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Pendant l’exposition au virus, les travaux politiques continuent

Comment préparer le mouvement social capable de destituer les responsables et de constituer la République des solidarités, de la liberté et de l’intérêt général

par Jean-Louis Bothurel

 

Là où croît le danger, croît aussi ce qui sauve
Friedrich Hölderlin 1 (20 mars 1770-7 juin 1843)

Depuis la fin de la semaine dernière et probablement jusqu’en mai, l’Europe et une grande partie du monde vivront dans le rythme étrange qu’imposent d’un côté l’attente fébrile d’informations sur l’évolution rapide de la pandémie de Cov19, et de l’autre, le confinement général de la population : tout s’accélère, tout ralentit. Nous assistons aux noces de l’urgence et de l’immobilisation. Seul point commun à ces deux temporalités : elles semblent mettre le politique sous cloche.

Et pourtant, cette crise est éminemment politique, et quand il faudra lever la cloche, le combat politique sera là comme une évidence. Mais en réalité, il a déjà commencé. La première bataille stratégique se joue aujourd’hui pour savoir de quoi cette crise est la crise ; de son issue dépendra potentiellement notre avenir démocratique à moyen terme.

Pour nous, cette crise est une crise du néolibéralisme autoritaire incarné jusqu’à la caricature par la synthèse jupitérienne entre Cinquième République, turbocapitalisme et expertocratie ; il ne s’agit bien sûr pas de dire que le virus a été produit par le capital. Mais s’il y a crise, et singulièrement si l’Union Européenne est si vite devenue le deuxième foyer mondial de la pandémie, c’est d’abord du fait de l’incapacité totale des gouvernements en place à anticiper l’avancée du mal ; à organiser une réponse exempte de complaisance pour les intérêts économiques, mais aussi de calculs électoralistes à la petite semaine, dont le cas de l’ex-ministre Buzyn constitue assurément un sommet digne d’entrer dans les Annales ; au-delà, ou en-deçà, la force de la secousse endurée s’explique aussi par une politique d’aménagement du territoire anti-écologique, anti-républicaine et anti-sociale, obsédée par la concentration des moyens et des habitants dans des métropoles-mondes réduisant le reste du pays à un désert social et sanitaire, et sacrifiant comme superflus tous les services publics qui ne servent pas la religion de l’innovation. C’est ainsi qu’on a assisté au sabotage systématique de la recherche française de long terme, en l’occurrence la recherche biomédicale sur les coronavirus, que l’Agence Nationale de la Recherche française traitait l’an dernier encore comme des broutilles. C’est ainsi également, et surtout, qu’on a vu détruire la sécurité sociale, démanteler la médecine de proximité, en ville et à la campagne, et qu’on a vu l’hôpital public être asservi à la folie gestionnaire des beds managers. « Abaissez la courbe ! », nous dit-on, signifiant par là qu’il faut ralentir la progression du virus pour éviter que le pic épidémique ne dépasse trop le seuil des capacités de l’hôpital. Et si on parlait de celles et ceux qui, depuis quinze ans, ont méthodiquement abaissé ce seuil ?

Ne nous voilons pas la face : le discours d’en face est en train de s’organiser en même temps qu’une réponse politique qui, si elle trouve à s’articuler, représentera un danger immédiat de synthèse finale entre l’ordolibéralisme et une forme de post-fascisme, ce qu’on pourrait appeler, révérence gardée pour Lénine, le « néolibéralisme de guerre », puisqu’apparemment « nous sommes en guerre ». Cette crise, nous dit-on, est d’abord une crise morale, celle de la responsabilité individuelle de citoyens hédonistes, insouciants, dont on oublie au passage qu’on les a soi-même gavés d’informations minorant le mal ; c’était la teneur du discours du Premier ministre samedi 14. Il faut dire qu’en bonne logique shadok, on identifiera le problème à partir de la solution qu’on aura trouvée. Et comme on a trouvé l’assignation à résidence (sauf pour ceux qui ont les moyens d’entretenir une maison de campagne où fuir), le télétravail pour les uns, la réquisition pour les autres et la fermeture des frontières pour tous, mais pas pour les marchandises bien sûr, on identifiera le problème comme suit : c’est une crise des solidarités du vieux monde, de cette façon « inadaptée » de s’inscrire dans des collectifs de travail, des collectifs de vie, des collectifs de lutte aussi parfois ; le collectif, c’est contagieux ! La solution, c’est donc la « distanciation sociale », terme sublime et terrible, qui trouve le moyen de mettre en avant une rupture du lien social derrière des gestes qui sont, foncièrement, des gestes altruistes, solidaires, collectifs : appeler les choses ainsi est déjà un aveu du monde que ces gens désirent. La destruction finale de ces mêmes institutions sociales qui auront sauvé des milliers de vie sera bien sûr présentée comme le contraire de ce qu’elle sera réellement, comme un moment de « refondation nationale », de « résilience collective », à grands renforts de déclarations effusions chauvines et moralistes associant triomphalisme de bon aloi et prêchi-prêcha clérical sur la régénération par l’effort (Macron, lundi 16 : la « guerre » va nous rendre « plus forts moralement » – passage étrangement supprimé du texte publié sur le site du gouvernement). On peut d’ailleurs compter sur les calotins de toutes chapelles pour soutenir ce discours et tenter ainsi de récupérer le monopole de la collectivité tolérable.

