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  1. chronique d'Evariste
    1. Robert Redeker : après l'indignation, que faire ?, par Évariste
  2. Débat autour du soutien à Robert Redeker
    1. Ne laissons pas Redeker avoir raison, par Sonja Rivière
    2. L'extrême droite fascisante se réjouit du sort de Redeker, par Caroline Fourest
  3. combat laïque
    1. Où va la France?, par Bernard Teper
    2. Anas El Jazouli, Urgence après 23 jours de grève de la faim ses jours sont en danger !, par Le Comité De Soutien
    3. Rapport "Machelon", Rapport "Rossinot", et proposition de loi "Glavany" étranges convergences, par Les Laïques En Réseau, Micheline Montot, Jean-Michel Sahut, Monique Vézinet, Robert Albarèdes
    4. La laïcité chez nous et chez nos voisins, par Hakim Arabdiou
  4. Les laïques sur le terrain
    1. Compte rendu du premier débat sur la violence et les enfants, à Lyon, par Rémi Thibert
  5. santé
    1. 4ème RENCONTRE NATIONALE - ETATS GENERAUX DE LA SANTE ET DE L'ASSURANCE MALADIE (EGSAM), par Bernard Teper, Lucette Guibert
  6. Si tu veux pas de Sarko, y'a pas que Ségo!
    1. Le syndicalisme obligatoire n'est pas une mesure de gauche, par Raquel Garrido
    2. Sarkozy et la République : le discours en trompe l'oeil, par Anne-Marie Le Pourhiet
  7. services publics
    1. Privatisation de GDF: Lettre de Marie-George Buffet à Pierre Carassus, par Marie-George Buffet
  8. école publique
    1. Lettre ouverte au ministre de l'Education nationale, par Mireille Popelin
  9. combat féministe
    1. Violences conjugales : une femme meurt tous les deux jours, par Delphine De Mallevoüe
    2. Indonésie: les médecins n'ont plus le droit de pratiquer l'excision, par AFP
  10. république et enjeux de mémoire
    1. Colonisation : pour en finir avec les idées reçues, par Christian Authier
    2. Indigènes... ou la difficile mémoire, par Mireille Popelin
  11. à lire
    1. 7 millions de travailleurs pauvres, la face cachée des temps modernes, de Jacques Cotta, par Jean-François Chalot
  12. Agenda

1 - chronique d'Evariste

1.1 - Robert Redeker : après l'indignation, que faire ?

La rédaction de Respublica n'est pas surprise par l'afflux de signatures que l'appel qu'elle a impulsé, Face à la barbarie, le soutien à Robert Redeker doit être sans réserve, et encourage ses lecteurs qui ne l'ont pas fait à renforcer le succès de cette initiative (www.petitionredeker.info).

Elle se félicite que d'autres aient eu la même idée, notamment Les Temps Modernes, dont le texte est paru dans le journal Le Monde, et d'autres sites, et souhaite que l'ensemble de ces initiatives puissent converger vers des actions communes.

La situation de ce professeur de philosophie, condamné du jour au lendemain à la clandestinité, pour avoir écrit des choses justes sur le Coran (et plus discutables sur la Bible), révolte tous les citoyens de notre pays attachés à la liberté d'expression.

L'opinion n'est pas prête à se laisser intimider par ceux qui voulaient imposer le voile à l'école, refusent la mixité à l'hôpital et traînent devant les tribunaux l'hebdomadaire Charlie Hebdo.

Face à cela, les propos peu élégants, au vu de la situation dramatique du philosophe, de la direction du Mrap, de celle de la LDH ou de quelques islamogauchistes pèsent bien peu, de même que le sectarisme congénital d'une organisation laïque qui trouve encore le moyen de lancer une polémique au lieu de se rassembler derrière la défense de Redeker.

Les citoyens comprennent que l'islam politique est aujourd'hui le fer de lance d'un combat féroce contre la laïcité, contre la libre critique de toutes les religions, contre la liberté d'expression.

Ils sentent confusément que ce sont les reculs des différents gouvernements, la complaisance de secteurs entiers de la gauche devant l'islamisme, son instrumentalisation par Nicolas Sarkozy, qui encouragent les fous d'Allah à réclamer toujours plus de dérogations communautaristes, au nom de la reconnaissance de la deuxième religion de France, en ayant recours systématiquement à un discours victimaire et culpabilisant.

Ils en ont assez, et sont de plus en plus écoeurés par l'absence de courage politique, face à des telles agressions de nos principes laïques et démocratiques, dont aujourd'hui Robert Redeker est la nouvelle victime.

Au-delà de signer des pétitions, aujourd'hui que faire ? D'abord, devons-nous admettre comme allant de soi qu'il suffise que des fanatiques islamistes condamnent à mort un mécréant pour qu'il ne puisse plus enseigner, et doive vivre dans la clandestinité ? Il appartient à Robert Redeker, et à lui seul de le décider, en sachant qu'on ne sort pas indemne d'une telle épreuve.

J'ai connu un syndicaliste, responsable de service d'ordre de la CGT, qui avait subi des menaces de mort, dans les années 1980, par des gens se réclamant d'Honneur de la Police. J'avais pu constater à quel point cela pouvait entamer le quotidien d'une vie, et ébranler les plus solides. Mais si Robert Redeker décidait, après réflexion, de vouloir continuer à enseigner, il appartiendrait alors aux forces de sécurité de l'Etat de le protéger avec toute l'efficacité nécessaire.

Bien évidemment, quoi qu'il arrive, le philosophe ne doit pas être pénalisé financièrement par les conséquences de son article.

Mais il appartient aux réseaux militants de réfléchir ensemble à la meilleure façon de réagir efficacement, face à de telles remises en cause de la liberté d'expression.

Le fait que des journaux français, comme France-Soir et Charlie Hebdo d'abord, aient publié les dessins sacrilèges du prophète a été un acte de solidarité vis-à-vis des dessinateurs danois.

Pourquoi, dans le même esprit, la presse ne publierait-elle pas, dans la rubrique Opinions d'autres articles critiquant librement les religions, toutes les religions, comme l'a fait Robert Redeker dans Le Figaro du 19 septembre ?

Pourquoi ne pas publier d'autres articles, démontrant également certains que certains versets du Coran sont inacceptables ? Notre ami Pascal Hilout, notre collaborateur Jocelyn Bézecourt, le philosophe Michel Onfray et bien d'autres ont ce talent. Plus on critiquera librement l'islam, le prophète et tous les autres dogmes, mieux on protègera les auteurs de ces critiques.

Pourquoi les milieux artistiques ne programmeraient-elles pas l'Idoméné de Mozart, qui vient d'être lamentablement déprogrammé à Berlin ?

Pourquoi ne pas programmer des pièces de Voltaire ? Il ne s'agit pas de rechercher la provocation pour le plaisir, mais de montrer la force d'une société voulant défendre la liberté artistique et la liberté d'expression, et refusant de céder aux injonctions des censeurs intégristes.

Pourquoi ne pas monter, partout où cela est possible, des conférences de presse de soutien, des collectifs, des réunions publiques avec des conférenciers et des historiens de talent, pour renforcer la mobilisation et rendre dynamique la défense des libertés républicaines ?

Enfin, il suffit de regarder la diversité des signatures, pour comprendre que le sectarisme et la division n'ont pas leur place dans une telle campagne. Les cinq premiers signataires de notre liste, Michel Onfray, Corinne Lepage, Alain Finkielkraut, Yvette Roudy et notre collaborateur Bernard Teper ne partagent pas le même point de vue sur nombre de sujets. Sans doute ne voteront-ils pas pour le même candidat en 2007. Certains ont voté oui au TCE, d'autres ont voté non. Certains s'impliquent dans le combat social, d'autres n'ont pas ces priorités.

Mais au-delà de ces clivages, dont il ne faut pas nier l'importance, ils partagent le même attachement aux valeurs fondamentales de la République, et refusent que toute pression cléricale, d'où qu'elle vienne, ne puisse remettre en cause des libertés démocratiques fondamentales, comme celle de parler librement d'une religion ou d'un dogme.

C'est cette capacité à dépasser ponctuellement des clivages, à établir des pôles de convergence, qui sera la meilleure garante de l'efficacité d'un combat qu'il faut aujourd'hui engager, et gagner.

Évariste Pour réagir aux articles,
écrire à evariste@gaucherepublicaine.org

2 - Débat autour du soutien à Robert Redeker

2.1 - Ne laissons pas Redeker avoir raison

On peut ne pas être forcément d'accord avec Robert Redeker, professeur de philosophie au lycée Pierre-Paul-Riquet de Saint-Orens de Gameville (Haure-Garonne) quand il affirme que " l'islam, dans son texte sacré exalte violence et haine ".

Toutes les religions du Livre (et quelques autres) comportent des appels au meurtre[1].

Mais Redeker et sa famille vivent, depuis huit jours, dans un endroit inconnuet sous protection policière. Après son article sur l'islam publié dans LeFigaro du 19 septembre dernier, Youssef Al-Qardawi l'a nomminé dans sa fameuse cheikh-liste, à la télévision Al-Jezira. Redeker a désormais un contrat, pardon, une fatwa, ou l'équivalent, sur sa tête. En tout cas, n'importe quel cinglé peut le trucider à l'aise pour aller au paradis. Et ça n'a pas traîné. Les menaces écrites sont suffisamment graves pour que l'enquête soit confiée à la section antiterroriste du parquet de Paris.

Alors, Redeker a finalement raison.

La religion ânonnée par des centaines de milliers d'enfants dans les écoles coraniques du Pakistan, du Soudan, de Somalie et en général des pays sous domination islamiste, cette religion prêche la haine de l'occident. Dans les pays sous dictature des fous de Dieu, l'appel à la prière est un appel au meurtre. Le mois sacré de ramadan doit apporter son quota de sacrifices humains. Se faire exploser au milieu de la foule musulmane en Irak, en Palestine, au Liban, est un exploit vanté par les mères des " martyrs ". Le Livre interdit le suicide ? Les fous ne lisent pas. Ne comprennent pas. Ne pensent pas. Ils vouent un culte à la mort et lui dressent des autels de cadavres d'infidèles ou d'apostats. Qu'importe le Coran pourvu qu'on ait l'ivresse des grands fonds !

Malheureusement, Redeker a raison.

Se foutant de l'esprit et de la lettre du texte sacré, les fous de Dieu tricotent une religion de haine, de rancoe¦ur et de sang. Ils la trament depuis les années 1920. Aujourd'hui, c'est un tissu très fin, en apparence, cardoublé de matériau isolant (pour isoler les " fidèles " des sociétés impies).

