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  1. chronique d'Evariste
    1. La gauche antilibérale dans tous ses états, par Évariste
  2. élections présidentielles 2007
    1. La gauche anti-libérale est encore sous l'emprise du libéralisme économique, par Pierre Baracca
    2. L'hypothèse Mélenchon est posée au PCF, par Le Journal Marianne
    3. Pourquoi Ségolène Royal l'a-t-elle emporté ?, par Jean-Jacques Chavigné
    4. Plutôt Ségolène qu'un droitier pro-américain, par Marcel COOLS
    5. Les actions de Bové servent-elles les multinationales ?, par Jean-Claude Depoil
    6. Les réunionnais privés de Sarkozy !, par Pierre Cassen
  3. combat social
    1. La difficile lutte de l'UMP contre les 35 heures, par Anna Borrel
  4. débats laïques
    1. Approfondir un vrai débat, par Pierre Cassen
    2. Je partage la définition de Jérôme Manouchian sur la laïcité, par Michel Naud
    3. Préserver la sphère publique des religions, par Pierre Montagnon
  5. Débat autour du soutien à Robert Redeker
    1. Soutien à Robert Redeker, par Claude Barratier
    2. Lettre à Mohamed Sifaoui, par Driss C. Jaydane
  6. combat laïque
    1. La laïcité en Grande-Bretagne, par Carole Biot-Stuart
    2. Un discours victimaire et anti-Républicain, par Caroline Brancher
  7. à lire
    1. Critique du livre "Immigration, sortir du chaos" de Maxime Tandonnet, 1ère partie, par Mireille Popelin
  8. Agenda

1 - chronique d'Evariste

1.1 - La gauche antilibérale dans tous ses états

Ca y est ! La gauche social-libérale a sa candidate : Ségolène Royal. Celle-là même qui est promotionnée par la presse du lobby militaro-industriel. Vous savez, cette presse détenue par les groupes Lagardère-Hachette-Dassault (75% de la presse écrite), cette même presse qui avait promotionné Chirac en 1995 contre Balladur. Le PS est donc en ordre de marche. Sa candidate, y compris soutenue par certains leaders qui il y a encore un an appelaient à voter non au traité constitutionnel, a fait mordre la poussière à ses deux concurrents. La messe est dite.

Laurent Fabius, qui, lui, n'a pas trahi ses engagements du 29 mai 2005 a fait un peu plus que 18% alors que le non dans le PS avait fait fin 2004 plus de 40% et que l'électorat socialiste avait voté à 60% pour le non.

Mais le PS est en mutation avec une arrivée massive de nouveaux adhérents organisée par un site internet extérieur au PS, Désirs d'avenir. La mutation du PS rappelle la mutation du parti travailliste britannique avec Tony Blair qui avait modifié la composition du parti en la coupant du mouvement syndical. Toutes choses étant inégales par ailleurs, ces deux mutations sont de même nature...

Il est étonnant de voir la nouvelle candidate ne pas intervenir sur les sujets qui sont les premières préoccupations des français, dans l'ordre, les propositions en matière de protection sociale, les salaires et l'emploi, la laïcité et le vivre ensemble, la sûreté, le logement social et les services publics. Non, je suis mauvaise langue, elle a dit qu'elle ne laisserait pas insulter Dieu laissant planer le risque de vouloir rétablir le délit de blasphème.

Reste la gauche anti-libérale. Tous les meetings montrent l'espoir important. De 1000 à 4000 personnes par meeting. Le dernier meeting de Montpellier a été le plus émouvant avec ses 4000 personnes. Dans ce dernier meeting, début de mobilisation des couches populaires, à suivre. Et pourtant, la crise est là. D'abord à ATTAC, ou les néo-communautaristes tentent de prendre le contrôle de l'organisation grâce à une liste bloquée de 18 " fondateurs " dont 17 sont homogènes idéologiquement et politiquement sur un CA de 30 personnes ( ou de 42 si la réforme des statuts passe ce qui n'est pas assuré).

Et dans les collectifs unitaires, nous avons vu la retrait de Raoul Marc Jennar puis récemment de José Bové de la candidature pour les présidentielles.

Laïque est le premier, ultra-communautariste est le second, ils critiquent tous les deux la poussée dans les collectifs des militants du Parti communiste pour promouvoir la candidature de Marie Georges Buffet. Les collectifs sont divisés sur un débat : faut-il un candidat d'un parti ou pas ! Pourtant, il est normal que les militants du PCF, conscients que seul le PCF peut avoir les 500 signatures, que 100.000 adhérents cela ne passe pas inaperçu et qu'ils trouvent bizarre qu'ils soient les seuls à ne pas être légitime à présenter un des leurs à la candidature. D'autant plus qu'une minorité du PCF, très proche des communautaristes des Indigènes de la république soutient Clémentine Autain.

Mais de plus en plus, dans cette crise, des militants pensent que sur les 31,3% du non de gauche du 29 mai 2005, le gros des troupes électorales sont les couches populaires et l'électorat socialiste du non. Et, qui mieux qu'un socialiste du non pour toucher ces deux ensembles d'électeurs ?

C'est pour cela que la candidature de Jean-Luc Mélenchon est de plus en plus dans le débat. L'hebdomadaire Marianne a fait un article sur ce point. Comme Jean-Luc Mélenchon ne souhaite pas s'opposer aux candidats anti-libéraux et surtout pas à Marie Georges Buffet, la décision incombe donc au parti dominant de la gauche anti-libérale, le PCF. Trois possibilités s'offrent aux militants anti-libéraux, voilà l'enjeu ! C'est le PCF qui a les cartes de la décision dans les mains pour engager la gauche anti-libérale dans l'une des 3 voies suivantes : faire imploser la gauche anti-libérale, faire un score de témoignage ou faire un score à deux chiffres ! Rendez-vous le 10 décembre !

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2 - élections présidentielles 2007

2.1 - La gauche anti-libérale est encore sous l'emprise du libéralisme économique

Les Collectifs de la gauche anti-libérale annoncent vouloir construire des propositions qui se veulent radicales et en rupture avec le social-libéralisme du PS ou de ce qui fut la "Gauche plurielle".

Ainsi ces Collectifs proposent :

Comment financent-ils ces propositions ?

Ces Collectifs proposent un meilleur partage des profits réalisés par les grands groupes multinationaux ou transnationaux en faveur du Travail et aux dépens du Capital. Et, ce, un peu comme dans la période 1960-80, les très keynésiennes " Trente glorieuses ", grâce :

En rester là, c'est socialiser une partie des profits, mais c'est demeurer sous la dépendance des stratégies financières des propriétaires du capital.

Dépasser la politique des "Partageux"

En effet, cette politique se limite à glaner ici ou là, temporairement, une part des profits, mais ce n'est nullement participer aux choix stratégiques et à l'implantation des grandes entreprises. C'est donc accepter la libre circulation des entreprises, des capitaux et de la force de travail à l'échelle de la planète, là où le décident les stratèges des grands groupes industriels et de services sous la pression des critères financiers et pour la plus grande rentabilité (donc les plus petits salaires et le moins d'Etat social).

Dans ces conditions, c'est un leurre de croire pouvoir infléchir politiquement les choix capitalistes. Que ce soit via l'Etat et/ou des collectifs de travailleurs. En fait c'est ne rien contrôler. Très vite cette politique volontariste de partage social des profits ou de socialisation d'une plus grande part de la Valeur Ajoutée créée sur le territoire français sera confrontée à des délocalisations nouvelles, à des pressions externes. En rester à l'idée d'un repartage de la richesse créée n'est qu'un remake des faux espoirs sociaux-libéraux de la Gauche plurielle. La rupture radicale annoncée ne sera qu'un réformisme de plus voué à un nouvel échec.

