Mode d'emploi

Soutenir et financer

Bien que le journal électronique soit rédigé par des contributeurs non rémunérés, nous devons faire face à des frais (notamment informatique). C'est pour cela que votre aide financière est la bienvenue pour nous permettre de continuer à vous informer sur les combats de la Gauche Républicaine et Laïque. Pour ce faire vous pouvez faire une adhésion de soutien en vous inspirant du barème ci-après et en nous envoyant sur papier libre vos Noms, Prénoms, Adresse et courriel à :

Les Amis de ReSPUBLICA
27, rue de la Réunion
75020 PARIS

Barème indicatif :
Chômeurs, RMIstes, Etudiants : 10 €
SMIC et au-delà : entre 25 € et 100 €

 
Chronique d'Evariste
Rubriques :
  • Chronique d'Evariste
  • Economie
  • ReSPUBLICA
  • banques
  • Crise du capitalisme
  • finance
  • lettre 911

Vers un nouveau krach bancaire et financier ?

par Évariste

 

Du 17 au 19 septembre dernier, la Réserve fédérale des Etats-Unis a injecté plus de 200 milliards de dollars dans les banques qui manquaient de liquidités (credit crunch) et ne pouvaient s’en procurer ni sur le marché interbancaire ni auprès des sociétés financières sans licence bancaire (Money Market Funds). C’est la première fois que cela se produit depuis 2008, date de la chute de Lehmann Brothers suivie de la faillite bancaire et financière internationale que l’on a connue.

C’est un signe supplémentaire de l’approfondissement de la crise économique financière mondiale. Avec une croissance faible dans les pays industrialisés, une décroissance forte de la croissance chinoise, avec des taux de profit dans l’économie réelle toujours très faibles (caractéristique de la phase actuelle du capitalisme et qui entraîne la baisse de l’investissement productif dans les entreprises malgré le gonflement de la masse des profits !), les profits des entreprises sont de moins en moins réinvestis dans la production et donc de plus en plus investis dans la spéculation financière internationale.

Les principales banques centrales du système capitaliste (BCE, Etats-Unis, Japon, Grande-Bretagne et Chine) accompagnent ce fonctionnement en faisant des injections massives de liquidités dans les banques (c’est la planche à billets !), en diminuant les taux d’intérêt (jusqu’à les rendre négatifs !). Nous aboutissons donc à une baisse de la production à cause de la surproduction en regard de la demande solvable, phénomène bien expliqué par notre vieux barbu du XIXe siècle : « Dès leur naissance, les grandes banques, affublées de titres nationaux, n’étaient que des associations de spéculateurs privés s’établissant à côté des gouvernements et, grâce aux privilèges qu’ils en obtenaient, à même de leur prêter l’argent du public.» ( Karl Marx, 1867, Le Capital, livre I, Œuvres I, Gallimard, La Pléiade, 1963, chapitre 31) ou encore « La crise elle-même éclate d’abord là où sévit la spéculation et ce n’est que plus tard qu’elle gagne la production. L’observateur superficiel ne voit pas la cause de la crise dans la surproduction. La désorganisation consécutive de la production n’apparaît pas comme le résultat nécessaire de sa propre exubérance antérieure mais comme une simple réaction de la spéculation qui se dégonfle. »( « Crise, prospérité et révolutions », Marx-Engels, Revue de mai à octobre 1850 in Marx-Engels, La crise, 10-18, 1978, p. 94). 1)Outre ces citations dues à Eric Toussaint, on peut se procurer sur le site de ReSPUBLICA, dans la rubrique de droite intitulée « Librairie militante », le livre très abordable de notre ami Quang, Le capital en toute simplicité !

Donc l’oligarchie capitaliste a le choix entre continuer l’accroissement exponentiel de la dette publique mais surtout privée ou le resserrement du crédit ; or ces deux voies mènent au krach. D’autant que les contenus toxiques des anciens prêts n’ont pas été nettoyés et continuent à polluer les produits titrisés des banques.
Par ailleurs, beaucoup de PME, n’ayant pas la possibilité de recourir à l’émission d’obligations pour se financer comme les firmes multinationales, entrent dans de grandes difficultés.