Si l'on s'en approche, il vous colle à la peau comme une tunique de Nessus.Théo Van Gogh en est mort, Salman Rushdie a bien failli, et Redeker est épinglé sur la liste. Sans oublier les dizaines de milliers de musulmans labellés " apostats " dans les pays islamiques, comme en Algérie

La même semaine, le Deutsche Oper de Berlin annulait la programmation de l'opéra de Mozart, " Idoménée ", par crainte de réactions islamistes. On y voit le roi de Crète Idoménée poser les têtes coupées de Poséïdon, Jésus, Bouddha et Mahomet sur des chaises. Un blasphème polythéiste, en somme, mais qui a, paraît-il, suscité des menaces préventives. Par prudence (?), la directrice de la salle a préféré assassiner Mozart (symboliquement).

Là encore, Redeker a tort d'avoir raison. Il écrit en effet que nous assistons désormais à " une islamisation des esprits, une soumission plus ou moins consciente aux diktats de l'islam ". Parce qu'à force d'entendre et de voir les mêmes vieilles (ou jeunes) barbes vitupérer depuis des années contre la décadence occidentale, on finit par se dire que, oui, c'est vrai, il y a une réelle démission à laisser ainsi se propager la haine. Et la peur. Mais le combat n'est pas celui de l'islam contre l'occident. Il est celui de la barbarie contre la civilisation, de la folie contre l'intelligence, de la dictature contre la démocratie. Et dans ce combat, les hommes et les femmes qui vivent sous domination islamiste sont en première ligne.

Les fous de Dieu ne sont ni courageux ni forts. Ils tuent au hasard dans la foule, s'acharnent sur des cibles faciles (une religieuse de 70 ans, un philosophe). Ce ne sont pas des loups mais des hyènes puantes. Ils ne chassent pas. Ils se repaissent des proies égarées par l'indifférence coupable de nos démocraties aveugles. Ils ne sont forts que de nos lâchetés intellectuelles, de cette stupidité abyssale qui feint de confondre la veulerie avec le respect de l'autre.

Quand osera-t-on interpeller les soi-disant " docteurs de la loi " islamique sur leur silence assourdissant à l'égard des crimes commis au nom de leur foi ? En se taisant, ils cautionnent l'image d'une religion de croisade, d'une sauvagerie moyen-ageuse. On peut aussi penser que les opposants de l'intérieur de l'islam, croyants ou non, ont peut-être du mal à accéder à une parole médiatique. Pas suffisamment agressifs, sans doute ? Il est vrai qu'un beau prédicateur rasé de loin justifiant à mots voilés la lapidation de la femme adultère, ça vous fait vibrer un plateau de télévision ! Qu'il est bon de détester cordialement un ennemi estampillé comme tel ! Les fous de Dieu sont passés maîtres dans l'art de se créer des ennemis en forme de caricatures.

Mais eux-mêmes ne sont que d'immondes caricatures.

Les temps sont venus de dénoncer l'effroyable imposture.Celle qui laisse croire à l'existence d'un islam conquérant lancé à l'assaut de la décadence occidentale. Il n'y a ici ni religion, ni conquête, et si décadence il y a, ce n'est pas celle que l'on croit. Il ne s'agit que d'une folie meurtrière théorisée par des esprits malades pour instaurer une nouvelle Inquisition, sssubstitut du nazisme. Une folie alimentée par ceux et celles qui, bien au chaud dans le cocon de la République, applaudissent à l'instauration d'une police des mœurs et de la pensée, à l'exclusion des femmes, au nom d' " un respect des différences culturelles " qui n'est autre que l'avatar moderne du racisme colonial.

La décadence, elle, c'est celle de l'instrumentalisation d'une religion transformée en idéologie totalitaire. Brandie par les intégristes, elle n'est même pas un étendard : à peine une feuille de vigne. Et qui peine désormais à cacher ses parties honteuses : jalousie, frustration, haine de soi, vide sidéral de la pensée, degré zéro de l'intelligence, fascination de la mort.

Cette caricature d'islamisation des esprits est devenue insupportable.

Et en ce sens, force est de reconnaître que Redeker avait raison.

Notes

[1] Redeker ne manque d'ailleurs de le souligner dans son article du Figaro

Sonja Rivière

2.2 - L'extrême droite fascisante se réjouit du sort de Redeker

Christian Bouchet, éditorialiste bien connu de l'extrême droite nationaliste et fascisante, est à peu près aussi remonté contre Robert Redeker que l'extrême droite catholique. Sur le site voxnr, la voix des nationaux-radicaux contre le nouvel ordre mondial, ressemblant notamment les anciens sympathisants d'Unité radicale (ce groupe néo-nazi dissout après que Maxime Brunerie ait tiré sur Jacques Chirac), la collaboration de Redeker à L'Humanité et à ProChoix leur reste en travers du gosier...

Extrait de l'éditorial de Christian Bouchet :

Robert Redeker n'est nullement un partisan de la liberté de pensée ou un défenseur de notre indépendance nationale. Bien au contraire, chroniqueur au quotidien L'Humanité, il s'y montra un ennemi acharné du Front national dont les initiales signifient pour lui France négative... Collaborateur des Temps moderne, de L'Arche, et de nombreuses autres revues vertuiste, il y construisit sa réputation en y dénonçant sans relâche, et avec une haine non dissimulée, les partisans de la liberté en matière de recherche historique. Ajoutons que notre homme qui ne supporte pas les femmes voilées n'hésite pas à apporter son soutien au groupe Prochoix qui milite en faveur de l'avortement, du lesbianisme, etc. (...) Alors, quand je vois Robert Redeker, qui jusqu'alors pissait de la copie antifasciste, pisser de peur après s'être attaqué à l'islam, et demander la protection d'une police qu'il conchiait hier, je me dis qu'il y a une justice immanente. Que notre flic de la pensée déguisé en enseignant crève de trouille, est bien le dernier de mes soucis. Au contraire même, cela aurait plutôt tendance à ensoleiller ma journée.

C'est une belle journée pour tout le monde. Pour les fachos et pour les féministes laïques. En effet, nous nous réjouissons de voir que l'extrême droite comprenne que le combat pour la liberté d'expression et l'esprit critique envers le religieux n'est pas le leur.

Caroline Fourest

3 - combat laïque

3.1 - Où va la France?

Il était une fois une France républicaine terre d'asile. Aujourd'hui, Anas El Jazouli, le Salman Rushdie marocain, président du Mouvement laïque marocain, est menacé de mort au Maroc par une fatwa intégriste. Réfugié en France,le gouvernement lui refuse le droit d'asile et l'invite à quitter le territoire. Il est en grève de la faim depuis 3 semaines.

Il était une fois, une France républicaine, assurant la sûreté des personnes sur son territoire conformément à l'article 2 de la déclaration des droits de l'homme du 26 août 1789.Aujourd'hui, un professeur de philosophie est obligé de se cacher à cause d'une fatwa d'un prédicateur intégriste.

Il était une fois, une France républicaine qui enseignait les Lumières. Aujourd'hui, après que l'Université de Lyon 3 ait donné une tribune à des négationnistes d'extrême droite niant la Shoah, voilà l'arrivée des conférences d'Hani Ramadan, celui-là même qui justifie, entre autres, la lapidation des femmes adultères, le sida comme une punition divine.

Il était une fois une France républicaine qui se dotait d'entreprises publiques de l'énergie. Aujourd'hui, le parlement marchandise et privatise ce secteur.

Il était une fois une France républicaine qui, avec le Conseil national de la résistance, a promu la sécurité sociale à la Libération. Aujourd'hui, après avoir favorisé les écoles privées confessionnelles au détriment des écoles publiques,favorisent les cliniques privées face à l'hôpital public et les multinationales de l'assurance au détriment de la sécurité sociale.

Il était une fois une France républicaine qui votait la loi du 9 décembre 1905 dite de séparation des églises et de l'Etat. Alors que la Suède a pris le même chemin, voilà notre gouvernement qui veut démanteler cette loi via le rapport Machelon.

Il était une fois une France républicaine qui avait une politique de plein emploi. Aujourd'hui, le turbocapitalisme met en place le chômage massif et la précarité. De plus, beaucoup d'organisations politiques et de candidats aux prochaines élections n'ont pas les discours et les actes à la hauteur des enjeux.

Après les victoires partielles concernant le non au traité constitutionnel et le retrait du CPE, la riposte à ce cours des choses est notoirement insuffisante. En partie à cause du manque de repères de ceux qui veulent résister à cette évolution. Pour avoir ces repères,il faut constituer un ensemble cohérent de principes. Pour nous, cet ensemble cohérent de principes, c'est le modèle laïque de la république sociale cher à Jean Jaurès. Notre travail d'éducation populaire consiste donc à affiner l'ensemble cohérent de ces principes et de le populariser dans le mouvement social pour redonner confiance.

Bernard Teper

3.2 - Anas El Jazouli, Urgence après 23 jours de grève de la faim ses jours sont en danger !

Anas El Jazouli militant laïque marocain réfugié en France pour fuir une fatwa lancée par des intégristes islamistes se trouve aujourd'hui sous le coup d'une invitation à quitter le territoire.

Le retour au Maroc signifiant une mort certaine, Anas El Jazouli a décidé depuis plus de 23 jours une grève de la faim qui aujourd'hui après plus de 20 kilos perdus met ses jours en périls. Une mort choisie en France lui semble plus digne qu'un assassinat assuré au Maroc. Nous ne pouvons supporter cette situation et nous nous demandons qui a intérêt à laisser mourir ainsi un militant laïque.

Nous appelons avec force et vigueur les autorités française à faire preuve d'humanisme en choisissant de garder en vie cet ami de la justice et des droits de l"homme en lui permettant d'obtenir les papiers qui lui permettront de vivre libre dans notre République.

et les 320 signataires qui le 04 octobre avaient signé la pétition

Le Comité De Soutien

3.3 - Rapport "Machelon", Rapport "Rossinot", et proposition de loi "Glavany" étranges convergences

Le rapport Machelon (rendu public le 20 septembre dernier) s'attache, conformément aux voeux du Ministre de l'intérieur, à vider de sens l'article 2 de la loi de 1905 et à réinstaller le religieux dans l'espace public.