Pour que cette rupture radicale s'enclenche, ces collectifs anti-libéraux doivent

  1. d'abord ne pas admettre la mondialisation comme naturelle, mais la percevoir comme le capitalisme à l'échelle mondiale, donc comme des choix opérés par une bourgeoisie cosmopolite pour ses intérêts particuliers ;
  2. puis se demander si le salariat et les petits patrons ont intérêt à abandonner l'idée d'un développement économique et social de chaque pays pour la croyance en une mondialisation alternative (altermondialisme) dont tout montre qu'elle n'offre guère de garantie de contrôle démocratique pour les citoyens de base d'un monde globalisé, d'une société-monde ;
  3. donc s'interroger sur le maintien des stratégies néolibérales actuelles de libre circulation des capitaux, des entreprises et des travailleurs (flux migratoires : émigration-immigration) à l'échelle planétaire comme solution aux problèmes des salariats et des peuples ou sur la nécessité de reconsidérer comme nécessaires des politiques de développement de tous les pays. Tant pour les pays capitalistes développés où chômage, précarisation et insécurité sociale croissent (France, pays européens, etc.) que pour les pays sous-développés (en Afrique, en Asie, etc.) ou dits " émergents " (Chine, Inde, Brésil) où l'immense majorité de la population demeure dans la misère, à l'écart des profits et de l'accès à une classe moyenne étroite en constitution. Cette orientation demande de réaliser des coopérations internationales et de maîtriser nationalement la production de l'alimentation, donc de l'agriculture, de l'eau, etc., sur des bases écologiques.

En somme, les Collectifs seront anti-libéraux si et seulement s'ils s'envisagent que des changements structurels sont nécessaires, sinon ils ne seront qu'une nouvelle version de la Gauche plurielle, c'est à dire le social-libéralisme de demain. Ces Collectifs se doivent donc de dépasser le niveau d'une politique émotionnelle de charité sociale à grande échelle.

Pierre Baracca

2.2 - L'hypothèse Mélenchon est posée au PCF

Victoire de Ségolène Royal au PS, difficultés des collectifs antilibéraux à produire un candidat commun, hésitation du PCF à entrer vraiment dans la campagne présidentielle : le mois de décembre sera-t-il celui de la candidature de Jean-Luc Mélenchon ?

Le meeting tenu à Montpellier vendredi 17 novembre a démontré l'incontestable attente qui demeure chez un grand nombre de militants du non au référendum de 2005. Quatre mille personnes rassemblées à six mois d'une échéance électorale en dépit de l'état de désorganisation des collectifs antilibéraux : voilà un fait politique qui n'est pas passé inaperçu. Un espace politique et une capacité militante semblent exister pour ceux qui font le pari que le clivage du " non " au Traité constitutionnel européen demeurera structurant pour 2007.

Mais comme le reconnaissent beaucoup de militants des collectifs antilibéraux, la désignation d'un candidat commun va relever du défi bien difficile à surmonter. Yves Salesse est reconnu pour sa force de travail mais reste presque totalement inconnu des Français. José Bové a beaucoup d'adversaires, en particulier au Parti communiste avec lequel il ne partage aucune histoire militante solide. Clémentine Autain plaît aux médias et aux bloggeurs bobos parisiens, mais son inexpérience et sa distance avec la France ouvrière sautent aux yeux. Patrick Braouzec n'a aucun atout politique permettant de l'emporter. Reste Marie-George Buffet, l'ancienne ministre de la Jeunesse et des sports, mais sa candidature estampillée PCF fait grincer les dents des autres " candidats à la candidature " et son potentiel électoral semble limité.

L'équation semble insoluble.

Même en dehors des collectifs, le PCF hésite à se lancer vraiment dans la bataille. La faiblesse du score de Robert Hue en 2002 a marqué les esprits (3,37% des voix, à peine 960 000 voix !). Un tel résultat rendrait difficile de solides négociations avec le PS pour les législatives, sans compter le non remboursement des frais de campagne. Et surtout, Marie-George Buffet manque de ce grain de folie qui fait un bon candidat à l'élection présidentielle : si son dévouement et la sincérité de ses convictions font consensus, il plane un doute sur sa capacité à mener campagne.

La clé est encore au PS

Depuis le référendum de 2005, les militants communistes ont eu l'occasion de cotoyer des camarades d'un genre nouveau : mi-rouges, mi-roses. Regroupés autour de Jean-Luc Mélenchon, les partisans de l'association Pour la république sociale (PRS) ont marqué les esprits par leur capacité militante et leur visibilité pendant la campagne référendaire. La célèbre affiche " Pour moi, c'est non ", c'était eux. Avant le vote de la CGT, avant les grosses machines militantes, ils ont silloné le pays pour s'opposer au traité constitutionnel européen.

Pendant la campagne et après, ils ont noué de solides liens avec les antilibéraux et avec les communistes. Le ballon de leur stand à la dernière Fête de l'Humanité était si visible qu'on leur demanda de bien vouloir être un peu plus... discret !

La culture des militants de PRS (deux ou trois milles membres) est très proche de celle des communistes : le peuple n'est pas un gros mot pour eux, pas plus que la France, et ils préfèrent au charme discret des centre-ville les odeurs des marchés et du terrain.

Mélenchon l'a dit à Montpellier : on ne fera pas de lui un Ségoliste.

Le PS sait qu'il lui sera difficile de le faire plier. Sénateur jusqu'en 2011, son calendrier est libre de tout point de pression. Ses choix politiques sont ses médailles : opposant à la première guerre du Golfe, adversaire résolu de la dérive libérale en Europe, tribun vengeur lors de la campagne référendaire sur l'Europe. Lors de ses longues envolées oratoires, il renoue avec la tradition du populisme socialiste, éduquant le Peuple et les militants, parlant aux tripes et aux coeurs.

A bien des égards, il est le seul à gauche à contester à Le Pen le statut de tribun des prolos. Il fallait le lire évoquant les poings serrés et la dignité retrouvée des petits et des humbles pour comprendre la réalité charnelle du 29 mai 2005.

Sa conviction est simple : la clé de 2007, comme 2005, se trouve au PS.

Une candidature Mélenchon, soutenue par le PCF et par une bonne partie des collectifs antilibéraux, donnerait une suite politique logique au 29 mai, en même temps qu'une solution politique aux hésitations des communistes et à l'immaturité organisationnelle des antilibéraux.

Avec les troupes communistes et celle de PRS, il pourra mener campagne en profondeur, sur l'ensemble du territoire, et avec une capacité de commando que les grands partis ne peuvent plus se permettre, fussent-ils les maîtres de la " blogosphère ".

Les communistes sauront-ils saisir et mettre à profit cette " fenêtre d'opportunité " comme le disent les experts en stratégie? Le mois de décembre le dira.

Le Journal Marianne www.marianne2007.info
L'élection présidentielle de 2007 vue par la rédaction de Marianne

Source : www.marianne2007.info

2.3 - Pourquoi Ségolène Royal l'a-t-elle emporté ?

Ségolène Royal l'a emporté sur Laurent Fabius. Pourtant, ce dernier proposait un certain nombre de mesures (augmentation de 100 euros du Smic, renationalisation d'EDF...) qui étaient beaucoup plus conformes aux aspirations de la société. Pourquoi, dans ces conditions, Ségolène Royale l'a-t-elle emporté ?

La première explication tient à l'existence des institutions de la Vème République qui ont pesé très lourd dans le débat interne du PS. L'élection présidentielle permet une personnalisation à l'extrême de la politique. C'est là une différence essentielle avec le vote pour le TCE : autant il était difficile de personnaliser le vote pour la Constitution européenne, autant il était facile pour les médias de personnaliser le choix d'un candidat à la présidentielle. Et ils ne s'en sont pas privés, avec la même absence de vergogne que lorsqu'ils faisaient campagne pour le oui mais avec beaucoup plus de succès.

