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Chronique d'Evariste
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Comprendre la « rupture Fillon » dans la nouvelle donne capitaliste

par Évariste

 

Nous avons largement présenté, dans les colonnes de ReSPUBLICA, l’enchaînement de la période néolibérale : la forte baisse des taux de profit dans l’économie réelle à la fin des années 60 et au début des années 70, l’incapacité des nouvelles technologies à y faire face contrairement aux séquences précédentes, l’éclosion de la financiarisation mondialisée comme seul remède permettant la croissance forte des taux de profit, le processus de gonflement et d’éclatement des bulles financières privées, l’utilisation de l’argent public pour combler des dettes privées impossibles à rembourser, le développement des dettes publiques, le renforcement obligatoire des politiques d’austérité pour financer les dettes publiques, la nécessité pour le capitalisme et son oligarchie de comprimer de plus en plus la masse des salaires, donc d’entrer dans le cercle vicieux de remplacement des fonctionnaires par des CDI, de remplacement des CDI par des CDD, de remplacement des CDD par des contrats de plus en plus précaires (par l’uberisation entre autres).

Outre les reculs sociaux, l’entrée dans le processus de recul continu de la démocratie – lire et relire la fin de l’intervention de Pierre Mendès-France du 18 janvier 19571 – est une nécessité pour le capitalisme. De plus, ce processus s’assortit du recul continu de la laïcité car le développement de cette séquence demande de satisfaire les principaux alliés des néolibéraux que sont les communautaristes et intégristes, instrumentalisés par le capitalisme pour remplacer auprès des perdants de la mondialisation la partie de la sphère de constitution des libertés (école, protection sociale, services publics) que l’on marchandise et privatise ! Et dire qu’une partie de la gauche dite radicale joue les idiots utiles en soutenant les principaux alliés communautaristes et intégristes des néolibéraux !

Les conséquences de la « rupture Fillon »

Or, dans cette période néo-libérale, nous venons d’entrer dans une nouvelle séquence. Non sans une certaine analogie avec les années 30, ce qui devrait faire un peu mieux réfléchir l’ensemble des gauches. Pour la première fois depuis la Libération, un candidat de la droite de gouvernement a scellé une alliance politique avec l’extrême droite catholique. Là réside l’explication principale de la poussée Fillon au sein de la droite. Après les rassemblements très puissants de la Manif pour tous, les dirigeants de celle-ci ont encastré « la Manif », qui d’après les journalistes des médias dominants ne ferait pas de politique, et Sens Commun qui en serait l’organe politique. Chez les catholiques, le rêve démocrate-chrétien s’éloigne des perspectives d’avenir et la poussée Fillon s’explique en grande partie par la mobilisation exceptionnelle d’une extrême droite catholique qui ne rêve que de revanche.
Si Fillon gagne l’élection présidentielle, accédera au pouvoir une droite conservatrice défendant le projet sociétal de l’extrême droite catholique du XXIe siècle. Sur le plan économique et social, on vérifiera la loi du mouvement réformateur néolibéral, à savoir que depuis 1983 chaque gouvernement fait pire que le précédent : avec l’accélération de la casse de la Sécurité sociale, le renforcement de la privatisation du profit et de la socialisation des pertes, la continuation du projet Kessler de suppression des conquis sociaux de la Libération et le recul de la laïcité seraient programmés.

Au sein du FN, cela devrait renforcer le courant de l’extrême droite politique au détriment de celui de l’extrême droite catholique. D’ailleurs, dès le soir de la victoire de Fillon à la primaire de la droite, en témoignait le discours de Philippot sur l’Union européenne, la zone euro, l’immigration, la xénophobie, ses vagues promesses de protection des couches populaires et des couches moyennes déclassées, etc.

Emmanuel Macron se sent pousser des ailes en espérant fortifier un électorat allant de la droite de l’électorat socialiste aux déçus de la défaite d’Alain Juppé, comme si on peut être progressiste sur le plan sociétal et néolibéral décomplexé et brutal sur le plan économique et social. On verra si Bayrou lui laisse cet espace.

Le spectacle de la gauche solférinienne est affligeant, prise qu’elle est au piège des primaires du PS stricto sensu et obligée de bafouiller près de deux mois encore devant les micros tendus par les journalistes avec un sourire narquois.

Du côté de la France insoumise, les choses avancent avec le vote légèrement majoritaire des adhérents du PC pour le soutien à Jean-Luc Mélenchon. Restent la discussion souhaitée par le PCF sur la signature de ses élus et un futur accord sur les législatives.

Avec le durcissement, voulu par les solfériniens, des règles de parrainage, la recherche de signatures n’a jamais été aussi difficile pour les autres petits candidats.

Il est aujourd’hui tout à fait possible, vu le triste spectacle des « hollando-vallsistes » et le bilan catastrophique pour les couches populaires et les couches moyennes intermédiaires des gouvernements Ayrault et Valls, que Jean-Luc Mélenchon passe devant le candidat solférinien au premier tour de l’élection présidentielle. Il pourra alors revendiquer le vote utile à gauche. Mais pour pouvoir atteindre les 20-25 % nécessaires pour être présent au second tour, il faudra alors qu’il puisse toucher les couches populaires et les jeunes qui, ces dernières années, s’abstiennent à 60 %. Cela demande une inflexion de la campagne sur ce point.

