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Chronique d'Evariste
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Nouveau seuil atteint dans le processus de décomposition du PCF

par Évariste

 

Les résultats du vote en vue du prochain congrès du PCF sur le texte du conseil national et sur les quatre textes alternatifs ont été rendus publics.

  • 14.942 voix (51,2 % des exprimés) pour le texte du conseil national qui devient la base commune amendable dans la deuxième phase du congrès pour la phase finale début juin. Deux départements ont donné plus de 80 % à ce texte (Corse du Sud et Côtes d’Armor).
  • 6.910 voix (23,68 % des exprimés) pour les partisans du Front de gauche (texte alternatif 1). Ce texte est majoritaire de façon absolue dans 6 départements dont la Vendée avec 67 %.
  • 1.575 voix (5,4 % des exprimés) pour le texte Alternative 2 mené par le groupe trotskiste La Riposte (elle-même filiale d’un petit groupe international Tendance marxiste internationale). Ce courant dépasse 15 % dans 3 départements dont la Côte d’Or avec plus de 21 %.
  • 3.755 voix (12,87 % des exprimés) pour le texte Alternative 3 des bastions municipaux orthodoxes (Pas-de-Calais, Vénissieux, les amis de JJ Karman, etc.). Ce courant dépasse 30 % dans 5 départements avec 45 % dans les Ardennes et plus de 78 % dans le Pas-de-Calais.
  • 2001 voix (6,86 % des exprimés) pour le texte ultra-orthodoxe réuni au tour de Dang Tran. Ce texte fait plus de 20 % dans 8 départements, plus de 30 % dans 5 départements, avec 47 % dans l’Aisne et plus de 75 % en Haute-Saône.

Analyse concrète du scrutin interne du PCF

D’abord sur le plan général, la chute des cotisants officiels est acté (64.000 en 2013, 51.000 en 2016). La chute des votants également (34.600 en 2013, 29.183 en 2016). La chute d’influence du texte du conseil national est manifeste (73 % en 2013, 51,2 % en 2016), d’autant plus que les quatre textes alternatifs sont opposés au texte aujourd’hui base commune. Nous sommes revenus en 2003 avec une configuration à peu près équivalente. Nous y reviendrons plus loin.

Notons aussi que dans certains départements (Hautes Alpes, Ardèche, Corse du sud, Gers, Indre, Lot, Haute-Marne, Moselle, Sarthe, Vosges, Territoire de Belfort), les blancs et nuls oscillent entre 6,8 % et 10 % des inscrits !

Si on regarde maintenant les votants de la base commune, ce sont pour une bonne part, les votes issus des bases électives du PCF existantes grâce à une alliance dès le premier tour avec le PS. Mais comme il est probable que le PS va continuer sa propre décomposition, l’avenir de ce courant du PCF suivra probablement celui de son allié principal.

Si on regarde le deuxième courant du PCF (Alternative 1) en importance qui représente ceux qui se déclare favorable au Front de gauche, notons que cette déclaration arrive à un moment où le Front de gauche n’existe plus sauf dans les nostalgies de certains. Né d’une volonté commune de Marie Georges Buffet (alors secrétaire nationale du PCF) et de Jean-Luc Mélenchon, il s’est concrétisé par une alliance entre le PCF et le PG (parti né dans cette circonstance) qui a été élargi ensuite à des petits groupes politiques. Cette alliance n’existant plus, parler aujourd’hui du Front de gauche est ne pas passer par la case « analyse concrète de la situation concrète ».

Alors que Pierre Laurent a tenté tous les contacts possibles avec Taubira, avec les frondeurs, avec Hulot, avec le PS via son accord pour les primaires socialistes, le manque de détermination de ses interlocuteurs et la réaction majoritaire de la base communiste l’ont obligé à déclarer que le PCF ne pourrait pas participer à une primaire avec le président sortant. Le vide stratégique est criant.

