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La Grèce, le SDF de l’Europe

par Évariste
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Les politiques font jouer aujourd’hui à la Grèce un rôle analogue à celui qu’endosse le SDF depuis la fin des années 80, époque à laquelle ce dernier entre avec fracas sur la scène médiatique.

Un français sur deux a peur de devenir SDF. Si le clochard était une figure de l’altérité, le SDF est une figure à laquelle on s’identifie. Comme nous, il est né dans une famille. Comme nous, il avait un emploi. Comme nous, il avait un domicile.  Mais, comme le disait si bien Laurence Parisot, la vie est précaire. Tout peut basculer d’un instant à l’autre. Et tout un chacun peut se retrouver sans emploi, à la rue, et perdre jusqu’au filet de sécurité que représente la famille. La droite néo-libérale n’a eu de cesse d’alimenter cette peur en signifiant à chacun : « le SDF, ce pourrait être vous ». La peur est une passion utile, dont les puissants ont toujours su jouer. Le SDF est une figure commode que les puissants d’aujourd’hui agitent comme un épouvantail pour inciter chacun à se régler sur le moins-disant. « Estimez-vous heureux d’avoir un emploi — fût-il mal rémunéré —, d’avoir un logement — fût-il indigne —, d’avoir une famille charitable qui peut vous secourir en cas de besoin. Contentez-vous de ce que vous avez. Vos conditions de vie pourraient être bien pires. » Et voilà comment la peur, passion paralysante qui empêche de penser et qui diminue notre puissance d’agir, vient en lieu et place de cette autre passion, active et féconde, qu’est l’indignation. Dans un contexte où les inégalités se creusent, où les plus riches n’ont jamais été aussi riches, où le PNB n’a jamais été aussi élevé, il faudrait s’indigner de ce que des citoyens puissent se retrouver sans aucun droit, sans aucune perspective, acculés à la nécessité de survivre. RSA, RMI, minima sociaux : dans un contexte où le capital se gave, on devrait s’étonner que l’on préfère payer une misère une force de travail que personne n’emploie, plutôt que de donner à chacun un travail décemment rémunéré.

La situation de la Grèce est apocalyptique : le taux de suicide a doublé depuis le début de la crise. Chaque jour, un service public est privatisé. Le dernier plan d’austérité prévoit, entre autres saignées, une réduction de 20 % des retraites supérieures à 1200 euros, la mise en réserve de 30 000 fonctionnaires, l’abaissement du seuil d’imposition de 8000 à 5000 euros de revenus annuels. La Grèce est devenue le SDF de l’Europe. Le message est clair : « Regardez ce qui va vous arrivez si vous ne consentez pas aux règles de bonne gestion ». Le spectacle de la Grèce est supposé produire le même effet de sidération que celui du SDF. Le peuple français est sommé de tirer la seule conclusion qui s’impose : il devra renoncer à son modèle social.

Ne pas céder à la peur, ne pas se laisser impressionner, c’est aussi récuser l’imprégnation idéologique de nos élites par le discours anglo-saxon de culpabilisation des pays européens : l’euro, les dettes et déficits, la faiblesse des banques… c’est l’hôpital qui se moque de la charité‍ !

S’opposer à cette logique de l’imperium mondial est seule façon, pour le peuple français d’être à la hauteur du peuple grec qui a exprimé, hier encore, son indignation, en bloquant l’accès aux principaux ministères.

 

Sénat
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Pourquoi la gauche est-elle devenue majoritaire au Sénat ? Que faire de cette majorité  ?

par Bernard Teper

 

La victoire de la gauche au Sénat est la conséquence des mutations sociologiques et politiques profondes qui travaillent la France. Elles sont les véritables causes du fait que la gauche est pour la première fois et sera sans doute pour longtemps majoritaire au Sénat.

