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L’héritage des parents collatéraux en islam : une spoliation

Il faut savoir qu’en islam, l’inégalité en matière d’héritage ne consiste pas seulement au fait que la femme reçoit la moitié de la part impartie à l’homme. Cette inégalité consiste également en plusieurs autres dispositions tout aussi iniques et scandaleuses : entre frères et sœurs, entre conjoints, entre enfants biologiques et enfants « adoptif » (1)Selon le Code algérien de la famille, l’enfant « adoptif » en islam n’a pas droit automatiquement. Il faudrait que son tuteur lui attribue par voie testamentaire une part n’excédant pas le tiers de la valeur monétaire du bien hérité. Toutefois, le tuteur peut lui octroyer davantage, à condition qu’il obtienne l’accord des autres héritiers. Ceci du fait que l’islam avait interdit l’adoption, pour que Mohammed, le Prophète des musulmans, déjà polygyne, puisse avec la bénédiction d’Allah épouser une femme, envers laquelle il a eu le coup de foudre. Il s’agissait de Zeineb, la femme de Zeid, son fils adoptif, que celui-ci a dû divorcer à cette fin. C’est pour cette raison qu’Allah substitua dans le Coran le tutorat sur l’enfant à l’adoption, qui existait depuis des siècles en Arabie préislamique et même à l’aube de l’islam. (Voir mon article).

L’héritage des parents collatéraux en islam : une spoliation

Un nombre croissant de familles musulmanes assimile ni plus ni moins à la spoliation, le fait que l’héritage de leurs filles, quand celles-ci n’ont pas de frères, revient partiellement à leur oncle, et en cas de décès de ce dernier, à leurs cousins. Les témoignages ne se comptent plus sur la manière, dont ces rapaces s’abattent sur leur victime pour la dépouiller une part non négligeable de son héritage.

En Algérie, cette disposition est stipulée par le Code de la famille, fondé sur la char’ia, en vigueur dans la quasi-totalité des pays musulmans. Tant pis, si cette disposition religieuse (comme plusieurs autres dans ce Code) est en totale contradiction avec les conventions internationales signées par l’Algérie, ainsi qu’avec ses lois civiles, en premier lieu les articles 29 et 31 de sa Constitution. Ceux-ci stipulent l’égalité entre tous les citoyens, et le devoir des pouvoirs publics de promouvoir cette égalité.

Ce type d’héritage, aujourd’hui totalement anachronique, pouvait à la rigueur s’expliquer par le contexte d’il y a quatorze siècles, avec la prédominance de la famille élargie. L’oncle paternel avait selon les préceptes islamiques, les responsabilités matérielle et morale de prendre en charge ses nièces et sa belle-sœur, en cas de décès de leur père ou époux. Or ce n’est plus le cas, depuis l’avènement dans les sociétés musulmanes de la famille nucléaire et l’entrée croissante et en grand nombre des femmes dans la vie active.

En effet, les héritières ne vivent plus avec leurs oncles ou leurs cousins, ni qu’elles ont besoin de leur aide, du fait qu’elles sont matériellement autonomes, si tant est que ces parents aient la volonté et les moyens de les prendre en charge.

Certes, les autorités politiques algériennes ont tenté d’atténuer les effets iniques d’une telle disposition, par l’autorisation de la donation et de la vente des ascendants à leurs descendants. Cette manœuvre légale permet le contournent de l’héritage des parents collatéraux par les musulmans, qui rejettent catégoriquement cet aspect qu’ils estiment profondément injuste de leur religion ; musulmans dont le nombre tendra par la force des choses, à s’accroître et à s’élargir à d’autres dimensions de cette nature contenu dans l’islam. Il reste qu’une telle démarche est fort coûteuse en temps, en énergie, et surtout financièrement.