La deuxième explication tient à l'évolution des débats au sein même du Parti Socialiste où la synthèse du Mans et l'adoption du projet socialiste ont ouvert un boulevard à la candidature de Ségolène Royal.

Lors du référendum interne, le " non " avait obtenu 42 % des suffrages malgré d'intenses manipulations dans certaines grosses fédérations.

Lors du congrès du Mans, la Motion 1 (celle de la direction du parti) enregistrait un nouveau recul et ne recueillait que 53 % des suffrages. Mais la synthèse du Mans a cassé net la progression de la gauche du Parti Socialiste. Elle reprenait l'essentiel de la Motion 1. La motions 2 et la motion 5 (Henri Emmanuelli, Benoît Hamon, Vincent Peillon) ne pesaient qu'à la marge dans la rédaction de cette synthèse. Le débat (ou plutôt le non-débat) sur le projet parachevait cette acceptation des thèses de la Motion 1. Or, la synthèse avait été acceptée par tous les dirigeants de la gauche du Parti Socialiste, à l'exception de Marc Dolez, Gérard Filoche et Arnaud Montebourg.

Quant au projet, il a été accepté par les mêmes, à l'exception[1] encore d'une fois de Marc Dolez et de Gérard Filoche qui s'était prononcé contre et de Arnaud Montebourg qui s'était abstenu et finalement l'a voté le 1er juillet...

Les dirigeants de gauche du parti disaient " notre candidat c'est le projet... " ils ne se sont pas battus sur le projet, ils ont été battus sur le candidat...

La politique a horreur du vide. A partir du moment où les principaux dirigeants de la gauche du parti avaient renoncé à occuper le terrain, ce terrain a été occupé par la droite du parti. Le débat politique n'a eu lieu ni au Mans, ni lors de l'élaboration du projet lorsqu'il était possible de discuter sur des idées et non sur des personnes. Le débat a eu lieu sur le plus mauvais terrain possible pour la gauche du parti : celui de la désignation du candidat à la présidentielle, là où le débat d'idées est le plus difficile et la personnalisation du débat la plus facile.

La troisième cause de la victoire de Ségolène Royal tient au vide politique béant apparu lors de la bataille contre le CPE. Tout au long de cette bataille, les dirigeants du Parti Socialiste se sont refusés à appeler à des élections législatives anticipées alors que ce problème était objectivement posé par la mobilisation de plus en plus massive confrontée à l'illégitimité de plus en plus flagrante du gouvernement.

Pire, à maintes reprises, François Hollande s'est porté au secours des institutions de la Vème République en affirmant que le problème du pouvoir n'était pas posé et qu'il fallait attendre les échéances institutionnelles. Et comme la politique a toujours horreur du vide, ce vide qui n'avait pas été comblé par les dirigeants de la gauche du parti (à l'exception, une nouvelle fois de Marc Dolez, de Gérard Filoche et de Jean-Luc Mélenchon), les médias se sont empressés de le combler dans le sens qui leur convenait le mieux : quatre grands hebdomadaires ont alors fait leur couverture avec une photographie de Ségolène Royal.

La quatrième cause trouve son origine dans l'image de Laurent Fabius qui n'a pas non plus été étrangère à la victoire de Ségolène Royal. Certes, Laurent Fabius avait eu le courage politique de se prononcer pour le " non " lors du référendum de 2005 et avançait un certain nombre de mesures sociales qui répondaient aux aspirations du salariat.

Mais l'image de Laurent Fabius, Premier ministre en 2004 ou ministre des Finances de Lionel Jospin n'avait pas disparu. Je me rappelle de la réponse d'un camarade d'une trentaine d'années à mon intervention en défense de la candidature de Laurent Fabius. " J'habite dans le quartier nord et lorsque les gens entendent dire que Fabius va augmenter le Smic et 100 euros, ils rigolent et affirment aussitôt qu'ils nous en reprendra 70 de l'autre main ". C'était injuste mais ne faisons donc pas comme si c'était deux conceptions chimiquement pures de la politique qui s'étaient affrontées dans le Parti Socialiste. Là aussi, les institutions de la Vème République ont pesé de tout leur poids et l'image qui restait collée à Laurent Fabius a pesé dans le débat.

La cinquième cause de la victoire de Ségolène Royal est liée à la volonté de nombreux adhérents du Parti Socialiste de gagner en 2007 et de changer la politique. Nous savons que le programme politique de Ségolène Royal (tel qu'il est aujourd'hui) rendra plus difficile qu'avec celui de Laurent Fabius le rassemblement des électeurs socialistes au 1er tour de l'élection présidentielle et le rassemblement de la gauche au second tour.

Nous savons également que Ségolène Royal donne l'apparence du changement politique pour surtout ne rien changer : ni les institutions de la Vème République, ni la main mise de l'appareil du PS (avec quelques éléphanteaux supplémentaires...) sur le Parti Socialiste. Mais l'important est que les adhérents du PS y aient cru. Tous les débats avec les adhérents l'attestent. Les médias leur ont répété que Ségolène Royal était la mieux placée pour battre Sarkozy. Les adhérents y ont cru. C'est tout à fait regrettable mais c'est ainsi et il ne faut pas confondre cette volonté de battre la droite et de changer la politique avec l'acceptation des 35 heures pour les enseignants, l'encadrement militaire de certains jeunes ou l'abandon de la carte scolaire. Il faut d'ailleurs remarquer que, très rapidement, sous la pression du débat dans le Parti Socialiste, Ségolène Royal a été amenée à modifier ces propositions.

Des camarades ont avancé une autre explication, celle de la transformation de la nature du Parti par les " adhérents à 20 euros ". Cette explication n'est pas convaincante. C'est une vue par trop " parisienne " de la situation où ces adhésions ont surtout renforcé la droite du parti et notamment DSK. Il n'en va pas de même en province où les nouveaux adhérents ont très souvent voté comme les anciens adhérents. Dans de nombreuses sections où la gauche du parti l'avait largement emporté lors du congrès du Mans et où il y avait peu de nouveaux adhérents, Ségolène Royal l'a largement emporté le 16 novembre.

Cette explication est même gênante. Quel membre du Parti Socialiste peut être contre le renforcement de son propre parti ? François Hollande souhaite que 100 000 nouveaux adhérents rejoignent le Parti Socialiste. Il a raison et nous devons nous apprêter à les accueillir plutôt qu'à faire la fine bouche.

Notes

[1] A notre connaissance, Mélenchon s'est abstenu sur le projet, la Rédaction

Jean-Jacques Chavigné www.democratie-socialisme.org

2.4 - Plutôt Ségolène qu'un droitier pro-américain

Cher ami républicain

Depuis plusieurs années je souhaiterais que la Wallonie puisse rejoindre la République, la frilosité et la médiocrité des hommes (et femmes) politiques francophones de Belgique ne me donnent pas d'espoir à court terme. Socialiste atavique je déplore le manque de combativité de la social-démocratie européenne face à la logique néo-libérale inspirée par les néo-cons américains. J'aurais voté non au traité prétendument constitutionnel européen.

Cela posé, Madame Ségolène Royal n'est peut-être pas la candidate rêvée, mais les divisions traditionnelles de la gauche française vont-elles à nouveau porter un droitier pro-américain au pouvoir ?

Il est sans doute bon que les gens de gauche puissent établir leur décompte de leurs forces respectives au premier tour de la présidentielle. Espérons quand même qu'il reste un réel deuxième tour...