La droite a pourtant tout fait pour façonner les institutions de manière à construire un Sénat qui ne pouvait pas lui échapper. En effet, le Sénat n’est pas représentatif des citoyens français, mais de ses territoires. Et traditionnellement, la majorité du Sénat était donnée par les zones rurales qui représentent 70 % du territoire et deux tiers des communes. Dans ces zones, la droite catholique et conservatrice régnait en maître et donc le tour était joué. De plus, la gauche de gouvernement, chaque fois qu’elle a accédée au pouvoir n’a pas remis en cause la domination de la droite : la gauche communautariste et ordo-libérale et l’extrême gauche communautariste ont préféré organiser des compromis bien connus avec la droite catholique et conservatrice. Ce n’est donc pas la gauche ou l’extrême gauche consciente et mobilisée qui sont la cause de cette majorité du Sénat. Alors, quelles en sont les causes ?

D’abord les mutations sociologiques…

Christophe Guilluy, géographe social, dans son Atlas permet d’en connaître une des causes profondes. Alors que l’imaginaire du vieux monde reposait sur l’idée que les classes populaires (ouvriers, employés) étaient situées dans les villes-centres et dans une partie des banlieues, que les classes moyennes vivaient pour beaucoup d’entre elles dans une partie des villes-centres et dans une partie de la banlieue, les zones rurales étant peuplées pour beaucoup de paysans sous emprise de la droite catholique et conservatrice, le nouveau monde qui pointe son nez devant nous appelle à un changement d’imaginaire.

Aujourd’hui, les classes populaires ont été chassées des villes-centre. Elles sont même en léger recul dans les banlieues. Ce sont les classes moyennes qui les ont remplacées. Par contre les classes populaires sont aujourd’hui largement majoritaires dans les zones périurbaines et sont 5 fois plus nombreuses que les paysans en zones rurales. Il est donc aisé de comprendre que les territoires seront de plus en plus tenus par des élus sous la pression des classes populaires.

Puis les mutations politiques conséquentes…

Comme la droite a toujours mené la lutte des classes, elle a, contrairement à la gauche, tenu compte de cette mutation sociologique. Pourquoi développer l’école en zone rurale quand ce sont de moins en moins des électeurs de droite. Fermons donc les écoles rurales (plus de 1500 ont été fermées en 2011) et périurbaines. Fermons les hôpitaux et maternités de proximité pour la même raison (et érigeons les ARS de la loi Bachelot pour faire ce sale travail au nom de la « rationalité »). Supprimons les services publics (poste, gares SNCF, lignes SNCF, etc.) en zones rurales.

Pour éviter que la gauche prenne le contrôle des territoires, il faut une réforme territoriale pour diminuer le nombre de collectivités. Et surtout, il faut supprimer la « clause de compétence générale » des collectivités locales que l’on aura de plus en plus difficilement le loisir d’administrer. Or cette clause permet à une collectivité territoriale de s’autosaisir sur tout sujet intéressant les citoyens et leurs familles. Sans cette clause, une collectivité territoriale n’aura le droit de s’occuper que des domaines décidés par le pouvoir politique national voir européen. Sur ce dossier, quelle cécité de la gauche qui a oeuvré quand elle était au pouvoir dans le même sens que la droite en soutenant l’intercommunalité sans suffrage universel direct afin de donner un pouvoir grandissant à une nomenklatura politicienne qui se « coopte » dans les intercommunalités !

Et pour finir, il fallait organiser l’assèchement des moyens financiers des communes : la suppression de la taxe professionnelle a été remplacée par la taxe économique territoriale, assise sur le foncier et sur la valeur ajoutée des entreprises, ce qui, malgré une compensation de l’État, a diminué beaucoup de moyens aux collectivités. Les villes moyennes souvent en zones périurbaines parlent d’un « manque à gagner sur 155 territoires à l’horizon 2015 serait évalué à 160 millions d’euros, soit une perte de dynamisme des ressources de 0,7 % par an ».

Pourquoi la droite a été prise à son propre piège ?

