, il suffit de regarder et d’entendre les propos du duo Emmanuel Macron-François Bayrou. Dans l’adresse aux Français du 13 mai dernier, le Président de la République a été clair : « l’argent magique » a été trouvé pour la crise du coronavirus et est en cours de rassemblement pour les armées. Mais pour les dépenses sociales, il va falloir faire 40 milliards de baisses. Sur les retraites, sur la santé, sur l’école, sur la Poste, etc. Et l’attaque contre la Sécurité sociale vient d’être lancée par la Cour des comptes et le gouvernement. Le déficit des hôpitaux publics qui acceptent tout le monde et toutes les pathologies est de 2,4 milliards d’euros. Le résultat net des cliniques à but lucratif qui choisissent leurs clients et ne traitent que les pathologies rentables pour les actionnaires est de 362 millions.
Les exemptions d’assiette et les exonérations de cotisations sociales se montent à 90 milliards d’euros. Les impôts sur les plus aisés et sur les entreprises, supprimés entre 2018 et 2023, se montent à 62 milliards d’euros(1)Cour des comptes, juillet 2024, La situation et les perspectives des finances publiques.. Il est là, l’argent qui manque.
Non à la désertification des fonctions postales
Le groupe, société anonyme dont la Caisse des dépôts et consignations (66 %) et l’État (34 %) sont les deux actionnaires, est engagé, depuis de nombreuses décennies, dans une profonde mutation de son modèle économique
Avec près de 233 000 « postiers », dont 60 500 facteurs et 45 000 fonctionnaires, La Poste réalise désormais 44 % de son chiffre d’affaires à l’international et finance ses acquisitions (20 milliards en 20 ans) en supprimant les bureaux de poste de plein exercice.
Ce développement s’est traduit par une augmentation de son chiffre d’affaires, passé de 22 Md€ en 2013 à 25,9 Md€ en 2019, puis à 31,1 Md€ en 2020, à 34 Md€ en 2023 et à 34,4 Md€ en 2024. Son résultat net est de 1,4 milliard d’euros. Mais ce développement s’est traduit par une baisse de la satisfaction des besoins sociaux des usagers de la poste.
On ferme les bureaux de poste les moins rentables, notamment en bancassurance, pour financer dans l’international. Alors qu’un bureau de poste de plein exercice devrait exister s’il existe un besoin citoyen. Et bien sûr qu’il faut repenser les processus de décision, surtout dans l’observatoire national de présence postale et dans sa déclinaison départementale. L’opacité doit cesser, la transparence devrait être la règle. Des associations d’usagers et des syndicats devraient siéger avec les élus.
Réaffirmer le sens de l’impôt et de la cotisation sociale
Nous proposons la justice fiscale et sociale pour financer la sphère de constitution des libertés (école, services publics, Sécurité sociale), conformément à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui proclame que « pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».
Face aux menaces sur nos services publics, nous entendons agir et mobiliser ensemble pour réaffirmer le sens de l’impôt et des cotisations sociales comme contribution commune.
Face aux menaces sur nos services publics, nous entendons agir et mobiliser ensemble pour réaffirmer le sens de l’impôt et des cotisations sociales comme contribution commune. Ils constituent non seulement un outil de justice sociale, mais également une nécessité pour permettre de construire des services publics qui répondent aux besoins de la population : apprendre, être en bonne santé, avoir accès à une eau de qualité, à un logement décent, au sport et à la culture, protéger l’environnement, développer les énergies renouvelables et des transports en commun, vivre en sécurité, garantir une justice égalitaire, une recherche et des médias indépendants, assurer des services sociaux et de proximité pour toutes et tous, et bien d’autres encore.
Préparer la bataille sur le PLF et le PLFSS
Les batailles locales, comme celle de Bény Bocage sont centrales, nous devons les soutenir et les coordonner. Mais il faut aussi se mobiliser sur la bataille annuelle du projet de loi de finances (PLF), sur le budget de l’État et sur celui du projet de loi de financement sur la Sécurité sociale (PLFSS), qui a lieu tous les ans de septembre à décembre. Il n’y aura pas de sortie de crise sans victoire sur les PLF et PLFSS. Car c’est sur ces projets de loi que les inflexions peuvent avoir lieu sur l’école, les services publics et la Sécurité sociale.
La Déclaration des droits de 1789
Article 13 : Pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.
Article 14 : Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.
Article 15 : La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.
Article 16 : Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution.
La Déclaration des droits de 1793
Article 20 : Une contribution ne peut être établie que pour l’utilité générale.
Article 28 : Un peuple a toujours le droit de revoir, de réformer et de changer sa Constitution.
Bien sûr, nous savons qu’il faut avoir une vision holistique de la situation, car nous devons analyser la totalité des problèmes qui se posent à nous. Mais nous n’accepterons jamais que la seule priorité soit la baisse des dépenses sociales et la voie de l’extinction de la sphère publique de constitution des libertés. Nous n’accepterons jamais le dogme néolibéral de la non-possibilité d’augmentation des impôts et des cotisations sociales pour les plus aisés. L’école, les services publics, la Sécurité sociale sont les pierres angulaires de notre projet politique. C’est dans une France exsangue que le programme du Conseil national de la résistance a produit la plus grande avancée sociale de l’histoire de France. Nous devons réitérer l’exploit de nos aînés !
Notes de bas de page
↑1 | Cour des comptes, juillet 2024, La situation et les perspectives des finances publiques. |
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