Il préconise toutes les formes de financement public pour la construction des lieux de culte. Il élargit la notion d'association cultuelle jusqu'à la confondre avec celle d'association culturelle et sociale. Il réaffirme le bien fondé du statut concordataire de l'Alsace-Moselle laissant entrevoir combien il serait souhaitable de l'étendre à l'ensemble de notre pays par le biais d'accords Etat-Eglises.

De la même inspiration, le rapport Rossinot, remis le même jour au ministre de l'Intérieur et de Cultes, propose de réaffirmer la laïcité dans les services publics sans jamais rappeler la séparation des églises et de l'Etat qui la fonde et s'engage vers une laïcité qui s'appliquerait au cas par cas, selon les villes et collectivités territoriales.

La proposition de loi sur la laïcité, déposée le 29 juin dernier par Jean Glavany, n'est pas faite pour rassurer tous ceux qui portent en eux l'idéal de laïcité lorsqu' elle détourne le sens de l'article 2 de la loi de 1905 la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte qui devient la République ne reconnaît ni ne privilégie aucun culte, qu'elle n'envisage pas l'application de cette loi sur l'ensemble du territoire et qu'elle considère comme irréversibles l'existence et le financement par les deniers publics de l'enseignement privé.

Il devient impérieux et urgent que tous les défenseurs de la laïcité résistent à ces remises en cause de l'un des principes essentiels qui fonde la République et qu'ils s'organisent publiquement autour d'actions nationales et unitaires.

Les Laïques En Réseau

Micheline Montot Comité Vendômois de Défense de la Laïcité

Jean-Michel Sahut Comité de Réflexion et d'Action Laïques 76

Monique Vézinet Union des FAmilles Laïques

Robert Albarèdes Comité pour le Laïcité et la Démocratie

3.4 - La laïcité chez nous et chez nos voisins

La direction générale de l'UNESCO, a interdit à une islamiste marocaine notoire de participer, en tant qu'intervenante, au colloque intitulé Existe-il un féminisme musulman ? Il s'agit de Nadia Yassine, porte-parole du mouvement islamiste Justice et Bienfaisance, fondatrice et dirigeante de la section femme de ce mouvement, et fille de Abdeslem Yassine, leader de cette formation politique. Le motif invoqué est le non-respect de la procédure en vigueur dans cette instance onusienne de consultation du pays d'originaire du conférencier. Cette rencontre, co-organisée par la commission, communautariste, islam et laïcité, dont le président n'est autre qu'Alain Gresh, s'est tenue les 17 et 18 septembre 2006, au siège de l'organisation des Nations unies, à Paris.

Bulgarie, les autorités ont interdit en juin dernier à deux musulmanes, Fatme et Mikhaela 17 ans, de porter le hidjab au lycée. Les islamistes bulgares n'avaient alors pas manqué de réagir à travers entre autres l'Organisation pour le développement et la culture, et le mufti, Alich Hadji. Celui-ci avait même menacé de porter l'affaire devant les instances internationales des droits de l'Homme. Mais la Commission parlementaire anti-discrimination présidée, par un parti politique représentant la minorité musulmane (10% de la population), essentiellement turque, a soutenu la mesure d'interdiction. Le Parlement a pour sa part justifié cette décision par le souci d'éviter au pays de se mettre en porte-à-faux avec les valeurs des peuples de l'UE, à laquelle il s'est porté candidat. En France, le site antilaïcité minorités.org a fait circuler cette information, contenue dans une dépêche de l'AFP, en la surtitrant : La Bulgarie atteinte par la peste laïcarde. Ce site figure parmi ceux qui en France s'opposent à l'accès des musulmans d'Europe aux valeurs universelles de la laïcité. La vérité est que les islamistes sont les seuls dans le monde musulman qui revendiquent le port du hidjab. C'est leur première et principale exigence envers les femmes musulmanes, pour les embrigader pour leur cause politique réactionnaire. Les deux lycéennes avaient d'ailleurs expliqué à la télévision que c'est à l'école coranique, où elles suivaient parallèlement des cours sur l'islam, qu'on les avait persuadées qu'il fallait le porter et comment.

Belgique, deux enseignantes de primaire de confession musulmane ont été licenciées il y a quatre ou cinq mois des écoles flamandes des quartiers d'Etterbeek et de Woluwe-Saint-Pierre, pour port du hidjab pendant les heures de cours. A leur recrutement, en septembre 2005, ces dernières avaient pourtant signé le règlement intérieur de l'établissement, qui stipule explicitement l'obligation de neutralité des enseignants dans l'exercice de leur fonction.

Belgique encore, les autorités politiques de la région de Bruxelles (Wallonne) viennent d'interdire toute manifestation extérieure de toute forme d'expression politique, philosophique ou religieuse pour les membres des bureaux électoraux, sous peine d'une amende de 1000 euros. Cette nouvelle réglementation, la première en son genre dans le royaume, qui sera appliquée dès les élections communales, du 8 octobre prochain, a soulevé l'ire des intégristes musulmans locaux. Elle vise selon eux directement tous les musulmans de cette juridiction. Le fait que cette disposition s'adresse à d'autres franges de la société bruxelloise ne serait qu'un stratagème destiné à la faire accepter par eux. D'ailleurs, cette mesure interviendrait Après l'interdiction des musulmans au sein de la plupart de nos écoles mais également de la fonction publique. Ainsi fidèle à leur technique d'amalgame sciemment trompeuse, l'obligation faite à une poignée d'islamistes ou de jeunes filles et de jeunes femmes sous leurs influences de respecter, à l'instar de tous les sujets du Roi, les principes de la laïcité dans les services publics, se serait soldée par le bannissement des travailleuses et des élèves de confession musulmane des établissements d'enseignement et des administrations publiques, alors qu'elles sont des milliers à fréquenter l'un et l'autre. Le Mouvement belge contre le racisme, l'Antisémitisme et la Xénophobie (MRAX) conteste cette disposition et réclame son annulation, après qu'il a été saisi par six jeunes femmes vêtues de l'uniforme islamiste. En réponse, le ministre-président Charles Picqué, l'auteur de cette disposition, devant le tapage fait par les islamistes et le MRAX, s'est fendu d'un communiqué et a donné une conférence de presse dans lesquels il affirme qu'à aucun moment, il n'a été fait référence au voile et que ce qui est visé, c'est bien la manifestation de signes ostentatoires destinés à influencer l'attitude et éventuellement le choix des électeurs.

Selon un sondage effectué par le prestigieux institut états-unien, Pew Research Center, dont les résultats ont été publiés par le Nouvel Observateur n° 2183 du 7-13 septembre 2006, 42% des musulmans français se sont déclarés d'abord citoyens, avant d'être musulmans (à peu près la même proportion que les chrétiens aux Etats-Unis), alors que 81% de leurs coreligionnaires britanniques se considèrent musulmans avant tout. 78% des musulmans français disent vouloir adopter les traditions de leur pays d'adoption, contre 63% pour les musulmans espagnols, 41 % pour les musulmans britanniques et 30% pour les musulmans allemands. Enfin, 93% des musulmans français ne font aucune confiance à Ben Laden, tandis qu'ils ne sont que 68% des musulmans britanniques à ne pas lui faire confiance. Selon cet institut, ces résultats s'expliquent aussi bien par le modèle d'intégration en vigueur dans chacun de ces pays, que par l'origine géographique des populations allogènes (maghrébine en France, pakistanaise en Grande-Bretagne, turque en Allemagne), ainsi que par leur trajectoire et leur ancienneté respective dans le pays d'accueil. L'institut ne met pas moins en doute la validité du modèle communautariste d'outre-Manche. Ces résultats se trouvent dans une grande mesure recoupés et confirmés par un autre sondage, effectué en avril-août derniers, et commandé par l'hebdomadaire catholique La Vie, sur le rapport des musulmans français à la laïcité et à l'égalité entre les hommes et les femmes,

Hakim Arabdiou

4 - Les laïques sur le terrain

4.1 - Compte rendu du premier débat sur la violence et les enfants, à Lyon

Jeudi 28 septembre 2006 - Marie de Lyon 8ème - Organisé par l'UFAL du Rhône

Belle soirée que celle que nous avons organisée. Une centaine de personnes ont fait le déplacement. Le thème est d'actualité : la violence et les jeunes. Celle dont les jeunes sont auteurs, mais aussi celle que les jeunes subissent. Il n'y a pas forcément d'un côté des victimes, et de l'autres des bourreaux, mais bien souvent il n'y a au final que des victimes.

Trois intervenants étaient présent, aux côté de Jean Claude Santana (Président de l'UFAL du Rhône), avec chacun un éclairage spécifique à apporter sur la question.

Jean Claude Santana a introduit le sujet, en présentant l'UFAL, et les positions qu'elle a pu prendre lors des émeutes de l'année dernière. Il a précisé que le débat n'avait pas vocation à dire une vérité, qu'en la matière il n'y avait rien de définitif, mais que l'on souhaitait échanger, partager, sur une problématique complexe, et qui intéresse ou du moins touche toutes les familles. L'UFAL avait toute sa place dans ce débat, surtout que les associations ne sont pas si nombreuses, qui offrent une lecture républicaine et laïque de la société. Comprendre la violence, ce n'est pas l'excuser. Les conditions de vie, l'individualisme, les difficultés sociales et économiques, si réelles soient-elles, ne peuvent servir d'alibi à la violence. En initiant ce cycle de débat, l'UFAL tient à ce que cette problématique ne soit pas exploitée à des fins politiciennes.

Liliande Dalligand, psychiatre, experte auprès des tribunaux, a fait un état de lieux de la violence, telle qu'elle la perçoit au quotidien, de par ses fonctions. La violence a toujours existé, mais l'absence de parole, notamment dans les familles, créé un terrain propice à son développement.

Une anecdote qui a été mentionnée : un éducateur menace un jeune de dire à ses parents ce qui se passe. Réponse du jeune en question : C'est bien la première fois qu'ils s'occuperaient de moi .

Les violences physiques sont en augmentation très importante ces dernières années. Et les filles sont de plus en plus nombreuses à se montrer violentes, voire extrèmement violente. C'est d'ailleurs souvent une réaction aux pressions qu'elles subissent au quotidien. Ceci ne la justifie pas, mais permet de l'expliquer. Bien entendu, il a été question des viols collectifs, qui ne sont pas une nouveauté : il y en avait déjà il y a 30 ans, mais leur nature a changé. Alors qu'avant les violeurs commettaient leurs horreurs devant les copains, comme un rite initiatique, ce n'est plus le cas aujourd'hui : ils se cachent, pour ne pas montrer leur honte, honte souvent de ne pas être à la hauteur, de ne pas se montrer suffisamment viril.

