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  1. chronique d'Evariste
    1. Sarkozy, du départ de Beauvau à la gamelle pour l'Elysée, par Évariste
  2. néo-libéralisme
    1. LES BOURSES BATTENT TOUS LES RECORDS, par Jacques Nikonoff
    2. La gauche doit dire " non " à la mobilité de la force de travail en Europe, par Jeanne Bourdillon
    3. L'INTERNATIONALISME LAIQUE ET REPUBLICAIN, par Bernard Teper
  3. école publique
    1. Sauver l'école publique et réparer l'ascenseur social, par Maurice T. MASCHINO
  4. combat social
    1. 70 ans de congés payés et la lutte continue..., par Guylain Chevrier
  5. extrême-droite catholique
    1. La soupe au cochon met la pagaille chez Villiers, par Pierre Caspi
  6. élections présidentielles 2007
    1. Les interrogations de la gauche antilibérale, par André Locussol
  7. Liberté d'expression
    1. Les dessous de l'affaire NICHANE, par Lejournal-hebdo.com
  8. à lire
    1. DIEU EST MORT, MAIS IL TUE ENCORE, par Catherine Deudon
    2. LAIQUES ET CLERICAUX FACE A FACE, par Jean-François Chalot
  9. courrier des lecteurs
    1. Hommage suite au décès de Pierre Montagnon, par Michel Naud
  10. Agenda

1 - chronique d'Evariste

1.1 - Sarkozy, du départ de Beauvau à la gamelle pour l'Elysée

Le grand jour approche, cela sera donc le 14 janvier prochain que Nicolas Sarkozy sera nommé officiellement candidat de l'UMP. Comme c'est un habile tacticien (le fait qu'il ait pris ce parti, malgré toute la résistance de Chirac le prouve), il est probable qu'il en profitera pour annoncer son départ de la place Beauvau, pour se consacrer à plein temps à sa campagne, et aller à la rencontre des Français. Il serait surprenant qu'il commette la même erreur que Lionel Jospin, qui a cru jusqu'au bout qu'il n'avait pas besoin de mener campagne, et que son bilan de premier ministre intègre suffirait à lui ouvrir les portes de l'Elysée.

Sarkozy a tout intérêt à partir dès maintenant. D'abord, il ne sera plus lié par la solidarité gouvernementale, notamment vis-à-vis de Villepin, qui le déteste autant que Sarkozy le hait. Ensuite, il n'a rien à gagner à alimenter les justes critiques que la dualité des rôles entre ministre de l'Intérieur et candidat aux présidentielles lui occasionnent depuis de longs mois.

Enfin, il pourra dire, en manipulant un peu les chiffres, qu'il est le ministre de l'Intérieur qui a fait reculer la délinquance (mais pas le nombre d'agressions individuelles) et que, sous son mandat, aucun mort n'a été à déplorer, que cela soit lors des émeutes de novembre-décembre ou lors des manifestations contre le CPE.

Tout donc pousse Sarkozy à quitter à cette occasion le gouvernement, il pourra même se permettre un dernier pied de nez à Chirac, en disant qu'il a entendu le souhait du président, voulant des ministres à leur poste, et qu'il le partage, bien évidemment.

Tout est donc en place pour un show à l'américaine, avec paillettes, show biz et Cecilia à ses côtés.

Il n'en demeure pas moins qu'il y a quand même un problème pour le ministre de l'Intérieur: les sondages (qui certes se trompent très souvent) le donnent aujourd'hui battu face à Ségolène Royal !

Il ne s'agit pas de dire que les jeux sont faits, et que le deuxième tour opposera forcément ces deux candidats. En 1995, on nous parlait d'un deuxième tour Balladur-Delors, en 2002, de l'inévitable bras-de-fer Jospin-Chirac, on a vu le résultat.

Certes, Bayrou peut faire un beau score, certes Le Pen peut encore jouer les trouble-fêtes, il a toutes les cartes pour cela, les raisons de sa présence au second tour sont au moins aussi fortes qu'en 2002.

Mais qui peut sérieusement contester, aujourd'hui, sauf décès violent de l'un d'eux, que le président, en 2007, sera Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy (ce qui ne signifie pas que les deux seront opposés au second tour) ?

Longtemps, certains ont pensé (et cela était dit ouvertement par ses adversaires socialistes) que Ségolène Royal était l'adversaire que la droite souhaitait. Certains ont été jusqu'à dire, avec peu de considération, et sans doute un peu de machisme, qu'elle était nulle, pas une pro de la politique, et que la baudruche allait se dégonfler.

Il est à craindre pour Sarkozy que cela soit un peu plus compliqué que cela. Plusieurs éléments ne jouent pas en faveur du maire de Neuilly. D'abord, il n'arrive pas à rassembler son camp. Certes, à l'image d'Alliot-Marie, télécommandée par Chirac, tout le monde finira par se rallier. Mais ils sont nombreux, à commencer par le président de la République lui-même, qui a encore des appuis, à souhaiter une défaite de Sarkozy. Chirac a su faire perdre les siens en 1974 et en 1981, et quiconque possède un peu de psychologie, et a compris le fonctionnement du personnage, ne peut que savoir qu'il réussirait sa sortie en flinguant subtilement celui qui l'a trahi en 1994, avec Balladur.

Autre mauvais coup pour Sarkozy, Ségolène Royal a su, avec beaucoup d'habileté, et parfois de courage, tourner le dos au discours bobo de la gauche, qui ne passait plus dans les couches populaires. L'exemple de sa sortie sur les jeunes délinquants, et un encadrement militaire, est probant. Brocardés par l'ensemble de son camp, y compris par les socialistes à la Aubry-Lang, insultés par les gauchistes, les propos de Ségolène Royal ont été bien ressentis dans les classes populaires. L'appareil socialiste, dont les leaders comme Strauss-Kahn, Fabius, Hollande, Aubry ou Lang sont méprisés par le peuple, a réussi un coup remarquable en jouant une personne qui, issue du même sérail, incarne un autre discours que celui d'une gauche coupée du peuple, et cela n'est pas une bonne nouvelle pour Sarkozy !

Un autre élément qui ne joue pas en faveur du ministre de l'Intérieur est, paradoxalement, l'échec du " non de gauche " à présenter une candidature commune. Là encore, Ségolène Royal, qui aurait eu tout à craindre d'une candidature qui se serait identifiée à la victoire du 29 mai, sort renforcée par le lamentable échec de fin 2006, qui discréditera pour un bon moment l'ensemble de la " gauche de la gauche ". Non seulement elle voit donc ses " adversaires " de gauche plus divisés et meurtris que jamais, mais elle obtient le ralliement de Jean-Pierre Chevènement. Cela a fait grincer des dents, dans le landernau de la gauche républicaine, habitué depuis longtemps, aux trahisons des socialistes, sur les idéaux républicains que prétend incarner le maire de Belfort. Mais, outre le nombre de circonscriptions qui ont couronné cette nouvelle alliance, nul doute que le maire de Belfort sera un renfort qui pourra convaincre de nombreux électeurs du " non de gauche " de voter Ségolène dès le premier tour.

Car ce sera surtout là l'argument numéro un des supporters de la présidente de Charentes-Poitou : plus jamais le 21 avril 2002, votez utile dès le premier tour !

Et cela pèsera bien plus à gauche qu'à droite, où Le Pen et Villiers piqueront bien plus de voix à Sarkozy que la gauche de la gauche ou les Verts, en admettant que ces derniers soient capables d'aller au bout, et ne se rallient pas au PS dès le premier tour, à la manière d'un Chevènement.

Sarkozy, outre la haine de quelques membres de son camp, sera, lui, plombé par l'image de " caniche de Bush ", l'image de l'homme qui se fait applaudir debout par les dirigeants du Medef, celui qui défend le belgo-suisse Hallyday de ne pas payer ses impôts en France, celui qui traîne un boulet comme Doc Gyneco, et cela, si les socialistes savent y faire, lui fera très mal.

Enfin, Sarkozy voulait incarner le discours de la rupture, devenue tranquille, du renouvellement de la classe politique. Là encore, l'image de la présidente de Charentes-Poitou risque de lui couper l'herbe sous le pied.

Dernière chose : le peuple français est un peuple rebelle. Il n'est pas certain que le cirage de pompes auquel se livrent les médias avec Sarkozy lui soit très profitable.

Le maire de Neuilly va incarner le vote de l'establishment. La manière de dire non à ce vote sera, pour beaucoup d'électeurs révoltés, de se tourner, soit vers Le Pen, soit sur Ségolène Royal, pour battre Sarkozy.

Dans les deux cas, pour le ministre de l'Intérieur, c'est perdant-perdant !

C'est pourquoi, s'il va quitter la place Beauvau, il ne sera pas à l'Elysée en 2007, je suis prêt à prendre tous les paris, restos, bouteilles de champ, etc.

Pour moi, c'est à haut risque : Sarko perd, je suis heureux, et je mange à l'oeil pour un bon moment ! Sarko gagne, je suis d'abord malheureux et dégoûté, et en plus cela me coûte très cher !

Une fois que je vous raconte tout cela, ne me faites pas dire que si Ségolène est élue, tout ira bien, et que les aspirations populaires seront satisfaites, je ne me mouillerai pas jusque là, et vous ne me ferez pas parier un kopek là-dessus !

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2 - néo-libéralisme

2.1 - LES BOURSES BATTENT TOUS LES RECORDS

A part au Moyen-Orient et au Japon (indice Nikkei), toutes les Bourses du monde ont connu en 2006 d'excellents résultats. Aux Etats-Unis par exemple, les pertes dues à l'éclatement de la bulle des nouvelles technologies de l'information, en 2000, ont été effacées. Des records ont parfois été battus.

Les performances des Bourses sont suivies au moyen d'indices boursiers dont le plus connu, en France, est le CAC 40. CAC signifie " cotation des actions en continu " et 40 parce que l'indice est composé de 40 entreprises cotées à la Bourse de Paris, choisies parmi les plus " représentatives " (différents secteurs économiques), " actives " (nombre de transactions d'achat et de vente) et les plus " capitalisées " (la capitalisation boursière d'une entreprise cotée est égale à la valeur de l'action multipliée par le nombre d'actions). Ainsi le CAC 40 a-t-il progressé de 17,5 % en 2006 (quatrième année consécutive de hausse).

Les autres indices boursiers ont connu, eux aussi, des progressions impressionnantes : Bourse de Shanghai (Chine) : + 130,47 % Bourse de Shenzhen (Chine) : + 100 % Indice Sensex (Bombay) : + 46,7 % Indice Hang Seng (Hong Kong) : + 34,2 % Indice Ibex 35 (Espagne) : + 31,8 % Indice Dax 30 (Allemagne) : 22,25 % Indice Dow Jones (Etats-Unis) : + 16,65 % (record absolu) Indice S&P 500 (Etats-Unis) : 14,13 % Indice Footsie 100 Grande-Bretagne) : 11,07 %

Quelles sont les causes de ces hausses des Bourses, et quels seront leurs effets économiques et sociaux ?

