Chronique d'Evariste
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Troque montre bling-bling contre bâton de pèlerin

par Évariste
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Un ami républicain de gauche me disait hier en rigolant que si d’aventure un institut de sondage lui téléphonait, il répondrait qu’il voterait Marine Le Pen en 2012. Joignant le geste à la parole, il ajouta : “c’est en ce moment la meilleure façon de faire un bras d’honneur à l’Elysée”. Les sondeurs partent du principe que plus d’une personne interrogée sur deux n’ose pas avouer son intention de voter Front National. Ils doublent donc mécaniquement le résultat obtenu. Peut-être seraient-ils bien avisés de faire, au contraire, une opération de division : il est fort possible que, parmi les personnes interrogées, certaines, à l’instar de mon ami, déclarent leur intention de voter pour le Front National tout en sachant pertinemment qu’elles n’en feront rien. Après tout, Ipsos et compagnie ne sondent ni les reins, ni les coeurs : mentir aux instituts de sondage est un petit plaisir qu’on peut encore s’offrir. “Schadenfreude” disent les allemands : il faut bien avouer que le spectacle des journalistes, experts, et commentateurs qui s’agitent depuis le début de la semaine et qui s’entre-commentent a quelque chose de réjouissant. C’est comme si un malin génie avait donné un coup de pied dans la fourmilière.
Nul doute que depuis l’Elysée, on a vu venir la montée de Marine Le Pen. Quelques jours avant la publication du sondage de l’Institut Harris Interactive, l’aiguille de la boussole commençait déjà à s’affoler. On a pu voir ainsi Sarkozy, conseiller par Patrick Buisson, perdre le Nord au Puy-en-Velay. A moins qu’il n’ait révélé son vrai visage : celui d’un opportuniste prêt à tout pour sortir du marasme.
Un opportuniste qui est d’abord prêt à sacrifier le principe de laïcité pour reconquérir l’électorat de la droite catholique. Le voilà qui prend des airs d’enfant de choeur et qui nous refait le coup du calamiteux discours de Latran. “La chrétienté nous a laissé un magnifique héritage de civilisation et de culture. C’est la France, la France que nous aimons, la France dont nous sommes fiers, la France qui a des racines.
J’entends d’ici les faux ingénus faire la leçon aux rigides laïcards : “N’exagérons rien : c’est un fait que l’histoire de la France a été marquée par le christianisme. Ce n’est tout de même pas attenter à la laïcité que de rappeler les racines chrétiennes de la France !”.
Nul ne saurait nier que l’histoire de la France soit partie liée à celle du christianisme. Il faudrait du reste ajouter : pour le meilleur, mais aussi pour le pire. Nul ne saurait non plus contester que la culture chrétienne a produit des oeuvres remarquables. Il est permis d’admirer l’architecture de Notre-Dame. Le problème est qu’en disant cela, Sarkozy joue sur l’équivocité du mot “France”. La “France” n’est pas seulement le nom d’un pays localisable géographiquement et déterminé par une histoire. Ce n’est pas seulement le nom d’une culture, caractérisée par ses moeurs pittoresques, sa gastronomie ou son “génie”. Lorsqu’on emploie le mot “France”, on ne peut pas faire comme si le terme ne désignait pas aussi un construction politique, à savoir la République. Surtout quand on en est le président. Surtout quand on est supposé représenter, non une communauté géographique, historique ou culturelle déterminée, mais le corps politique des citoyens.
N’en déplaise à M. Sarkozy, la République n’a pas de “racines” : elle se fonde sur des principes. On ne peut l’enfermer dans une quelconque “identité” : la République n’est pas référable à des particularismes. La force et l’originalité du modèle politique qui la sous-tend est précisément de définir le citoyen comme un pur concept, comme un pur sujet de droits. Le clocher du village, les fromages odorants, la truculence rabelaisienne, les vieilles DS, autant d‘images chatoyantes qu’il faut remettre à leur place : précisément, celle de l’imaginaire. La psychanalyse freudienne a produit le concept d’ “identifications imaginaires”. Chacun a les siennes. Et chacun peut découvrir, pour peu qu’il consente à un travail d’analyse, à quel point elles sont fragiles.
En faisant l’éloge de la France qu’il aime, la France chrétienne, Nicolas Sarkozy espère reconquérir les électeurs catholiques. Jacob et Wauquiez sont chargés quant à eux de faire la danse du ventre à la frange la plus radicalisée de cet électorat. Alors qu’il accompagnait le président dans son déplacement au Puy-en-Velay, Wauquiez s’est fendu d’un curieux commentaire. “Dominique Strauss-Kahn, c’est Washington, Dominique Strauss-Kahn, c’est sûrement une très belle maison qui donne sur le Potomac. C’est pas la Haute-Loire et c’est pas ces racines-là [sic]”. C’est vrai, ça : Strauss-Kahn, ça fait pas vraiment France profonde, ce nom-là. Encore un qui n’a pas dû souvent sentir la bonne terre de France lui coller aux semelles. Encore un déraciné, un type urbanisé qui se sent mieux dans les villes cosmopolites que dans les terroirs. J’entends déjà les vierges offensées : “c’est tout de même un peu fort, alors, comme ça, on n’a pas de droit de dire que Strauss-Kahn n’a jamais vécu en Haute-Loire et qu’il ne fait pas vraiment France rurale ?”. Le déraciné contre le Français solidement enraciné dans le terroir, le citadin contre le paysan : major à l’agrégation d’Histoire, Wauquiez ne peut pas ignorer les accents très maurrassiens d’une telle rhétorique.
Lors de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy avait joué la carte du discours républicain. Discours de pur façade puisque toute sa politique a consisté, ensuite, à démanteler pièce par pièce, le modèle républicain. Son action aura eu au moins le mérite de la cohérence : d’une main il a détruit la République laïque, de l’autre, la République sociale.

A l’approche de 2012, il joue cette fois-ci la carte de la “droite décomplexée”. Désormais, on sait au moins ce que signifie l’expression : la droite décomplexée est tout bonnement une droite qui ne craint plus de renouer avec la rhétorique maurrassienne en faisant l’éloge du “pays réel” contre le “pays légal”. Une droite qui considère qu’Eric Zemmour est l’exemple même du courage politique.

Catastrophe au Japon
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La nécessité d’un choix public raisonné sur l’énergie illustrée par la catastrophe japonaise

par Monique Vézinet
Présidente de l'UFAL
http://www.ufal.org

Source de l'article

 

À l’heure où la situation semble désespérée à la centrale de Fukushima, que le nombre des victimes n’est pas encore connu et que des centaines de milliers de personnes subissent encore les conséquences d’une catastrophe naturelle sans précédent, l’UFAL tient à apporter tout son soutien au peuple japonais.

Le Japon traverse un drame humain sans nom. Le tremblement de terre suivi d’un tsunami a causé un nombre considérable de victimes, une pollution chimique effective, d’énormes dégâts, et au final une des plus grandes catastrophes nucléaires de notre époque.

L’UFAL dans un communiqué de presse daté du 14 mars, a tenu à rappeler que respecter le peuple japonais, c’était ne pas instrumentaliser la catastrophe actuelle en la réduisant à sa seule dimension nucléaire alors que des milliers de personnes sont portées disparues et que des centaines de milliers d’autres ont vu leur habitation détruite et sont privées du nécessaire. Six jours après le séisme et le tsunami, l’heure est toujours à la solidarité envers le peuple japonais.

Néanmoins, il faut lever les possibles incompréhensions et être clair : l’UFAL considère le débat sur les choix énergétiques d’autant plus indispensable qu’il touche au cœur de la société capitaliste et productiviste dans laquelle nous vivons. Or ce débat mérite mieux que de réagir à chaud, quelle que soit notre légitime émotion devant la catastrophe japonaise. Le respect des principes républicains appelle à ce que le débat démocratique se fasse dans un cadre qui privilégie la raison et non les peurs. Passée la phase d’urgence du drame de Fukushima, un bilan global doit être établi.

Attachée à une conception républicaine et laïque de la société, l’UFAL rappelle qu’elle est indépendante de tout groupe de pression, notamment « pro » ou « anti » nucléaire. Dans cette optique, elle a choisi d’être un lieu de débats et d’échanges sur nombre de domaines touchant notre société, y compris sur la question de l’écologie et les choix de développement de notre société ; sujets incluant de facto la gestion et la production de l’énergie, ainsi que la surconsommation.

L’UFAL soutient que seul un service public digne de ce nom est apte et légitime à gérer la production de l’énergie, car l’énergie est un bien commun essentiel à l’ensemble de la société.
Le nucléaire ne doit pas être confié au privé comme c’est le cas au Japon et en France, avec toutes les dérives qui sont révélées aujourd’hui (primauté de l’objectif de rentabilité entraînant opacité, dissimulations, réduction des dépenses de maintenance et recours à la sous-traitance, manque de qualification du personnel, etc.).

