n°824 - 03/10/2016
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Chronique d'Evariste

Combattre le racisme

Proche-Orient

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Chronique d'Evariste
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Espagne/Grande-Bretagne/France : où en est la gauche ?

par Évariste

 

Malgré la fronde de la majorité parlementaire du parti travailliste britannique contre Jeremy Corbyn, ce dernier s’est renforcé à la tête du parti. Les élections régionales espagnoles en Galice et au Pays basque ont montré une légère poussée de la droite et de Podemos au détriment des autres partis. En France, la décomposition des partis de la gauche de la gauche se poursuit. Seule, pour l’instant, la candidature de Jean-Luc Mélenchon suscite un espoir à gauche. Mais tout cela s’effectue dans le cadre d’un effondrement prévisible de la gauche toute entière (gauche de la gauche et gauche gouvernementale). La question se pose donc de savoir si on peut éviter un deuxième tour « droite versus extrême droite ».

Grande-Bretagne

Avec 77 % de participation au sein du parti travailliste britannique, 61,8 % des voix, soit 313.209, sont allées à Jeremy Corbyn, contre 193 229 à Owen Smith, le candidat de la majorité des députés de la formation. A noter que Jeremy Corbin a fait 61 000 voix de plus qu’en 2015.

Pour comprendre l’enjeu politique, il faut savoir que la majorité des députés et Owen Smith sont des néolibéraux, européistes alors que la base sociale ouvrière du parti travailliste a voté le Brexit. Ce scrutin était devenu nécessaire depuis que la majorité des députés avaient reproché à Jeremy Corbyn d’avoir soutenu avec peu de ferveur l’option de rester dans l’Union européenne. La majorité puissante qu’a obtenue Jeremy Corbin est due au soutien des syndicats, des ouvriers, des employés et des jeunes qui ont voulu rompre avec les politiques néolibérales de la direction d’avant 2015.

Bien évidemment, la tâche des nouveaux responsables ne sera pas facile. Car il faut conduire une mutation du parti travailliste britannique qui est loin d’être terminée pour que cela se transforme en une majorité populaire dans les urnes.

Espagne

Aux élections régionales en Galice, la droite (le parti populaire PP) garde sa majorité avec plus de 41 % des voix. Podemos fait une percée avec plus de 19 % des voix  dépassant les socialistes du PSOE qui font moins de 18 %. Le Bloc nationaliste de gauche dépasse 8 %. En résumé, on peut dire : maintien de la droite majoritaire, poussée de Podemos et recul du PSOE et du bloc nationaliste de gauche.

Aux élections régionales du Pays basque, poussée des nationalistes de droite (PNV) avec plus de 37 % des voix, recul des nationalistes de gauche avec un peu plus de 21 %, poussée de Podemos avec près de 15 % des voix, recul des socialistes du PSOE avec moins de 11,5 % et de la droite espagnole (PP) avec tout juste 10 % des voix.

Avec ces deux régions, c’est plus de 10 % du corps électoral espagnol qui a été appelé aux urnes. On voit là que le débat va faire rage au sein du PSOE entre ceux qui veulent un accord national avec la droite néolibérale espagnole et ceux qui veulent un accord à gauche avec Podemos. Après 9 mois sans majorité politique en Espagne, nous verrons s’il y aura une révolution de palais pour changer la direction du PSOE et refaire l’alliance néolibérale PP-PSOE ou s’il y aura une troisième élection législative en 2016 pour que le peuple espagnol choisisse entre ces deux options.

France

La situation française est le produit d’un ras le bol populaire à l’égard de la direction politique du pays depuis 2012 (avec les politiques d’austérité et la criminalisation de l’action syndicale organisée par le gouvernement), d’un processus de décomposition de toute la gauche qu’elle soit gouvernementale et néolibérale ou qu’elle soit la gauche de la gauche. Cette décomposition a pour principale cause le fait que la classe populaire ouvrière et employée qui représente 53 % de la population française s’abstient à 60 % aux élections.

Rappelons que François Mitterrand a été élu le 10 mai 1981 principalement parce qu’il a eu les suffrages de plus de 70  % des ouvriers et des employés. Le contraste est saisissant. Dans les colonnes de ReSPUBLICA, nous avons à de nombreuses reprises fourni un discours explicatif du pourquoi de ce désamour :politiques néolibérales, poussée du communautarisme dans la gauche de la gauche de préférence à la laïcité, facteur important en France d’unification du peuple mobilisé, refus des organisations à construire des campagnes d’éducation populaire refondée, ligne politique qui ne rompt pas avec le néolibéralisme et le communautarisme, stratégie électorale opportuniste, formation économique et politique quasi inexistante dans les partis et les syndicats, refus d’une analyse diachronique, refus de comprendre le réel du capitalisme aujourd’hui, etc.

Ajoutons à cela qu’il est plus difficile aujourd’hui de chercher les 500 signatures pour la présidentielle qu’en 2012. Nous passons allégrement d’un système de démocratie imparfaite à une démocrature. Comme le pouvoir n’est plus dans les communes mais dans les communautés de communes, les agglomérations et les métropoles et que tous leurs dirigeants sont soit PS soit LR, le chantage à la subvention bat son plein.

Même pour Jean-Luc Mélenchon, cela ne sera pas facile d’avoir les 500 signatures. Il en est à 200 promesses de signature. Et encore plus difficile pour tous ceux qui n’ont pas déclenché un rassemblement aussi large que lui.

Pour l’instant, nous nous avançons vers un deuxième tour probable et non souhaitable droite-extrême droite. Et ce ne sont pas les innombrables appels à l’union et à des primaires sans contenus de toute la gauche qui seront susceptibles de faire bouger l’électorat populaire abstentionniste.

Nous verrons la position du PCF début novembre. Mais, sans attendre, on ne peut pas faire l’économie des débats nécessaires pour construire non pas une gauche de la gauche en décomposition, mais une gauche de gauche dont les pratiques sociales et politiques soient à la hauteur des enjeux – comme nous l’avons déjà définie à plusieurs reprises dans ReSPUBLICA – et capable de redonner espoir aux couches populaires. Nos intervenants sont à votre disposition.

Combattre le racisme
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Un racisme à l'envers ?

par Gilles Clavreul

 

Fin août, un « camp d’été décolonial » a été organisé à Reims. Une réunion procédant du même principe avait eu lieu quelques temps plus tôt à l’université Paris VIII. Signe particulier : un accès réservé aux « racisés » c’est-à-dire, dans les faits, interdit aux « blancs ».

Prétendant s’inspirer des réunions féministes non mixtes, les organisateurs de ce camp d’été se défendent de tout racisme. S’il ne saurait s’agir de taxer d’intentions discriminatoires tous ceux qui ont participé à ces réunions, celles-ci révèlent un enfermement idéologique progressif aboutissant, de fait, à une vision du monde structurée en races. Ce qui est la définition même du racisme politique.

