Mode d'emploi

Soutenir et financer

Bien que le journal électronique soit rédigé par des contributeurs non rémunérés, nous devons faire face à des frais (notamment informatique). C'est pour cela que votre aide financière est la bienvenue pour nous permettre de continuer à vous informer sur les combats de la Gauche Républicaine et Laïque. Pour ce faire vous pouvez faire une adhésion de soutien en vous inspirant du barème ci-après et en nous envoyant sur papier libre vos Noms, Prénoms, Adresse et courriel à :

Les Amis de ReSPUBLICA
27, rue de la Réunion
75020 PARIS

Barème indicatif :
Chômeurs, RMIstes, Etudiants : 10 €
SMIC et au-delà : entre 25 € et 100 €

 
Chronique d'Evariste
Rubriques :
  • Chronique d'Evariste
  • Débats politiques
  • Elections
  • gauche de gauche
  • gauche de la gauche
  • lettre 798

Régionales 2015 : le processus de décomposition de la gauche de la gauche est engagé

par Évariste

 

Deux dates ont marqué positivement l’histoire de l’Autre gauche en notre siècle. Les 31,3 % du non de gauche le 29 mai 2005 et les 11,1 % du score de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle de 2012. Dans le premier cas, les pitreries des comités anti-libéraux ont anéanti cette inédite massification, supérieure au non de droite et d’extrême droite, au oui de gauche ou au oui de droite. Dans le deuxième cas, l’anéantissement eut des causes multiples : les pitreries du gauchisme, maladie infantile de la transformation culturelle, sociale et politique, la confusion savamment entretenue entre la nécessité de lutter contre tous les racismes (dont celui qui est anti-musulman) et la soumission idéologique d’une partie de la gauche de la gauche au communautarisme des Indigènes de la république et aux positions réactionnaires des Frères musulmans, la prolifération des projets magiques irrationnels des Yaka et des Faukon censés nous donner les clés du paradis, la schizophrénie d’une partie des élus communistes qui critiquent avec vigueur le gouvernement mais qui acceptent une solidarité de gestion sans faille avec les socialistes tant décriés.

Résultat : toute la « gauche » (y compris les socialistes) représente aujourd’hui autour de 30 % des électeurs inscrits. Le Front de gauche a perdu plus de la moitié des électeurs de 2012. C’est donc une bérézina. La décomposition de la gauche de la gauche est largement engagée. Cette gauche de la gauche ne s’en relèvera pas tant la refondation nécessaire demanderait d’inversions des priorités, de nouvelles stratégies et pratiques sociales. Nous y reviendrons en fin d’article.

Peut-on s’opposer au mouvement réformateur néolibéral sans les classes sociales en lutte ?

De nombreux secteurs de la gauche de la gauche ne se posent déjà plus cette question, tant ils ont abandonné l’idée que la lutte des classes reste le moteur de l’histoire, estimant qu’un électeur vaut un électeur – ce qui est un contresens pour tout militant voulant œuvrer contre le mouvement réformateur néolibéral et pour une transformation culturelle, sociale et politique. D’autres secteurs ont abandonné la classe populaire ouvrière et employée au profit des pauvres, de préférence de culture musulmane, d’où leur propension au communautarisme, au clientélisme et même à une simplification abusive de la doctrine sociale des églises. Les sondages à la sortie des urnes nous renseignent énormément sur ces dérives.

Par ailleurs, l’élection du 6 décembre engage un tournant sociologique du comportement électoral. Jusqu’aux élections départementales de 2015, le comportement des ouvriers et des employés (soit 53 % de la population française !) fut le suivant. La majorité des ouvriers et des employés ayant dans le temps effectué des votes de gauche s’abstenait. Résultat : 70 % des ces couches sociales étaient dans l’abstention. Pendant ce temps-là, les ouvriers et les employés qui votaient traditionnellement à droite se radicalisaient en rejoignant l’extrême droite du FN. Ce que les journalistes du mouvement réformateur néolibéral appelaient à tort la droitisation de l’électorat n’était en fait que le résultat arithmétique du phénomène que nous venons de décrire.