  1. «…  L’abdication d’une démocratie peut prendre deux formes, soit le recours à une dictature interne par la remise de tous les pouvoirs à un homme providentiel, soit la délégation de ces pouvoirs à une autorité extérieure, laquelle, au nom de la technique, exercera en réalité la puissance politique, car au nom d’une saine économie on en vient aisément à dicter une politique monétaire, budgétaire, sociale, finalement « une politique », au sens le plus large du mot, nationale et internationale… » []
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Pour les prolos : Uber, pour les bourgeois : les grandes écoles

par un collectif

 

Les deux textes suivants sont dus à des militants syndicalistes SUD.

Passe ton bac… après ? faudra des sous….

Quand on parle de la reproduction des inégalités sociales, les commentateurs ciblent souvent l’école primaire, le collège, le lycée. Il y a sans doute beaucoup à dire et à lutter à ces niveaux. Mais les parents d’élèves qui ont eu leur bac savent bien que financièrement le plus commence. Quelques exemples tirés d’Alternatives Economiques de septembre 2016.

Ecoles de commerce

En moyenne, l’étudiant-e et sa famille devront débourser 35 000 € sur trois ans. Pour HEC, il faut compter 44 400 € sur trois ans… Il n’a jamais été aussi difficile pour les enfants des classes populaires d’entrer dans les écoles de commerce. Les solutions proposées consistent en prêts d’honneur ou à des tarifs auprès des banques… Comparaison n’est pas raison, mais on peut rappeler que la dette étudiante de 1 300 milliards de dollars aux Etats-Unis… Pour revenir à la France, une des autres solutions proposées est le cursus en apprentissage. D’un côté l’apprenti voit ses frais de scolaire pris en charge par l’entreprise, et l’école peut solliciter le versement de la taxe d’apprentissage auprès de ces entreprises. Pour autant, ces apprentis sont coupés de la vie sociale sur le campus, en particulier l’activité associative  qui permet aux étudiant-e-s de constituer un « capital social », c’est-à-dire un réseau de relations utile tout au long de leur carrière. Ce réseau social est pourtant un des arguments des écoles de commerce. Ben là, on y est dans la reproduction des inégalités sociales, voire leur amplification. Mais là ce sont des écoles privées, on ne dit rien ?!

Etudes de médecine

L’exemple cité par Alternatives Economiques parle d’un cas récent de 327 étudiants reçus en 2ème année sur une cohorte de 2 300, soit 14, 21 % … Pour réussir le parcours du combattant-e-, les étudiant-e-s ont souvent intérêt à multiplier les cours dans des prépas médecine privées. Une pré-rentrée de 3 semaines peut coûter 1 185 €. Le reste de l’année, cela peut coûter 1 800 € par semestre…D’autres élèves choisissent « la prépa  0 ». Comme les étudiants ne peuvent se présenter que 2 fois au concours de PACES, cette « prépa 0 » leur permet de suivre le programme sans passer le concours. Ils/elles ne tenteront leur chance que les deux années suivantes (avec des prépas privées en plus des cours de fac). Cette « prépa 0 » coûte entre 4 000 € et 8 000 €…

Pas étonnant que dans cette voie, comme d’autres, de nombreux jeunes étudiant-e-s choisissent la Belgique ou les droits de scolarité sont plus modestes qu’en France.

Il y a quelques facs qui mettent en place un tutorat pour lutter contre ces prépas privées pour des prix de 43 €. Mais il n’y en a pas partout. Il serait temps de s’interroger sur ces études de médecine où l’intensité de l’apprentissage par cœur et la compétition féroce entre élèves. Est-ce bien cohérent comme formation à des métiers où les relations humaines sont fondamentales ? Une autre réflexion devrait aussi être menée sur le côté libéral des médecins, qui veulent bien s’installer en Côte d’Azur pour s’occuper des vieux bourgeois friqués, et qui désertent les zones rurales… Dans la mesure où les médecins sont de fait essentiellement salariés par la Sécurité Sociale, un « mouvement national des postes vacants (médecins partant à la retraite) » serait envisageable, avec des centres collectifs de soins. Centres existants déjà ici et là. En contrepartie des contraintes de ce mouvement, les médecins pourraient obtenir des garanties en matière d’installation,  de salaires et de temps et de conditions de travail. Bon, je sais, je m’éloigne des sujets. Mais tout est dans tout, et réciproquement.

Des solutions

Combien  d’étudiant-e-s échouent simplement parce que financer ses études en faisant un « petit boulot » à côté, limite le temps qui doit être consacré aux études. L’idée d’un revenu accordé aux étudiant-e-s, en, dehors de leur appartenance familiale leur permettrait de conquérir leur autonomie vis-à-vis de leur famille, sans hypothéquer leurs études.

Le nombre d’étudiant-e-s a considérablement augmenté, mais pas les moyens. Il faudrait donc donner aux facultés, aux IUT etc. beaucoup plus de moyens. Un système public gratuit de qualité est possible : il existe en Allemagne, mais sans les « grandes écoles » ! Grandes écoles qui non contentes d’être financées par l’Etat, comme toutes les écoles privées sous contrat, demandent jusqu’à 15 000 € par an. Inaccessible pour la plupart des enfants du salariat, sauf quelques boursiers. Mais là, remettre en cause les grandes écoles, c’est s’attaquer directement à un privilège que  la bourgeoisie réserve à ses enfants. La lutte des classes, quoi ! Va valoir muscler notre jeu…

Le modèle Uber, l’avenir des salarié-e-s ?

