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Chronique d'Evariste
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Election de Trump : ceux qui sont sidérés sont ceux qui n’ont pas compris la période

par Évariste

 

Notre journal a répété à l’envi que la crise systémique de la formation sociale capitaliste ne donne comme possibilité pour l’oligarchie que de durcir toujours plus les politiques d’austérité et donc d’augmenter les inégalités sociales. Tout simplement parce que les lois tendancielles de cette formation sociale ne permettent pas autre chose. Comme dans les années 30, les peuples ont alors deux issues : la gauche de gauche ou le processus de droitisation vers l’extrême droite. Le problème pour nous est que la gauche de gauche n’existe pas encore et que nous n’avons qu’une gauche de la gauche en décomposition.
En décomposition car elle est infesté de virus néolibéraux : stratégie du consensus contre la démocratie empêchant de répondre aux besoins du peuple, extrêmisation d’un extrême centre consensuel, maintien des discours perdants qui n’intéressent plus les citoyens, refus de penser le modèle politique post-capitaliste, amour du libre-échange, volonté de défendre l’Union européenne et la zone euro alors qu’elles empêchent toute politique progressiste, sous-estimation des réactions violentes de l’oligarchie en cas de processus « gauche de gauche », croyance que le volontarisme peut faire fi des lois tendancielles des formations sociales capitalistes, soutien au piège du système des primaires, amour du communautarisme anglo-saxon et haine de la laïcité comme principe d’organisation sociale permettant le plus haut niveau de liberté pour tous, dédain de la lutte des classes, dédain de la pratique de masse, refus de penser la lutte entre impérialismes, mépris du peuple et de la nation, acceptation de se couper de la classe populaire ouvrière et employée, refus de l’éducation populaire et de la bataille pour une nouvelle hégémonie culturelle, préférence pour des cartels d’organisations anti-démocratiques, culture de l’entre-soi, refus d’établir une ligne jaune avec les partis néolibéraux de droite comme de gauche, croyance que des partis de masse peuvent se constituer de manière endogène à partir de groupuscules coupés des masses, etc.

Devant l’absence de gauche de gauche, des expérimentations ont lieu ici et là, avec Bernie Sanders aux Etats-Unis, avec Podemos en Espagne, avec la France insoumise en France. Nous devons regarder ces expérimentations avec empathie et de façon humble, tout en sachant que le chemin vers une gauche de gauche sera encore long. Raison de plus pour prioriser l’éducation populaire refondée en vue de construire une nouvelle hégémonie culturelle.

En attendant (et il faudrait plutôt raccourcir le délai !), ce sont l’abstention populaire (60 % des jeunes, des ouvriers, des employés – majoritaires dans le peuple – qui se sont abstenus aux dernières élections) et les réponses réactionnaires de droite ou d’extrême droite qui mobilisent la classe populaire ouvrière et employée et les couches moyennes intermédiaires.

L’élection présidentielle française de 2017 se profile malheureusement dans la lignée du Brexit de droite en Grande-Bretagne ou de l’élection de Trump aux Etats-Unis, en lien avec un durcissement sans comparaison des politiques d’austérité et de « démocrature ».

Au lieu de croire qu’en diabolisant Trump on empêchera la décomposition totale de la gauche de la gauche, il vaudrait mieux être attentif à ce qui peut rassembler le peuple dans une voie progressiste et aussi engager des débats populaires plutôt que groupusculaires. Mais de grâce, laissons au vestiaire les discours trentenaires qui ont alimenté l’actuelle décomposition de la gauche de la gauche. Reprenons les fondamentaux et adaptons-les au XXIe siècle : les pensées de Condorcet, Marx, Jaurès et Gramsci, l’esprit de la Résistance et du peuple mobilisé, le déjà-là produit par le programme du Conseil national de la Résistance et son joyau révolutionnaire la Sécurité sociale, le principe rassembleur de la laïcité, le modèle politique évolutif de la République sociale, avec ses principes constitutifs, les ruptures et les exigences qu’elle implique, ainsi que la stratégie de l’évolution révolutionnaire.
Voilà notre feuille de route pour les quelque 300 rendez-vous annuels dont l’organisation est prévue avec notre partenaire, le Réseau Education Populaire (REP).