Par ailleurs, le débat au sein de l’UFAL sur les questions de l’énergie n’exclut absolument aucune voie, y compris celle de la sortie programmée de l’électro-nucléaire et de son remplacement par d’autres sources d’énergie qui n’épuisent pas et polluent moins la planète, accompagné du développement de l’efficacité énergétique. Mais sortir ou non de l’électro-nucléaire implique des choix de société qu’il faudra exposer, développer et argumenter pour que chacun, en s’en saisissant pleinement, ait conscience du projet commun de société à établir. Rappeler et exiger la tenue et les conditions rationnelles d’un tel débat est une responsabilité politique majeure.

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Un livre salutaire : "Désobéissons à l'Union européenne"

par Bernard Teper

 

Aurélien Bernier sort beaucoup de livres. Beaucoup donnent des informations, voire des idées, mais peu explorent de nouveaux chemins pour l’émancipation. Son livre1 est de cette dernière trempe. Déjà, il nous avait habitué à cela sur l’écologie dans sa critique féroce, tant du discours productiviste et “croissancielle” que dans celui du discours écologique traditionnel et “décroissancielle”. Sans s’arrêter aux mirages de l’écologie politique qui ne font que reprendre les idéologies éculées du désir et du bonheur du milieu du 19 ème siècle, il a commencé à baliser un discours émancipateur avec le concept d’écologie républicaine; à partir duquel nous devons aller encore plus loin!

Cette fois-ci, il défriche un nouveau chemin en partant des discours de l’Union européenne. Dans une première partie, il montre la genèse de l’Union européenne et de quelle manière la contre-révolution néolibérale part de très loin: c’est-à-dire tout de suite après la Libération du nazisme qui a permis le Programme du Conseil National de la Résistance. Les revanchards sont tout de suite partis en campagne (Société du Mont pélerin en 1947, déclaration Schumann en 1950) pour aboutir au marché commun déjà très bien analysé par Pierre Mendès-France le 18 janvier 1957. Cette partie permet de tordre le coup à ceux qui, dans la gauche radicale, n’ont vu le caractère négatif de ce qui deviendra l’Union européenne que dans l’Acte unique européen, quand ce n’est pas après 2002!

Dans sa deuxième partie, il montre comment le verrouillage de l’Union européenne empêche toute autre politique que celle du turbocapitalisme avec son libre-change, son néolibéralisme sauvage, sa théorie ordo-libérale, etc.

Dans une troisième partie, il montre comment la droite, les écologistes et le PS se piègent eux-mêmes avec le mythe européen. Il montre aussi que tous ceux qui, dans la gauche radicale, veulent changer l’Union européenne de l’intérieur avec des slogans de type “Changer d’Europe” ou “Europe sociale” (majorité des altermondialistes, PCF notamment) sont dans une impasse, faisant croire qu’il suffit que le mouvement d’en bas submerge le mouvement d’en haut, alors que le mouvement d’en bas ne peut que déclencher le processus de transformation sociale et non le mener à terme, et qu’ il faut une dialectique entre ces mouvements. C’est d’ailleurs ce qui se met en place en Tunisie ou en Égypte. Il montre enfin qu’au NPA et au PG se développe une trop timide politique de rupture mais qui n’ose pas aller jusqu’au bout tant la vieille idéologie est encore là.

Dans sa dernière partie (le chapitre 3), il esquisse ce qui lui semble l’alternative. Comme on ne peut pas réformer de l’intérieur l’Union européenne, il donne une voie pour aller de l’avant et esquisse ce que pourrait être une politique de désobéissance européenne. Il critique au passage ceux qui, y compris dans sa propre organisation, prônent la sortie de l’euro et/où de l’Union européenne comme inopérante, et moins percutante que sa proposition de désobéissance européenne.

Il propose l’ouverture d’une période de tension avec l’Union européenne à partir d’un référendum “d’inversion des normes”, qui permettrait que le droit national prime sur le droit de l’Union européenne; puis il donne quelques exemples d’action et analyse les réactions possibles des néolibéraux. Il fait la différence entre désobéissance civile et européenne en montrant l’essence républicaine de la désobéissance européenne. Il montre que celle-ci n’est pas un repli frileux mais est en lien avec l’internationalisme.

Le livre d’Aurélien Bernier est salutaire, car on comprend pourquoi aujourd’hui le Front national et son idéologie régressive nauséabonde reprend force devant tant d’impasses à gauche et à l’extrême gauche.

Le livre d’Aurélien Bernier est salutaire grâce à ses critiques justes et pertinentes contre les idéologies ambiantes chez les écologistes, les socialistes et même dans la gauche radicale.

Mais, il y a un mais… Il oublie de traiter un point de stratégie politique préalable. Il écrit page 109 “Pour un gouvernement de gauche radicale qui serait élu en France […]”, page 111 et 112 “ La tâche prioritaire d’un gouvernement de gauche radicale sera […]”. Le problème est de définir le chemin pour aller à ce gouvernement de gauche radicale.

2012? Aurélien Bernier nous propose la phase 2 sans nous dire comment on fait dans la phase 1. Là, il faut articuler politiquement la question sociologique (retisser pour la gauche des liens sociaux et politiques avec les couches populaires ouvriers et employés représentant 53% de la population), ainsi que la nouvelle géosociologie des territoires, les luttes sociales et l’insuffisant travail d’éducation populaire. Mais, là est une autre histoire qui va s’écrire indéniablement plus tard.

A chaque jour suffit sa peine. Si on est encore loin de la “coupe aux lèvres”, Aurélien Bernier a bien franchit une étape qui mériterait d’être franchie par d’autres pour aller ensemble plus loin. LISEZ SON LIVRE, INVITEZ-LE A DÉBATTRE, c’est un service que vous rendrez à “la cause” et qui lui permettra d’aller encore plus loin!

  1. Aux Editions mille et une nuits (4euros). []
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Non, mille fois non à Le Pen-la Haine

par Jean ESTIVILL
Conseiller Municipal, Président des élus du Parti de Gauche de Savigny, Président de l’Essonne de l’UFAL (Union des Associations des Familles Laïques)
http://www.savigny-egalite.com

 

Qui n’a pas compris que le Front National sert de « diable de confort » ? Comme la fable antidémocratique du « vote utile » ne marche plus on avance par tous les moyens le danger lepeniste et pour le contrer qu’il faudrait voter UMP ou PS ! Mais c’est jouer avec le Feu : la république et la démocratie ne peuvent être à la merci d’un tel mouvement dont on connaît les origines, les méthodes et la fonction.

En 1983 avec Jean-Luc Mélenchon et Gabriel Amard, nous manifestions dans l’Essonne, à Saint-Vrain, contre le meeting du Front National au cri de « hors de Saint-Vrain fils de Pétain ». Nous avions compris qu’après sa défaite en 1945 la « bête immonde » était de retour. Nous connaissions ces partis d’extrême droite, leurs méthodes, leur fonction, depuis toujours en Europe et dans le monde. Le fondateur du Front National, J.M. Le Pen, ne venait-il pas de donner un signe clair en éditant les disques des chants nazis. Oui nous connaissions ces partis de la haine, en France avant-guerre la haine des juifs, des Polonais, puis des Italiens, des Espagnols, des Portugais fuyant la misère ou leurs amis politiques, tour à tour Mussolini, Hitler, Salazar, Franco, et puis la haine des Maghrébins, des ressortissants plus récemment d’Afrique noire.

Aujourd’hui Madame Le Pen qui fait baptiser ses enfants dans une église illégalement occupée par ses sinistres amis catholiques intégristes a trouvé une nouvelle cible, les musulmans. Toujours la même méthode pour la même fonction. La haine de son voisin de palier coupable de tous les maux qui accablent notre société, pour dégager la responsabilité du capitalisme financier et du système social qui lui permet de prospérer. Ils veulent nous détourner de cette évidence : ce dernier est en train de « tiers-mondiser » notre pays, en le privant de tous ses services publics, en privatisant tout ce qui peut faire de l’argent : éducation, santé, sécurité, équipement, transports, énergie, quand a-t-on vu le Front National formuler une condamnation des contre-réformes contre les acquis sociaux comme celle sur la retraite, soutenir une seule grève de salariés, une seule lutte de petits commerçants, dénoncer la multiplication des CDD, ou avancer une proposition menaçant l’oligarchie en particulier celle du CAC 40 ? Rideau de fumée dérisoire que celui de l’extrême droite, mais aussi quel danger. La république sut résister à la famille politique de madame Le Pen en 1934, mais quelle revanche dès que la France fut occupée par les Allemands, Pétain put enfin abolir la République et toutes ses libertés.

