n°951 - 30/11/2020
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Laïcité

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Laïcité
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Face aux surenchères laïques, quelques réflexions actuelles

par Philippe Duffau

 

Ni laïcité « molle » ni laïcité « dure », ni laïcité « ouverte » ni laïcité « de combat »… mais le combat pour la laïcité, toute la laïcité, intrinsèquement lié au combat pour une société de l’équité sociale et de la fraternité

Après la décapitation par un islamiste de l’enseignant, Samuel Paty, et la publication par Le Monde des échanges de courriels, chacun y va de sa profession de « foi » laïque, d’une surenchère laïque, laïcité qui, jusqu’à récemment, ne préoccupait pas ces nouveaux adeptes alors que :

  • certaines collectivités, voire l’Etat, subventionnaient des édifices religieux catholiques ou musulmans, continuent de rétribuer des ministres des cultes catholiques, protestants et israélites, des catéchistes de ces trois cultes dans le Haut-Rhin, le Bas-Rhin et la Moselle, de financer les écoles privées confessionnelles qui dans leur statut ne respectent ni la liberté de conscience des enseignants ni celle des élèves (cf. statut de l’enseignement catholique),
  • ne trouvaient pas grand-chose à redire avec les accommodements ou compromissions en lien avec l’islam politique proche des salafistes ou des Frères musulmans,
  • qui, non seulement ne s’interrogent pas, mais se font les promoteurs d’un système d’ « économie-monde » ultra-libéral terreau de multiples séparatismes religieux, sociaux de la part des ultra-riches qui font sécession avec le peuple…

Rappel des principes laïques pour une laïcité ni ouverte ni fermée mais rassembleuse : tous les musulmans ne sont pas des islamistes

Il s’agit d’appliquer fermement et sans esprit de vengeance les principes laïques, de distinguer le domaine public notamment dans les services publics où la neutralité des agents est de mise, de l’espace public (rues, places…) et privé où l’affichage religieux ou politique n’est pas interdit sous réserve de ne pas entraîner un désordre public dans des termes définis par la loi commune. Quelques principes laïques devraient être consensuels pour les athées, les agnostiques, les indifférents aux choses de la religion (très majoritaires dans la société française) et les croyants, toutes religions confondues :

  • « Nul citoyen ne doit être contraint de financer un culte qui n’est pas le sien » selon le décret de ventôse de l’an III de la République.
  • La liberté absolue de conscience dont la liberté de croire ou de ne pas croire prime sur toutes les autres libertés.
  • L’égalité de droit sans distinction de conviction.
  • L’illégitimité de la domination des croyants sur les athées.
  • Le respect des personnes est à distinguer du droit à critiquer, caricaturer toutes les conceptions métaphysiques religieuses ou athées. Ainsi, l’islamophobie, la christianophobie, l’athéophobie… sont des opinions et non des délits. Par contre les discriminations à l’emploi, dans le déroulement de carrière, dans l’accès au logement sont à combattre.
  • La laïcité est universaliste et non différentialiste sans interdire la singularité de chaque personne.
  • La laïcité est un levier qui permet l’émancipation, qui libère et affranchit les femmes, les hommes, les athées, les croyants, est un antidote à tout enfermement communautaire.
  • La laïcité suppose la préséance du bien commun pour toutes et tous sur les intérêts particuliers.
  • La laïcité n’est pas un athéisme, n’est pas une option spirituelle. Une République athée n’est pas plus laïque qu’une République théocratique qui favorise une religion.
  • La laïcité est par essence anticléricale en ce sens que les activités des clergés et l’expression publique des représentants des religions ne dérangent personne mais la faculté du clergé d’imposer une loi à partir d’une foi ou de contrôler l’espace publique est inacceptable.

La vigilance pour que la laïcité ne se détourne pas de ses principes. 

Ne pas abuser des signalements : distinguer le signalement au procureur de la République dans le cas de l’enfance en danger du signalement par l’utilisation du formulaire « atteinte à la laïcité ».

Les signalements pour atteinte aux principes de la République laïque ou à la laïcité en général doivent être précisés par des critères pour éviter de tomber dans les ornières de l’obsession sécuritaire d’un côté et de l’angélisme qui excuserait tout de l’autre. Les professionnels de l’éducation doivent avoir une claire conscience de ce qui relève du travail normal en classe au travers des débats entre élèves sous la conduite de l’enseignant dont le but doit être d’élever la conscience des élèves et de ce qui relève d’une conduite à risque pour l’élève et pour l’entourage ou la société. Distinction délicate s’il en est, il faut bien en convenir. L’enseignant doit éviter de devenir un auxiliaire de police tout en ayant conscience de son devoir et de citoyen et de professeur d’ « assister toute personne en danger », du point de vue de son intégrité et physique et psychique.