PS – Sur l’élection américaine, on peut trouver des éléments intéressants dans la chronique de Relations internationales due à Pierre Guerlain : “Ceux qui ont tué Bernie Sanders ont récolté Trump“.

Voir aussi l’article de Pablo Iglésias, ci-après.

 

Etats-Unis
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Trump et le moment populiste

par Pablo Iglesias

 

Publié en espagnol le 9 novembre 2016 dans « Publico »

Un fasciste a gagné.
Ce n’est pas banaliser le fascisme que de l’affirmer. Le fascisme n’est pas un phénomène exclusivement italien et allemand des années 30 ; c’est une façon de construire le politique. Certains politologues espagnols essayèrent de délimiter le phénomène hors de nos frontières, pour éviter d’avoir à parler de fascisme en Espagne. Seuls auraient été fascistes en Espagne les vieilles chemises de la minuscule Phalange de José Antonio Primo de Rivera. Ce n’est pas vrai. Le fascisme s’est construit en Espagne avec le matériau idéologique disponible pour un projet de masse : le catholicisme le plus réactionnaire. Ce que certains appelèrent le national-catholicisme est la version espagnole du fascisme. Et il y a eu des fascismes dans nombre de pays d’Europe et d’Amérique, avec des combinaisons discursives singulières de pseudo-patriotisme, xénophobie, revendication d’un passé national glorieux, religion, phraséologie anti-élites, chauvinisme et zéro mise en question des relations de propriété. Trump est un fasciste viable aux Etats-Unis : il ne fait pas le salut romain et n’arbore pas de svastikas, mais il a reçu l’appui explicite de fascistes imprésentables, depuis le Ku Klux Klan jusqu’à différentes milices armées des USA.
Ceux qui disent que le courant Trump est du populisme de droite ont raison. Y a-t-il meilleure façon de décrire le fascisme si ce n’est comme populisme de droite ?
Le populisme n’est pas une idéologie, ni un ensemble de politiques publiques, c’est une modalité de construction du politique depuis un « dehors » qui se répand dans les moments de crise. Ce dehors est celui qui a mobilisé la white American working class avec Trump, de la même façon qu’il a mobilisé la classe ouvrière britannique en faveur du brexit. Le mépris aristocratique si politiquement correct envers les rednecks américains, les chavs britanniques ou les habitants de Badalona qui firent du réactionnaire Albiol leur maire, ce mépris révèle la myopie d’un certain progressisme cosmopolite qui n’est rien d’autre qu’une sorte de ringardise urbaine à la mode.
Les populistes sont des outsiders et peuvent être de droite, de gauche, ultralibéraux ou protectionnistes. Est-ce que cela signifie que les « extrêmes » se toucheraient ou qu’ils se ressembleraient ? En aucun cas. Répéter ce mantra n’enlève rien au ridicule de cet argument qu’utilise un extrémiste du centre pour s’auto-identifier comme étant le moyen terme vertueux, affirmant en un triple saut périlleux que les points les plus opposés seraient en fait les plus proches. Trump n’est pas proche de Sanders, il est proche des politiques migratoires de Bush et de l’Union européenne. Trump, multimillionnaire, est proche du monde bâti par les présidents qui l’ont précédé, y compris Obama, qui ont laissé au vent mauvais les classes populaires américaines. Simplement, Trump a su profiter du moment.
C’est qu’en réalité le populisme ne définit pas les options politiques, mais les moments politiques. Il y eut le moment populiste Berlusconi, le moment Poutine, le moment Perón et les Etats-Unis viennent de vivre le moment Trump. Mais il ne s’agit pas d’un moment isolé.
Le crash financier de 2007 a été l’antichambre de la crise d’une grande partie des systèmes politiques occidentaux. N’oublions pas que ces systèmes, étayés par l’amélioration des perspectives de vie de la classe ouvrière, la consommation de masse, la redistribution et les droits sociaux, naquirent dans l’esprit de l’antifascisme et dans un contexte géopolitique bipolaire. Tout entra en crise avec Thatcher et Reagan et pris fin définitivement avec la chute du Mur de Berlin. Ce que la crise financière de 2007 a mis au jour, c’est un ensemble de vérités économiques qui devaient, tôt ou tard, trouver une traduction politique : l’appauvrissement des classes moyennes et salariées, la détérioration des services publics et des droits sociaux. La traduction politique s’appelle Trump aux Etats-Unis, elle s’appelle Le Pen en France, et en Espagne – « grâce à la Vierge » dirait [la leader de droite] Aguirre – elle s’appelle Podemos. En quoi nous ressemblons-nous ? En rien, ce sont les moments politiques qui se ressemblent.
L’important, dans les moments politiques populistes,c’est qu’ils dépouillent la politique de ses atours parlementaires (et en passant mettent à la mode, même parmi les politologues mainstream, Carl Schmitt selon la lecture qu’en fait Chantal Mouffe). Trump c’est ça : la nudité obscène, face à la candidate de Wall Street.