De son côté, Jean-Luc Mélenchon a vite compris que s’il attendait avant de se déclarer candidat, il ne pourrait plus le faire, d’autant que nous savons aujourd’hui que les règles de la présidentielle se sont durcies. Mélenchon a aujourd’hui derrière lui un millier de groupes d’appui et 100.000 citoyens qui soutiennent sa candidature. Et comme la nature a horreur du vide, les intentions de vote autour de sa candidature sont plutôt bonnes. Il organise le 5 juin prochain, dernier jour du 37e congrès du PCF congrès, un rassemblement qui pourra accueillir les déçus du congrès du PCF. Le courant pro-Front de gauche, regroupé dans l’Alternative 1 va probablement se diviser entre ceux qui tenteront un nouvel accord avec la direction nationale alors que les textes initiaux sont peu conciliables, ceux qui quitteront le PCF et un certain nombre qui rejoindront la candidature de Jean-Luc Mélenchon sans que ces choix ne soient exclusifs entre eux.

Le troisième texte (Alternative 2) très critique du texte de la base commune a fait le choix stratégique trotskiste de devenir un courant critique interne des partis communistes.

Les deux autres textes (Alternative 3 et 4) sont des vieux courants orthodoxes du PCF, qui n’ont pas fait leur deuil du communisme soviétique, qui déclinent donc globalement de congrès en congrès mais dont ledéclin est masqué par le déclin du PCF lui-même.

Une des raisons de la décomposition réside dans la confusion et les impasses théoriques et pratiques

Comme on le voit, aucun de ces courants n’est une force propulsive pour nous mener vers une transformation sociale et politique en rupture avec le système dominant. D’autant, que leur stratégie n’est toujours pas connue (comment peut-on rassembler politiquement sans une stratégie claire ?), et que leur ligne politique est confuse sur de nombreux points.

D’abord sur l’Union européenne et la zone euro. Que ce soit la base commune ou l’Alternative 1, leur position est toujours le plan A à savoir la croyance que la mobilisation et le simple volontarisme politique suffisent à transformer l’euro néolibéral en euro social et que de la même façon, les traités pourraient devenir des traités sociaux. Nous savons pourtant que ces traités ne peuvent pas être changés vu que la règle est l’unanimité des pays pour l’obtenir (il sera long pour certains de comprendre le pourquoi de l’élargissement à certains pays comme Malte par exemple) et que le parlement européen n’a pas de pouvoirs législatifs même s’il a certains pouvoirs de co-décision ce qui est loin d’être la même chose. Le déclenchement par les syndicats grecs d’une grève générale de 48 heures contre le gouvernement grec ne les fait pas vaciller sur leur soutien inconditionnel à la politique du gouvernement grec.

Certains cependant dans l’Alternative 1 sont favorables au plan B à savoir la sortie de la zone euro par un simple volontarisme politique négligeant par là les lois tendancielles du capitalisme qui ne permettront une sortie du carcan de la zone euro que dans une situation de crise paroxystique à condition d’être organisé et de s’y être préparé nationalement et internationalement.

Un deuxième point de confusion divise les deux principaux courants du PCF. C’est celui du relativisme culturel, du soutien au communautarisme, au clientélisme, au financement public des cultes notamment catholique, de leur complaisance avec l’islamisme en lieu et place des principes de la République sociale avec son universalisme, sa laïcité, son acceptation de toutes les religions (donc y compris l’islam bien sûr) et du refus de toute complaisance avec tous les racismes et discriminations sans exception aucune.

Un troisième point de difficulté réside dans la croyance des deux principaux courants du PCF que l’on peut rassembler le peuple sans se poser la question : « pourquoi la classe populaire ouvrière et employée a utilisée le vote Front de gauche ou PCF en 5e choix (après l’abstention majoritaire mais aussi derrière le FN, LR, PS) ? ».