Il a aussi été question d'intégration des immigrés. Liliane Dalligand souligne avec force la nécessité pour les immigrés d'un apprentissage du Français : c'est selon elle une obligation pour une bonne intégration, afin qu'ils puissent trouver leur place. Comment trouver sa place si on ne sait pas comment fonctionne le pays ? Le suicide des jeunes a aussi été évoqué : violence contre soi même. Y compris chez des enfants de moins de 10 ans.

Ensuite, Michèle Vianès a apporté une vision féministe du problème. La violence faite aux filles, aux femmes. Elle a illustré le propos de Liliane Dalligand, à partir d'exemples.

Elle s'est aussi étonnée que Hani Ramadan puisse venir enseigner à Lyon, alors qu'il défend une vison archaique de la femme notamment : il est pour la lapidation en cas de grossesse hors mariage par exemple (60 % des premiers enfants d'un couple sont nés hors mariage : ça en ferait des femmes à lapider en France !). Les islamistes, et leur lecture du coran à des fins politiques, favorisent une violence à l'encontre des femmes qui est inacceptable. Les femmes sont toujours inférieures aux hommes.

Et enfin, Gilbert Debard a terminé en présentant sa vision du problème, vu du côté de la police (il est représentant du SNOP-UNSA). Il a précisé que la répression pour la répression, ce n'était pas efficace, pas plus que ne l'est la prévention si on ne fait que ça. Le système peut fonctionner s'il s'appuie sur ces deux jambes : prévention ET répression. Il récuse le discours communautariste de M. Sarkozy, qui monte les catégories de gens les unes contre les autres : les juges qui ne font pas leurs boulot, contre les policiers qu'on empêche de travailler correctement. Il insiste sur le manque de moyens de toutes ces institutions. Les lois existent, l'arsenal juridique existe, mais les moyens font défaut. La responsabilité est collective. Seule une augmentation des impôts conséquente permettrait de résoudre bon nombres de problèmes. Choix politique.

Les échanges qui ont suivis ont été riches, parfois passionnés. Il reste encore des questions, même beaucoup plus que de réponses. Nous espérons avoir apporté une pierre au débat qui est nécessaire, sans dogmatisme. La soirée s'est terminée autour d'un verre, offert par la mairie du 8ème.

Nous avons pu admirer l'exposition de caricatures, qui s'est tenue en Pologne, et qui est hébergée à la mairie du 8ème actuellement. Belle expo !

Nous remercions l'équipe municipale, qui nous a soutenu dans l'organisation de ce débat, ainsi que Regards de Femmes, qui a apporté sa contribution.

Article avec photos

Rémi Thibert

5 - santé

5.1 - 4ème RENCONTRE NATIONALE - ETATS GENERAUX DE LA SANTE ET DE L'ASSURANCE MALADIE (EGSAM)

Samedi 21 et dimanche 22 Octobre 2006

Bourse départementale du travail, 1 Place de la Libération à Bobigny(93)

A quelques mois d'échéances électorales importantes, vont se tenir les prochaines rencontres nationales des EGSAM, qui font suite aux multiples rencontres régionales.

Cette assemblée aura pour objectif de faire que le projet de Manifeste anti-libéral que nous allons adopter, s'invite fortement dans la campagne électorale, s'imposant aux partis et aux candidats, comme une référence pour une politique alternative de santé en France. Nous aurons à nous déterminer pendant ces deux jours, sur le niveau et le type de mobilisation pour y parvenir.

PROGRAMME DES 21 et 22 OCTOBRE

Samedi 21-10-2006

Dimanche 22-10-2006

Liste des ateliers

Disposant de 4 salles, nous proposons les ateliers suivants qui s'adossent au texte mis en débat :

Ateliers sur une demie journée

  1. Psychiatrie, éthique et droits des patients
  2. Prévention, médecine du travail, santé scolaire, accidents du travail et maladies professionnelles.
  3. Recherche pharmaceutique, transparence et indépendance vis à vis des forces commerciales et de l'industrie pharmaceutique, structures internationales.
  4. Les moyens de notre politique de santé.

Ateliers sur la journée

  1. Services sociaux d'intérêt général (SSIG), Europe, Mutualité, équipements publics, laïcité économique, autorités de santé.
  2. Organisation du système de santé : hôpital, développement du système de santé de premier recours, centres hospitaliers de deuxième recours, médecine de ville, centres de santé, secteur dentaire.

Bernard Teper

Lucette Guibert

6 - Si tu veux pas de Sarko, y'a pas que Ségo!

6.1 - Le syndicalisme obligatoire n'est pas une mesure de gauche

Lors des récentes élections suédoises, on pouvait voir le premier ministre social-démocrate et la secrétaire générale du syndicat unique côte à côte sur des affiches électorales. Sur tous les murs du pays, la dirigeante du syndicat à adhésion obligatoire, pris récemment pour exemple par Ségolène Royal, appelait les salariés à voter pour le parti social-démocrate. Les électeurs en ont décidé autrement. Un résultat qui incite à aller au-delà de la vision simpliste et erronée développée par Royal sur les vertus d'un modèle qu'elle souhaite importer en France.

Comment fonctionne le système suédois d'adhésion syndicale obligatoire ? Quelles seraient les conséquences d'une telle réforme, en France ? Nous verrons que la singularité du modèle français, fondé sur des principes républicains, est incompatible avec la pratique suédoise.

Dans le système scandinave, l'adhésion à un syndicat (unique) est obligatoire pour pouvoir bénéficier des droits issus de la Convention collective négociée par ce syndicat. Au contraire, en France, il n'est pas obligatoire d'être adhérent d'un syndicat pour bénéficier des dispositions des conventions collectives. En effet, c'est par un mécanisme dit d' extension que les pouvoirs publics décrètent l'application de la convention à tous les salariés d'une branche, même quand ils ne sont pas syndiqués, ou quand leur patron n'est pas membre d'une fédération patronale. L'intervention des pouvoirs publics, qui fait suite à la négociation menée librement par les syndicats et employeurs, est acceptée par les syndicats car elle se fonde sur l'idée républicaine d'universalité de la loi et de son application égale pour tous. Le résultat est un taux de couverture par les conventions collectives de 97% du salariat en France, c'est-à-dire un des taux les plus élevés des pays de l'OCDE.

En proposant, avec beaucoup de légèreté, de rendre l'affiliation syndicale obligatoire comme en Suède, Ségolène Royal oublie d'indiquer le fonctionnement de ce système. L'importer en France reviendrait à retirer des droits acquis à quiconque ne se syndique pas, et à diviser le salariat entre ceux qui travaillent dans les entreprises dont l'employeur est d'adhérent d'une fédération patronale, et ceux qui travaillent dans des entreprises non affiliées.

Car c'est bien ce qui a lieu en Scandinavie. Les Scandinaves font primer le contrat collectif sur la loi en matière de conditions de travail. Par conséquent, il n'y a que des salaires conventionnels, pas de salaires minimums, et si le patron refuse d'adhérer à une fédération patronale, alors ses salariés n'ont pas accès aux droits de la Convention collective. Sans être arrogant à l'égard de nos camarades suédois, on peut tout de même se féliciter qu'en France, les salariés soient majoritairement protégés par le truchement de la loi républicaine, indépendamment du bon vouloir de leur patron.

La méthode française a un défaut, certes, c'est le faible taux de syndicalisation. Mais le nombre de syndiqués n'est pas le seul critère pour déterminer la représentativité et la puissance des syndicats.

Les Suédois ou Danois ont des taux de syndicalisation astronomiques, mais quand ils ont mené campagne pour que leurs adhérents votent pour les partis sociaux-démocrates, ils n'ont pas été entendus. Et quand il s'agira de défendre des acquis vis-à-vis de la Droite au pouvoir, on peut craindre qu'ils n'aient pas la même capacité de manifester dans la rue comme on l'a connu en France. Ils sont forts pour négocier, mais ils ont négocié, entre autres, la retraite à 65 ans... pour commencer.

Dire des syndicats qu'ils ne sont pas assez représentatifs est un discours récurent de la droite, qui tente à chaque conflit déclenché par ces derniers de leur opposer la majorité silencieuse des salariés non-grévistes. Hélas, les déclarations de Ségolène Royal alimentent un tel discours. Il suffit de voir son propre site Désirs D'Avenir, où le débat sur le syndicalisme a entraîné un flot d'insultes aux syndicats, fauteurs de grèves et illégitimes (voir ci-dessous).

En fait, le mouvement et la victoire contre le CPE montre que les syndicats français ne sont pas ces organisations faibles et peu représentatives qu'on le décrit. La force de mobilisation des travailleurs français est connue et admirée dans le monde entier. Dommage que Ségolène Royal, après avoir été silencieuse sur le CPE, s'exprime enfin sur ces question en dénonçant un manque prétendu de puissance des syndicats.

Enfin, la primauté à la liberté contractuelle est non seulement une vision de la société qui s'oppose aux traditions républicaines du mouvement syndical français, mais en plus, une conception inadaptée aux comportements actuels des entreprises.

On le voit en Allemagne, qui a un syndicalisme puissant, présent au sein même des conseils d'Administration des entreprises, mais où, pour la première fois de son histoire, le grand syndicat DGB vient de revendiquer la mise en place d'un salaire minimum légal. Face au capitalisme financier et transnational, la négociation collective ne suffit pas, car elle ne balance pas vraiment du côté des syndicats, même quand ceux-ci ont beaucoup d'adhérents.

Autre exemple : la Suède, justement, où l'ouverture aux entreprises européennes a entraîné l'installation d'investisseurs baltes qui refusent de s'affilier aux fédérations patronales et d'appliquer les conventions collectives. Avec ce système-là, les travailleurs suédois deviennent méfiants vis-à-vis des travailleurs étrangers car ceux-ci n'ont pas nécessairement les mêmes droits sociaux.

Poul Nyrup Rasmussen, ancien Premier Ministre danois, a expliqué, lors d'un colloque du Parti des Socialistes Européens à Paris la semaine dernière, que sa défaite était en grande partie due à la crainte des étrangers. Il est notable qu'en France, au moment de l'élargissement de l'Union Européenne, les syndicats ne se sont pas opposés à la libre circulation des travailleurs. Ils s'appuient sur l'application de la loi républicaine à tous les salariés, qu'ils soient étrangers ou non. Ils savent que les conventions collectives et les lois s'appliqueront, en droit, à tout travailleur, d'où qu'il vienne. Plutôt que de revendiquer des quotas pour limiter la circulation des travailleurs, ils ont cherché à combattre le Principe du Pays d'Origine introduit par la Directive Bolkestein sur les services.

