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Quels souhaits pouvons-nous faire pour 2018 ?

par Évariste

 

Soyons fous puisque c’est la période ! Et si on travaillait cette année sur les conditions nécessaires à la transformation sociale et politique ? Souhaitons que nos organisations politiques, syndicales et associatives se mettent à la hauteur des enjeux sans se laisser influencer par la pensée magique de gourous propres sur eux, ni se prêter à l’intégration au système ! Et si on travaillait à mieux comprendre la crise du capital ?
Car nous vivons un paradoxe, la crise du capital s’approfondit, les politiques austéritaires sont de plus en plus injustes et anti-sociales, et la mobilisation est de plus en plus faible. Non, ce n’est pas une fatalité, il convient de réinterroger la ligne politique, la stratégie et les modes d’organisation. Pourvu qu’il y ait suffisamment de réunions où ces questions soient posées !
De plus, les gérants du capital sont politiquement intelligents (et non pas stupides comme on l’entend ici et là). Ils arrivent donc à retarder toute évolution et même à faire remonter le président Macron dans les sondages. Ce dernier avait commencé à baisser dans les premiers mois de son mandat mais l’incapacité du mouvement social et politique à se mobiliser contre la pire des attaques anti-sociales a entraîné la montée du fatalisme social.
Qui a dit  « Nul ne peut causer notre perte, sauf nos propres erreurs »1 ? Eh bien cette phrase est d’actualité.
Si nous avons pu être enthousiasmés par la gauche de la gauche – qui a perdu 1,5 millions de voix entre 2012 et 2015 – , de nouveau enthousiasmés par une stratégie populiste de gauche – qui a quand même permis à Jean-Luc Mélenchon de faire près de 20 % à l’élection présidentielle avec une percée réelle auprès la jeunesse ce qui n’est pas rien -, le piètre résultat des législatives et la faiblesse du mouvement de résistance aux ordonnances Macron nous obligent à relativiser nos enthousiasmes et à engager les conversations nécessaires, voire les débats fraternels et productifs avec humilité.

Reprendre in fine l’offensive

Pour cela, il est nécessaire de prendre des initiatives pour globaliser les combats et rassembler dans ces combats. L’une d’entre elles vient d’être prise avec l’appel « Combat laïque, combat social, fédérer le peuple » (voir www.combatlaiquecombatsocial.net). Elle développe l’idée qui nous semble fort juste que, sans la liaison du combat laïque, du combat social et de tous les autres combats progressistes, point de salut ! Le communautarisme et les accommodements avec l’obscurantisme intégriste sont un cancer pour le mouvement social et politique. Ils tentent de nier la lutte des classes (pourtant pratiquée par l’oligarchie capitaliste) et empêchent le rassemblement et l’expression de la souveraineté populaire.
Il faut aider au développement de cette campagne. Mobilisez-vous et n’hésitez plus à organiser des réunions ou des conversations sur cette thématique dans le but de faire progresser collectivement le mouvement social et politique. Nous sommes à votre disposition pour en débattre.
Mais d’autres sujets doivent aussi nous alerter : la lutte contre les diktats de l’Union européenne et pour la construction de son alternative, la lutte pour la transition écologique et énergétique après la mascarade de la COP 21 dans laquelle de nombreux militants se sont perdus, la lutte contre les prochains mauvais coups (CAP 22 contre les services publics, assurance-chômage, retraites, etc.), le développement de la prostitution malgré la loi du 13 avril 2016 , les écarts scandaleux de salaires entre femmes et hommes, etc.

Quelques repères

D’abord ne pas se faire voler le mot patriotisme car il est nécessaire pour combattre les nationalismes. Ni le terme de démocratie, au vu des reculs actuels dans l’État mais aussi dans les organisations.
Pour nous qui plaçons au plus haut point la démocratie, et la pratique de type autogestionnaire de la Sécurité sociale à ses débuts, il est fondamental de comprendre pourquoi les dérives ont eu lieu, comment le processus de dénaturation a eu lieu. Car il n’y a pas de troisième voie. Toutes les troisièmes voies ont échoué ou échoueront. Donc, dans un affrontement, il faut comprendre pourquoi ceux que nous aurions suivis si nous vivions à leur époque ont échoué face aux dérives et ce que nous devons faire pour éviter ces dérives.
Les textes de ce numéro 862 nous entraînent à réfléchir aux débats que nous devons avoir. Lisez-les et dites- nous ce que vous en pensez.

Nous sommes loin de croire que l’on peut faire mieux en construisant à l’enthousiasme aujourd’hui pour décevoir demain. Il faut mener la lutte des classes mais nous avons toujours deux adversaires : le capital et les dérives dans notre propre camp. Voilà comment il faut expliquer notre positionnement de l’Appel  “Combat laïque et combat social” contre le communautarisme et le philo-islamisme d’une partie de la gauche et de l’extrême gauche française.

Dernières tendances du capitalisme mondial

Terminons notre propos d’aujourd’hui sur les modifications géoéconomiques globales qui préparent une évolution significative de la concurrence au sein de l’oligarchie mondiale capitaliste.
Jusqu’ici, la principale monnaie de réserve des différents pays du monde et la principale monnaie servant de base aux échanges énergétiques et des matières premières est le dollar. Aujourd’hui, les principales transactions mondiales transitent par le SWIFT (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication) dominé par le dollar. La Chine, avec quelques soutiens sur la « route de la soie », vient de créer un centre de transaction concurrent, le CIPS (Cross-Border Interbank Payments System). Bien évidemment, nous en sommes encore à un rapport de type « un cheval, une alouette », mais l’importance montante de pays comme la Russie, la Chine, l’Inde, l’Afrique du sud – par ailleurs grand producteur d’or – laisse présager une possibilité de montée en puissance. Intervenir sur le cours de l’or a une influence importante sur le cours des monnaies de réserve comme d’ailleurs pour les ressources d’énergie. Le lancement, l’année dernière d’un emprunt d’Etat russe en yuans chinois est sans doute un début de processus. Nous verrons comment le rapport des forces évoluera dans l’avenir.
En attendant, nous vous souhaitons à toutes et à tous la meilleure année possible pour vous et vos proches.