Marcel COOLS

2.5 - Les actions de Bové servent-elles les multinationales ?

Par des actions aussi spectaculaires qu'imbéciles, José Bové contribue à occulter le vrai débat sur les OGM.

J'ai pris le temps de réfléchir à l'action de Bové et sa destruction de la récolte de maïs transgénique. Il est clair, aujourd'hui, que la machine s'emballe : tout d'abord ce candidat à la candidature ne peut plus se présenter comme un paysan, tout simplement parce qu'un paysan ne détruit pas la récolte d'un autre paysan. Cela dit, son action n'éclaircit pas le débat sur les OGM. Tout au mieux lui permet-elle de se faire voir, et, là, nous tombons encore dans les travers du paraître et de l'image à tout prix.

Est ce que la recherche sur les organismes génétiquement modifiés est utile ? Pour ma part, je pense que oui, car elle ouvre des horizons nouveaux notamment dans la recherche en matière de santé humaine : les chercheurs en science fondamentale de nos instituts nationaux (à condition de leur donner les moyens et de les considérer comme ils le méritent) sont capables d'utiliser cette méthode pour faire avancer la connaissance et certainement trouver des remèdes à certaines maladies.

Est-ce que l'exploitation industrielle des OGM à des fins commerciales est nécessaire à la survie de l'humanité ? Pour moi, la réponse est non. D'une part, la connaissance n'est pas assez grande pour savoir les effets sur l'environnement. Je pense notamment qu'il est urgent d'arrêter les cultures en pleins champs, simplement parce que le pollen de maïs est comme le nuage de Tchernobyl : il ne connaît pas les limites de parcelle et l'on peut, sans se tromper, dire aujourd'hui que la proportion de maïs " pollué " doit être importante.

Mais, je pense que le réel problème est ailleurs : en effet, en démultipliant les semences transgéniques, les multinationales confisquent le simple pouvoir aux cultivateurs du monde entier - et surtout dans les pays en voie de développement -, de multiplier leurs propres semences. À ce moment-là, cela devient criminel : car en s'arrogeant le monopole de la distribution des semences pour le profit, elles exposent des populations entières à la famine !

J'ai entendu certains candidats ou candidates soutenir Bové. De mon point de vue, elles ou ils feraient mieux de s'engager pour un vrai programme pour sauver la recherche fondamentale et engager un débat sérieux avec des experts afin de soustraire à l'Organisation Mondiale du Commerce le secteur agricole. La paysannerie et les consommateurs ont déjà payé un trop lourd tribut à la haute finance internationale.

Continuer ainsi, par des actions aussi spectaculaires qu'imbéciles, contribue à occulter le vrai débat et ainsi à éviter de faire la part des choses. Au final, je pense que les actions à la " Bové " servent les multinationales car elles confisquent le débat ce qui arrange bien les semenciers. Là, comme ailleurs, le politique doit primer sur l'économique.

Jean-Claude Depoil Agriculteur, Saint-Didier en Donjon (Allier)

Source : www.marianne2007.info

2.6 - Les réunionnais privés de Sarkozy !

Le chef de l'UMP locale l'avait annoncé partout ! Nicolas Sarkozy devait venir à La Réunion pour quelques jours, le 15 décembre. Tout était prêt pour l'accueillir comme le futur chef d'Etat. Dominique de Villepin devait lui aussi venir, et peut-être en même temps ! On parlait de l'un sur la côte ouest, et de l'autre sur la côte est, si la visite était simultanée. Hélas, on sera privé de ce spectacle. Le patron de l'UMP, devant la gravité de la situation interne de l'UMP, a préféré annuler ce voyage.

Il est vrai qu'il commence à y avoir le feu à l'UMP. Les chiraquiens, comme Evariste l'avait annoncé dans une chronique : " Chirac, le cauchemar de Sarkozy ", multiplient, en utilisant Alliot-Marie, Villepin et Debré, les croche-pieds au ministre de l'Intérieur, laissant entendre que sa candidature n'était peut-être pas aussi indiscutable que cela.

C'est le 14 janvier que les militants UMP devront trancher. Et les candidats auront jusqu'au 31 décembre pour se déclarer.

Bien évidemment, Sarkozy sera désigné, quoi qu'il arrive, et annoncera sa candidature cette semaine. Mais Chirac maintient le suspens, et cherchera par tous les moyens à plomber jusqu'au bout la campagne du maire de Neuilly.

Ségolène Royal, qui commence à inquiéter les leaders de l'UMP, est venue, il y a quelques semaines, sur l'Ile de La Réunion.

Elle avait affirmé qu'elle défendrait becs et ongles la laïcité... et avait réuni pour cela tous les chefs religieux de l'Ile, en disant qu'elle était favorable à de nouveaux jours fériés pour d'autres cultes, si les catholiques étaient d'accord !

Puis elle avait développé la conception de la préférence régionale, revendiquée par tous les autonomistes et indépendantistes de France et de Navarre.

C'est pourquoi on attendait avec impatience si le ministre de l'Intérieur allait se livrer à une surenchère de ce discours anti-républicain et anti-laïque de la candidate socialiste.

Cela sera pour 2007, si Chirac laisse Sarkozy en paix !

Pierre Cassen

3 - combat social

3.1 - La difficile lutte de l'UMP contre les 35 heures

Tenue de se justifier sur une croissance en berne, l'UMP contre-attaque et pointe le responsable : les 35 heures. Problème: derrière le slogan "travailler plus pour gagner plus" cher à Nicolas Sarkozy se cache une stratégie qui ne satisfait ni les syndicats... ni le Medef. Explication.

A l'approche des élections, c'est l'heure du bilan pour l'UMP. Et les chiffres sont mauvais: au troisième trimestre 2006, on annonce une croissance à zéro. Tenu de se justifier, Thierry Breton réplique en s'en prenant aux 35 heures, source de tous les maux économiques. Mais, ce faisant, il doit aussi expliquer pourquoi elles n'ont pas été supprimées par son gouvernement...

Le ministre de l'Economie assure que "des assouplissements substantiels" ont été réalisés et qu'il "faudra continuer" dans ce sens. Une antienne reprise par François Fillon et Luc Chatel, porte-parole de l'UMP, qui déclinent le slogan de campagne de Nicolas Sarkozy: "travailler plus pour gagner plus". "Nous pensons qu'il faut créer de la richesse avant de la partager", martèle Luc Chatel pour Marianne2007.info. "Ce que nous proposons, c'est de lever le verrou des heures supplémentaires. Cela présente un double intérêt : d'une part cela permettra aux salariés d'augmenter leur pouvoir d'achat de 15% s'ils travaillent 4 heures de plus par semaine, d'autre part cela permettra aux entreprises d'augmenter leur compétitivité par la défiscalisation de ces heures supplémentaires. " L'idée est d'étendre la réforme Fillon de 2003 - qui exclue déjà les entreprises de moins de 20 salariés de la loi sur les 35 heures - pour décloisonner la durée légale du travail dans toutes les structures, à coups de petites mesures qui ne s'attaquent pas de front à la législation de Martine Aubry. Aucune réforme globale n'est à prévoir. Pourquoi ? La réponse est à chercher dans le bras de fer qui oppose pour le moment deux alliés traditionnels : le Medef et l'UMP.

35, 39 ou... 48 heures ?

La position du syndicat patronal permet d'éclairer, entre autres, les passes d'armes discrètes qui ont émaillé la campagne au mois d'octobre entre le ministre de l'Economie et Laurence Parisot. Thierry Breton reprochait au Medef sa passivité face au projet du Parti socialiste de généraliser les 35 heures à l'ensemble des salariés.