Comme tout aurait été différent si Trump avait eu en face quelqu’un qui, sans obscénité fasciste, parle au peuple en appelant les choses par leur nom ! Ce rival existe : c’est Bernie Sanders. Les populistes peuvent aussi être socialistes, car en vérité le populisme ne définit que les moments ; le moment des USA était celui de Trump et de Sanders, pas celui de la candidate de l’establishment. Y a-t-il eu moment plus populiste que celui au cours duquel, voici 99 ans, quelqu’un appela à réclamer du pain et la paix ?
J’insiste sur le fait que ce sont les moments politiques qui se ressemblent, pas les options politiques qui en profitent.Pensons maintenant à l’Espagne. Posons-nous la question : quel a été le fait politique le plus important de l’année ? D’aucuns diront que c’est le blocage politique. Mais c’est Juan Villar Mir – l’un des principaux grands patrons espagnols – qui l’a clairement défini : « Ce qui est vraiment important, c’est que Podemos ne soit pas au gouvernement, cela aurait déréglé l’économie. »
La politique, quand c’est pour de vrai, est viscérale, agonique, dure. Les nuances, la courtoisie, la mesure, les manières nobles et soignées se donnent parfois à voir au sein des parlements et dans les réceptions officielles, mais dès que l’on parle de ce qui est vraiment important, alors finies les bonnes manières ! Il n’y a pas plus élégant que la diplomatie, mais quiconque est au fait des relations internationales sait que derrière la diplomatie il y a des divisions blindées et d’immenses pouvoirs économiques. C’est pour ça que l’élection de Trump est déjà un événement géopolitique qui transcende son propre moment.
En Espagne, nous autres de Podemos pouvons goûter, ces jours-ci, à cette friandise au goût de caramel amer : être une opposition constituant une véritable alternative et qui peut gagner.
Rien à voir avec les débats parlementaires, quand bien même on peut nous y traiter de crétins ou de canaille ou nous y accuser de travailler pour des dictatures. Ne vous y trompez pas : à côté de Villar Mir, Rafa Hernando [porte-parole du PP, droite au pouvoir, aux propos toujours agressifs et virulents] c’est un ours en peluche, son obscénité est simplement candide. Au Parlement, bien que l’arbitre n’y soit pas impartial, au moins pouvons-nous parler librement et nous faire plaisir en disant depuis la tribune des vérités que presque personne n’y a dites avant nous.
Mais il est faux que le Parlement soit la scène la plus importante de la politique, comme il est faux de dire que sur les bancs du gouvernement s’assoient les femmes et les hommes les plus puissants du pays. Ruben Juste, dans un article courageux publié l’autre jour dans Contexto CTXT, l’a montré : « Il y a un État parallèle, privé ou semi-privé, avec son nom propre : société anonyme ». L’auteur précise ce qu’est ce parlement privé de cet État espagnol dans l’ombre, formé de 417 conseillers – parmi lesquels 74 femmes seulement – et donne les noms de ses ministres : les Villar Mir, les Landiribar, les Isla… les propriétaires de Repsol, Telefonica, ACS, Inditex, OHL, Santander, les anciens de Goldman Sachs, les propriétaires de quasiment tout ce que les Espagnols peuvent regarder, écouter ou lire pour s’informer.
C’est ça la politique pour de vrai, et le caractère exceptionnel du moment que nous vivons a aussi à voir avec la nudité où apparaissent les propriétaires de l’opinion. Jamais le vieux proverbe « un chien ne mange pas de la viande de chien » n’aura été aussi éloigné de la réalité. Nous avons pu voir le propriétaire d’un groupe de médias licencier puis traîner devant les tribunaux des journalistes coupables seulement d’informer sur lui. Politique de vérité à l’état pur.
La victoire de Trump nous laisse une leçon importante, qui a beaucoup à voir avec nos débats actuels au sein de Podemos. L’antidote aux Trump, aux Albiol et aux Le Pen, l’antidote au fascisme et à l’autoritarisme financier, c’est la politique qui interpelle et organise le peuple en assumant l’ennemi comme tel. C’est très risqué ; ça déchaîne la colère des puissants et de leurs appareils et c’est bien plus rugueux que la politique parlementaire. Ça présente de nombreuses difficultés, car cela implique de doter la société civile et les mouvements populaires d’instruments de pouvoir et d’auto-organisation. Des types tels que Trump ne peuvent se frayer un chemin que là où ils ne sont pas arrêtés par les tranchées de la société civile organisée, là où règnent la perte de socialisation et la solitude des dépossédés, là où l’on peut dresser l’avant-dernier contre le dernier.
Mais cette politique qui interpelle et parle clair, cette politique qui donne des instruments pour l’organisation populaire est la seule qui touche les consciences, la seule à même de gagner.