On notera que les propositions de Ségolène Royal, relayées par Arnaud Montebourg, ont fait l'unanimité des syndicats contre elles. Or n'oublions pas que les militants syndicaux sont des relais importants pour la gauche. Que Ségolène Royal choisisse de s'affronter à eux est une erreur monumentale, du point de vue politique comme d'un point de vue strictement électoral.

Et concrètement ?

Si le système de l'adhésion syndicale obligatoire s'appliquait chez nous, chaque salarié devrait cocher, au moment de l'embauche, une case pour déterminer à qui serait versée sa cotisation syndicale. Car en effet, si Ségolène Royal se réfère au modèle scandinave, elle s'en détache sur un point essentiel.. Alors qu'en Suède il y a un syndicat unique, Royal défend pour la France l'adhésion obligatoire au syndicat de son choix (Les Echos, 19 mai 2009).

Imaginons la scène : obligé de cocher une case, un salarié pourrait cocher au hasard, ou sur le conseil du DRH. Il pourrait choisir un syndicat qui refuse la mobilisation et la grève... Pire encore, un syndicat pourrait, pour obtenir plus d'adhérents (dont découlerait logiquement la reconnaissance de sa représentativité et donc les moyens matériels correspondants), proposer de rembourser la cotisation.

Comment mesure réellement leur représentativité, dans ces conditions ? Ceux qui ont été étudiants connaissent un système voisin où chacun doit choisir entre deux mutuelles concurrentes comme centre de Sécurité sociale : en réalité, c'est un acte administratif aux implications essentiellement financières, et ces mutuelles ne peuvent se prévaloir de leur nombre d'adhérents pour justifier des prises de positions revendicatives et mobilisatrices.

Les syndicats risqueraient d'y perdre leur crédibilité et surtout leur cohérence et capacité de mobilisation. Aujourd'hui, adhérer à une organisation syndicale confédérée, c'est un acte libre de conscience. C'est manifester sa conviction d'intérêts communs au salariat. Cela s'oppose à la vision des salariés qui adhèrent au modèle de la concurrence individuelle des travailleurs et récusent toute solidarité collective. Obliger ces derniers à adhérer à un syndicat et leur reconnaître une quelconque représentativité collective représente un risque considérable Cela renforcerait les regroupements par entreprise, le corporatisme, les jeunes, et représenterait une attaque frontale contre le syndicalisme confédéré.

Les propositions de Ségolène Royal soulève un autre difficulté. Au moment de donner au salarié le choix de cocher une case pour attribuer sa cotisation syndicale, qui aurait auparavant déterminé la liste des syndicats autorisés ? Et selon quels critères ? Ceux-ci sont actuellement établis dans un Arrêté de 1966. Celui-ci peut bien sûr être discuté. Par exemple, le critère de l'attitude patriotique pendant la Guerre peut faire sourire, mais il a empêché la constitution de syndicats d'extrême-droite. Si ce critère avait été appliqué aux élections politiques, le paysage politique aurait été vraiment différent. Pour continuer la comparaison avec le politique, il faut dire à ceux qui s'en prennent à la faiblesse des syndicats qu'aucun parti politique en France n'a plus d'adhérents que les trois principales confédérations syndicales, à savoir la CFDT, la CGT et FO. Il n'y aurait donc finalement que les sondages pour représenter fidèlement le pays ?

Raquel Garrido

6.2 - Sarkozy et la République : le discours en trompe l'oeil

Le 8 mars 2006, le journal Le Monde titrait M. Sarkozy : les communautés, c'est moi . Effectivement, les proches du président de l'UMP ne cachent rien sur les pourcentages de voix escomptés aux présidentielles dans chaque communauté ethnico-religieuse et n'hésitent pas à faire part de leur principal souci : La communauté noire où Sarkozy doit être à 20% et encore... .

M. Abderrahmane Dahmane, président des démocrates musulmans et secrétaire national de l'UMP chargé des relations avec les associations des Français issus de l'immigration (sic) dévoile tout sur le clientélisme outrancier du président du mouvement mais on sait que le rejet du modèle républicain est aussi partagé par de nombreux responsables de l'UMP. Le maire d'Asnières, Manuel Aeschlimann, n'hésite pas à proclamer l'échec du sacro-saint principe de l'intégration républicaine et à décréter Il faut segmenter tout cela et cibler chaque groupe . Après avoir chaleureusement agrémenté de sa présence l'inauguration du Conseil représentatif des associations noires (CRAN) en compagnie de Patrick Devedjian, Madame Roselyne Bachelot, vice-président de l'UMP, déclare également avec une belle assurance que la nostalgie du creuset républicain n'est en aucun cas opérationnelle et que le phénomène communautaire est inévitable dans une société globalisée avant de remercier chaleureusement le CRAN pour son invitation à passer de l'indifférence à la différence . Enfin, en guise de cerise sur le gâteau, le sociologue Michel Wieviorka, grand prêtre du multiculturalisme, voit dans Nicolas Sarkozy l'homme politique qui a le mieux compris qu'on était dans une configuration post-républicaine et qui s'y installe . Dans l'entourage du président de l'UMP certains conseillers se sont également déclarés effrayés par les réactions de satisfaction à la décision du Conseil d'Etat refusant l'intégration des écoles Diwan dans le public, y voyant l'image de la République casquée face aux enfants de l'esprit nouveau [1].

Nul doute donc, après tout ce que l'on sait déjà de l'engouement de Nicolas Sarkozy en faveur des discriminations positives et des préfets musulmans , que la rupture essentielle proposée par le candidat UMP devrait être celle du modèle républicain. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir les affiches du ministère de l'Intérieur qui s'étalent déjà sur les murs des Facultés de droit pour vanter une police aux couleurs de la République , lesquelles ne sont plus bleu, blanc, rouge , mais black, blanc, beur ...

Après un tel credo bien enraciné en faveur des thèses post-républicaines, les récents discours tenus le 9 mai à Nîmes, le 22 juin à Agen et le 3 septembre à Marseille, ont de quoi surprendre et ont effectivement surpris. Voila soudain que la France, l'Etat-Nation, l'intérêt général, le service public, la langue française, Charles Martel, Napoléon, Jaurès, Blum et de Gaulle se sont retrouvés au goût du jour et que Nicolas Sarkozy nous a fait le numéro Plus républicain que moi tu meurs ! . Nous eûmes le droit à des formules incroyables : D'où vient la tentation communautariste qui s'oppose à l'idée que je me fais de la nation ? (Nîmes) ou encore Sans elle (la République) vous aurez le communautarisme, la loi des tribus, chacun renvoyé à ses origines ethniques, à sa religion (Marseille). Adieu Bachelot, le CRAN, le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) et Wieviorka ?

Sans doute lesdits propos sont-ils noyés dans des discours-fleuves d'une saisissante démagogie, dont la caractéristique dominante réside dans un ego surdimensionné et passablement narcissique. Il est rare que le je soit à ce point présent dans des discours-programme. Il n'en demeure pas moins que ce retour de la rhétorique républicaine montre que le président de l'UMP a été averti du risque de rejet par les Français de ses thèses communautaristes et qu'il a peut-être enfin compris que, dans une démocratie digne de ce nom, ce n'est pas en courtisant des minorités que l'on obtient la majorité. Les conseillers de Nicolas Sarkozy sont peut-être convaincus de la décrépitude du cadre stato-national mais les résultats du référendum du 29 mai 2005 ont démontré l'attachement du peuple français à l'Etat, que ce soit l'Etat régalien pour le non de droite ou l'Etat providence pour le non de gauche. Il n'est jamais trop tard pour apprendre à lire un scrutin passé, surtout lorsque le suivant se profile.

Ne pouvant toutefois pas risquer de déplaire subitement à ses clientèles communautaires, le président de l'UMP s'est trouvé contraint de faire le grand écart et de multiplier les assertions parfaitement contradictoires.

Ainsi a-t-on entendu le candidat à l'élection présidentielle indiquer à Marseille qu'il ne transigerait sur aucun de nos principes fondamentaux et notamment celui de l'égalité des droits avant d'affirmer aussitôt qu'il restait partisan de la discrimination positive alors que celle-ci se définit précisément comme une rupture de l'égalité de droit destinée à réaliser une égalité de fait. Il ajoute qu' on ne portera pas atteinte à nos principes fondamentaux en donnant plus ceux qui ont moins alors qu'il a cependant déclaré à Agen : au fond, depuis 25 ans, on fait une politique qui se résume tout entière à prendre aux uns pour donner aux autres, à pénaliser les uns pour favoriser les autres, à déshabiller Pierre pour habiller Paul . Et le même de dénoncer on crée des ZEP soi-disant pour réduire les inégalités ... mais les ZEP reposent précisément sur l'idée de discrimination positive !

En proposant, à Agen, à ceux qui au lieu de se donner du mal pour gagner leur vie préfèrent chercher dans les replis de l'histoire une dette imaginaire que la France aurait contractée à leur égard et qu'à leurs yeux elle n'aurait pas réglée et qui préfèrent attiser la surenchère des mémoires pour exiger une compensation que personne ne leur doit plutôt que de chercher à s'intégrer par l'effort et par le travail (...) de quitter le territoire national, et aux autres de se satisfaire de l'égalité des droits et des devoirs , Nicolas Sarkozy anéantit tout l'argumentaire victimaire qui sert précisément à justifier les discriminations positives dont il se réclame.

L'élitisme républicain et l'apologie du mérite occupent une place de choix dans les trois discours mais ils figurent déjà en toutes lettres dans notre Constitution à travers l'article 6 de la Déclaration de 1789 qui dispose : Tous les citoyens étant égaux à ses yeux (la loi) sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leurs capacités et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents . Or c'est précisément à ce principe que déroge la discriminations positive en introduisant la prise en compte des distinctions d'origine, de race, de sexe ou de religion par ailleurs expressément prohibées par l'article 1er de la Constitution. Monsieur Borloo n'annonce t-il pas déjà qu'il réfléchit, pour l'après 2007, à une révision constitutionnelle nécessaire pour permettre la discrimination positive, aider massivement les populations défavorisées, ouvrir les concours de la fonction publique, etc ... [2]

Et que penser du couplet agenais on sait où nous ont menés par le passé l'idéologie de la {{ terre qui ne ment pas et l'apologie des anciennes sociétés provinciales, étriquées, repliées sur elles-mêmes et dominées par les notables }} ? N'est-ce pas cette idéologie qui imprègne justement les régionalismes corse, breton, basque ou alsacien ainsi que la charte européenne sur les langues régionales et minoritaires que le président de l'UMP se propose quand même de ratifier après celle sur l'autonomie locale ? Et d'où Monsieur Sarkozy sort-il qu'il y aurait des dispositions de la constitution européenne qui n'auraient pas fait l'objet de contestation et qui pourrait donc être reprises dans un mini-traité ratifié par voie parlementaire ? Le non des Français portait sur l'intégralité d'un texte et non sur une partie seulement et c'est bafouer non seulement la République mais la démocratie que de passer outre le veto populaire.