Mais le Medef ne souhaite pas, contrairement à ce que l'UMP voudrait lui faire dire, remettre en cause les 35 heures. Les négociations qui ont conduit à leur application ont été trop longues et trop complexes pour revenir en arrière. En revanche, le syndicat patronal milite fermement pour une réforme bien plus profonde, que l'UMP se refuse pour le moment d'envisager : l'abrogation pure et simple de la durée du travail. Il prône des négociations par branche pour fixer des durées au cas par cas, avec pour plafond la norme européenne : 48 heures hebdomadaires. Questionné la semaine dernière sur ce sujet sur France Inter, François Fillon a répondu que les partenaires sociaux n'étaient pas prêts et qu'il faudrait " plus d'une mandature " pour mettre en place une telle réforme. Pour le sénateur de la Sarthe, il faut d'abord largement réformer le dialogue social avant d'envisager cette réforme. En un mot : dans l'immédiat, c'est non.

48, 65 ou... plus ?

" Si l'on traduit, ça veut dire que l'UMP n'a pas la CFDT avec elle sur ce coup-là ", analyse Gérard Filoche, inspecteur du travail, membre du Conseil national du Parti socialiste et militant de longue date à la CGT.

A l'argument de Luc Chatel selon lequel " la France est le pays où la durée du travail est la plus courte ", il oppose les heures supplémentaires impayées et non comptabilisées qui seraient légion dans tous les secteurs. Selon Gérard Filoche, quelque 6 millions de salariés travaillent déjà plus de 50 heures par semaine, sans rémunération supplémentaire. Et le militant de mettre en garde contre les conséquences des desiderata du Medef : " Si, pour le moment, la norme européenne fixe la durée maximale à 48 heures, il y a déjà des dérogations possibles pour l'augmenter.

Et une autre directive circule actuellement à la commission, qui projette de porter cette durée légale à 65 heures. L'Angleterre a déjà obtenu une clause particulière qui permet de faire signer au salarié un contrat l'autorisant à travailler plus de 48 heures, sans limite. " Pour lui, la position de François Fillon est raisonnable au sens où porter politiquement les désirs du Medef serait " aller au clash " avec les syndicats. Interrogés, la CGC, la CGT et FO se sont prononcés résolument contre. Sur le terrain du temps de travail, l'UMP s'engage donc dans la campagne avec une marge de man¦uvre très limitée, sous les feux croisés du patronat et des syndicats. Et se prépare à des lendemains qui chantent l'internationale...

Voir aussi : L'interview de Gérard Filoche

Voir aussi : Heures supplémentaires : le piège

Anna Borrel

Source : www.marianne2007.info

4 - débats laïques

4.1 - Approfondir un vrai débat

En décidant de lancer un débat sur l'attitude à adopter face à la recrudescence de voiles intégraux dans la rue, Respublica a joué parfaitement son rôle et permis d'approfondir un débat incontournable pour quiconque se réclame du combat laïque et du combat féministe. La période était propice, car, coup sur coup, le gouvernement conservateur hollandais et le candidat de droite extrême Philippe de Villers ont fait connaître leurs propositions d'interdire le voile dans la rue et dans tous les lieux publics.

Certains pouvaient craindre qu'en impulsant un tel débat, notre journal ne caresse dans le sens du poil des courants xénophobes qui n'ont rien à voir avec les valeurs que nous défendons.

Pourtant, la qualité des interventions, et les échanges, qui, depuis plusieurs semaines, ont opposé nos collaborateurs, Pierre Caspi, Jérôme Manouchian, Brigitte Bré Bayle, Marie Perret, mais aussi nos lecteurs comme René Petitprêtre, Stéphane Arlen, Louis Peretz, Pierre Montagnon ou Michel Naud permettent de commencer à clarifier les choses.

Certains s'opposent à l'interdiction du voile intégral dans la rue, argumentant que cela serait une position liberticide qui ne correspond pas à sa définition de la liberté et de la laïcité.

D'autres affirment que cela ne serait pas une position laïque, sans dire pour autant s'ils sont favorables à cette position, quand elle est défendue par des arguments féministes, telles que le développe Lutte Ouvrière, par exemple.

On se souvient que le mouvement d'Arlette Laguiller avait soutenu la bataille pour une loi contre les signes religieux à l'école, tout comme l'Ufal, mais avec des arguments différents, l'organisation trotskiste ne prononçant jamais le mot de laïcité, contrairement à d'autres organisations.

Cela n'avait pas empêché les militants de lutter ensemble, dans des débats parfois animés à la fête de Lutte ouvrière ou ailleurs, contre les islamogauchistes qui voyaient dans la loi du racisme.

Pourquoi cela serait-il impossible aujourd'hui ?

Mais pour cela, il faudrait que les camarades qui contestent le côté laïque de ces revendications répondent précisément aux trois questions évoquées par Pierre Caspi (Respublica 486).

Pensent-ils que s'opposer au voile intégral dans la rue, comme le réclame certaines féministes, est une position non laïque, et liberticide ?

Pensent-ils que le voile à l'université est légitime, sous prétexte que les étudiantes sont majeures ?

Pensent-ils, après l'affaire du gite des Vosges, qu'un lieu où des citoyens souhaitent se retrouver en paix (gite, restaurant, hôtel, etc.) doit tolérer des tenues qui sont une offense pour la dignité de la femme ? La propriétaire, Fanny Truchelut, a-t-elle eu tort de demander aux locataires de retirer leur voile ?

La sémantique, même si elle est utile pour affiner certains concepts, n'est donc pas l'essentiel du débat.

Au nom d'une conception " puriste " de la laïcité, sommes-nous prêts à laisser l'espace public envahi par une démonstration religieuse de plus en plus insupportable, ou bien pensons-nous qu'il faut légiférer contre cela, en s'appuyant sur d'autres concepts que la laïcité ?

Voilà le vrai débat qu'il faut approfondir : dans quel type de société avons-nous envie de vivre ?

Pierre Cassen

4.2 - Je partage la définition de Jérôme Manouchian sur la laïcité

Bonjour Jerôme,

Voulant illustrer "la confusion dans laquelle le mouvement laïque a sombré[1]", tu précises: "Je n'ai jamais dit que la revendication d'interdire les signes religieux dans la rue ne méritait pas d'être discuté. Ce que je dis, c'est que cela ne peut pas se faire au nom de la laïcité. Certains camarades défendent cette position au nom du trouble à l'ordre public. Cela mérite débat comme toute autre proposition. Mais cela ne peut pas se faire au nom du concept de laïcité à qui on dénaturerait son contenu."

Je suis d'accord intégralement sur ta qualification et je voudrais ajouter que si confusion il y a (et je suis d'accord sur cette qualification) il ne faut pas laisser croire que cette confusion serait récente. De même, il ne faudrait pas croire non plus qu'à l'échelle de notre continent, la conception de la laïcité que je défends, comme toi dans ce paragraphe, est majoritaire, en France et en Europe.

Comme tu le sais probablement, dans beaucoup de pays (Belgique ou Norvège, par exemple, pour parler de pays ou le "mouvement laïque" est fortement structuré et financé par l'Etat, en tant que courant de conviction, au même titre que les religions) les mouvements dits "laïques" ne sont, en fait, que la représentation institutionnelle... de l'incroyance... Ainsi, de façon significative, les causes qui mobilisent la plus grande part de leur énergie sont celles de la lutte (méritoire) contre les discriminations qui frapperaient des incroyants, et la revendication (que je ne partage pas) que ces incroyants, sous la dénomination "laïque", soient invités aux côtés des évêques, rabbins et autres imams dans les tours de table de la "démocratie participative" (cela est parfaitement clair avec le rôle que joue la fédération humaniste européenne avec les institutions européennes de Bruxelles)... cela est bel et bien d'un tout autre registre que celui de la "laïcité républicaine".