Parallèlement, on nous dira que c’est une crise des mobilités, pas celle des biens, non, celle des gens qui ne veulent pas rester là où est leur place. On oubliera à l’occasion le mythe de la mobilité heureuse auquel on a longtemps voulu croire, pour en revenir à l’essence profonde de l’ordolibéralisme : l’assignation à résidence, sociale, géographique, économique, qu’il s’agira cette fois de comprendre dans le sens le plus littéral possible. Et donc, face à l’inconséquence des gens mal informés (par qui ?), mal socialisés (par qui ?) et trop mobiles (à l’appel de qui ?), on en appellera aux « experts », qui ne sont bien entendu pas les chercheurs qu’on aura préalablement étranglés, ni les médecins hospitaliers qu’on aura acculés au burn-out. Et il faudra réparer les dégâts économiques causés par le confinement, lui-même conséquence de cette inconséquence civique : « L’État paiera ». Comme en 2008 ? La suite est déjà écrite : dans six mois, un an, on s’indignera de « la dette ». Qui paiera la dette ? Les fautifs ! Et comme en Grèce, on lancera une cure d’austérité pour soigner le patient.

Il pourrait y avoir quelque chose de désespérant à se dire que tout est aussi cousu de fil blanc. Mais en un sens, cette situation est rassurante : pendant que les masques du « progressisme libéral » finiront de tomber à la faveur du confinement, nous savons que nous avons quelques semaines pour mener une bataille culturelle dont nous avons identifié les enjeux, sur laquelle il y a dès aujourd’hui un très large consensus dans le mouvement social et politique, et où nos positions d’émancipation démocratique, sociale et écologique entrent en résonance avec les préoccupations et les diagnostics d’une très large part de la population. Nous avons un avantage sur le gouvernement, qui est que nous sommes sous la cloche avec nos concitoyens. Les fils de communication ne sont pas rompus. À nous, donc, de faire monter la température sous la cloche pour que le jour où le gouvernement la lèvera, car il devra bien la lever au moins en partie, ne serait-ce que pour des raisons économiques, il trouve face à lui un mouvement social déterminé à destituer celles et ceux qui porteront la responsabilité des milliers voire des dizaines de milliers de morts du virus en France ; mais aussi déterminé à constituer, socialement, politiquement, institutionnellement, la République des solidarités, de la liberté et de l’intérêt général humain. L’enjeu est crucial, et la bataille sera terrible, car cette crise est continentale voire mondiale, et plus qu’aucune autre depuis dix ans, elle met en jeu toute l’organisation institutionnelle, géographique et sociale du capitalisme dans les pays de l’OCDE. Le pays qui arrivera à destituer les coupables et à constituer la solidarité ouvrira la voie à tout un monde.

A nous d’être prêts.

NOTE

1 Le 20 mars 2020 marque le 250e anniversaire de la naissance de « l’étoile Hölderlin » (Louis Aragon). Poète, romancier, traducteur, philosophe, il est une figure centrale de l’idéalisme allemand, compagnon intime de Hegel durant leurs années de jeunesse et jusque vers 1800. Hölderlin, qui a vécu quelques temps à Bordeaux, est aussi un défenseur de la liberté politique en Europe, inspiré à la fois par le soulèvement héroïque du peuple grec et par l’espérance républicaine et révolutionnaire française, qu’il défendit jusqu’au bout. Son œuvre associe le combat pour l’émancipation collective, la réconciliation de l’humain avec la nature et l’exigence de la pensée dialectique.