Manifestement, Nicolas Sarkozy ne sait pas très bien ce qu'il veut ou alors souffre de confusion conceptuelle et de carence philosophique graves. Le journal Le Monde n'a pas manqué de relever la contradiction entre la reconnaissance de la diversité et les références à la IIIème République et au gaullisme [3].

Renaud Dutreil détient peut-être l'explication de ces géantes incohérences en laissant tomber : Nicolas veut gagner, il doit donc rassembler et élargir. Peu importe la sincérité de son discours [4] ... On a tort, en effet, de trop vouloir opposer Nicolas Sarkozy à Jacques Chirac alors qu'ils sont absolument de la même école, celle de l'absence de conviction véritable et de l'opportunisme, et qu'il n'y a donc, sur ce point essentiel, absolument aucune rupture à attendre [5].

Chargé par l'article 5 de la Constitution de veiller au respect de celle-ci, le président de la République actuel n'a pourtant eu de cesse que d'attenter au régime de la Vème République d'abord et à la République tout court ensuite. On ne compte plus les révisions constitutionnelles orchestrées sous son égide, dans le but de porter atteinte soit aux conditions essentielles de la souveraineté nationale (révisions de 1999 et 2005 sur l'Europe et la Cour pénale internationale), soit aux principes d'unité et d'indivisibilité de la République et d'égalité devant la loi (révisions de 1998 sur la Nouvelle-Calédonie, de 1999 sur la parité sexuelle, de 2003 sur l'organisation décentralisée de la république). Les sévères remontrances de deux présidents du Conseil constitutionnel, Yves Guéna puis Pierre Mazeaud, gaullistes authentiques, et même les critiques publiques de Jean-Louis Debré, n'ont pas dissuadé Jacques Chirac de continuer de brader la République [6].

On a souvent observé la capacité de l'actuel président à dire une chose dans un discours et son contraire absolu dans le discours suivant, tandis que se succèdent aussi les contradictions majeures à l'intérieur d'un seul et même discours. On l'a entendu prôner à la fois l'équivalence des cultures et l'excellence de la culture française, défendre le caractère irremplaçable de l'institution départementale et proposer la suppression des départements corses et antillais, trouver inconvenant de chercher un préfet musulman mais s'empresser d'en nommer un, et même juger que le oui au quinquennat serait bien mais que le non serait bien aussi !

On n'est donc pas dépaysé devant les contradictions sarkozystes : le tribalisme c'est bien, la République aussi ! Maurice Couve de Murville disait de Robert Schumann Il ne veut déplaire à personne et, ce faisant, mécontente tout le monde [7] ... La leçon n'est pas suffisamment méditée.

On peut juger que le modèle républicain est révolu et qu'il faut proposer aux Français une société postmoderne multiculturaliste. Mais il faut alors avoir le courage d'affronter sa conviction et, s'agissant de bouleverser le contrat social des Français, de leur proposer, par référendum, de changer de Constitution en abandonnant la référence à la Déclaration de 1789. C'est à ce texte, en effet, dans lequel se concentrent toute la philosophie des Lumières et la pensée révolutionnaire française que sont directement contraires les projets communautaristes et les discriminations positives de Monsieur Borloo et de Madame Bachelot, qui devraient mieux lire les décisions du Conseil constitutionnel.

Nicolas Sarkozy ne pourra indéfiniment se réfugier dans la duplicité qui a valu à l'actuel président le mépris des Français. La lassitude de ceux-ci devant l'opportunisme généralisé et l'érection de la politique en produit est extrême. Il y a des limites au mépris du peuple.

Source: http://www.marianne2007.info

Notes

[1] Hugues Moutouh, " La France coupée en deux ", Le Figaro, 26 novembre 2001 ; Libres propos sur la société multiculturelle, Revue Politeïa, 2002, n° 1 et 2, p. 65

[2] Le "libéralisme populaire" de Nicolas Sarkozy reste à définir, Le Monde, 3 et 4 septembre 2006

[3] " Le virage à droite de Nicolas Sarkozy ", Le Monde, 5 septembre 2006

[4] idem

[5] Jean Mauriac, L'après de Gaulle - 1969 - 1989, Fayard, 2006

[6] Yves Guéna, "Des coups de canif dans la Constitution", Le Monde, 25 janvier 2000 - Pierre Mazeaud, Voeux du Conseil constitutionnel au président de la République, 3 janvier 2006, - Jean-Louis Debré, "L'Etat et la décentralisation", discours du 31 octobre 2002, Revue Libres, n°1, 2003, p. 58

[7] Jean Mauriac, précité, p.52

Anne-Marie Le Pourhiet Professeur de droit public

7 - services publics

7.1 - Privatisation de GDF: Lettre de Marie-George Buffet à Pierre Carassus

Cher Pierre,

L'Assemblée nationale vient d'adopter le projet de loi de privatisation de GDF. Pour autant, la fin de cette bataille parlementaire ne signifie pas que plus rien ne peut efficacement s'opposer au projet du gouvernement.

Les enjeux sont en effet trop importants. Avec cette fusion, le débat à l'Assemblée l'a d'ailleurs bien montré, c'est non seulement le droit à l'énergie pour toutes et tous qui est menacé, mais c'est aussi toute notre indépendance énergétique qui est fragilisée.

Chaque jour grandit la nécessité d'une meilleure protection de l'environnement, d'un développement des énergies renouvelables et d'un véritable développement durable. Ces questions interpellent de plus en plus, à raison, nos concitoyens. Et nous savons bien que nous ne pourrons pas leur apporter de réponse en se privant des outils à disposition de la collectivité que sont les services publics. Arrêter le processus de privatisation de GDF est bien d'une urgente nécessité. Je suis convaincue qu'il reste possible de faire reculer le gouvernement sur cette question.

Les organisations syndicales appellent à une grande journée d'action le 14 octobre prochain. Je souhaiterais que cette journée puisse véritablement marquer le début d'une grande mobilisation populaire pour le service public de l'énergie.

Pour aider à la réussite de ces manifestations, la gauche a une véritable responsabilité. Notre participation à ces manifestations devra être à la hauteur des enjeux. Plus largement, je te propose de lancer un appel commun de toutes les forces de gauche contre ce projet de privatisation. Tous et toutes ensemble, nous pourrons ainsi contribuer à l'élargissement de cette mobilisation et, je l'espère, finir par faire reculer le gouvernement.

En restant à ta disposition,

Je te prie d'agréer mes salutations amicales.

Marie-George Buffet

8 - école publique

8.1 - Lettre ouverte au ministre de l'Education nationale

Monsieur le Ministre de l'Education Nationale,

La publication du rapport OBIN de l'Education nationale arrive bien tard hélas !

Beaucoup de temps a été perdu , et ce qui était dénoncé dans le livre " les territoires perdus de la République " ( Emmanuel Brenner ) en 2004 n'a fait qu'empirer...

Non respect de la laïcité dans les écoles , dans les cantines , refus de la mixité , refus de " cohabiter " dans cet espace commun de l'école , séparation en communautés ethniques et religieuses...

A Lyon, une lettre de parents d'élèves d'une école de l'agglomération nous est parvenue : la fille de ces parents a été constamment l'objet d'insultes parce qu'elle mange du porc, la cantine de l'école organise des tables séparées :

les " sans porcs " et les " avec porc " . Or, comme disent ces parents, " la République est une et indivisible. Toute division en son sein, visible et organisée met en péril cette indivisibilité. Cette division assigne une place à tout enfant en fonction de son origine, de sa supposée religion."

Elle organise les enfants en communautés, dés l'école primaire ! La cantine d'une école est dans l'école. Le personnel de la cantine d'une école est placé sous la responsabilité de la Mairie.

La petite fille a été agressée particulièrement parce que sa mère est d'origine maghrébine, mais cette mère est laïque et refuse que sa fille suive une prescription du Coran à l'école. La petite fille a été également injuriée parce qu'elle porte une jupe ! C'est donc l'équipe éducative tout entière qui aurait dû intervenir et faire respecter la laïcité.

La fillette est maintenant au collège : la voilà pressée , harcelée parce qu'elle ne fait pas le Ramadan .( On pourrait parler également de ce jeûne , et de la santé des enfants, sans manger ni boire une journée , qu'en pense le corps médical ? )

Toutes ces dérives existent (je tiens à votre disposition le dossier remis par les parents). Dans les écoles où les élèves non- musulmans sont minoritaires, ces pratiques sont courantes : dans mon entourage, un enfant a connu les mêmes problèmes . mais l'équipe éducative a réglé ce problème dans l'unité et avec la plus grande fermeté.

Les dérives de cet islam radical qui cherche à s'imposer dés l'école maternelle ont été dénoncées dans le livre " l'école face à l'obcurantisme religieux " avec la publication du rapport OBIN .

Ce livre devrait être à la disposition des personnels:

Et les chefs d'établissement , pour les établissements scolaires devraient le lire , le commenter et redéfinir la loi républicaine et celle de notre école , qui doit respecter la liberté de conscience des enfants en les préservant de tout prosélytisme religieux , l'école doit rester résolument laïque.

Quand on voit :

On ne peut qu'être indigné et révolté de voir les lois de la République ainsi bafouées et l' islam radical et tous les intégrismes se glisser ainsi dans l'école, poussés par des intégristes religieux qui cherchent à ébranler la République et attaquent la laïcité qu'ils détestent et veulent supprimer.

Les enseignants, les parents d'élèves et tous les citoyens, attachés à la laïcité, à la liberté de conscience, à la liberté d'expression doivent se lever et dire " Stop " !