Tout cela entraîne la baisse de la masse des salaires directs mais aussi la baisse des prestations sociales de redistribution, mais encore l’augmentation du chômage (pour connaître le chômage en France, il convient d’additionner les catégories A, B, C, D, E de chômeurs et non se borner à la seule catégorie A comme le font les médias aux ordres du néolibéralisme : nous avons alors 6,5 millions de chômeurs et près de 10 millions de personnes sous le seuil de pauvreté.)

Il reste toujours la possibilité d’une solution alternative mais elle est contraire aux intérêts de l’oligarchie capitaliste. Elle exige donc que les forces de transformation sociale et politique soient prêtes à prendre le pouvoir au moment des crises paroxystiques qui sont fréquentes au sein du capitalisme. Car les forces de transformation ont toujours pris le pouvoir dans des crises paroxystiques (Révolution française, révolution russe, etc.).

Mais pour cela, il faut fédérer le peuple (constituer un nouveau bloc historique, dirait Antonio Gramsci) 2)Voir un bref rappel historique de la notion de fédération, dans ce numéro). Or pour fédérer le peuple, il faut toute une série de conditions dont nous avons parlé dans nos deux dernières chroniques ((http://www.gaucherepublicaine.org/chronique-devariste/preparer-une-rentree-offensive/7405927 et http://www.gaucherepublicaine.org/respublica/pour-satisfaire-les-besoins-sociaux-il-faut-tenter-le-blocage-du-systeme/7406264). Voir aussi, pour illustrer le lien indispensable mais non suffisant en soi entre le combat laïque et le combat social, les explications de Henri Pena Ruiz suite aux attaques qu’il a subies https://polony.tv/rencontres/henri-pena-ruiz-repond-aux-ennemis-de-la-laicit?autoplay=true. Et c’est là que le bât blesse tant dans le mouvement syndical dit de lutte que dans les organisations politiques souhaitant la transformation sociale et politique : leurs lignes stratégiques actuelles ne leur permettent pas de réaliser ces conditions nécessaires.

Voilà pourquoi nous pensons que la période actuelle doit prioriser l’éducation populaire refondée pour convaincre des conditions nécessaires à la fédération du peuple. Ce sera l’objet de notre rencontre du 12 octobre à Paris. Pour s’inscrire, contacter evariste@gaucherepublicaine.org ou combatlaiquecombatsocial@gmail.com.

Notes de bas de page   [ + ]

1. Outre ces citations dues à Eric Toussaint, on peut se procurer sur le site de ReSPUBLICA, dans la rubrique de droite intitulée « Librairie militante », le livre très abordable de notre ami Quang, Le capital en toute simplicité !
2. Voir un bref rappel historique de la notion de fédération, dans ce numéro). Or pour fédérer le peuple, il faut toute une série de conditions dont nous avons parlé dans nos deux dernières chroniques ((http://www.gaucherepublicaine.org/chronique-devariste/preparer-une-rentree-offensive/7405927 et http://www.gaucherepublicaine.org/respublica/pour-satisfaire-les-besoins-sociaux-il-faut-tenter-le-blocage-du-systeme/7406264). Voir aussi, pour illustrer le lien indispensable mais non suffisant en soi entre le combat laïque et le combat social, les explications de Henri Pena Ruiz suite aux attaques qu’il a subies https://polony.tv/rencontres/henri-pena-ruiz-repond-aux-ennemis-de-la-laicit?autoplay=true
Société
Rubriques :
  • Société
  • gilets jaunes
  • lettre 911

Gilets jaunes : des fractions de classes particulièrement mobilisées, comment l’expliquer ?