« On le voit avec l’exemple qu’offre Uber dans la région parisienne : des gens souvent victimes de l’exclusion choisissent l’entreprenariat individuel parce que, pour beaucoup de jeunes aujourd’hui, c’est plus facile de trouver un client que de trouver un employeur » Emmanuel Macron – Le Monde 6 Janvier 2016-

Lors de ses conférences contre la loi travail, Gérard Filoche (inspecteur du travail  à la retraite ; militant CGT etc.) citait pour  exemple un chauffeur de taxi « Uber » avec qui il avait pu discuter. Certains ont parlé d’ « Ubérisation » de la société, pour annoncer la fin du salariat (et le retour du servage ?). Les conducteurs VTC sont souvent d’anciens élèves de nos quartiers « REP »… En ce sens cette question nous intéresse…
Alternatives Economiques publie régulièrement des enquêtes sur UBER et son monde. En voici quelques éléments.

Moins de 3 € de l’heure !

D’après les calculs faits par Alternatives Economiques, pour un chiffre d’affaires de 4 500€, soit 60 à 70 heures de travail hebdo, le chauffeur gagne 750€ s’il est locataire de son véhicule et 900€ s’il est propriétaire. En effet, il faut compter la commission à payer à Uber et co., la location ou l’amortissement du véhicule, le gazole, les frais d’entretien du véhicule, son assurance, les cotisations sociales, la comptabilité, les bouteilles d’eau, les frais de parking, les coûts liés aux pannes, aux rayures ou aux endommagements de véhicule…

Ceux qui pensent bien gagner leur vie confondent chiffre d’affaires et bénéfice.

Evidemment ce sont souvent des jeunes issus des quartiers prolétaires des banlieues qui sont ces chauffeurs VTC. La première année, ils bénéficient du dispositif ACCRE (Aide au Chômeur Créant ou Reprenant une Entreprise), qui leur permet de cumuler prestations et le revenu de leur activité la première année suivant la création de leur entreprise.

Certaines plate-formes contournent la nouvelle réglementation qui a durci l’octroi de nouvelles licences VTC en déclarant les chauffeurs comme salariés une à deux heures par jour, et de les utiliser le reste du temps comme auto-entrepreneurs.

Celles et ceux qui croyaient que l’auto-entreprise étaient un espace de liberté « être son propre patron » en sont pour leur frais. Les chauffeurs qui bossent pour la plateforme Le Cab doivent travailler avec une 508 Peugeot couleur gris Aria. LeCab dispose de l’exclusivité sur cette couleur auprès du constructeur…Certains chauffeurs ont été déconnectés d’Uber sans vraiment savoir pourquoi. Refus de certaines courses, acceptation d’espèces d’un client ?

Il y a un énorme turn over dans cette profession. Avec des jeunes qui viennent, prennent l’argent, ne déclarent rien et arrêtent au bout d’un an. Ce n’est pas sans danger, car avec les applications, tout est traçable. Le jour où l’administration fiscale aura accès aux données, cela risque de faire mal…

Rappelons qu’une partie de l’économie collaborative (sous-louer son appartement, faire le chauffeur en amateur, traduire des fragments de texte à la pièce) est peu ou pas soumise à l’impôt et aux cotisations sociales. Ce qui aura un impact négatif sur la protection sociale et la dynamique d’ensemble de l’économie.

Sinon, concrètement, il y a sans doute quelques applications à virer ou refuser sur nos téléphones portables…

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Appel citoyen pour les services publics et la protection sociale du XXIe siècle

par la Convergence nationale de défense et de développement des services publics

 

Suite aux assises nationales des 18 et 19 novembre 2016 à la Mairie de Montreuil pour le service public du XXIème siècle, un appel a été adopté par les participants.  sur le site de L’Humanité.

La Convergence, qui rassemble des collectifs locaux, des associations, des organisations syndicales et des partis politiques, appelle à mener des débats et à construire des convergences entre militant-e-s, usagers, personnels et élu-e-s. Elle est à la fois un outil précieux pour construire et articuler des mobilisations locales et nationales et un lieu de réflexion, un creuset, où peuvent s’élaborer les principes futurs de l’organisation des services publics.

Il s’agit de défendre et de proposer :

  • Défendre, car la politique d’austérité, les multiples avatars des réformes de l’Etat et les contraintes européennes portent des coups très durs aux services publics en France ;
  • Proposer, car les besoins et les enjeux actuels appellent à des transformations, à la création de nouveaux services publics et à la reconquête de ceux qui ont été privatisés.

Pourquoi ces Assises ?
Les services publics et la protection sociale sont aujourd’hui remis en cause à la fois au niveau national – comme en témoignent la politique suivie par les gouvernements successifs et les débats de la « primaire de la droite et du centre » dont les candidats se disputent pour savoir lequel supprimera le plus de postes de fonctionnaires – et au niveau international à travers les différents projets de traités commerciaux (TISA, CETA, TAFTA, …). Les services publics sont une composante majeure de tout projet de société solidaire, démocratique et écologique hors de la férule du marché. Ces Assises visent donc à élaborer collectivement des propositions pour les services publics qui soient à la hauteur des enjeux du XXIème siècle.