Madame Le Pen veut jeter à l’eau les pauvres diables qui fuient les massacres dans leurs pays, comme sa famille politique le demandait pour les 400 000 réfugiés républicains espagnols décrétés « voyous rouges » en1939. Pétain en livra des milliers à la barbarie des camps de déportation nazie, mais des milliers purent participer à la résistance. Madame Le Pen croit-elle que les Français sont des analphabètes, sans mémoire, des républicains qu’on peut berner en jouant les laïques fraichement convertis comme elle tente de nous le faire croire dans son incroyable numéro politicien ? Il est vrai qu’il reste encore à reprendre aux Français la sécurité sociale dans son intégralité et le système hospitalier, l’école, ce qui reste du droit du travail et ce qui avait rendu fou de rage sa famille politique quand le FRONT POPULAIRE avait arraché, les congés payés, et puis avec les acquis sociaux les droits démocratiques obtenus de haute lutte comme l’IVG….

Et bien Madame Le Pen avec le FRONT DE GAUCHE, c’est un nouveau Front Populaire qui se met en marche. Il va vous en falloir faire des contorsions.

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Sarko, l'État et le tyran...

par Jean-Paul Beauquier

 

Un petit billet des Échos pose la question : « L’État, c’est qui ? » et dans la page voisine Roger-Pol Droit interroge : « Qu’est-ce qu’un tyran ? »

Le premier relève « la longue liste des professions régaliennes ulcérées par les mépris du pouvoir ». Par pouvoir , il faut entendre Sarko soi-même et subsidiairement ses chiens de meute et exécutants divers…
Citant le philosophe Marcel Gauchet, l’auteur du billet rajoute : « la plus grande faille de Nicolas Sarkozy, c’est qu’il n’a pas le sens de l’institution » et la conclusion, alors, coule de source : « l’État, ce n’est plus l’appareil d’État puisque celui-ci est dévalué par son propre chef. Mais ce ne peut être non plus le chef lui-même puisqu’il ne se conçoit pas comme étant à la tête d’une institution. »

Autrement dit la France n’a pas à sa tête un individu qui entre dans les catégories politiques normales dans un État démocratique, même marqué par la pensée libérale ou néo-libérale…

Car s’il est bien une question que les libéraux ont traitée, c’est bien de la légitimité d’un système politique qui fait vivre ensemble les agents d’une société par l’acceptation collective d’une « contractualité centrale » dont l’État est le garant.

Un chef d’État qui dénigre systématiquement sa fonction publique et qui effectivement n’a pas « le sens de l’institution » parce qu’il croit, peut-être, que la distinction classique entre « les deux corps du roi » ne fait plus sens, est confronté à une question que, visiblement, l’occupant de l’Élysée ne se pose pas, celle de sa légitimité réelle propre, son élection ne pouvant suffire à lui en assurer une puisque les citoyens ont cru élire un Président de la République…

Approfondissant une réflexion sur les bouleversements en cours au sud de la Méditerranée, R.-P. Droit élargit la réflexion à une analyse de la nature du tyran : « Pour comprendre la nature du tyran, lire Platon. Pour sa version moderne, ajouter le Père Ubu ».
Le plus bizarre est qu’il n’est pas besoin de forcer le trait pour reconnaître dans les travers de l’omni, hyper ou ego-président qui mène la France à la catastrophe, nombre de caractéristiques généralement consubstantielles à la fonction tyrannique.

Ainsi « ses caprices deviennent des lois, ses lubies des projets nationaux »… Le nombre de lois inapplicables et inappliquées, parce qu’elles furent votées à la sauvette par une majorité de godillots effarés, parce qu’elles étaient mal écrites, parce qu’elles sont contraires à des engagements internationaux, parce qu’elles étaient une réponse, dans l’urgence supposée d’un fait divers, un pur objet de communication est devenu impressionnant. Quant à celles qui ont pu passer le filtre du Conseil Constitutionnel, en attendant pour d’autres la réponse à une QPC, elles ont toutes une caractéristique commune, elles limitent les libertés individuelles et publiques, LOPPSi 2 n’étant que l’étape actuelle de cette démolition de l’éminente dignité du citoyen et de sa souveraineté, nécessairement supérieure à celle des élus assemblés, car elle est le fondement de la leur et qu’une délégation ne subordonne pas l’un aux autres.
R.-P. D. enchaîne : « Qu’est-ce qui fait d’Ubu un tyran moderne ? […] Son vocabulaire d’ordures, ses carnages au front bas ? Insuffisant […] La nouveauté d’Ubu est de relier « pompes à phynances » et « machine à décerveler »… »
Voilà qui peut faire penser aux amis du Fouquets, à l’EPAD, à TF1, à tous les éditocrates et experts stipendiés qui encombrent les émissions de radio ou de télé…

Peut-on conclure en citant encore une fois ce philosophe : « Les tyrans modernes connaissent en effet les mécanismes bancaires et outils de communication. Ils élaborent des montages financiers tout comme ils instrumentalisent les désirs de dignité, de liberté et d’indépendance » ?

Le nôtre y rajoute la peur des invasions incontrôlées, le spectre sécuritaire… Curieux que ce qui se passe au Sud n’interroge pas davantage nos « excellences » sur leurs pratiques. Corrompus ou ineptes, nos politiciens seraient-ils trop conscients d’une proximité de nature sinon d’intensité dans la méthode, ou inconscients au contraire des ravages continus que leur politique a déclenché dans l’esprit civique et le goût du vivre ensemble qui fonde les sociétés civilisées ?

« Ubu roi » a été écrit en 1896… Sacrée modernité, mais quelle régression dans la République!

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Débat national sur la laicité

par Jean Riedinger
Secrétaire de l'Observatoire Chrétien de la Laïcité

 

Aux instances dirigeantes des partis politiques français

Madame, Monsieur,

Sur proposition de M. Coppé, secrétaire général de l’UMP, M. Sarkozy, président de la République, a décidé d’organiser une réflexion nationale concernant la laïcité dans la France d’aujourd’hui. Nous craignons – vu le contexte – que cette décision soit prioritairement une façon d’interroger la place de l’Islam dans notre pays. Or de fausses inquiétudes sont délibérément entretenues – y compris par des responsables politiques éminents – et surtout par des tendances et des mouvements xénophobes, concernant les menaces que feraient planer nos concitoyens musulmans sur la culture française.

L’Observatoire Chrétien de la Laïcité (OCL) soutient qu’une réflexion sur la laïcité en 2011 ne saurait se confondre avec un combat contre une prétendue islamisation de la France ! Nous considérons que les croyants de l’Islam ont droit au même respect que les catholiques, les protestants, les juifs, les bouddhistes mais aussi les agnostiques ou les athées, etc., et que la loi doit les traiter également. Telle est la base du vivre ensemble, ainsi que la possibilité même d’une démocratie de citoyens.

Certes, la situation des convictions, qu’elles soient religieuses ou non, dans la société française d’aujourd’hui est différente de ce qu’elle était en 1905 au moment du vote de la loi de séparation, qui se voulut et fut, de fait, malgré certaines résistances conservatrices temporaires, une loi d’apaisement. Mais on ne saurait prétendre pour autant que le concept de laïcité est dépassé et que le toilettage de cette loi doit être envisagé !

L’OCL souligne que la loi de 1905, dans ses principes de base, reste d’actualité1. En effet les principes de liberté de conscience, de liberté des cultes, de non « reconnaissance » de ces derniers qui implique que l’État ne saurait les subventionner, sont à nos yeux toujours valables. Il n’y a donc aucune raison de mettre en cause ces fondements de la loi.

L’OCL souligne en particulier que, contrairement à certains arguments juridiquement erronés, garantir la liberté des cultes n’implique aucunement de fournir aux organisations religieuses – sur les deniers de l’État – les moyens matériels de fonctionner, mais affirme la reconnaissance du droit pour les citoyens qui le désirent de se rassembler à des fins cultuelles et religieuses. L’objet du verbe « garantir » dans l’article 1 de la loi n’est pas l’exercice des cultes lui-même, c’est-à-dire une activité dont l’État fournirait éventuellement les moyens, mais le libre exercice des cultes C’est la liberté de cet exercice qui est donc l’objet de la garantie. Ainsi la loi fonde à la fois l’indépendance de l’Etat à l’égard des religions et l’autonomie des religions à l’égard de l’Etat, dans les limites démocratiques du respect de l’ordre public.

On objecte souvent que les municipalités, les départements, l’État – selon le cas – ont en charge l’entretien des églises catholiques datant d’avant 1905. Cette décision a été prise conjoncturellement du fait du refus obstiné de l’Église catholique, à la différence des juifs et des protestants, d’entrer dans le cadre de la loi, et dans le souci de ne pas brimer les fidèles à cause de l’entêtement aveugle du Vatican.

Du fait de cette malheureuse exception, faudrait il donc revenir à une situation antérieure où l’État reconnaitrait de jure la qualité religieuse de telle ou telle organisation afin de subvenir à la construction de lieux de culte ? Cette situation est impensable au regard de ce qui devient de plus en plus une mosaïque de communautés, voire de chapelles ou de groupuscules, prêts pour certains à se faire « reconnaître » comme cultes pour en retirer des avantages financiers.