Elle pensait avoir le temps de faire l’ensemble de ces contre-réformes avec le soutien de la gauche ordolibérale et l’inconséquence d’une partie de l’extrême gauche. Malheureusement pour elle, la crise de productivité du capital et donc la crise de profitabilité du capitalisme ont accéléré les mutations. Le capitalisme, sous l’influence de l’ordolibéralisme, a tenté de résoudre ce point en accentuant l’autonomie de la sphère financière, le développement de la concurrence libre et… faussée et même aujourd’hui la « patate chaude » de la dette publique souveraine. En fait, ce sont les contradictions du capitalisme qui accélèrent le mouvement de l’histoire, prennent à contre-pied la droite française et offrent, entre autres, à la gauche de gouvernement la majorité du Sénat. La crise arrive avant que la droite ait pu mener à bien ses contre-réformes régressives. Voilà pourquoi la droite a été prise à son propre piège !

Est-ce que la vraie gauche doit s’en réjouir ?

Bien sûr, car tout ce qui précipite le mouvement historique est susceptible d’ouvrir de nouvelles marges de manoeuvre pour une gauche d’alternative. Nous pourrons mettre la gauche de gouvernement au pied du mur. Maintenant qu’ils ont la majorité au Sénat, forçons-les à ne plus accepter les compromis ordolibéraux qui ont désespéré les classes populaires. Et faisons ensemble que la gauche d’alternative soit capable de comprendre le pourquoi des choses, ce qui n’est pas totalement gagné ! Voilà pourquoi une campagne d’éducation populaire tournée vers l’action sur l’analyse de la triple crise du capitalisme et sur l’alternative du modèle laïque de la République sociale est nécessaire.

Voilà pourquoi nous devons saisir toutes les possibilités du mouvement social et politique pour intervenir sur les sujets de conflits sociaux et politiques : la protection sociale, les retraites, la santé, la dépendance-autonomie, les médicaments, l’hôpital, l’école, les services publics, l’Europe, les politiques d’immigration et de la nationalité, l’analyse du monde et de la gouvernance mondiale, la crise énergétique et écologique, la crise démocratique, la crise laïque, etc.

Que ceux qui veulent oeuvrer dans cette direction contactent votre journal électronique favori ReSPUBLICA. Nous les mettrons en contact avec le Réseau Éducation Populaire (REP) dont ReSPUBLICA fera connaître dans les semaines qui viennent son agenda de conférences publiques.

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Victoire historique au Sénat : femmes, sortez de ce corps !

par Gwen Fauchois
journaliste de 1997 à 2001, responsable de la communication d’Act Up-Paris de 1994 à 1997

Source de l'article

 

Samedi 1er octobre 2011, 15h30 environ, Catherine Tasca monte à la tribune du Sénat sous les acclamations de ses pairs. L’instant est historique. Pour la première fois, une femme vient d’être élue Présidente de la Haute Assemblée.

Seulement voilà, en France en 2011, ce scénario est envisageable au cinéma, peut-être même dans un téléfilm, vous pourriez le découvrir dans un roman mais il n’est pas question qu’il se produise dans la réalité!

Média et politiques, dans un même élan à l’unanimité suspecte, se sont chargés de l’enterrer à la minute même où il est devenu possible.

Il est déjà pitoyable d’en être réduit, aujourd’hui encore, à mesurer la portée historique que revêtirait une telle éventualité, mais la radiographie de notre représentation politique est encore plus implacable.

La candidature d’une femme, pourtant hautement qualifiée au regard de ses concurrents (vice-présidente du Sénat, plusieurs fois ministres, présidente de la Commission des Lois de l’Assemblée…), sous le jeu des pressions plus ou moins amicales, au fil des défections de ses soutiens légitimes n’a même pas dépassé le cadre des déclarations d’intentions.

L’argument de la compétence n’est pas recevable ici, qu’importe! On agite le chiffon rouge de la division, le parti en danger! On campe artificiellement la droite en prestidigitateur rusé, capable d’escamoter une majorité qu’elle n’a pas su conserver dans le plus fortifié de ses bastions.

Démontez une excuse, on vous en opposera aussitôt une autre. On multipliera les explications techniques, les justifications conjoncturelles pour affirmer qu’il n’y a rien de sexiste dans ces choix.