Ce qui est nouveau le 6 décembre 2015, c’est un début de transfert significatif des ouvriers et des employés abstentionnistes vers l’électorat du FN. Pour dire vrai, nous avions déjà vu cela dans les élections précédentes, dans des poches déclassées du Nord-Pas-de-Calais. Aujourd’hui, le caractère national de ce transfert est patent (villes-centres non comprises, voir plus loin). Parmi les ouvriers et employés, les abstentionnistes comptent pour moins de 60 % et ceux qui ne s’abstiennent plus renforcent le vote FN considéré par eux comme le seul vote anti-système. Près de la moitié des ouvriers et des employés votants votent aujourd’hui pour le FN, soit 5 fois plus que pour la gauche de la gauche ! Pire, les partis néolibéraux obtiennent deux fois plus de votes ouvriers et employés que la gauche de la gauche.
Bien que la majorité des ouvriers et des employés s’abstiennent encore, nous voyons là un début de transfert qui n’a aucune raison de ne pas continuer à la présidentielle de 2017, sauf si une vraie gauche de gauche remplace enfin la gauche de la gauche moribonde.

Si nous regardons le vote des jeunes, il suit le même phénomène. Croire que l’on peut aller à la transformation culturelle, sociale et politique sans les jeunes, les ouvriers et les employés témoigne de l’embourgeoisement des responsables de la gauche de la gauche. Dit autrement, on ne fait pas la révolution en n’entretenant des liens qu’avec les couches moyennes intermédiaires (24 % de la population) et les couches moyennes supérieures (15 %).

La difficulté réside dans le fait que le phénomène que nous venons de résumer n’est pas visible pour les responsables politiques des écologistes, du Front de gauche et de l’extrême gauche puisque la ségrégation spatiale ne les fait pas vivre là où vit la majorité du peuple ! De nombreux responsables de la gauche de la gauche nient même l’importance du phénomène de gentrification (transfert des classes défavorisées des villes-centres vers le rural et le périurbain, les banlieues voyant augmenter le nombre de familles qui ne font qu’y transiter provisoirement) et il n’y a que les responsables des comités de lutte contre la désertification des services publics en zone rurale et périurbaine qui « voient » ce phénomène…
La situation exige des responsables de la gauche de la gauche qu’ils reconsidèrent leurs croyances politiques, largement influencées par le mouvement réformateur néolibéral lui-même. De plus, comme ce mouvement réformateur néolibéral promeut par touches successives le communautarisme anglo-saxon au détriment du modèle de la République sociale laïque, ces responsables imaginaient qu’ils pourraient gauchir le communautarisme anglo-saxon !

Quant au deuxième tour des régionales, nous avons vu que le front républicain a néanmoins globalement fonctionné, diminuant fortement l’abstention et permettant qu’aucune région ne tombe dans l’escarcelle du FN. Sans changement de ligne stratégique, la mort programmée de la gauche de la gauche ne permettra pas à une gauche de gauche de prendre le relais.

Que faire pour une gauche de gauche ?

Répondons par une boutade à cette question : « le contraire de ce qu’ont fait la plupart des responsables de la gauche de la gauche depuis quelques années » ! Plus sérieusement, disons que Jean-Luc Mélenchon a raison de dire qu’il faudrait œuvrer à un nouveau front populaire. Mais rappelons que le Front populaire de 1936 avait mobilisé la grande majorité des ouvriers et que ceux-ci ont su entrer en action vers la grève générale pour obliger les vainqueurs des élections à aller plus loin que le démantèlement des ligues factieuses ! On en est très loin !

Nous proposons, dans nos interventions d’éducation populaire, 7 pistes partir desquelles le débat peut s’enclencher quel que soit le type d’organisations invitantes (mouvement syndical revendicatif, partis de transformation culturelle, sociale et politique, associations ou comités de résistance et de lutte, mutuelles pro-Sécu, MJC et centre sociaux, etc.)

1) Tout d’abord, analyser et clarifier le réel complexe plutôt que se vautrer dans des croyances autour de simplifications abusives autour d’une seule idée messianique (le revenu universel, l’idée européiste de l’euro social, la sortie de l’euro demain matin à 8 heures 30, le retour à la monnaie commune du SME, le communautarisme, les enthousiasmes internationaux sans réflexion critique, etc.)