 

  1. Allez, un apéro gratuit à celui qui trouve ! []
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Lutter contre les discriminations ? Certes ! Et contre les inégalités ?

par Alain Beitone

 

Le texte ci-dessous est la synthèse d’un texte initialement paru en août 2016. Le texte complet est disponible sur le site du Groupe de Recherche sur la Démocratisation Scolaire

L’administration de l’éducation nationale met l’accent sur les discriminations. Plusieurs initiatives en témoignent : la mise en place par exemple d’un réseau de lutte contre les discriminations au sein de l’Institut Français d’Education (IFI) en 2013 ou bien la publication en février 2016 d’un rapport sur les discriminations dans l’académie de Créteil. Dans le même temps, certains réseaux militants considèrent que les discriminations ethno-raciales sont le problème principal de l’École.

Il faut en premier lieu définir ce que l’on entend par discrimination car il n’y a pas de débat sérieux quand on ne précise pas avec rigueur le sens des mots que l’on utilise. En France, les comportements discriminatoires sont sanctionnés par la loi (article 225-1 du Code Pénal). Une discrimination est un traitement défavorable infligé à un individu sur la base d’un critère illégal. Si l’on verse des salaires inégaux à deux individus en fonction de leurs différences de qualification, il ne s’agit pas d’une discrimination. Mais si l’inégalité de salaire repose sur des différences ethniques ou de genre, elle en devient une.

Pour démontrer qu’il y a discriminations ethniques au sein de l’école, il faut donc prouver que des élèves obtiennent de moins bons résultats et des orientations moins favorables, en raison de leur origine ethnique.

Or tous les travaux scientifiques, depuis le texte de J.P. Caille et L.-A. Vallet (1996) jusqu’à la récente enquête « Trajectoires et origines » conduite par l’INSEE et l’INED (2016), démontrent que toute choses égales par ailleurs (le revenu de la famille, le diplôme des parents, le lieu de résidence, etc.) les résultats des élèves issus de l’immigration sont identiques à ceux des élèves issus de la population majoritaire. Pour certains d’entre eux, notamment les enfants issus d’Asie, les résultats des élèves issus de l’immigration sont même meilleurs. Il n’y a donc pas discrimination dans l’école française. Les travaux qualitatifs (souvent ethnographiques) confirment par d’autres méthodes, cette conclusion. F. Lorcerie, sociologue pourtant sensible à la question des discriminations, déclare à partir de la définition juridique des discriminations : « Dans ce sens-là, il n’y a pas de discrimination dans l’École française à raison de l’origine des élèves. Du moins les données d’enquête disponibles n’y concluent pas ». De même, dans un ouvrage consacré aux discriminations, F. Dubet et ses co-auteurs écrivent : « Il n’est guère possible d’affirmer que l’école discrimine, au sens où elle traiterait différemment et de manière systématique telle catégorie d’élève du fait de son origine ethnique» (Dubet et alii, 2013, p. 221).

Il y a bien d’importantes inégalités au sein du système scolaire, mais leur origine se trouve d’une part dans les inégalités sociales et économiques entre les familles et d’autre part dans la pratique très répandue dans l’école d’une « pédagogie invisible » avantageant les élèves culturellement favorisés et défavorisant les autres.

Si l’on veut lutter contre les inégalités de réussite scolaire, il faut donc lutter contre les inégalités sociales (quartiers ghettos, emplois précaires, niveau très élevé du chômage, etc.), mais il faut aussi changer de paradigme pédagogique et proposer à tous les élèves une école de l’exigence intellectuelle (Terrail, 2016).

Il faut rappeler que la mise en avant du thème des discriminations trouve son origine dans la pensée économique libérale (Gary Becker notamment). Pour ces penseurs libéraux, les inégalités qui découlent de discriminations sont injustes et doivent être combattues, mais que les autres inégalités qui résultent du fonctionnement « normal » du marché sont justes et doivent être acceptées. En affirmant que le problème primordial de l’école est la discrimination ethno-raciale, on passe délibérément ou pas, à côté du problème essentiel. Il ne s’agit pas de lutter contre le « racisme » inconscient des enseignants « blancs », mais de faire en sorte que l’école contribue dans toute la mesure de ses moyens qui sont grands, à faire une école qui soit au service des élèves qui n’ont que l’école pour apprendre. Des solutions existent, elles reposent sur des analyses robustes (celles du GRDS ou celle du groupe ESCOL de Paris VIII).

S’il y a des pratiques discriminatoires au sein de l’école, il faut les dénoncer au procureur de la République qui doit les poursuivre. Pour le reste, il faut exiger pour l’école les moyens qui lui permettraient de mettre en œuvre une égalité des apprentissages. Car les élèves sont tous capables d’apprendre pour peu qu’on leur propose de vrais enjeux cognitifs et une pédagogie explicite leur permettant de s’approprier les savoirs leur permettant de penser le monde de façon autonome.

 

Références bibliographiques

 

Beauchemin C., Hamel C., Simon P. (2016), Trajectoires et origines, Editions de l’INED.

Caille J.P. et Vallet L.-A. (1996), Les élèves étrangers ou issus de l’immigration dans l’école et le collège français. Une étude d’ensemble, Les dossiers d’éducation et formation, n°67.

Dubet F., Cousin O., Macé E., Rui S. (2013), Pourquoi moi ? L’expérience des discriminations, Seuil.

Lorcerie F. (2009), Dans l’école les classements ethniques sont en usage, Entretien avec F. Jarraud, Le Café pédagogique, 15 janvier 2009.

Terrail J.-P. (2016), Pour une école de l’exigence intellectuelle. Changer de paradigme pédagogique, La dispute.

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"L’École de demain, Propositions pour une Éducation nationale rénovée", par Jean-Michel Blanquer

par Jean-Noël Laurenti

 

Compte rendu publié dans Études franco-anciennes, Revue de l’Association des Professeurs de Lettres, n° 163, septembre 2017, pp. 50-52 (http://www.aplettres.org)

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Jean-Michel Blanquer, L’École de demain, Propositions pour une Éducation nationale rénovée, Odile Jacob, 2016, 152 p.