« Je suis un homme, et c’est tout le passé du monde que j’ai à reprendre. En aucune façon je ne dois tirer du passé des peuples de couleur ma vocation originelle. Ce n’est pas le monde noir qui me dicte ma conduite. Ma peau noire n’est pas dépositaire de valeurs spécifiques (…).
Je n’ai pas le droit, moi homme de couleur de souhaiter la cristallisation chez le Blanc d’une culpabilité envers le passé de ma race. Je n’ai pas le droit, moi homme de couleur, de me préoccuper des moyens qui me permettraient de piétiner la fierté de l’ancien maître. Je n’ai pas le droit ni le devoir d’exiger réparation pour mes ancêtres domestiqués. Il n’y a pas de mission nègre ; il n’y a pas de fardeau blanc »

Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs

La tenue de réunions publiques où s’exprime ouvertement une vision du monde marquée par l’affrontement entre « races » suscite un émoi légitime. Ceux qui ont recours à ce vocabulaire, que l’on croyait confiné à la plus extrême extrême-droite, en justifient l’emploi par un combat « décolonial » qui prétend lutter contre le « racisme d’Etat », symptôme d’une France incapable de solder son passé. Tournant le dos à l’antiracisme universaliste, honni et méprisé, ils se présentent comme des « racisés » porteurs d’un « antiracisme politique ».

Les réactions d’étonnement sont vite noyées sous une pluie d’éléments de langage : personne ne peut parler à la place des victimes, les féministes aussi ont tenu des réunions non-mixtes, il faut répondre à la montée de « l’islamophobie », etc. Et en effet : qui songerait à reprocher aux victimes de s’organiser loin des récupérations politiciennes ? Excellents communicants, les organisateurs du « Camp d’été décolonial » ont pris soin de limiter drastiquement l’accès de la presse à deux médias peu enclins à la critique, en leur demandant d’envoyer des journalistes eux-mêmes « racisés », par ailleurs sympathisants déclarés du mouvement. Appelons cela de la transparence maîtrisée.

De qui et de quoi parle-t-on ? Ni parti constitué, ni idéologie aux contours nettement définis, il s’agit plutôt d’une nébuleuse où l’on retrouve peu ou prou les protagonistes du meeting de Saint-Denis de décembre 2015 dont Tariq Ramadan fut l’orateur vedette et de la « marche des dignités » du mois d’octobre à Paris. Chacun opère sur un créneau militant spécifique, certains étant portés à la radicalité, d’autres recherchant davantage la visibilité médiatique et le contact avec des associations et des formations politiques, selon une division implicite mais efficace du travail militant.

Les pratiques et la phraséologie font la part belle aux grands classiques contestataires : radicalité du discours, théorisation poussée, dénonciation de l’oppression, etc. Les thèmes principaux sont la critique acerbe de « l’inconscient colonial » qui continuerait de gouverner les rapports entre la France et les minorités issues de l’immigration, d’où son appréhension conflictuelle de la diversité ; la dénonciation des violences policières dont les premières victimes sont les « racisés » ; le rejet de l’antiracisme traditionnel comme entreprise de récupération et de mise sous tutelle des minorités opprimées ; et enfin, « l’islamophobie », symptôme par excellence de la dérive identitaire de la France blanche et de ses élites, et donc thème privilégié de mobilisation.

Mais ce qui retient le plus l’attention est la référence, de plus en plus prégnante, à la race.

La première partie du raisonnement peut s’entendre : celle consistant à dire que les races sont des notions socialement et idéologiquement construites, au moyen desquelles les êtres humains sont assignés à leur origine. De là découlent certaines caractéristiques supposées, tant physiques que comportementales, qui signent les croyances, les opinions et les pratiques culturelles. On y distingue nettement l’empreinte des « cultural studies » américaines, elles-mêmes réinterprétant et confrontant aux réalités d’un pays multi-ethnique les apports du structuralisme européen et singulièrement français. Le relatif désintérêt pour l’analyse économique et la place éminente qu’il accorde aux communautés et au fait religieux finissent d’en convaincre : cet anti-colonialisme-là est plus « liberal », au sens anglo-saxon, que marxiste. Il se montre d’ailleurs remarquablement peu critique envers l’économie de marché et la société de consommation, comme la polémique sur la « mode pudique », où étaient défendues les grandes enseignes commerciales investissant ce marché que l’on dit prometteur, l’a récemment illustré.

Plus préoccupant, cette fabrique  des identités, conçue dans le cadre d’un raisonnement manichéen, semble fonctionner à sens unique. Le « racisé », comme l’emploi du participe passé l’indique, ne choisit pas sa race. C’est le blanc qui la lui impose, perpétuant la domination historique de l’occident sur les peuples colonisés.

Ainsi le monde se diviserait entre blancs et non-blancs, entre oppresseurs et opprimés, entre coupables et victimes. Dans ce schéma, le modèle républicain n’est pas vu comme une rupture ni un progrès, mais au contraire comme la poursuite de la domination par d’autres moyens, moins coercitifs mais tout aussi redoutables. On n’aurait ainsi proclamé l’égalité des droits et l’universalité du genre humain que pour mieux maintenir les peuples sous le joug occidental. La laïcité est plus particulièrement dénoncée comme une arme idéologique visant à exclure et inférioriser le racisé en délégitimant sa religion.

Ainsi, ce ne sont pas seulement les races qui sont une « invention » des blancs, mais bien le racisme lui-même. Il ne saurait donc y avoir de racisme dirigé contre les blancs, ni de racisme entre non-blancs, sinon comme sous-produit de la domination blanche et exacerbation des rivalités entre dominés. Il s’agit d’un racisme qualifié de « structurel » – il n’est pas un élément de l’ordre social, mais l’ordre social lui-même – et « d’institutionnel » : l’Etat, les politiques publiques, les discours que ses acteurs produisent visent à assurer la domination raciste, par la coercition ou la persuasion. Les politiques visant à lutter contre le racisme et les discriminations sont dénoncées à ce titre comme le comble de la supercherie.

Sans s’attarder sur le caractère circulaire du raisonnement, qu’est-ce qui saute aux yeux ? Que cet antiracisme est raciste, tout simplement, et ce au sens premier du mot : une vision du monde structurée en races distinctes, séparées et hiérarchisées. Il s’agit certes d’un racisme d’un genre nouveau, notamment parce qu’il ne s’embarrasse pas de justification pseudo-biologique et qu’il fait siens nombre de concepts issus de la gauche radicale. De même il ne formule pas explicitement l’idée d’une suprématie : on ne trouve pas d’invocation de la supériorité des « races non blanches », même si le manichéisme avec lequel sont présentés les turpitudes des uns et la dignité des autres laisse flotter un parfum de supériorité morale du racisé sur le blanc.

En revanche, il repose bel et bien sur une opposition structurante entre des groupes humains essentiellement définis par leur apparence physique, leur origine et – fait singulier mais non surprenant compte tenu de l’importance accordée à la défense de l’islam comme religion des opprimés – leur croyance.

