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Projet de loi visant à renforcer les principes républicains : derrière un texte bavard, des mesures dangereuses et des maux non traités

par Franco Hélène (L)

 

Pour analyser le texte d’un projet de loi de cette importance par le sujet qu’il entend traiter, on ne peut faire abstraction du contexte.

Le contexte

« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément » écrivait Nicolas Boileau-Despreaux en 1674. C’est peu dire que le gouvernement a tâtonné sur les mots pour élaborer ce projet de loi, à commencer par l’énoncé de son titre qui définit son objet.

Après avoir pensé présenter un projet de loi visant à lutter « contre les séparatismes », le gouvernement a changé l’intitulé du projet en texte « contre le séparatisme islamiste », puis en projet de loi visant à « renforcer la laïcité ». Le gouvernement a finalement saisi le 9 décembre 2020 l’assemblée nationale d’un projet « confortant le respect des principes de la République ».

À l’évidence, l’ignoble assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine (78) est un élément de contexte majeur dans la rédaction de ce texte. L’émotion ressentie après chaque assassinat terroriste islamiste a été douloureusement réactivée par ce drame.

La procédure accélérée, procédure choisie du gouvernement, permet que le projet de loi ne fasse l’objet que d’une lecture par chambre du Parlement (assemblée nationale puis sénat) avant d’être adoptée, ce qui réduit donc la navette parlementaire à une unique transmission du texte. Il est étonnant que, s’agissant d’un texte qui se veut principiel et marqueur du quinquennat, le débat parlementaire soit ainsi tronqué. Pour mémoire, les débats parlementaires ayant abouti à l’adoption de la loi du 9 décembre 1905 avaient commencé… en juin 1903 !

Un autre élément de contexte est l’inconstance du président de la République Macron sur la question de la laïcité. Chacun se souvient de son discours au couvent des Bernardins le 9 avril 2018. En s’adressant à Georges Pontier, archevêque de Marseille et puissance invitante en tant que président de la conférence des évêques de France, Emmanuel Macron, au mépris du principe de séparation des Églises et de l’État, avait lancé : « Pour nous retrouver ici ce soir, Monseigneur, nous avons, vous et moi bravé, les sceptiques de chaque bord. Et si nous l’avons fait, c’est sans doute que nous partageons confusément le sentiment que le lien entre l’Église et l’État s’est abîmé, et qu’il nous importe à vous comme à moi de le réparer. » ! C’est sans doute dans ce discours dans lequel le président de la République a le mieux exprimé le fond de sa pensée. Respectueux de la liberté de conscience, mais oublieux du principe de séparation entre l’Église catholique et l’État. Cet esprit concordataire se retrouve en filigrane dans plusieurs dispositions du projet de loi.

En effet, au milieu d’un étrange inventaire à la Prévert, allant de la polygamie aux mariages forcés en passant par les certificats de virginité et de la création de deux délits supplémentaires, la logique du Concordat napoléonien de 1801 est de retour : contrôle accru de l’État sur la pratique des cultes en contrepartie de sources de financement facilitées pour les religions.

Le texte

Sans prétendre à l’exhaustivité, voici une analyse des dispositions principales du texte.

Il est erroné d’asséner que ce texte est « contre les musulmans ». Mais à l’évidence, il ouvre des brèches dans le principe de séparation des Églises et de l’État. Mécaniquement, ces entailles à la clé de voûte de la loi de 1905 profiteront essentiellement, d’un point de vue financier, à la religion la plus anciennement installée en France et la plus riche : l’Église catholique.

Les militants républicains laïques que nous sommes ne sont pas intéressés par un quelconque « équilibre » entre les gages donnés par l’État aux différents cultes. Nous devons lutter au contraire pour ce que Victor Hugo avait magnifiquement résumé : « L’État chez lui, l’Église chez elle ».

Concernant le contrôle financier des cultes, certaines dispositions sont bienvenues telles que le contrôle tous les 5 ans par le préfet du caractère réellement cultuel des associations déclarées comme telles, la déclaration des dons éligibles à des déductions fiscales (ce qui n’était pas le cas des associations cultuelles jusqu’à présent) ou encore la nécessité de faire certifier les comptes de l’association chaque année par un commissaire aux comptes et l’accroissement des moyens et pouvoirs donnés à TRACFIN pour contrôler la provenance des dons.

L’économie générale de cette partie du texte est de soumettre les associations cultuelles à l’association de 1905, plus exigeante en matière de contrôle financier que la loi de 1901 (actuellement, 92 % des associations cultuelles musulmanes sont sous l’empire de la loi de 1901).

Mais le gouvernement a lâché une contrepartie très importante aux religions, à savoir la possibilité pour les associations cultuelles d’avoir des immeubles de rapport à condition que ceux-ci soient acquis gratuitement (dons, legs).

L’extension déjà actée de l’obligation de la scolarité dès trois ans permet aux écoles privées pour la plupart catholiques de percevoir des fonds publics légaux qui jusqu’à présent lui échappaient.

Nous devons réaffirmer notre combat : les fonds publics doivent être réservés à l’École publique.

