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Pour un antiracisme radical laïque

Le mouvement réformateur néolibéral ne peut que se féliciter de son alliance avec l’ensemble du communautarisme religieux. D’abord, cela permet à une partie de l’oligarchie de pouvoir vendre ses produits dans les monarchies pétrolières rétrogrades du Moyen-Orient. Mais ensuite, cela permet de diviser la gauche et de freiner la convergence sociale indispensable au rapport des forces. Jean Jaurès avait théorisé cela en disant que seule la laïcité est un ciment pour rassembler le peuple.
Quand des responsables d’organisations politiques et syndicales de gauche se mettent à la remorque de l’intégrisme de la confrérie des Frères musulmans, ceux-là même qui ont soutenu la Manif pour tous organisée par les intégristes catholiques ; quand on voit Macron vouloir construire « l’islam de France » autour de cette même confrérie des Frères musulmans, la boucle est bouclée. Qui n’a pas compris les liens entre la Manif pour tous, l’UOIF, le CCIF, la plateforme L.E.S Musulmans se discrédite dans la bataille sociale et politique.

D’autre part, on voit bien, pour le cas de la manifestation du 10 novembre dernier, que cette convergence ne satisfait pas non plus la plupart des responsables religieux concernés, comme le souligne Didier Leschi (président de l’Institut européen en sciences des religions) dans le Point : « La grande faute de la manifestation du 10 novembre n’est pas seulement d’avoir rassemblé les partisans d’une radicalité identitaire (entraînant même une foule à crier « Allahou akbar »), elle est de tenter de prendre en otage de cette dérive la grande majorité des responsables et des fidèles des mosquées. Car force est de constater qu’ils n’étaient pas présents dans leur force et diversité et au regard du nombre de musulmans en France. Ni l’islam subsaharien des foyers de travailleurs migrants, ni l’islam d’origine marocaine avec ses rites propres et sa volonté d’incarner un juste milieu, ni l’islam d’origine algérienne toujours meurtri par les dérives islamistes, ni l’islam d’origine turque, qui sait se manifester quand il le souhaite avec ses organisations puissantes et paraétatiques, n’étaient présents. »

Mais ce n’est pas tout. Le travail idéologique des identitaires racialistes et communautaristes qui ont investi des forces syndicales et politiques de gauche, vise à masquer le racisme anti-arabe et anti-noir pour ne voir que le racisme anti-musulman, ce qui rejoint l’opération idéologique menée par l’extrême droite du RN. Ils apportent une aide considérable au RN pour continuer son développement nauséabond et participent à la dédiabolisation de l’extrême droite française.
Par ailleurs, n’est-ce pas une victoire des « escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes » (reprise du titre du livre de Charb publié deux jours avant son assassinat) que d’avoir réussi à ce que le dictionnaire Larousse reprenne la définition qu’ils souhaitent, à savoir que l’islamophobie serait une « hostilité envers l’islam et les musulmans » ? Certains considèrent ainsi la loi de 2004 sur le port des signes religieux à l’école comme « liberticide » alors qu’une étude de l’IZA (Institute of Labor Economics) (1)« Behind the Veil: The Effect of Banning the Islamic Veil in Schools », Eric Maurin, Nicolas Navarrete H., septembre 2019. vient de montrer que cette même loi a eu un effet positif pour les femmes musulmanes sur leur niveau d’étude et qu’elle a contribué à réduire l’écart avec les élèves non musulmans.

Le racisme contre les musulmans est à combattre mais la critique des religions et de l’athéisme doit rester libre, c’est cela la liberté de conscience ! ReSPUBLICA n’a pas manqué de le rappeler il y a peu en défense de Henri Pena-Ruiz (2) Voir ainsi l’article « Soutien à Henri Pena-Ruiz »..
Que beaucoup de militants de gauche ne comprennent pas que la confrérie des Frères musulmans est de même nature que l’Opus dei chez les catholiques, que le CCIF est de même nature que Civitas ou Sens commun, cela montre tout le travail qui reste à faire pour « renverser la table ».
Pour globaliser les combats et fédérer le peuple autour des luttes sociales et politiques, commençons par lier un antiracisme radical à la laïcité !

Notes de bas de page[+]

Notes de bas de page
1 « Behind the Veil: The Effect of Banning the Islamic Veil in Schools », Eric Maurin, Nicolas Navarrete H., septembre 2019.
2 Voir ainsi l’article « Soutien à Henri Pena-Ruiz ».
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