On peut au contraire souhaiter que, petit à petit, l’exception catholique soit en voie d’extinction du fait des nouvelles structures ecclésiastiques qui laissent vacantes et inoccupées de très nombreuses églises, souvent trésors du patrimoine culturel français, dont l’État et les collectivités territoriales sont propriétaires. Il reviendrait alors aux propriétaires de ces lieux de prendre en considération leur intérêt artistique, culturel, ou seulement architectural, pour aider à l’entretien de ce qui fut un lieu de culte attribué à l’Église catholique, en vue d’assurer divers services à la communauté citoyenne dans son ensemble. Ces lieux anciens, puisque construits avant 1905, ne seraient plus alors des lieux de culte, et pourraient être affectés à d’autres fonctions d’intérêt général.

Ce simple exemple montre que le « paysage » religieux en France en 2011 a profondément changé par rapport à celui qui prévalait au moment du vote de la loi de 1905. Le christianisme s’est diversifié, a parfois éclaté, des églises ou communautés nouvelles (évangéliques par exemples, progressistes ou intégristes en d’autres cas), des religions, comme les baha’is, les différentes écoles du bouddhisme, des communautés spirituelles très diverses, jusqu’à des mouvements ou groupuscules sectaires, sont apparus.

D’aucuns pensent néanmoins qu’il faudrait faire un geste particulier en faveur de nos concitoyens musulmans désormais très nombreux dans notre pays, et qui n’étaient pas pris en compte dans la loi de 1905. De plus en plus de musulmans vivant en France sont en accord avec ce passage du rapport de la commission Stasi:

“L’islam, religion la plus récemment implantée en France et qui compte de nombreux fidèles, est parfois présentée comme inconciliable avec la laïcité. Pourtant la théologie musulmane a produit, dans sa période la plus brillante, une réflexion novatrice sur le rapport entre politique et religion. Les courants les plus rationnels en son sein refusaient la confusion entre pouvoir politique et spirituel. La culture musulmane peut trouver dans son histoire les ressources lui permettant de s’accommoder d’un cadre laïque, de même que la laïcité peut permettre le plein épanouissement intellectuel de la pensée islamique à l’abri des contraintes du pouvoir.”

Dans le sens de la loi de 1905, il revient à toutes les Églises et institutions religieuses, d’envisager les moyens de leur propre financement. En ce qui concerne la construction des lieux de culte, des formules juridiques (telles que des fondations privées favorisant le recueil des fonds nécessaires) sont tout à fait envisageables. Il revient aux pouvoirs publics d’étudier, comme pour toute implantation architecturale nouvelle, les conditions urbanistiques d’implantation de ces lieux de culte. A ce propos, construire des minarets dans le cadre d’une mosquée n’a rien qui puisse choquer la culture française. Seuls quelques fanatiques irrationnels s’élèvent par exemple contre le minaret de la Grande mosquée de Paris.

Il devient d’autant plus impératif que l’État, tout en connaissant cette diversité, et sans oublier que de très nombreux Français athées ou agnostiques ne souhaitent pas que leurs impôts subventionnent des religions, se refuse à « reconnaître » quelque culte que ce soit sous aucun prétexte. Il n’a pas vocation à le faire, et nous ne voyons pas quels critères il pourrait se donner pour en décider.

Veiller à ce que des groupuscules prétendument religieux, voire des sectes n’attentent pas à la liberté des personnes ou ne servent pas de paravent à des manœuvres financières plus ou moins occultes ou à des crimes sexuels, par exemple – comme cela s’est vu – est en revanche de son rôle comme le soulignait très clairement le rapport de la commission Stasi:

“L’État laïque, garant de la liberté de conscience, outre la liberté de culte ou d’expression, protège l’individu : il permet librement à tous de choisir, ou non, une option spirituelle ou religieuse, d’en changer ou d’y renoncer. Il s’assure qu’aucun groupe, aucune communauté ne peut imposer à quiconque une appartenance ou une identité confessionnelle, en particulier en raison de ses origines. Il protège chacune et chacun contre toute pression, physique ou morale, exercée sous couvert de telle ou telle prescription spirituelle ou religieuse. La défense de la liberté de conscience individuelle contre tout prosélytisme vient aujourd’hui compléter les notions de séparation et de neutralité centrales dans la loi de 1905.”

C’est pourquoi nous sommes fermement attachés à l’école publique, creuset de citoyenneté. Nous voyons avec beaucoup d’inquiétude que la loi Debré qui a favorisé essentiellement les établissements catholiques sous contrat serve désormais de plus en plus à la mise en place d’établissements d’autres obédiences (protestante, juive, et récemment musulmane). La diversité des cultures dont la rencontre, le dialogue et les échanges réciproques forgent historiquement les civilisations, aussi bien en France qu’en Europe ou dans l’ensemble du monde, est une richesse pour toute l’humanité. L’école publique laïque est ouverte et doit s’ouvrir toujours plus au dialogue et à l’échange, et assurer la formation de citoyens se reconnaissant comme concitoyens. En revanche, la sectorisation confessionnelle accrue de la vie scolaire favoriserait le passage d’une société fraternelle, riche de la diversité de l’humanité, à une société déstructurée communautariste où se dresseraient des frontières de toute nature entre citoyens de convictions différentes. C’est ce que précisément déplorent de plus en plus de responsables politiques dans des pays proches ayant fait le choix de ce qu’on a appelé le multiculturalisme, et qui souffrent de plus en plus d’une situation d’éclatement social, culturel et politique.

Il est tout à fait souhaitable à nos yeux que, dans le cadre de la société civile, des espaces de dialogue et d’échanges inter-religieux et, de façon plus générale, inter-convictionnels puissent se constituer. Mais ces espaces ne sauraient participer en tant que tels ni à l’élaboration, ni à l’application des lois de la République, qui relèvent du pouvoir politique et de lui seul .Quand des questions d’éthique sociale se posent, les autorités publiques peuvent réunir un comité d’experts réputés pour leur compétence et leur liberté d’esprit ; s’ils sont connus pour adhérer à un groupe de conviction, cela ne peut être un motif d’exclusion ni d’appel.

La commission réunie en son temps par le président Jacques Chirac sous la direction de Monsieur Stasi est un exemple de ce genre de comité, à la fois indépendant et capable de faire des propositions utiles au pouvoir. Il est d’ailleurs fort regrettable que le rapport de cette commission n’ait été que fort peu suivi d ‘effets.

Quelques mots de la lettre d’introduction adressée par Monsieur Stasi au président Jacques Chirac pour présenter le rapport de la commission (11/12/2003) attestent de l’attachement indéfectible de son auteur à la loi de 1905, base juridique du principe de laïcité : [que le] « principe de laïcité, fondement de l’unité nationale, soit reconnu et respecté par tous ceux qui habitent sur notre territoire” Il permet “la qualité de notre vivre ensemble, aujourd’hui et demain ».

“Nous avons pu constater, écrit le rapporteur – l’attachement de la grande majorité de nos concitoyens au principe de la laïcité. Instinctivement, ils reconnaissent dans ce principe une valeur sur laquelle est fondée l’unité nationale, en même temps qu’un garant de la liberté individuelle. C’est dire combien il leur paraît important que cette valeur soit respectée et chaque fois qu’elle est menacée défendue”.

J’attire aussi votre attention sur cet autre passage du texte de ce rapport:

“La laïcité, pierre angulaire du pacte républicain, repose sur trois valeurs indissociables : liberté de conscience, égalité en droit des options spirituelles et religieuses, neutralité du pouvoir politique… L’égalité en droit prohibe toute discrimination ou contrainte et l’État ne privilégie aucune option. Enfin le pouvoir politique reconnaît ses limites en s’abstenant de toute immixtion dans le domaine spirituel ou religieux”.

La force de conviction qui transparaît à travers ces lignes reste pour nous une référence. C’est pourquoi nous nous permettons de vous envoyer le texte de ce rapport, dont vous avez sans doute connaissance et qui figure à coup sûr dans vos archives, mais il nous semble opportun de vous inviter à l’exhumer, en ces temps où le débat sur l’actualisation de la laïcité est menacé par la tentation de la démagogie populiste dont les musulmans de France seraient les cibles privilégiées.
A moins que certaines pressions inverses d’origines variées – religieuses ou non – profitent de ce débat pour remettre en cause, sous le nom très ambigu de laïcité « ouverte », les principes fondamentaux de la laïcité telle qu’elle assure jusqu’à présent la paix sociale en France.

Je vous prie de croire, madame, monsieur, en l’expression de ma considération.