Concernant les autres dispositions du texte, on ne peut qu’être dérouté par la confusion permanente entre la lutte contre le terrorisme et les actions violentes d’une part et la lutte contre des pratiques communautaristes déjà prohibées d’autre part.

Une mesure apparaît véritablement dangereuse. Il s’agit de la création du délit de haine en ligne (un réchauffé de la loi Avia retoquée par le conseil constitutionnel). La définition juridique est vague et surtout ce délit, par dérogation à l’article 24 de la loi de 1881 consacrant la liberté de la presse, pourra être jugé en comparution immédiate !

Outre que cette dénaturation de la loi de 1881 n’est pas anodine, le ministre de la Justice a prétendu lors d’une conférence de presse du 9 décembre 2020 que cette voie procédurale ne s’appliquerait pas aux journalistes. Quid dans ce cas du principe d’égalité de tous les citoyens devant la loi ?

Des mesures semblent soit cosmétiques, soit inapplicables :

– L’interdiction des certificats de virginité se heurte au secret médical qui lie un médecin avec, en l’espèce, une patiente. Le gouvernement a-t-il l’intention de mettre un policier dans chaque cabinet médical ?

– Les mariages forcés existent, mais ils sont très rarement célébrés en France. Or, le dispositif prévu par le projet de loi de vérification de la réalité du consentement par un entretien préalable avec un Officier d’état civil quand il y a doute ne s’appliquerait qu’en France. Faut-il rappeler que les maires ont déjà l’obligation de s’assurer de la sincérité du consentement à mariage de chacun des partenaires ?

– Les lois sur l’héritage en France interdisent depuis longtemps toute discrimination entre garçons et filles. Mais il est admis que, même si on ne peut plus déshériter totalement un de ses enfants, on peut limiter sa part à la portion réservataire. Le dispositif de contrôle accru pour s’assurer que les filles ne sont pas lésées par rapport aux garçons (qui de toute façon ne pourrait s’appliquer qu’aux biens immobiliers se trouvant en France) apparaît bien peu efficient.

– La création d’un nouveau délit de mise en danger de la vie d’autrui par divulgation d’éléments concernant sa vie privée dans le but de porter atteinte à sa vie ou à son intégrité physique ou psychique ou à celle des membres de sa famille. La répression de ce délit se heurtera à la difficulté pour le juge de caractériser l’intention de nuire. Il est à noter que le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi a considéré que cette intention devra être « manifeste et caractérisée ». Ce nouveau délit fait en grande partie doublon avec l’actuel article 433-3 du Code pénal réprimant les menaces de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférés à l’encontre de toute personne dépositaire de l’autorité publique ou autres personnes chargées d’une mission de service public dans l’exercice de ses fonctions. Si cet article est davantage en lien avec l’assassinat de Samuel Paty qu’avec les promesses faites par E. Macron aux syndicats de policiers et qui ont donné l’article 24 de la proposition de loi dite « sécurité globale », il n’en demeure pas moins qu’il instaure une sorte de délit d’intention bien difficile à caractériser.

Enfin, ce projet de loi pèche gravement par ses manques :

– La loi du 9 décembre 1905 n’est toujours pas applicable à l’ensemble du territoire national, et notamment à l’Alsace-Moselle.

– Le texte ne comprend aucune disposition positive visant à lutter efficacement contre les discriminations réelles au logement, à l’embauche ou contre les contrôles d’identité au faciès.

Toutes mesures qui seraient de nature à « conforter les principes républicains » pour de bon.

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Y-a-t-il une alternative à la mondialisation malheureuse ? Nous répondons par l’affirmative.

par Philippe Duffau

 

Proverbe wolof du Sénégal : « L’Homme est le remède de l’homme. »

Tout le monde se souvient de l’affirmation péremptoire de Margaret Thatcher avec l’acronyme « TINA » « There is no alternative ! » traduit par « Il n’y a pas d’alternative », « Il n’y a pas d’autres choix » ou encore « Il n’y a pas de plan B. »

Le propos est de démonter cette affirmation qui, à force d’être répétée, apparaît comme une évidence. Pour cela, il est essentiel de préciser ce que recouvre le terme de « mondialisation », d’analyser la mondialisation actuelle et ses dégâts soit, de 1992 à nos jours, 400 millions de morts et d’explorer d’autres voies.

Cet exercice participe de l’envie de construire un monde dans lequel l’universalité des droits et devoirs devient une réalité en concrétisant les droits formels, la devise républicaine de Liberté, d’Égalité et de Fraternité au sens au Victor Hugo évoquait la République universelle tout en souhaitant les États-Unis d’Europe, un souhait qui est aux antipodes de l’Union européenne actuelle et de ses principes essentiellement marchands, libre-échangistes, de mise en concurrence des travailleurs…

Comme l’affirmait Henri Lefebvre en 1970, nous revendiquons « la qualité d’être » des « utopistes… Ceux qui pensent arrêter leur regard sur l’horizon et se bornent à regarder ce qu’on voit, ceux qui revendiquent le pragmatisme et tentent de faire seulement avec ce qu’on a, n’ont aucune chance de changer le monde… Seuls ceux qui regardent vers ce qu’on ne voit pas, ceux qui regardent au-delà de l’horizon sont réalistes. Ceux-là ont une chance de changer le monde… L’utopie c’est ce qui est au-delà de l’horizon… Notre raison analytique sait avec précision ce que nous ne voulons pas, ce qu’il faut absolument changer… Mais ce qui doit venir, ce que nous voulons, le monde totalement autre, nouveau, seul notre regard intérieur, seule l’utopie en nous, nous le montrent… »

Les cinq piliers de la mondialisation

La mondialisation actuelle comme les deux précédentes présentent les mêmes cinq caractéristiques fondamentales :

  • Un réseau commercial planétaire intégré qui inclut de gré ou de force la quasi-totalité de l’humanité.