De même, à l’exemple du racisme biologique, il se légitime par une relecture partielle et partiale de l’Histoire, faisant l’impasse sur tout ce qui ne conforte pas la théorie – à commencer par le fait que le colonialisme et l’esclavage sont loin d’être le propre de la modernité occidentale. En redoublant de critiques contre la République, coupable d’avoir offert une pseudo-émancipation par l’octroi de droits purement formels et d’avoir ainsi pérennisé et renforcé la domination raciale, ce néo-racisme referme le système sur lui-même : les races sont condamnées à s’affronter car toute prétention à l’égalité, tout reconnaissance de la diversité, ne visent qu’à obtenir, par la ruse, l’assentiment du dominé.

Autre point d’analogie : le statut ambigu des métis, qu’on ne sait comment classer ni considérer, et celui, particulier, des juifs, considérés comme des racisés que les blancs, pour expier la culpabilité de la shoah, ont retourné en leur « offrant » Israël, faisant d’eux des victimes devenus bourreaux – ce qui permet au passage de raccrocher le récit néo-raciste à la défense de la cause palestinienne tout en prétendant distinguer la dimension politique – la lutte contre le sionisme – d’un antisémitisme difficile à assumer. Seules les figures les plus radicales du mouvement s’aventurent franchement sur ces terrains glissants ; les autres ne s’y risquent pas, mais ne s’en démarquent pas non plus.

Dès lors, à partir d’un simple postulat socio-historique relativement inoffensif (les races sont un construit social sur la définition duquel les acteurs sociaux s’affrontent), quelque chose se cristallise sous nos yeux : les races sont une essence, un concept chimiquement pur. Peut-on sortir de sa condition ? Il semble que non. Un racisé qui refuse de se reconnaître tel devient un oncle Tom, un « collabeur », un racial-traître. Symétriquement, un blanc ne peut pas comprendre le racisme parce qu’il n’en a jamais souffert – d’où la disqualification de toute prise de parole « blanche » en matière d’antiracisme.

Ce faux antiracisme n’est pas seulement absurde – puisqu’il vise à combattre le racisme en imposant une vision raciste de la société : il porte en lui la négation de l’individu comme sujet autonome, libre, doué d’esprit critique, et capable de se définir dans un rapport dialectique à son ascendance. Produit de ses gênes, de son histoire, de sa « race », celui-ci n’a d’autre volonté que celle de sa lignée, d’autre identité que celle de son sang. Par conséquent, il n’y aurait pas à comprendre, seulement à admettre, que l’Histoire est histoire de la lutte des races, où chacun a sa place et son identité selon une définition sur laquelle il n’a aucune prise. L’individu s’efface derrière un principe hétéronome : une loi qui lui est extérieure le définit et le contient tout entier, à l’image du groupe auquel il appartient.

En parlant d’émancipation, de liberté, en promettant de « rendre la parole aux victimes », les néo-racistes emploient des termes que tous les démocrates ont envie d’approuver, mais que leur système de pensée contredit radicalement, car il sape les bases mêmes de ce qui rend possible l’expression d’une parole libre, c’est-à-dire l’autonomie du sujet. Ce n’est pas la liberté de dire ce qu’on veut, mais l’injonction de dire ce que le groupe veut qu’on dise.

Le « nouvel antiracisme », qui n’a d’antiraciste que le nom et mérite plutôt celui de néo-racisme ou d’essentialisme, détourne habilement à son profit certaines des valeurs que cet « occident colonial » tant exécré choie le plus : la liberté individuelle, la défense du faible contre le fort, le pluralisme des opinions et des cultures. Ce discours emprunte à la langue libérale pour rendre acceptable la morale la plus rétrograde et justifier les propositions les plus choquantes : l’asservissement de la femme au nom du respect des cultures, la condamnation de l’homosexualité comme « pratique importée » chez les colonisés, la défense des prêcheurs fondamentalistes au nom de la liberté de pensée ou encore le séparatisme culturel, comme le propose cet atelier du camp décolonial baptisé « Non à la diversité : décoloniser la culture ».

Une partie de la presse et certains milieux universitaires portent à ces mouvements une considération bienveillante, pas toujours dénuée de démagogie ni de suivisme ; cet adoubement contraste avec l’intérêt pour l’heure limité qu’ils suscitent dans les quartiers populaires. Néanmoinsil ne faut pas mésestimer leur capacité à capter une demande et à instrumentaliser une souffrance trop rarement entendue par la classe politique. Et il faut avertir sur les risques qu’ils font courir, non pas à la société toute entière, mais aux personnes qui souffrent du racisme et des discriminations et qui, sous couvert « d’apprendre à se défendre » face au racisme d’Etat, se laissent gagner par une idéologie de repli et de rupture.

Car, pour schématique et caricatural qu’il nous paraisse, ce système de pensée est également construit, cohérent, séduisant dans sa radicalité, et servi par une maîtrise redoutable des nouveaux modes de communication, réseaux sociaux en tête. Il est le symétrique parfait des délires xénophobes annonçant le « grand remplacement » et forme avec eux cette tenaille identitaire qui se resserre peu à peu, si l’on n’y prend garde, sur une société française très majoritairement attachée aux valeurs démocratiques et guère décidée à tomber dans le piège de l’essentialisation. Une symétrie qui va jusqu’à la convergence des luttes, quand certains membres de la mouvance s’associent à l’extrême-droite pour dénoncer le mariage pour tous ou les ABCD de l’égalité.

Ironiquement, cet antiracisme dévoyé ne déteste rien tant que le métissage, la diversité, le multiple. Il ne renverse pas le racisme, il l’inverse seulement. Feignant de dénoncer la séparation, il l’entérine. Mais au fond, rendre impossible l’expression d’un choix individuel qui ne soit la marque ni d’un déchirement ni d’une rupture, refuser l’échange et le mélange des cultures et pousser par là même à un conflit frontal entre des communautés artificiellement définies, n’est-ce pas le but recherché ?

 

Proche-Orient
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Nos fils de pute

Les Etats-Unis et Daech

par Ilya U. Topper

 

Publié en espagnol le 22 septembre 2016 sur M’Sur http://msur.es/2016/09/22/topper-Daech-hijos/3/. Traduction de Alberto Arricruz

 Il est difficile d’avoir un texte objectif sur cette partie du monde ! Cet article fait une analyse intéressante des causes externes du conflit syrien avec,  en filigrane, la thèse d’une implication du “lobby sioniste”  qui ne nous paraît pas convaincante : pour Israël la frontière nord est restée calme depuis 1974 grâce au clan Assad soutenu par les allaouites, les chrétiens et les sunnites baassistes . La déflagration de la guerre civile syrienne a été ressentie comme une menace de déstabilisation globale et, loin de soutenir Daech, Tel Aviv a refusé en 2011-2012 de prendre parti contre Assad, comme le préconisaient l’Occident et l’Arabie saoudite. Le gouvernement israélien cherche surtout à rester neutre le plus longtemps possible, la ligne rouge restant la dotation en armes stratégiques du Hezbollah, et se satisferait d’un maintien du Baas à Damas, en  accord avec Poutine.
Certes, les puissances régionales et mondiales mettent de l’huile sur le feu, mais il faut que les conditions objectives du pays soient réunies pour créer un tel drame et il faudrait évoquer aussi les causes internes du conflit, liées à la réalité économique, politique, ethnique et religieuse du pays. La Syrie, comme l’Irak d’ailleurs, sont des nations de fraîche date (années 40) qui peuvent disparaître pour laisser la place au chaos…
La Rédaction 

Comment se peut-il que la plus grande puissance militaire au monde bombarde sans répit, depuis un an, l’État islamique en Syrie et en Irak, sans que Daech ne plie ? C’est simple : sa disparition n’intéresse pas les États-Unis. Il n’y a pas d’intention d’éradiquer Daech.