Jean-Michel Blanquer, actuellement ministre de l’Éducation nationale, a été recteur de l’académie de Guyane, de l’académie de Créteil, et directeur général de l’enseignement scolaire sous Luc Chatel ; il se réclame des orientations de l’Institut Montaigne. Cet ouvrage aux intentions pédagogiques affichées, est écrit dans un style clair et concis ; le jargon abstrait n’en est pas absent, mais il en est fait un usage modéré.

Les six chapitres, « L’école maternelle », « L’école élémentaire », « Le collège », « Le lycée », « La carrière des professeurs », « L’organisation du système éducatif », sont tous structurés de la même façon : « Ce que nous enseigne l’expérience », « Ce que nous enseigne la comparaison internationale », « Ce que nous enseigne la science », « Ce qu’il faut faire », avec deux sections : « Scénario fondamental », « Scénario optimal ». Chaque chapitre est terminé par des « Mesures-clés » en manière de synthèse.

Pour l’école maternelle et l’école élémentaire, les orientations les plus saillantes sont la priorité accordée à la langue, par l’« immersion langagière », mais aussi par l’apprentissage de la grammaire et du vocabulaire, et au souci de diffuser des techniques pédagogiques d’une efficacité reconnue, privilégiant un enseignement explicite, et d’améliorer en ce sens la formation des professeurs (l’auteur se garde manifestement de donner à croire qu’il souhaite l’instauration d’une pédagogie officielle). Plutôt que le soutien, pratiqué au cours de la scolarité et souvent peu efficace, il préconise la détection et le traitement précoces des difficultés des élèves et, à cette fin, la division par deux des tailles des classes à l’école maternelle, prioritairement en REP ; il propose également l’affectation des maîtres les plus expérimentés dans les niveaux cruciaux, grande section de maternelle et CP. À l’école élémentaire, dont les horaires ont été réduits au fil des décennies, depuis les 30 heures par semaine de 1960, il propose d’« assurer au moins 26 heures de cours effectives à tous les enfants dont 20 heures consacrées aux savoirs fondamentaux », ainsi que des stages de remise à niveau en été. Il préconise enfin le renforcement de la « présence des arts » en maternelle et, à l’école élémentaire, la transmission des « grands textes », la promotion de la lecture.

Le collège, affirme l’auteur, se situe dans la continuité de l’école élémentaire. D’où la proposition d’introduire progressivement deux enseignants (sciences et lettres-humanités) à partir du CM1. L’accompagnement des élèves dans leur travail se poursuit également à travers la proposition d’instituer 2 heures d’études dirigées obligatoires tous les jours après la classe. Le lycée, lui a pour vocation de transmettre les « humanités du XXIe siècle » : l’auteur propose de réduire les filières générales à deux, une filière scientifique et une filière littéraire et économique. Pour le baccalauréat professionnel, il est dit qu’il devrait aboutir à l’emploi, c’est-à-dire, à mots couverts, qu’il ne devrait pas mener à l’université.

À côté de propositions qui prêtent à discussion, on en trouve là beaucoup qui vont dans le sens des vœux de l’APLettres. Mais on y trouve aussi des ambiguïtés et des imprécisions. La référence en matière de contenus étant le « socle de compétences », on peut craindre que les ambitions en matière d’humanités ne puissent dépasser les rudiments : ainsi, bien qu’on ne puisse qu’approuver l’idée, énoncée à propos de l’école élémentaire, de restaurer un enseignement de l’histoire et de la géographie de la France qui soit simple, clair et progressif, on peut se demander comment il sera garanti qu’on ne reviendra pas néanmoins à un équivalent moderne du Tour de France de deux enfants, que le retour indispensable au factuel et au narratif (dont le dénigrement a été l’arme des réformes obscurantistes passées) s’accompagnera d’une dimension critique, et qui replace la France dans le reste du monde. À cette restauration de l’histoire il n’est fait allusion d’ailleurs que fugitivement : pour le lycée, on se demande en quoi consistent les « humanités du XXIe siècle », en quoi elles se distinguent des humanités tout court, si elles ne sont pas plus proches des sciences sociales ou de l’anthropologie, à la manière des humanities anglo-saxonnes, ou bien si elles ne se réduisent pas à de simples connaissances générales (dont le « numérique », sur lequel l’auteur insiste à mainte reprise) qui favorisent l’« employabilité » et l’« adaptabilité » plus que la formation personnelle de l’homme et du citoyen. Par ailleurs, à côté des ambitions critiques, qui sont certes présentes, on trouve l’idée de transmettre des « valeurs », « respect », voire « service d’autrui », notion que les philosophes des Lumières utilitaristes ont certes fondées en raison, mais qui, présentées comme des « valeurs » (donc relevant par essence de choix subjectifs ou de croyances collectives), risquent de relever plutôt du formatage affectif, auquel d’ailleurs les adolescents sont souvent rebelles, et ressemblent un peu à l’« empathie » et à l’« engagement », notions sentimentales qui figurent illégitimement dans le « socle commun ».

Plus inquiétante est la proposition de refonte du fonctionnement du système éducatif et du statut des personnels. Autonomie et contractualisation sont les maîtres mots. Au-delà d’horaires minimum (10 heures par semaine en mathématique et français tout au long du collège), les établissements seraient maîtres de l’affectation des horaires, en fonction d’un projet « partagé par toute la communauté éducative » (et que se passe-t-il si un professeur n’est pas d’accord ?), mis en œuvre par un chef d’établissement assisté d’une équipe « rapprochée » de cinq à dix personnes, qui noterait lui-même les personnels, eux-mêmes recrutés par lui sur profil. Du côté des élèves et des parents, ce serait le choix de parcours personnalisés (le collège deviendrait « commun » et non plus « unique ») et la carte scolaire « élargie » favoriserait l’éventail de choix des établissements. L’inspection, elle, aurait mission de procéder à l’audit des établissements.