  • Une superpuissance qui impose les règles.

  • Un courant de pensée économique dominant qui correspond aux intérêts de la superpuissance du moment.

  • Prédation des ressources matérielles des territoires du plus faible.

  • Asservissement des populations de ces territoires faibles.

Bilan de cette troisième mondialisation de l’année 1992 à l’année 2017 incluse

L’hégémonie globale exercée par les États-Unis est au service des grandes fortunes et des multinationales du pays en raison non d’un complot secret ou d’une conspiration occulte mais du fait que ces grandes fortunes et ces multinationales contrôlent la vie politique américaine (autorisation sans limite des dépenses de communications des entreprises, des syndicats, des ONG et des associations au profit de tel ou tel candidat). Le cadre de pensée de cette mondialisation, comme pour la précédente, est le libre-échange élevé en dogme tel un mantra.

Le libre-échange apparaît comme la cause principale des immenses inégalités de développement entre pays riches et pays pauvres et conduit, dans les pays riches les mieux dotés en travail hautement qualifié à l’aggravation des inégalités de revenus et l’appauvrissement de la population la plus pauvre.

Le système financier actuel depuis 1971 et Richard Nixon a eu pour conséquences voulues, au travers d’une féroce concurrence pour être le plus « attractif » possible, un nivellement par le bas dans les pays riches.

Mais aussi dans les pays pauvres pour accueillir les activités des multinationales ou de leurs sous-traitants :

  • Renoncement à renforcer leur système fiscal insuffisant,

  • Renoncement à renforcer leur droit social pourtant indigent,

  • Renoncement à renforcer les règles environnementales souvent inexistantes,

  • Existence des « ateliers de la sueur » et du néoesclavage.

Économie guerrière : 600 000 morts

Parmi les dix plus grandes puissances militaires mondiales, les États-Unis dépensent à eux seuls autant que l’intégralité des neuf suivants du classement. La conséquence est la dépendance de tout un pan de l’économie américaine qui vit de la guerre et la tendance forte à surévaluer les menaces des puissances rivales et à pousser à de vastes opérations militaires. Ce « complexe militaro-industriel » a été ciblé par le président Eisenhower qui a conjuré ses concitoyens au sein des cercles du pouvoir « d’empêcher ce complexe d’acquérir une influence injustifiée… Nous devons ne jamais laisser la puissance de cette alliance mettre en péril nos libertés ou nos processus démocratiques. »

Guerres de pillages : 6,5 millions de morts

En lien avec l’économie guerrière, les guerres de pillages ont pour enjeu la mainmise sur une ou plusieurs ressources : cobalt, tantale, or, diamants, niobium, gaz, pétrole. Ces ressources sont soit pillées soit exploitées dans des conditions infâmes qui maintiennent les populations des territoires concernés dans l’extrême pauvreté.

Famines et malnutritions : 11 millions de morts malgré l’abondance de nourriture

Les proportions atteintes par l’insécurité alimentaire sous le règne de la mondialisation donnent le vertige. Un cliché est souvent répandu : c’est parce l’humanité ne produit pas assez de nourriture que la famine existe, nous serions donc trop nombreux sur Terre. En réalité, depuis plus d’un demi-siècle, l’humanité produit plus de nourriture qu’elle n’en a besoin. Ainsi, en 1992, nous étions 5,5 milliards de Terriens et produisions suffisamment pour 6,5 milliards d’habitants, en 6,2 milliards pour 7,8 milliards, en 2012, 7,1 milliards pour 9,3 milliards. L’écrasante majorité de la population affamée souffre d’une sous-alimentation non pas du fait de guerre ou de sécheresse mais pour des raisons structurelles dues à une répartition inéquitable des ressources sous le règne de la mondialisation. Les multinationales accaparent des terres cultivables pour l’exportation qui devraient servir à produire de la nourriture.

Conditions de travail infâmes : 56 millions de morts

Les pays pauvres qui ont aspiré l’industrie textile ont en commun de pratiquer des conditions de protection sociale, de sécurité et santé au travail beaucoup plus basses que les pays riches : travail des enfants, plus de 48 heures de travail hebdomadaire.

L’industrie de l’informatique et du smartphone est également édifiante : 200 000 personnes travaillent et dorment sur place dans l’usine Foxconn en Chine à 100 par dortoirs, station debout exigée durant des heures, journées de 15 heures…

Le néo-esclavage : 25 millions d’êtres humains

L’esclavage moderne, les camps de travail ne sont pas un reliquat des temps plus anciens mais sont inhérents au modèle de maximalisation des profits des industries les plus à la pointe de la technologie comme la production de matériel informatique, mais aussi dans l’industrie de la mode. Ainsi, en 2015, 430 000 êtres humains sont décédés d’accidents du travail ou de maladies professionnelles dans les pays riches, 2,3 millions dans le reste du monde.