La classe est un lieu d’élaboration de la pensée et d’apprentissage pour formuler des opinions en s’appuyant sur des arguments fondés sur la raison et des faits.

Les enseignants ont pour mission de former des élèves, des collégiens, des lycéens et ont pour mission de leur apprendre la différence entre les croyances et les savoirs scientifiques, croyances qui relèvent de la foi et qu’il est impossible de démontrer et savoirs scientifiques qui peuvent être vérifiés tout en ayant conscience que ces savoirs peuvent être remis en cause par des recherches et découvertes postérieures et que cela fait partie des avancées de la pensée humaine.

Un élève qui remet en cause le fait que tous les êtres vivants actuels sont issus de premières cellules ou micro-organismes, il y a plusieurs milliards d’années, et d’une évolution, un élève qui remet en cause les découvertes archéologiques qui font remonter l’apparition des premiers hominidés il y a 7 millions d’années et les hommes « modernes » qui en sont issus il y a 200 000 ans environ car cela entre en contradiction avec les textes dits « révélés » pour les croyants, un tel élève n’a pas à faire l’objet d’un signalement. C’est la mission de l’école publique et des enseignants de faire preuve et de pédagogie et de fermeté pour transmettre ces connaissances et les construire avec les élèves.

De même un élève qui s’offusque, dans le cadre de l’ECM (éducation civique et morale), qu’on puisse affirmer que certains sont persuadés que Dieu, cet « incréé », a créé les êtres humains à son image et que d’autres estiment que Dieu est une création de la pensée humaine, à l’origine pour se rassurer face aux événements naturels tels les inondations, les éruptions volcaniques, les éclipses de soleil, les tremblements de terre et avoir le sentiment d’avoir une prise sur eux au travers de prières, d’offrandes faites aux Dieux, cet enfant n’a pas à être signalé. Là encore, c’est le rôle de l’école publique de confronter les élèves aux diverses philosophies actuelles et aux grandes controverses depuis l’Antiquité en ne se focalisant pas uniquement sur l’Europe et le Moyen-Orient.

Tout cela doit servir de tremplin pour travailler et forger une conscience libre des élèves futurs citoyens armés contre les superstitions, les clichés, les vérités toutes faites ou « révélées » et en capacité de développer des opinions argumentées et raisonnées. Condorcet affirmait : « Même sous la constitution la plus libre, un peuple ignorant est esclave. »

Tout cela ne relève pas de signalement et doit se gérer au sein des classes en demeurant ferme sur la distinction entre croyances et savoirs scientifiques et sur l’objectif principal qui demeure la transmission des savoirs avérés.

Faut-il changer les lois qui régissent la laïcité ? Danger

Méfions-nous de ceux qui veulent, à chaque événement, durcir les lois au point de porter atteinte à nos libertés individuelles : état d’urgence contre le terrorisme, contre le virus avec transfert dans le long terme dans le droit commun. Appliquons l’article de la loi de séparation des Eglise et de l’Etat de 1905 concernant la Police des cultes et mettons hors d’état de nuire les prêcheurs de haine, appliquons l’interdiction du financement des cultes par la puissance publique tout en garantissant, dans ce cadre, la liberté de culte.

Ministère de l’Education nationale : à quand la fin du « pas de vagues » et un soutien aux soutiers de l’éducation que sont les enseignants ?

Les enseignants doivent se sentir soutenus et confortés dans leur mission d’émancipation, de construction de l’ « unité fraternelle de la Nation » par la hiérarchie, accompagnés quand ils appliquent non pour eux-mêmes mais pour l’institution ce qu’affirmait Jules Ferry : « Nous avons promis la neutralité religieuse, mais nous n’avons pas promis la neutralité philosophique ou politique. » notamment face aux remises en cause de la liberté de conscience, de la liberté d’expression.