La milice ultra-islamiste continue à dominer un territoire plus grand que la Grèce, malgré les bombardements et les diverses guérillas qui entendent expulser les djihadistes pour occuper leur place (géographique mais aussi, le plus souvent, idéologique). Non pas que cela soit impossible : les milices kurdes, avec quelques fusils d’assaut, en ont été capables quand elles s’y sont mises. La question est : pourquoi cela ne va-t-il pas plus loin ?

Les avantages de Daech

En finir avec Daech serait une grave erreur pour les intérêts des États-Unis. Mieux vaut pour eux que la milice continue d’exister et de sévir, mais sous contrôle, sans se disloquer.

Les avantages sont nombreux : d’une part, Daech sert d’aimant à tous les islamistes de par le monde, qui accourent à l’appel du djihad. Plutôt que d’avoir à les identifier un à un, dans de laborieuses enquêtes de police, on les laisse partir en Syrie et, avec un peu de chance, ils y meurent au combat. Peut-être même périssent-ils en tuant d’autres musulmans tout aussi détestables, donc c’est tout bénéfice. Plus Daech durera longtemps, plus nombreux seront les musulmans radicaux tués, et moins il faudra s’en occuper.

Bien sûr, le risque est qu’ils survivent et retournent, par exemple en France, où ils pourront mettre à profit leur expérience du combat pour commettre quelque attaque. Mais il est bien tard pour éviter cela désormais : si on décidait maintenant d’en finir avec Daech, il y aurait suffisamment de radicaux formés là-bas qui fuiraient dans tous les coins de la planète ; aussi mieux vaut laisser brûler le foyer syrien, et que tous les djihadistes y soient occupés.

D’ailleurs, la majorité des attentats commis en Europe l’ont été par des types s’inspirant du discours de Daech, mais ni entraînés en Syrie, ni directement commandés, et avec des armes qui ne viennent pas d’un arsenal militaire (un camion, un couteau, une hache). La disparition de Daech en Syrie ne fera pas diminuer l’attractivité de son discours ; au contraire, tant que Daech doit consacrer d’importantes ressources à l’administration et la défense de son territoire, cela le détourne du travail de captation et d’armement de militants en Europe.

Plus important encore : Daech maintient occupé le régime de Bachar El Assad, allié de la Russie et surtout de l’Iran. Pourquoi donc donner un coup de main à l’axe Moscou-Téhéran-Damas ? À Washington, ils devraient être bien sots pour faire une chose pareille ; il faudrait qu’ils croient à leur propre discours sur la paix mondiale…

Cet axe va jusqu’à Beyrouth. Car tant que Daech existe, le Hezbollah, cette milice libanaise à la solde de Téhéran devenue la garde prétorienne du régime d’Assad, doit être déployé sur le front. Et, en dépensant hommes et moyens dans le marasme syrien, il s’affaiblit au Liban, où il est l’adversaire le plus féroce des partis sunnites soutenus par Washington.

L’équation est simple : si les USA en finissaient avec Daech, l’Iran reprendrait le contrôle d’une grande part du Proche-Orient, de ses frontières jusqu’à Beyrouth. Pour les Etats-Unis, tant que Daech existera, des canailles musulmanes tueront d’autres canailles musulmanes : c’est ce qui peut arriver de mieux.

La politique de destruction de la Syrie

Théorie du complot ? Non. Ce que vous venez de lire n’est pas une idée de moi. C’est le résumé, en partie même la citation littérale, d’un essai intitulé « Strategic Mistake », publié le 2 août dernier par l’analyste israélien Efraim Inbar. Avec une petite différence : lorsque je dis que Washington agit ainsi, Inbar dit qu’il devrait agir ainsi. Il suggère, il insiste, il exhorte le gouvernement nord-américain à ne pas en finir avec Daech, pour toutes les raisons énumérées.

Il reste à voir si Washington a prêté attention à cette analyse (en supposant que Inbar leur ait fait parvenir sa réflexion pointue, quand les USA ont fondé la coalition anti-djihadiste à l’automne 2014). Ce ne serait pas étonnant : Inbar est le directeur du Begin Sadat Center for Strategic Studies à l’université bar-Ilan en Israël (il se présente lui-même comme « réaliste, conservateur et sioniste »), il est docteur de l’université de Chicago, auteur de cinq livres et quatre-vingt essais, conférencier régulier à Harvard, Oxford, Columbia et Yale. Mais en plus, il est « fellow » du Middle East Forum, le centre d’analyses et d’influence le plus rageusement de droite et pro-israélien de tous ceux, nombreux, présents aux Etats-Unis.

Le ME Forum n’est pas n’importe quoi : il soutient le Washington Project, dont le but déclaré est d’influencer la politique des USA. Avec succès semble-t-il : grâce au blog Obama Mideast Monitor, créé « pour influencer les nominations et la politique de l’Administration concernant le Proche-Orient », l’une de ses figures, Steven J. Rosen (ex-chef du lobby pro-israélien AIPAC) aura réussi en 2009 à empêcher Obama de nommer la personne qu’il avait choisie (Chas Freeman) au poste de coordinateur des services secrets. En tout cas, le ME Forum s’en vante, proposant sur sa page internet les liens vers les reportages de la presse nord-américaine décrivant avec dégoût le ventilateur à merde mis en marche par Rosen pour dénigrer Freeman. Le but, atteint, était d’isoler Obama des diplomates qui déplaisent au lobby pro-israélien.

Je dis « pro-israélien » mais l’expression est impropre. Ce n’est pas un lobby en faveur d’Israël, mais en faveur de l’extrême droite israélienne. Le ME Forum et l’AIPAC travaillèrent d’arrache-pied pour enterrer les politiques de Yitzhak Rabin et Shimon Pérès et porter Netanyahou au pouvoir – toujours selon un reportage fièrement affiché sur la page internet du ME Forum. Il faut être gonflé ; autant qu’Efraim Inbar quand il préconise que « les méchants tuent les méchants » puisque c’est « utile et même moral ».

En d’autres termes : la destruction de la Syrie est « utile et morale ». Daech, ce sont des fils de pute, mais ce sont nos fils de pute. Du moins dans la vision du Monde qui domine à Tel-Aviv. Pense-t-on de même à Washington ? J’en connais beaucoup qui se jetteraient du pont de Brooklyn avant d’assumer qu’Obama puisse penser ainsi. Mais, comme nous l’avons vu, les fonctionnaires qui dirigent tout ce machin ne sont pas ceux qu’Obama aurait voulu nommer.