  1. TITRE PREMIER DE LA LOI DE 1905
    Principes.
    ARTICLE PREMIER. - La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.
    ART. 2.- La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l’État, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l’exercice des cultes. Pourront toutefois être inscrites aux dits budgets les dépenses relatives à des services d’aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons.
    Les établissements publics du culte sont supprimés, sous réserve des dispositions énoncées à l’article 3. []
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Une étoile du gauchisme s’écroule, une alternative de république sociale s’élève

par Bernard Teper
Responsable du secteur Education populaire de l'Union des FAmilles Laïques
Portail des secteurs de l'UFAL : www.ufal.info

http://www.ufal.org

 

Après l’écroulement du communisme soviétique, la parenthèse de l’enthousiasme contre la raison raisonnante, ouverte par la révolution russe, est refermée. Non pas que nous critiquons la prise du pouvoir d’octobre 1917, car il n’y avait plus de pouvoir et Vladimir Ilitch Oulianov alias Lénine a eu l’intelligence tactique de le ramasser (ou plutôt de convaincre la direction du parti bolchevique qu’il fallait le ramasser). Mais cette parenthèse, commencée en début 1918 lorsque le nouveau pouvoir a décidé la dictature (dissolution de la Douma parce que le résultat ne lui convenait pas, militarisation des syndicats proposée par Léon Davidovitch Bronstein alias Trotski, etc.) s’est achevée par un stalinisme de triste mémoire. Ajoutons l’engouement pour la Chine maoïste jusqu’à la découverte de la réalité du régime sans protection sociale conséquente ; puis le régime albanais ainsi que la Corée du Nord devenus des nouvelles coqueluches, etc.

Et rappelez-vous ce néo-gauchisme venu vanter les mérites du nouveau régime de Kadhafi basé sur la démocratie directe. La réalité : pas de Parlement, pas d’institutions, le maintien au 21ème siècle de toutes les tribus ancestrales de Libye. En fait : un régime totalement antinomique au modèle politique de la république sociale. Impossible de compter les groupes et groupuscules qui étaient les thuriféraires de ce nouveau régime au nom du principe nauséabond « les ennemis de mes ennemis sont mes amis » ; sans parler des financements occultes tels qu’en Algérie, en Chine ou ailleurs.
Tout cela procède de la crise des modèles politiques. Car toute transformation sociale et politique aujourd’hui a besoin de nombreuses conditions : un mécontentement profond ; une globalisation des combats sans qu’un combat soit considéré surplombant aux autres ; une alliance à front large entre les couches populaires et une partie des couches moyennes ; une victoire dans la bataille parmi l’hégémonie idéologique et culturelle allant jusqu’au projet d’un nouveau modèle politique ; un mouvement de masse puissant ; une ou plusieurs organisations politiques capables de porter l’espérance en frayant la voie de l’émancipation grâce au projet du nouveau modèle politique. Que reste-t-il comme modèle politique alternatif au turbocapitalisme ?
Les modèles du communisme soviétique et chinois sont aujourd’hui dévalués et celui de la social-démocratie est un mirage depuis que tous les pays et partis sociaux-démocrates ont opté sans exception pour l’ordo-libéralisme. Les modèles yougoslave, libyen et tiers-mondistes ont explosés en plein vol. Les quelques pays émergents qui tirent aujourd’hui leur épingle du jeu à titre conjoncturel grâce à leur possession des matières premières dont le prix est en hausse constante ne peuvent exporter leur modèle à la grande majorité des pays de la planète. Reste l’expérience de l’Alliance bolivarienne en Amérique du Sud autour du Venezuela, de l’Equateur et de la Bolivie, ainsi que l’actualité des « révolutions » arabes et la montée du projet politique de la république sociale en France. Ce dernier concept, né à la révolution de 1848, s’arrêta net avec la confiscation du pouvoir par le nouveau Bonaparte, mais reprit force et vigueur avec les partisans de la république sociale : d’abord Jean Jaurès et ses amis, puis le soulèvement populaire de 1936 (non prévu dans les programmes des grandes organisations!) et enfin le Conseil national de la Résistance et la plus grande grève de l’histoire de France en mai-juin 68.
Bien sûr, nous devons fermer la période régressive anti-sociale que nous vivons actuellement : il n’y a pas d’autre issue que d’abattre le turbocapitalisme. La Tunisie, l’Egypte, l’effet domino dans les pays arabes et/ou musulmans ne sont pas l’apanage d’une partie du monde ; c’est la conséquence des reculs démocratiques, laïques et sociaux dans la plupart des pays du monde où la démocratie est confisquée (regardez le traité de Lisbonne entre autres), la laïcité bafouée, où il y a de moins en moins de bouclier social, sans oublier le maintien d’une politique productiviste non respectueuse des générations suivantes.
Comme il n’y a plus de débat démocratique en cette période de crise intense, il ne reste que la révolte populaire pour engager un nouveau processus. Encore faut-il que des organisations soient prêtes pour donner un débouché stratégique à ces révoltes menant à la transformation sociale et politique. Afin d’ouvrir le chemin du modèle politique laïque de la république sociale, quatre ruptures sont indispensables:

  • la rupture démocratique pour rompre avec l’oligarchie,
  • la rupture laïque pour rompre avec le théologico-politique,
  • la rupture sociale pour rompre avec le turbocapitalisme,
  • la rupture écologique pour rompre avec le productivisme.

Engagées plusieurs décennies auparavant, certaines ruptures furent endiguées par le turbocapitalisme : tout est à recommencer. Voilà ce que nous expliquons dans nos réunions publiques sur le thème: “Refonder la république sociale, une urgence pour l’émancipation!”

N’hésitez pas à faire appel à nos conférenciers pour vos réunions publiques.

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Algérie. Chérifa Bouatta : la révolution arabe en cours « réfute la thèse des « spécifités », qui condamnaient nos peuples à vivre sous la dictature »

par Hakim Arabdiou

 

Madame Chérifa Bouatta est en Algérie, professeure de psychologie à l’université d’Alger, membre d’une association de psychologue, la SARP, et directrice de la revue, Psychologie. Elle est aussi membre, depuis les années 1980, de l’association, Défense et promotion des droits des femmes. Cette association revendique l’égalité totale des droits entre les hommes et les femmes. Mais pas seulement, parce que l’expérience des autres pays leur a montré l’insuffisance de l’égalité juridique. C’est pour cette raison qu’elle estime qu’il leur faut être vigilantes, car les pouvoirs politiques en place, peuvent facilement brader les droits des femmes, lesquelles sont partie prenante de tous les mouvements sociaux et politiques, qui traversent leurs pays, en l’occurrence l’Algérie. Enfin, Madame Bouatta est également membre du récent Observatoire national contre les violences faites aux femmes, en Algérie.

Hakim Arabdiou : Que vous inspire, en tant que citoyenne, en particulier en tant que féministe algériennes, le renversement des présidents dictateurs et maffieux, tunisien, égyptien, en attendant celui de Keddafi, ainsi que le vent de la contestation qui souffle sur le monde arabe et l’Iran actuellement ?
Chérifa Bouatta
: la chute des dictatures est évidemment pour tous les citoyennes et citoyens du monde arabe quelque chose qui redonne beaucoup d’espoir et qui inscrit-à mon avis- le monde arabe dans le futur, dans l’avenir. Nous avons vécu dans des sortes de “monde figé” où la dictature faisait partie de notre histoire, de notre quotidien ; où les répressions, les emprisonnements étaient devenus quelque chose d’attendus et la démocratie quelque chose de lointain, un horizon difficilement atteignable. La chute des dictatures doit avoir lieu, sans intervention extérieure, par les seules volonté et forces des peuples musulmans. Ceci ouvre une nouvelle page d’histoire pour nos pays et réfute la thèse des “spécificités”, qui condamnaient jusque-là nos pays à vivre sous dictature. Sans pour autant faire l’économie de la question relative au faite que la majorité de nos pays vivent sous dictature.

Je crois qu’après la chute des dictatures se posent à nos pays les vraies questions : les choix économiques et politiques, l’égalité entre les hommes et les femmes, ainsi que la créativité qui permet aux individus et aux groupes de s’épanouir, d’écrire, de réfléchir, de penser librement. Il est vrai que l’Algérie n’est pas encore dans cette dynamique, mais je suis certaine que ce vent de changement va la toucher et toucher l’ensemble du monde arabe, même si les scénarios qui seront adoptés par les différents peuples seront différents. Le moment est venu pour nous de nous débarrasser de la peur qui nous habite. C’est quand même fou d’avoir peut parce que vous avez des idées différentes, parce que vous avez écrit un livre, parce que vous revendiquez des droits… Les murs de la peur, qui avaient été érigé, sont en train de tomber et les leçons à tirer ne concernent pas seulement le monde arabe, je pense que ça relève de questions qui se posent à toute l’humanité.