Le combat s’apparente à une guérilla de tous les instants. Les résistances à l’égalité réelle sont si profondes que s’en remettre à la patience est un leurre. Car à y regarder de près, ce n’est jamais le bon moment. La parité, c’est ce qu’on fera demain. C’est promis.

En 2001, le Sénat comptait dans ses rangs près de 30% de femmes. En 2011 cette proportion n’atteint plus que 22,13%. 77 sénatrices siègeront à la prochaine session soit 3 de moins qu’aujourd’hui. Victoire historique de la gauche, nous dit-on. Certes.

Vague dommage collatéral, ce recul de la parité, vite expédié au rang des sacrifices nécessaires n’est évoqué qu’à titre d’anecdote. Et les femmes renvoyées aussitôt à la place que toutes les promesses non tenues leur réservent : dans l’ombre.

Dans ce domaine, il n’est plus question de renouvellement, de modernisation du fonctionnement du Sénat, d’une assemblée réellement représentative, de la fin d’une anomalie démocratique!

Au moment de choisir son candidat à la Présidence du Sénat, la gauche tenait une occasion historique d’accorder son discours et ses actes et de mettre un terme à cette autre anomalie démocratique. Il ne relevait que de sa volonté de faire élire une femme à la tête de la Haute assemblée.

Mais une fois de plus, il a été demandé aux femmes de passer leur tour. Depuis 1958, cinq hommes se sont succédé à la présidence du Sénat, un sixième s’apprête à prendre leur suite sans qu’aucun acteur, observateur, et commentateur politiques ne s’offusque. Cinq présidents mais il n’est toujours pas temps qu’une femme dirige le Sénat!

L’alternance demeure ce qu’elle est invariablement : masculine.

Les femmes au Sénat comme dans les entreprises, dans les conseils d’administration, dans la fonction publique ne sont-elles tolérées qu’à des postes de responsabilité subalternes?

En France, la vice-présidence serait-elle l’échelon ultime accessible aux femmes? Le cache-sexe du chef, le vrai!

Alors pour 2012, on peut d’ores et déjà parier que le candidat du PS à la Présidentielle sera masculin. Pourquoi? Parce que cette fois, il pourrait gagner.

Humeur
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La réflexologie pour soigner l'hôpital ?!

par André Grimaldi
Professeur de diabétologie et président du Mouvement de Défense de l'Hôpital Public (MDHP)
http://www.petition-mdhp.fr/

 

En ces temps de tristesse comptable, à l’heure où il va nous falloir expier nos folies dépensières, une lueur d’espoir apparaît. Notre Bonne Mère l’APHP a décidé « d’introduire dans les hôpitaux des prises en charge et des traitements à la fois traditionnels et innovants ». Louons, avec notre directrice générale, « l’ouverture d’esprit des équipes médicales et paramédicales ».

À côté de l’hôpital entreprise soumis à la loi d’acier de la T2A, existe donc un coin d’humanité, de rêve et de ciel bleu : « une offre de traitements complémentaires qui existe déjà à l’APHP… le plus souvent en ambulatoire (…, auriculothérapie, homéopathie… réflexologie) ». Et un comité va « émettre des propositions d’orientation et d’action sur la place de ces traitements dans l’institution ».

Étant diabétologue, la « réflexologie » m’intéresse à double titre

D’une part parce que nous apprenons aux patients à masser leur(s) pied(s). Or ce faisant, sans le savoir, nous les amenons à masser leur pancréas (ce qui ne peut que lui faire du bien), mais aussi hélas leurs reins contigus (ce qui doit être délétère compte tenu de l’hyperfiltration glomérulaire induite par le diabète) (Cf. le schéma)
D’autre part, je découvre avec consternation les conséquences dramatiques du mal perforant plantaire siégeant sous la tête du 1er méta, site plantaire du cœur1 !