Catastrophes écologiques : 69 millions de morts

L’actuel réchauffement climatique a débuté plusieurs décennies avant la mondialisation ultralibérale dominante depuis 1992 mais cette dernière est sans conteste responsable de son aggravation sans commune mesure.

Éradication des autres espèces par les activités de l’être humain

L’extinction contemporaine en cours pour cause humaine, 100 fois plus rapide que celles qui ont eu lieu avant que l’espèce humaine devienne dominante (anthropocène).

Cette extinction actuelle est éminemment dangereuse pour l’humanité pour deux raisons :

  • certaines espèces sont directement indispensables à la survie de l’espèce humaine comme les abeilles compte tenu de leur rôle dans pollinisation,

  • la complexité des interdépendances entre toutes les espèces végétales et animales non encore comprise par la science, complexité qui interroge sur l’impact de la disparition d’une espèce quant à la survie de l’humanité.

Consommation de masse et publicité

L’économie-monde repose sur la consommation effrénée de masse. Celle-ci exige la manipulation des consommateurs au travers de la publicité qui revient à nous abreuver de spots publicitaires pour nous pousser à acheter tel ou tel produit de telle ou telle marque même si nous n’en avons ni l’utilité ni l’usage.

Le « jour du dépassement »

Ce jour où l’humanité dans le cadre de l’économie-monde a consommé intégralement les ressources que la Terre procure sans fragiliser leur renouvellement au cours de l’année ne cesse d’arriver de plus en plus tôt : en 1980, le 3 novembre, en 1990, le 4 octobre, en 2010, le 28 août, en 2019, le 29 juillet (source : Global Footprint Network).

Les problèmes d’approvisionnement en eau, les émissions de GES se démultiplient. Les conséquences du réchauffement climatique induit par ces rejets en sont l’expansion des zones arides, la contraction des zones polaires impactant massivement la répartition, la démographie et les activités saisonnières de nombreuses espèces végétales et animales et donc, à terme, les migrations humaines. L’acidification des Océans et la montée des eaux entraînent la disparition des récifs coralliens, l’extinction progressive d’écosystèmes marins, la diminution des réserves alimentaires dans les eaux tropicales peu profondes de 40 % et de la biodiversité marine de 17 %. La fonte du pergélisol riche en CO2 et méthane libérera dans l’atmosphère également des GES.

La pollution de l’air : 3 millions de morts par an soit 69 millions de 1992 à 2017

Les destinations privilégiées des délocalisations d’usines correspondent aux zones concernées par les problèmes liés à la pollution atmosphérique : Inde, Chine et Égypte sont aux dix premiers rangs mondiaux d’attractivité et aux dix premières places de la mortalité due à la pollution atmosphérique.

L’économie-monde s’illustre par un pacte mortifère : des pays pauvres sont devenus émergents en se substituant aux pays riches dans les activités industrielles les plus polluantes pour l’air avec pour conséquence l’empoisonnement de leur population.

256 millions de morts de maladies soignables

Est imputable à la mondialisation malheureuse la mortalité due aux maladies dont on peut guérir facilement. Les dix principales causes de décès dans les pays pauvres concernent à 90 % des morts évitables par défaut d’accès aux soins qui existent : pneumonie, morts néonatales, diarrhée, tuberculose, sida, paludisme…

Rôle des multinationales pharmaceutiques

La protection de médicaments par un brevet confère aux multinationales pharmaceutiques un monopole sur leur fabrication, vente et exportation. Les prix étant fixés sur la base de la profitabilité des pays riches, ils se révèlent inabordables pour les systèmes de santé des États pauvres.

Il y a une alternative

La conscience collective mondiale a progressé sur la nécessité d’agir tout de suite.

Grands arguments pro-mondialisation :

  • Des centaines de millions d’êtres humains sont sortis de la pauvreté : vrai en partie mais une réalité qui contredit cette affirmation avec les 11 millions de morts de faim et 256 millions de morts de maladies par défaut d’accès à la nourriture et aux médicaments.

  • Baisse des prix des produits de consommation courante les rendant accessibles à des centaines de millions d’êtres humains : vrai mais la réalité indique que cela se fait au prix du chômage de masse des travailleurs non qualifiés et peu qualifiés des pays riches et de conditions de travail dégradantes.

  • Il n’y a pas d’alternative : vrai en apparence car il n’existe, à ce jour, aucun modèle économique alternatif. Les exemples des Révolutions américaines et françaises montrent que ce n’est pas parce qu’il n’y avait que des régimes monarchiques que l’émergence de régimes républicains étaient impossibles.

De la démondialisation et du protectionnisme

Comme aucun système, comme cela s’est vérifié dans toute l’histoire humaine, n’est éternel, une autre voie peut exister. Cette autre voie porte un nom : la démondialisation. Elle s’articule autour d’une proposition centrale : le protectionnisme solidaire qui permet :

  • de protéger la production locale contre la concurrence des produits importés,

  • de protéger l’écosystème contre la pollution provoquée par les conditions de production et de transports des marchandises importées,

  • de jouer sur les prix au travers des tarifs douaniers,

  • de jouer sur les quotas d’importations,

  • d’imposer des réglementations normatives au travers de normes sociales, sanitaires, environnementales.