Lors du débat sur la Sécurité Sociale, a été soulignée la nécessité de faire entendre des voix convergentes pour sa défense et son développement, sachant que les moyens financiers existent pour répondre aux besoins d’aujourd’hui et de demain.

Quelles perspectives ?
Nous souhaitons nous adresser à l’ensemble des citoyen-ne-s qui devront se prononcer, à travers leurs votes au printemps prochain, sur l’avenir des services publics. Au-delà nous voulons rassembler, débatte et agir pour cet objectif notamment en se saisissant du projet de manifeste comme d’un outil à enrichir dans la pratique. Nous voulons conjuguer toutes les initiatives et les actions nécessaires pour faire des services publics un enjeu sociétal et environnemental majeur, les rendre à la fois plus démocratiques, plus articulés sur les besoins des populations et améliorer les conditions de travail de celles et ceux qui les font vivre au quotidien. Ensemble, conjuguons nos efforts pour que renaisse l’espoir d’une société solidaire.

Montreuil le 19 novembre 2016

L’ensemble des organisations suivantes ont été représentées à ces assises : CGT, FSU, Union Syndicale Solidaires, Confédération paysanne, FNME-CGT, FAPT-CGT, Fédération CGT des Cheminots, CGT Services Publics, UGFF-CGT, CGT Finances, Solidaires Finances Publics, Solidaires Fonction publique, Sud-PTT, Sud Santé-Sociaux, SNCA e.i.l., UNL, Coordination Eau Bien Commun France, Convergence Nationale Rail, Coordination nationale des hôpitaux et maternité de proximité, Notre Santé en Danger, Fondation France Libertés, collectif citoyen du Sud Gironde et de l’Entre-deux-Mers, Comité de Vigilance pour le maintien des services publics de proximité de Haute-Saône, Collectif de défense et de développement (CDDSP) de l’Ardèche, CDDSP Bretagne, CDDSP des Combrailles,  CDDSP Corrèze, CDDSP Creuse, CDDSP Gironde, CDDSP Indre et Loire, CDDSP de Mayenne, Vivent les services publics – Bouches-du-Rhône, ATTAC France, ATTAC Ile-de-France, CADTM-Comité pour l’abolition des dettes illégitimes, CNDF,   Femmes-Egalité, Fondation Copernic, Réseau Éducation Populaire, Résistance Sociale, UFAL, E&S UNRPA, Cap à Gauche, Démocratie et Socialisme, Gauche Avenir, ANECR, EELV, Ensemble !, MJCF, NPA, PCF, PCOF, PG, République et Socialisme…

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Le Rif se défait de la peur

par Elena Gonzalez

 

Article publié en espagnol dans M’Sur le 17 novembre 2016
http://msur.es/2016/11/17/marruecos-protestas-rif/

Durant la dernière manifestation à Al Hoceïma, lorsque Nasser Zafzafi monta sur la scène et agrippa le micro, le public rassemblé sur la place Mohammed VI rugissait son nom : « Nasser, Nasser ! ». Zafzafi a été la personne en vue des mobilisations de la semaine précédente, déclenchées par la mort dix jours avant, le 28 octobre,du vendeur de poissons MohcineFikri, écrasédans la benne du camion-poubelle alors qu’il essayait de récupérer sa marchandise d’espadon qui avait été confisquée par la police.

Les images et les cris de Mohcine Fikri, filmé alors qu’il était en train d’être écrasé, ont été diffusés sur les réseaux sociaux et partagés des milliers de fois, réveillant au Maroc et surtout dans le Rif – territoire comanche depuis presque toujours – l’indignation et ceux qui se sentent piétinés par les abus et le mépris des autorités, ce que l’on appelle « Hogra ». « L’Hogra enough ! », basta l’Hogra.

« Mes amis ! » clamait Zafzari au micro. « Mes amis, notre territoire vit une répression politique, économique, sociale et culturelle. Nous n’avons pas de liberté d’expression, nous n’avons pas d’industrie, les Rifains qui ont émigré en Europe envoient de l’argent qui sert ensuite à des investissements hors du Rif, et ce qui est arrivé à Mohcine Fikri peut arriver à n’importe lequel d’entre nous. » La foule – des milliers de personnes – l’acclamait et le filmait et enregistrer avec les téléphones portables.

Passée une semaine de manifestations, la colère reste forte et en même temps contenue : juste assez pour ne pas franchir la ligne jaune de la violence, mais assez pour maintenir vivace l’indignation. Combien de temps durera la protestation ? C’est la question que tous se posent au Maroc.

L’apparition de Zafzafi sur la scène de Al Hoceïma était la plus attendue ce soir-là, et ce fut sans doute la dernière pour le moment. Il faut maintenant, dit-il, réorganiser les forces et penser au prochain mouvement pour ne pas laisser les choses retomber. « Comme le disait Abdelkrim, il faut penser calmement et agir avec détermination » ; il cite ainsi le leader rifain de la lutte contre la colonisation française et espagnole (1882-1963), vainqueur de la bataille de Anual (1921) et qui parvint à établir une République du Rif de 1923 à 1926.