On peut bien entendu ne pas partager les bases morales de cette vision ni même son utilité : toute l’argumentation fonctionne si et seulement si on accepte que « le vrai ennemi c’est l’Iran », mantra répété par Inbar au sein du ME Forum depuis des années, et donnant pour acquis que bombarder l’Iran est indispensable. Disons que le gouvernement d’Obama ne partage pas cette vision ; mais la droite israélienne installée depuis des années au pouvoir à Tel-Aviv a fait de cette guerre fictive sa raison d’être, sa philosophie politique et sa justification. Sans elle, le fantasme d’être la nation la plus menacée de la Terre, seul ciment qui maintient unie une société israélienne profondément fracturée, perdrait de sa force.

De Tel-Aviv à Ryad

Mais s’en tenir aux besoins électoraux de Netanyahou serait une erreur. La géostratégie que le lobby de l’ultra-droite israélienne veut imposer à Washington dispose d’un autre acteur de plus grand poids : l’Arabie saoudite.

À dire vrai, l’histoire selon laquelle le roi saoudien aurait financé la campagne électorale de Netanyahou est fausse (et basée sur un chiffre fabriqué). Ce qui est certain par contre, c’est qu’Israël et l’Arabie saoudite se trouvent dans le même camp face aux USA qui lentement changent de cap (comme un immense porte-avions, selon l’expression de Uri Avnery) et cessent progressivement de considérer l’Iran comme un ennemi mortel. Or, pour Ryad, il s’agit d’une question désespérée de survie politique.

La rivalité entre Ryad et Téhéran s’est approfondie ces dernières décennies. Au milieu du vingtième siècle, l’Arabie saoudite était un pays arabe parmi d’autres, un pays que les héritiers de la civilisation arabe – Le Caire, Damas, Bagdad – prenaient de haut. La guerre du Yémen, et la confrontation géopolitique entre les gouvernements égyptien et saoudien, aboutit en 1970 à la victoire du camp républicain mais elle fut une déroute économique pour son parrain, l’Égypte, qui ne s’en est jamais remise.

À partir de là, Ryad commença à remplacer les armes par les barbes : finançant bourses, universités, écoles, instituts, mosquées, imams sur les cinq continents, particulièrement dans les pays appelés musulmans, amen de ses télévisions par satellite. C’est la génération issue de cette vague de wahhabisation qui accourt toute préparée maintenant à l’appel des groupes armés tels le Front Al Nosra ou Daech : parce que ces groupes diffusent l’idéal saoudien qui leur a été inculqué.

Le seul pays qui a disputé à l’Arabie saoudite, durant des années, l’hégémonie au sein de ce qui est appelé le monde arabe, c’est l’Irak, en se réclamant héritier d’une tradition totalement opposée : le panarabisme non religieux. C’était le seul pays qui le pouvait ; ses réserves de pétrole sont les deuxièmes plus grandes parmi les pays arabes, et l’Irak avait tout ce que l’Arabie saoudite n’aura jamais : de l’eau, une agriculture, une histoire, une société cultivée et un leader ambitieux capable de galvaniser les masses de nombreux pays se reconnaissant sous l’étiquette arabe.

Cette ambition même de Saddam Hussein aura scellé sa défaite : le piège de la guerre du Koweït a permis d’abord d’isoler l’Irak durant une décennie, puis finalement de le détruire par une invasion qui n’a jamais profité aux États-Unis – bien qu’elle ait été très profitable à des familles proches de cet associé commercial de la dynastie saoudienne qu’était Georges W. Bush.

Cette destruction de l’Irak n’a pas été opérée pour « voler le pétrole » comme le veut la légende urbaine : l’importation de brut irakien aux USA était à son apogée en 2001, et n’a jamais cessé de se réduire depuis – jusqu’à stagner de nos jours au tiers du volume d’alors. J’avais décrit en 2012 (« Au nom de l’Arabie », M’Sur, 23 août 2012) la destruction méticuleusement planifiée de l’Irak en tant que nation, en tant qu’État et en tant que puissance économique, et il n’y a guère à ajouter depuis. Il est simplement de plus en plus clair chaque jour que, une fois instaurée la division sectaire entre chiites et sunnites, l’Irak passe inexorablement sous la sphère d’influence de Téhéran. Un Irak en paix ne pourra être qu’un pion géopolitique de Téhéran. C’est pour cela que l’existence de Daech a pour rôle d’empêcher, à tout prix, la paix.

La géographie dit le reste : un Irak pro-iranien ferait le lien territorial avec la Syrie d’Assad, qui n’a rien de chiite mais que les circonstances politiques et historiques ont positionné du côté panarabe, pas du côté islamiste, donc en opposition à l’Arabie saoudite et aujourd’hui affiliée au camp de l’Iran. La dernière pièce, celle de la connexion avec la Méditerranée, c’est le Liban en partie contrôlé par le Hezbollah pro-iranien.

Les deux premières années de guerre civile ont mis en évidence que le seul rapport de forces locales ne suffit pas à renverser Assad et instaurer un régime de type sunnite susceptible de passer dans le camp saoudien. Alors la brèche sombre de Daech est devenue l’unique antidote à l’axe Téhéran-Bagdad-Damas-Beyrouth. Avec le même mode opératoire appliqué à l’Irak : détruire la Syrie.

Vers où se dirige Washington ?

J’ai le sentiment que Washington n’a pas les moyens d’imposer un critère différent. Obama peut rétablir les relations avec l’Iran, ce qui est un grand pas, mais il est très probable que la CIA ne peut pas se passer d’une bonne relation avec le Mossad, et que le Pentagone ne peut agir contre le critère de Ryad qui accueille les bases militaires américaines les plus importantes dans la zone (la rivalité entre l’Arabie saoudite et le Qatar s’est déjà décantée en faveur de Ryad, et n’est jamais allée plus loin que la question de savoir qui est à la tête de la suprématie wahhabite).

Avec l’administration d’Obama contrôlée par des groupes tels que AIPAC et ME Forum, que dire de plus ? Pour preuve, un indice : la politique d’Obama face à l’occupation de la Palestine est impossible à distinguer de celle du gouvernement Bush. Durant les huit ans de présidence de Georges W. Bush, les implantations coloniales en Cisjordanie – cet outil employé par l’ultra-droite israélienne pour dynamiter tout processus de paix – se sont accrues de 90 000 personnes. Durant les six premières années de la présidence Obama, il y a eu encore 90 000 colons de plus. Washington a continué à opposer son veto aux résolutions de l’ONU condamnant les implantations illégales, bien qu’elles soient illégales selon une définition établie par les États-Unis eux-mêmes.

Non, ne vous faites pas d’illusions quant à la marge de manœuvre dont disposerait Obama. Ne vous faites pas d’illusion non plus à propos de Hillary Clinton. L’information selon laquelle l’Arabie saoudite aurait financée sa campagne a elleaussi été démentie, par l’agence officielle jordanienne (Petra) qui l’avait d’abord diffusée (« erreur informatique »…). Il est vrai que la Fondation Clinton (à vocation humanitaire, non politique) a reçu ces huit dernières années des dizaines de millions de dollars versés par le gouvernement saoudien et par des ressortissants de ce pays, entre autres.