Les grandes crises de société ont leurs symptômes : l’irrationalité de la finance finit par gagner les esprits. Les malins se remplissent les poches au détriment des gogos. « Médecine rationnelle guidée par l’EBM », « consommateurs éclairés », « médecins ingénieurs » « efficience » qu’ils disaient !

Cette faillite de la raison honnête n’annonce hélas rien de bon.

En rire ou en pleurer

  1. Le mal perforant plantaire est la conséquence d’un durillon négligé siégeant sous la tête des métatarsiens au niveau des points d’appui plantaires. Si ce durillon a été négligé au point de blesser la chaire sous-jacente et d’y provoquer une ulcération, c’est qu’il était totalement indolore. Et ce qui le rend indolore c’est l’atteinte des nerfs par le diabète mal équilibré (la neuropathie diabétique). Selon les élucubrations de la réflexologie qui a inventé une cartographie du pied où se projettent les différents organes, le cœur se situe au niveau de la tête du 1er métatarsien (]
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Présentation du scénario 2011 de l'association négaWatt

par Bernard Teper

 

Le dernier scénario datait de 2006, c’est donc cinq ans après que l’association négaWatt a récidivé, ce jeudi 29 septembre 2011 à l’Espace Reuilly. La salle était pleine (sans doute près d’un millier de personnes).
Que ce soit dans le débat énergétique ou dans celui de la transition énergétique, ou encore pour les partisans de la République sociale du 21e siècle dans le débat sur la rupture écologique, on a l’habitude des numéros de saltimbanques dogmatiques aussi bien chez les pro-nucléaires que chez les anti. D’ailleurs, nous en avons eu un exemple grandeur nature à l’entrée de la salle de présentation du scénario négaWatt. Sans doute, excédé par le fait que l’association négaWatt estime qu’il faut 22 ans pour sortir du nucléaire, les militants du réseau Sortir du Nucléaire ont distribué un tract disant que cela devait se faire en 10 ans maximum. Qui dit mieux ! Ce tract du groupe Sortir du nucléaire se targue d’avoir rassemblé, à la suite de Fukushima, 67 associations et partis politiques dont ATTAC, CAP21, NPA, PG, etc. Ces organisations devraient mieux réfléchir avant de signer avec une association qui ensuite utilise leurs signatures dans un tract titré « 10 ans maximum pour sortir du nucléaire ! ».

Le sérieux était par contre au rendez-vous côté tribune.

Car disons-le ! Dans le débat énergétique et dans le camp qui souhaite sortir des énergies fossiles « faciles » et du nucléaire, négaWatt est l’association la plus sérieuse.

Les responsables actuels de négaWatt 2e génération ont fait présider la séance par Bernard Laponche, ancien directeur de l’ADEME qui fut de la première génération. négaWatt a comme objectif de prendre en compte l’urgence climatique, la fin des énergies fossiles « faciles » pour cause de décarbonation nécessaire et la fin du nucléaire.

D’abord, elle va dans le bon sens en partant des usages et non des ressources. Ce point est capital. Les tendances eschatologiques de « la fin du monde » de ceux qui veulent ne prendre en compte que le niveau des ressources doivent nous entraîner à soutenir ce point de doctrine des négaWatt. Ensuite, ils refusent, à juste titre, à mon sens, de prendre en compte les procédés futurs non encore mis au point.

L’association s’appuie sur trois leviers :

  • la sobriété,
  • l’efficacité énergétique
  • et le développement des renouvelables.


Mais dans leur schéma, un effort principal vient de la biomasse solide. Il est à noter que ce scénario est compatible avec le scénario Afterres 2050 de l’association Solagro qui travaille sur les sols et l’agriculture.

Ce qui est très intéressant est le fait qu’entrent dans leur scénario les enjeux énergétiques essentiels que constituent le bâtiment, l’industrie et les transports notamment en développant des hypothèses de base sur tous ses sujets.

Comme indiqué ci-dessus, la sortie nucléaire ne peut pas se faire sérieusement avant 22 ans si l’on veut travailler sur une sortie raisonnée et progressive en tenant compte de toute la chaîne du nucléaire et surtout d’une montée en charge des énergies de substitution.