H. A : Votre association féministe, ainsi que plusieurs plusieurs associations de même genre, vient de rejoindre officiellement à la Coordination nationale pour le changement et la démocratie en Algérie. Pouvez-vous expliciter à nos lecteurs les raisons de votre adhésion ?
C. B. :
Les féministes algériennes ont rejoint la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), en tant que représentantes de l’Observatoire contre les violences faites aux femmes. Il est clair pour nous que nous ne pouvions être à l’écart de mouvements qui appellent au changement, à la chute de la dictature. En vérité, le mouvement féministe algérien s’est toujours pensé partie prenante des questions essentielles qui se posent à son pays : la démocratie, la justice sociale … Ceci d’autant plus que la question des femmes est éminemment politique et s’inscrit tout naturellement dans une perspective démocratique. Nous n’avons jamais été sourdes aux pulsations de notre société ; nous avons toujours été présentes pour revendiquer un État de droit, au service de notre peuple.

H. A : Les organisations féministes, et les forces progressistes en France, n’ont pu que se réjouir de votre création récemment en Algérie d’un Observatoire contre les violences faites aux femmes ; une création qui a suivi de peu votre élaboration d’un projet de loi-cadre contre les violences faites aux femmes. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
C. B. :
En effet un observatoire contre les violences faites aux femmes a vu le jour le mois de janvier. Cette idée a émergé après les violences faites aux femmes de Hassi-Messaoud, en 2010, une ville pétrolière dans l’extrême sud algérien. Des femmes de différentes associations se sont réunies et s’est posée la question du quoi faire pour aider les femmes victimes de violences ? Certaines femmes pensent qu’il faut se doter d’un dispositif qui permette non seulement de réagir, mais aussi de prévenir les violences faites aux femmes. C’est l’expérience de plusieurs années de lutte et de réflexion qui a donné lieu à cette instance qui se définit d’emblée comme impliquée dans les luttes démocratiques et sociales qui ont lieu dans notre pays et qui se tient aux côtés des femmes évidemment mais aussi aux côtés des jeunes, des plus vulnérables…

H. A. : Enfin, pouvez-vous nous dire où en est votre mise en débat l’inégalité de l’héritage en islam au détriment des femmes
C.B.
: Certaines associations féministes revendiquent l’égalité de l’héritage entre les femmes et les hommes. Vous savez qu’en islam, il y une discrimination dans ce cas. Mais en ce qui nous concerne nous demandons l’abrogation du code de la famille et le recours à des lois civiles. La référence à l’islam se fait souvent au détriment des femmes et d’ailleurs les discriminations actuelles sont expliquées par la référence à la chari’a. Sans entrer dans un long débat qui montrerait différentes lectures de l’islam faites par des femmes, des hommes éclairés, la majorité des associations de femmes algériennes demandent tout simplement l’abrogation du code de la famille. Nous avons eu dans les années 1980 deux options chez les femmes : celles qui demandaient l’abrogation et celles qui demandaient des amendements, aujourd’hui sur cette question nous sommes toutes d’accord, nous demandons son abrogation.

Propos recueilli par Hakim Arabdiou

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Algérie : appel à un grand rassemblement ce samedi à Paris

par la Coordination Nationale pour le Changement et la Démocratie en Algérie - Coordination France

 

Voilà déjà plus d’un mois qu’une grande effervescence s’est emparée des citoyens en Algérie et dans l’immigration à la faveur des grands bouleversements que connaît l’Afrique du nord et le Moyen-Orient. Une véritable onde de choc traverse tous les pays et ébranlent dans leur fondement des dictatures en place depuis des décennies. Cela a rejailli aussi de façon notable sur le niveau de mobilisation des partis démocrates tenus de suivre l’évolution des évènements et d’éclairer l’opinion publique.

La CNCD - coordination France, créée dans le feu de l’action, s’est impliquée de façon importante dans le travail de mobilisation et d’explication des luttes menées sur le terrain par la CNCD-Algérie. Des efforts conséquents ont été investis en France pour donner de la visibilité aux évènements d’Algérie à travers les médias (radios, télévisions, presse écrite), la distribution de tracts et les réseaux sociaux (Face book, Twitter, blogs, etc…). Différents types d’action ont été initiés : Une campagne d’information large a d’abord été menée dans différents arrondissements parisiens et en banlieue en distribuant des milliers de tracts en direction de l’immigration ou en collant des affichettes dans les cafés et les restaurants. Les nouvelles techniques de communication ont aussi été sollicitées.

Des pages Facebook spécialement dédié à la CNCD-coordination France a été créé pour assurer une meilleure circulation de l’information entre les différentes composantes de la coordination. Chaque militant a mobilisé son réseau au service des actions organisées par la coordination. Ainsi, la CNCD-Coordination France a organisé plusieurs rassemblements/manifestations : ceux de la Place de la République, celui devant l’ambassade d’Algérie et celui du 5 mars où il a été décidé d’un commun accord de se joindre à la manifestation organisée à Paris par le Collectif National Droits des Femmes (CNDF) à l’occasion de la journée internationale des luttes pour les droits des femmes en ajoutant aux mots d’ordre de la CNCD - Algérie celui de l’abrogation du code la famille, des lois civiles égalitaires, l’officialisation de la langue tamazight. Cette demande nous a été faite par nos compatriotes lors de nos rassemblements et nos rencontres. Toutes ces manifestations ont eu un prolongement médiatique grâce à la présence des journalistes de la presse écrite algérienne et de radios françaises. De plus, la réalisation de courts métrages de quelques minutes ont pu être visionnés par de nombreux citoyens sur Internet. Le militantisme participe du volontariat et à ce titre, l’on devrait investir, comme nous l’avons fait jusqu’à présent, tous les efforts pour préserver l’ambiance extraordinaire de camaraderie qui a prévalu et qui prévaut toujours à la coordination.

C’est le plus grand acquis des luttes que nous avons menées ensemble ces dernières semaines. Chacune et chacun tente d’apporter sa modeste contribution pour que la dynamique de mobilisation perdure et que l’information et la sensibilisation puissent se renforcer efficacement. Le principe de notre soutien politique à la CNCD en Algérie est acquis. Mais, il est tout à fait pertinent de s’interroger non seulement sur les suites à donner au mouvement mais aussi sur les formes d’actions nouvelles à envisager pour les semaines à venir. De la même façon, nous nous adressons à nos camarades de la CNCD-Algérie pour les inviter à inscrire à l’ordre du jour l’examen de 2 propositions sociétales qui sont centrales dans le cadre du changement démocratique :

  • L’abrogation du code de la famille.
  • L’officialisation de Tamazight identité et langue.

Nous nous élevons contre les propos racistes qui ont été tenues à l’encontre de Said SADI le traitant de sale Kabyle et de sale Juif, que nous dénonçons avec force ainsi que tentative d’atteinte à sa vie par arme blanche que nous condamnons vigoureusement. Sous d’autres cieux de tels agissements auraient été punis sévèrement par la loi et le premier responsable de cet état de fait aurait été démis de ses fonctions. Attentifs aux initiatives de la CNCD, une campagne d’informations est prévue pour ce samedi 12 mars en préparation d’un grand rassemblement le samedi 19 mars à la Place de la République à Paris pour exiger entre autres :

  • Le changement du système
  • L’ouverture des champs politiques et médiatiques
  • Une Algérie démocratique et sociale
  • L’unité de tous les patriotes
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Quand les conspirationnistes crient haro sur le printemps arabe

 

Régimes autoritaires aux abois et désinformateurs professionnels plaquent sur les récents bouleversements du monde arabe une grille de lecture largement éculée…

On ne compte plus les théories du complot développées au cours des dernières semaines à propos des soulèvements qui ont embrasé le monde arabe. Avant de s’effondrer, le régime de Ben Ali comme celui de Moubarak ont évoqué la thèse du complot islamiste.

Familier de la rhétorique conspirationniste, le colonel Kadhafi parlait le 22 février dernier d’« un complot d’étrangers, d’Américains, d’Al Qaïda et de fous » contre la Libye, qu’il estimait en proie à de « jeunes drogués manipulés par Ben Laden ». Aujourd’hui, il vilipende le « complot colonialiste » des Occidentaux et sous-entend qu’il pourrait désormais s’allier… avec Ben Laden. « Les pays colonialistes trament un complot pour humilier le peuple libyen, le réduire à l’esclavage et contrôler le pétrole », a-t-il encore répété hier soir sur la télévision d’Etat.

Le 27 février, le président Ali Abdallah Saleh dénonçait lui aussi « un complot contre l’unité et l’intégrité territoriale de la république yéménite », avant de déclarer, dans un discours tenu à l’Université de Sanaa le 1er mars, que « la vague d’agitation politique qui déferle à travers le monde arabe est une conspiration qui sert Israël et les Sionistes ». Selon le président du Yémen, qui a d’ores et déjà annoncé qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat, « les manifestants sont dirigés par la Maison Blanche et le centre de contrôle de la déstabilisation du monde arabe est à Tel Aviv ».