Mais pas besoin de s’arrêter là-dessus. Il suffit de lire le discours de Clinton devant l’AIPAC en mars dernier pour savoir qui est le grand ennemi international pour la probable future présidente des Etats-Unis : « les agressions continues de l’Iran, la récente vague de radicalisme et l’effort grandissant pour délégitimer Israël sur la scène mondiale » sont, dans cet ordre, les « trois menaces » que Clinton promet de combattre. 20 % de son discours (660 mots sur 3300) ont été consacrés à la menace iranienne (y compris le Hezbollah, 86 mots), pour 130 mots seulement dédiés à Daech. « Notre objectif ne peut pas être de contenir ISIS, nous devons battre l’ISIS », a-t-elle pourtant affirmé : curieusement, sans mentionner ni la Syrie ni l’Irak, mais en citant un attentat à Istanbul où moururent des juifs, le Sinaï et Gaza. De fait, la seule fois où elle cite la Syrie dans ce discours, c’est pour reprocher à l’Iran de s’en servir pour menacer Israël.

Clinton se propose peut-être d’éradiquer Daech dans le Sinaï. S’agissant de la Syrie, elle suivra fidèlement la ligne marquée par le tandem Tel-Aviv/Ryad. Et tant que Daech sera une pièce utile dans cette longue guerre, les bombardements continueront d’être la farce qu’ils sont aujourd’hui.

Il est vrai que l’autre camp a pu aussi profiter de Daech comme instrument à court terme. Ce fut la première stratégie d’Assad : permettre que les groupes ultra wahhabites se renforcent sur le territoire pour absorber les armes, l’argent et les combattants, affaiblissant les groupes aux idées quasi démocratiques – tels l’Armée syrienne libre – et annulant la légitimité de toute rébellion – tous les opposants sont devenus « terroristes et djihadistes ». Ça a marché ; et Daech reste utile pour l’entrée de la Russie dans les combats, bombardant les groupes rebelles au prétexte d’aller en mission contre Daech.

Dans ce bras de fer sur la longue durée, chaque partie poursuit la même fin : l’annihilation de la société syrienne.

Assad aura gagné quand Daech aura phagocyté toute la Syrie opposante, que soit militairement ou idéologiquement ; il sera alors la seule option pour gouverner les ruines de son pays. Nous y sommes presque.

L’Arabie saoudite aura gagné si Daech parvient à détruire toute la Syrie, au point que le pays qu’Assad prétend gouverner aura cessé d’exister. Il n’y aura plus de Syrie, comme il n’y a déjà plus d’Irak.

Il faut encore un peu de temps pour cela. Mais nous avons huit ans devant nous.

 

 

 

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Vive « La Sociale » !

Voir et utiliser le film de Gilles Perret

par ReSPUBLICA

 

Ce film de Gilles Perret « La Sociale. Vive la Sécu ! », dont la sortie nationale en salles aura lieu le 9 novembre 2016, est un excellent support d’éducation populaire.

Il retrace l’épopée de la création de la Sécu en 1945-46, en rendant ses lettres de noblesse à la responsabilité collective dans la concrétisation de cet acte social. Par la suite il démontre sa fragilité actuelle et la nécessité de la défendre et en même temps de la refonder.
Déjà programmé dans plus de 200 villes avec plus d’une centaine de séances débat prévues, un débat sur ce film est le moyen de commémorer les 70 ans de la Sécurité sociale oubliés par la plupart des organisations sociales et politiques alors que ce fut la proposition la plus avancée du programme du Conseil national de la Résistance.

De la démocratie sociale vers l’étatisation puis la privatisation

La Sécurité sociale fut un service public original et indépendant de l’Etat, directement géré par les représentants élus des assurés sociaux lors des élections générales de la Sécurité sociale. Elle fut fondée comme une Institution du droit social par cinq grands textes : les ordonnances des 4 octobre (qui prévoit un réseau coordonné de caisses se substituant à de multiples organismes) et 19 octobre 1945 (concerne les risques maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès) et les trois grandes lois d’Ambroise Croizat des 22 mai (pose le principe de la généralisation de la sécurité sociale à l’ensemble de la population mais les professions non salariées s’y opposeront), 22 août (étend les allocations familiales à pratiquement toute la population) et du 30 octobre 1946 (précise les modalités de fonctionnement du système de réparation des accidents du travail à la Sécurité sociale). Son financement fut prévu par la cotisation, prélèvement sur la valeur ajoutée dès la création de richesse. Elle assura le remplacement de la charité par la solidarité : à chacun selon ses besoins, chacun contribuant selon ses moyens.
Tous ces principes constitutifs ont été depuis détruits par touches successives, d’abord par l’étatisation : décret du 12 mai 1960 (augmentant les pouvoirs du directeur nommé par l’Etat), les quatre ordonnances Jeanneney du 21 août 1967 (qui met fin à la démocratie sociale par la suppression des gestionnaires élus qui représentaient alors 75 % des conseils d’administration), par la fiscalisation via la CSG instituée par la loi de finances du 28 décembre 1990 et du plan Juppé qui entre en application en 1996 et finalise l’étatisation de la Sécurité sociale.
Mais le processus d’étatisation n’était que le préalable au processus de la privatisation qui fut engagée en 1983 (forfait hospitalier), par la création de la Cades institué par l’ordonnance du 24 janvier 1996 pour financer la dette sociale via les préteurs privés, par la transformation en 2001 de l’ancien  Code de la Mutualité par un code assurantiel, par la réforme Douste-Blazy de 2004 supprimant les conseils d’administration remplacés par des conseils avec des pouvoirs très limités et créant l’Union nationale des organismes complémentaires à la sécurité sociale (UNOCAM) pour rassembler les mutuelles avec les institutions de prévoyance et la branche assurantielle du Medef, par le financement des hôpitaux par la tarification à l’activité (T2A) à partir du Plan Hôpital 2007 en 2003 et mise en place par les ordonnances de 2005, par la loi HPST dite Bachelot en 2009 transformant l’hôpital en hôpital-entreprise autour du directeur nommé par la nouvelle Agence régionale de santé(ARS) elle-même émanation verticale de l’appareil d’Etat, par la nouvelle définition du service public hospitalier de Marisol Touraine, par l’institutionnalisation et le développement des dépassements d’honoraires, etc.
Alors que le budget de la Sécurité sociale est le premier budget humain en dépassant les 460 milliards d’euros, que l’ensemble de la protection sociale pèse plus de 660 milliards d’euros – soit bien plus que le budget de l’Etat (340 milliards d’euros) – peu de débats citoyens organisés par les organisations syndicales, associatives et politiques. Alors que pris globalement, c’est la première préoccupations des salariés avec le chômage et la précarité. Cherchez l’erreur !
C’est avec des ciné-débats autour d’un tel film que nous commencerons à relever le gant pour bien comprendre le passé, analyser le présent et pouvoir alors construire l’avenir et l’espoir correspondant. Nos amis du Réseau Education Populaire (REP), partenaires de l’équipe du film pour l’animation des ciné-débats sont à votre disposition. Vous pouvez aussi passer par la rédaction de Respublica.