Le point-clé du 1 qui permet entre autres d’accepter la variabilité des énergies renouvelables. Il prévoit une production de 30 TWh de méthane synthétique.

Ils ont montré, ce qui est intéressant, que le programme du Grenelle de l’environnement aurait eu comme impact de baisser la quantité d’énergie nécessaire pendant quelques courtes années puis que cela aurait recommencé à grimper. Cela montre donc que le Grenelle de l’environnement n’avait comme objectif qu’un effet d’affichage.

Bien évidemment, le débat est ouvert sur les hypothèses de base du modèle négaWatt. Prenons quelques exemples.

Dans leur base de calcul, ils prennent pour l’occupation des logements pour 2050, 2,2 personnes par logement alors que c’est 2,25 personnes par logement en 2010 avec un chiffre tendanciel calculé par l’INSEE de 2,01 pour 2050. Voilà un exemple de débat à avoir sur les hypothèses de base. Ils tablent sur deux mètres carrés par habitant de solaire en 2050. Alors qu’il pensait dans leur scénario 2006 que l’obligation de mise aux normes ne devait être portée que dans les ventes d’appartement, le scénario 2011 appelle donc à rajouter à un programme de réhabilitation et de rénovation urbaine pour mise aux normes. Par ailleurs, ils sous-estiment sans doute la réprobation d’une partie de la population sur la visibilité proche de chez eux de l’éolien terrestre. On pourra aussi discuter de leur propension à diminuer fortement les trajets des avions longs courriers (avec les résistances à cette diminution forte que cela va produire) et le fait qu’ils n’ont pas chiffrés les investissements nécessaires à court terme pour lancer la transition énergétique. Car stipuler la transition énergétique voire la planification énergétique ou écologique sans donner les chiffres des investissements court terme nécessaire est critiquable.

Cela dit, nous avons là une base sérieuse pour engager le débat énergétique avec les travaux de cette association négaWatt. D’autant plus que nous n’avons pas l’équivalent de ce travail chez ceux qui veulent garder un peu de nucléaire (en dehors d’EDF, le CEA et AREVA dont l’opacité et la non-transparence sont légendaires). Pas d’études sérieuses fournies au public sur les conséquences de la tendance à la privatisation et à la marchandisation de l’énergie nucléaire en cours dans le turbocapitalisme. Pas d’études sérieuses sur la quatrième génération des centrales nucléaires. Pas d’études sérieuses sur les internalisations nécessaires des externalisations négatives du nucléaire. Pas d’études sérieuses sur la sûreté des centrales. Sans parler des déchets. Etc.

Et c’est bien dommage, car du débat entre des études sérieuses et en partie contradictoires peut surgir des vérités. Avis aux amateurs !

En tout état de cause, nous avons là un matériau et des conférenciers pour engager un travail d’éducation populaire tournée vers l’action sur la transition énergétique. À bon entendeur.

  1. réaction simple entre l’hydrogène d’électrolyse et du gaz carbonique de combustion que l’on injecte au même titre que le biogaz dans le réseau où il remplace le gaz naturel fossile []
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Souffrance au travail : vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant !

par Alain Astouric
Auteur de "La tyrannie du marketing"
http://astouric.icioula.org/

 

Depuis deux décennies les techniques managériales de mutation organisationnelle permanente, de travail en mode projet, de réingénierie, d’empowerment* et de rémunération variable individuelle ont poussées les hommes, pardon ! les ressources humaines, vers la religion de la mobilité, la transformation permanente, la flexibilité, la polycompétence et l’individualisation des résultats au sein d’une entreprise prétendument individualisée pour le bien de tous.

Or, s’il est exact que ces évolutions peuvent offrir certaines opportunités de responsabilisation des salariés et de mise en place d’organisations moins hiérarchiques, elles font surtout peser de graves risques sur la santé mentale des travailleurs.

Aussi nous ne pouvons que regretter le silence, en particulier politique et dans une moindre mesure journalistique, qui a longtemps prévalu à propos de la souffrance au travail.