C'est l'objet de cette lettre, Monsieur le Ministre de l'Education Nationale, c'est le cri d'une enseignante retraitée qui, avec son association, l'Union des Familles laïques, a défendu et défendra de toutes ses forces, jusqu'au bout, cette valeur magnifique qui est NOTRE, la laïcité.

Dans son rapport, monsieur Obin a tout vu et dit. Sa conclusion est la nôtre:

Sur un sujet aussi difficile et aussi grave puisqu'il concerne la cohésion nationale et la concorde civile , soulignons qu'il est deux qualités qui permettent beaucoup , et qu' on devrait développer et promouvoir à tous les niveaux. Ce sont la lucidité et le courage

Veuillez croire , Monsieur le ministre de l'Education Nationale , à l'expression de mes sentiments respectueux.

Mireille Popelin

9 - combat féministe

9.1 - Violences conjugales : une femme meurt tous les deux jours

Tous les indicateurs sont au rouge. Mais cette flambée des statistiques montre aussi que les victimes portent de plus en plus plainte.

PLUS les études sur les violences conjugales se multiplient, moins les résultats sont encourageants. Alors que l'enquête de novembre 2005, menée pour le compte du ministère de la Cohésion sociale, révélait qu'une femme mourait des suites de violences conjugales tous les quatre jours, le rapport 2006 de l'Obser vatoire national de la délinquance (OND) annonce qu'il en meurt une tous les deux jours.

En 2004, pas moins de 34 848 violences non mortelles ont été commises sur les femmes par leur conjoint ou ex-conjoint, soit une hausse de 13,6% par rapport à 2002, révèle le rapport de cet observatoire, fondé sur les données fournies par les services de gendarmerie et de la police nationale. Quant aux meurtres et aux viols commis sur concubines, ils ont respectivement augmenté de 13% et de 35,2% en trois ans (de 2002 à 2004). Tous les milieux sociaux continuent d'être touchés par ce fléau.

Briser l'omerta

Pour autant, ce serait une erreur de dire que les femmes battues sont plus nombreuses qu'avant, tempère Valérie Bonvoisin, chargée d'études à l'OND qui a mené l'enquête sur les violences conjugales. N'est-ce pas plutôt que les femmes sont de plus en plus nombreuses à dénoncer leur situation, grâce aux campagnes de préven tion ? Une différence de méthodologie expliquerait le décalage entre les statistiques du ministère et celles de l'OND, qui certifie pourtant s'approcher le plus de la réalité.

C'est sur un autre aspect de la question que s'est penché Aldo Rocco. Déterminé à comprendre l'incompréhensible, cet écrivain italien de renom, qui a préféré écrire sous pseudonyme, vient de publier Pourquoi les hommes frappent les femmes. Violences conjugales : l'enquête (Éditions Alban). Pour une fois, la parole est donnée aux coupables, aux hommes, souligne-t-il. Une façon de passer de l'autre côté du miroir, pour tenter de découvrir ce qui se passe dans leur tête quand ils deviennent violents.

Le plus souvent, les agresseurs évoquent des abus et des maltraitances dans leur propre enfance. D'autres attribuent leur violence à un mariage non souhaité et trop précoce ou à une hétérosexualité mal assumée. Certifiant ne pas chercher à les excuser mais à mieux cerner les mécanismes psychologiques qui sont alors mis en jeu, Aldo Rocco espère ainsi briser l'omerta sur ce sujet en Italie.

L'ouvrage fait d'ores et déjà réagir les associations de défense du droit des femmes qui estiment que la seule volonté de comprendre l'acte des hommes violents est déjà la négation de leur délit. Selon Annie Guilberteau, directrice générale du Centre national d'information sur les droits des femmes et des familles (CNDIFF), les violences conjugales ne relèvent pas de la pathologie mais de la délinquance et de la volonté de contrôle et d'appropriation des femmes. Qu'importe s'il y a des facteurs psychiques ou non qui favorisent le passage à l'acte, ils ne l'expliquent et ne l'excusent en aucun cas.

Delphine De Mallevoüe in Le Figaro du 3 octobre 2006

9.2 - Indonésie: les médecins n'ont plus le droit de pratiquer l'excision

Les médecins et les infirmières n'ont plus le droit de pratiquer des excisions en Indonésie, pays musulman le plus peuplé du monde, a annoncé mercredi un haut responsable du ministère de la Santé.

Dans ce pays, certaines communautés encouragent les parents à faire procéder à une ablation d'une partie du clitoris des petites filles à leur naissance même si les instances islamiques indonésiennes ne sont pas toujours d'accord sur l'intérêt de ces pratiques quand elles n'ont pas de but thérapeutique.

Selon Sri Hermiyanti, directrice du service de la santé familiale au sein du ministère, les excisions symboliques, qui ne causent pas de tort physique à l'enfant pourront encore être réalisées.

"Mutiler, endommager, inciser le clitoris ou procéder à son ablation ne sont pas autorisés. Ces pratiques violent les droits reproductifs de ces jeunes filles et endommagent leurs organes", a déclaré Hermiyanti, ajoutant qu'une circulaire avait été diffusée en avril parmi les autorités médicales.

"S'il ne s'agit que de nettoyer l'organe, ce n'est pas un problème. Mais en Indonésie cela implique une incision. La pratique relève davantage de la tradition que de la religion, de nombreux imams ne l'encourageant pas", a-t-elle expliqué.

Selon l'Organisation mondiale de la santé, deux millions de filles dans le monde entier sont, chaque année, exposées à l'excision, une pratique antérieure à l'avènement de l'islam.

AFP

10 - république et enjeux de mémoire

10.1 - Colonisation : pour en finir avec les idées reçues

Dans un essai érudit et nerveux, Pour en finir avec la repentance coloniale[1], Daniel Lefeuvre, professeur d'Histoire à l'université Paris-8, s'adresse aux Repentants et à leurs discours qui, de l'esclavagisme à la colonisation en passant par l'immigration, dressent un réquisitoire féroce contre une France coupable de tous les maux. Entretien.

L'Opinion : Comment en est-on arrivé à considérer la colonisation accomplie par la France comme la genèse du nazisme et Hitler comme le fils spirituel de Gambetta ou Ferry ?

Daniel Lefeuvre : Le moment où un parallèle est fait entre le nazisme et la colonisation se situe lors du procès Papon. Ce dernier fut, comme on le sait, un fonctionnaire zélé de Vichy et joua un rôle important dans la déportation des juifs de Bordeaux.

Plus tard, il fut préfet à Constantine et ensuite préfet de police à Paris où il mit en place des instruments de répression violents contre le FLN en France et plus largement contre la population algérienne, notamment lors de la manifestation du 17 octobre 1961 puis celle du métro Charonne. Durant son procès, on fit donc le rapprochement entre colonisation et collaboration. Par ailleurs, il y eut un travail militant sur la notion de massacres de masse et de massacres coloniaux. On développa l'idée qu'il y avait eu des massacres semblables à celui d'Oradour pendant la colonisation. On peut citer les articles de Claude Bourdet ou de François Mauriac évoquant notre gestapo en Algérie. Cette littérature militante, parfaitement honorable par ailleurs, a été réanimée pendant le procès Papon où l'histoire coloniale fut présentée comme un nouveau passé qui ne passe pas en référence à Vichy.

Ce discours actuel sur la repentance émane de groupes marginaux et militants, mais a aussi été repris dans des cercles plus institutionnels. Vous citez Le Monde et sa fixation sur la guerre d'Algérie, on pense aussi à Libération...

On peut constater ce glissement. Il y a une espèce de discours bien-pensant qui autorise que l'on dise n'importe quoi sur la colonisation en lui attribuant tous les maux possibles : idéologiques, politiques ou économiques avec le sous-développement des anciens colonisés.

L'Opinion : Ce discours repentant n'est-il pas le prolongement d'une certaine tendance à l'autoflagellation ou à l'autodénigrement qui va de L'Idéologie française de BHL à la France moisie de Philippe Sollers ?

Daniel Lefeuvre : Il s'inscrit effectivement dans ce courant intellectuel qui nous dit que nous devons avoir honte de ce que nous sommes, honte de ce qu'est la France et honte de notre passé.

L'Opinion : Parmi les idées reçues que vous dénoncez et démontez, il y a celle selon laquelle la France aurait conduit un véritable pillage aux colonies dont le sous-développement est une séquelle scandaleuse.

Daniel Lefeuvre : Que la colonisation ait été entreprise notamment pour des raisons économiques, c'est évident. Mais ce n'est pas parce que l'on espère tirer profit de la colonisation que l'on va en tirer profit.

Pour certains milieux, qu'il s'agisse d'entreprises ou d'hommes, la colonisation a pu être une bonne affaire. Ensuite, le budget de l'État s'est-il engraissé grâce aux colonies qui auraient été la vache à lait de l'économie française ? Si l'on observe les principales matières premières dont la France avait besoin, on se rend compte que l'apport des colonies joue un rôle tout à fait marginal.

L'exemple le plus frappant est celui du coton, mais le cas du pétrole algérien est assez éloquent et n'a jamais été une manne. Par ailleurs, certaines entreprises ou secteurs d'activités ont trouvé dans les colonies des débouchés importants, plus stables que l'étranger et plus rémunérateurs. Cependant, si cet aspect compte, les colonies n'ont jamais fourni plus de 10 ou 20 % des débouchés extérieurs de la France tandis qu'elles ont été considérablement subventionnés par le Trésor, c'est-à-dire par le contribuable, pour absorber ces richesses. La France a dépensé en net dans son empire trois fois et demi plus que ce que l'aide américaine a apporté à la France du lendemain de la seconde guerre mondiale à la fin du plan Marshall.

L'Opinion : Vous rappelez que l'argument économique selon lequel les colonies coûtaient plus cher que ce qu'elles rapportaient était brandi par certains anticolonialistes libéraux ou de droite, comme Raymond Cartier dans Paris Match dont l'expression La Corrèze avant le Zambèze est restée fameuse...

Daniel Lefeuvre : Effectivement, tout un courant d'économistes libéraux, dès le début de la conquête coloniale, remarque que celle-ci, faite en partie au nom de réalités économiques, est une illusion. Pour eux, la prospérité européenne ne peut pas reposer sur la domination coloniale. Cette tradition est étouffée de la première guerre mondiale jusqu'au début des années cinquante, mais retrouve une audience avec Cartier sur un mode indiscutablement raciste et surtout avec Raymond Aron sur un mode plus savant et plus intelligent.