Proche-Orient
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Comprendre l’imbroglio syrien pour éviter d’être l’idiot utile d’un impérialisme

...ou d’un de ses alliés communautaristes ou intégristes

par Zohra Ramdane

 

Les implications étrangères croissantes sont le fruit du développement des contradictions entre impérialismes

Comme l’économie est toujours « déterminante en dernière instance », partons des problèmes géo-économiques.

Acte 1 : De nouveaux gisements d’hydrocarbures ont été découverts en Syrie. La Syrie a donné le droit d’extraction des hydrocarbures et d’organiser la chaîne de traitement à la Russie.

Acte 2 : Deux gazoducs concurrents sont prévus par les protagonistes du Moyen Orient pour alimenter l’Union européenne : celui qui provient du Qatar (sunnite, soutien de la Confrérie des frères musulmans et allié des États-Unis) et celui qui provient de l’Iran (chiite, soutien du Hezbollah libanais et plutôt allié avec la Russie). Les deux devraient passer par la Syrie depuis que le gouvernement islamiste sunnite turc refuse de faire passer par la Turquie un gazoduc iranien.

Acte 3 : l’ensemble des protagonistes agissant en Syrie vendent des armes à l’ensemble des belligérants : les impérialismes occidentaux (dont la France) vers les monarchies pétrolières sunnites (notamment l’Arabie saoudite et le Qatar) dont une partie aboutissent par des détours compliqués aux islamistes sunnites dont Daech. De plus, les impérialismes occidentaux financent et fournissent des armes à l’opposition syrienne qui aboutissent directement à l’ex-front al-Nosra (filiale d’Al-Qaïda) devenu depuis peu le Fatah Al-cham, tout simplement parce que le Fatah Al-cham dirige la coalition anti-Assad. La Russie fait de même notamment avec la Syrie et les islamistes chiites. N’oublions pas la Turquie, alliée des impérialismes occidentaux, qui avait commencé par soutenir Daech, soutiennent plutôt les organisations proches des Frères musulmans de la coalition anti-Assad tout en agissant contres les organisations kurdes (elle-même anti-Daech) tout simplement parce qu’elle ne veut en aucun prix d’un Kurdistan syrien qui pourrait être une base arrière du PKK agissant en Turquie.

Acte 4: la seule base navale russe hors territoire russe est en Syrie.

Tout s’éclaire, non ? Bien sûr, il faudrait dans une analyse plus fouillée relier cela aux autres confrontations des impérialismes mondiaux. Par exemple, pour comprendre pourquoi la Chine défend l’intégrité de la Syrie alors que la plupart des protagonistes se dirigent vers une partition comme en ex-Yougoslavie, en ex-URSS, en Libye, ou ailleurs.