Quand les conspirationnistes crient haro sur le printemps arabe

Les autorités algériennes ont fait entendre à peu de choses près la même petite musique, suggérant que les manifestations d’opposition étaient fomentées par des syndicats, des partis et des organisations inféodées aux intérêts étrangers, français, américains et juifs. La presse pro-gouvernementale s’est lancée en particulier dans une campagne de calomnies contre Saïd Sadi, le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), accusé d’avoir fait un voyage à Paris dans le seul but de recevoir des ordres de ses vrais chefs. Un journal algérien a carrément publié une fausse interview de Saïd Sadi, un drapeau israélien en arrière plan, dans laquelle ce dernier soutient que « le CRIF l’a assuré du soutien d’Israël » (ci-dessus). Un autre journal pro-gouvernemental est allé jusqu’à publier une photo de lui aux côtés de Bernard-Henri Lévy agrémenté de la légende : « Comment voulez-vous faire confiance à un homme qui parle à un juif ? » (voir la vidéo ).

Google, l’OTAN, le FMI, la CIA et les médias occidentaux

Selon le président russe Dimitri Medvedev, ceux à qui profitent les révolutions arabes auraient « préparé un scénario analogue pour la Russie ». Le vice-Premier ministre russe Igor Setchine a quant à lui déclaré dans une interview au Wall Street Journal, que « de hauts dirigeants de Google » – derrière lesquels certains ont tôt fait de voir la main de la CIA – ont « manipulé » les Egyptiens. Faisant référence à mots couverts aux analyses deThierry Meyssan, qui a été invité à plusieurs reprises sur les chaînes de télévision russes fin février, ou à celles de Wayne Madsen, contributeur régulier de la chaîne anglophone du Kremlin, Russia Today, le journal en ligne Slate.fr rapporte que « des experts et des conseillers du gouvernement[russe] n’hésitent pas à faire un parallèle entre les soulèvements au Proche-Orient et les “révolutions de couleurs fomentées par la CIA” qui se sont produites dans la CEI ou encore d’évoquer “un soi-disant plan” de l’OTAN pour “occuper la Libye et prendre le contrôle de ses ressources pétrolières et gazières” ».

Au Venezuela, le président Hugo Chàvez assure que « les Etats-Unis exagèrent et déforment la situation pour favoriser une invasion » en Libye tandis que son ministre des Affaires étrangères, Nicolas Maduro, accuse les médias occidentaux de « créer les conditions pour la justifier ». Quant aux médias “bolivariens”, comme TeleSUR, où officie le célèbre présentateurWalter Martinez, lui même adepte de la théorie du complot, ils renouent avec les réflexes de la presse officielle soviétique, passant sous silence la répression brutale de la population civile par le régime “ami” de Kadhafi. Ils relayent également la propagande des théoriciens du complot professionnels. Le site de la radio YVKE Mundial, qui dépend directement du Ministère de la Communication et de l’Information vénézuelien et où Thierry Meyssan a littéralement pignon sur rue depuis 2007, a repris à son compteles analyses de Webster G. Tarpley, grand inventeur de théories conspirationnistes devant l’Eternel, qui interprète les révolutions arabes comme une manière pour les Etats-Unis d’« installer au pouvoir des marionnettes encore plus agressives à l’égard de la Russie, de la Chine et de l’Iran ».

Michel Chossudovsky soutient sensiblement la même thèse. Selon cet animateur du site conspirationniste Mondialisation.ca, « les véritables décisions sont prises à Washington DC, au département d’État, au Pentagone, à Langley, le quartier général de la CIA et à H Street NW, le quartier général de la Banque mondiale et du FMI » et la crise égyptienne ne serait rien d’autre que l’aboutissement d’un « plan de Washington » visant à promouvoir, au travers d’ONG liées aux services secrets américains, de nouveaux dirigeants arabes destinés à remplacer des chefs d’Etat usés par des décennies de pouvoir.

Cette grille de lecture conspirationniste est erronée à plusieurs titres :

Tout d’abord, elle envisage les nations arabes comme une collection de peuples dépourvus de toute volonté ou capacité d’action autonomes. Réduisant les Arabes à n’être que des spectateurs passifs de leur propre histoire, elle les enferme dans le rôle d’éternelles victimes de « l’impérialisme occidental », incapables de prendre en main leur destin.

La deuxième limite de cette approche réside dans la représentation faussée des Etats-Unis sur laquelle elle repose. L’Amérique y est conçue comme une entité à la fois maléfique et monolithique, dotée d’une volonté immuable tout au long de l’histoire, en dépit des changements d’administration. Les chefs d’Etat américains successifs et leurs équipes, bien que désignés au terme d’élections libres, ne seraient que des pantins à la solde d’intérêts supérieurs, cachés bien évidemment (la “finance internationale”, le “Nouvel Ordre mondial”, les “Illuminati”, le “Sionisme”, etc.).

Cette approche simpliste et étroitement manichéenne présente également l’inconvénient de négliger un ensemble de facteurs qui constituent sans doute la clé de la compréhension des soulèvements du monde arabe : le rôle d’Internet ; l’importance cruciale de l’émergence de réseaux sociaux comme Facebook et Twitter ; l’émergence de médias audiovisuels de qualité en langue arabe comme Al-Jazeera ; le choc créé dans les opinions publiques, et singulièrement dans l’opinion tunisienne, par les révélations de Wikileaks et les logiques mimétiques à l’œuvre (le fameux “effet domino”).

Enfin, imaginer que ces événements sont le pur produit de logiques intentionnelles revient à s’affranchir totalement des faits car, comme le révèlent les atermoiements du Département d’Etat et des autres chancelleries occidentales, tout le monde, y compris les Frères musulmans en Egypte et en Tunisie, a été pris de court par cette série de soulèvements populaires. Et s’il est était, tout simplement impossible de prédire une révolution ?

Quand les conspirationnistes crient haro sur le printemps arabe

Il ne s’agit pas ici de minimiser l’influence des Etats-Unis au Proche-Orient ou celle des Frères musulmans sur la société civile égyptienne. L’Egypte d’Hosni Moubarak faisait indéniablement partie de la sphère d’influence américaine. Mais était-il vraiment dans l’intérêt des Etats-Unis de voir ce dernier quitter le pouvoir, dans de telles circonstances ? Quant à la puissante confrérie fondée par Hassan Al-Banna, elle est sans doute la première force politique du pays quoique pas nécessairement majoritaire. De toute évidence, pourtant, elle n’a pas eu de rôle décisif dans le soulèvement des Egyptiens.

Par ailleurs, en quoi le chaos qui prévaut en Libye est-il de nature à faire le jeu des Occidentaux ? Qui peut dire que les forces de l’OTAN, déjà empêtrées en Afghanistan, ont envie d’ouvrir un nouveau front en Afrique du Nord ? Enfin, n’est-il pas significatif que les sympathisants du colonel Kadhafi omettent de rappeler que le principe d’une zone d’exclusion aérienne visant à protéger les civils, non seulement est accueilli favorablement par la Ligue arabe et l’Organisation de la Conférence islamique, mais ne pourra être imposé qu’avec l’assentiment de la Russie et de la Chine au Conseil de sécurité de l’ONU ?

Dernière minute :
Un texte remarquable a été mis en ligne aujourd’hui sur le site du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). Il dénonce avec force l’attitude adoptée par Fidel Castro et Hugo Chavez face à la révolution libyenne et se démarque clairement de toute lecture conspirationniste de la situation. En voici un extrait :

« On voit également fleurir aujourd’hui d’abracadabrantes “théories du complot”, selon lesquelles, contre toute évidence, les événements dans le monde arabe, et particulièrement en Libye, seraient l’œuvre d’une vaste conspiration ourdie par la CIA et le Mossad afin de pérenniser leurs intérêts dans la région, de “changer les choses pour que rien ne change”. Selon ces théories fumeuses, tout était prévu, tout était écrit à l’avance par l’impérialisme. Les masses en révolte ne seraient ainsi que de vulgaires marionnettes aux mains de forces machiavéliques et toutes puissantes qui tirent les ficelles dans l’ombre, à Washington ou à Tel Aviv. Outre le profond mépris pour les peuples de la région arabe qui se cache derrière ces théories conspirationnistes, elles ont également comme conséquence désastreuse de susciter la méfiance, la passivité ou l’absence de solidarité face aux processus en cours. Si des conspirations existent bel et bien, ce ne sont pourtant pas elles qui écrivent l’histoire présente, elles tentent au contraire de les réécrire, de soumettre à leur volonté des événements qui leur échappent et les dépassent largement ».

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Peut-on faire confiance aux islamistes?