Un quatrième point de difficulté réside dans le fait que le PCF (comme hier le Front de gauche d’ailleurs) est resté dans le tabou de la propriété et ne s’inscrit pas dans la ligne du fondateur du journal l’Humanité qui écrivait en 1898 dans « Socialisme et Liberté » : « Quand le prolétariat socialiste aura été porté au pouvoir par les événements, par une crise de l’histoire, il ne commettra pas la faute des révolutionnaires de 1848 : il réalisera d’emblée la grande réforme de la propriété. » Jaurès parlait de la propriété des moyens de production et non de la propriété d’usage.

Un cinquième point de difficulté réside dans le fait que le PCF (comme hier le Front de gauche) préfère en rester à l’information propagandiste en refusant les processus d’éducation populaire. On comprend cela car il est difficile de produire un processus d’éducation populaire avec de la confusion sur la ligne et sur la stratégie !

Un sixième point de difficulté, mais qui découle de ce qui précède, est que si le PCF (comme le Front de gauche d’ailleurs) a bien un programme, il n’a pas de modèle politique alternatif qu’il puisse articuler avec les propositions immédiates. Jean Jaurès appelait cela l’articulation de la double besogne via la stratégie de l’évolution révolutionnaire. Il préconisait de reprendre le modèle politique de la République sociale inventé par les révolutionnaires de 1848.

Mais nous ne sommes pas à la fin de l’histoire car il n’y a pas de fin de l’histoire. De nombreux points positifs ont surgi récemment des mouvements sociaux et politiques pour qui sait les regarder autrement que par l’entremise de TF1, France 2, BFM ou de Itélé.
Nous y reviendrons dans d’autres articles de Respublica mais aussi dans les discours des intervenants de Respublica et du Réseau Education Populaire.
Hasta la victoria siempre !

Combattre le racisme
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Rapport 2015 de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme : une révélation, vraiment ?

par Didier Hanne

 

Oui la réalité est bien là : jamais les opinions tolérantes n’ont été si fortes en France. Elles ont même progressé en 2015, année de deux attentats djihadistes majeurs. Les actes racistes progressent (et en leur sein il y a bien deux fois plus d’actes antisémites que d’actes anti-musulmans), mais ils sont le fait d’infimes minorités : 2.034 actes recensés en une année (dont 429 actes anti-musulmans et 808 actes antisémites) dans cet horrible pays raciste de 65 millions d’habitants ! Pour donner un ordre de comparaison, en 2014, selon l’Office National de la Délinquance et des Réponses Pénales (ONDRP), 568.000 ménages en France ont été victimes d’un cambriolage…

Le Monde qui publie des extraits de ce rapport dans son édition datée du 3 mai avoue son embarras. Ah mais que s’est-il passé ? Nos « intuitions » n’étaient pas les bonnes s’étonne la journaliste ! C’est vrai, quoi ! Comment se fait-il que les mêmes Français qui étaient favorables à 85 % à la déchéance de nationalité pour les terroristes soient, selon la CNCDH, « plus ouverts qu’avant » ? Lewis Carroll, au secours !

Que vont dire ceux qui nous expliquent depuis des années, notamment dans nombre de tribunes et éditoriaux du Monde, que la France a versé en bloc dans le racisme et la xénophobie et que c’était même pour cela que les Français sondés soutenaient massivement l’état d’urgence et la déchéance de nationalité ?

Que va dire Emmanuel Todd lequel, dans Qui est Charlie (Seuil, 2015), diffamait les défilés du 11 janvier 2015 en y voyant une manifestation de « catholiques zombies » forcément anti-musulmans, ces méprisables moutons frappés « d’hystérie » ayant été de surcroît « convoqués par le gouvernement »?

Que va dire Alain Badiou qui, dans Notre mal vient de plus loin (Fayard, 2016), affirmait que la classe moyenne était, « prise dans son ensemble, poreuse au racisme à la xénophobie, au mépris de démunis » et dénonçait une « fascisation rampante »? Qui sont les vecteurs de cette fascisation ? Mais nous bien sûr, odieux Français moyens ! Et l’immense philosophe d’asséner : « je pense qu’on peut appeler fasciste la subjectivité populaire générée et suscitée par le capitalisme ».