« Nous allons continuer la lutte, mais nous ne pouvant pas épuiser les gens en manifestations », nous explique Zafzafi. « Le système a employé des mesures de répression qui jouent maintenant en notre faveur. Nous avons accumulé un sentiment tel qu’il n’y a plus de retour en arrière. Les gens ont perdu la peur de protester », ajoute-t-il. Jusqu’à maintenant, les forces de sécurité se sont maintenues inhabituellement tranquilles face aux manifestations.

Il reste à voir comment se concrétisera cette deuxième phase de mobilisations ; mais ce Rifain de 37 ans est devenu le catalyseur du Printemps du Rif. Un jour après la mort de Fikri, tandis qu’étaient récupérés ses restes dans le camion-poubelle, il commençait à réunir des assemblées ; il est allé parler aux autorités et au Wali (le gouverneur) de la province, et son téléphone ne cesse de sonner d’appels de gens qui l’encouragent – ou de la famille de Mohcine Fikri avec qui il est en contact permanent.

Pourtant, il ne se voit pas comme un leader : « J’appartiens à une classe modeste et toute ma vie j’ai senti cette humiliation du manque de travail et d’opportunités. J’ai ressenti les insultes et la maltraitance à l’encontre de ceux qui n’ont pas un parrain. Mais qu’il y ait un leader, ce n’est pas l’essentiel : l’essentiel, ce sont les gens, sans eux il n’y a pas de mobilisation. »

Assemblée clandestine

À peine la dernière manifestation de Al Hoceïma était-elle achevée que plusieurs de ses organisateurs se réunissaient pour discuter de l’avenir des protestations. La petite assemblée se tint au deuxième étage d’un café fermé au public, dans une ambiance à mi-chemin entre le mouvement des Indignés espagnols et les réunions clandestines dans le Rif au temps du roi Hassan II.

Aucun des participants ne se reconnaît d’affiliation politique et d’appartenance à quelque association, et tous démentent avec force la rumeur qui court depuis le début de la mobilisation : que ceux qui l’encourage auraient des intérêts politiques. « C’est la Hogra qui nous a unis », assurent-ils.

Zafzafi participait à cette réunion. Il a travaillé comme agent de sécurité, il a tenu un magasin d’électronique qui fit faillite et il a été, la plupart du temps, un chômeur parmi tant d’autres. Il y avait aussi des maçons, des informaticiens, des professeurs ainsi que d’anciens militants du mouvement contestataire dit du 20 février, apparu il y a cinq ans alors que le Printemps arabe frôlait les frontières du Maroc.

En 2011, la monarchie avait su réagir pour étouffer la colère des manifestants, faisant approuver une nouvelle Constitution qui réduisait les pouvoirs du Roi. En pratique, selon les militants du 20 février, les réformes n’ont été que du maquillage.

« Nous ne voulons pas que cela soit un Printemps arabe, ni non plus créer un mouvement séparatiste du Rif. Nous voulons la fin des abus » nous dit Mohammed Rida, professeur d’éducation physique. « Il faut regarder l’avenir, qui est plus important que notre Histoire », insistent-ils tous, montrant que cette fois, plutôt que de chercher des chefs qui dirigeraient le peuple, il faut faire un effort collectif.
« Les ministres de l’Intérieur, de la Justice et de la Pêche sont les responsables et personne n’a démissionné. Mais les gens sont descendus massivement dans la rue et nous sommes sur la bonne voie », ajoute Mohammed Majjaoui, ancien militant du 20 février.

Comme en 2011, la réaction du cercle du pouvoir marocain a été rapide : en un geste hors du commun, le roi Mohammed VI – qui était en tournée dans plusieurs pays africains – envoya le ministre de l’Intérieur présenter ses condoléances à la famille et annonça une enquête. Onze personnes ont été arrêtées et huit emprisonnées avec inculpation. Parmi elles, deux officiers du ministère de l’Intérieur, un vétérinaire et deux agents de l’Autorité du port de pêche. Mais, au vu des protestations, c’est insuffisant.

« Quand cinq jeunes sont morts brûlés dans une agence bancaire ici, à Al Hoceïma, ils avaient aussi annoncé une enquête et après il ne s’est rien passé », se souviennent les habitants. Ces morts furent la goutte qui fit déborder le vase en 2011. Avec la mort de Mohcine Fikri, le vase vient à nouveau de déborder au même endroit : le Rif.

Une région de soulèvements

Depuis les débuts du siècle précédent, la région a été frappée en permanence. Elle a subi des attaques à l’arme chimique durant la bataille contre l’armée espagnole ; elle a souffert la répression brutale des soulèvements de 1958 et 1959, quand des milliers de personnes périrent, furent torturées et violées, comme le raconte Tarik Idrissi dans son documentaire « Rif 58/59, rompre le silence ». le Rif a été puni de ce soulèvement indépendantiste par l’abandon cruel et prémédité pendant le règne de Hassan II, durant 40 ans.

Dans une tentative de panser les blessures, le premier voyage officiel que fit Mohammed VI en tant que roi fut au Rif ; mais ni n’ont été effacées les traces de ces longues années de punition, ni l’on a vu de résultats palpables d’un redressement annoncé de la région. « Le Rif continue à être oublié », affirme Zafzafi. « Le Roi a dit dans ses discours qu’il y ferait plus attention, il est venu, il a inauguré, mais tout est toujours pareil. Aucun site industriel ne fonctionne. »

Dans la distribution des reproches, les mafias emportent la plus grande part – celles qui tirent les ficelles dans la ville, les dessous de table, les magouilles. Mais aussi le Makhzen, ce cercle très proche du Palais royal, celui des puissants. « Nous sommes en deuil. Le Makhzen nous tue ! » scandent les manifestants. « Le Peuple aime ceux qui ont sont morts en martyr ».