La presse anglo-saxonne communautariste et la laïcité

En ces temps où les titres de la presse anglo-saxonne décrivent la République française et sa laïcité comme liberticides, rappelons-leur les propos de Thomas Jefferson (1743-1826) : « On ne porte pas atteinte à son voisin lorsqu’on affirme qu’il y a vingt dieux ou qu’il n’y en a aucun. Cela ne me vide pas les poches et ne me brise pas les jambes. L’Etat n’a pas à se préoccuper des âmes mais simplement des actes par lesquels les citoyens respectent les règles de vie commune. »

Contre le différentialisme et pour le droit de l’enfant à s’instruire

Tout comme Nelson Mandela demandait l’indifférence et non des droits particuliers pour les Noirs, il doit en être de même pour tous les individus de quelque confession ou athéisme qu’ils soient. Victor Hugo opposait au droit du père qui entendait priver l’enfant d’instruction le droit de l’enfant à construire tout ce qu’il peut potentiellement devenir grâce à l’école publique.

Quelle République ?

La République doit se faire enseignante afin de faire advenir une citoyenneté lucide, éclairée conjuguant esprit critique indissociable de la liberté d’expression et civisme. Pour cela, tout en étant ferme sur les principes laïques, tout en condamnant les propos appelant à la haine de ceux qui ne pensent pas selon les dogmes religieux notamment de l’islamisme politique qui, souvent, légitiment les passages à l’acte violent et terroriste, rappelons que la laïcité ne doit être ni de combat ni molle, ne doit pas être instrumentalisée à des fins politiques en prévision des présidentielles de 2022. Elle doit avoir une visée de rassemblement. Il est de plus en plus dérangeant de constater que le gouvernement essaye de naviguer entre deux courants : un courant concordataire et de complaisance avec les religions incarné par le président Macron et un courant de laïcité dure incarné pas sa ministre Marlène Schiappa, tous deux également éloignés des principes républicains, afin de ratisser large électoralement. De même, les religions ne doivent pas être instrumentalisées à des fins politiciennes.

Le combat laïque est aussi un combat social. En oubliant l’un on affaiblit l’autre, et vice versa.

Enfin, ne séparons pas le combat pour la laïcité … et non pas la « laïcité de combat » …, du combat pour la justice sociale. Les religions et les communautés (réelles ou fantasmées) se développent parce que l’individu atomisé dans la mondialisation libérale est dramatiquement seul. Le système économique, qui se moque des Etats, des frontières, des règles et qui s’attaque aux solidarités et aux protections collectives, s’accommode parfaitement de cette démocratie archipellisée dans laquelle le particulier supplante l’universel. Le combat laïque est aussi un combat social. En oubliant l’un on affaiblit l’autre, et vice versa. Une société déchirée assigne les gens à résidence spirituelle. Une société solidaire crée les conditions d’un rassemblement paisible autour de valeurs communes. Nous devons mettre notre énergie militante au service d’une République s’articulant autour de la justice et de la solidarité. Tel est le sens de la laïcité qui ne peut s’épanouir dans un système d’économie-monde fondée sur l’ultra-libéralisme.

Une constituante pour une VIe République s’impose pour que, des droits formels indispensables mais insuffisants, nous passions aux droits réels.

 

 

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Les livres sont évidemment essentiels

par Rachel Haller

 

Avant-hier c’étaient le Traité sur la tolérance de Voltaire et Paris est une fête d’Hemingway, hier Notre-Dame de Paris d’Hugo, aujourd’hui c’est La peste d’Albert Camus : à chaque crise, un livre classique est spontanément lu ou revisité, pour nous consoler ou nous aider à appréhender l’événement tragique. Oui, le livre est un refuge. Et la lecture nous aide à vivre.

En ces temps troublés par l’incertitude de l’évolution de la crise sanitaire et par ses futures retombées économiques et sociales, nous avons plus que jamais besoin des livres. Les libraires l’ont constaté cet été au cours duquel plusieurs librairies ont enregistré des ventes exceptionnelles[1] (cela avait déjà été le cas en 2015, année durant laquelle la vente d’essais sur l’Islam ou le terrorisme avait permis au secteur de renouer avec la croissance) : les lecteurs étaient au rendez-vous. « Lisez, retrouvez aussi ce sens de l’essentiel » avait d’ailleurs conseillé le président Macron dans son allocution du 16 mars dernier. C’est pourquoi la réouvertures des librairies samedi 28 novembre dernier aurait du intervenir bien avant et les livres ne pas être relégués au statuts de produits « inessentiels », mais au-delà de la question des librairies, ce sont tous les acteurs du livre qui doivent être soutenus.

Photographie de la bibliothèque de Holland House, prise le 22 (ou 23) octobre 1940 par M. Harrison (de la Fox Photo Agency), un mois après l’un des raids aériens de la Luftwaffe sur Londres.

Pourquoi les livres et la lecture sont-ils essentiels ?