Et Edwy Plenel, qui dans Pour les musulmans (La découverte, 2015), voyait resurgir rien moins qu’un vichysme en marche, « la guerre d’une France contre une autre » (la France des cathos contre celle des musulmans ?) et affirmait que c’était « nous », par nos « mises en scène islamophobes » qui avions alimenté « la montée de l’intolérance anti musulmane » ?

Oui, que vont-ils trouver  ?

Simple : d’une part que c’est grâce à eux, à la virulence de leurs dénonciations, que le racisme a reculé. Une secte était ainsi retombé sur ses pattes, par un communiqué publié quelques jours après celui de la fin du monde qu’elle avait prédit : c’était l’intensité et la ferveur des prières de la secte qui avaient fait renoncer le Tout-puissant à son funeste projet. Les affaires pouvaient continuer.

Les champions de la dénonciation de l’islamophobie ajouteront également que les actes anti-musulmans ont progressé – ce qui est exact – mais en oubliant de signaler qu’en 2015 y a eu quand même deux fois plus d’actes antisémites que d’actes anti-musulmans d’après la CNCDH. Ce sont les actes les plus nombreux, ce sont aussi les actes les plus meurtriers (d’Ivan Halimi au magasin Casher de Vincennes en passant par Merah à Toulouse en 2012) depuis 10 ans. Et cela vise une communauté numériquement bien plus faible que la communauté musulmane.

C’est ainsi.

Lisons Que sont mes amis devenus ? de Brigitte Stora (éd. du Bord de l’eau, 2016). Un livre qui braque une lampe-torche sur la faillite de toute une fraction du mouvement dit antiraciste. Celle qui a carrément raté la montée raciste la plus préoccupante en France, quantitativement et qualitativement : celle de l’antisémitisme. Et d’une partie de l’extrême gauche – celle qui a substitué la lutte contre les discriminations à la lutte des classes. Ils ont découpé l’antiracisme en tranches, la noble et la moins noble, et c’était une défaite de la pensée, une occultation de la réalité. IIs se sont aussi lourdement trompés sur l’état d’esprit de la masse des Français.

Mais rien ne peut réfuter une logique sectaire. Rien. Les yeux fermés le demeureront.

Par contre, faire en sorte que la fable de l’islamophobie galopante (souvent reprise dans les médias anglo-saxons) convainque de moins en moins de monde, ça, oui, on y peut quelque chose. En commençant par ouvrir les yeux. En luttant à armes égales contre tous les actes racistes. Et en bataillant contre le dégoût du peuple instillé par les cercles de la gauche élitiste qui donne le ton depuis trop longtemps.

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Bangladesh - Protéger les droits à la liberté de religion, de croyance et d’expression

par un collectif

 

Appel lancé par des militants bangladais et signé par la Fédération Humaniste Européenne (European Humanist Federation) dont l’UFAL est membre.
Le texte d’origine (en anglais) est disponible avec ce lien, la traduction a été faite par l’UFAL.

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Nous soussignés, universitaires, intellectuels, défenseurs des droits de l’homme et organisations du Bangladesh et du monde entier, condamnons sans équivoque les récentes déclarations des représentants du gouvernement du Bangladesh qui accusent les écrivains, les éditeurs et les militants d’être responsables de leur propre mort sous les coups d’extrémistes armés suspectés d’être en lien avec des groupes islamistes militants. Nous exhortons le gouvernement du Bangladesh à prendre immédiatement des mesures pour protéger vigoureusement les droits à la liberté de religion, de croyance et d’expression, tant en paroles qu’en actes.