Les arguments en faveur d’un tel bouleversement sont bien connus : il s’agit de favoriser l’implication des personnels, mais aussi des parents et des élèves, de les motiver par des projets, d’éviter que la logique administrative n’expédie des professeurs dans des établissements qui ne correspondent ni à leurs vœux ni à leurs capacités. C’est une logique d’entreprise bien connue. Mais l’école, institution de la République, n’a pas à être une entreprise. Si l’autonomie peut être stimulante pour les établissements favorisés, son envers pour les autres sera inévitablement qu’ils se retrouveront souvent livrés à eux-mêmes, sur la pente où les poussent le milieu social ou culturel dans lequel ils sont implantés, les pressions diverses, économiques, sociales, voire religieuses, et dans cette jungle on ne voit pas en quoi un audit, nécessairement ponctuel, pourrait y remédier : la seule mesure drastique proposée est la fermeture des « collèges dont les résultats sont trop faibles ». On se demande alors comment le parcours personnalisé des élèves les plus défavorisés pourra être autre chose que l’acceptation de leur sort, en dehors de toute ambition à laquelle ils pourraient objectivement prétendre. En matière d’horaires, également, nul doute que des pressions ne s’exercent sur les établissements de quartiers populaires pour qu’ils se détournent des langues anciennes (celles-ci, dont il est d’ailleurs très peu question dans l’ouvrage, sont précisément présentées comme des « choix d’excellence ») alors qu’elles devraient être proposées à tous les élèves parce qu’elles sont un instrument irremplaçable dans la maîtrise de la langue et l’acquisition d’une culture. De même, si le professeur est noté par son chef d’établissement, on imagine les pressions arbitraires, pour raisons idéologiques, copinage de carrière, préférences personnelles voire harcèlement, qui peuvent s’exercer au détriment de leur liberté et de leur efficacité pédagogiques : la présence vigilante de l’État républicain se justifie précisément par sa fonction fondamentale qui est d’éviter cette guerre de tous contre tous. Se dispenser d’imaginer de telles dérives, penser que l’avenir harmonieux brossé par Jean-Michel Blanquer ne peut que se réaliser, c’est s’en remettre à la mythique « main invisible » d’Adam Smith. Dans les années 1980-1990, le pédagogisme voyait aussi un univers paradisiaque dans l’école où l’« apprenant » construisait lui-même son propre savoir : cette vision angélique se retrouve, d’une certaine façon, dans l’école libérale.

Réaffirmons donc que l’excellence et la culture ne sont pas réservée à ceux qui peuvent, mais qu’il est de la responsabilité de l’État de la dispenser à ceux qui ne peuvent pas ; que la formation critique, fondamentale dans la formation de l’homme et du citoyen et donc destinée à tous, repose sur une culture humaniste consistante qui ne se confond pas avec les rudiments nécessaires à l’« employabilité » des individus ; et que les ambitions affichées par Jean-Michel Blanquer, ambitions de bon sens en matière de contenus et de méthodes pédagogiques, méritent d’être affirmées, précisées, et présentées de manière que tous puissent en bénéficier.

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Où va la SNCF ?

par Didier Le Reste

 

Assemblée Générale Annuelle De la Convergence Nationale Rail (CNR)

Après avoir fait observer une minute de silence en mémoire des jeunes victimes, disparues dans la dramatique collision entre un TER et un autocar scolaire survenue jeudi 14/12 à un passage à niveau situé sur la commune de Millas (P.O), Didier Le Reste, Président de la CNR a présenté le rapport des activités 2017 de l’association.

Depuis notre AG de 2016, beaucoup d’évènements se sont produits tant aux plans politique, social, sociétal et de façon corrélative au niveau des politiques de transports.

Sans approfondir le sujet, il convient d’évoquer la séquence électorale de cette année qui a débouché sur un bouleversement de l’échiquier politique qui n’est jamais neutre.

Pour cette occasion, conformément aux décisions de notre AG de 2016, nous avons proposé à nos collectifs, à nos comités, de soumettre notamment aux candidat-e-s aux législatives, un pacte de progrès du Service Public ferroviaire reprenant nos principales propositions structurantes.

Comme souvent dans ces périodes et dans ce genre de démarche, nous enregistrons des fortunes diverses et variées mais avec plusieurs dizaines de retours, nous avons pu être présent dans le débat public portant sur les enjeux du Service Public ferroviaire qui fondent un choix de société.

En janvier 2017, la Fédération CGT des cheminots tenait son 43ème congrès à St Malo.

Au cours de ce congrès, la CNR représentée par Sylviane ARNAC du CODELIAPP a pu participer à une table ronde relative à l’état du Service Public ferroviaire, à son avenir et aux convergences à renforcer entre cheminots, usagers et les élus qui défendent une conception progressiste du chemin de fer.

Dans le même ordre d’idée, signalons le succès du Forum des associations du 5 octobre dernier organisé par la Fédération CGT des cheminots auquel ont participé plusieurs collectifs adhérents à la CNR.

Notre camarade Daniel Coffin de CODERAIL représentait la CNR à la tribune de ce forum à l’issue duquel un compte-rendu a été diffusé.

Afin de prolonger concrètement cette initiative qui a vu la participation de 45 associations d’usagers, de responsables politiques et syndicaux il a été proposé et nous vous y engageons, d’élaborer en territoire, en convergence avec d’autres forces un plan d’urgence pour le Service Public ferroviaire que l’on pourra mettre au centre de mobilisations et autres initiatives.

Notons pour terminer sur ce point que la publication « la vraie info » éditée à 500 000 exemplaires par la CGT cheminots a été fortement appréciée par les usagers du rail et au-delà.

Comme nous l’avons souligné dans un courrier en date du 31/10 dernier à E. Borne, nouvelle Ministre des transports, les inaugurations de juillet 2017 en grandes pompes des LGV Paris-Bordeaux et Paris-Rennes (qui auraient coûté en global 6 millions d’euros !), n’ont pas masqué longtemps les mauvais coups qui continuent de s’abattre sur le Service Public ferroviaire, générant des conséquences de plus en plus pénalisantes pour les usagers et au-delà pour la vie des territoires.

Malgré les mobilisations, qu’elles soient à l’initiative d’associations d’usagers ou des cheminots avec leurs syndicats, les fermetures de guichets, de boutiques, de gares continuent, des arrêts et des trains sont supprimés comme les TET (Trains d’Équilibre du Territoire/ Train corail…), singulièrement les trains de nuit, nous connaissons toujours des trains surchargés et en retard, des correspondances inadaptées et désorganisées, la poursuite du démantèlement de l’activité du transport de marchandises par train avec la menace de nouvelles fermetures de triages comme celui de Nîmes ou du triage de Miramas qui mettrait 300 000 camions supplémentaires sur les routes !