Du printemps arabe à une guerre entre impérialismes réalisée par des sous-traitants

Les printemps arabes ont été déclenchés pour s’opposer d’abord  aux politiques de privatisation et d’austérité des régimes dictatoriaux et corrompus. Ainsi étaient formulés des revendications sociales et démocratiques et quelquefois laïques; Si il y a bien eu un printemps arabe en Syrie, le fait qu’il n’y ait pas eu d’organisation représentative de ce printemps arabe et indépendante des impérialismes a vite entraîné le dévoiement de ce printemps arabe vers une instrumentalisation par les différents impérialismes et leurs alliées.

Partir du réel pour atteindre l’idéal

Nous sortons d’un monde unipolaire dirigé par les États-Unis pour entrer dans un mode multipolaire. C’est ni bien ni mal, c’est la réalité matérielle et donc il faut partir de là. Le monde multipolaire n’est pas plus propice à la paix que le monde unipolaire. Certaines forces se disant de transformation sociale et politique souhaitent s’allier avec un impérialisme contre un autre. Comme d’autres qui souhaitent s’allier avec telle extrême droite religieuse sous le prétexte que cette religion serait la religion des pauvres. Dans le premier cas, ces forces sont instrumentalisés par le dit impérialisme et dans le second cas, par la doctrine sociale de l’église correspondante et deviennent alors les idiots utiles d’une alliance entre un impérialisme avec ses extrêmes droites religieuses spécifiques. Voilà pourquoi nous devons opter pour la stratégie du double front d’une part contre les impérialismes et d’autre part contre les communautarismes et intégrismes religieux qu’ils soient djihadistes ou pas car les seconds sont le terreau des premiers. C’est sur cette base et sur aucune autre que doit se construire l’internationalisme. Ce qui doit nous guider doit être défini par une analyse de classe et par une détermination des alliances de classe nécessaires pour permettre au peuple d’agir. Les gauchistes communautaristes ou les élus qui pensent acheter la paix sociale en soutenant l’islamisme politique, sont en fait les idiots utiles d’un impérialisme ou d’une extrême droite religieuse. Ils n’ont toujours pas compris l’assassinat d’Abanne Ramdane, chef laïque du FLN supprimé par les dirigeants du FLN en 1957, le massacre d’un million de morts en 1965 en Indonésie, le massacre des communistes, des athées et laïques dans les années 80 en Iran, les centaines de milliers de morts en Algérie dans la décennie noire de la fin du XXe siècle, l’assassinat de Mohamed Boudiaf en 1992, les assassinats récents en Tunisie de deux dirigeants du Front populaire tunisien Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi par des islamistes, etc.

Les autres causes de l’imbroglio syrien

Si la cause principale de l’imbroglio syrien réside dans la géo-économie, d’autres causes ne doivent pas être occultées. Tout d’abord la géopolitique. Depuis l’effondrement du panarabisme, la question religieuse structure les luttes géopolitiques avec le soutien des impérialismes. La lutte pour l’hégémonie que se mènent l’Iran, l’Arabie saoudite et le Qatar sème la terreur dans la région et dans le monde. Et la division sunnites/chiites est utilisée pour structurer les contradictions géopolitiques. Mais cerise sur le gâteau de l’islamisme politique, les gouvernements néolibéraux, comme les gauchistes communautaristes ou les élus de tous bord qui souhaitent acheter la paix sociale favorisent les islamismes politiques jusque dans les quartiers populaires. Tout cela favorise en Europe bien sûr la montée des extrêmes droites chrétiennes et politiques (comme le FN) qui développe différentes formes de racisme et de haine contre une religion « bouc-émissaire », hier le judaïsme, aujourd’hui l’islam.

Voilà pourquoi il est préférable d’écouter Kepel et Pena Ruiz plutôt que Roy, Baubérot, Plenel ou Gresh. Voilà pourquoi, à la stratégie du double front, nous devons ajouter la liaison des combats démocratique, laïque, social, écologique et féministe. C’est plus difficile, mais c’est le seul chemin possible vers l’émancipation.