Deux causes principales sont mises en avant par les journaux spécialisés.

Première cause : un record de fusions et acquisitions. Elles ont représenté 3 610 milliards de dollars dans le monde dont 1 363 en Europe (2 736 milliards d'euros). Le dernier record mondial avait été établi en 2000 avec 3 400 milliards de dollars. Ces sommes sont tellement gigantesques qu'elles en paraissent abstraites. Afin de leur donner une signification, on peut les comparer à la capitalisation boursière d'une entreprise comme Air France qui valait 8 milliards d'euros fin 2006. Ainsi, les 2 736 milliards de fusions et acquisitions de 2006 ont représenté l'équivalent de 342 entreprises de la taille d'Air France qui auraient changé de main.

Les fusions et acquisitions n'ont que rarement des objectifs industriels. Les buts sont essentiellement financiers et boursiers : permettre une augmentation de la valeur des actions pour les revendre ensuite avec une plus-value confortable. La hausse des cours est en effet automatique car pour convaincre les actionnaires des entreprises " ciblées " de vendre leurs actions à l'entreprise prédatrice, il faut bien augmenter son prix !

Deuxième cause : des profits records générés par les sociétés cotées (par exemple 606 milliards de dollars pour les entreprises composant le Dow Jones, record absolu). Ces profits attirent des acheteurs d'actions, phénomène qui contribue à la hausse des cours.

Les commentateurs oublient cependant une chose : le volume des rachats d'actions et leur proportion avec les émissions nouvelles d'actions. Les Bourses, en effet, ont été créées pour permettre le financement des entreprises. L'efficacité des Bourses devrait donc se mesurer à leur capacité à drainer des financements pour le développement économique. Or, depuis quelques années, une phénomène inverse est apparu : celui du rachat de leurs propres actions par les entreprises.

Depuis 1995 aux Etats-Unis et depuis 2001 en Europe, ont observe une baisse significative du montant des capitaux drainés par les sociétés cotées.

D'une part, le nombre de sociétés cotées en Bourse a tendance à baisser. Alors qu'elles étaient 936 en 2001 à la Bourse de Paris, leur nombre a régulièrement baissé pour atteindre 749 en 2005. Les admissions à la cote ont été de 3 (2003), 18 (2004) et 20 (2005), alors que les radiations ont été ces mêmes années de 64, 54 et 60.

D'autre part, le montant des rachats d'action a parfois dépassé le montant des émissions d'actions. Ainsi aux Etats-Unis les rachats d'actions ont-ils représenté 44 % des distributions de bénéfices en 2000, contre 11 % en 1971. De plus en plus d'entreprises choisissent en effet d'utiliser leurs profits pour récompenser leurs actionnaires en procédant à un rachat d'une partie de leurs actions. De sorte que les actions qui restent sur le marché augmentent de valeur (il y a un plus grand bénéfice déclaré par action), et les actionnaires paient moins d'impôt que s'ils recevaient des dividendes.

Les entreprises cotées en Bourse préfèrent désormais les rachats d'actions aux distributions de dividendes. À la fin des années 1990 et pour la première fois de leur histoire, les entreprises américaines ont utilisé une plus grande part de leurs profits pour racheter leurs actions sur le marché qu'elles ne l'ont fait pour verser un dividende à leurs actionnaires.

Les actions sont rachetées par endettement bancaire ou par utilisation des trésoreries quand celles-ci sont abondantes comme c'est le cas aujourd'hui. Le motif officiel est la " régularisation " des cours de l'action de l'entreprise (comme le ferait une banque centrale pour maintenir la parité de change). En réalité il s'agit de rendre l'argent aux actionnaires, d'attribuer des actions ou des stock-options au personnel (essentiellement les cadres dirigeants).

Les politiques de rachat d'actions sont comme des transactions d'initiés effectuées à grande échelle. Elles sont même des délits d'initié permanents.

Evidement, aucun commentateur officiel ne cherche à savoir ce qui s'est passé en 2006 dans ces deux domaines : les apports de capitaux frais en regard des retraits de la cote et le montant des rachats d'actions.

Quels sont les effets économiques et sociaux de ces évolutions ?

La multiplication des fusions et acquisitions va se traduire par des licenciements, fermetures d'entreprises et délocalisations.

Les profits des entreprises, alors qu'ils pourraient permettre une réduction des inégalités par une relance des politiques salariales et une augmentation des prélèvements sociaux par le biais de la fiscalité, seront quasi exclusivement orientés vers les actionnaires.

Deux mesures devraient être prises : l'autorisation préalable par les pouvoirs publics de toute opération de fusion et acquisition ; l'interdiction des rachats d'actions. Hélas, on ne retrouve ces propositions ni dans la Charte antilibérale, ni dans le Manifeste d'Attac.

Jacques Nikonoff

Source : www.avenirdattac.net

2.2 - La gauche doit dire " non " à la mobilité de la force de travail en Europe

L'année a donc commencé par une nouvelle fort peu commentée par l'ensemble des candidats aux présidentielles. Après le véritable coup de forces qui a consisté à transformer l'Europe des Quinze en une Europe des Vingt-cinq, on file allègrement vers une Europe encore plus élargie, passant pour l'instant, avec l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, à vingt-sept. Et en plus, l'un des deux pays (la Roumanie) a des salaires encore plus bas que ceux qui existaient jusqu'à ce jour dans l'Europe des 25 ! Il va donc falloir très rapidement que les candidats nous expliquent leurs projets pour faire respecter le vote des Français, le 29 mai, à une Union Européenne qui, manifestement, n'en a pas grand-chose à faire.

Autre information intéressante, les employeurs du privé, en Espagne, ont obtenu l'autorisation d'importer, sur leur territoire, 180.000 travailleurs étrangers supplémentaires en 2007.

Pourtant, avec la régularisation massive de 600.000 clandestins (pardon, de sans-papiers), en 2005, et le maintien d'un taux de chômage de près de 9% de la population, soit plus de 2 millions de personnes, on aurait pu penser que l'apport de nouveaux salariés serait peut-être difficile à expliquer.

Pas du tout ! Les autorités socialistes espagnoles, pour la plus grande joie du patronat, nous expliquent que grâce à l'apport de 1,8 million d'immigrés sur le marché du travail, la Sécurité sociale est en excédent de 8 milliards d'euros, et que le système de santé espagnol (santé et retraites) est sauvé ! On oublie juste d'expliquer aux Espagnols (qui paient) le vrai coût du chômage de masse, supporté par la collectivité.

On imagine d'ici, à la lecture de ces faits et des ces chiffres, l'air triomphant que ne vont pas manquer de prendre nos gauchistes, inconditionnels de la liberté de circulation de la force de travail.

Cette fois, n'attendez pas des militants de la LCR, qui ont cassé les collectifs du non au nom d'un ultimatum antisocialiste, de discours hostiles à Zapatero. Il a régularisé tous les sans-papiers, et en plus il permet de continuer d'importer de la force de travail nouvelle : social-libéral, il est sur les positions de l'aile la plus gauchiste du mouvement social, et aussi de la frange la plus libérale du patronat.

Longtemps, les malheureux qui ont osé évoqué des mesures protectionnistes, pour aider notre marché, nos entreprises, le travail des ouvriers, les conventions collectives, gagnées par des décennies de combat, ont été traités de nationalistes, voire bien plus méchamment.

Aujourd'hui, grâce à l'apport et à la réflexion de quelques économistes iconoclastes, comme Jacques Sapir, la notion de protectionnisme, auquel on ajoute le mot " social ", la défense de l'Etat-Nation, autre mot longtemps sacrilège, contre la libre circulation du capital et de la force de travail, commence à susciter à nouveau une écoute intéressée.

Faut-il rappeler qu'en France, sous Lionel Jospin, il n'a fallu que trois années pour équilibrer les comptes de la Sécurité sociale, grâce, notamment, à une bonne conjoncture économique, qui a créé 1.800.000 emplois en trois ans, dont un certain nombre d'emploi-jeunes.

Qui, en France, osera rompre avec le logique - cohérente - des employeurs, cherchant le surprofit, et surtout, à gauche, avec le terrorisme intellectuel des gauchistes compassionnels, qui crient au racisme et à la xénophobie dès qu'on remet en cause le mot d'ordre de " régularisation de tous les sans-papiers ", ou qu'on conteste la libre circulation de la force de travail, que réclamait encore Krivine et les siens fin 2006 ?

La gauche ne veut-elle laisser ces questions qu'aux seules xénophobes de l'extrême droite, ou bien au démagogue Sarkozy, qui, avec sa notion d'immigration choisie, laisse les mains libres au patronat pour choisir sa main d'oeuvre, y compris en pillant les pays pauvres de leurs meilleurs atouts pour l'avenir ?

Qui mènera une vraie réflexion sur la politique de baisse des coûts menée depuis des années : blocage des salaires, précarisation des emplois, flexibilité, exonérations des cotisations salariales patronales, zones franches, menaces de délocalisations pour intimider les ouvriers, etc.

Qui osera faire le parallèle entre la complaisance des différents gouvernements contre cette agression du monde du travail, et la mise en place de systèmes comme le RMI ? Pendant qu'on retirait sa dignité au travailleur, on lui faisait la charité. On l'habituait à vivre des aides, et à ne plus être un homme libre, ne devant cette liberté qu'à son travail.

Qui osera dire qu'on est en train de mettre en place, dans l'Europe, un système de " jaunes potentiels ", qui sont utilisés pour casser les grèves et briser les acquis, exactement comme le patronat des Mines et du Bâtiment utilisait, au début du siècle dernier, des jaunes pour briser les revendications des ouvriers. Ceux-ci n'avaient pas alors les gauchistes et la presse bien-pensante pour les traiter de racistes xénophobes, ils avaient leur instinct de classe pour empêcher, y compris physiquement, d'autres ouvriers, même plus pauvres, de briser leurs acquis.

Hier, ma fille m'a fait découvrir dessin animé extraordinaire, de la série américaine " South Park ". Cela s'appelait les " Gluands ". L'histoire était simple : des hommes avaient fait un long voyage du futur, pour trouver du travail, car, huit cents ans plus tard, il n'y avait plus d'emplois pour eux. Donc, ils remontaient le temps pour trouver du boulot !

Naturellement, au début, tout le monde trouvait cela drôle, car il y en avait peu. Les premières victimes furent les gamins, qui déblayaient la neige des voisins pour dix euros. Ils ne trouvaient plus leur argent de poche, gagnée par le travail, car celui-ci était fait par un " Gluand " qui le faisait pour moins d'un euro.

Mais leur nombre de mutants augmentait sans arrêt.