Parce que le Maroc a maintenant son martyr, comme la Tunisie avec Mohammed Bouazizi. Il a un coupable indéterminé : la Hogra, le Makhzen, les abus, la répression. Il a une phrase qui va rester – vraie ou pas – dans la mémoire collective, celle que le policier aurait paraît-il prononcé tandis que Fikri mourrait écrasé : « Écrase-le, lui et sa mère avec ».

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Nouvelle donne politique au Venezuela…

Et retard de l'information en France

par Franco Vielma

 

A l’initiative du gouvernement bolivarien, les partis de la droite vénézuélienne ont accepté récemment de s’asseoir à la table des négociations. La première étape de ce dialogue amorcé avec l’appui de l’ex-président du Panama Martin Torrijos et de l’ex-président espagnol Rodriguez Zapatero s’est achevée le samedi 12 novembre 2016. Entouré notamment du secrétaire général de l’UNASUR et ex-président de Colombie Ernesto Samper, de Leonel Fernandez, ex-président de la République Dominicaine, l’envoyé du Vatican Claudio María Celli a lu les cinq points principaux du communiqué final :

  1. Le gouvernement et la MUD (coordination des partis d’opposition à la révolution) ont convenu de combattre ensemble toute forme de sabotage, de boycott ou d’agression envers l’économie. La priorité sera donnée aux mesures en faveur de l’approvisionnement, production et importation de médicaments et aliments, via la planification et l’application de politiques de coopération entre les secteurs public et privé pour surveiller et contrôler les mécanismes d’acquisition et de distribution de matières premières et de marchandises.
  1. La droite accepte la sentence d’illégalité prononcée par le Tribunal Suprême de Justice à la suite de l’élection frauduleuse de trois de ses députés (Ndr : ces députés, exclus, ont offert leur démission au leader de la droite, Henry Ramos Allup, président de l’Assemblée Nationale). Les parties ont également convenu de travailler ensemble à la nomination de deux recteurs du Conseil National Électoral dot le mandat prend fin en décembre 2016.
  1. Les parties ont adopté une position unanime de défense des droits du Venezuela sur la région de l’Esequibo, adoptant l’accord de Genève de 1966 comme instrument juridique pour résoudre cette controverse territoriale.
  1. Les parties ont adopté une déclaration commune intitulée « Vivre ensemble en Paix ».
  1. Seront invités aux prochaines réunions un gouverneur de chacune des parties et des représentants des différents secteurs de la société. Une commission de suivi sera coordonnée par l’ex-président espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, par Jorge Rodriguez pour le gouvernement bolivarien et Luis Aquiles Moreno pour la MUD.

Qui gagne, qui perd ?

Dans le cadre strict des accords il n‘y a ni gagnant ni perdant. C’est une victoire de la Constitution Bolivarienne, soit une avancée majeure pour une société vénézuélienne qui réclame de ses leaders des alternatives et des solutions consensuelles, en particulier pour faire cesser les violences.

C’est sur la nouvelle donne politique et la perception publique que je voudrais faire quelques commentaires.

  • La coordination de la droite (MUD) admet face au pays qu’il y a un boycott et une agression économique persistants contre la population, reconnaissant entre les lignes que son capital politique est né d’un contexte d’extorsion et du désespoir d’une population qui a voté pour elle en décembre 2015. La guerre économique cent fois niée existerait donc ? C’est la MUD qui le dit à présent. Autre discours qui s’effondre : celui du « communisme régulateur » comme cause de la situation économique. La MUD adhère en effet à la nécessité de « surveiller, inspecter et contrôler » le flux de marchandises.
  • En reconnaissant que l’Assemblée Nationale ne peut maintenir des députés élus frauduleusement, la droite renonce au lexique destiné aux médias internationaux (ou commandé par eux…) d’« actions arbitraires » de la part d’une « dictature ». Les élections législatives dans l’état d’Amazonas ont été entachées de fraudes et devront être répétées.
  • Carlos Ocaríz (porte-parole antichaviste qui a participé au dialogue, voir photo) use à présent du terme « personnes arrêtées » au lieu de celui de « prisonniers politiques » jusqu’ici destiné aux militants et dont la fonction était surtout d’agiter les médias internationaux (terme rentable également pour certaines « ONG de droits de l’homme » à l’œuvre également en Bolivie, en Equateur ou au Nicaragua).
  • Pas d’accord sur le référendum révocatoire, dont la collecte de signatures a elle aussi été entachée de fraudes massives (des milliers de personnes décédées apparaissant parmi les signataires) ni sur les prochaines élections générales (il y en aura deux en 2017). La rhétorique et la démagogie destinées aux militants souffre des incohérences, des divisions au sein de la droite, minant sa crédibilité. Même l’ambassade des États-Unis semble lassée de tant d’inefficacité. Il n‘est pas sûr encore que son soutien se poursuive avec la même intensité sous la présidence de Donald Trump.
  • Après de nombreux effets d’annonces sur la « prise du palais présidentiel » au terme de mobilisations de rue, la droite rentre dans les rangs institutionnels de l’Assemblée Nationale qu’elle pourra continuer à utiliser comme un bélier politique. Pour sa part le chavisme gagne en légitimité. La droite aurait-elle sous-estimé la capacité politique de Nicolas Maduro ?