Politique française
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Le PCF poursuit dans la voie de sa marginalisation progressive

par Bernard Teper

 

Les cadres du Parti communiste ont choisi le 5 novembre dernier à une courte majorité une voie étroite qui privilégie de choisir un candidat communiste à l’élection présidentielle de 2017, candidat qui pourrait se retirer à la fin du mois de janvier 2017 dans le cas où Montebourg serait le vainqueur de la primaire socialiste.  Cette stratégie alambiquée du PCF, qui doit encore être soumis aux adhérents du PCF dans trois semaines, est le fruit d’un accord tactique contre-nature entre les courants identitaires du PCF et la fraction dirigeante de l’Association nationale des élus communistes et républicains (ANECR). Les deux courants identitaires du PCF voient dans cette tactique le moyen de donner une chance à leur croyance que la transformation sociale et politique ne peut se faire que par une croissance endogène de leur parti. La fraction dirigeante de l’ANECR voit dans cette tactique le moyen de « sauver » les municipalités communistes actuelles en 2020 par un accord avec les néolibéraux du parti solférinien. Curieux attelage  dans la mesure où ces deux contractants sont en désaccord profond sur la ligne politique à conduire. Ajoutons à ce constat que le secrétaire national, Pierre Laurent, pris à contre-pied dans cette controverse, a de plus en plus de mal de tenir son rôle d’équilibriste.

D’autres contradictions minent l’actuel PCF

Si on ajoute à ce premier jeu de contradictions que le PCF est traversé également par d’autres contradictions qui vont devenir antagoniques en son sein, son avenir est sombre.

Il s’agit d’abord de la contradiction entre ceux qui restent les héritiers de Jean Jaurès, premier directeur du journal L’Humanité, qui aujourd’hui prônent la liaison des combats démocratiques, laïques, sociaux, écologiques et féministes et une coalition regroupant  les adeptes du communautarisme de type « Indigènes de la république » et des partisans de l’achat de la paix sociale en s’alliant avec le communautarisme de l’islamisme politique.

L’autre contradiction procède d’une vue majoritaire dans le PCF que le changement des traités européens peut s’effectuer au sein de l’actuelle Union européenne (UE) et de l’actuelle zone euro sans tirer aucune leçon des conséquences de la signature du troisième mémorandum en juillet 2015 alors que se développe en son sein la thèse contraire, à savoir que la construction concrète de cette UE et de cette zone euro a été effectuée justement pour interdire définitivement toute politique progressiste dans l’UE et dans la zone euro.

Tout cela renvoie aussi au fait que la majorité des communistes dans tous les différents courants protagonistes internes aujourd’hui ne s’appuie plus sur le matérialisme dialectique et historique et pas plus sur le projet de République sociale chère au premier directeur du journal L’Humanité et encore moins sur la nécessité d’œuvrer pour une nouvelle hégémonie culturelle. Ainsi, ils emploient à leur place les bases théoriques de leurs adversaires.

Les conséquences de la dictature de la tactique employée pour la survie du PCF

Cerise sur le gâteau de la décomposition, chacun de  ces quatre  ensembles de contradictions clivent le PCF de façon différente ce qui empêche toute mise en cohérence de ce parti dans un futur immédiat par des alliances tactiques changeantes et improbables.

Les conséquences sont multiples. Le PCF est vieillissant. Son appareil est animé de plus en plus par les cadres de la fonction publique territoriale présente dans les actuelles municipalités communistes. Les ouvriers et les employés (majoritaires dans le pays) n’existent plus dans le PCF hormis chez les retraités. La culture de l’entre-soi y devient prédominante.

Bien sûr, cela va rendre plus difficile la recherche de signatures pour Jean-Luc Mélenchon, recherche  indispensable pour sa présentation à l’élection présidentielle alors qu’il reste le seul candidat de gauche à pouvoir être au premier tour devant le parti gouvernemental solférinien néolibéral avec un score à deux chiffres. On mesure là l’injustice de ne pas avoir de parrainages de citoyens dans la loi et la responsabilité que prendraient ceux qui, à gauche, porteraient la décision d’empêcher l’expression du suffrage pour l’un des candidats les plus populaires à gauche.