Les deuxièmes victimes furent les ouvriers, qui étaient remplacés, au fur et à mesure, par les " Mutants ". C'est alors que syndicalistes, appelés " les Beauf conservateurs racistes en colère " commencèrent à protester contre cela. Ils s'affrontèrent alors à une classe socialement supérieure, appelée " Les Vieux Hippies libéraux un peu glands ". Les ouvriers disaient simplement : " Ils nous volent notre travail ", alors que les hippies disaient aux ouvriers : " Vous devriez avoir honte, ils ont tellement souffert, souhaitons-leur la bienvenue, et accueillons les dignement ". Le dessin animé était extraordinaire, je croyais voir certains cathos-gauchos indécrottables dans les " hippies libéraux un peu glands ".

Avec beaucoup de subtilité, en se préservant de tout message raciste, il posait une question aujourd'hui inabordable, en France (par ailleurs, j'en ai découvert une autre de cette série, contre la Tentation du Christ, de Mel Gibson, que je vous recommande).

Quand un candidat (ou une candidate) aura-t-elle le vrai courage, celui qui consiste, comme disait Jaurès, à chercher la vérité, et à la dire. Les Français n'ont pas envie d'entendre un discours raciste, xénophobe, haineux contre les étrangers. Mais ils en ont plus que marre d'être pris pour des imbéciles par des discours culpabilisants, venus de l'extrême gauche et de la gauche compassionnelle à la Lang-Aubry, qui font passer les salariés qui veulent tout simplement protéger leur force de travail, leur outil de travail, leur dignité, en réclamant notamment, en période de chômage de masse, un contrôle de l'immigration contre la concurrence libre et non faussée de la force de travail, pour des beaufs racistes électeurs de Le Pen!

Jeanne Bourdillon

2.3 - L'INTERNATIONALISME LAIQUE ET REPUBLICAIN

NON AU PROTECTIONNISME D'HIER! NON AUX QUATRE LIBRE-ECHANGE (SERVICES, CAPITAUX, PRODUITS MANUFACTURES ET AGRICOLES, FORCE DE TRAVAIL) ! OUI A L'INTERNATIONALISME LAIQUE ET REPUBLICAIN !

Le débat sur l'immigration est un débat qui est devant nous. Pourquoi?

D'abord parce que le turbocapitalisme et ses politiques néolibérales en font une arme centrale. Puis parce que les gauchistes culturels et communautaristes en remettent souvent une couche en servant d'idiots utiles au néolibéralisme. Enfin ,parce que le traitement inhumain qui est réservé aux immigrés est un scandale pour tout humanisme.

Cependant, il faut éviter les formules rapides à l'emporte -pièces et faire croire qu'avec une mesure, on règle tous les problèmes. Par exemple, qu'il suffise de ne pas régulariser les sans-papiers et de fermer les frontières. Il faut donc globaliser le problème et donc l'insérer dans une politique cohérente de rupture avec le néolibéralisme.

Pourquoi il faut dire " non au protectionnisme d'hier " ?

Le protectionnisme d'hier est un protectionnisme renfermé dans les Etats-nations organisé par les bourgeoisies nationales. Tous ceux qui pensent qu'il est possible de revenir au passé se trompent car dans aucun pays développé ,les bourgeoisies nationales sont en mesure d'assurer leur hégémonie à droite et donc elles ne sont pas en mesure de prendre le pouvoir. L'arrivée de Nicolas Sarkosy, le " bushiste " français est l'homme des firmes multinationales qui ont encore le pouvoir aujourd'hui sur la planète. Il est le symbole de l'écrasement de la bourgeoisie nationale française.

Reste la stratégie des républicains des deux rives tentée par Jean-Pierre Chevènement en 2002 avec le succès que l'on sait et dont on connaît la fin de l'histoire à savoir le reniement et l'alliance avec les sociaux-libéraux pour une poignée de lentilles. Donc les deux scenari sont impossibles. Le protectionnisme d'hier n'est qu'une nostalgie qui ne peut produire qu'une impasse. Si personne n'est en capacité de proposer une sortie de crise en répondant à l'urgence politique et sociale mondiale, la chimère du protectionnisme d'hier ne peut qu'alimenter les discours protestataires de différentes sensibilités sans aucune chance de déboucher sur une sortie de crise. Car tout n'est pas possible quand on analyse sérieusement la situation économique et politique mondiale.

Pourquoi il faut dire " non aux quatre libre-échanges " ?

Parce que ces quatre libre-échanges de marchandises (services, capitaux, produits manufacturés et agricoles et force de travail) sont cosubstanciels au néolibéralisme.De ce point de vue, nous savons depuis Karl Marx, que l'homme n'est pas une marchandise mais que sa force de travail en est une. Pour rompre avec le néolibéralisme, il faut rompre avec tous les libre-échanges sans exception. Il n'y a donc pas de rupture avec le néolibéralisme si ,comme nos gauchistes culturels et communautaristes ,on demande la liberté d'installation de tous les travailleurs immigrés de la terre et certains ajoutent comme pour la liberté des capitaux (Krivine dans un interview au Figaro à l'été dernier!). Voilà une des raisons de l'implosion de la gauche anti-libérale en France, une partie d'entre elles étant les idiots utiles du néolibéralisme !

Pourquoi le néolibéralisme est pour le droit d'installation de tous les travailleurs immigrés ?

C'est parce que l'une des cinq caractéristiques du turbocapitalisme (phase actuelle du capitalisme) est d'harmoniser les systèmes de protection sociale par le bas en mettant en difficulté les systèmes de protection sociale les plus protecteurs. L'un des moyens est d'ouvrir les vannes de l'immigration et de faire en sorte que ces travailleurs ne puissent travailler qu'au noir. Dans ce cas, cela met en difficulté les systèmes de protection sociale développé car les travailleurs au noir ne cotisent pas. Puis cela fait une pression sur les salariés qui cotisent car les travailleurs au noir sont plus fragiles que les travailleurs cotisants car ils ne sont pas protégé par le droit du travail.

Il est donc nécessaire d'avoir une politique néoprotectionniste en matière d'immigration.

Mais si on ne peut pas revenir au protectionnisme d'hier et qu'il faut une politique néoprotectionniste, comment faire ?

C'est là qu'intervient la nécessité pour les laïques et les républicains de gauche et d'extrême gauche de renouer avec l'internationalisme laïque et républicain. Il s'agit là de proposer une sortie de crise qui réponde à l'urgence sociale et politique tant en France, qu'en Europe et dans le Monde tout en restant dans un univers démocratique. L'internationalisme laïque et républicain permet de résoudre le paradigme du 21 ème siècle : traiter tous les habitants de la planète selon un humanisme républicain permettre une harmonisation des systèmes de protection sociale par le haut refuser les méthodes fascistes de répression permettre un système de développement pour tous et non pas accepter que le développement des uns se fassent au détriment des autres.

Il faut donc une politique globale cohérente et non pas une idée qui semble tout résoudre et qui ne résout rien.

Pour maintenir un système de protection élevé ,il est nécessaire (mais pas suffisant) de supprimer le travail au noir qui est une cinquième colonne contre le système de protection sociale ). Trois possibilités :l'expulsion, le retour négocié , la régularisation. Tous les syndicats démocratiques de policiers vous diront qu'expulser des centaines de milliers de travailleurs au noir n'est possible qu'en régime fasciste (rafle du Vel'd'hiv). Tout au plus ,une démocratie ne peut expulser que quelques petits millliers de travailleurs avec des problèmes éthiques déjà évidents.

Le retour négocié demande une politique de développement dans le pays d'origine et donc n'est possible qu'à moyen terme et non à court terme. Reste la seule solution qui est la régularisation avec une guerre contre le travail au noir organisé par des brigades nouvelles d'inspecteurs du travail contre les employeurs qui complotent contre la République.

Mais si on veut donner une réponse pour tous les habitants de la planète ,il faut une réponse internationaliste qui agisse pour élever les systèmes de protection sociale des pays pauvres ou moins développés. C'est là qu'intervient le néo-protectionnisme altruiste, social et écologique qui instaure une taxation fonction des différentiels de système de protection sociale et écologique dont le produit est intégralement versé au pays exportateur moins développé.

Le tout lié à une théorie du développement économique de l'ensemble des pays du monde. [1]

Mais en même temps que ces politiques, il faut annoncer une politique RESTRICTIVE de l'immigration avec le cas échéant menacer l'Union européenne de la politique de la chaise vide (comme de Gaulle avait fait en son temps) pour obliger l'Union européenne d'entrer dans un cercle vertueux de développement et de rupture avec le néolibéralisme. Le rétablissement des contrôles aux frontières d'un noyau dur européen est de ce point de vue nécessaire. Voilà un créneau de travail pour les mouvements d'éducation populaire laïque tourné vers l'action.

Cette piste est bien sûr soumis au débat. Mais elle a l'avantage d'être un projet global contrairement à tous les autres qui jusqu-ici ont été produits qui ne sont que des projets partiels ou protestataires qui ne peuvent donc pas être une alternative cohérente et globale aux politiques néolibérales.

Notes

[1] C'est ce que l'UFAL débattra lors de son Université populaire laïque (UPL) d'Annonay (07) avec plusieurs économistes qui présenteront le projet global.

Bernard Teper

3 - école publique

3.1 - Sauver l'école publique et réparer l'ascenseur social

Soutenus par l'OCDE et le libéralisme ambiant, les "modernistes" de l'Education nationale écartent les élèves défavorisés du centre du système.

Vous dénoncez la politique de destruction de l'école, à l'oeuvre depuis des décennies ?

Nostalgie ! Vous constatez que de très nombreux élèves savent à peine lire, ignorent l'orthographe et manquent totalement d'esprit critique ? Nostalgie ! Vous êtes scandalisé que les correcteurs du brevet et du bac reçoivent des consignes pour relever les notes de copies archinulles ? Nostalgie, vous dis-je !

Nostalgie, irrationalité, conservatisme : tels les médecins de Molière, les Diafoirus de l'Education nationale n'ont que ces mots-là à la bouche. Loin de réfuter, preuves à l'appui, les arguments de ceux qui constatent la mort de l'école, ils se contentent d'invectives et, retour à l'école de grand-papa ou à la grammaire de grand-mère, taxent de passéisme ceux qui défendent l'école de la République. C'est un peu court. Et rappelle la myopie de ceux qui, quand le doigt montre la lune, regardent le doigt.

Trop souvent, lorsqu'on s'interroge sur le présent ou le devenir de l'école, on raisonne comme si l'école était une entité, une sorte d'institution en soi, qui échapperait à toutes les contingences du moment. Alors qu'elle dépend étroitement du contexte socio-politique dans lequel elle s'inscrit et qui en fixe les modalités et les fonctions, qu'elle a toujours été au service d'une politique, d'une idéologie et des exigences des maîtres du moment, que ses fins, en un mot, ont toujours été extrascolaires : non pas la distribution au plus grand nombre du plus grand savoir, mais la répartition inégale du savoir entre les groupes sociaux et la place qu'ils occupent dans le processus de production.