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De la mondialisation comme virus

par Bellon André

 

Il y a 40 ans, un virus idéologique se répandait sur le monde. Un Alain Minc, héraut autoproclamé, l’appelait « la mondialisation heureuse ». Refusant toute contestation, le bienheureux Minc s’inquiétait de voir la France être le mauvais élève de la modernité. Il entraînait d’autant plus facilement l’adhésion que les gouvernements de l’époque, droite et gauche confondus, sollicitaient ses conseils éclairés, qu’il présidait le Conseil de surveillance du Monde, était responsable du rapport sur « la France de l’an 2000 » commandé par  le premier ministre Edouard Balladur et faisait partie de nombreux cercles d’influence comme la Fondation Saint-Simon. On ne comptait plus ses disciples, certains pontifiants, d’autres un peu plus ras de terre. La mondialisation devenait une sorte de conte de fée. On sourira en rappelant cette pauvre Laure Adler laissant échapper son émotion enthousiaste devant le « symbole » de tous ces humains, de toutes races, de tous sexes et de toutes conditions, regardant tous dans la même direction : l’éclipse de soleil. Une allégorie de la mondialisation fraternelle en quelque sorte !

Cette volonté béate de magnifier une mondialisation toujours évoquée, mais jamais analysée, que ne nous a-t-elle pas coûté ? Certes, certains cherchaient à prendre des distances en demandant une autre mondialisation – alter ? -, mais ne regardaient-ils pas, comme les autres, vers l’éclipse ? Même Jacques Attali, grand chantre d’un gouvernement planétaire, se croit obligé, depuis quelques temps, de se démarquer du bonheur mondialisé en critiquant une mondialisation financière qu’il a beaucoup aidé à favoriser dans les années 1980.

L’idéologie développée par les mondialistes, largement relayée par les médias, a conduit à considérer tout Etat comme oppressif et toute idée de frontière comme porteuse de xénophobie et de racisme. Ah, ce fameux gouvernement mondial, source de paix et de bonheur entre les humains !

Et pourtant ! Toute conception de gouvernement mondial se présente comme une transcendance ou, comme le dit Alain Supiot, professeur au Collège de France, comme « un fait de nature ». Il se réfère obligatoirement à des normes communes définies hors de tout contrôle des citoyens. D’ailleurs, il n’y a alors plus de citoyens, il n’y a plus que des individus atomisés, sans pouvoir politique. Un gouvernement mondial ne peut être qu’une expertocratie.

Il est d’ailleurs frappant que les thuriféraires de la mondialisation, ou de son secteur particulier qui s’appelle l’Union européenne, demandent à la fois des règles non contestables, en particulier économiques et financières, et le respect des identités. Mais, par identités, ils signifient des particularités qui caractérisent le genre, l’origine ethnique, les pratiques sexuelles, mais pas la citoyenneté, élément politique de base. La mondialisation détruit l’individu en tant qu’être politique. En ce sens, elle s’oppose à l’humanisme.

Elle peut donc être contestée par l’humain reprenant toute sa place dans l’Histoire, c’est-à-dire par le citoyen reconstitué. La question était largement posée après la deuxième guerre mondiale. D’un côté, l’ONU, forum de nations ou la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui rappelait que « la volonté du peuple est le fondement de l’autorité des pouvoirs publics ». De l’autre, une volonté de domination monétaire et financière symbolisée par le FMI ou la Banque Mondiale.

Les événements récents ne révèlent-ils pas quel a été le choix, ne font-ils pas apparaître la signification philosophique de la mondialisation ?
La pandémie de coronavirus constitue un double révélateur.

Elle a d’abord mis en lumière la ruine des services publics de recherche qui auraient permis d’anticiper une telle catastrophe. Des programmes de lutte contre ce type de virus existaient il y a vingt ans. Ils ont été jugés inutiles parce que ne répondant qu’à des défis qui, n’étant pas immédiats, n’étaient pas prioritaires. Elle a montré la naïveté et l’imprévoyance du mondialisme qui trouvait normal de déléguer la fabrication de médicaments européens importants en… Chine ou en Inde, créant des pénuries visibles depuis plusieurs années. Le système mondialisé ne s’intéresse pas au long terme. Un pouvoir éloigné des humains ne raisonne pas à l’échelle de l’humain.

Par ailleurs et paradoxalement, la mondialisation financière, censée réguler l’économie, a montré la fragilité des marchés financiers. Ce colosse s’écroule à la moindre secousse. La chose avait pourtant été démontrée, dans l’indifférence générale, en 2008, par la résistance islandaise à la crise financière. Comment ne pas évoquer aujourd’hui le Président islandais invitant ses amis européens, à l’issue de ce séisme national, à inverser l’importance des facteurs. Il proclamait alors que les droits de l’humanité étaient supérieurs, dans tous les cas, aux intérêts des marchés financiers. La chose n’est-elle pas aujourd’hui d’actualité ?

Depuis plus de 40 ans, nos gouvernements ne savent plus penser l’intérêt général qui ne les intéresse plus puisque les marchés sont supposés s’occuper de tout. Ils se soumettent à des logiques d’immédiateté, représentatives d’intérêts volatiles et inhumains qui s’opposent à des perspectives raisonnées. Ils ont abandonné le sens de l’humanité qui se construisait depuis la philosophie des Lumières. Ce n’est pas une crise conjoncturelle que nous vivons, c’est une crise historique qui doit remettre en cause le système économique et politique. L’heure est au retour des valeurs humanistes et du citoyen qui en est l’incarnation.