Pour se donner bonne conscience, la SNCF est partenaire du train du climat, stationné cette semaine en Gare de Paris-Est qui porte l’enjeu de la lutte contre le réchauffement climatique et en matière de transport de favoriser les modes les plus économes en énergie, les moins polluants, comme le rail, alternatifs à la route qui est responsable de près de 30% des émissions de Gaz à effet de serre (GES) contre 0.4% pour le train !

Donc des ambitions, des préconisations, même des décisions mais qui se heurtent aux politiques menées par la SNCF et son groupe, fort de près de 1 200 filiales et sous-filiales, principalement routières.

Pour les usagers et leurs associations, il y a chaque jour la cruelle réalité qui s’impose, à savoir que la qualité de service se dégrade alors que les nouvelles autorités politiques ont déclaré à plusieurs reprises qu’elles souhaitaient améliorer les transports du quotidien et marquer une pause dans les grands chantiers d’infrastructures.

Cette situation semble pour le moins controversée et présente de par les actes politiques posés de nouvelles contradictions.

En IDF par exemple le métro du Grand Paris Express (GPE), qui a pourtant fait l’objet de très longues et nombreuses négociations entre les principaux acteurs des territoires concernés semble menacé par l’abandon total ou partiel de certaines de ses lignes comme les lignes 16 et 17 notamment… sous prétexte d’austérité budgétaire.

Par contre la relation ferroviaire directe entre la Gare de l’Est et l’aéroport de Roissy dénommée CDG Express est quelques part sur les rails, puisque l’État, malgré ce qui a été déclaré, s’engage à le financer sur fonds publics !

Chiffres 2017 et de source interne, ce sont plus de 2 milliards d’euros qui seraient engloutis dans ce projet qui ne va concerner qu’une population restreinte (17 000 voyageurs / jour, alors que le RER B transporte près de 900 000 passagers/jour !), relativement aisée puisque le billet aller simple est estimé aujourd’hui entre 27 et 29 euros.

De plus cette circulation comme l’a bien pointé le rapport du STIF (syndicat des transports d’Ile-de France) va générer des impacts négatifs en terme de ponctualité sur les lignes B, K, Ter Picardie et pour les trains de Fret.

Les mobilisations s’organisent contre ce projet afin que l’argent public disponible soit utilisé à répondre à l’intérêt général en améliorant les conditions des transports du quotidien qui en ont bien besoin.

Des associations ont déposé des recours, des requêtes en annulation au Conseil d’État.

En matière de dysfonctionnements, d’incidents affectant la chaîne, la continuité du Service Public ferroviaire, comment ne pas revenir en deux mots sur ce qui a perturbé voire paralysé le trafic ferroviaire à 3 reprises depuis l’été dernier en gare de Montparnasse. Cette situation est assez révélatrice des faiblesses, des failles, des maux dont souffre le Service Public ferroviaire.

Rappelons que du 29/07 au 01/08 les circulations TGV au départ et à l’arrivée de la Gare Montparnasse ont été supprimées à cause d’un dérangement au poste de commande de signalisation de Vanves-Malakoff, le 3 décembre dernier nouvelle journée très difficile pour les usagers de la SNCF, sans parler de la panne électrique qui a affecté la Gare de Montparnasse et son fonctionnement ces tous derniers jours.

Ces situations mises bout à bout mettent en exergue le retard dans les investissements de modernisation des installations, les conséquences de la sous traitance et de l’empilage des réorganisations menées à marche forcée, la réduction drastique des moyens humains et le désengagement financier progressif de l’État actionnaire !

Malheureusement, il semble que de nouveau les vrais enseignements liés à ces situations dégradées et fort pénalisantes ne seront pas tirés.

Les autorités essaient de s’en sortir en invoquant l’absence de communication et en sommant de façon théâtrale les dirigeants de la SNCF de s’expliquer et de produire dans des délais impossibles des plans d’actions.

Ce sont là des gesticulations médiatiques qui ne doivent tromper personne. Les maux dont souffre le Service Public ferroviaire demeurent et vont perdurer.

Au stade de ce rapport, je veux souligner pour la saluer, la belle mobilisation de citoyennes et de citoyens avec d’autres forces organisées portant sur la sauvegarde des trains de nuit sous l’impulsion du Collectif « Oui aux trains de nuit » dont nous accueillons avec plaisir aujourd’hui un de ses représentants, Nicolas Forien.

Ce collectif a depuis des mois organisé sur plusieurs sites (Perpignan, Pau, Tarbes,Nice, Gare de Lyon, Gare d’Austerlitz, Capdenac…), des initiatives auxquelles ont pu participer des représentants de la CNR.

A ce titre, la CNR a appuyé auprès de la DG SNCF, du Ministère des Transports, du Ministre Hulot en charge de la transition écologique et solidaire, le maintien du train de nuit la Palombe Bleue.

A la demande du collectif « Oui aux trains de nuit » la CNR a créé les conditions pour que ce dossier soit évoqué à l’Assemblée Nationale avec l’idée de faire engager une mission d’information parlementaire sur le potentiel des trains de nuit à fortiori que la SNCF a semble-t-il tronqué les chiffres pour justifier l’abandon de ces circulations de nuit.

Nous avons donc monté une délégation CNR à laquelle nous avons associé Nicolas Forien du collectif Oui aux trains de nuit qui a été reçue à l’Assemblée Nationale le 27 septembre 2017 par le député Hubert Wulfranc du groupe CRC. Celui-ci est membre de la Commission du développement durable et de l’aménagement des territoires de l’Assemblée Nationale par le biais de laquelle il a demandé la création d’une mission parlementaire.