Ces fins sont aujourd'hui très claires : au moment où le libéralisme gagne tous les secteurs de la vie socio-économique, où la privatisation des services, jusqu'à présent à la charge de l'Etat, s'accélère, l'école publique change complètement de nature. N'accueillant plus que les enfants des catégories sociales les plus "défavorisées" ou en déclin, comme les classes moyennes, elle n'a plus pour mission de transmettre des connaissances ­ des enseignants ont été sanctionnés pour continuer à le faire ­ mais de gérer au mieux une population dont il ne s'agit plus d'élever le niveau.

Si "l'ascenseur social" est en panne, comme on le répète, c'est pour la raison très simple que les classes dirigeantes n'ont plus besoin, comme à l'époque de Jules Ferry et de l'essor industriel, du savoir et du savoir-faire de la majorité des citoyens : que ceux d'en bas restent donc au sous-sol ou dans les caves de la société.

Et qu'ils y restent tranquilles. Mieux : qu'ils s'"épanouissent" dans cette école devenue un "lieu de vie", où l'on ne s'ennuie plus à apprendre la grammaire, à faire des dictées, des rédactions et des dissertations, à lire des textes auxquels on ne comprend rien...

Au diable le bourrage de crâne, que les verbes et les sujets s'accordent comme bon leur semble et qu'en attendant de trouver une place d'apprenti, dès 14 ans, les "apprenants" s'amusent à faire des crêpes (école élémentaire), s'initient aux jeux de la Bourse ("les Masters de l'économie", installés sur Internet dans les établissements par le CIC), rédigent un journal sportif, mettent en scène un JT ou, en seconde, racontent à la façon d'un journaliste people la rencontre de la princesse de Clèves et du comte de Nemours...

Facéties de maîtres "super-modernistes" ? Nullement : mise en pratique des directives de l'OCDE, que la France a contresignées : à l'avenir, estime l'un des rapports de cet organisme, "les pouvoirs publics n'auront plus qu'à assurer l'accès à l'apprentissage de ceux qui ne constitueront jamais un marché rentable et dont l'exclusion de la société en général s'accentuera à mesure que d'autres vont contribuer à progresser".

Et un fonctionnaire de l'OCDE, Christian Morrisson, de suggérer aux gouvernements européens une réduction drastique des crédits de fonctionnement de l'école publique, ainsi que l'instauration de partenariats avec des entreprises qui, en échange d'investissements financiers, ont déjà pris pied, très largement, dans l'école. Coca-Cola, la firme Morgan ­ dont il était possible, du temps de Jack Lang, de commander un tee-shirt par un simple clic sur le site du ministère ­, la SNCF, participent déjà largement au financement et à la mise en place des nouvelles finalités de l'école, chargée non plus de former des élèves, mais d'éveiller en chaque élève un consommateur. Comme le prescrit un membre de l'Institut de l'entreprise, Jean-Pierre Boisivon, on ne doit pas dire "l'élève est au centre du système éducatif", mais "le client est au centre du marché".

Ce que Claude Allègre avait fort bien compris ­ et encouragé ­ en déclarant qu'au lycée il fallait apprendre à "rédiger un CV ou une lettre de motivation". Ce que préconisait également l'ex-grand-prêtre du ministère de l'Ignorance nationale, Philippe Meirieu, pour qui les enfants des milieux défavorisés devaient "apprendre à lire dans les modes d'emploi d'appareils électroménagers et non dans les textes littéraires" ­ réservés, cela va sans dire, à l'"élite".

Une école publique désertée par ceux qui demain dirigeront le pays, une école réservée, comme les bantoustans l'étaient aux Noirs d'Afrique du Sud, aux enfants des familles, de plus en plus nombreuses, que la société libérale rejette dans ses marges, une école qui les "occupe" en attendant qu'ils s'inscrivent à l'ANPE, telle est la réalité que camouflent les tirades "modernistes" des Tartuffes pédagogistes qui, en prétendant mettre l'élève au centre du système éducatif, y ont installé les marchands.

Des enseignants l'ont compris qui, dans leurs livres, leurs manifestes, leurs communiqués, dénoncent l'escroquerie des Pol Pot de la rue de Grenelle. "Sauver les lettres", "Sauver les maths", sont à l'avant-garde de ce combat. Mais, si la majorité fait la sourde oreille ou se contente d'ergoter sur des questions de méthode, d'horaire et de moyens, l'école de la République ne sera bientôt plus qu'un souvenir, et la République une dépouille.

Maurice T. MASCHINO Maschino ancien professeur de philosophie, journaliste et écrivain. Auteur de Parents contre profs, Fayard, 2002.

Source : www.liberation.fr , mercredi 3 janvier 2007

4 - combat social

4.1 - 70 ans de congés payés et la lutte continue...

L'épopée du Front populaire !

Les grèves du Front populaire laisseront au patronat le souvenir de la " plus grande peur de son histoire ". Il y a un avant et un après Front populaire, où l'idée de progrès social prend un sens pour le peuple, cet oublié trop souvent de l'histoire. Des libertés nouvelles ont été acquises pour préparer les combats de demain dans l'entreprise elle-même et sous un espoir nouveau, celui de s'offrir, en famille, ce qui était seulement réservé aux bourgeois et à l'aristocratie, les vacances...

Avec la fin des années 1920, c'est la grande crise.

Avec la fin des années 1920, une crise économique majeure voit le jour, avec des conséquences sociales, morales et politiques. A l'usine, on y naît presque alors dans les familles ouvrières, seul horizon indépassable avec cadences pour les uns et profit pour les autres. La durée hebdomadaire de travail est de 48 heures. Il y a même le chômage en prime avec la crise, un chômage de masse et une situation d'appauvrissement qui touche les plus modestes. On fait de plus en plus la queue à la soupe populaire Face à cet état de faits les gouvernements s'enchaînent sans gouverner vraiment, de 1932 à 1934, avec une troisième République qui semble impuissante.

C'est alors que l'affaire Stavisky ébranle la République parlementaire Alexandre Stavisky, né en Ukraine, escrocs notoire, a su se faire des relations dans les milieux politiques jusqu'au gouvernement, grâce auxquelles il échappe à la justice. En janvier 1934, il est retrouvé mort et la police conclut au suicide. "Le Canard enchaîné" titrera " Stavisky s'est suicidé d'une balle tirée à 3 mètres. Ce que c'est que d'avoir le bras long." La presse de droite et d'extrême-droite exploite l'événement et déclenche une campagne violemment antisémite et antiparlementaire.

La République et la démocratie en danger !

Cette situation profite à ceux qui voient d'un oeil complice la montée des fascismes en Europe. Les ligues factieuses qui sont contre le parlementarisme, autant dire la démocratie, se regroupent, de l'Action française à la Ligue des croix de feux du colonel de La Rocque en passant par La Ligue des jeunesses patriotes. Le 6 février 1934, profitant du flottement du pouvoir qui ne propose rien pour remédier à la situation, les fascistes français décident de passer à l'action. Ils veulent faire tomber le gouvernement et prendre le parlement, en finir avec la République. Socialistes et communistes face à ce mouvement sont divisés, ainsi que les syndicats, CGT d'un côté et CGTU de l'autre. Sur les pavés, face aux fascistes, on trouve les anciens combattants communistes de l'ARAC ainsi que des républicains. Les fascistes provoquent des émeutes sanglantes. Il y a des dizaines de morts des centaines de blessés. Mais leur coup échoue !

Le 9 février au soir, une manifestation est organisée à l'appel du PCF. Les ouvriers communistes et socialistes se retrouvent place de la République pour exiger la dissolution des ligues fascistes. Elle est interdite par le gouvernement. S'en suit des combats de rue violents avec la police qui charge les manifestants cartouchières pleines et arme au poing. Le brouillard semble impénétrable, mais l'internationale reprise en coeur le coupe. Et voici une forte colonne de socialistes qui rejoint les communistes boulevard Magenta, on entend :. " Groupons-nous et demain... " et " Unité d'action. " Un ouvrier à terre est tiré à bout portant ! Neuf militants ouvriers tombent ce jour là.

De nombreux intellectuels dont Paul Rivet, Alain, Paul Langevin, Malraux, Eluard, Vigo, Léger... se mobilisent pour hâter la réalisation de l'union qui tarde à venir et le 10 février proclament leur soutien à l'idée d'une grève générale. Le 12 février, la grève rassemble un million de travailleurs ! Lors de l'énorme manifestation parisienne, les socialistes se regroupent côté Sud du cours de Vincennes, les communistes côté Nord, ils manifestent côté à côte pour la première fois, ils se rejoignent puis se fondent aux cris d'" Unité d'action ! " C'est la mise à feu du Front populaire. Des comités de vigilance antifascistes se constituent dont le Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (CVIA). En juillet 1934 un premier accord politique est signé entre le Parti Communiste et la SFIO (socialiste). Le peuple a défendu la République et sort renforcé de cette épreuve.

La construction de l'unité politique du Front populaire.

C'est dans cette période que les choses évoluent sur l'initiative du Parti communiste qui abandonne la tactique " classe contre classe " fondée sur la dénonciation de la traîtrise du socialisme vis-à-vis de la classe ouvrière, au profit de celle de l'" alliance des classes moyennes et ouvrières ". L'internationale communiste n'y est pas étrangère qui tire les enseignements de l'arrivée au pouvoir d'Hitler. Elle propose en Europe une stratégie de fronts unitaires face au fascisme devenu l'ennemi. Il faut aussi compter avec la pression des militants de gauche favorables à l'unité. La nation prend une référence nouvelle pour les communistes qui lient la Marseillaise à l'internationale. C'est Maurice Thorez, à Nantes le 24 octobre 1934, qui appelle lors d'un meeting à la constitution d'un " front populaire de liberté, du travail et du pain ".

Le 14 juillet 1935, 500 000 manifestants défilent de la Bastille au cours de Vincennes, derrière le socialiste Léon Blum, le communiste Maurice Thorez, le radical Edouard Daladier. L'unité est en marche. Un accord de désistement électoral est conclu entre les partis membres du Rassemblement populaire et une plate-forme commune adoptée autour du slogan " le pain- la paix-la liberté ". Le 5 mars 1936, au Congrès de Toulouse, CGT-U et CGT ne font plus qu'un après une scission de 15 ans consécutive à la naissance du Parti communiste en 1920. L'unité syndicale fait passer les effectifs de la CGT de 490 984 en 1934 à 5 millions en 1937. Unité syndicale et unité de la gauche font naître dans le pays un immense espoir.