En France même, de large courants se comportent en pratique de cette façon, notamment, mais pas exclusivement, au sein des courants héritiers de la pensée communiste (" orthodoxe " ou " hétérodoxes ") ; en pratique je pense même qu'il est lucide de penser que lorsque les rues de nos villes débordent (à notre grande satisfaction) de citoyens et de citoyennes réclamant que les fonds publics ne doivent aller qu'aux écoles publiques, la majorité de celles et ceux qui se mobilisent ne le fait pas au nom de la " laïcité républicaine ", de la séparation des églises (et idéologies) et l'Etat, mais bel et bien pour défendre " leur " école, suivant la posture symétrique de celle de l'agriculteur qui fut un temps mon voisin quand j'ai résidé dans le Maine et Loire profond et qui appelait l'école publique du village où étudiaient nos enfants " l'école du diable ".

Je pense que, même s'ils ne partagent pas les prémisses de sa phrase, beaucoup de citoyens et de citoyennes qui se mobilisent quand l'école publique est menacée partagent en fait la posture d'Arlette Laguiller quand elle déclare[2] : " Etant communiste, je suis athée et je considère que la religion est une affaire privée.

Je trouve particulièrement choquant que l'Etat entretienne financièrement les différentes églises sur l'argent de la collectivité, qu'il s'agisse des salaires des ministres du culte en Alsace-Lorraine ou, plus généralement, de subventions accordées aux écoles confessionnelles ". De façon évidente, si Lutte Ouvrière entre bien en convergence avec celles et ceux qui défendent la " laïcité républicaine "b(et je m'en félicite), il s'agit bel et bien d'une " mise en convergence " et non d'une " identité de vue ".

D'ailleurs Arlette le dit elle-même quand elle affirme, à propos de son engagement, que " ce n'est pas tant au nom d'une laïcité illusoire que parce que je milite contre l'obscurantisme et pense que l'argent public doit aller aux services publics ". Sophie Gargan défendait la même orientation dans son argumentaire contre le port public (y compris dans la rue) du voile islamique[3] : "Ce n'est pas à la laïcité qu'il faut principalement penser mais à la défense des femmes. Pour elles, le voile islamique est plus qu'une contrainte vestimentaire, c'est la marque d'une oppression et, à ce titre, c'est une infamie". (si je pointe ces propos de LO c'est que, contrairement à beaucoup de militants au PCF par exemple, LO expose en toute clarté la problématique que tu soulèves sur ce qui est du champ de la laïcité et ce qui ne l'est pas, pour leurs positions propres ... en fait LO n'est pas "laïque" parce que pour eux la république et sa laïcité sont des expressions de la bourgeoisie, éclairée certes, mais appelée à disparaître, avec les obscurantismes religieux, dans les poubelles de l'histoire ...)

Je me risquerais même à avancer l'hypothèse que le succès du concept de " laïcité ouverte " aussi bien auprès des religions organisées (typiquement l'église catholique romaine) qu'au sein de grandes organisations du " mouvement laïque " (typiquement la ligue de l'enseignement ou la fédération humaniste européenne) tient largement à cela ; l'idée du " grand service unifié de l'éducation nationale " en était une signature, tout comme, lors des débats sur la légitimité de l'interdiction du ports de signes religieux visibles dans les écoles publiques, lorsqu'une large fraction réclamait que cette loi s'applique aux écoles confessionnelles sous contrat au prétexte qu'elles bénéficient de fonds publics.

Donc, je suis d'accord avec toi, Jerôme : " rendons à la laïcité ce qui est à la laïcité " ... mais pourquoi viens-tu à ton tour subordonner la mobilisation pour la laïcité républicaine à ta propre perspective politique (sur laquelle, là, je ne te suivrai pas) : " Ce mode de pensée entraîne la confusion et ne permet pas d'élaborer des alternatives au turbocapitalisme et de rassembler sur longue période les militants pour y parvenir. " ... ?

Amicalement,

Notes

[1] Cf. Utiliser un concept (la laïcité) sans le définir est une impasse théorique et pratique, par Jérôme Manouchian, Respublica 489

[2] propos repris sur http://vigilance-laique.over-blog.com/categorie-778119.html

[3] propos repris sur http://brightsfrance.free.fr/phpBB2/viewtopic.php?t=249&start=1

Michel Naud Initiateur du réseau brightsfrance.free.fr/

4.3 - Préserver la sphère publique des religions

Cher Evariste,

Dans le numéro 488 de Respublica, Jérôme Manouchian signe un article étonnant.

Après avoir fort justement rappelé que le principe de laïcité implique une séparation de la sphère privée et de la sphère publique, il mélange les deux sphères en écrivant : "la rue est comme chacun sait (!?) un espace public relevant de la sphère privée" Ou même : "la rue, sphère privée par excellence".

Ne pas donner aux mots leur sens précis, disait à peu près Albert Camus, est le commencement du malheur. Essayons donc de définir les deux adjectifs, "privé" et "public":

De la façon la plus générale, est privé ce qui m'appartient en propre, et public ce qui appartient à tous. Si nous retenons cette définition, la rue (la voie publique) n'a rien à voir avec la sphère privée.

Ma sphère privée, c'est mon domicile et mes biens personnels, ma conscience ou ma foi. La République me garantit tout cela. Mais elle m'interdit en échange, dans le principe, d'exhiber en public des signes religieux ou philosophiques qui pourraient heurter d'autres consciences. Rien n'est plus clair, à cet égard, que l'esprit de l'article 28 de la loi de séparation de décembre 1905 : " Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer quelque signe religieux que ce soit ... en quelque emplacement public que ce soit. "

Lorsqu'en France intervint la première séparation de l'Eglise et de l'Etat, en 1795, toute cérémonie religieuse fut interdite en dehors des églises, et les prêtres ne purent porter l'habit ecclésiastique que dans leurs lieux de culte.

Tel est l'esprit le plus pur de la laïcité : Il a subi depuis deux siècles bien des avatars, (notamment napoléoniens) et souffre aujourd'hui encore de quelques séquelles.

Nous refusons les insignes religieux " ostentatoires " dans l'école publique et les acceptons dans la rue. Où est la cohérence ? Le voile, symbole de soumission féminine, est-il moins symbolique dans la rue qu'à l'école ? La kippa est également la marque d'une religion sexiste. Je préfèrerais qu'elle fût portée à la maison ou dans la synagogue, plutôt que sous mes yeux.

Faut-il défendre la laïcité ou combattre les religions ? C'est un faux dilemme. La laïcité respecte les religions dans leur domaine privé, mais exige des croyances qu'elles ne débordent pas dans le domaine public. ( le domaine public étant, redisons-le si nécessaire, celui qui est utilisé par tous ). Cette simple discipline ne serait pas si harassante, si quelques-uns ne se prétendaient pas éclairés par le Ciel.

Bien cordialement,

Pierre Montagnon

5 - Débat autour du soutien à Robert Redeker

5.1 - Soutien à Robert Redeker

L'Assemblée générale de la FGRFP 69 réunie le 14 novembre à LYON a décidé d'envoyer une motion de soutien à monsieur REDEKER, professeur menacé de mort dans son lycée et à son domicile par des islamistes intégristes anonymes en raison du contenu de déclarations faites par monsieur REDEKER publiées par le quotidien Le Figaro.

Voici le contenu de cette motion :

"L'Assemblée Générale de la Fédération Générale des Retraités de la Fonction Publique du Rhône du 14 novembre 2006 constate que le professeur REDEKER menacé de mort vit caché sous la protection de la gendarmerie, privé de son droit d'exercer son métier, et n'a pas pu rester en fonction auprès des élèves de son lycée toulousain.