Une analyse sociologique de la population des gilets jaunes

par Loïc Bonin

 

Auteurs : Loïc BONIN et Pauline LIOCHON
Paru sur le site lundimatin le 26 septembre 2019 : https://lundi.am/Gilets-Jaunes-Des-fractions-de-classes-particulierement-mobilisees-comment-l

8 décembre 2018. La nuit tombe sur la capitale et les dernières cendres, vestiges d’une journée d’insurrection, tiédissent à peine sur les champs Elysées. Depuis près d’un mois les gilets jaunes ont investi des ronds-points et initié le plus grand mouvement social de ces 50 dernières années. Face à des revendications légitimes d’un peuple criant à la justice fiscale et sociale, le gouvernement assène ses éléments de langage. « Sorti du fond des âges », « inattendu », c’est surtout l’épithète « hétérogène » qui est largement utilisé pour caractériser le mouvement. Agglomérats de revendications et de positions sociales diverses, un corps difforme, trop complexe pour former un tout uni, voilà comment était résumée la situation par le gouvernement. Qui sont les gilets jaunes ? Cette question taraude plus d’un journaliste, plus d’un politique, plus d’un militant. Après 9 mois d’enquête ethnographique sur le rond-point de Camon [1] et une enquête par questionnaires (1400 questionnaires passés in situin visu, entre novembre et janvier), nous pouvons identifier des fractions de classes précises qui composent le gros des rangs des gilets jaunes. Les explications liées à la présence de cette population fortement présente dans les premiers temps des mobilisations des gilets jaunes sont à chercher dans les mutations structurelles du capitalisme.

LES FEMMES ET LE CARE

Les premiers temps de la mobilisation des gilets jaunes marqués par l’occupation des ronds-points sont finis. Après bientôt un an de mobilisation, le corps interne des activistes a muté. Une attention particulière aux premières occupations de rond-point met en lumière la présence de militants mais surtout de militantes. Qui sont ces femmes dont Macron dit « avoir découvert l’existence » dans son discours du 25 avril 2019 ? Celles qu’il définit comme étant des « mères célibataires » les renvoyant à leur condition matrimoniale et à leur foyer et occultant par la même leur situation professionnelle. Au sein de la population féminine des gilets jaunes, on retrouve environ 40% [2] de femmes travaillant dans le domaine du care au sens large du terme (aides-soignantes, auxiliaires de vie, infirmières, assistantes maternelles…). Comment expliquer une telle mobilisation dans un secteur où l’on sait que les mobilisations sont pourtant éphémères et fragmentées ?

LES SOINS, LE CHRONOMÈTRE ET LA RATIONALISATION

Le secteur du care, c’est avant toute chose un secteur en plein bouleversement, un véritable laboratoire d’essai des réformes néo-libérales dont une étude permet de dresser les conditions objectives d’une mobilisation sociale. L’importation du capitalisme et des formes de management corrélées à ce dernier au cœur même de l’appareil d’Etat ont bouleversé les modèles d’organisations dans le domaine de la santé. L’hôpital public fut à ce titre le théâtre de la mise en place de politiques de New Public Management dès les années 1990. « Une entreprise bien particulière de rationalisation du travail va alors se déployer avant tout économique, s’apparentant à bien des égards à des tentatives d’organisation « scientifique » du travail cherchant à normaliser, parcelliser et standardiser l’acte de soin » [3]. Cette recherche de l’efficacité économique à tout prix, dans un espace de soin devenu « hôpital-entreprise », contraint les soignantes à passer de moins en moins de temps avec chaque patient, leur donnant l’impression de ne plus pouvoir faire correctement leur travail. L’analyse ainsi faite de l’hôpital public peut se dupliquer à d’autres secteurs du soin. Les Agences régionales de santé rappellent systématiquement à l’ordre les différents services de soins infirmiers à domicile pour leur rappeler de « remplir les services ». Les cliniques privées ne sont pas en reste, et les employées du paramédical sont également soumises à des conditions de travail toujours plus précaires. La réévaluation du plafond des heures supplémentaires, la possibilité d’individualiser les horaires et les faire varier, et l’élargissement des possibilités de dérogation conduisent un alourdissement de la charge physique, psychologique et émotionnelle au travail. Cette injonction à la productivité conduit à la mise sous pression de toutes les travailleuses du care, et pousse un certain nombre d’entre elles au burn out. Une situation qu’a connue Chantal, 61 ans, infirmière à la retraite « J’ai passé deux ans, là derrière, allongée à regarder la télé. J’en pouvais plus, j’étais comment on dit ? En burn-out. J’y arrivais plus du tout, on m’en demandait toujours plus, on me demandait toujours d’aller plus vite, le soir je rentrais chez moi je voyais trouble j’avais des maux de tête […]. Je n’arrive plus à travailler c’est impossible pour moi »