2) Puis, engager des nouvelles pratiques sociales pour renouer les liens avec la classe populaire objective, ouvrière et employée. Dans ces nouvelles pratiques sociales, deux choses sont importantes, les luttes sociales de résistance et la démarche d’éducation populaire et de formation. Cette dernière reste un élément indispensable alors que, jusqu’ici, la plupart des responsables de la gauche de la gauche estimaient non nécessaires tant l’éducation populaire, sans doute jugée fastidieuse, que la formation culturelle, économique et politique pour se « soigner » des simplifications abusives qui justifiaient les anciennes pratiques sociales à l’origine du désastre de leurs mouvements.

3) Rompre définitivement avec le communautarisme diviseur importé des pays anglo-saxons et utiliser le principe de laïcité pour unifier le peuple comme l’a fait Jean Jaurès, fondateur et premier directeur de l’Humanité. Encore faut-il sortir du relativisme culturel instillé par le mouvement réformateur néolibéral qui influence de nombreux responsables de la gauche de la gauche, sans qu’ils en aient conscience d’ailleurs ! Encore faut-il combattre à visage découvert les déviances : celle de l’ultra-laïcisme anti-laïque largement développé dans la droite et l’extrême droite ; celle de la laïcité d’imposture ou laïcité adjectivée largement développée dans la gauche de la gauche moribonde ; celle de la tentative néolibérale de droite et de gauche (et donc du gouvernement Hollande-Valls) d’aller vers un nouveau processus concordataire. Le soutien aux combats laïques menés au sein de l’actuelle gauche de la gauche – qu’elle soit syndicale, politique ou associative – est une des tâches les plus importantes de la période.

4) Reprendre la stratégie populaire jaurésienne de l’évolution révolutionnaire qui, aujourd’hui comme hier, doit s’appuyer sur un double front : anticapitaliste et anti-impérialiste d’une part, contre le communautarisme et l’intégrisme d’autre part, puisque ces derniers sont de fait les alliés du mouvement réformateur néo-libéral.

5) Engager sérieusement le débat sur le modèle politique alternatif car aujourd’hui il n’y a plus d’altercapitalisme possible sans les politiques d’austérité. Dans ce débat, nous intervenons autour du modèle politique de la République sociale avec sa dizaine de principes constitutifs, ses quatre ruptures nécessaires (démocratique, laïque, sociale et écologique), sa demi-douzaine d’exigences indispensables. Nos ouvrages sont à disposition sur http://www.gaucherepublicaine.org/librairie. Nos intervenants en écrivant à evariste@gaucherepublicaine.org ou sur le site du REP.

6) Combattre sérieusement dans nos rangs ces maladies infantiles que sont le groupuscularisme, le sectarisme, le messianisme, le gauchisme.

7) Développer l’anti-racisme laïque quel que soit le type de racisme. Nous devons notamment protéger tous les juifs du racisme anti-juif et tous les musulmans du racisme anti-musulman, ce qui ne nous dispense pas de critiquer les parties réactionnaires des écrits et discours religieux.

13 novembre
Rubriques :
  • 13 novembre
  • Daech
  • lettre 798
  • politique sécuritaire
  • terrorisme

Daech, état d’urgence, mouvements sociaux : la grande confusion

par Didier Hanne

 

Il y aura d’autres morts, d’autres carnages, d’autres exterminations, en France et ailleurs. Pourquoi ? Parce qu’il est fort difficile de lutter contre ce nouvel adversaire, étant données les méthodes qu’il emploie et les caractéristiques de nos sociétés. L’absence totale de scrupule est une arme particulièrement sophistiquée. Certains d’avoir absolument raison, sûrs de l’impunité puisqu’ils sont prêts à mourir, les terroristes s’enfoncent comme une lame affûtée dans nos fragilités. Quant à nos régimes, contrairement à la légende bâtie par des foucaldiens, ils n’étaient pas d’abord ceux de la méta-surveillance, du contrôle total et du super Big Brother, mais ceux des caches multiples, des préparatifs indétectables dans les plis et replis de la société réelle. Celle qui se caractérise par les grands nombres, l’urbain démentiel, les mobilités et la complexité. Aucun panopticon : une tunique trouée, des enchevêtrements, des plans multiples, des invisibilités à foison, des peaux qu’on enlève, et dessous il y a une autre peau, puis encore une autre… Tel est notre monde. Et voilà qu’en plus, le terrorisme est ambulant alors que les frontières, justement, pour le meilleur et pour le pire, sont devenues des passoires.
Vous nous annonciez une mondialisation heureuse et transparente ? La vraie est opaque et tragique.