Mais comme « on ne peut pas faire bouillir les marmites du futur » (Engels), l’histoire reste à écrire et sera tributaire des actions qui seront entreprises ici et là et de la logique des différentes lois tendancielles de la formation sociale capitaliste dans laquelle nous sommes. Pour notre part, nous continuerons à creuser le sillon du soutien aux luttes sociales et populaires, d’une éducation populaire refondée pour pouvoir s’engager in fine dans un processus de transformation sociale et politique.

Hasta la victoria siempre !

 

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« La face cachée du pape François », par Paul Ariès

par Monique Vézinet

 

Paul Ariès est sans doute connu de nos lecteurs comme théoricien de la décroissance (« objecteur de croissance »), de la « simplicité volontaire », pourfendeur de la mal-bouffe et la publicité, mais il a aussi écrit sur les sectes, le satanisme, la scientologie. Athée, il est proche des catholiques de gauche et a beaucoup publié aux éditions Golias.

Son nouvel ouvrage, « La face cachée du pape François », publié début 2016 aux éditions Max Milo, témoigne de la proximité de l’auteur avec les thèses de la  théologie de la libération telle qu’elle fut pensée par Gustavo Gutiérrez dès 1971, développée en Amérique latine et combattue par les néo-libéraux : la pauvreté n’est pas voulue par Dieu mais résulte de l’exploitation économique ; il faut participer aux luttes populaires ; et pour cela l’Eglise doit se transformer en développant des communautés de base qui remettent en cause la distinction entre clercs et laïcs. Si François a reçu Gutiérrez avec honneur en 2013 et si la théologie (révolutionnaire) de la libération ne représente plus un réel danger, la reprise aujourd’hui du thème de « l’option préférentielle pour les pauvres » masque en fait une acceptation des inégalités sociales et l’idéal d’une réconciliation entre les riches et les pauvres. Ariès démonte finement la façon dont Benoît XVI a enclenché cette récupération de théories revues à la sauce vaticane et plus particulièrement de ce qu’est devenu l’amour (tout évangélique) des pauvres dans les mains de l’Opus Dei.

Quant à la réforme de l’Eglise, elle est bien la mission que l’évêque Bergoglio a reçu de ses mandants lors de son élection : la rendre plus efficace sans remettre en cause le centralisme, pour faire oublier les scandales financiers, sexuels, donner une image de pape frugal… Opération de communication confiée à un bon communicant, mais, note Ariès, « François ne réforme pas l’Eglise pour en faire une Eglise pauvre au service des pauvres, il réforme l’Eglise pour lui permettre de passer le mauvais cap actuel et la mettre en état de remporter sa part de marché du retour du religieux. »

Sur les conditions de cette élection, Ariès rappelle d’abord la « jeunesse cachée » du jésuite argentin et ses relations avec l’organisation péroniste de la Garde de fer (éponyme d’une organisation fasciste en Roumanie) puis avec l’OUTG pour assurer le transfert de l’Universidad del Salvador des religieux aux laïques ; il y voit la volonté de réaliser en Amérique latine une opération comparable à celle de Solidarnosc en Pologne : constituer une alternative populaire aux gauches bolivariennes. Les réseaux ayant appuyé Bergoglio font l’objet d’une analyse précise : outre l’Opus Dei, Communion et Libération, les Chevaliers de Colomb ou les Légionnaires du Christ. L’un des ultra-conservateurs appartenant à cette dernière organisation, Massimo Introvigne, a droit à un portrait particulièrement soigné car il est spécialiste non seulement de la réfutation des luttes anti-sectes, mais encore de la défense de l’Eglise contre les accusations de pédophilie.
Dans les pages où se manifeste le plus clairement l’indignation de l’auteur, on trouvera également la canonisation d’un prêtre génocidaire, évangélisateur de la Californie au 18e siècle, Junipero Serra, et la béatification d’un prêtre français antisémite, Léon Dehon.