Depuis février 2015, il y a eu six attaques meurtrières contre des écrivains athées, humanistes et laïques, des blogueurs et des éditeurs au Bangladesh, chaque fois par des militants armés de machettes. Le 26 février 2015, Avijit Roy, fondateur du forum de la libre pensée Mukto-Mona, a été tué au moment où il quittait une foire du livre où il s’était rendu avec sa femme, l’auteur et militante Rafida Bonya Ahmed. Ahmed a survécu, mais a été grièvement blessé. Le 30 mars 2015, Washiqur Rahman a été tué par un groupe d’extrémistes sur le chemin de son travail. Le 12 mai 2015, Ananta Bijoy Das a été tué de la même façon. Le 7 août 2015, Niloy Neel a été tué par six hommes qui avaient réussi à s’introduire dans sa maison, ont enfermé son compagnon dans une pièce et l’ont battu à mort. Le 31 octobre 2015, Faisal Arefin Deepan, éditeur musulman de livres laïques, a été tué dans sa maison d’édition. Le même jour, trois autres — Ahmedur Rashid Tutul, Tariq Rahim et Ranadipam Basu — ont été grièvement blessés dans une attaque similaire dans une autre maison d’édition. Et, le 6 avril 2016, Nazimuddin Samad, étudiant en droit, a été attaqué et tué alors qu’il rentrait chez lui après les cours.

Des croyants, des militants des droits des LGBT et des professeurs d’université ont également été l’objet de menaces et d’attaques armées. Entre octobre et décembre 2015, 37 leaders chrétiens ont reçu des menaces de mort. Le 27 novembre 2015, des hommes armés ont attaqué une mosquée chiite, tuant une personne et en blessant trois autres. Le 25 décembre 2015, un kamikaze a blessé trois personnes dans une mosquée ahmadie. Le 21 février des activistes ont tué un prêtre hindou et blessé un croyant. Le 15 mars 2016, un religieux chiite a été tué. Le 23 avril 2016, le professeur d’université anglais Rezaul Karim Siddique a été frappé à mort à la machette en se rendant à son travail. Le 24 avril un autre croyant hindou a été tué. Le 25 avril 2016, Xulhaz Mannan, rédacteur en chef du premier magazine LGBT du Bangladesh, et son ami Mahbub Tanay, militant des droits LGBT et comédien, ont été poignardés à mort. Et le 30 avril 2016, un tailleur hindou, précédemment arrêté et emprisonné pour avoir prétendument fait des commentaires désobligeants sur le Prophète Muhammad, a été frappé à mort à la machette.

Tandis que certaines de ces attaques ont été revendiquées par des groupes terroristes indigènes tels que l’Équipe Ansarullah Bangla et Ansar al-Islam, la branche bangladaise d’Al-Qaïda dans le sous-continent indien, d’autres ont été revendiquées par Daesh.
La réponse du gouvernement du Bangladesh à ces attaques a été extrêmement décevante ; la réponse aux attaques contre les athées et les militants laïques a été particulièrement décourageante. Personne à ce jour n’a été tenu pour responsable de ces meurtres. Alors que certaines arrestations ont eu lieu, peu de charges ont été retenues contre les auteurs. Certains athées et laïques menacés, qui sont sur les listes noires dressées par des groupes islamistes militants présumés impliqués dans des agressions en cours, se sont entendu inciter à l’autocensure ou à l’exil quand ils ont requis la protection de la loi. De nombreux militants sont également réticents à solliciter la police, craignant de se voir inculpés au titre de la Loi sur l’information, la communication et la technologie, qui criminalise les écrits blessant la croyance religieuse. Les autorités gouvernementales ont été incapables d’agir pour assurer aide et protection aux athées ou laïcs menacés, ou condamner publiquement les meurtres. Au lieu de cela, les autorités ont pris leurs distances avec les victimes, ou même semblé blâmer les défunts pour leurs propres meurtres.