Le programme du Front populaire définit les mesures indispensables pour garantir les libertés essentielles (liberté d'opinion et d'expression, liberté syndicale, liberté de conscience et laïcité) : dans l'ordre international, il pose les conditions nécessaires à la sauvegarde de la paix ; dans l'ordre économique et financier, il s'attache à lutter, dans l'intérêt des masses laborieuses et épargnantes, contre la crise et contre les organisations fascistes qui l'exploitent pour le compte des puissances d'argent...

Victoire électorale du Front populaire sous un front de grèves historiques !

Avril-mai 1936, l'union a payé, lors des élections législatives, c'est la victoire du Front populaire !. C'est Léon Blum, principal dirigeant socialiste auquel il est fait appel par le Président de la République pour former le gouvernement du Front populaire. Il est constitué le 5 juin. Il est composé de socialistes et de radicaux, les communistes le soutiennent mais n'y participent pas. Petite révolution, pour la première fois dans l'histoire politique de la France trois femmes sont nommées " sous-secrétaire d'Etat " : Irène Joliot-Curie, Cécile Brunschwicg, et Suzanne Lacore. Dès son arrivée au pouvoir, le gouvernement du Front populaire prononce la dissolution des ligues d'extrême droite. Le gouvernement se forme sur un fond de grèves sans précédent qui touchent 12000 entreprises et deux millions de salariés qui veulent des réponses à la crise à partir des revendications ouvrières.

Le 1er mai 1936 des patrons licencient en forme de provocation ici et là des ouvriers grévistes. La riposte à cette provocation est cinglante, les usines d'aviation Bréguet du havre se mettent en grève les premières ; détonateur d'un embrasement qui fin mai prend une ampleur sans précédent Les grèves qui se multiplient avec occupation des lieux surprennent les patrons qui s'affolent, croyant y voir une révolution sociale qui scellerait leur expropriation. Aucune consigne n'a été lancée à l'origine de la grèves par les partis ou les syndicats. La spontanéité du mouvement n'est pas contestable mais elle s'exprime dans un contexte où l'efficacité organisationnelle et idéologique des militants ouvriers n'est pas négligeable. Autant les petites affaires familiales que les grandes entreprises et tous les secteurs d'activité sont concernés. La grève est ressentie comme un cri de délivrance ! Simone Weil, intellectuelle engagée de l'époque témoigne : " Cette grève est en elle-même une joie (...) Enfin, pour la première fois, et pour toujours, il flottera autour de ces lourdes machines d'autres souvenirs que le silence, la contrainte, la soumission. "

Une formidable victoire ouvrière, des " accords Matignon " aux lois sociales...

Les grèves qui se multiplient avec occupation des lieux surprennent les patrons qui s'affolent, croyant y voir une révolution sociale qui scellerait leur expropriation. C'est à leur demande que Léon Blum réunit leurs représentants à l'Hôtel Matignon et ceux de la CGT qui le 7 juin signent les "accords Matignon" : 7 à 15 % d'augmentation des salaires, reconnaissance du droit syndical dans l'entreprise, le principe des conventions collectives est acquis avec délégués du personnel (entreprises de plus de 10 salariés) Mais Léon Blum veut rassurer les acteurs économiques, il parle d'une expérience de gouvernement social dans le cadre capitaliste. La grève se termine lentement sur un goût ambigu. Il faut toute l'autorité du dirigeant communiste Maurice Thorez pour y mettre fin selon la phrase célèbre : " Il faut savoir arrêter une grève " Tout était-il possible ? comme s'interroge alors le dirigeant socialiste dissident Marceau Pivert. On ne le saura jamais. Pour autant, les avancées du Front populaire améliorent la condition des ouvriers qui sortent de cette épreuve comme une classe à laquelle des droits nouveaux sont prioritairement reconnus. Les deux grandes " lois sociales " du gouvernement du Front populaire pour lutter contre le chômage vont dans ce sens : la création des congés payés autrement dit, 15 jours de vacances payées par le patron, et la limitation à 40 heures de la durée hebdomadaire de travail. Avec deux semaines de congés pour tous, les vacances ne sont plus " le privilège de la bourgeoisie ". C'est un véritable bouleversement dans les conditions de vie des travailleurs, qui vont enfin connaître des repos prolongés et la joie des départs en vacances. Il s'ensuit une euphorie qui marque l'été 1936. L'humanisme de ces mesures donne une nouvelle dignité à l'ouvrier qui est ainsi considéré, au-delà de la machine à laquelle l'économie l'enchaîne, comme un homme.

Découverte des loisirs pour tous et autres conquêtes du Front populaire

La loi des quarante heures et les congés payés dégagent du temps aux ouvriers pour les loisirs. Léo Lagrange, sous-secrétaire d'Etat aux Sports et aux Loisirs crée un Billet de congés payés à tarif réduit (-40%) afin de faciliter l'organisation des vacances des familles ouvrières : elles sont 550 000 à l'utiliser pour l'été des premiers congés payés en 1936 et 907 000 en 1937. Il encourage les " Auberges de jeunesse " et les théâtres populaires... La droite y voit une dégradation de la société et désigne Léo Lagrange du surnom de " Ministre de la paresse ".

Sous la responsabilité de Jean Zay, Ministre de l'Education nationale, l'âge de la scolarité obligatoire est porté à quatorze ans. Il jette les bases du CNRS, du Musée de l'Homme, du Festival de Cannes, il encourage des pédagogies nouvelles qui marqueront l'histoire à venir... Plus de 5000 postes d'instituteurs et 225 postes de professeurs sont créés afin de dédoubler les classes dépassant les 35 élèves... Il édite une circulaire en mai 1937 qui vise la propagande confessionnelle, celle-ci rappelle le caractère laïque de l'enseignement public : " aucune forme de prosélytisme ne saurait être admise dans les établissements ".

Sur le plan économique, le statut de la Banque de France change, on y donne le pouvoir de décision aux 40000 actionnaires et à un conseil général de 20 membres, majoritairement nommés par l'Etat, dans l'espoir d'en finir avec la domination des fameuses " 200 familles " les plus riches. Le principe de la nationalisation des industries de guerre est adopté. L'Office national interprofessionnel du blé est créé, destiné à en garantir le prix assurant un meilleur revenu aux paysans. Dans le prolongement des réformes du Front populaire, la SNCF naît de la loi d'août 1937, elle embauche 80 000 cheminots. Léon Blum à la radio le 31 décembre 1936 : " Il est revenu un espoir, un goût du travail, un goût de la vie. La France a une autre mine et un autre air (...) Tout fait sentir qu'en France la condition humaine s'est relevée. "

De tout semble possible à la pause dans les réformes : le Front populaire en échec.

Une première épreuve ébranle l'unité. La guerre d'Espagne éclate en juillet 1936. Mais le gouvernement de Blum, malgré les manifestations massives des militants ouvriers qui demandent " Des canons, des avions pour l'Espagne ! " refusera de l'aider. La jeune République espagnole à défaut d'une aide du gouvernement de la France du Front populaire drainera des milliers de volontaires pour prendre les armes pour elle, les Brigades internationales.

Devant les pressions des milieux financiers qui menacent de fuite des capitaux à l'étranger mettant en péril la monnaie, l'augmentation des prix contre laquelle rien n'est fait qui très rapidement rattrape les augmentations de salaires, Léon Blum proclame " la pause " des réformes sociales en février 1937. Il renonce à la " retraite des vieux ", solennellement promise. Un mois plus tard la police tire sur les ouvriers à Clichy lors d'une manifestation organisée par la gauche qui veut empêcher un rassemblement du parti d'extrême-droite, le Parti social français, faisant 5 morts et 200 blessés. L'embellie du Front populaire fait place au scepticisme et à la colère.

Les communistes sont accusés de préparer des grèves pour affaiblir la France face à la guerre qui menace. Les classes moyennes tournent le dos au Front populaire. Des manifestations hostiles au gouvernement ont lieu en présence de responsables du parti radical. La politique des intérêts partisans reprend la main. En avril 1938 arrive au pouvoir le chef du Parti radical, Edouard Daladier, qui va mettre un terme au Front populaire qui n'aura duré que mille jours. Déjà on entend des voix s'élever pour dire " plutôt Hitler que le Front populaire " et on le verra, malheureusement ! Il reste que l'on retrouvera l'esprit du Front populaire dans le programme du Conseil National de la Résistance qui en reprendra l'essentiel des acquis. Les années de guerre n'auront pas effacé le souffle historique des conquêtes du Front populaire.

L'antiparlementarisme et l'antisémitisme, armes politiques pour la droite et l'extrême-droite

De l'affaire Stavisky que la presse de droite et d'extrême-droite exploite comme une machine de guerre contre le régime au retour de Daladier au pouvoir, toute la période sera marquée par une campagne violemment antisémite et antiparlementaire. C'est dans ce contexte qu'une campagne de presse d'une violence inouïe orchestrée par la droite et l'extrême-droite se déchaîne contre le Front populaire, anti-ouvrière et antisémite, qui attaque les membres israélites du gouvernement. Roger Salengro, le ministre de l'Intérieur, est faussement accusé d'avoir déserté durant la guerre. La calomnie ne cesse d'enfler dans l'espoir odieux qu'elle éclabousse le gouvernement. Le ministre, déjà gravement affecté par le décès récent de son épouse, se suicide le 17 novembre 1936.

Le Front populaire, un bon en avant et des acquis qui enjambent l'histoire !

Il y a un parfum de libération de l'homme à travers le souffle du Front populaire qui a des accents d'universel. Même le gouvernement de Vichy n'osera pas toucher aux congés payés. Un fait historique nouveau s'est constitué à travers ces événements, c'est l'avènement de l'Etat social, c'est-à-dire d'un Etat intervenant directement dans la négociation entre patronat et travailleurs et, particulièrement, en faveur de ces derniers à l'aune d'un rapport de force qui en imposait le sens et la voie. C'était aussi la reconnaissance de la classe ouvrière comme réalité sociale et politique, une nouvelle dignité collective et une conscience nouvelle pour le peuple.

Mis en perspective, les acquis sociaux du Front populaire s'inscrivent dans l'esprit de 1789, Liberté-Egalité-Fraternité. Un mouvement inscrit aussi dans le sens de la conquête d'une République laïque et sociale. Le Front populaire est l'un des grands pas de cette épopée, inachevée...

Le Front populaire a été une exclusivité française selon une tradition de luttes qui a toujours pris des formes originales en raison d'un héritage révolutionnaire très riche et d'une avant-garde trempée dans les luttes. Si cette période reste si ancrée profondément dans la mémoire collective française et même internationale, comme celle qui a fait trembler le capitalisme, c'est surtout comme bon en avant non seulement des conditions de la classe ouvrière mais de la modernisation des rapports sociaux, avec des acquis qui enjambent l'histoire... Le Front populaire a ouvert une brèche de lutte et d'espoir:qui a, toujours et encore, de l'avenir !