Source : http://misionverdad.com/la-guerra-en-venezuela/reflexiones-sobre-los-resultados-del-dialogo-chavismo-mud – Traduction : Thierry Deronne

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Slovénie : introduction du droit humain à l'eau dans la Constitution

par Anonyme

 

Le 17 novembre 2016, l’Assemblée nationale de Slovénie a adopté un amendement à sa Constitution pour inclure un nouvel article qui reconnaît le droit humain à l’eau. L’amendement affirme que l’eau doit être traitée comme un bien public géré par l’État et non comme une marchandise et que l’eau potable doit être fournie par le secteur public sans but lucratif. C’est un grand succès pour les militants et la population de Slovénie. Communiqué de l’European water movement.

« Les citoyens de toute l’Europe se sont mobilisés avec succès pour que le droit à l’eau et à l’assainissement soit reconnu comme un droit de l’homme – comme l’a décidé l’ONU – et soit introduit dans la législation européenne. La Commission européenne continue d’ignorer près de deux millions de voix de la première initiative citoyenne européenne réussie. Le commissaire Vella devrait écouter les citoyens et suivre l’exemple slovène dès que possible », a déclaré Jan Willem Goudriaan, secrétaire général de l’EPSU.

L’eau est un sujet controversé en Slovénie, car les entreprises étrangères de l’industrie alimentaire achètent des droits d’une grande quantité de ressources locales en eau. Le gouvernement slovène a exprimé des inquiétudes quant aux incidences des accords de libre-échange comme CETA sur sa capacité de contrôler et de réglementer ces ressources1.

« Les accords de libre échange et les mécanismes de règlement des différends investisseur-État peuvent limiter la capacité des États à reprendre le contrôle public sur les ressources en eau lorsque des investisseurs étrangers sont impliqués, comme c’est le cas en Slovénie. Pour garantir le droit à l’eau et le contrôle de cette ressource clé, les Parlements européen et slovène devraient rejeter CETA lors d’un vote dans les prochains mois », a déclaré David Sánchez, directeur de Food & Water Europe.

L’amendement est le résultat d’une initiative citoyenne qui a recueilli 51 000 signatures pour proposer un amendement constitutionnel2.

« Nous nous félicitons de l’introduction du droit humain à l’eau dans la Constitution slovène, comme un grand résultat d’initiative citoyenne. Aujourd’hui, la société civile doit veiller à garantir une gestion démocratique et transparente du cycle intégré de l’eau, fondé sur la participation des citoyens et des travailleurs », a déclaré Jutta Schütz, porte-parole de l’European Water Movement.

  1. Le gouvernement slovène a exprimé des inquiétudes quant à l’ambiguïté de termes tels que «utilisation commerciale d’une source d’eau» dans CETA, la manière dont l’accord s’applique aux droits d’eau existants et la capacité future des gouvernements nationaux de limiter les concessions déjà accordées sans être soumis à des réclamations sous l’ICS, entre autres. Le document est accessible ici []
  2. Plus d’information concernant cette initiative citoyenne sur le site web http://voda.svoboda.si/ []
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« De la nation et de sa prise en charge et de sa déprise, d’une révolution l’autre », par Bernard Peloille

par Bernard Teper

 

Bernard Peloille signe là un livre1 qui intéressera tous ceux qui veulent connaître les soubassements théoriques de l’utilisation du concept de nation dans une théorie marxiste, c’est-à-dire en articulation avec celui des classes sociales. Le premier grand intérêt du livre est l’étude diachronique du concept de nation. D’abord une très belle étude de la pensée bourgeoise de Necker et de Quinet qui accompagnera les débuts du capitalisme. Beaucoup de citoyens éclairés verront alors la puissance de la pensée de ces deux personnages et alors ils comprendront que mieux les événements révolutionnaires de cette période et notamment les décisions bourgeoises prises dès le déclenchement de la grande révolution française. La classe bourgeoise était prête à prendre le pouvoir grâce à sa victoire d’une nouvelle hégémonie culturelle. Puis, l’étude de la clôture renanienne pensée comme épuisement de la pensée de la nation qui ne manquera pas d’intéresser le lecteur car il s’agit là d’une sortie de cet auteur hors des représentations iconiques qui sont des empêchements à comprendre sa pensée réelle. Puis de l’empêchement bauerien qui en dit long sur cette impasse qui a pollué le marxisme lui-même. Vient ensuite la dislocation proudhonienne où l’auteur montre qu’in fine, sa théorie répond aux aspirations de la petite bourgeoisie contre les classes laborieuses. Viennent ensuite les critiques sur trois auteurs qui se placent sur le terrain des classes laborieuses, Blanqui, Lénine et Staline. L’auteur se borne à une critique sur leur conception du concept de nation. Le lecteur verra que Blanqui n’est pas seulement un activiste mais participe grandement à l’évolution de la pensée sur ce concept. Puis ils verront l’application d’une critique marxiste aux conceptions des deux penseurs soviétiques. Cette critique semble indispensable à tous ceux qui veulent comprendre les liens charnels entre le socialisme et la nation et qui estiment qu’il faut apprendre de l’histoire pour ne pas « mimer » les hommes du passé. Mais l’auteur développe aussi une critique classiste intéressante de tous ceux qui se sont opposés à la Nation. Jusqu’à montrer en quoi le pétainisme fut une rétrogression historique générale contre la Nation.