À ReSPUBLICA, nous attachons une importance toute particulière à l’éducation populaire, élément pour nous indispensable au combat politique et le livre est bien évidemment un vecteur important de l’éducation populaire et de l’éducation tout court (c’est pourquoi notre site comporte aussi une librairie militante). Le livre permet d’analyser, de comprendre le réel et de trouver des ressources pour faire advenir une société meilleure. « La lecture nourrit l’âme, comme le pain nourrit le corps » pour reprendre les mots de l’écrivain Antoine  Albalat. Mais outre cet aspect, la lecture est bénéfique à bien des égards : plusieurs études scientifiques ont montré les bienfaits de la lecture pour notre santé mentale et notre santé en générale. En effet, lire diminue le stress. Selon une étude de l’Université de Sussex, la lecture, en nous permettant de concentrer notre attention sur un autre objet que nos soucis, est un moyen très efficace de se calmer. De plus, en faisant travailler notre mémoire, elle permet de maintenir plus longtemps nos capacités cérébrales et de prévenir le vieillissement du cerveau.
Outre ces effets positifs sur notre santé, lire améliore aussi nos relations avec les autres : la lecture d’œuvres de fiction augmente notre capacité d’empathie et notre compréhension d’autrui grâce à l’identification aux personnages. Comme le montrent si bien ces mots de Paul Valéry : « Mais enfin le temps vient que l’on sait lire – événement capital – le troisième événement capital de notre vie. Le premier fut d’apprendre à voir ; le second d’apprendre à marcher ; le troisième est celui-ci, la lecture, et nous voici en possession du trésor de l’esprit universel. Bientôt nous sommes captifs de la lecture, enchaînés par la facilité qu’elle nous offre de connaître, d’épouser sans efforts quantité de destins extraordinaires, d’éprouver des sensations puissantes par l’esprit, de courir des aventures prodigieuses et sans conséquences, d’agir sans agir, de former enfin des pensées plus belles et plus profondes que les nôtres et qui ne coûtent presque rien ; et, en somme, d’ajouter une infinité d’émotions, d’expériences fictives, de remarques qui ne sont pas de nous, à ce que nous sommes et à ce que nous pouvons être. »
En somme, lire nous fait bénéficier de l’expérience d’autrui, nous enrichit et permet de nous évader de notre quotidien. Dans cette période où la santé mentale de nombre de nos concitoyens s’aggrave du fait des conséquences de la pandémie – faisant craindre aux professionnels une « vague psychiatrique » – il faut se souvenir qu’il existe un remède sans aucun effet secondaire néfaste : le livre.

Il fallait rouvrir les librairies plus tôt

Malgré une importante mobilisation du secteur (avec une pétition en ligne qui a atteint plus de 200 000 signatures : https://www.change.org/p/monsieur-le-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9publique-monsieur-le-pr%C3%A9sident-faisons-le-choix-de-la-culture-en-rouvrant-les-librairies), le gouvernement a une nouvelle fois effectué un choix qui manquait cruellement de bon sens en ne permettant pas aux librairies de figurer dans la liste des commerces autorisés à être ouverts lors de la première période de reconfinement (alors que les quincailleries ou que les enseignes qui vendent du matériel électronique comme la Fnac figuraient dans cette liste !). Cette décision était d’autant plus regrettable que par rapport à la situation du premier confinement, les librairies avaient fait de gros efforts pour s’adapter aux contraintes sanitaires. Pour rajouter à l’absurde, la concession du gouvernement a été de faire fermer les rayons de produits culturels dans les grandes surfaces, ouvrant un boulevard à Amazon durant cette période… Ces dernières représentent effectivement une concurrence aux librairies indépendantes et ont grignoté depuis les années 1990 des parts de marché à nos librairies de quartier[2].
Notre pays ne compte plus que 3200 librairies (il en a compté au maximum 6000, c’était en 1878), ce qui en fait néanmoins de la France l’un des pays au monde les mieux dotés en la matière. Or, nous avons besoin de ces passeurs de culture : ce sont les libraires qui, en défendant des auteurs, permettent à ces derniers et à leurs maisons d’édition d’exister à côté des mastodontes du métier. En  misant sur leur expérience et la relation avec leurs clients, les libraires accompagnent les lecteurs et transmettent leur passion de la lecture.
Ainsi, pour rappeler l’importance des libraires comme acteurs essentiels de la vie culturelle, le Conseil de Paris a voté le 19 novembre la pose d’une plaque en l’honneur d’Adrienne Monnier. Cette libraire a ouvert La Maison des Amis des Livres en 1915 : un lieu où vont se croiser de nombreux écrivains prestigieux, tels Aragon, Simone de Beauvoir, Walter Benjamin, Fitzgerald, Gide, Jacques Prévert… Compagne de Sylvia Beach, la libraire de Shakespeare and Compagny (librairie toujours située dans le Ve arrondissement) qui a publié l’édition originale d’Ulysse de James Joyce, Adrienne Monnier en a publié la version originale française.