Partenaire du film, l’UFAL a produit un clip vidéo très pédagogique : à utiliser sans restrictions !

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« Pour une approche critique de l'islam », par Yvon Quiniou

par Bernard Teper

 

Il manquait un élément du puzzle. Yvon Quiniou, philosophe marxiste, lance le débat pour l’introduire1. Pour avoir une chance de marcher vers une transformation sociale et politique nécessaire, encore faut-il de nombreuses conditions. L’une d’entre elles consiste à exercer notre esprit critique sur l’ensemble des idées qui participent à la « vraie vie » dans notre formation sociale capitaliste. La laïcité étant entre autres liberté de conscience, elle nous invite, dans le respect des croyants, à user de la liberté de critique des religions. Yvon Quiniou participe ainsi à un débat nécessaire alors que de nombreux éléments de la gauche sont souvent pris à défaut, face à la droite et à l’extrême droite, par leur propension à ériger des tabous qu’il est interdit de discuter.2
D’entrée de jeu, il s’inscrit dans le sillage de Meddeb et d’Adonis, deux intellectuels de culture musulmane dont le courage intellectuel n’est plus à démontrer, et du Goya qui a dit : « Le sommeil de la raison engendre des monstres ». Il paraphrase Einstein avec en exergue la formule : « Nier un problème empêche de le résoudre ». Et loue le courage de Spinoza qui, dans son Traité théologico-politique, dénonce ce qu’il considère comme des aberrations dans toutes les religions y compris le judaïsme dans lequel il est né.
Dés le début, il précise que son propos « ne concerne pas les musulmans dans leur pratique quotidienne, mais seulement la religion musulmane en elle-même, ignorée dans ses fondements par la majorité d’entre eux ». Ainsi il critique comme nous le piège de l’utilisation du concept d’islamophobie qui vise à ne pas séparer la critique contre les musulmans qui relève du racisme anti-musulman à sanctionner sévèrement et la critique d’une religion qui relève, elle, d’un droit citoyen inaliénable dans toute République émancipatrice.
D’entrée de jeu, il critique une position que nous défendons à ReSPUBLICA, celle de faire une différence entre islam et islamisme. Il considère que cela innocente « d’une manière subreptice le premier distingué artificiellement du second ».
Nous estimons quant à nous qu’il faut distinguer islam et islamisme non pour dédouaner quoi que ce soit mais pour distinguer le second – qui doit être combattu dans notre pratique sociale et politique comme toutes les extrêmes droites religieuses – alors que le premier comme toutes les religions ne doit être soumis qu’à la critique, ce qui pour nous est différent.
Yvon Quiniou refuse donc l’objection de la contextualisation du texte coranique puisqu’il est présenté comme une vérité absolue et l’interprétation qui est pour lui « une stratégie herméneutique [qui ne vise qu’à] sauver un texte religieux, vis-à-vis des démentis que lui oppose, dans sa lettre, l’actualité scientifique ou politique contemporaine, en prétendant lui donner un sens caché que pendants des siècles on lui a refusé ! ». Nous estimons à contrario que les éventuelles contextualisations et interprétations concernent principalement ceux qui se déclarent musulmans mais pas forcément les autres. Par contre, ce qui concerne tous les citoyens sans exception pour avoir le plus haut degré de liberté pour tous, c’est le respect du principe de laïcité qui nous impose d’abord de l’appliquer dans ses quatre items3 mais aussi : d’une part de combattre toutes les extrêmes droites, donc aussi les extrêmes droites religieuses, donc aussi l’islamisme, et d’autre part de critiquer toutes les idées que nous considérons comme contraires à la nécessaire émancipation humaine, et donc toutes les religions y compris l’islam. Combattre est un mot plus large que la simple critique d’une idée.
Reprenant les idées de son livre précédent Critique de la religion. Une imposture morale, intellectuelle et politique, Yvon Quiniou estime important de remettre en cause l’idée de « révélation », il développe les raisons qui selon lui justifient le fait que l’islam, comme les autres religions est, dans ses termes, une imposture, c’est-à-dire que l’islam prétend être ce qu’il n’est pas et prétend apporter ce qu’il n’apporte pas. Et il décline cela sur le plan intellectuel, moral et politique. Il rapporte cependant que sa critique de l’islam en ses fondements « n’est qu’un cas particulier, aujourd’hui, d’une critique générale des religions en leurs fondements même qu’il convient de réopérer ».
Un certain nombre de versets du Coran sont présentés pour justifier sa thèse concernant la violence dans le texte même. L’auteur note plus loin dans le livre que la violence est également très forte dans le Deutéronome, ou lorsque le Christ apporte « l’épée » au nom de sa foi, ou encore dans l’Evangile selon Saint Mathieu ! Il reprend à son compte l’idée de Meddeb, intellectuel tunisien qui affirme que « l’islamisme est la maladie de l’islam, mais [que] les germes sont dans les textes »4.
Quant à son retour sur Marx, Quiniou met en avant le Marx de sa période de maturité, et notamment celui de la Critique du programme de Gotha qui appelle à « libérer les consciences de la fantasmagorie religieuse », pour critiquer la mauvaise interprétation de certains militants de gauche et d’extrême gauche qui se réfèrent à Marx sans l’avoir sérieusement lu dans le texte.
Puis, il présente ce que serait une « offensive politique d’ensemble contre Daech ». S’il est interventionniste en France (améliorer le renseignement, contrôle plus strict des mosquées propageant un islamisme radical, etc.), en Syrie également, il fustige ceux qui s’arrêtent là car il estime que « Daech n’est pas le mal absolu mais le symptôme du mal [car] la violence djihadiste n’est pour une grande part que la conséquence du malheur économique, social et politique, imposé aux pays du Moyen Orient, quels que soient leur régime, par l’impérialisme capitaliste occidental depuis des décennies. ». Mais il précise que les fondements doctrinaux de l’islam… visent d’abord les « infidèles et les incrédules » et la laïcité. Il estime que l’idéologie n’est pas « un simple reflet mystifié, donc un simple effet de processus historiques, mais aussi une cause d’effets propres dont il faut tenir compte si l’on veut comprendre le comportement des hommes, spécialement quand ils deviennent barbares sans l’admettre moralement ».
Il en appelle à un respect strict du principe de laïcité, à un travail d’éducation populaire pour développer la raison critique, et souhaite que des théologiens de l’islam puissent inciter « à une refondation de la doctrine de base » de l’islam. Il souhaite aussi que ceux qui appellent à cette refondation soient soutenus. Il fait l’apologie de l’émission de France Inter du 20 novembre 2015 qu’il qualifie de remarquable car elle mettait à nu l’hypocrisie de l’impérialisme occidental par son double jeu vis-à-vis de ses « alliés » au Moyen-Orient ! Il développe pour exemple le conflit autour du pipeline qui permettrait à l’Iran d’accéder à la mer via l’Irak et la Syrie, largement combattu par l’Arabie saoudite et le Qatar, les alliés de l’impérialisme occidental. La lutte pour le pétrole menée par les impérialismes n’est pas pour rien dans le développement du terrorisme islamiste.
Estimant qu’il n’y a pas de retour du religieux mais un « retour politique du religieux », il termine son livre en affirmant que l’antidote est le développement d’une idéologie non religieuse « des droits de l’homme ou celle d’un humanisme universaliste, lié à la science » avec une morale universaliste de type kantien qui stipule « le respect inconditionnel de la personne ». « Sous cette double base, on peut vivre sans religion », conclut-il en reprenant la célèbre phrase du philosophe français Pierre Bayle : « une société d’athées est possible ».