Bien sûr, après la lecture de ce livre, le lecteur sentira le besoin d’une analyse actuelle d’une part pour ne pas refaire les mêmes erreurs que nos prédécesseurs mais aussi pour repenser le lien entre les classes sociales et la nation. D’ailleurs, ce lien aurait pu être de notre point de vue le titre de l’ouvrage. Car l’enjeu de la réflexion aujourd’hui n’est-il pas de penser comment le prolétariat peut se constituer en « classe nationale », ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où nous écrivons cette recension. Nous ne résistons pas à reproduire le dernier paragraphe de ce livre : « Une classe qui se soumet au seul jeu des ses intérêts particuliers, à l’intérieur et à l’extérieur de la nation, ne peut devenir, être, demeurer, réellement « classe nationale », elle exprime par là qu’elle n’est, plus ou moins activement selon les circonstances, qu’antinationale. »
Voilà un bel objet de débat pour une éventuelle révolution citoyenne ! Il conviendra que le Réseau Education Populaire (REP) puisse répondre alors aux demandes sociales et politiques qui pourront advenir demain sur ce thème, espérons-le, par la compréhension des conditions nécessaires à la transformation sociale et politique.

 

  1. chez Inclinaison, 20 rue du Dr Blanchard 30700 Uzès ou www.inclinaison.fr []
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Sur la démocratie, le militantisme et les primaires

par ReSPUBLICA

 

Reçu de Christian Gauthier – Le militant : un “citoyen” utile à la démocratie

1) La démocratie fonctionne (tant bien que mal) à de multiples conditions : élections de représentants ; engagements citoyens dans des associations, des syndicats, des partis ; manifestations, grèves. Quel que soit le cadre, la “dispute”, le conflit, les oppositions, avis différents sont utiles à la démocratie.
2) La démocratie peut fonctionner mieux par une remise en cause des traités européens, une réforme des institutions, le renforcement des syndicats, le changement de pratique des partis. Ce que l’on appelle les “corps intermédiaires” sont indispensables à la démocratie : syndicats et partis sont des formes d’organisation qui s’inscrivent dans le temps long (expérience, mémoire). Ils mobilisent un citoyen particulier fort utile à l’évolution de nos sociétés : le militant.
3) Or, insidieusement, depuis plusieurs années, cette démocratie sociale que j’appelle de mes voeux est combattue par une volonté “d’hégémonie culturelle” libérale dont les campagnes sur une Europe “de paix” préalable à une construction européenne a-démocratique est l’aspect le plus visible. Mais, cette confiscation de pouvoir touche aussi les syndicats : “on” (y compris au PS) ne cesse de les prétendre peu légitimes, “on” poursuit et condamne des militants… Cette confiscation touche aussi les partis, du moins ce qui fonde leur force, c’est à dire un mode d’organisation (qui peut-être à l’adresse de classes sociales exploitées par exemple) qui inscrit ses actions en s’enrichissant d’expériences et de mémoires. 
4) Il est de bon ton aujourd’hui d’invoquer sans cesse le citoyen et la démocratie directe (en méconnaissant souvent ce que recouvrent ces deux termes). Mais, plutôt que de multiplier des primaires, qui sont, de fait, anti-démocratiques et privilégient les élections à toutes autres formes d’expression, il serait de bon ton de faire fonctionner réellement la démocratie en confiant plus de pouvoir aux usagers et aux associations, à commencer dans les services publics. Plus de pouvoir aux syndicats, une meilleure représentation des classes sociales dans toutes les instances.
Il est urgent de réhabiliter, certes le citoyen, mais aussi le militant. Il est temps aussi de parler de ce qui fâche. La tâche est difficile ; elle implique de combiner éducation populaire et action. Les primaires sont l’inverse de cette tâche.

A propos de ceux qui ont jugé bon d’aller voter aux “primaires de la droite et du centre” et sans rentrer dans le débat (qui n’a pas d’intérêt selon moi sauf à prôner la proportionnelle et la fin de la monarchie présidentielle), pour ceux qui ne le saurait pas : un précédent.

Un commentaire de Pierre Mascomère (rédaction de ReSPUBLICA) sur les primaires

On se rappellera que, pour l’élection présidentielle de 2012, le PS a jugé bon d’organiser des « primaires ouvertes ». Le PDG (ex, aujourd’hui) de la société d’assurance AXA, Henri de Castries, a participé tout à fait publiquement à ces primaires ouvertes du PS. Il a aussi fait un don – le maximum possible – de 7 500 euros ! Il n’a jamais caché pourtant ses idées de droite et présidé le think tank (très libéral économiquement) qu’est l’Institut Montaigne, créé et financé largement justement par AXA.
Henri de Castries a participé aux primaires du PS « parce qu’il a fait partie de la même promotion de l’ENA que celle de François Hollande », mais surtout afin que « Martine Aubry ne soit pas désignée ».

Aujourd’hui, Henri de Castries est un soutien déclaré de François Fillon…



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