Le professeur n'est sous le coup d'aucune faute professionnelle, d'aucune poursuite au civil ou au pénal pour la moindre faute qu'il aurait pu commettre au regard de la loi républicaine. Il s'exprimait en dehors de son service d'enseignant, dans la presse.

La République ne fait plus la loi lorsqu'un citoyen est empêché de se déplacer librement, de faire son travail, d'exposer librement ses idées sans les imposer.

La FGRFP soutient moralement le professeur REDEKER, l'invite à résister aux pressions, à continuer à démontrer sa liberté de pensée sans se laisser museler par des menaces, et demande que le problème soit traité par les pouvoirs de la République qui doivent garantir la liberté de penser et de s'exprimer à tout citoyen dans le cadre de la loi française et européenne, seules légitimes."

Ce texte signé du secrétaire général au nom de la FGRFP 69 sera envoyé à l'intéressé, au Président de la République, et au Premier Ministre.

Signer la pétition : petitionredeker.info

Claude Barratier

5.2 - Lettre à Mohamed Sifaoui

Cher Monsieur Sifaoui,

Je suis chroniqueur, auteur, et j'écris depuis des années sur la question de l'islamisme, des articles, chroniques, ...

Hier encore, je donnais un séminaire à l'université, à Casablanca, où j'ai pu parler à des étudiants de choses qui touchent à la philosophie, l'Occident, l'Islam, la peur, la question de l'Autre, et bien sûr, à la question du terrorisme, comme d'autres, des amis, qui tentent de créer des passerelles, aussi fragiles soient-elles, entre le Monde Arabo-Musulman et ce qu'on appelle l'Occident.

Depuis des années, j'écris afin de condamner l'islamisme.

Monsieur Sifaoui (Cf. Pourquoi je soutiens Robert Redeker ?), lorsqu'un intellectuel - je prends le cas du Maroc, tente de dénoncer l'islamisme dans les grands médias français, ce que j'ai tenté de faire, ces écrits ne sont jamais publiés, pour des raisons que je ne veux même pas connaître ! Chapelles ? Désir d'expertise ? Parts de marché non-négociable sur la question de l'islamisme ? Allez donc savoir !

Ici, à Casa, pour m'en être pris à Tarek Ramadan, le pressant d'encourager les jeunes musulmanes de France à préférer l'école au voile, au nom de cette phrase du Coran qui veut que "L'encre de l'érudit a plus de valeur que le sang du martyr", ce ne sont pas dix, mais cents lettres d'insultes, de menaces, que j'ai reçues, pour avoir trahi, ce qui n'est même plus l'islam, mais "La Cause", et le champion à l'âme immaculée : Frère Tarek !

Quand, encore une fois, j'adjurai que l'on n'invite pas ce salaud de Dieudonné, on me traita d'enrôlé par les sionistes, me demandant combien j'avais été payé pour écrire que "le spectacle de Dieudo avait des relent de Nuit de Cristal, et du Céline de Bagatelles pour un massacre.

Lorsque, - j'insiste peut-être lourdement !, il y a quelques mois déjà, j'envoie un "Appel à ne pas mettre les formes avec les lapidateurs", au Monde, à Marianne, en réponse au même Ramadan, on me répond que le journal a des problèmes de pagination, que mon texte, certes formidable !, est peut-être un peu long ? Trop long, une réponse à un homme qui, lors d'un entretien avec un honorable quotidien Suisse, dit, littéralement que qu'il faut se rendre "audible" ? Que nous devons, sur la question du meurtre, modérer nos propos ?

Ici, tous les jours, je croise des hommes, habillés comme à Kaboul, qui pratique des arts martiaux, se gavent de récits épiques d'égorgement, ici, à Casa, en un lieu que l'on nomme Derb Ghallef, lieu où l'on peut acheter son spectacle de Gad piraté ou ses Nike Air, des DVD circulent, qui exhortent les foules à détester Juifs, Chrétien, Occidentaux, Homosexuels, Femmes non-voilées, Intellectuels par trop occidentalisés.

Ici, dans ce grand marché de la contrebande, des hommes à l'allure de Mollah Omar, n'ont plus peur d'arborer des couteaux pour le jour du Grand Egorgement. J'ai même, pour l'anecdote, assisté à une séance sur l'art d'enfoncer son couteau sans risquer que l'adversaire ne puisse s'en emparer !

Que dire de ces femmes, pourtant fièrement le "voile intégral" des Iraniennes, et qui, de l'intérieur de leur 4X4, vous toise comme si vous étiez de la race des insectes !

Alors ?

D'ici, donc, je vois et entends, hormis deux ou trois "spécialistes", des crétins Algériens, Marocains, et autres, oui des crétins à moustaches, formés à l'Islam des boucheries Hallal et devenus par un long travail qui relève davantage de l'art de découper du jarret, que de la chaire universitaire, des voix, qui parlent, à la télévision française pour les Musulmans ! Je veux encore croire que les médias de France et de Navarre n'opèrent pas une sélection avec pour critère la médiocrité et le ridicule...

Puisque vous, Monsieur Sifaoui, êtes un homme entendu, demandez-donc à vos amis qui vous respectent pour ce travail, -dangereux et essentiel, que vous avez entrepris de faire, de donner la parole aux intellectuels de mon pays, et des autres, bien sûr.

On serait surpris, en France, d'entendre et de lire ce que ces intelligences-là peuvent exprimer de refus de la Barbarie, et de volonté chevillée au corps, d'en découdre, pour en finir, avec ces salauds d'islamistes. Je suis prêt à venir en France, pour aider Redeker à sortir de chez lui, comme devraient le faire tous les intellectuels de France, au lieu de signifier à des délinquants que la terreur a définitivement vaincu !

Voilà, cher Monsieur Sifaoui, ce que je voulais vous dire, j'espère que ma parole ne restera pas sans écho, encore une fois.

Driss C. Jaydane Casablanca

6 - combat laïque

6.1 - La laïcité en Grande-Bretagne

Alors que le débat sur la laïcité et le communautarisme est d'actualité en France, il est loin d'en être autant en Grande-Bretagne. En tant que Française et ayant grandi dans une tradition de séparation des enseignements religieux et académiques, il me semble logique pour ne pas dire normal que la religion reste à la porte de l'école.

Je vis en Angleterre depuis trois ans et ai choisi d'envoyer mes enfants dans une école privée de Londres. Cette école suit le programme officiel et n'a pas de dénomination religieuse. Toutefois y sont dispenses des cours d'éducation religieuse au cours desquels les différentes religions sont abordées. Je pensais que l'intrusion de la religion à l'école anglaise s'arrêtait là. Mais quelle ne fut pas ma surprise de trouver quelques livres de lecture du programme officiel élaborés par l'université d'Oxford traiter des fêtes religieuses musulmanes. Il est intéressant de savoir que ces livres sont destinés à des enfants de 5 - 6 ans!

Alors qu'il est souvent difficile de trouver une place dans une bonne école publique à Londres, nombre de familles ne pouvant se permettre de payer les frais de scolarité exorbitants des écoles privées, se tourne vers des écoles catholiques gratuites. Ces écoles dispensent généralement des enseignements de bon niveau, mais exigent une implication de la famille dans la vie religieuse de l'école. Ainsi les enfants doivent en principe être baptisés et la présence à la messe dominicale est de rigueur.

Je constate malheureusement que la laïcité et l'égalité en Grande-Bretagne n'existent pas et je trouve choquante l'intrusion insidieuse de la religion à l'école, ce qui ne fait que promouvoir les communautarismes. Les attentats de Juillet 2005 à Londres constituent le reflet de l'échec de cette politique. La laïcité me semble être le seul rempart contre cette maladie!

