De scandale en scandale…

Certes, nous vivons une époque dangereuse et incertaine, où nous ne pouvons tout prévoir. Pour autant, en revenant sur l’histoire ainsi que sur notre corpus laïque de la république sociale, il devient facile de décrypter certains évènements récents. On remarquera d’ailleurs que la gauche laïque et républicaine fait de plus en plus d’émules avec ses cycles d’université populaire tournés vers l’action.

Évidemment, il y a tous les scandales qui s’étalent à longueur de journée. Avez-vous remarqué que nous arrivons à un non-lieu pour l’Angolagate ?! Avez-vous remarqué qu’il n’y a jamais de coupables dans les élites du pouvoir : uniquement du non-lieu ? Sans compter tout ce que les éditorialistes des grandes télés et des grandes radios passent sous silence, alors qu’il est urgent de les expliquer. Nous avons choisi d’en mettre trois en lumière; trois de grande importance, bien que nous aurions pu en choisir dix, voire quinze, sans aucune difficulté.

Premier fait. Nous apprenons que la direction de la Haute Autorité de la santé (HAS) vient de se faire retoquer par le Conseil d’Etat, car elle continue à accepter les conflits d’intérêts en son sein lorsqu’elle fait des recommandations. En claire, les agents des firmes multinationales sont présents là où on édicte les recommandations de santé. La droite est tellement engluée dans le partenariat public-privé qu’elle en vient à être subordonnée aux intérêts du privé. C’est honteux!

Second fait. Nous apprenons que le Parlement français a donné récemment son feu vert au programme de stabilité et de croissance européen pour la période 2011-2014, que Paris va maintenant transmettre à la Commission européenne. L’Assemblée nationale a adopté par 163 voix (UMP-Nouveau centre) contre 74 (PS-PC-Verts et apparentés) ce texte que le Sénat avait déjà approuvé le 27 avril par 186 voix contre 151.
Il est à noter que la gauche ne s’est pas mobilisée à l’Assemblée nationale et que de nombreux socialistes (le groupe le plus nombreux, et de loin) n’était pas présent pour le vote, comme si la ratification du programme de stabilité illégitime de la Commission européenne n’était pas importante. C’est pourtant ce programme qui fait le cadre dans lequel le gouvernement va organiser la privatisation des profits, la socialisation des pertes et la diminution des postes dans l’école, la protection sociale et les services publics. Honteux!!

Et troisièmement. Nous apprenons qu’un “liquidateur” de notre système de santé entre dans la direction de la Mutualité Française. Est-il nécessaire de prendre Emmanuel Roux comme directeur délégué auprès de Jean-Martin Cohen-Solal, directeur général de la Mutualité Française, afin de défendre les usagers de santé? Ce conseiller référendaire à la Cour des comptes est un de ceux qui ont travaillé à l’installation des Agences régionales de santé, ces structures césaristes mises en place par la loi scélérate dite « loi Sarkozy-Fillon-Bachelot de 2009 » qui ont terminé de détruire la démocratie sanitaire et qui ont pour fonction d’organiser la privatisation des profits et la socialisation des pertes dans les hôpitaux et le système de santé en général. Honteux!!!

En revanche, les ondes nous rabattent les oreilles avec la mutation du FN en parti social et ouvrier, sans nous dire par quel miracle ! N’est-ce pas étrange ? Voilà qui explique pourquoi on veut tuer l’histoire à l’école: pour que l’on ne puisse plus comprendre !, alors que les années 20 et 30 ont bien montré quand et pourquoi l’extrême droite resurgit. Lorsque la droite ne peut plus contenir la gauche montante, l’extrême droite arrive afin de casser les fronts larges réalisés par les couches populaires et les couches moyennes intermédiaires, afin de diviser le peuple. Comme par hasard, elle arrive suite à la mobilisation des retraites ayant fait 70% de soutien dans la population. C’est pourquoi la campagne de la CGT contre le FN doit être soutenue.

Bien évidemment, les médias, y compris certains qui se disent de gauche (Libération, le Nouvel Obs, etc.), entrent dans la manigance: en donnant plus de place à la manifestation du premier mai du FN avec ses quelques 3000 “fachos” (cette fois-ci en costume: l’aggiornamento de la cheftaine du FN) qu’aux dizaines de milliers des syndicats de salariés. Ou encore, en nous abrutissant avec le mariage princier anglais (dont la lune de miel se passe à 10.000 km de chez nous dans un ensemble à 4500 euros la nuit), ou avec la béatification de monsieur Wojtyła qui a passé quelques décennies à la tête de l’Eglise catholique ; cette structure qui protège des criminels de toutes natures (criminels contre l’humanité, criminels génocidaires, pédophiles) ou qui empêche la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles, ayant pour majordome bien élevé Baroin qui nous ressort que nous sommes “la fille ainée de l’Eglise”. Celle-là même qui est toujours au service des puissants en essayant de circonscrire la lutte des classes entre les exploités et les exploiteurs, et pour y substituer la compassion des riches envers les pauvres. Nous ne voulons pas de votre compassion. En fait, la bobocratie aux ordres dans les médias est fascinée par les esthétiques cléricale et fasciste.

Décernons enfin le César de l’abrutissement aux médias qui ont colporté la baisse du chômage pour unique raison qu’elle a eu lieu dans l’une des catégories de chômeurs… pourtant, si on les cumule toutes (soit 4,3 millions de chômeurs), on obtient une forte augmentation du chômage! Honteux !!!!

Vous rétorquerez, à juste titre, que la gauche n’est pas à la hauteur. De nombreuses raisons (précédemment recensées dans Respublica) étayent ce constat : fossé avec les couches populaires qui s’abstiennent; nouvelle géosociologie des territoires; une gauche toujours au milieu du gué sur la démocratie en recul, sur la laïcité en berne, sur les droits sociaux dynamités, sur le refus de prendre à bras-le-corps le combat contre le libre-échange, contre la politique de l’euro dévastateur, contre la concurrence sauvage organisée par le traité et la stratégie de Lisbonne, contre la politique de monopole des prêts bancaires par les banques privées à but lucratif pour les actionnaires; et inégalités grandissantes scolaires, de santé, de logement, etc.

Sans oublier les formes de campagne électorale de type meeting qui ne rassemblent que des convaincus jubilant d’assister à leur défilé d’orateurs énonçant tous les mêmes propos à la va vite avec plus ou moins de qualité oratoire… Quand est-ce que la gauche prendra conscience qu’il est nécessaire d’organiser une campagne d’éducation populaire politique sur le mode des réunions publiques, dans lesquelles il faut revenir sur le « non » au traité constitutionnel européen, ou affirmer sa position contre la loi sur les retraites (qui ont aboutit à être un complément important aux mobilisations populaires exemplaires jusqu’à obtenir un soutien de 70% de la population, ce qui ne s’est jamais vu auparavant) ?

Quant aux programmes, les colonnes de Respublica y reviendront dans les mois qui viennent; mais pour l’heure, parcourez seulement celui du PS et cherchez le financement de la protection sociale qui représente près du tiers de la richesse produite chaque année. Nada, excepté de vulgaires généralités. Même le programme du Front de gauche en construction n’est pour l’instant pas très disert sur le financement des différents éléments de la protection sociale, tant dans ses modes que dans ses montants… Côté NPA, on l’attend toujours. On sait pourtant que l’exercice éventuel du pouvoir est toujours plus difficile que prévu. Et si on n’a pas un cap précis, ce sont les lobbies financiers et économiques qui détermineront la politique réelle, si, par bonheur, la gauche gagne…