Guylain Chevrier Docteur en Histoire

5 - extrême-droite catholique

5.1 - La soupe au cochon met la pagaille chez Villiers

Sale temps pour le Vicomte. Il n'arrivait déjà pas à décoller des sondages, et à exister face au Front national, qui apparaissait capter bien mieux que lui un mécontentement populaire qui se tourne vers l'extrême droite. Une affaire de moeurs familiale (son fils aîné est accusé de viols par un de ses cadets) n'arrange pas ses affaires.

Pourtant, le calcul de Villiers pouvait paraître bon : en ciblant principalement l'islamisme, il pensait se différencier de Le Pen, qui, sur cette question, est favorable au voile à l'école, et ne cache pas sa sympathie pour le régime des ayatollahs, et le président iranien antisémite Ahmadinejad.

Beaucoup plus en pointe sur le TCE que Le Pen, le vicomte espérait capter ainsi la juste inquiétude que suscite la montée de l'islam politique, et se mettait même à parler de laïcité et de République, ce qui, pour tous ceux qui connaissent ses pratiques et ses connivences avec l'extrême droite catholique en Vendée, faisait quand même un peu désordre dans sa bouche.

Il était notamment soutenu par un site très marqué à la droite extrême catholique, France-Echos, spécialisé dans l'attaque tous azimuth contre l'islam, qui naturellement avait fait du vicomte son favori pour la prochaine présidentielle.

Malheureusement, ce site soutient également l'action d'Identitaires qui organisent des " Soupes au cochon ", dans différentes villes de France. On assiste d'ailleurs, autour de ces soupes au cochon, à un curieux pas de deux. Elles sont dorénavant interdites par les autorités, suite à des demandes d'organisations qui y voyaient une instrumentalisation raciste de la misère contre les musulmans.

Si les intentions des " Identitaires ", groupuscule d'extrême droite regroupés autour de l'association SDF (Solidarité des Français) peuvent effectivement paraître louches, ne soyons pas naïfs, il est pour le moins curieux, malgré tout, qu'on interdise des soupes, sous prétexte qu'elles risqueraient de heurter les pratiques obscurantistes de ceux qui se refusent à manger un type d'aliment, quel qu'il soit ! Il y a tout de même un bon nombre de maghrébins qui mangent du porc, sans parler des musulmans qui trouvent des arrangements avec cet interdit alimentaire stupide.

Quand on sait que certaines cantines scolaires, sous demande de municipalités, refusent aujourd'hui de servir du porc aux élèves, et que d'autres enfants refusent de manger à côté de ceux qui mangent cette viande, on ne peut que s'inquiéter pour l'avenir des charcutiers de ce pays, si notre bon cochon est ainsi ostracisé, et de plus en plus interdit au public!

Malgré tout, le numéro deux de Villiers, Guillaume Peltier, issu du Front national, a, lui aussi, condamné les " soupe au cochons ", des Identitaires, lors d'une émission télévisée, " Les Quatre Vérités ". Sur le site " France-Echos ", c'est le drame, tout s'effondre, le vicomte devient l'homme à abattre, celui qui a trahi la croisade contre les Impurs, contre les musulmans !

Villiers, qui était déjà au plus bas dans les sondages, n'avait pas besoin de ce nouvel épisode pour continuer à plonger.

A part cela, et au-delà de toute instrumentalisation de cette question par l'extrême droite, ne laissons pas les islamistes et tous les obscurantistes vouloir imposer à la société leurs interdits alimentaires : cela s'appelle du cléricalisme, et, en général, ce sont les laïques, et pas les fachos, qui sont en première ligne pour s'opposer à cela.

Pierre Caspi

6 - élections présidentielles 2007

6.1 - Les interrogations de la gauche antilibérale

Le rassemblement antilibéral n'a pu choisir son candidat pour les présidentielles. La situation est inextricable, nous sommes dans l'impasse. La règle du double consensus, adoptée par l'ensemble des collectifs unitaires sur proposition du collectif national, le 10 septembre 2006, n'a pas permis de trouver un(e) présidentiable.

Seule Marie-George Buffet à obtenu la majorité au sein des collectifs locaux. Mais face à la demande réitérée de retrait de sa candidature - qui pouvait arguer qu'elle avait fait consensus au sein des collectifs locaux - par le collectif national et par des membres des diverses composantes du rassemblement antilibéral, y compris des personnalités communistes, et face à l'affrontement qui en a découlé, le PCF a décidé de présenter Marie-George Buffet à la présidentielle.

Ce qui a amené, fin décembre 2006, certains collectifs locaux et une partie du collectif national à rechercher un candidat autre que PCF, en lançant divers appels en concertation avec les membres de la LCR unitaire (minoritaires), des membres du PCF qui désapprouvent la position de leur parti ; relayés vers les collectifs locaux qui veulent continuer dans cette démarche unitaire antilibérale. Précisons que dans les mails qui circulent sur le Net, on évoque toujours les mêmes candidatures : celles de Clémentine Autain, d'Yves Salesse, de Claude Debons et même le retour de José Bové !

Soyons clairs : le PCF et la LCR ont fait leur choix. Peuvent-ils revenir dessus ? Choisir un candidat à la présidentielle n'est pas une nécessité absolue. Et, les personnalités qui ont pris des positions pour ou contre, sont trop marquées et ne peuvent plus faire consensus : Clémentine Autain, Patrick Braouezec, et à un degré moindre Yves Salesse et Claude Debons. La candidature de José Bové ne se pose même pas : absent de la plupart des réunions et meetings nationaux, des luttes politiques (des délocalisés aux sans-abri), et premier diviseur commun...

Le collectif de Rueil-Malmaison Garches Saint-Cloud a fait une proposition originale pour trouver une solution. Il semble que celle-ci arrive malheureusement trop tard si on en juge par le peu d'écho qu'elle a reçu :

" PROPOSITION DU COLLECTIF DE RUEIL GARCHES SAINT CLOUD (Approuvée par 14 voix sur 19 participants, 4 abstentions et 1 voix contre)

PRINCIPE

Ne pas désigner un(e) candidat(e) à la présidentielle, mais un triumvirat, voire un quatuor (au plus) composé, très clairement, d'un présidentiable - Marie-George Buffet -, d'un futur Premier ministre (Salesse ?), d'un ministre de l'économie (de l'économie durable ?) et, symbole fort, d'un ministre de la solidarité (Autain ?). Un " shadow cabinet ", comme en compose l'opposition en Angleterre, un ticket sur plusieurs personnalités comme on en présentait souvent aux débuts de la Ve République, avant qu'elle ne prenne un tour monarchique.

AVANTAGES

Il faut pourtant que nous sortions de la crise, qui a commencé avec l'annonce de la candidature d'Olivier Besancenot, le départ de José Bové (qui a des velléités de retour), et s'est poursuivie avec les attaques contre Marie-George Buffet et le PCF, le double jeu de Francine Bavay " cooptée " par les Verts, le grand écart de Jean-Luc Mélenchon entre le PS et le rassemblement antilibéral, et, maintenant le retrait du PRS et d'Alter-Ekolo pour rejoindre qui ? L'image donnée par le rassemblement libéral est ternie par cette crise, tout comme celle de la gauche tout entière, où les grandes manoeuvres ont commencé, avec un PS qui bat le rappel côté antilibéral, mais qui perd quelques éléments de poids (Bernard Kouchner et Bernard Tapie) qui ont proposé leurs services à la droite - cela s'appelle " aller à la soupe " - et à Nicolas Sarkozy !!!

Si nous continuons dans cette voie de la critique systématique et partisane, de la division dictée par des ambitions personnelles, c'est la dissolution du rassemblement qui se profile à l'horizon. Et, ne nous étonnons pas que nos concitoyens finissent par s'abstenir ou par voter nul ou blanc en considérant que tous les candidats et les partis sont : " tous pourris, et qu'il n'y en pas un pour rattraper l'autre... ".

Peu importe les raisons invoquées par les uns et les autres pour justifier leurs positions, et de savoir qui a raison et qui a tort. Nous pourrions en débattre pendant des semaines et des mois, comme cela se passe malheureusement dans les collectifs depuis septembre 2006. Nous avons perdu assez de temps en stratégies, règlements de compte et en tergiversations, alors que des millions d'hommes et de femmes attendent que nous nous entendions, car ils n'ont plus aucun espoir et ne croient plus ni en la droite, ni en la gauche socialiste, ni dans l'union de la gauche qui a fait une politique de droite lorsqu'elle était au gouvernement. Ils attendent une autre voie à gauche, une gauche de transformation sociale, une alternative au libéralisme qui a détruit le travail et a précarisé la moitié de l'humanité.

Si nous avions été au bout de nos idées, avec l'affirmation d'une VIème république sans chef d'Etat, nous ne serions pas là à polémiquer et à nous déchirer. Nous irions à l'essentiel : l'élection des représentants du peuple, qui aurait du être notre unique objectif et notre priorité. Nous n'avons pas perdu la guerre contre le libéralisme, juste une bataille.

Mais, à condition de répondre à ces deux questions : qu'allons-nous faire aujourd'hui pour ne pas briser cette dynamique antilibérale qui a suscité tant d'engouement et d'espoir au sein de la gauche antilibérale et parmi les couches populaires, les exclus et tous ceux qui souffrent ? Comment allons-nous nous y prendre, par exemple, pour loger ces centaines de milliers de sans-logis qui vivent le long du Canal Saint-Martin, sur la place Bellecour à Lyon, sous les ponts, dans des taudis et des squats, partout en France ?

Faisons l'impasse sur les présidentielles si nous n'arrivons pas à nous entendre, plutôt que de nous écharper et de détruire l'ESPOIR... Les communistes (et des sympathisants) voteront pour la candidate du PCF, respectons leur choix. Les majoritaires de la LCR voteront pour Olivier Besancenot. Arlette Laguiller rassemblera sa clientèle habituelle. Chaque membre des collectifs antilibéraux sera libre de se déterminer en son âme et conscience, et nous ferons les comptes après.

Sommes-nous encore capables de nous rassembler tous ensemble - sous l'étiquette du rassemblement unitaire et antilibéral uniquement - en faisant une place à chacun : partis, mouvements, organisations, sympathisants, non-encartés... sans exclusive, sans calcul et sans privilège, pour enfin commencer la campagne, celle des législatives, pour enchaîner ensuite avec les municipales, les cantonales et les européennes ? Sommes-nous assez matures et lucides pour nous rendre compte que la division c'est la perte de crédibilité du rassemblement, et sa disparition sur la scène politique et sociale pour plusieurs années ou décennies. C'est aussi le sacrifice de la planète sur l'autel du marché, et la mort de millions d'innocents, victimes d'une pandémie nommée libéralisme...