Habib Bourguiba a aboli l’héritage des parents collatéraux

D’après certaines sources, la Tunisie serait l’unique pays arabe, où l’héritage des parents collatéraux aurait été aboli, dès son indépendance, en 1956, ou les décennies suivantes, par le président, Habib Bourguiba, lorsque celui-ci avait sécularisé une grande partie du Statut du Code personnel. L’une des exceptions notables est relative au partage de l’héritage au détriment des femmes. Le rapport des forces lui avait été insuffisamment favorable, pour qu’il mette fin à une disposition qui défie le bon sens et la morale de notre temps (2)L’ex-président dictateur de la Tunisie, Zine el Abidine Ben Ali, après avoir tenté de louvoyer durant les deux premières années de son règne, qui avait commencé en 1987, avec les intégristes tunisiens, en commençant à les caresser dans le sens du poil (ce que fait le président Bouteflika, en Algérie), s’est vite rendu compte qu’il risquait d’être phagocyté par eux. Il a alors promulgué plusieurs lois en faveur des femmes tunisiennes. Mais il n’a pas par exemple aboli la circulaire gouvernementale xénophobe interdisant le mariage d’une Tunisienne musulmane avec un non musulman, à moins qu’il ne se convertisse..

D’ailleurs, la lutte pour l’abolition de cette injustice constitue de longue date le cheval de bataille des féministes tunisiennes. Les féministes d’autres pays musulmans ont elles aussi ajouté, depuis quelques années, la lutte contre cette autre discrimination sexiste, à leur long et difficile combat pour l’égalité totale entre les hommes et les femmes entre musulmanes et musulmans.

Les intégristes musulmans d’Ennahda de Rachid Ghannouchi sont les adversaires les plus acharnés du Code du statut personnel, dont ils réclament l’abrogation pure et simple. Ils n’avaient pas été légalisé, parce qu’ils avaient également refusé de reconnaître ce Code progressiste.


Les pays musulmans sur la voie inéluctable de la sécularisation et de la modernité

En dépit des pressions considérables des islamistes et des conservateurs, l’Algérie et les autres États musulmans, y compris les plus réactionnaires d’entre eux, finiront bon gré, malgré par renoncer les unes après les autres aux lois religieuses souvent misogynes et attentatoires aux droits de l’Homme, très majoritairement à ceux des femmes, et dont les codes de la famille musulmane sont selon les pays les principaux ou les derniers bastions juridiques des forces de la réaction et du conservatisme.
Ces changements auront lieu sous les effets conjugués de plusieurs facteurs, liés aux énormes bouleversements sociologiques que connaissent à divers degrés, depuis la décolonisation, toutes les sociétés et tous les États musulmans. Il s’agit en premier lieu de la production et de la reproduction élargie de couches moyennes nombreuses, dont l’une des fonctions sociales est de servir de vecteurs aux idées, surtout lorsqu’elles sont nouvelles.

Il s’agit aussi du début de prise de conscience par les femmes musulmanes de leur nombre, et donc de leur force. Cette décantation atteint aussi, mais dans une moindre mesure, les intégristes musulmanes. Elle s’exprime essentiellement, mais pas seulement, à travers certaines revendications égalitaires d’organisations féminines islamistes, bien que ces dernières ne soient pas parvenues, au stade- féministe. Un stade synonyme de leur émancipation de la férule islamiste. (Voir mon article).

Cette prise de conscience se traduit par l’occupation massive de l’espace public de la part des femmes musulmanes, dont une proportion notable porte l’uniforme politico-religieux des islamistes, mais qu’elles vident progressivement de son contenu. Cette occupation concerne avant tout les activités professionnelles, où elles sont de plus en plus instruites, et occupant des fonctions de plus en plus hautes, dans tous les domaines, malgré les blocages et l’ostracisme, auxquelles elles sont en buttes.

Ceci d’autant plus, que ces femmes mettent nettement moins d’enfants au monde que leurs mères, prenant ainsi le Train à Grande Vitesse de la modernité démographique et de la libération sexuelle, dont elles sont d’actifs protagonistes en Terre d’islam.

L’élévation du niveau d’instruction général de leurs populations constitue un deuxième facteur exprimant ces changements. Un exemple : toutes les études sociologiques montrent unanimement le niveau d’instruction moyen sensiblement supérieur des nouveaux migrants en Occident originaires des pays musulmans (et d’autres régions du monde) que celui des migrants des générations précédentes, qui étaient pour la plupart analphabètes ou semi-analphabètes.