En plus des librairies qui doivent être soutenues car le secteur est fragile depuis plusieurs années, n’oublions pas non plus un autre acteur incontournable pour favoriser la lecture : les bibliothèques. Celles-ci sont un pilier du service public pour la culture. Grâce à des professionnels engagés et à des projets municipaux ou nationaux ambitieux, une part toujours plus importante de la population fréquente les bibliothèques : en 2016, 91 % des Français s’étaient déjà rendus dans une bibliothèque, contre 84,8 % en 2005. De même, entre 2005 et 2016, le nombre d’usages des bibliothèques municipales a augmenté de 23 % (soit une hausse 4 millions d’usagers)[3]. Alors que s’est amorcée depuis quelques années une réflexion pour l’élargissement des horaires d’ouvertures des bibliothèques, il serait bon que dans cette période aussi un maximum d’entre elles puissent assurer leur rôle de service public de la lecture (les bibliothèques parisiennes ont par exemple conservé un service de retrait de documents).

Pour finir, il nous paraît évident que la lecture est aujourd’hui toujours indispensable et essentielle et qu’il faut soutenir vigoureusement les librairies indépendantes. Mais plus largement, outre un investissement dans le réseau de bibliothèques qui ne doit pas se démentir, il faudrait aussi que le futur plan de relance accorde une place importante aux artistes et aux écrivains, comme ce fut le cas durant le New Deal. Entre 1935 et 1943, quatre à six mille personnes par an – romanciers, dramaturges, poètes mais aussi journalistes et chercheurs – ont bénéficié du programme Federal Writer’s Projet, parmi lesquels John Steinbeck ou John Dos Passos. Il n’est pas inutile de rappeler que la profession d’écrivains est pour la majorité d’entre eux précaire et que cette précarité est davantage exacerbée par les conséquences de la pandémie. Alors soutenons les librairies et éditeurs indépendants, mais avant tout : les écrivains !
Et terminons par les mots de François Cheng tenus en avril dernier qui résument parfaitement un de leurs rôles aujourd’hui : « Si on est écrivain, si on est digne de ce nom, il faut porter, dans la mesure du possible toute la douleur du monde. Et essayer de la transformer, de les transfigurer en une sorte de lumière qui nous aide à vivre. »

NOTES

[1]Lire à ce sujet « « Le livre est un refuge » : en librairie, le sursaut des ventes et la solidarité des clients », Jean Binrbaum, Zoé Courtois, Le Monde, 6/08/2020 [en ligne : https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/08/06/le-livre-est-un-refuge-en-librairie-le-sursaut-des-ventes-et-la-solidarite-des-clients_6048267_3246.html].

[2]Voir à ce sujet l’article très instructif de Franck Gintrand « Amazon fait peur mais ce sont les grandes surfaces qui font mal aux librairies » sur Slate.fr [en ligne : http://www.slate.fr/story/196753/librairies-amazon-grande-distribution-concurrence-vente-livres-menace-disparition-fnac-cultura-leclerc].

[3]Chiffres du rapport du ministère de la Culture « Publics et usages des bibliothèques municipales en 2016 ».

A lire, à voir ou à écouter
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Chansons déconfinées 10

par Philippe Barre

 

Comme notre camarade Pascal Generet, les Goguettes continuent à créer des chansons qui nous aident à lutter et à vivre. En voici quelques unes :

  • 2020 dans l’Hexagone sur l’air d’Hexagone de Renaud !

https://youtu.be/sAzO4IFa3hE

  • Medley du confinement, les goguettes auxquelles vous avez échappé :

https://www.youtube.com/watch?v=jYhnR_dxRrg

  • Message personnel (l’amour confiné) sur l’air de Message personnel par Françoise Hardy :

https://www.youtube.com/watch?v=Pti-ljSdeAY

 

Blanquer Démission sur l’air de Comme dans les tableaux du douanier Rousseau de la Compagnie Créole (âme sensible s’abstenir) par un autre multirécidiviste : Eric Charles

https://www.youtube.com/watch?v=sa190j5CbQU&feature=youtu.be

 

Maintenant, Respublica attend vos créations et les chansons que nous ne connaissons pas encore !

 

 

 



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