 

Le monde arabe est en pleine ébullition depuis plusieurs mois. Devenus le centre d’attention d’un monde qui l’avait ignoré jusque là, les pays que l’on a coutume d’appeler « arabo-musulmans » se sont soudainement réveillés depuis la mort du désormais célèbre Mohamed Bouazizi, qui ne fut que l’un des éléments déclencheurs d’une révolution qui bouillonnait déjà dans les esprits de pas mal de Tunisiens. Révolution tunisienne qui, comme le fit jadis la grande révolution de 1789, servit elle-même ensuite de phare guidant les pays avoisinants sous le joug de dictatures et de régimes religieux totalitaires. La chute du despote Ben Ali ne fit que raviver la flamme de ces peuples avides de liberté, entrainant la chute d’un deuxième dictateur, véritable frère jumeau du premier tant dans les idées que dans l’apparence, le dénommé Moubarak. Ces deux chutes créèrent une onde de choc sans pareille, provoquant séismes démocratiques, affolant tyrans et totalitaires et redonnant de l’espérance à des populations qui en manquaient cruellement.

Tel est en tout cas l’espoir des observateurs extérieurs dont votre humble serviteur fait partie. Néanmoins, un tel désir de démocratie, légitime pour un humaniste, ne peut pas non plus nous aveugler à un autre danger qui lui pointe son nez aussi dans le chaos actuel: celui de l’islamisme. Hélas, pour de nombreuses raisons trop longues à rappeler ici, et dont la responsabilité incombe aussi à l’Occident anciennement colonisateur, les démocrates laïques de ces mêmes pays, luttant avec opiniâtreté pour les droits de l’homme, la liberté et l’égalité, ont été depuis toujours enserrés dans un étau diabolique entre d’une part les dictateurs « laïques » et les islamistes de l’autre. Une situation infernale qui poussa certains à s’allier avec cette extrême-droite religieuse afin de combattre la dictature, et d’autres à s’y opposer avec fermeté comme le fit Saïd Saadi du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie algérien. Ennemi de la junte militaire, il ne put néanmoins se résumer à accepter l’avènement des islamistes du Front Islamique du Salut (qui à l’époque déclarait franchement sa volonté d’éradiquer la démocratie afin d’instaurer une théocratie islamique) au pouvoir et donc défendit l’arrêt du processus électoral en 1992. Il aura cette magnifique phrase pour expliquer sa décision: « l’intégrisme c’est comme la mort, on n’en fait l’expérience qu’une fois».

Il semble pourtant que dans la fougue et la vigueur des évènements récents, certains Occidentaux bien pensants ont oublié le danger de la menace intégriste. L’idée d’une participation au pouvoir de fanatiques voués à l’application d’une loi religieuse moyenâgeuse ne les fait plus frémir et, ignorant les évènements passés, s’aveuglant au passé et à l’histoire de certaines personnalités en vogue, se mettent à prêcher en faveur des islamistes prétendument devenus démocrates. Islamisme modéré, islamisme démocratique, et autres fadaises sorties de cerveaux vermoulus d’islamologues et de journalistes orientalistes sont les oxymores constitutifs d’un langage devenu à la mode. Balayant d’un tour de bras la condition misérable voire inhumaine des femmes, des homosexuels et des mécréants dans le projet politique des islamistes, des personnalités progressistes affichent une complaisance inouïe envers cette frange radicale de l’Islam, et c’est ainsi que l’on peut lire dans un journal comme Le Soir que « [l’islamisme tunisien] est l’un des plus tolérants de la région »((Le Soir édition du 13 janvier 2011)).

Cet article va tenter d’expliquer un peu une partie de l’histoire de l’islamisme et la situation de 3 pays emblématiques, afin de démontrer non pas qu’il faille condamner ces révolutions mais bien garder une certaine vigilance laïque envers le fléau qu’est l’intégrisme religieux.

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Combat féministe
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Henriette Zoughebi. Changer les règles, le masculin ne l’emporte plus sur le féminin

 

Henriette Zoughebi, 
élue communiste, 
vice-présidente du conseil régional d’Île-de-France, 
est une des conceptrices 
de l’exposition « L’égalité, c’est pas sorcier ! ».

Pourquoi le combat féministe est-il si essentiel pour vous ?

Henriette Zoughebi. Parce que, dès qu’on fait bouger un élément des inégalités entre hommes et femmes, c’est toute la société qui progresse. Par exemple, les salaires les plus bas sont des salaires féminins. L’augmentation générale des salaires – une revendication raisonnable et pas utopique du tout puisque même des membres du Medef la prônent – profiterait naturellement d’abord aux femmes, mais aussi aux hommes. La visibilité des inégalités vécues par les femmes est particulièrement importante car elle donne de la cohérence aux choses. À l’hôpital Tenon, à Paris, les femmes ont fait reculer le pouvoir qui voulait fermer le service des IVG. C’est la casse de l’hôpital public qui avait conduit à cette décision, mais ce sont les conséquences directes pour la vie des femmes qui ont provoqué leur réaction. C’est ainsi qu’une nouvelle dynamique sociale peut renaître face aux actuelles régressions du point de vue social comme des mentalités.

Comment vivez-vous 
le fait que les femmes subissent une discrimination salariale 
de 17 % à 32 % ?

Henriette Zoughebi. C’est intolérable que des personnes, de par leur sexe, subissent cette discrimination dans quelle que branche que ce soit, dans quelle qu’entreprise que ce soit, à quel que poste que ce soit. C’est quelque chose de très violent. D’autant que l’aspiration des femmes à travailler pour avoir une véritable autonomie est extrêmement forte. Aujourd’hui, les inégalités progressent malgré les promesses électorales de Sarkozy. C’est un obstacle pour les jeunes femmes qui, de plus en plus nombreuses, aspirent à une vie équilibrée, où ni le tout-travail ni le tout-famille n’ont leur place.

Les femmes sont particulièrement victimes du temps partiel imposé. Comment combattre cette dérive ?

Henriette Zoughebi. Pour le faire reculer, la seule chose à faire est de se battre pour transformer ces postes en emplois à temps complet. Combattre la précarisation. Il y a là quelque chose à imposer aux employeurs. Les femmes de ménage qui commencent à 5 heures du matin après avoir préparé le petit déjeuner pour les enfants ne gagnent pas, pour autant, leur vie. Il faut s’attaquer à ça parce que c’est injuste et parce que cela créerait des emplois. Il y a une politique volontaire à mettre en place et une bataille à mener sur ce front.

Comment faire pour améliorer 
la condition des femmes 
dans l’entreprise ?

Henriette Zoughebi. Nous avons tous les outils pour faire bouger les choses : il y a des lois et, depuis décembre 2010, des statistiques comparatives sexuées existent. Il faut s’en servir. Comme il y a autant de femmes que d’hommes et qu’elles ne sont pas moins compétentes, ces chiffres devraient permettre d’avancer vers la parité. Les blocages sont nombreux dans les entreprises. Pour s’en débarrasser, nous aurions besoin d’un observatoire de l’égalité professionnelle qui publierait les chiffres et montrerait les enjeux des batailles à mener. C’est une revendication du Parti communiste.

S’il est une lutte où les femmes 
ont remporté une victoire, c’est celle contre les violences domestiques. Comment l’expliquer ?

Henriette Zoughebi. Le mouvement de lutte des femmes a été extrêmement fort sur cette question. Avec cette loi, nous avons réussi à faire bouger la norme. C’est extrêmement important car tout ce qui a trait à l’égalité est au croisement de grandes questions de société et de ce que nous avons de plus intime, donc d’une réflexion personnelle. Si la conscience n’avait été que sociale, qu’elle n’avait pas été relayée au niveau des individus, nous n’aurions pas progressé.

Vous aspirez aussi à changer 
les normes en ce qui concerne 
la prostitution…

Henriette Zoughebi. Là encore, il existe des lois, des conventions, mais il y a aussi un marché juteux, celui du proxénétisme, qui génère des sommes faramineuses. La prostitution n’est que violence, il n’y a rien d’autre. Pour la faire reculer, la pénalisation du client est nécessaire; pour poser l’interdit social – le corps d’une autre personne ne s’achète pas – et pour responsabiliser les gens. Des stages existent pour la sécurité routière, pourquoi n’y aurait-il pas des stages pour les clients des prostitués pour qu’ils réfléchissent, qu’ils s’interrogent sur ce que tout ça représente ? Le corps des femmes n’est ni à louer, ni à vendre, ni à acheter. Le jour où on affirmera cela avec force, cela aura des conséquences dans bien des secteurs de notre société. En se battant sur ce terrain, on rend visibles des rapports de domination, mais aussi des voies de plus grande humanité.

La norme grammaticale 
vous tient aussi à cœur…

Henriette Zoughebi. Qu’y a-t-il de plus fort comme expression de la domination masculine que le simple énoncé d’une règle de grammaire qui dit : le masculin l’emporte sur le féminin, point. Toutes les petites filles et tous les petits garçons l’apprennent dès leur enfance. C’est un élément symbolique lourd. La langue est vivante, on peut la faire bouger. En instituant la « règle de proximité » (que les hommes et les femmes soient belles, ou, que les femmes et les hommes soient beaux – NDLR), on donne à la langue du jeu, du possible, de la créativité. Mener la bataille pour changer le symbolique dans la grammaire, c’est possible.

Entretien réalisé par 
Dany Stive