Encore un autre facteur parmi beaucoup d’autres : l’influence culturelle et juridique déjà sensible de l’Occident, foyer historique de la sécularisation et de la modernité, sur les pays musulmans. Cette influence est appelée à s’accroître davantage, suite au développement fantastique dans les vingt ou trente prochaines années des moyens de télécommunications de masse et de leurs coûts bon marché. Ces moyens permettront une diffusion mondiale plus large et plus profonde du mode de vie moderne. Cette diffusion fera jonction, une jonction en vérité déjà à l’œuvre depuis un moment, avec l’aspiration encore plus forte à un mode de vie moderne de l’immense majorité des peuples musulmans et des migrants de cette origine.

Il en sera de même du poids de l’Occident dans l’élaboration du droit international et des conventions de cette sorte dans le sens de la sécularisation et de la modernité, ainsi que dans leurs transcriptions contraintes ou non dans les législations nationales des pays musulmans, notamment en matière d’effectivité pleine et entière de l’égalité entre les sexes.

On assistera par conséquent à une réduction de plus en plus accélérée de l’écart entre les modes de vie des sociétés occidentales et celui des sociétés musulmanes, en grande partie par le rapprochement des secondes du mode de vie des premières, que par l’inverse ; partant du principe marxiste que les cultures dominantes sont celles des classes et des nations dominantes.

Il nous faut par ailleurs savoir distinguer entre l’Occident, en tant que aire de civilisation, à l’avant-garde de l’humanité depuis plusieurs siècles ; et l’Occident, en tant qu’entité géopolitique, que les forces de progrès, en Occident-même et dans le monde, ont le droit et le devoir de s’en défier, voire de combattre, quand qu’il fait preuve d’intention dominatrice et de soutien aux régimes corrompus et répressifs sur le dos des peuples musulmans.

Pour autant, le décalage actuel entre d’un côté l’avènement des conditions objectives favorables à l’émancipation des femmes musulmanes, et de l’autre les faibles avancées des conditions subjectives de cette émancipation ne doit pas obscurcir une analyse sereine et juste des mutations en cours et relativement rapides dans ces sociétés et ces États.

Seule la vulgate marxiste peut laisser croire à une synchronisation -nécessairement immédiate- entre infrastructures socio-économiques et superstructures idéologique et juridique.

Souvenons-nous ! C’est seulement depuis quelques décennies que les Européennes ont réussi à arracher la plupart de leurs droits, mais pas encore tous leurs droits, après pourtant six siècles de la Renaissance et plus d’un siècle et demi de la première vague (Royaume Uni et France) de la Révolution industrielle sur leur continent.

Précisons tout de même que les chamboulements sommairement décrits ci-dessus ne sont pas propres aux pays musulmans et à leurs communautés respectives en Occident, mais des phénomènes planétaires.

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Notes de bas de page
1 Selon le Code algérien de la famille, l’enfant « adoptif » en islam n’a pas droit automatiquement. Il faudrait que son tuteur lui attribue par voie testamentaire une part n’excédant pas le tiers de la valeur monétaire du bien hérité. Toutefois, le tuteur peut lui octroyer davantage, à condition qu’il obtienne l’accord des autres héritiers. Ceci du fait que l’islam avait interdit l’adoption, pour que Mohammed, le Prophète des musulmans, déjà polygyne, puisse avec la bénédiction d’Allah épouser une femme, envers laquelle il a eu le coup de foudre. Il s’agissait de Zeineb, la femme de Zeid, son fils adoptif, que celui-ci a dû divorcer à cette fin. C’est pour cette raison qu’Allah substitua dans le Coran le tutorat sur l’enfant à l’adoption, qui existait depuis des siècles en Arabie préislamique et même à l’aube de l’islam. (Voir mon article).
2 L’ex-président dictateur de la Tunisie, Zine el Abidine Ben Ali, après avoir tenté de louvoyer durant les deux premières années de son règne, qui avait commencé en 1987, avec les intégristes tunisiens, en commençant à les caresser dans le sens du poil (ce que fait le président Bouteflika, en Algérie), s’est vite rendu compte qu’il risquait d’être phagocyté par eux. Il a alors promulgué plusieurs lois en faveur des femmes tunisiennes. Mais il n’a pas par exemple aboli la circulaire gouvernementale xénophobe interdisant le mariage d’une Tunisienne musulmane avec un non musulman, à moins qu’il ne se convertisse.
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