Le terrorisme islamiste, cet hydre à deux têtes (Daech et Al Qaïda) ne fera aucune différence ni entre les démocraties, ni entre les gens. Les démocraties ont adopté des régimes très variés par rapport au phénomène terroriste ? Cela n’entrera pas en ligne de compte. Les uns et les autres peuvent quand même redouter le pire. Certains États ont opté pour un multiculturalisme assumé, en droit ou en fait, d’autres s’y sont refusés ? Tous sont en danger.  Des pays ont une politique étrangère et militaire offensive contre Daech, d’autres s’en abstiennent ? L’appartenance à l’une ou l’autre de ces catégories ne changera rien : les énergiques et  les timides seront cibles à part égales. La coalition hétéroclite – qui va de Monsieur Villepin, en passant par Pierre Manent jusqu’à Clémentine Autain – pour nous expliquer que la chose qu’il faudrait changer après les attentats, c’est la politique (intérieure et extérieure) de la France, se trompe aussi complètement qu’il est possible. Il faudrait que la France s’approche du grizzly et lui mette doucement  la main sur le museau. Il va nous faire un câlin, c’est sûr ! Au fond, ces vieilles querelles entre le Djihad et nous, ce serait un gros malentendu.
Non. Le grizzly n’est pas outragé par nos politiques : il a faim, et très envie de planter ses canines. Alors les tueries continueront en Europe, les catholiques continueront d’être expulsés du Moyen Orient, les juifs d’être une cible mondiale rien que parce qu’ils sont juifs… et les musulmans non conformes au fanatisme continueront à mourir par dizaines de milliers en Syrie, en Irak, en Libye, grâce à Daech, même si la France change de politique, tant que Daech n’auras pas été détruit.
Quant à nous, on oublie trop vite, en se focalisant sur la tuerie du Bataclan pour en tirer des conclusions hâtives sur les objectifs des terroristes, que s’il n’y avait pas eu un dispositif de sécurité dissuasif à l’entrée du stade de France, il y aurait eu des centaines de morts dans les gradins. Les théories selon lesquelles la cible de Daech était le Paris jeune, festif, cosmopolite et branché n’ont pu fleurir qu’en esquivant les milliers de péquenauds du stade de France qui n’ont du leur salut qu’à des vigiles payés au salaire minimum. Le total-terrorisme ne fera AUCUNE DIFFERENCE. Il possède, de ce fait, un énorme avantage au commencement de la bataille.

Nous venons de subir une attaque exceptionnellement grave et sommes menacés d’en subir d’autres. Voici pourtant que la grande clameur anti sécuritaire cherche déjà à nous la faire oublier, consacrant l’essentiel de ses ressources intellectuelles et de ses forces militantes à essayer de changer l’ordre du jour, pour que n’y figurent que les points sur lesquels elle est à l’aise. Ce sont bien ceux qui clamaient par discours, motions et écrits divers durant ces derniers mois (et même après les attentats de janvier), qu’on exagérait le danger terroriste, que les médias en faisaient trop, etc. qui se reconvertissent désormais dans la  lutte exclusive contre l’état d’urgence. “Non à l’état d’urgence permanent” comme vient de le clamer, après le NPA, le Syndicat de la Magistrature. Non au confusionnisme, plutôt. Mais quelle est donc la réponse qu’il fallait, selon eux, organiser après le 13 novembre ? Elle se lit, en creux, dans d’innombrables tribunes de circonstances : aucune. Pas question de bouger. Éloge de la placidité. Cet “ordre sécuritaire” odieux qu’on dénonçait tant avant, il était finalement parfaitement adapté à la situation. Ainsi, dotés des dispositifs militaires, policiers et judiciaires qui avaient laissé passer les tueurs du Bataclan et négligé les explosés du stade de France, nous étions et sommes encore suffisamment  pourvus. Sans qu’on y touche, ils deviendront miraculeusement performants. Bref, il est urgent… d’attendre la suite. Ces braves gens ont le temps. L’époque, elle, nous mord la nuque avec ses tirs à balles réelles.