  1. Pour une approche critique de l’islam, éd. H&O, 2016, 96 p. []
  2. Au cours des derniers mois, Yvon Quiniou a publié ce livre et Paul Ariès La face cachée du pape François. Voilà deux ouvrages que nous pensons nécessaire de recenser, le second le sera prochainement. []
  3. Voir Laïcité : Plus de liberté pour tous paru chez Eric Jamet éditeur que l’on peut se procurer sur www.gaucherepublicaine.org/librairie. []
  4. Voir le journal Libération du 23/9/2006 et le livre de Meddeb paru au Seuil, La maladie de l’islam. []
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« Les habits neufs du délit de blasphème », par Jeanne Favret-Saada

par Monique Vézinet

 

Sous le titre « Les habits neufs du délit de blasphème », Jeanne Favret-Saada a confié au blog Mezetulle, en juin 2016, l’avant-propos historique à l’ouvrage qu’elle termine et qui paraîtra chez Fayard début 2017 : Les christianismes contre le blasphème. Cinéma et liberté d’expression, 1965-2006.

Les croyances sont au centre du travail de cette anthropologue. Après des recherches sur les discours populaires liés à la sorcellerie, J. Favret-Saada s’est intéressée aux polémiques publiques à enjeux religieux (les accusations de blasphème), en particulier à l’affaire Salman Rushdie. Elle a aussi étudié, sous le prisme danois, la publication des caricatures du Prophète, et sur la scène internationale au tournant du millénaire (Jeux d’ombres sur la scène de l’ONU : Droits humains et laïcité) comment une majorité d’États refusant désormais de reconnaître l’universalité des droits de l’homme, l’organisation internationale se rabat sur leur justification implicite par les religions.

Elle s’intéresse à présent à  la réapparition paradoxale dans une République française laïque d’un délit d’opinion religieuse – qui diffère de l’ancien délit de blasphème en ce qu’il ne sanctionne plus les offenses à Dieu mais celles à la « sensibilité de ses fidèles ». Pour ceux qui ne liraient pas ce texte passionnant, résumons-le à grand traits.

Sous l’Ancien Régime, lié au caractère divin de la monarchie, le blasphème reste qualifié de crime. Au XVIIIe siècle, la tiédeur croissante des magistrats à appliquer les textes contraste avec leur exceptionnelle sévérité dans l’affaire Calas. On attendra pour voir abolir le crime de blasphème le Code pénal de 1791 dont le rédacteur, le constituant Le Peletier de Saint-Fargeau, souligne « qu’il a voulu rendre hommage aux ‘’idées du siècle de Montesquieu et de Beccaria’’, tous deux ennemis jurés de ‘’cette foule de crimes imaginaires qui grossissaient nos anciens recueils de lois. Dont ceux – hérésie, lèse-majesté divine, sortilège, magie – pour lesquels, au nom du ciel, tant de sang a souillé la terre’’ ».

Passé l’Empire, les lois de 1819 auraient «  presque » rétabli la liberté proclamée en 1791 si n’y apparaissait l’« outrage à la morale publique et religieuse ».  Façon, estime J. Favret-Saada, de rétablir le délit d’opinion en matière de religion. Or cette nouvelle formulation du délit de blasphème subsistera dans notre droit jusqu’en 1881.

Avec la proximité retrouvée entre l’Eglise et l’Etat sous la Restauration, qui s’illustre notamment par le procès du populaire chansonnier Béranger, et surtout après l’assassinat du duc de Berry, sont votées plusieurs lois qui restreignent les libertés individuelles et celle de la presse (le « délit de tendance » en 1822 et la loi sur le sacrilège de 1825).

Si l’attentat  manqué de Fieschi contre Louis-Philippe, en 1835 entraîne un durcissement des lois sur la presse, c’est sous le Second Empire que l’outrage à la « morale publique et religieuse » devient un chef d’inculpation favori ; il justifie environ la moitié des procès de presse à cette époque, note l’auteur, qui rappelle les procès intentés autour d’œuvres comme Madame BovaryLes Fleurs du Mal ou Les Mystères du Peuple d’Eugène Sue.

Passée la période de l’Ordre moral, la République se devait enfin de renouer avec 1791 ; la loi du 29 juillet 1881 efface 90 ans de tutelle de la presse et de l’édition, ce que J. Favret-Saada analyse ainsi :  «  le jeune régime républicain, alors même qu’il est politiquement incapable de mettre fin au Concordat ou de proclamer la séparation des Églises et de l’État, s’est déjà engagé – et avec quelle énergie, si l’on considère l’œuvre scolaire de ces années-là – dans la voie de la laïcité. Le régime de laïcité proprement dit ne sera véritablement établi qu’en 1905, mais, dès 1881, il est désormais impossible, de poursuivre un écrit au seul prétexte qu’il porterait atteinte à la religion. »

Plus près de nous pourtant, une étonnante volte-face sera permise par la loi Pleven de 1972, se basant sur le respect des conventions internationales : il devient possible de plaider le « droit au respect des croyances », le « respect des sensibilités religieuses »… Rappelons en 1984 l’assignation contre l’affiche du film Ave Maria, en 1985 celle contre le réalisateur et le producteur de Je vous salue, Marie. La jurisprudence restera flottante jusqu’au jugement rendu en 2007 dans le procès intenté à Charlie Hebdo au sujet des caricatures du prophète.

Attendons donc le livre à paraître de J. Favret-Saada pour le détail de cette période et souhaitons avec elle que cette date marque bien la fin des procès en défense de la religion.

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La grève des sardinières de Douarnenez en 1924

par ReSPUBLICA

 

Une grève de femmes dure et violente, que ne doivent oublier ni le mouvement féministe ni la gauche de la gauche…
Lire la brochure de Lucie Colliard publiée en 1925 : “Une belle Grève de Femmes : Douarnenez

greve

Il y a une suite : alors que les femmes ne sont en droit ni électrices ni éligibles, lors des municipales de mai 1925, une ouvrière de Douarnenez, Joséphine Pencalet, est élue conseillère municipale sur la liste du maire communiste sortant Daniel Le Flanchec (celui sur qui les “jaunes” avaient tiré lors de la grève).
Elle participe aux séances du conseil municipal pendant près de six mois avant que le Conseil d’État invalide son élection au motif qu’elle est une femme…



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