Après l’assassinat de Niloy Neel, le Premier ministre Hasina a déclaré : « Vous ne pouvez pas vous en prendre à la religion d’autrui. Vous devez arrêter de faire cela. Il ne sera pas toléré que le sentiment religieux d’autrui soit blessé. » Après l’assassinat récent de Nazimuddin Samad, le ministre de l’Intérieur Asaduzzaman Khan a déclaré qu’une partie de l’enquête serait consacrée à « vérifier s’il a écrit quoi que ce soit de répréhensible sur ses blogs, » suggérant qu’une certaine justification pourrait être trouvée à la mort de Samad. Le ministre Khan aurait également indiqué : « Les blogueurs, ils devraient contrôler leurs écrits.(…) Je veux dire que les gens devraient faire attention à ne blesser personne dans tout ce qu’ils écrivent – offenser quelque religion, quelque croyance collective, quelque chef religieux que ce soit. » Quelques jours plus tard, le Premier ministre Hasina faisait état des mêmes sentiments, déclarant à propos des blogueurs laïques. « Je considère ces écrits non comme de la pensée libre, mais comme des mots obscènes. Comment peut-on écrire de telles choses ? Il est totalement inacceptable que l’on écrive contre notre prophète ou d’autres religions. Pourquoi le gouvernement serait-il responsable si ces écrits entraînent des incidents fâcheux ? Tout le monde devrait respecter la décence. Sinon le gouvernement ne saurait être responsable de quelque comportement sauvage que ce soit ».

Il n’est pas nécessaire d’être d’accord avec les opinions religieuses d’une autre personne pour reconnaître son droit d’exprimer ces opinions et de vivre en paix en la matière. La réponse à une expression que l’on désapprouve ne doit pas être la violence, mais l’argumentation contraire.
Ces meurtres d’écrivains, de blogueurs, d’éditeurs, de militants et de croyants innocents — tout simplement pour avoir exercé pacifiquement leurs libertés fondamentales — volent au Bangladesh des esprits brillants et de courageux défenseurs des droits de l’homme.
Il est inexcusable que les autorités gouvernementales aient, se plaçant en gros du côté des assassins extrémistes, demandé aux citoyens de s’autocensurer, et ont été incapables de fournir une protection suffisante ou d’inculper les tueurs.
Le Bangladesh s’est engagé à respecter les droits humains fondamentaux. La Constitution garantit à tous les citoyens le droit à la vie (article 32), la liberté de conscience et d’expression (article 39), et la liberté de religion (article 41). En outre, le Bangladesh est signataire du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui protège le droit à la vie (article 6), celui de ne pas être victime de discrimination pour divers motifs (article 2), la liberté de pensée, de conscience ou de religion (article 18), et la liberté d’expression (article 19).
Ces droits incluent la liberté d’adopter ou non une croyance religieuse, de changer de religion ou de conviction, d’observer et de manifester sa religion ou ses convictions individuellement ou collectivement, de parler librement et de s’exprimer en public sur ses croyances, idées ou convictions — sans crainte d’attaques de représailles ou de répression gouvernementale.

Nous appelons donc :

  • le gouvernement du Bangladesh à protéger vigoureusement le plein exercice de la liberté de religion, de croyance et d’expression, les athées, les laïques, les minorités religieuses qui sont menacés, et tous ceux qui exercent leurs droits dans leur pays ;
  • les autorités gouvernementales du Bangladesh à cesser, dans des déclarations publiques, d’invoquer la religion comme prétexte pour refuser les droits de certains Bangladais, et à condamner avec force et vigueur les attaques violentes contre les athées, les laïcs, les minorités, et tous ceux qui exercent leurs droits dans leur pays ;
  • Le gouvernement du Bangladesh à mener des enquêtes rapides, approfondies, efficaces, indépendantes et impartiales sur les meurtres commis depuis février 2015, et veiller à ce que tous les responsables soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables respectant les normes internationales ;
  • La communauté internationale à accroître son soutien et fournir une assistance au Bangladesh pour faire face à cette crise des droits humains.

3 mai 2016

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