Mais décidément, rien n’est jamais simple dans la vie. Voilà qu’un mauvais virus circule dans la réplique au terrorisme. Certes, le gouvernement en laissant les services de police et de gendarmerie élargir les mesures permises par l’état d’urgence à des personnes ou des groupes (zadistes, écologistes, manifestants pacifiques de la COP 21, etc.) qui n’ont manifestement rien à voir avec l total-terrorisme islamiste, a commis une énorme erreur. Manifestement, ni monsieur Cazeneuve ni madame Taubira ne contrôlent vraiment ce qui se passe à l’échelle locale. Les amiraux fixent la feuille de route, puis ils s’enferment dans leurs cabines. Mais les officiers de quart, eux ont tendance à naviguer comme bon leur semble : alors ils tirent des bords, sur les à-côtés de la menace. Osons la question : qui gouverne vraiment l’état d’urgence, là où ça se passe, au ras du sol des perquisitions, des assignations à résidence, des interdictions de manifester ?

Toutes sortes de services d’ordre et de renseignement font en ce moment le siège des Préfets pour obtenir des perquisitions administratives à tout va, comme s’ils cherchaient à profiter de l’état d’urgence pour régler de vieux comptes avec la “subversion” ou des bandits de droit commun qu’ils n’arrivaient pas à cerner avec les procédures habituelles… Il faudrait des tirs de précision. Dans certains endroits on préfère la grosse chevrotine et les tirs en gerbe et au jugé. Gaspillage de forces et affaiblissement de la crédibilité d’une réponse qui avait l’assentiment de l’immense majorité de la population ! Les textes en vigueur étant ce qu’ils sont, le principe de l’état d’urgence n’était pas critiquable – sauf à être d’une extrême mauvaise foi quant à l’imminence des dangers – mais les usages qui en sont faits actuellement, sous couvert préfectoral et dans le silence assourdissant du gouvernement, sont une faute majeure, de nature à miner l’union contre le total-terrorisme islamiste.
Là aussi, il faudrait, vite, stopper la dynamique confusionniste qui s’est enclenchée dans les entrailles de l’État et renforcer les garde-fous.

Dernier confusionnisme, celui des bons sentiments qui s’affichent. Voici Jean-Luc Mélenchon qui nous explique dans les Inrockuptibles : “ l’amour est un principe plus fort que la rage de décimer. Il faut que la gauche assume l’esthétisation de ses valeurs.”1 On a lu ça, une semaine après le 13 novembre. Non, non encore. Au Bataclan, plein d’amours ont pris fin. Et cela aurait eu lieu,  même si la gauche, la droite, qui que ce soit,  avait mieux assumé quoi que ce soit. L’amour, pour durer, a besoin de protection, de sécurité, et parfois il faut lutter pour qu’il continue. L’amour peut mourir, quand il est désarmé par l’angélisme. Oui, nous voulons une société meilleure, encore bien meilleure. Et nous sommes, comme vous, exaspérés d’avoir en ce moment quelque chose à faire en plus que lutter contre le super capital qui grignote tout, la destruction programmée de la planète et les surenchères mortifères du FN. Mais contre Daech et Al Qaïda, et leurs Pol Pot portatifs, pas de poésie. Ou alors comme René Char dans les maquis de Provence : une poésie les armes à la main. Aucune échappatoire, même lyrique : pour mettre à l’abri nos amours, nos amis, nos emmerdements… il faudra se battre.