Comme nous n’avions pas encore de réponse de la Présidente de la Commission, ni du bureau de l’Assemblée Nationale, j’ai demandé ces derniers jours que l’on relance la question en suggérant que quelque soit le nom de baptême, mission, commission, étude, enquête, il convenait qu’il y ait des actes parlementaires de produits sur l’enjeu des trains de nuit. Ce combat est à poursuivre et à amplifier autour de ce beau slogan « sortons les trains de nuit de leur sommeil ! »

Le Président G. Pépy qui n’a jamais aimé le train, s’est cru autorisé de déclarer lors du récent congrès de la FNTV (fédération nationale des transports de voyageurs) je le cite « La SNCF a l’ambition que le car TER soit meilleur que ce que le train peut faire ».

C’est cette philosophie qui l’a conduit à vouloir supprimer 7 relations d’auto-train sur 11 et à continuer à maintenir sous perfusion à coups d’argent public sa filiale d’autocars déficitaire OUIBUS qui, sur nombre de relations, concurrence les TGV et les TET (trains corail…).

La CNR s’est fendue d’un communiqué de presse très virulent pour condamner ces politiques mortifères.

Pour poursuivre dans le bilan de nos activités, il faut indiquer qu’à notre demande nous avons été reçu le 9 mars dernier par le cabinet du Ministre des transports d’alors, Alain Vidalies.

Ce n’était pas une période propice, puisqu’à proximité d’échéances électorales politiques, mais nous avons pu exposer nos avis, arguments, propositions en matière de Service Public ferroviaire, remettre des documents et défendre les dossiers que nous ont confiés nos collectifs comme ceux de la Creuse à propos de l’avenir de la Gare de la Souterraine, du CODERAIL de la région de Montluçon ou encore les questions transmises par le MNLE PACA au sujet des velléités du Président du Conseil Régional d’alors (ESTROSI…) voulant remplacer les trains par des bus sur 4 lignes de la Région.

Comme vous le savez, le Gouvernement a lancé les Assises Nationales sur les Mobilités qui doivent déboucher au 1er semestre 2018 sur un projet de loi d’orientation des Mobilités dénommée LOMI qui pourrait remplacer la LOTI (loi d’intégration des Transports Intérieurs) de 1982 et sur la création d’un Conseil National des Infrastructures. L’affaire est donc très sérieuse…

Cela dit, ce qui nous remonte à l’instar de ce qui s’est passé dans la COP21, dans la loi sur la transition énergétique, dans le Plan Hulot… on parle très peu si non pas de transports publics, de report modal, de rail public. On phosphore, même si cela recouvre un certain intérêt, sur le covoiturage, les circulations douces, l’auto-partage, les voitures autonomes, le vélo électrique, les

applications numériques… C’est bien mais cela ne répondra pas de façon efficace aux enjeux environnementaux qui sont posés et au nécessaire transport de masse dont on a besoin.

Par contre ce qui doit nous interpeller en tant qu’association d’usagers du Rail, qui porte la défense et le développement du Service Public ferroviaire, c’est la mission qu’a confié le Premier Ministre à M. Spinetta, l’ancien PDG Air France-KLM dans le cadre de ses Assises, à savoir : « préparer une stratégie d’ensemble pour refondre le modèle du transport ferroviaire dans le cadre d’un marché ouvert à la concurrence ! »

On ne peut pas être plus clair sur les objectifs poursuivis.
La CNR a donc été auditionnée à sa demande par M.
Spinetta le 28 novembre 2017.

Vous avez pu apprécier au travers du compte-rendu que nous avons rédigé que les 2H d’audition ont été mises à profit à des échanges nourris et intenses.

Si nous avons pu ébranler Mr.Spinetta sur certaines de ses approches, il nous a bien fait comprendre que ce qui l’animait était bien les conditions de l’ouverture à la concurrence privée des activités ferroviaires.

Nous avons là encore pu exposer des cas concrets de la détérioration du Service Public ferroviaire en territoire au point que Mr ; Spinetta s’est dit intéressé pour en savoir plus sur ce que nous appelons la « désaffection organisée des trains » TET (trains d’équilibre du Territoire), Trains de nuit en particulier…

Les nouvelles velléités pour forcer l’ouverture à la concurrence prolongent ce qu’a engagé depuis longtemps la SNCF avec l’approbation des gouvernements et qu’elle accélère dans la période avec de nouvelles contraintes pour l’exercice du droit de grève afin de limiter la capacité des salariés à s’opposer aux mauvais coups !

Plus proche de nous, l’abandon de l’appellation TGV qui est pourtant le produit du travail de générations de cheminots, du savoir-faire français en matière ferroviaire et a fait notre renommée de par le monde, participe de la volonté de gommer toute référence à l’histoire du Service Public ferroviaire et ce qu’elle implique.

Même si nous n’avons pas pu répondre à toutes les sollicitations nous nous sommes efforcés de faire le maximum de nos possibilités.

Nous avons avec les membres du bureau notamment pu aussi participer à des initiatives, à des débats en territoire. Aurélien Djament notre Vice-Président a participé au débat organisé à la Fête de l’Humanité par la Convergence Nationale des collectifs de défense et du développement des Services Publics avec laquelle nous devons renforcer notre partenariat.

En matière de partenariat nous avons en Mars dernier lancé un Appel avec INDECOSA-CGT, l’association des consommateurs de la CGT, visant à renforcer le Service Public ferroviaire au service de tous les citoyens de notre Pays.

Cet appel que nous avons tenté en vain d’élargir à d’autres structures comme la CNAFAL, la CNL, l’AFOC se voulait être une réponse à six Fédérations d’usagers et opérateurs de transport qui

plaidaient auprès des candidats à la Présidentielle pour l’expérimentation à la concurrence dans les TER avant 2026 !

Malgré un contexte difficile et peu propice au développement du Rail Public, on peut quand même souligner qu’il y a quelques mois un premier train ouvert aux voyageurs a pu finalement circuler entre Chartes et Voves, ce qui n’était pas arrivé depuis 75 ans !

Des choses bougent côté Région OCCITANIE, sous l’impulsion de Jean-Luc Gibelin Vice-président en charge des transports et ce malgré les freins mis par la SNCF. On vient de nous annoncer la signature de la convention TER pour 8 ans ! C’est un exemple à suivre !

Suite aux États Généraux du Rail organisés par cette Région il a été acté la priorité de la réouverture aux voyageurs de la ligne Rive Droite du Rhône.