Le secteur du care n’est pas le seul touché par ces mutations structurelles sur lesquelles les travailleurs n’ont pas de prise. Dans le secteur logistique et de la route, lui aussi touché par les transformations du capitalisme, les travailleurs sont ainsi soumis aux mêmes logiques et font aussi face à une dégradation de leurs conditions de travail.

« LE POUVOIR EST LOGISTIQUE »

« Nul ne voit le pouvoir parce que chacun l’a à tout moment sous les yeux, sous la forme d’une ligne haute tension, d’une autoroute, d’un sens giratoire, d’un supermarché […]. Le pouvoir est logistique. Bloquons tout » écrivait le comité invisible [4].

Visionnaire. Lucide. La transition d’un capitalisme fordien d’accumulation à un capitalisme néo libéral toyotiste est marqué par le fonctionnement en flux tendu de notre économie, la place prépondérante prise par la livraison et la dislocation des unités de production sur l’ensemble du territoire. Tant de processus qui permettent de mettre en avant la place prépondérante prise par les secteurs de la route et de la logistique. Les chauffeurs, les routiers, les caristes, les employés de la logistique sont les professions qui ont fourni le gros des rangs des gilets jaunes. Les hommes travaillant dans ces deux secteurs représentent légèrement plus de 30 % de la population masculine. « Le transport routier de marchandises a été un laboratoire à ciel ouvert de la déréglementation et de la concurrence généralisée » [5]. L’explosion du nombre de licences de transporteurs a favorisé l’atomisation de la profession tirant par là même les prix vers le bas. Tout comme la concurrence intra-européenne stimulée par la multiplication du statut de travailleurs détachés a initié une dynamique de détérioration des conditions de travail du secteur. Au même titre que les femmes dans le secteur du care, les hommes du secteur de la route ont vu leur conditions de travail se dégrader, si bien que l’irrespect des règles (temps de travail, temps de repos, vitesse) est devenu la « norme de la profession ». Les employés de la logistique ont quant à eux vu les cadences de chargement et de déchargement s’accélérer et les charges portées devenir toujours plus conséquentes.

DES EXPÉRIENCES COMMUNES AU TRAVAIL

Un compte rendu objectif des dégradations des conditions de travail de ces deux secteurs ne permet pas de comprendre la perception qu’ont les manifestants eux-mêmes de leur travail et encore moins d’appréhender le travail comme un facteur d’engagement. Pourtant, ce dernier apparaît comme un déterminant central.

En s’appuyant ici sur 32 entretiens menés avec les manifestants du rond-point de Camon, nous pouvons souligner la présence d’une expérience traumatique commune au travail. Nathalie routière de 45 ans raconte

« C’est qu’avant je roulais que de la matière dangereuse, on m’emmerdait pas trop au niveau du temps si tu veux, et là maintenant c’est vite, vite et il faut rouler à 90 moi rouler vite ce n’était pas mon job […] sauf que si j’arrivais en retard je pénalisais les gars derrière […] je me suis pris la tête avec beaucoup de collègues. Dans le fret tu es tout le temps dans le speed mais là c’était devenu vraiment le bordel. Vivre comme ça tu ne peux pas à un moment donné, tu te dis mais moi je peux pas ».