Mais la cible essentielle de Paul Ariès, c’est « l’écolo-catholicisme » qui prend sa source dans l’encyclique Laudato si’ de 2015 sur la « sauvegarde de la maison commune ».  Il y consacre un grande partie du livre, au prix parfois de redites et d’une présentation touffue. La lecture qu’il fait de ce texte se lit ainsi : la cause ultime de la dégradation de l’environnement étant la « perte de Dieu » et sa cause proche le « consumérisme », « combattons d’abord les causes profondes de l’effondrement écologique comme la contraception ou l’IVG plutôt que les causes superficielles comme le capitalisme et le productivisme ! »

A cet égard, la partie du livre consacrée aux droits des femmes ne compte qu’une dizaine de pages et n’apportera pas d’éléments très nouveaux aux féministes, sinon un savoureux commentaire sur la casuistique appliquée aux cas d’avortement, puisque les catholiques l’ayant pratiqué se trouvent toujours automatiquement excommuniées ; il est vrai que la confession peut conduire à la rémission de ce péché mortel et  le « progressiste » François s’en fait attribuer le mérite en le rappelant !

Il est impossible de résumer le détail des analyses de Paul Ariès sur la question de l’anticapitalisme de François (il semble opter pour un penchant de celui-ci pour le bon vieux corporatisme). L’ouvrage est très convainquant lors qu’il expose, avec de nombreuses citations à l’appui, les thèses les plus extrêmes des plus réactionnaires tenants de la doctrine du Vatican, ainsi lorsqu’il démonte la rhétorique nouvelle droite de « Tradition Famille Propriété » (présente en France via  Avenir de la culture). Cependant, on regrettera que, dans sa fougue, l’auteur passe parfois d’un pontificat à l’autre ou d’un cercle à l’autre de la sphère vaticane sans clairement marquer l’importance et l’impact des différents réseaux. Occupé qu’il est à ferrailler contre la droitisation de l’Eglise, on lui saura gré de l’argumentaire – accablant – qu’il livre contre l’évolution actuelle de celle-ci sous François, à l’opposée de l’image d’un pape sympathique, ouvert à la modernité et aux intérêts des peuples.

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Lu pour vous : laïcité scolaire - accords multilatéraux

par ReSPUBLICA

 

La folie suicidaire de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC)”, par Jacques Berthelot

Fascinée par les accords de libre-échange méga-régionaux (ALEMR) comme le TTIP (TAFTA), le TTP et le CETA, l’Union africaine  montre ses muscles en prétendant faire encore mieux entre ses 54 Etats […]
Il est utile aussi de se rappeler la mise en garde du célèbre économiste du développement Ignacy Sachs qui déclarait déjà en 1971 : “Sous l’effet aussi de l’exemple du Marché Commun européen, de nombreux pays du Tiers Monde se bercent d’espoirs démesuré sau sujet d’intégrations régionales conçues à l’européenne, c’est-à-dire obtenues par l’ouverture progressive des marchés. A mon avis, c’est là une fausse piste car la réduction des tarifs douaniers sert en premier lieu l’expansion des entreprises multinationales, établies à l’intérieur des marchés communs, plus puissantes et mieux préparées à se saisir des nouvelles opportunités”.
…une intégration économique régionale durable [des Etats de l’Afrique sub-saharienne] aux énormes disparités de niveau de développement est impossible sans une politique de redistribution significative entre eux, ce qui implique une intégration politique minimale avec un budget important. De simples zones de libre-échange comme l’Accord Tripartite et plus encore la ZLEC ne peuvent que favoriser la marginalisation des ménages, entreprises et régions les plus pauvres, générant des conflits sociaux et politiques structurels.
Lire : la-folie-suicidaire-de-la-zone-de-libre-echange-continentale-africaine-7-novembre-2016

“Lorant Deutsch et l’Histoire: pour un enseignement débarrassé des charlatans”, par Pascal Langlois

La polémique récente suscitée par la venue de Lorànt Deutsch, comédien et auteur d’ouvrages de vulgarisation de l’Histoire de France, au salon Histoire de Lire de Versailles prévu le 4 novembre 2016, montre à quel point l’enseignement de cette discipline est un enjeu politique qui met à mal le respect de la laïcité à l’école. […]
Ainsi donc, sur la pression d’un conseil départemental de droite relayé par les autorités académiques, un comédien-écrivain aux idées royalistes assumées peut être promu professeur d’Histoire auprès de collégiens ! 
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