Taxe pigouvienne contre les externalités négatives pour l’être humain et l’environnement

Une taxe, la taxe pigouvienne semble efficace. Comme les producteurs et investisseurs sont obnubilés par la satisfaction de leurs intérêts privés Arthur Cécil Pigou propose que l’État taxe systématiquement les activités économiques ayant un impact négatif sur la société. De manière générale est considérée comme taxe pigouvienne toutes mesures qui taxent les externalités négatives et subventionnent les externalités positives. Cette logique pigouvienne pour fonctionner doit imposer que l’intégralité de l’argent collecté par les taxes sur les activités négatives soit affectée au subventionnement des activités dont les effets sont positifs pour la société.

Protectionnisme et règles internationales

Le protectionnisme est permis par l’article VI du traité fondamental de l’OMC qui autorise les États à surtaxer les produits importés dont la compétitivité-prix résulte d’une concurrence déloyale. Il est également autorisé à l’intérieur de l’Union européenne dans les cas concernant la protection de la santé, des consommateurs et de l’environnement. De grandes puissances l’ont pratiqué avec succès pour développer et maintenir une base industrielle.

Le protectionnisme serait vecteur de nationalisme, de conflits guerriers, de crises économiques

Des exemples indiquent qu’il n’y pas forcément de relation de cause à effet.

  • dictature de Pinochet au Chili : nationaliste et partisane du libre-échange mondialisé,

  • l’Union européenne : n’est pas une nation, n’est pas nationaliste et peut pratiquer le protectionnisme notamment sur le plan réglementaire,

  • Première Guerre mondiale et Seconde Guerre mondiale : les volumes des échanges ont crû de 1901 à 1913 et de 1934 à 1937, année où la marche du conflit planétaire était très avancée,

  • Sept ans d’augmentation du libre-échange ont précédé le krach de 1929, quatorze ans pour la double crise de 1974 et 1979, quatre ans pour la krach de 1987, quatorze ans pour la crise asiatique de 1997, vingt ans pour l’éclatement de la bulle Internet boursière de 2000 et cinq ans pour la crise des subprimes de 2007à 2009.

Certes le protectionnisme a pour effet une hausse des prix due à la taxation des produits importés, à la hausse du revenu moyen de la population en raison du plein-emploi. Ainsi, le choix politique est le suivant :

  • soit le protectionnisme avec en corollaire des prix plus élevés et le plein-emploi,

  • soit le libre-échange avec des prix plus bas, un chômage de masse et la pression à la baisse des salaires dans les pays riches, le néo-esclavagisme dans les territoires pauvres.

Hormis les pays pauvres disposant de ressources indispensables au monde entier et qui peuvent en tirer une rente qu’ils peuvent consacrer à leur développement humain, les autres pays pauvres sans ressources rares sont privés de débouchés. L’actuel système de libre-échange ne parvient pas à les sortir de la pauvreté. Pour eux aucun des deux systèmes n’est avantageux.

Alternative humaniste et écologique : substituer à l’actuel FMI, un « Fonds de développement humain » (FDH)

La création d’une nouvelle organisation mondiale, le FDH, en commençant par les pays du G20, alimentée par une taxe commune dite Tobin sur les transactions boursières spéculatives, déstabilisantes pour le système financier pourrait servir à améliorer le bien-être général des populations des pays pauvres en favorisant l’accès à un toit, à une nourriture suffisante, à l’éducation, à la santé, à la culture.

Pour éviter l’obstacle endémique du clientélisme, de la corruption, des détournements de fonds, les fonds alloués à la mise en œuvre de grands programmes de développement humain devraient être gérés par les agences spécialisées des Nations unies en lien avec des ONG sous-traitantes agréées.

Ainsi pourrait être mis un terme au TINA, pas d’alternative à la mondialisation malheureuse, et pourrait émerger un nouveau monde plus juste associant progrès scientifique, technique et progrès humain tout en préservant les grands équilibres écologiques planétaires.

Recommencer la Révolution : exemple de la Révolution française de 1789 pour Emmanuel Kant (Königsberg) :

« Un tel phénomène dans l’histoire du monde ne s’oubliera jamais car il a ouvert au fond de la nature humaine une possibilité de progrès moral qu’aucun homme n’avait jusqu’à présent soupçonné. Même si le but poursuivi ne fut pas atteint… ces premières heures de liberté ne perdent rien de leur valeur. Car cet événement est trop immense, trop mêlé aux intérêts de l’humanité et d’une trop grande influence sur toutes les parties du monde pour que les peuples, en d’autres circonstances, ne s’en souviennent pas et ne soient conduits à en recommencer l’expérience. »

Entre la justice planétaire et le pouvoir féodal des cosmocrates, des entreprises multinationales ou transnationales et de la finance spéculative la guerre est permanente et l’antinomie radicale.