Chez les repentants, vous déplorez l'idée que la torture et les massacres de masse seraient nés chez les Français avec la colonisation. Vous rappelez d'autres épisodes historiques tragiques comme la Vendée...

Évidemment, il y a eu des massacres de masse pendant la conquête coloniale et en particulier pendant la conquête de l'Algérie qui fut longue et dure. En revanche, il n'y a pas eu de spécificité dans la guerre coloniale qui aurait institué, selon certains, des massacres de populations civiles. Ainsi, avant la conquête de l'Algérie, il y a eu des guerres où l'on a usé de ces procédés. C'est vrai pour la guerre en Vendée comme pour la guerre d'occupation française menée en Espagne. D'ailleurs, la plupart des chefs militaires qui ont conquis l'Algérie sont passés soit par la Vendée soit par l'Espagne, comme Bugeaud. Rien de nouveau donc en Algérie. On retrouve aussi les mêmes méthodes en Europe avant le premier conflit mondial avec les terribles guerres balkaniques.

L'Opinion : À propos de l'immigration algérienne de l'après-guerre, il y a l'idée reçue selon laquelle le capitalisme français l'aurait provoquée. Or, elle répondait à une volonté politique, et non économique, qui se situait dans la perspective de garder l'Algérie française.

Daniel Lefeuvre : L'immigration algérienne de travail correspond à une nécessité économique lors de la première guerre mondiale. Ensuite, cette immigration répond essentiellement à un facteur : l'accroissement démographique en Algérie allié à la stagnation du nombre d'emplois. Pour ces populations, l'immigration apparaît comme une solution de subsistance. Pour l'État français, la misère en Algérie peut nourrir des sentiments nationalistes contestant la présence française. L'immigration est alors une solution immédiate qui permet de soulager la misère et de réduire les risques politiques. Donc, la France facilite l'accès des Algériens au monde du travail en métropole en mettant en place des mécanismes de préférence nationale. Le patronat n'a jamais été enthousiaste quant à la main-d'œuvre algérienne. Après l'indépendance, ce sont les autorités algériennes qui vont négocier pour que la porte reste ouverte à leurs ressortissants confrontés au chômage.

L'Opinion : Autre idée reçue : la main-d'œuvre coloniale aurait reconstruit la France. Vous écrivez que son rôle dans le relèvement national est marginal...

Daniel Lefeuvre : Tout simplement parce que cette main-d'œuvre est très peu nombreuse. Au début des années cinquante, il y a environ 250 000 Algériens en France, 50 000 Marocains et quelques milliers d'autres travailleurs, soit 300 000 personnes pour une population active de 17 ou 18 millions de personnes. Même dans les secteurs où elle est concentrée, elle ne représente que 2 ou 3 % de la population active du secteur.

L'Opinion : Vous terminez votre livre en exprimant la crainte de voir s'ériger une France du communautarisme et de l'Apartheid. Cependant, ce chemin semble bien engagé...

Daniel Lefeuvre : Cette idée de repentance conduit à nourrir toute une série de revendications, notamment sur une fracture coloniale qu'il faudrait résorber. Il y aurait d'un côté les Français de souche et ceux issus des anciennes colonies. Ces revendications politiques s'appuient sur le principe de la discrimination positive qui définit des droits particuliers en fonction de la communauté à laquelle on appartient. Cela est très grave car ce principe détricote la nation française telle qu'elle s'est construite depuis un gros millénaire. C'est grave aussi pour ces populations qui sont surreprésentées dans les milieux populaires, chez les petits employés et chez les chômeurs. Or, les traiter différemment sous prétexte de répondre à ces problèmes risque de les ghettoïser.

Ce type de système fait émerger quelques représentants des communautés dans les élites - on le voit bien aux Etats-Unis - mais la masse de ces gens est reléguée aux marges de la société. Si l'on se lance dans un modèle communautariste, on écarterait ces populations de l'ascenseur social et du creuset républicain français qui, à mon avis, continue de fonctionner malgré ses imperfections.

Article paru dans l'édition du Vendredi 22 Septembre 2006

Notes

[1] Pour en finir avec la repentance coloniale, Flammarion, 230 p, 18 euros.

Christian Authier

10.2 - Indigènes... ou la difficile mémoire

OUI, je suis allée voir le film du réalisateur Rachid Boucharel : l'histoire de ces 130 000 maghrébins et africains qui s'engagèrent dans l'armée française. La première scène montre l'engagement : les recruteurs proposent l'engagement et les " indigènes " acceptent.ou non. Mais beaucoup acceptent pour l'argent. On suit ainsi les recrues, en butte au racisme des chefs et des autres " français " qui sont traités différemment " les tomates , ce n'est pas pour vous " leur dit un gradé.

Ils arrivent en France, " la mère patrie " qu'ils n'avaient jamais vue. les combats sont violents , les indigènes s'unissent dans le combat , ils sont courageux, solidaires.

Le sergent " pied noir ", lui, est raciste (j'allais dire bien sûr). Un seul pied noir gradé, on n'entend guère les autres, et il est raciste ! Il paraît donc représenter TOUS les pieds noirs, qui firent la guerre aussi.. C'est (comme dit Guylain Chevrier) une instrumentalisation de l'histoire : je sais , parce que j'étais instit en Algérie de 1959 à 1963 , que tous les pieds noirs n'étaient pas racistes ! Certains soutenaient les Algériens, par exemple, certains s'engagèrent même à leurs côtés .. Certains ont été plastiqués par l'OAS, certains, encore plus engagés furent torturés (Henri Alleg ) et d'autres sont morts , fusillés par l'armée française ! (Fernand Yveton, Maurice Audin)

Il faudrait, en même temps que le film "Indigènes ", repasser le film " la question " tiré du livre de Henri Alleg.

En parlant du film " Indigènes " à une féministe d'origine algérienne, elle m'a dit " je ne savais pas tout cela. mais elle ignore aussi l'histoire de Henri Alleg ! Et celle des luttes anti-coloniales , en France

Voilà bien le problème : ce très beau film risque de donner des arguments à ceux qui, en ce moment, essaient de diviser la population, de la communautariser. Avec la pétition " Nous les indigènes de la République " et maintenant le film" Indigènes " (même titre , c'est curieux) , il y a le risque de dresser les " issus de l'immigration " contre la France , contre les français, en oubliant que beaucoup de français ont lutté contre la colonisation et les colonisateurs , contre la guerre d'Algérie ..

Les enfants des indigènes contre les enfants des colonisateurs ?

" Indigènes " " la question ", deux films et un troisième qui n'a pas encore été fait : l'histoire des pieds noirs chassés de l'Algérie ," les juifs" et les "chrétiens " obligés de quitter les ex- pays colonisés, un exode lent et silencieux dont les belles âmes compassionnelles n'ont pas parlé.

Assez bouleversée par ce film (j'ai vécu 4 ans en Algérie et partagé la souffrance de mes amis pieds noirs anti-OAS, comme moi et plastiqués comme moi)

je songeais, à la sortie, que j'avais été menacée par l'OAS , et que maintenant , je combats le fascisme islamique en France !

L'Algérie, c'est NOTRE histoire, pas celle des "indigènes" seuls. Nous avons à écrire AUSSI les pages de son histoire.

Allez voir ce film, qui est magnifique, malgré les visées politiques et le manichéisme qu'il sous-tend.

Mireille Popelin

11 - à lire

11.1 - 7 millions de travailleurs pauvres, la face cachée des temps modernes, de Jacques Cotta

Editions Fayard, 300 pages, septembre 2006, 19 euros

Les Restos du cœur gèrent, les profs gèrent, la police gère, tout le monde gère, pourvu que cela ne pète pas. ...

Cette explosion ou implosion est inévitable, à moins que la gauche de redevienne la gauche et qu'une mobilisation importante conduise les politiques, du moins ceux qui se réclament du socialisme et du mouvement ouvrier à prendre les décisions qui s'imposent.

N'est-il pas urgent que les logements en nombre suffisants soient accessibles !

N'est-il pas urgent de mettre fin aux petits boulots, au CDD !

N'est-il pas urgent de mettre fin à la pauvreté qui touche plus de sept millions de travailleurs et plus de deux millions d'enfants !

Une explosion pourquoi pas si elle débouche sur une alternative politique et non sur une division entre pauvres et l'arrivée d'un pouvoir fort...

Toutes ces questions sont au cœur de cet ouvrage fort documenté et surtout fort vivant.

L'auteur, journaliste de son état n'a pas hésité à aller sur le terrain pour rencontrer des dizaines et des dizaines de personnes, travailleurs pauvres, bien souvent sans toit.

Les entretiens sont souvent très émouvants, ils nous montrent la gravité de situations individuelles et collectives de familles et aussi l'incurie d'un système.

Les stages parking existent, ils sont même obligatoires :

Dès les premiers jours, les formateurs absents durant pratiquement tout le cycle, ont indiqué aux quinze stagiaires que {{ la forme autogestionnaire était la plus adaptée à leur situation , les mieux formés aidant et corrigeant les moins avancés. }} ! On croirait cauchemarder !

Les séries télévisées nous montrent parfois des policiers découvrir et fermer des dortoirs clandestins , elles ne montrent pas ces dizaines voire ces centaines d'hôtels délabrés qui touchent des subsides confortables de la part des institutions et pouvoirs publics pour entasser des sans abris...

Une autre voie est possible ; la loi de réquisition existe. Réactualisée en 1998, elle date de 1945 : c'était la réponse du Conseil national de la résistance à la crise qui secouait la République au sortir de la guerre ...Elle n'est pas appliquée alors que des dizaines de milliers de logements, même des centaines de milliers de logements inoccupés existent à Paris et en région parisienne ! Mais aujourd'hui la droite s'apprête à balayer tous les acquis de la Libération.

Ce livre traite un sujet d'une brûlante actualité qui dérange beaucoup de responsables politiques...La gauche institutionnelle se tait devant cette situation qui conduit à l'installation d'une société duale où la misère fait face à un enrichissement exponentiel des milieux financiers.

On voit même des verts refouler physiquement des pauvres venus demander que les promesses en termes de logements soient respectées...

Le maire socialiste d'Alfortville sort un arrêté municipal et en appelle aux forces de police pour évacuer un conseiller municipal indiscipliné osant demander que la Municipalité réquisitionne des logements et locaux vides !

Jacques Cotta nous offre un document intéressant, passionnant même nous donnant d'ailleurs la rage au ventre...Oui il faut que cela cesse et vite...La pauvreté n'est pas une fatalité mais la conséquence d'une politique.

Jean-François Chalot

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