Peut-être allons-nous assister à un retour du transport de marchandises à partir du triage ferroviaire de Villeneuve Saint Georges, dans la défense duquel la CNR s’est impliquée.

Il y a donc eu récemment l’annonce d’une signature d’un contrat d’intérêt National entre l’État, les collectivités territoriales, le Groupe public Ferroviaire SNCF garantissant la vocation industrielle et ferroviaire du site.

Enfin pour terminer sur le spectre de nos activités comme nous nous y étions engagés, nous avons produit un certain nombre d’expressions servant aussi d’argumentaires, spécifiquement sur les trains de nuit, sur les TET, sur la concurrence…

Et là nous avons entre autres chantiers un APPEL/MANIFESTE que nous pourrons verser en complément de notre audition comme contribution aux Assises Nationales sur la Mobilité.

Comme vous le voyez le menu a été copieux et le demeure mais nous avons toujours bon appétit !

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"Un court moment révolutionnaire dans la révolution prolétarienne, par Julien Chuzeville

par Stéphane Julien

 

Texte paru dans La Révolution prolétarienne (décembre 2017) et repris du site de l’éditeur (http://www.editionslibertalia.com/blog/un-court-moment-revolutionnaire-la-revolution-proletarienne-1712). Y voir aussi l’entretien avec l’auteur.

Julien Chuzeville poursuit son travail d’historien du mouvement ouvrier sur la période de la Première Guerre mondiale et des premières années du PCF, avant sa rapide « bolchevisation » qui fut à l’origine de la fondation de notre revue. Il remet à leur juste (et importante) place des militants comme Fernand Loriot et Pierre Monatte, sait contextualiser les dynamiques et les choix et se placer dans les logiques des générations militantes de l’époque : dégoût de l’Union sacrée, besoin de retrouver la lutte de classe avec des perspectives socialistes révolutionnaires, dépassement des clivages d’avant-guerre dans une période de remontée des mobilisations, sentiment d’urgence, d’imminence des possibilités anticapitalistes, besoin de refondation d’organisations de lutte débarrassées de la collaboration avec l’État et la bourgeoisie, solidarités forgées ou renforcées dans la répression politique, etc.
La guerre avait quasiment tout emporté, la faillite avait été quasiment totale : le socialisme international et même une bonne partie des anarchistes avaient sombré. C’est grâce au syndicalisme révolutionnaire que la flamme internationaliste a survécu et, avec notamment le Comité pour la reprise des relations internationales (CRRI) devenu après-guerre Comité de la IIIe Internationale, qui a initié un redressement du mouvement ouvrier. La scission au Congrès de Tours « était, en fait inévitable. Les débats sur l’attitude à adopter face à cette guerre longue et particulièrement meurtrière […], puis l’attitude face à la situation perçue comme révolutionnaire en Europe, avaient rendu la scission déjà effective dans les esprits ». 
Si la séparation entre PS et PC devait par la suite diviser la gauche pour plusieurs décennies, les deux organisations étant actuellement en piteux état, il ne faut pas faire d’anachronisme : « Loin d’être considérée comme une rupture avec le socialisme, la transformation en SFIC est vue comme la réaffirmation d’un socialisme plus authentique. » La « bolchevisation » n’était pas encore passée par là.
Les militantes féministes passèrent toutes au PC, nombre d’entre elles devaient d’ailleurs écrire bientôt dans La RP. De nombreux syndicalistes révolutionnaires rejoignirent aussi le parti, dans une recomposition sur des clivages révélés par la guerre. Pourtant, le dynamique PC fondé ne décollait pas. Julien Chuzeville considère qu’il avait tort d’affirmer la révolution imminente alors qu’après 1921 les luttes sociales refluèrent, créant ainsi un désarroi sur le long terme. La rapidité de sa dégénérescence s’en expliquerait : « Comprenant mal les causes de son recul, le PC cherche à y pallier par des mesures internes qui non seulement n’arrangeront rien, mais même accentueront le problème. Cette situation facilite la progressive mise sous contrôle par l’IC et l’instauration d’un appareil de direction bureaucratique aux ordres de, et payé par Moscou. C’est un cercle vicieux : l’instabilité interne du PC renforce la mise sous tutelle par le Komintern, et cette dernière crée de nouvelles tensions au sein du parti. » 
Alors que les militants zimmerwaldiens avaient été les pionniers du ralliement de la SFIO à la Nouvelle Internationale, « les anciens du CRRI sont particulièrement présents dans les rangs oppositionnels, ils quittent le parti ou en sont exclus principalement entre 1924 et 1927 ». Après l’exclusion de Monatte et Rosmer, le PC est déjà un autre parti, aux ordres de la bureaucratie de Zinoviev, prêt à passer au stalinisme en germe.
Ici comme régulièrement, les éditions Libertalia sortent un livre tout à fait bienvenu sur le fond et sur la forme, d’un rapport qualité-prix devenu rare.

 

Courrier des lecteurs
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A propos de "Religion, violence et radicalisation"

par ReSPUBLICA

 