La seule issue ainsi que nous y invite Emmanuel Kant est de recommencer la révolution.

Bibliographie :

  • L’Empire de la honte, Jean ZIEGLER, Fayard, 2005.

  • Le Livre noir de la mondialisation, 400 millions de morts, Thomas GUENOLE, Plon, 2020.

 

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Macron-Castex-Véran, vous vous comportez comme des « salopards » avec l’hôpital public

par Zohra Ramdane

 

Alors que le Président de la République s’est félicité de voir les professionnels de santé applaudis lors de la première vague COVID, les mesures qui découlent du plan Investir pour l’Hôpital et du Ségur de la santé sont une invitation à déserter l’hôpital public pour tous les praticiens engagés, alors que plus de 30 % des postes sont toujours vacants ! Les médecins Anne Wernet, présidente du Snphare, Cyrille Venet du Smnh-Fo, Christophe Prudhomme de l’Ufmict-Cgt, Patrick Pelloux de l’Amuf, Arnaud Chiche du collectif santé en danger ont raison d’écrire que « par une mécanique non compensée par les mesures Ségur, les décrets pour l’attractivité du 28 septembre 2020 et le décret à paraître fin janvier sur les modifications de grilles d’échelon conduisent à la perte relative de 4 années d’ancienneté pour les praticiens hospitaliers nommés avant 2020, et à une arrivée en fin de grille au-delà de l’âge de la retraite ! »

La première arnaque est la présentation dans l’urgence, et en plein Ségur, d’un décret supprimant les trois premiers des treize échelons de la grille d’ancienneté des praticiens hospitaliers. Cette excellente mesure, discutée et plébiscitée par tous les syndicats depuis des années, se devait d’être accompagnée d’une mesure compensatrice pour les autres praticiens : le Ségur réglerait cela, nous a-t-on dit au ministère. Il n’en a rien été… les modalités d’applications qui ont précédé la parution de ce décret ont confirmé l’entourloupe, faisant coexister deux grilles d’ancienneté selon que vous êtes nouveau dans la carrière hospitalière, ou que vous y êtes depuis plus longtemps, accordant un désavantage de 4 années d’ancienneté : la fidélité à l’hôpital public est punie !

La deuxième arnaque est celle des accords du Ségur, majorée par cette entourloupe. La création des trois derniers échelons fait passer la durée de la progression de carrière de 24 ans à 32 ans (praticiens nommés en 2020) et 36 ans (PH nommés avant 2020). Ceci a deux graves conséquences : d’une part, tous les PH actuels atteindront le dernier échelon après 66 ou 67 ans, l’allongement de carrière va limiter la constitution d’une pension – ce qui, dans un système de retraite à points (que nous avons déjà avec l’IRCANTEC, et qui représente la part principale de nos futures pensions de retraites), est particulièrement pénalisant – ou incitera à travailler au-delà des limites physiologiques : danger pour les patients, danger pour les praticiens ! l

Tout est fait pour créer des injustices nouvelles au sein de l’hôpital public. On voudrait inciter les médecins hospitaliers à partir, on ne s’y prendrait pas autrement !

Histoire
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1920 : la scission du mouvement ouvrier français et la naissance du Parti communiste (SFIC)

par Pierre Miléo

 

Cette nouvelle brochure du CREAL76 élaborée par Pierre Miléo, docteur en histoire, donne quelques clés de compréhension sur la fracturation du monde ouvrier puis syndical pendant et après le conflit mondial de 1914-1918.
Depuis avril 1905 au congrès du Globe à Paris, quelques mois avant l’adoption de la Loi de séparation des Églises et de l’État, l’unité s’était faite à gauche au sein de la SFIO (Section française de l’internationale ouvrière).
Mais l’adhésion des dirigeants de la SFIO et de la CGT à l’Union sacrée belliciste dès août 1914 après l’assassinat de Jean Jaurès le 31 juillet, sera favorable aux forces conservatrices et religieuses, au retour des congrégations interdites depuis 1904, à la reconnaissance du Vatican comme État et ce malgré les mobilisations sociales d’ampleur à partir de 1917. C’est dans ce contexte, détaillé dans cette brochure, que nait en 1920 à Tours, la SFIC (Section française de l’internationale communiste) qui deviendra le Parti communiste en 1921.

Le CREAL76 qui entend lier combat laïque et combat social, n’est évidemment pas indifférent – à l’instar de Jaurès – à la question de l’unité dont la laïcité est une condition. À cet égard, un siècle après, le congrès de Tours laisse encore des traces dans le paysage syndical et politique. L’étymologie nous indique que le mot laïque vient du grec laos qui signifie le peuple uni dont il s’agit d’affirmer les droits, à l’opposé des clercs (kléros) « fraction de la société […] qui pense avoir reçu la mission de gouverner le reste des humains » selon Ferdinand Buisson.

Télécharger la brochure : Congrès de Tours

 

 

 

 

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Chansons déconfinées n°11

par Philippe Barre

 

En hommage à Anne Sylvestre, qui ne fut pas seulement une chanteuse qui accompagna des générations d’élèves en maternelle…

Une sorcière comme les autres… (chantée par Anne Sylvestre).