Carole Biot-Stuart

6.2 - Un discours victimaire et anti-Républicain

Sadri Khiari, membre du mouvement des indigènes de la République, écrivait il y a seulement quelques mois, à l'occasion des manifestations anti-CPE, un texte légitimant les émeutes en banlieues de novembre 2005 et attribuant le succès de la mobilisation contre le CPE à " l'existence d'un champ politique Blanc ". Ce texte est disponible sur le site officiel du mouvement des indigènes.

Pour rappel, le mouvement des indigènes est né suite à la pétition " nous sommes les indigènes de la République ! " publiée sur le site islamiste Oumma.com en janvier 2005. Cette pétition met sur le même plan les discriminations ethniques et sociales à l'embauche et au logement (qui existent dans la société française et doivent être combattues) et le colonialisme qui est une doctrine prônant l'exploitation et la mise sous tutelle de territoires étrangers par la force, ce qui est un amalgame honteux et grossier. Le mouvement des indigènes s'approprie une souffrance qui n'est pas la sienne c'est à dire celle des victimes du colonialisme. Non seulement c'est déplacé et c'est banaliser le colonialisme mais c'est aussi jouer dangereusement avec l'Histoire. Nul doute que les véritables victimes des crimes coloniaux doivent se retourner dans leur tombe.

Les émeutes de novembre 2005 : une " lutte " ?

Dans le texte publié sur le site des indigènes, Sadri Khiari met les récentes mobilisations contre la loi Fillon et le TCE sur un pied d'égalité avec les émeutes en banlieues de novembre 2005. Pour lui, " Le soulèvement des quartiers populaires " fait partie " des grandes luttes de l'année passée " Une manifestation n'a pourtant rien d'analogue avec une émeute. Les mobilisations contre la loi Fillon et contre le TCE ne peuvent pas être mises au même niveau que les émeutes de novembre 2005 : - Si une manifestation est organisée et encadrée par des syndicats ou des fédérations, une émeute ne l'est pas. Les émeutes de novembre 2005 n'étaient ni planifiées ni organisées ce qui est pourtant la base de toute mobilisation politique. - Si descendre dans la rue pour manifester pacifiquement est un droit dans toute démocratie, la dégradation et le saccage de bâtiments publics et des biens d'autrui, l'incendie d'écoles, les tentatives d'homicide envers des fonctionnaires de l'Etat ne sont pas un droit et n'en seront jamais un, et cela, quelque soit les raisons qui ont poussé à cette violence. - Si, lorsqu'on manifeste dans la rue c'est pour revendiquer ou afficher son désaccord avec la politique menée par un Gouvernement, quelles étaient au juste les revendications des émeutiers au cours des violences de l'automne dernier ? A-t-on seulement vu des meneurs émerger parmi les émeutiers et émettre des revendications ? Non. Rappelons que, à part à Aulnay-sous-bois où des explications sur les circonstances entourant la mort des deux jeunes électrocutés ont été exigées, les émeutiers ont brillé par l'absence de revendications. Pendant trois semaines qui n'auront été rien d'autre que chaos et désordre absolu (et pas une " lutte "), les émeutiers ont démontré qu'ils n'avaient aucune conscience politique.

Suite de l'article

Caroline Brancher

Source : www.prochoix.org

7 - à lire

7.1 - Critique du livre "Immigration, sortir du chaos" de Maxime Tandonnet, 1ère partie

L'immigration, ce n'est pas un slogan,

"L'immigration est une richesse", ce slogan me fait sourire: richesse pour qui? Pour les immigrés (avec ou sans contrat) qui sont employés à bas prix (et dont l'emploi pèse sur les salaires des ouvriers, employés déjà installés?)

Ou pour les actionnaires de ces entreprises qui utilisent les délocalisations dans les deux sens (en faisant venir, en employant au noir)?

Cette question, liée au TCE est un enjeu politique majeur pour le vote de 2007, il sera au coeur de la campagne électorale, il faut en être conscient.

Cette question n'est guère évoquée dans le livre (par ailleurs intéressant) parce qu'il critique très vivement les politiques, de droite comme de gauche, menées sur l'immigration.

Du discours de Rocard : "La France ne peut accueillir toute la misère du monde" on n'a retenu que cette phrase et les élites "ont broyé déchiqueté ces propos" dit l'auteur du livre. Il ajoute. L'idéologie dominante étant "le culte de l'ouverture". Pourtant, Rocard disait encore : "Nous ne pouvons en effet recevoir un flux massif et INCONTROLE sans que cela n'hypothèque gravement et tout ensemble l'équilibre social de la NATION, et ensuite les chances d'intégration des étrangers installés. Nous sommes également à la veille, si nous n'y prenons garde, d'une nouvelle vague massive, venant d'un Sud plus lointain, d'un Est plus incertain". Il faut bien reconnaïtre que Rocard avait vu juste...

"Qui oserait, aujourd'hui, dans la classe dirigeante, prononcer de telles paroles?" dit l'auteur du livre.

Car la droite et la gauche ont la même politique d'ouverture à l'immigration mais avec des motivations (réelles ou seulement "affichées"?) différentes:

la Gauche:

La Droite:

elle, est favorable à une immigration choisie: son objectif est de limiter l'immigration, de régulariser au cas par cas, de limiter le regroupement familial etc.

Mais cette immigration choisie (c'est moi qui parle) c'est un scandale !

C'est "le pillage des cerveaux. C'est ainsi que l'on va vider l'Afrique de ses étudiants, de ses intellectuels, de ses informaticiens, de ses mèdecins les plus doués pour les besoins de leur économie" (l'économie des pays occidentaux)

Mais cette politique de l'immigration a AUSSI été utilisée par la Gauche!

Ainsi Lionel Jospin disait (4 décembre 2001): "Il n'y pas de fuite de cerveaux, il y a une circulation des cerveaux. Celle-ci est naturelle et même SOUHAITABLE"

Et maintenant, la Gauche pousse de grands cris avec "l'immigration choisie" de la droite?

"La question de l'immigration est le lieu où s'exprime dans toute sa profondeur la coupure entre les ELITES et la NATION" dit l'auteur.

Les phénomènes migratoires sont en augmentation : 60% des migrants sont installés dans les pays les plus riches du monde .

L'auteur, dans un chapitre, reprend l'explication des 3 D: écarts de Développement, Démographie et Démocratie

Développement :

150 Millions d'hommes vivent avec moins de 1 dollar par jour. Ils sont en majorité dans les pays du SUD

Démographie:

Démocratie:

" Les citoyens veulent aujourd'hui profiter d'un bon système scolaire et d'un travail décent. Ils veulent pouvoir exprimer leur OPINION n'ayant pas réussi à contester les cultures conservatrices dans leur pays " ( discours de Mr Ould Abdallah, envoyé spécial de l'ONU Avril 2006 )

On peut objecter (c'est moi qui parle) que les migrants devraient mener la lutte dans leur PROPRE pays! qui ne sont pas TOUS pauvres, et risquent de s'appauvrir encore plus s'ils le quittent! Ainsi les étudiants formés dans les Universités occidentales, qui seraient bien utiles dans leur pays, préfèrent rester dans ces pays occidentaux plutôt que retourner dans leur pays :

600 médecins formés en Zambie et 50 seulement restés au pays

1200 médecins formés au Zimbabwe et 350 restés au pays .

"La migration, encensée par les élites du monde occidental comme la voie idéale vers un monde meilleur est devenue une des CAUSES de la MISERE et de la détresse" dit justement Maxime Tandonnet .

(ce livre est condensé mais très riche et nécessite un 2e article)

Mireille Popelin

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