‒ Nous regrettons d’abord l’injonction paradoxale à l’autonomie qui a été faite aux salariés, sans jamais s’être assuré qu’ils y soient prêts, sans toujours leur avoir donné les moyens afférents et sans avoir non plus suffisamment intégré le frein que constitue en parallèle la procéduralisation excessive du travail. L’organisation est aujourd’hui exagérément normée et l’employé n’a plus le droit, faute de se le voir reprocher, de dévier des tâches à accomplir les unes derrière les autres ;

‒ Nous regrettons en second lieu la mise en concurrence des équipes. Une sorte de compétition qui, à l’instar des pratiques individualisantes, des modes de travail concurrentiels et des menaces de mise au placard ou de licenciement, continue à ravaler les gens au rang de simples ressources ;

‒ Nous regrettons en suite l’idée même de qualité totale, comme nous le faisions dès 2004 dans une étude  intitulée, Le management durable […] les appellations aux allures excessives comme, qualité totale, zéro défaut ou excellence qui ne font aucune place à la réserve, ignorent la nuance et oublient les concessions afférentes à l’imperfection humaine, sont à manier avec précaution, si ce n’est à regarder avec suspicion […] La perfection n’est pas encore de ce monde ! D’ailleurs, si comme nous l’entendons de plus en plus souvent le risque zéro n’existe pas, comment la qualité totale pourrait-elle exister ?

Alors que faire en ces temps du triomphe de l’individualisme ?

Etant donné qu’on ne peut pas revenir en arrière, il est urgent de reconstruire l’entreprise. Non pas par nostalgie du passé mais parce que l’on tient là l’unique façon de réussir l’avenir.

Maintenant que les partenaires sociaux sont parvenus à un accord sur le harcèlement visant à mieux détecter la violence dans les entreprises, le moment est venu pour les branches professionnelles de mettre en place les outils adaptés à la situation de leurs secteurs. C’est-à-dire, pour l’essentiel : systématiser vraiment l’accompagnement des changements ; instaurer un délai minimum de stabilité après chaque changement de poste et, comme le recommande le rapport Lachmann de février 2010, prévoir une étude d’impact social avant toute restructuration significative.

Parallèlement à ces trois mesures structurelles, il est plus que temps de donner enfin à la maîtrise et aux cadres non seulement une réelle et suffisante marge de manœuvre mais aussi une formation sérieuse, complète et concrète, d’abord aux problématiques de la santé et du bien-être au travail, ensuite, et surtout, aux dix techniques qui fondent (depuis presque toujours) le management efficace d’une équipe au travail :

  • La communication interindividuelle ;
  • La gestion du changement dans les Organisations ;
  • La recherche de l’amélioration de la qualité ;
  • La délégation de pouvoir ;
  • La prise de décision ;
  • La négociation interindividuelle ;
  • La motivation de l’homme au travail ;
  • La conduite de réunion ;
  • La prise de parole en public ;
  • L’entretien de face-à-face.

Nous sommes bien conscient que vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant et que la pédagogie à elle seule n’est pas la panacée. Mais si l’on n’utilise pas en premier lieu les moyens existants, ceux là même qui ont depuis longtemps fait leurs preuves, rien ne sera jamais résolu.

En outre, parce qu’en matière de relations sociales dans le travail, de conditions de travail et d’organisation du travail la démarche collective est toujours à privilégier, nous insistons sur la nécessité à former les décideurs et dirigeants ‒ surtout les plus jeunes ‒ au minimum aux problématiques de la santé et du bien-être au travail ainsi qu’à la gestion du changement dans les Organisations. De préférence à la totalité de ce même programme.

On a là un train de mesures qui en ne confondant pas prévention du stress et poudre aux yeux devrait nous permettre de regagner suffisamment de confiance et d’adhésion pour, enfin, travailler mieux.

D’autant que les moyens existent de détecter les causes du stress, et donc d’agir en amont, par exemple, ThermoStress.