André Locussol Coordinateur Collectif Rueil Garches St Cloud

7 - Liberté d'expression

7.1 - Les dessous de l'affaire NICHANE

Suite à un dossier consacré aux "noukates" (blagues), l'hebdomadaire arabophone Nichane a été interdit cette semaine. Si le numéro en question n'avait fait l'objet d'aucune saisie lors de sa parution, la récente décision d'interdiction de la publication, émanant du Premier ministre Driss Jettou, suscite de nombreuses réactions. Retour sur un engrenage aussi rapide qu'inattendu.

Pour la presse marocaine, 2006 s'achève sur une bien triste note. Moins de quatre mois après son lancement, l'hebdomadaire arabophone Nichane s'est vu frappé d'interdiction. En cause, un dossier publié dans le n° 91 du 9 au 15 décembre intitulé "Blagues, comment les Marocains rient de la religion, du sexe et de la politique", a froissé les susceptibilités, notamment religieuses de certains. Les excuses formulées par la rédaction de Nichane ne suffiront pas à calmer le courroux des nombreux mécontents qui demandent l'interdiction du magazine, alors que les appels à la haine et à la violence physique contre les journalistes de Nichane fleurissent sur les forums des sites islamistes. Une audience est fixée au 8 janvier pour statuer sur le sort du directeur de publication Driss Ksikes et de la journaliste Sanaa Al Aji, tous les deux poursuivis pour "atteinte à la religion islamique" et "publication et distribution d'écrits contraires à la morale et aux bonnes moeurs".

Devançant la décision de justice, le Premier ministre Driss Jettou a annoncé ce mercredi 21 décembre l'interdiction "d'exposer sur la voie publique et de diffuser" l'hebdomadaire. Le chef de l'Exécutif justifie sa décision par les dispositions de l'article 66 du Code de la presse. L'article en question stipule que "le Premier ministre et les autorités administratives locales, dans les limites de leur compétence territoriale, peuvent interdire par arrêté motivé, l'exposition sur les voies publiques et dans tous les lieux ouverts au public, ainsi que la diffusion par quelque moyen que ce soit sur la voie publique, de toute publication contraire à la moralité publique ou nuisible à la jeunesse".

Cette décision se base également, selon Driss Jettou, sur "les dispositions constitutionnelles consacrant l'islam comme religion d'Etat et le rôle du roi, en sa qualité de Commandeur des croyants et Protecteur de la foi et de la religion" et prend en considération "l'atteinte aux sentiments du peuple". Une décision qui, curieusement, est intervenue douze jours après la publication du numéro objet de cette monumentale controverse. Quelles sont donc les véritables raisons qui ont poussé le gouvernement à prendre cette décision ? Et qui est véritablement derrière cette campagne contre Nichane?

Les raisons de la colère

"Notre démarche journalistique par rapport à ce dossier reposait sur une approche anthropologique". C'est ainsi que Driss Ksikes, directeur de publication de l'hebdomadaire arabophone qualifie l'article consacré aux blagues au Maroc. Ce dernier avoue qu'à l'heure de la conception du dossier, il ne s'attendait absolument pas à ce retour de bâton. "Nous sommes dans une phase où nous essayons de comprendre qui nous sommes, explique-t-il. En tâchant de comprendre le discours oral du peuple, nous faisons oeuvre utile pour mieux comprendre notre société". Dédramatisant, il souligne que ce ne sont que des blagues, triées qui plus est. Regrettant l'absurdité de la situation, Driss Ksikes rappelle qu'à travers ce dossier, la rédaction "n'a même pas cherché à exprimer une opinion, qui aurait pu être outrancière. On ne fait que refléter, insiste-t-il. Nous interdire est un déni du droit d'informer".

Le site islamiste khorafa.org est le premier à ouvrir le feu sur Nichane, le 16 décembre dernier. Khorafa est un site créé, il y a de cela une année, par des ex-membres d'Al Adl Wal Ihssane pour combattre la jamaâ et les visions de son cheikh. "Nous avons été les premiers à condamner ce crime horrible contre Allah, le prophète Mohammed et ses compagnons. Nous avons également invité les internautes à exprimer leurs opinions à travers un forum", raconte le modérateur du site Abdelfattah Rahmoune. Des centaines de réactions, marocaines et étrangères, vont alors envahir le site. Les plus virulentes, incitant notamment à la violence et au meurtre, vont être systématiquement écartées par Abdelfattah. Pourtant, six jours après le lancement de la page consacrée à Nichane, on pouvait y trouver les messages suivants : "celui qui se moque de la religion d'Allah est sans doute KAFIR (pécheur), et il faut lui arracher la tête", "mes frères, nous n'acceptons pas leurs excuses et ceux qui reviennent sur leur foi ne méritent qu'une chose, la mort". D'autres y insultent les journalistes de Nichane et de Tel Quel, les traitant de mécréants, d'athées, d'homosexuels et d'alcooliques. Tous ont appelé à la condamnation et à l'interdiction du support, demandant aux autorités compétentes de prendre leurs responsabilités. Ces appels du site marocain vont être relayés par d'autres provenant de la péninsule arabique. En effet, le mardi 19 décembre, des parlementaires koweïtiens, représentés par le parlementaire Ahmed Achahoumi, adressent à l'ambassadeur du Maroc au Koweït un communiqué de protestation émanant de l'instance législative de l'Emirat, pointant du doigt le dossier de Nichane. Le site Islamway.com publie les noms des journalistes et leurs courriels et adresse une lettre au roi du Maroc, l'appelant à appliquer les préceptes de la chariaâ sur les journalistes de Nichane pour éviter la "fitna".

Au Maroc, c'est à Kenitra que des manifestations contre la revue ont éclaté le lundi 18 décembre. Il s'agirait d'étudiants encadrés par des islamistes qui manifestent leur colère contre "Nichane". Le lendemain, Rachid Niny, directeur de publication du quotidien "Al Massae" et chroniqueur vedette de la presse arabophone, mettra lui aussi son grain de sel. Dans sa colonne "Chouf tchouf" qu'il intitulera "Dahk lbassel" (L'humour lourd), Niny va appeler l'exécutif et le conseil des ouléma à "prendre leurs responsabilités". Le même jour, le directeur de publication de Nichane est convoqué par la police judiciaire. La direction de l'hebdomadaire contacte alors un responsable de l'exécutif pour l'aviser de l'intention de présenter dès le numéro suivant des excuses "à ceux qui se sont sentis offensés". Le lendemain, Driss Ksikes et Sanaa Al Aji sont encore une fois convoqués par la P.J. Et c'est My Tayeb Cherkaoui, directeur des affaires pénales et des grâces au sein du ministère de la justice, qui assurera les responsables de la revue que les poursuites par le parquet sont plutôt incertaines. Pourtant, le directeur de Nichane et la journaliste auteur du dossier vont être notifiés de l'acte d'accusation, d'"atteinte aux valeurs sacrées". Dans la même après-midi, le Premier ministre signe la mise à mort de l'hebdomadaire arabophone. Nichane publiera dans la soirée un communiqué où la rédaction précise : "que certains aient été heurtés suite à leur publication, nous en prenons acte, et leur présentons volontiers nos excuses. Notre intention n'était pas de heurter quiconque et évidemment pas d'attaquer l'islam, étant nous-mêmes musulmans".

Réactions en chaîne

ImageDes excuses qui ne sont certainement pas du goût de tout le monde. Mohamed Yatim, député du PJD et secrétaire général de l'Union nationale marocaine du travail (UNMT) pense que "les excuses des responsables de Nichane ne sont pas sincères et ressemblent de près à celles qui sont présentées par le pape. En s'attaquant aux symboles de toute une nation, ils se sont mis tout le monde à dos". Même le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM), qui a rendu public un communiqué le lendemain de l'interdiction, n'est pas tout à fait solidaire avec Nichane. "Nous sommes contre l'interdiction, explique Younes Moujahid, secrétaire général du SNPM. C'est une position de principe. Mais, la liberté d'expression ne nous autorise pas à mépriser les croyances religieuses, quelle que soit la religion. Il faut noter que les excuses faites par la revue montrent toutefois que les journalistes étaient de bonne foi". Le Conseil supérieur des ouléma et la Rabita mohammadia des ouléma vont appuyer la décision d'interdiction et insiste sur la condamnation de Nichane.

Reporters Sans Frontières est la première entité à condamner la décision du gouvernement. "En prenant cette double initiative, les autorités marocaines rappellent, à qui l'aurait oublié, que l'arsenal juridique et administratif est toujours là qui limite la liberté d'expression des journalistes marocains", lit-on dans le communiqué de RSF. Demandant solennellement aux autorités de revenir sur leurs décisions, RSF dénonce "ces mesures qui relèvent du calcul électoral à la veille d'échéances qui pourraient être marquées par une forte poussée du mouvement islamiste". La revue trouve également des supporters du côté de la société civile. "Je suis totalement solidaire avec le magazine Nichane. Je suis contre l'interdiction et les poursuites du journal. Ce ne sont que des blagues que les gens se racontent et qui ont été uniquement rapportées par Nichane. Il faudrait que la société civile et la presse manifestent leur solidarité", s'indigne Nourredine Ayouche, président de l'association Daba 2007. Abdellah Zaâzaâ, militant associatif, est clair là-dessus : "Le sacré n'existe pas pour une société. C'est une affaire personnelle. On doit accepter que notre sacré soit désacralisé par les autres".

À la tête de la Fédération des éditeurs de presse, Abdelmounaïm Dilami appelle avant tout à la mesure. "Il faut calmer les choses, pour qu'il n'y ait pas d'autres excités qui s'en prennent à eux", estime Dilami. "Ce qui a aggravé les choses, analyse-t-il, c'est que l'affaire a pris une dimension à l'échelle du monde musulman. Ce n'est qu'une fois ces pressions internationales subies que le gouvernement s'est senti obligé de prendre une décision". Le mot est lancé. Ce sont les multiples revendications, dépassant parfois nos frontières, qui auraient accéléré l'implication du gouvernement. Une décision qui semble motivée par la volonté de maîtriser la situation. "Est-ce pour calmer le jeu ? s'interroge Driss Ksikes, Je veux bien le croire. Mais, la manière dont tout ceci a été orchestré montre un acharnement contre nous". L'article 66 invoqué par le Premier ministre est aussi remis en cause. "L'exécutif a outrepassé ses droits. L'article 66 accorde le droit au Premier ministre de saisir l'exemplaire en question, il ne l'autorise pas à interdire le magazine a posteriori", explique M. Moujahid.

L'interdiction n'aura pourtant pas réussi à calmer les esprits. Les coups de téléphone et les lettres électroniques de menaces sont toujours de mise à l'encontre des journalistes de Nichane, mais aussi ceux de Tel Quel, journal du même groupe. Situés dans les mêmes locaux, les deux hebdomadaires ont pris le soin de renforcer la sécurité. Nichane a rendez-vous avec la justice le 8 janvier prochain.