Nathalie se trouve aujourd’hui dans l’incapacité de vendre sa force de travail et touche comme seul revenu l’allocation aux adultes handicapés. En plus du mal-être au travail, les différentes études ethnographiques nous permettent d’estimer la présence de 5 à 8% de personnes en situation de handicap, d’invalidité ou de maladies longue durée. En plus de ces expériences communes, les deux secteurs, care et livraison, sont marqués par l’absence de structure syndicale puissante. Le fait est que beaucoup de ces personnes ne partagent pas un lieu de travail commun et pour certains ne rencontrent jamais leurs collègues. C’est le cas par exemple de Elisa, 28 ans, auxiliaire de vie à domicile

« J’ai travaillé deux ans dans cette boîte, je n’ai jamais vu un collègue, toutes les réunions se faisaient par skype et on communiquait par téléphone. Il y avait une représentante du personnel, je ne l’ai jamais vue non plus, elle travaillait près du siège à une heure et quart de route d’ici. Je n’ai vu que deux fois ma patronne, pour l’entretien d’embauche et quand j’ai apporté ma démission. »

Le problème apparaît également pour les routiers dont la plus large partie du temps de travail s’effectue sur la route, seul dans son camion.

Ces deux secteurs comportent de nombreux obstacles structurels à une mobilisation au sein même de l’espace de travail ; absence de syndicat, précarité, isolement. L’engagement au sein des gilets jaunes peut alors apparaître comme un recours possible et un moyen de se faire entendre. Le mouvement, caractérisé par l’absence de structures préexistantes à la mobilisation a ainsi permis d’agréger en son sein des travailleurs et des travailleuses de secteurs, certes différents, mais subissant la même précarisation et les mêmes conditions de vie. Le rond-point, espace clef de la mobilisation fut un centre névralgique de la coordination militante, de partage de ces conditions de vie et de formulation de revendications liées au travail.

DES REVENDICATIONS LIÉES AU TRAVAIL

« Pourquoi vous mobilisez-vous aujourd’hui ? ». Telle est l’une des questions que nous avons posées dans notre questionnaire. Une étude séparée des réponses entre les différents actes de la mobilisation permet de constater l’arrivée au cours de la troisième semaine du RIC chez de nombreux répondants, avant que la question du référendum ne devienne majoritaire au cours de l’acte 5. Eclipsant partiellement des revendications qui gravitent initialement autour de deux pôles. Le premier se focalise sur « la dignité au travail » avec notamment la hausse du SMIC, la baisse des taxes pour les artisans et les petits patrons. Le second se concentre autour de la baisse du coût de l’essence et la suppression de la nouvelle taxe sur le carburant annoncés par le gouvernement Philippe. Une nouvelle fois ces revendications liées au coût de l’essence ne peuvent être comprises en dehors d’une analyse du travail. Pour beaucoup de gilets jaunes, la voiture est le premier outil de travail. Pour les aides-soignantes et les infirmières à domicile, ou pour les chauffeurs, le véhicule et le carburant sont deux postes de dépenses colossaux. Katy, aide-soignante à domicile de 54 ans nous confie « Mon véhicule, je n’ai pas le choix je dois l’utiliser, le centre communal d’action social me rembourse 14 centimes par kilomètre roulé. Autant dire pas grand-chose. C’est mon outil de travail à la fois le plus précieux et le plus coûteux. A chaque fois que je mets de l’essence, c’est comme si je retirais directement de l’argent sur ma feuille de paie ». Pour celles et ceux qui n’utilisent pas leur véhicule pour travailler, leur véhicule leur sert pour aller travailler. Les distances quotidiennement parcourues par certains manifestants simplement pour se rendre au travail sont extrêmement importantes et bien évidement cela engendre un coût à la hauteur du déplacement.

Une affiche lors du mouvement du CPE en 2006 disait « c’est par le flux que ce monde se maintient ». Les gilets jaunes semblent être à la fois victimes de ces flux, les contraignant à toujours plus de déplacements, de productivité et en ont également été les bourreaux durant les premières semaines de mobilisations. Les blocages de route à partir des ronds-points, les blocages d’entrepôt, de plateformes de distribution ont sans aucun doute marqué de leur empreinte les luttes sociales à venir. « Les luttes infrastructurelles viennent ! ».