Dans la catégorie phare de notre rubrique de multirécidivistes :

« Il tape sur beaucoup de gens » par les Goguettes (en trio mais à quatre : https://youtu.be/emR79s891b8

Encore deux belles livraisons d’un autre multirécidiviste

« Et j’en oublie de vivre »  par Pascal Genneret :

Et j’en oublie de vivre (Pascal Genneret) – YouTube

« Des lumières allumées » par Pascal Genneret :

Des lumières allumées (Pascal Genneret) – YouTube

« Une sorcière comme les autres » de Laetitia Isambert et Nathalie Doummar, une autre version tout aussi émouvante…

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Rafael Correa sur les élections au Venezuela

par Venezuela Infos

 

Au Venezuela la droite vient de perdre l’Assemblée Nationale lors des élections du 6 décembre. Les électeurs ont choisi une majorité de députés chavistes (68 %). Les petits partis de droite/gauche se partagent le reste des sièges. Malgré des années de blocus, sanctions, guerre économique menés par les USA et l’UE dans l’objectif de créer de grandes difficultés quotidiennes, mécontenter et détruire la base sociale de la révolution, 32 % des électeurs.trices se sont rendue.s aux urnes. L’ex-président d’Equateur, Rafael Correa, faisait partie avec la sénatrice colombienne et militante des Droits Humains Piedad Cordoba, ou Evo Morales, des 3000 observateurs internationaux du scrutin (ainsi que l’ex-président espagnol Zapatero qui a souligné le caractère pluraliste des élections et l’absurdité du soutien de l’UE à l’extrême droite du président fantoche Juan Guaido). Rafael Correa s’est dit impressionné par la désinformation qui sévit par rapport au pays bolivarien.« Ils veulent nous faire croire qu’il y a une dictature et ils disent que le modèle a échoué alors que le Venezuela est soumis à un blocus » (article initialement publié par Venezuelainfos).

Entretien avec l’ancien président de l’Équateur

Rafael Correa est au Venezuela depuis jeudi dernier. Il a été le premier ex-président à arriver en tant qu’observateur pour les élections de mi-mandat de dimanche, à l’issue desquelles le Grand pôle patriotique de Nicolas Maduro a gagné avec 68 % des voix. Le leader équatorien est arrivé à Caracas via le Mexique, partageant un vol avec la délégation argentine, dont l’auteure de cet interview en tant qu’observatrice pour l’Internationale progressiste.

« Qu’est-ce qu’il faisait froid dans l’avion ! J’étais inquiet parce qu’ils m’ont servi un petit déjeuner chaud et ne vous ont rien donné », dit-il en nous accueillant avec sa chaleur habituelle, où son masque ne parvient pas à cacher son sourire et où les salutation se font le poing fermé. L’interview se déroule au milieu de l’emploi du temps chargé de l’ancien président, dans un bâtiment situé dans le centre de Caracas, à quelques pâtés de maison de la maison de Simón Bolívar et de la place du même nom.

Quelle est l’importance de ces élections législatives au Venezuela ?

La démocratie au Venezuela est toujours vivante. Ce qui se passe c’est que pour certaines personnes la démocratie est effective tant qu’elles gagnent les élections. Ces élections sont exactement les mêmes qu’en 2015, lorsque le gouvernement avait perdu et que l’opposition avait gagné, là elles étaient valables (dit-il avec ironie). Aujourd’hui, pour certains groupes radicaux de droite qui n’ont pas participé, il semble qu’elles ne soient plus valables.

La déformation de ce qui se passe au Venezuela est impressionnante. Dans tous les domaines : en politique, où ils veulent nous faire croire qu’il y a une dictature ici ; en économie, lorsqu’ils disent que le modèle a échoué quand le Venezuela est soumis à un blocus. Le pays a dû développer une économie de guerre, c’est comme si je bombardais le Chili demain pour dire ensuite que le néolibéralisme a échoué.

En parlant d’économie de guerre, comment analysez-vous le Venezuela, précisément à partir du blocus, du pétrole, de la décision de Nicolas Maduro de faire des ouvertures au capital privé ?

Je ne sais pas comment le Venezuela survit, les choses sont terribles. On pourrait croire qu’il s’agit d’une histoire fantastique, d’une mauvaise plaisanterie. Le pays qui avait autrefois plus de 50 milliards de dollars de revenus pétroliers, n’atteint plus aujourd’hui 500 millions, soit un centième de ce montant. Voilà à quel point la situation est grave, un blocus brutal. Face à ces circonstances, il est nécessaire de rendre le cadre juridique plus flexible afin d’attirer les investissements étrangers. C’est ce que le président Maduro a fait avec la loi anti-blocage et je suis tout à fait d’accord. Ce que nous ne pouvons pas ignorer, ce sont les conséquences de ce blocus. Je ne comprends pas les analystes et les pseudo-professeurs qui parlent de l’échec des politiques économiques du Venezuela ou de la migration, en omettant de dire que le pays est bloqué, qu’il est dans une économie de guerre.

Quelle est l’intention de cette droite politico-médiatique qui, par exemple, en Argentine a des dirigeants comme Patricia Bullrich, la présidente du PRO (parti de Macri) qui a appelé le peuple à ne pas aller voter ?