Lejournal-hebdo.com

Source : www.lejournal-hebdo.com/

8 - à lire

8.1 - DIEU EST MORT, MAIS IL TUE ENCORE

Les religions meurtrières, Elie Barnavi.

Café voltaire Flammarion. 2006

L'Occident rationaliste a prédit la disparition des religions, mais elles résistent, alors que toutes les grandes utopies laïques ont mordu la poussière. La religion s'est mondialisée, et les laïcs sont minoritaires. Au travail missionnaire à l'ancienne se sont ajoutés les moyens de communication de masse moderne. Il y eut les " fous de Dieu " de la Sainte Ligue catholique, leur défaite mis fin aux guerres de religions dans la France des Valois. Aujourd'hui c'est le Hezbollah chiite née dans la foulée de l'invasion israélienne au Liban qui lui ressemble le plus (Hezbollah, en arabe, veut dire littéralement " Parti de Dieu ").

Toute religion est politique, et affaire de pouvoir. Toute religion légitime des hiérarchies, celle entre hommes et femmes est primordiale et universelle.

Toutes les religions du Livre ont des tentations fondamentalistes. Pour qu'elles deviennent dangereuses il faut que le fondamentalisme cherche à s'emparer du politique. C'est ce fondamentalisme révolutionnaire (plutôt que l'intégrisme) qui séme la mort aux quatre coins du monde depuis les années 80.

Machiavel a le premier théorisé l'autonomie du politique. Nous sommes responsable de notre sort ici bas, et suivons les règles que nous dicte notre seule raison. L'Etat moderne est par défintion " laïque ". Le divorce de l'Eglise et de l'Etat est, partout en Occident, une réalité forte et indépassable. Il a été possible grâce a la dualité dans le christianisme du pouvoir spirituel et du temporel. Et l'Etat a modelé l'Eglise a son image. Ces deux royaumes séparés ont été la chance extraordinaire de l'Occident - La Pologne est une exception que le temps et l'Europe feront rentrer dans le rang.

La perte du fondamentalisme révolutionnaire juif a été l'Etat, qui a montré sa force pour n'avoir pas à s'en servir dans le " désengagement " de la bande de Gaza. Le fondamentalisme révolutionnaire juif est une religion sans projet universaliste. Mais surtout la société israëlienne est dans la dynamique d'une ouverture moderne. Il faut avoir le marxisme-léninisme chevillé pour croire encore que la religion n'est qu'une " superstructure " qui masque les véritables enjeux socio-économiques de " l'infrastructure. Figé dés le Moyen-Age l'islam c'est l'irrémédiable confusion du spirituel et du temporel. L'Etat en terre d'islam est despotique, mais jamais pleinement souverain.

Cependant l'islam n'est pas incompatible avec la raison. En témoigne la civilisation de l'islam classique. Malheureusemt le dogme vaincra l'élan rationaliste. Dés le IXeme siècle c'est le déclin, définitif au XIVeme. L'Occident est tenu pour barbare. Certains ont essayé la modernisation par le haut, mais elle a échouée, même en Turquie, la laïcité ne peut se passer des baïonnettes

Qotb le Lénine musulman et ses amis n'ont pas attendu Huntington pour proclamer, à leur manière, le " choc des civilisations ".

Désormais une mutation terroriste depuis une vingtaine d'année s'est dilattée aux dimensions de la planête avec la génèration al-Qaida.

Des musulmans européens, nés et éduqués en Europe sont islamisés sur place. Ils sont l'avatar musulman des terroristes de la bande à Baader-Meinhof, des Brigades rouges italiennes, de l'Armée rouge japonaise, de l'Action directe française. Ils ont la même haine de la modernité, de l'Amérique impériale, le même dédain idéologique de la compléxité humaine, la détestation de la démocratie libérale, et le même mépris de la vie humaine au nom du bonheur de l'Humanité.

Pour vaincre il faudra défendre la laïcité, et réapprendre la guerre. Un " nouveau sacre " s'il devait advenir, n'adviendra pas par décret, ni surtout par la violence terroriste conclue avec un volontaire espoir Elie Barnavi, qui compte aussi sur la réconciliation de l'Europe et de l'Amérique avec laquelle nous partageons l'essentiel : La Liberté.

Catherine Deudon

8.2 - LAIQUES ET CLERICAUX FACE A FACE

"L'école, la religion et la politique de Condorcet à Ferry"

de Lydie Garreau

chez L'Harmattan

268 pages, novembre 2006, 24 euros

Le combat fut rude entre les cléricaux et les républicain en ce 19ème siècle, plus rude encore que certains peuvent le penser.. .L'Eglise voulait tout : la "liberté de l'enseignement" c'est à dire la possibilité d'ouvrir des écoles privées et celle qui viseà contrôler le contenu de l'enseignement public. La loi Guizot institue en 1833 l'instruction primaire élémentaire qui comprend nécessairement "l'instruction morale et religieuse", les curé étant chargé du contrôle de l'enseignement ...

Alors que Thiers s'opposait au début à la "liberté" totale de l'enseignement, il devient l'un des fervents défenseurs de cette possibilité offerte aux congrégations d'ouvrir des écoles privées financées en partie par des fonds publics... Il s'explique dans sa déclaration du 29 juin 1849: "...Quant à l'université, j'ai été son défenseur... mais la Révolution de février m'a ouvert les yeux, j'ai vu que l'université est infectée de socialisme. Elle l'est surtout parmi les instituteurs primaires qui sont maintenant le plus terrible fléau de nos pays. Il faut à leur égard des remèdes prompts et énergiques..." La messe est dite et Thiers continue une carrière ultra réactionnaire qui le conduira à devenir le grand massacreur de la Commune.

La loi Falloux va permettre en 1850 à l'Eglise de disposer de tous les leviers :

Les républicains, laïques convaincus vont avec opiniatreté combattre les monarchistes, Victor Hugo à l'Assemblée nationale le 15 janvier 1850 s'en prend au parti clérical : "Vous êtes les parasites de l'Eglise, vous êtes la maladie de l'Eglise. Ignace est l'ennemi de Jésus. Vous êtes, non les croyants, mais les sectaires d'une religion que vous ne comprenez pas. Vous êtes les metteurs en scène de la sainteté. Ne mêlez pas l'Eglise à vos affaires, à vos combinaisons, à vos stratégiés, à vos doctrines, à vos ambitions..." Anti religieux Victor Hugo ? Que non... C'est l'anti-cléricalisme qui s'exprime et rien d'autre...

Voici là l'une des pages du combat séculaire.

Les laïques auront leurs revanche quand la République sera étabie et consolidée. Au début très peu de républicains étaient pour la séparation des églises et de l'Etat... Pour certains il valait mieux contrôler l'Eglise que lui couper les vivres.

Le passage de la domination de l'église à celle de l'émancipation par l'école sera difficile mais l'intransigeance des cléricaux et la position anti républicaine du pape Léon XIII condamnant avec plus que de la vigueur les lois scolaires de 1881 à 1882 finiront par élargir le camp de ceux qui se prononceront enfin pour une loi de séparation.

L'intérêt de ce livre c'est de nous apporter en plus d'éléments d'analyse, des références et de larges extraits présentés et commentés de discours établis par les uns et les autres. On peut y découvrir des premier déblayeurs, laïques, peu connus comme Volney qui sut s'opposer courageusement à la politique religieuse de Napoléon Bonaparte...

Ce débat d'hier est aujourd'hui d'une actualité brûlante..L'antagonisme entre l'Etat et les Eglises se poursuit... Les cléricaux ne veulent ils pas remettre en cause la liberté de penser, de critiquer la religion (le droit au blaspème étant remis en cause)!?

Aujourd'hui, les églises ne désarment pas, elles veulent que l'Etat révise la loi de séparation... Les laïques sauront-ils relever le défi et poursuivre l'oeuvre de leurs devanciers?

Jean-François Chalot

9 - courrier des lecteurs

9.1 - Hommage suite au décès de Pierre Montagnon

Le Président de la section de Paris de l'Union Rationaliste vient de me faire part du décès, le 20 décembre dernier, de notre (mon) ami Pierre Montagnon. Cette nouvelle me remplit d'une profonde tristesse. Pierre était depuis longtemps membre de l'Union Rationaliste au sein de laquelle il était un des militants parmi les plus infatigables de la laïcité institutionnelle et scolaire. Il comptait également parmi les soutiens les plus constants de Marie Humbert dans son combat, et n'a jamais cessé de poursuivre de sa plume précise et élégante les détracteurs du droit à mourir dans la dignité. Il ne craignait pas plus les combats difficiles comme ceux consistant à rétablir une image de la république irakienne plus conforme à l'expérience qu'il en avait eue plutôt qu'à la caricature qui continue d'en être tracée, ou d'affronter les fondamentalistes antinucléaires, dernièrement encore lors du énième lynchage médiatique du Professeur Pellerin. Il fut aussi l'un des premiers à demander à figurer sur la liste publique du réseau francophone des brights lancée il y a deux ans aujourd'hui (http://brightsfrance.free.fr/membres.htm ).

Pierre Montagnon, cadre dirigeant en retraite, ne pouvait plus guère se déplacer. La sclérose latérale amyotrophique (SLA ou " maladie de Charcot ") qui l'affectait sur le plan physique et le condamnait ainsi au " militantisme électronique " n'a pourtant jamais entamé sa fougue. Celle-ci s'exprimait à travers les très nombreux courriers qu'il adressait notamment au journal Le Monde ou à Jean Glavany, " monsieur laïcité " d'un parti socialiste dont il n'arrivait pas à se " résoudre " à ce qu'il appelait " la trahison " et qu'il avait de nouveau rejoint l'an dernier car il lui était " apparu souhaitable d'essayer de faire opposition à la candidature de Bertrand Delanoë, de Jack Lang ou de Ségolène Royal ".

Pierre était aussi un fidèle lecteur de la lettre électronique ResPublica avec l'équipe de laquelle il aimait correspondre. Ce fut le cadre de nos derniers échanges alors que nous étions, exception qui confirme la règle, pour une fois en désaccord. Le dernier message électronique que je reçus de lui était daté du 19 décembre 2006. Rien ne laissait présager une issue aussi brutale.

Pierre était attaché à la libre discussion, sans complaisance mais toujours amicale. Je me permets donc pour de terminer ce message par la reproduction des derniers échanges (non publiés) que nous avons eu sur cette question qui nous séparait, ainsi que de quelques unes de ses protestations récentes[1].

Notes

[1] Cette discussion est disponible sur le site internet de Brights France. Elle avait donné lieu à une publication dans notre journal: "Préserver la sphère publique des religions", Par Pierre Montagnon, dans le numéro 490 de Respublica (http://www.gaucherepublicaine.org/?page=article&idArticle=601). La rédaction se joint à Michel Naud pour rendre hommage à Pierre Montagnon

Michel Naud Initiateur du réseau brightsfrance.free.fr/

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