NOTES

[1] Tous les noms (personnes et lieux) ont été modifiés.

[2] Résultats issus du travail collectif d’enquête du CNRS « jaune vif » regroupant 80 chercheurs et chercheuses. Les analyses ici faites n’engagent toutefois que les deux auteur.e.s

[3] Pierre André Juven, Frédéric Pierre, Fanny Vincent, La casse du siècle. A propos des réformes de l’hôpital public, Raisons d’agir éditions, Paris, 2019.

[4] Le comité invisible, A nos amis, La Fabrique, Paris, 2014.

[5] Laurent Kestel, En marche forcée. Une chronique de la libéralisation des transports : SNCF, cars Macron et quelques autres, Raisons d’agir éditions, Paris, 2018.

Brèves
Rubriques :
  • Brèves
  • Histoire
  • lettre 911

« Fédérer » le peuple : quelles références historiques ?

par ReSPUBLICA

 

La première référence est celle de la Fédération nationale célébrée au Champ-de-Mars le 14 juillet 1790, avec la « montée » de province des fédérations issues de la « révolution municipale » de la bourgeoisie, alors réservée aux citoyens « actifs ». Car il faut attendre la seconde Fête de la Fédération le 14 juillet 1792, l’arrivée le 30 des fédérés marseillais qui popularisent le « Chant de guerre pour l’Armée du Rhin » (devenu « La Marseillaise », que chanteront les révolutionnaires russes en 1917) pour que la Fédération devienne réellement nationale et populaire, celle du peuple venu en armes (les gardes nationales) défendre la révolution, tout simplement !
Deux nouveaux pouvoirs apparaissent alors à Paris, réunis à l’Hôtel de Ville :
– le Bureau central des sections qui va devenir la Commune insurrectionnelle de Paris,
– le Comité central des Fédérés.
Un groupe autour de Robespierre est en contact permanent avec eux. Les forces de la seconde Révolution française sont prêtes. Leur mot d’ordre résume leur état d’esprit : « La liberté ou la mort ». Objectif la journée du 10 août 1792 puis le renversement de la Monarchie et l’instauration de la Ière République.

Seconde référence, les Fédérés de la Commune. Pendant le siège de Paris de 1870, les gardes nationaux – réactivant l’idée de la Révolution et redonnant une force politique à une forme d’organisation en sommeil depuis lors – décident de se fédérer, organisés en bataillons issus des quartiers à prédominance ouvrière et artisanale. Adeptes de la démocratie directe, ils mettent en place des organismes où les représentants sont élus et révocables, en particulier le Comité central de la Fédération qui organise les élections du 26 avril 1871. Une vingtaine de candidats « modérés » représentent les classes aisées dans les Ier, IIe, IXe et XVIe arrondissements. Plus des trois quarts des électeurs votent en faveur des Fédérés dans les IIIe, IVe, Ve, VIe, VIIe, Xe, XIe, XIIe, XIIIe, XIVe et XVe arrondissements, avec environ 70 représentants.
Le Conseil est représentatif des classes populaires et de la petite bourgeoisie parisiennes. On y trouve 25 ouvriers, 12 artisans, 4 employés, 6 commerçants, 3 avocats, 3 médecins, 1 pharmacien, 1 vétérinaire, 1 ingénieur, 1 architecte, 2 artistes peintres, 12 journalistes : voilà l’expression et la représentation d’un bloc historique au sens de Gramsci !
La suite de leur œuvre et du combat contre les Versaillais est connue. Elle se termine au Mur des Fédérés du Père-Lachaise.

Lire aussi le texte d’Evariste : http://www.gaucherepublicaine.org/chronique-devariste/federer-le-peuple/7400967



Si vous ne souhaitez plus recevoir cette lettre, désinscrivez-vous en cliquant ici.

ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine est édité par l'association :
"Les Amis de ReSPUBLICA"
27, rue de la Réunion
75020 PARIS
Courriel : respublica@gaucherepublicaine.org
Site: gaucherepublicaine.org