4 décembre 2015

Débats laïques
Rubriques :
  • Débats laïques
  • islamo-gauchisme
  • lettre 798
  • terrorisme

Un florilège islamo-gauchiste

Le meeting du 11 décembre à Saint-Denis

par Zohra Ramdane

 

Il faut dire que ces derniers temps, ils s’en sont donné à cœur joie ! Relatons par exemple le meeting du 11 décembre où se réunissaient les islamo-gauchistes de la gauche de la gauche en suivant la relation des propos tenus sur le site Ikhwan. Rappelons que ce meeting a été promotionné par le parti de Clémentine Autain « Ensemble »1 et par les intellectuels habituels, nouveaux Jésus-Christ des temps modernes (membres de certaines organisations de la gauche de la gauche) qui suivent les discours des « Indigènes de la république » et des stars proches de l’organisation des « Frères musulmans ». Comme vous le verrez, pour tous, Daesh et Al Qaïda ne sont pas des ennemis à combattre car les seuls responsables sont les dirigeants des impérialismes américains et français. Cela nous rappelle les trotskistes qui critiquaient la Résistance française entre 1940 et 1945 car elle tuait des soldats allemands (« derrière l’uniforme allemand, il y a un cœur de travailleur ») !

Les faits n’affectent pas ces gens-là. Les massacres qu’ils consentent à attribuer à l’EI sont présentés comme les effets mécaniques de « causes profondes » qu’il faut deviner. Les massacreurs sont ainsi exemptés de toute responsabilité et de tout projet politiques. Ils ne portent aucun intérêt, n’expriment aucune volonté. Ce ne sont donc pas des adversaires politiques. Il n’y a pas lieu de les combattre. Le combat est ailleurs. CQFD.

Quant au passage sur la paix sur leur texte d’appel, ce serait hilarant de dépolitisation et d’hypocrisie si la situation n’était pas aussi dure. En fait, leur « paix »  ne fait que remplacer artificiellement l’éloge de la « politique de la haine » soutenue par les adeptes des Indigènes de la république et des fans de l’organisation des Frères musulmans.

Fiammetta Venner et Carla Parisi nous permettront de citer longuement leur compte rendu, orateur après orateur :

Lors de ce meeting, Salma Yaqoob, a expliqué que lorsque le Sun publie un sondage disant que 1/5 musulmans soutient Daesh, c ‘est une attaque contre les musulmans !

… lorsque « Valls déclare la guerre à Daesh (…) St Denis en paie le prix » dixit Alain Gresh, journaliste au Monde diplomatique.

Tariq Ramadan a poursuivi  à la tribune en congratulant Alain Gresh qui a « très bien présenté le lien avec la politique étrangère et les attentats ».
Il a ajouté qu’on ne « doit pas interdire ni criminaliser le salafisme ni les lectures littéralistes, car en plus on traite avec les Rois de ces lectures à l’international » et qu' »il faut discuter de la lecture religieuse » mais ne pas faire l’amalgame « entre lecture littéraliste et attentats ».
D’après Tariq Ramadan, les attentats du 13 novembre sont « un prétexte pour déclarer la guerre à la Syrie », guerre qui aurait été « préparée par la France bien avant ».
Mais bien sûr, « des forces pro-israéliennes et sionistes en France ne veulent pas de son discours et provoquent des déstabilisations ». Et de rajouter, qu' »on connaît les sources d’islamophobie, on sait d’où ça vient… Elles sont liées à des associations pro-sionistes mais on a pas le droit de le dire ».
Tariq Ramadan a ensuite évoqué le cas de l’imam Kattabi, assigné à résidence. Seul imam proche des Frères musulmans à être inquiété, il a tout de même expliqué soutenir les jihadistes (qu’il appelle « moudjahidines ») où qu’ils se trouvent. L’imam a également déclaré : « de nos jours, notre société et l’éducation incitent à la fornication ». Il a lancé des campagne de haine contre Mohamed Sifaoui et aurait, selon le Fisc, un petit problème de mémoire avec ses déclarations.
Tariq Ramadan en appelle aux militants dans la salle : après avoir créé des associations contre l’islamophobie, il faut maintenant « passer à la deuxième étape », et « être beaucoup plus offensif en France et à l’international ».
Et de terminer par une diatribe contre le laïcité. « Arrêtez avec cette laïcité à toutes les sauces !! Il y en a marre !!! Unité de la république, laïcité, viande hallal, foulard, journée de la laïcité… c’est quel désordre ça ? On est où ? C’est de la distraction !!! »

Marwan Mohamed : « Valls a une fracture du cerveau car il ne veut pas comprendre les excuses sociologiques des terroristes ».