Les élections sont valables tant qu’ils les gagnent, la démocratie est valable tant qu’elle sert leurs intérêts. Mais quand il y a un risque que quelque chose change dans cette démocratie, ils n’ont aucun souci à y mettre fin. Nous avons vu les coups d’État, les déstabilisations, etc. Alors, sûrement, puisque cette dame a vu que son allié au Venezuela n’allait pas gagner les prochaines élections, a-t-elle voulu les délégitimer en appelant à l’abstention.

Correa porte un costume bleu et une chemise blanche andine avec une broderie pré-colombienne bleue. La tenue vestimentaire habituelle reste un message d’identité nationale auquel il n’a pas renoncé. La salle où se déroule l’entretien est vitrée. Des fenêtres, on peut voir une partie de la ville. À l’extérieur de la salle, on aperçoit, attendant une réunion Fernando Lugo, l’ancien président du Paraguay qui a été renversé par un coup d’État en 2012 et qui est également l’un des anciens présidents venus en observateurs, avec le Bolivien Evo Morales et l’Espagnol José Luis Rodríguez Zapatero.

Comment voyez-vous la situation actuelle en Équateur, le binôme Arauz-Rabascall, votre propre interdiction ?

Triomphale. Nous travaillons comme si nous n’avions pas un seul vote, mais tous les sondages nous placent en tête et pour beaucoup d’entre eux, nous gagnons au premier tour. C’est le bon côté de l’histoire, le mauvais est que le gouvernement le sait. Pour ce gouvernement malfaisant (de Lenin Moreno), la pire chose au monde serait que nous gagnions. Ils n’auront nulle part où se cacher, nous ne cherchons pas la vengeance mais la justice. Ils ont commis des crimes terribles : corruption, persécution politique ; ils sont prêts à tout, absolument à tout…  Le binôme, qui s’est inscrit le 18 septembre et a été contesté à maintes reprises, n’est pas encore officiellement enregistré. Plus de deux mois plus tard, le duo n’est pas très fort, bien qu’il soit en tête de tous les sondages. Très probablement, arguant du problème de la pandémie, voudront-ils reporter les élections pour voir comment ils peuvent nous vaincre ou accepter un candidat à la dernière minute en enfreignant les règles électorales et en forçant un second tour et, dans ce second tour, s’unir contre nous. Ils sont désespérés, mais nous sommes optimistes et enthousiastes.

 

Rafael Correa rappelle les persécutions menées par le gouvernement de Lenin Moreno. Cette interview se déroule avec trois citoyens équatoriens exilés de leur pays : Correa lui-même, qui a été condamné et a reçu l’ordre d’être arrêté en Équateur ; Fernando Alvarado, ancien fonctionnaire et chef de campagne de la révolution citoyenne, et Gabriela Rivadeneira, une cadre importante des partisans de Correa et ancienne présidente de l’Assemblée équatorienne. Chacun d’eux raconte l’histoire du moment où il a dû quitter l’Equateur. Ces expériences donnent le frisson en pensant à un appareil d’État répressif qui les cherche dans la ville et à des amis qui appellent et disent, comme dans le cas de Rivadeneira et Alvarado : « Jette ton téléphone portable, prends tes affaires, tes enfants, et partez maintenant parce qu’ils vous cherchent ».

Alvarado est ici au Venezuela et Rivadeneira vit au Mexique avec ses deux enfants. L’ancienne députée révèle que le jour où le président Andrés Manuel López Obrador lui a donné refuge, le Mexique a rouvert la porte de l’asile politique après presque quarante ans d’inactivité.

La dette, le coronavirus, les médias

Comment les pays de la région vont-ils se sortir des situations de dette extérieure et de pandémie ?

Pour surmonter la pandémie, nous aurons besoin d’une aide et d’un financement extérieurs et il est préférable de le faire au niveau régional, de manière coordonnée, pour être un peu plus présent au niveau mondial. L’Argentine est un cas particulier. Elle a reçu le plus grand financement de l’histoire du FMI, mais il a été fait de manière absolument irresponsable : cette dette envers le FMI n’a pas servi à financer des routes, des centrales hydroélectriques, des augmentations de réserves, mais elle a financé la fuite des capitaux. L’Argentine s’est retrouvée endettée, l’économie est en crise et l’argent a quitté le pays.

Il y a quelques minutes, vous avez dit qu’en 2015 « ce n’est pas Macri mais Clarín (le plus grand groupe de presse et médias d’Argentine) qui a triomphé ».

Tant que nous n’aurons pas résolu la question des médias, il n’y aura  ni démocratie ni développement en Amérique latine. Parfois, nous ne lui accordons pas l’importance qu’ont certains problèmes. Que font les médias ? Ils nous informent. En principe, ils devraient être les gardiens de la vérité ; en Amérique latine, ils ont été les premiers à voler cette vérité. Sans vérité, sans information, nous n’avons pas de démocratie, pas d’élections libres, nous sommes manipulés, il n’y a pas de décisions politiques correctes, pas de décisions correctes pour l’action politique et sans cela, il n’y aura pas de développement. Les médias sont les grands opposants aux gouvernements progressistes.

Propos recueillis par Cynthia Garcia.



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