Courrier de Jean-Pierre Castel à l’auteur de l’article, Jean-Noël Laurenti

Je souhaite réagir à votre article “Religion, violence et radicalisation” .
Je ne suis pas d’accord lorsque vous dites : « les monothéismes… pourraient bien être plus violents que les autres. .. Mais cela ne signifie pas que les autres religions ne portent pas en elles la violence … comme le montre le procès de Socrate … et les persécutions contre les chrétiens, motivées par le fait qu’ils ne reconnaissaient pas les dieux de l’Olympe ». 
Il n’est pas besoin d’aller chercher Socrate ou les persécutions romaines pour trouver de la violence au sein des religions : le sacrifice, c’est-à-dire la violence rituelle, est au cœur de la plupart des religions. Mais précisément, c’est une violence rituelle, encadrée, limitée par le rituel. Toute autre est la violence monothéiste, celle qui consiste à détruire les dieux d’autrui pour imposer le sien. Cette violence là, sauf contre exemple que je serais intéressé à découvrir, est spécifique aux religions abrahamiques : aucune autre religion n’a jamais, avant la mondialisation du XXe siècle, cherché à détruire les dieux d’autrui pour imposer le ou les siens. 
Dans le procès de Socrate et de l’exil de quelques autres philosophes grecs, l’offense aux dieux n’était qu’un prétexte ‒ Socrate a d’ailleurs récusé cette accusation, alors que les acteurs des violences monothéistes au contraire s’en glorifient ‒ pour dissimuler une cause politique ‒ son appui aux tyrans dans le cas de Socrate, motif devenu juridiquement irrecevable pour cause d’amnistie. Quant aux persécutions romaines, elles n’étaient pas motivées par les croyances des chrétiens ‒ la religio romaine n’avait rien à faire des croyances ‒, mais par leur refus de certaines obligations civiques, par exemple le service militaire, qui redeviendra comme par hasard obligatoire pour tous les chrétiens …dès que le christianisme sera devenu religion officielle. 
Le Pape François et le journal La Croix estiment aujourd’hui que « les martyrs chrétiens n’ont pas été si nombreux aux premiers siècles…[Même un apologiste comme] Eusèbe de Césarée, qui a écrit sur les martyrs en Palestine, n’en recense qu’environ une quarantaine [en Palestine], même pendant la Grande persécution [celle de Dioclétien] » . Le spécialiste de l’Antiquité tardive Pierre Maraval explique que « les mesures [de persécution] ont été peu appliquées en Occident, même à Rome, où de surcroît les témoignages sont peu fiables, et presque pas en Gaule » . Comparer les procès de quelques philosophes grecs et les quelques vagues de persécutions romaines aux violences récurrentes et systématiques perpétrées par la chrétienté au nom de l’extirpation de l’hérésie et d l’idolâtrie, c’est confondre l’exception et la règle.
En résumé, détruire les dieux d’autrui pour imposer le ou les siens constitue une motivation de violence inventée par les religions abrahamiques, inconnue des autres religions avant le XXe siècle.
Quant à postuler que c’est la misère sociale ou psychologique qui crée les djihadistes, n’est-ce pas confondre les conditions qui créent les mercenaires avec la cause qui les enrôle ? Il est de fait que pour nombre de « djihadistes européens », le terrorisme vient satisfaire une frustration ou une pulsion de violence qui n’avait à l’origine rien de religieux. Il existe mille et unes raisons pour devenir mercenaire. Et d’ailleurs l’un des constats les mieux partagés est la diversité des profils de nos « djihadistes européens ». Ces « djihadistes européens » n’en sont pas moins engagés dans une guerre de religion qui les dépasse, au même titre qu’un mercenaire participe de fait à la cause de l’armée qui l’a enrôlé. La cause des « vrais » islamistes, c’est le rétablissement de « la vraie religion », comme la cause de Saint Louis lorsqu’il partait en croisade, c’était de libérer le tombeau du Christ et de convertir les musulmans.
Certes il existe des islams, comme il existe des christianismes et des judaïsmes. Mais il existe trois textes sacrés, et ces textes contiennent des versets exclusivistes, alors que de tels versets n’existent pas dans les grands textes des autres religions. Depuis vingt siècles, l’histoire montre que ces versets exclusivistes ont motivé, ou légitimé, ou justifié des violences récurrentes. En effet, si les pulsions de violence peuvent être très diverses et très généralement répandues, le passage à l’acte nécessite bien souvent une légitimation par une autorité jouissant d’une aura particulière (cf. Milgram et Zimbardo). Nos djihadistes européens » ne trouvent-il pas dans ces textes sacrés la justification qu’il attendent, comme un mercenaire attend sa solde ?
S’attaquer aux raisons qui poussent à devenir mercenaire relève de l’action politique et sociale ordinaire, mais réduire le pouvoir d’attraction de la cause islamiste relève d’un autre combat, perdu d’avance si l’on se trompe d’analyse, en particulier si l’on omet ou occulte sa dimension religieuse spécifique.

Réponse de Jean-Noël Laurenti

Je n’ai aucunement nié la violence intrinsèque des monothéismes. Je dis simplement que toute religion, dans la mesure où elle est un moyen de gouvernement (j’entends gouvernement des maîtres sur les esclaves, des exploiteurs sur les exploités), a partie liée, de près ou de loin, avec la violence parce que ce genre de gouvernement ne peut être que violent, qu’il s’agit d’une violence ouverte ou d’une violence sous-jacente, entérinée par l’habitude et la soumission, selon un processus dans lequel la religion joue un rôle irremplaçable. Et l’exemple de Socrate, tel que le présente Jean-Pierre Castel, illustre bien mon propos : la religion est un instrument de la politique.

Quant aux causes qui suscitent les djihadistes, je ne vois pas où est la divergence : je n’ai jamais dit, comme les islamogauchistes, que la misère sociale « créait » le djihadisme, mais qu’elle créait les « conditions » (terme marxiste employé par Jean-Pierre Castel et parfaitement bienvenu) qui rendaient certains jeunes accueillants à l’islamisme radical. La thèse islamogauchiste est une vieille déviation bien connue du marxisme, l’historicisme : les doctrines n’auraient pas de valeur de vérité, le seul critère pour les juger serait la classe dont elles émanent. C’est ce qui permet de conclure qu’il y a une religion des riches, qui est mauvaise, et une religion des pauvres, la bonne. À ce compte-là, les sciences, les techniques, la plus grande partie des philosophies et ce qu’on appelle la culture devraient être jetées par-dessus bord, émanant des classes dominantes qui de loin, évidemment, ont été et sont toujours celles qui ont davantage les moyens de les développer. Certains n’ont pas hésité à mettre en pratique ces conclusions : l’historicisme mène à l’obscurantisme et rejoint par une autre voie l’islam radical. Par conséquent, loin d’ignorer le contenu intrinsèque des doctrines, il faut les examiner et le cas échéant les combattre. Mais, d’un autre côté, se contenter d’un pur combat d’idées serait vain car ces doctrines ne se développent que si les conditions sociales et politiques sont réunies, et souvent en dehors de toute rationalité. D’où il suit que, s’il convient de combattre le fanatisme en tant que doctrine, il est encore plus nécessaire de combattre la misère qui fait son succès.



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