Toujours à la tribune, Sihame Assbague a appelé à ne pas voter pour la gauche: « Pas de justice, pas de voix ».

Enfin est cité le tweet de Madjid Messaoudene, élu de la majorité communiste de Saint-Denis : « je voterai pas Bartolone mais @vpecresse qui tape sur lui … »
A la tribune, il a expliqué que Saint Denis a été touchée trois fois. Le 13 nov., le 18 nov. (avec une intervention policière « qui a choqué les habitants »), puis avec les « attaques à l’encontre de St Denis »… Il parle des perquisitions ! Pour Madjid Messaoudene, un attentat faisant 130 morts est donc visiblement équivalent à une action anti-terroriste pour prévenir un autre attentat.

Nous pourrions rajouter la photo adressée sur les réseaux sociaux par la Jeunesse communiste du Val-de-Marne des responsables de la JC94 et de Tariq Ramadan, mais nous arrêterons là pour aujourd’hui !

 

  1. Troisième formation du Front de gauche en nombre de militants. Même si un tweet de Clémentine Autain a ensuite indiqué qu’Ensemble n’appelait pas au meeting… []
Ecole publique
Rubriques :
  • Ecole publique
  • Education nationale
  • lettre 798

"Un partenariat indigne des valeurs affichées par l'Éducation nationale"

par Collectif

 

Lundi 30 novembre 2015, la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche Najat Vallaud-Belkacem a annoncé la signature d’un partenariat entre Microsoft et son ministère. Les organisations signatrices [sic] de ce communiqué dénoncent une collusion d’intérêts : ce partenariat prévoit de présenter une fois de plus aux élèves un logiciel privateur et des formats fermés comme seuls outils incontournables et par voie de conséquence la dépendance comme modèle à adopter. Tout cela tend à renforcer la position dominante de l’entreprise américaine, au détriment des logiciels libres et des formats ouverts, qui pourtant respectent les principes élémentaires de neutralité et d’interopérabilité.
Le texte intégral de l’accord, disponible sur le site de l’Éducation Nationale, présente plusieurs axes, dont la formation des enseignants à la maitrise des environnements Microsoft en classe, la mise à disposition d’un écosystème Cloud, d’une plateforme de formation à distance. L’apprentissage du code se fera aussi sous l’égide de l’entreprise américaine. C’est donc une véritable mise sous tutelle de l’informatique à l’école, réalisée de plus sans consultation des acteurs de l’éducation, y compris en interne.
Au sein de cet accord aucune prise en considération du travail des personnels de terrain, des enseignants, des chercheurs n’a été prévue par les parties. Ceux-ci, pourtant les plus au fait des besoins des élèves, de leur administration et des contraintes liées au partage des données dans leurs établissements, ont accumulé un savoir-faire considérable que l’accord prévoit purement et simplement d’ignorer pour « former » les cadres et les enseignants aux technologies qu’ils voudraient imposer. De même, il n’est fait aucun cas de l’appel en faveur des formats ouverts dans l’éducation qui, pourtant, a été soutenu par des associations professionnelles d’enseignants, des syndicats, des entreprises, des individus, mais a été ici mis de côté.
Ce n’est pas la première fois qu’un tel partenariat est signé : déjà en 2005 un accord avait été signé. Mais ce partenariat apparaît d’autant plus navrant qu’il fait suite aux récentes révélations sur l’espionnage facilité par Microsoft et sa politique de collecte d’informations personnelles de l’utilisateur.
Ce partenariat est d’autant plus regrettable qu’il va à l’encontre des objectifs de l’école, et témoigne d’une absence de volonté politique de promouvoir la diffusion et l’appropriation par tous de la connaissance et des savoirs. Une volonté politique affirmée aurait pourtant pu mettre en avant des solutions en logiciel libre, respectueuses des libertés de chacun, des standards ouverts et de l’interopérabilité qui permettent aux élèves de progresser en informatique sans enfermement technologique. Cette proposition fait d’ailleurs partie des plus soutenues de la consultation sur l’avant projet de loi « République Numérique» d’Axelle Lemaire. L’école va devenir une fabrique d’inégalité, l’argent servant par la suite de discriminant dans le choix des logiciels et des services.
Fin 2011, François Hollande avait fait de la jeunesse la « la grande cause de l’élection présidentielle » (discours à Strasbourg le 22 novembre 2011). Visiblement, une nouvelle fois, la jeunesse et la formation des esprits sont sacrifiées au profit d’intérêts économiques de grandes firmes américaines.

April
Adullact
AFUL
CNLL
framasoft
FSFE (Free Software Foundation Europe)
FSF France
SEP-UNSA
CGT Éduc’Action
Association Enseignement Public & Informatique (EPI)
Fédération SUD Éducation
SGEN-CFDT
AbulÉdu-fr
La Mouette
Fédération des Enseignants Documentalistes de l’Éducation Nationale (FADBEN)
SE-Unsa
SavoirsCom1
Doc pour docs
Pagestec
SNES-FSU
SNUipp-FSU
le CECIL

Ecologie
Rubriques :
  • Ecologie
  • ReSPUBLICA
  • COP21
  • lettre 798

COP 21 : tout cela pour ça ?

par Zohra Ramdane

 

La COP 21 fut un énorme succès de communication des médias néolibéraux et une gigantesque victoire diplomatique du gouvernement français qui a fait signer un texte à 195 États du monde. Pour arriver à quoi ? A rien ou pas grand-chose. Jamais on n’a eu un battage médiatique d’une telle vigueur. Rarement, on n’a eu des mobilisations écologistes aussi fortes. Pour arriver à quoi ? A rien ou presque ! A se demander si les images de joie des militants que l’on a vues à la télévision n’étaient pas des images de figurants payés pour l’occasion.
D’abord si le texte peut apparaître universel, il n’est en rien contraignant sauf sur le fait que des petits fours seront distribués aux prochaines réunions, tous les 5 ans à partir de 2020. D’ici là, nous restons sur la voie d’un réchauffement climatique supérieur à 3° avec le but ultérieurement (quand ? quand les poules auront des dents !) de ramener ce chiffre à 1,5 %. Comme disait l’autre, ce qu’il y a de bien dans les promesses, c’est qu’elles n’engagent que ceux qui y croient !
L’article 4 en est un symbole : « [Les États] doivent réduire rapidement les émissions de manière à parvenir à un équilibre entre les émissions d’origine humaine et leur stockage dans la seconde moitié du siècle ». On fait mieux comme phrase contraignante !
Par ailleurs, nulle part n’est noté explicitement qu’à terme il faille entrer dans un processus d’extinction des énergies fossiles ! La référence aux droits humains qui pourraient protéger certains habitants de la planète a été supprimée de l’accord. Toute la partie sur les responsabilités juridiques des pollueurs a été purement et simplement retirée. Aucun financement, notamment pour la transition énergétique des pays pauvres, n’est prévu de façon claire, nette et précise. Aucune sanction n’est prévue contre les pays et les entreprises qui ne respecteraient pas les quelques propositions notées. Pas de transfert de technologie assuré pour les pays pauvres. Le texte ouvre la voie à des compensations qui pourraient exonérer les pays riches de toute lutte contre les rejets de gaz à effet de serre.
Nous partageons le propos de la CGT : « La CGT estime que, une fois encore, les États ont tout fait pour sauver le processus multilatéral, au détriment du climat, des femmes et des hommes, comme cela avait été le cas à Durban ou Doha ». Fermez le ban !



Si vous ne souhaitez plus recevoir cette lettre, désinscrivez-vous en cliquant ici.

ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine est édité par l'association :
"Les Amis de ReSPUBLICA"
27, rue de la Réunion
75020 PARIS
Courriel : respublica@gaucherepublicaine.org
Site: gaucherepublicaine.org