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La mondialisation malheureuse est contagieuse

par Frédéric Pierru

 

NDLR – Cet article a été publié dans une version courte par l’hebdomadaire Marianne.

« Nous sommes en guerre ». Le Président de la République, M. Emmanuel Macron, l’a répété sept fois lors de son allocution solennelle, sinon sépulcrale, du 16 mars 2020. En guerre, certes, mais reste à définir l’ennemi. Nous avons bien compris que l’ennemi désigné par le pouvoir était invisible, viral, comme l’est le terrorisme islamiste. Rien de tel qu’un ennemi invisible, menant une guerre asymétrique, pour faire taire les désaccords, de plus en plus nombreux, et unifier la Nation autour de son Chef, aux accents gaulliens. Certes, on pourra juger que la prestation frisa le ridicule. Ni l’âge, ni l’uniforme, ni le passé résistant ne venaient conforter ce discours martial. Le tragique de l’époque vient de ce décalage entre des rôles définis dans des périodes héroïques d’un côté, leur occupation par des hommes finalement triviaux de l’autre : un héros national ne peut être un homme qui incarne à l’état chimiquement pur le conformisme intellectuel et politique d’un néolibéralisme agonisant. Et, comme si cette dissonance ne suffisait pas, nous apprenions, dans une interview proprement stupéfiante publiée par le quotidien vespéral1, que l’ancienne ministre de la Santé, Mme Agnès Buzyn, avait alerté – ou pas – dès janvier le pouvoir exécutif de la gravité de la pandémie à venir, puis regretté la « mascarade » du premier tour des élections municipales à laquelle elle s’était apparemment volontiers prêtée… Dès lors, l’incrimination de Français « insouciants » servant de justification à des mesures de santé publique coercitives – le confinement – rejoignait le long cortège d’insultes proférées par M. Macron à l’égard des « Gaulois réfractaires ». Emmanuel Todd, dans son dernier livre, a décidément raison : faute d’avoir prise sur l’Histoire, les gouvernants français sont passés « en mode aztèque »2. Ils se vengent de leur impuissance au niveau international en martyrisant leurs concitoyens…

L’heure est grave en effet et chacun doit se mobiliser contre la « tempête microbienne », virale en l’occurrence3. Les services de réanimation sont débordés, comme l’étaient et le sont plus que jamais les services d’urgence4 dans l’indifférence hautaine de nos gouvernants qui semblent plus se soucier de leur avenir professionnel après une déroute électorale que de la santé de leurs concitoyens. Les personnels soignants, déjà épuisés, sont sommés de monter au front pandémique. Ils le font et le feront car c’est la raison pour laquelle ils font le métier qu’ils font. Leur légitimité, déjà grande, sortira renforcée de cette vocation chevillée au corps et de cette abnégation.

En finir avec la « double pensée » macronienne
et réfléchir en temps de crise

Pour autant, l’on entend déjà des apprentis censeurs réclamer, au nom de l’Unité nationale face à l’ennemi viral, l’extinction de tout débat. C’est un classique : toute crise, surtout sanitaire, et, a fortiori, toute guerre, engendrent son lot de discours consensuels et unanimistes. L’Ennemi, surtout lorsqu’il est invisible, réclame l’enrôlement et toute critique est perçue comme une mutinerie. Fusillée, la critique, pour l’exemple.

Cette alternative infernale, il faut pourtant la refuser. L’on peut en même temps – retour à l’envoyeur de la politique de l’oxymore ou, en termes plus orwellien, de la double pensée qui a fait le succès électoral de M. Macron – être un rouage de la lutte contre la pandémie et ne pas éluder la question, si insistante, de l’identification des responsabilités dans la situation actuelle, à savoir : un pays parmi les plus développés qui, parce qu’il a sapé, au nom de l’irraison budgétaire, les services publics, en particulier de la santé, et son industrie5 se retrouve dans la situation consistant à jouer de la peur pour contenir une pandémie qu’il avait le temps de voir venir. Le caractère inédit – c’est à voir – de la pandémie joue comme un révélateur de la déliquescence du système public de santé, comme un coronakrach comme l’a fort justement évoqué Frédéric Lordon sur son blog6.

Le Professeur Rémi Salomon, récemment élu président de la Commission Médicale d’Etablissement de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, avait, à la suite des Collectifs Inter-Hôpitaux et Inter-Urgences, annoncé un « krach sanitaire » dès la fin de l’année 2019. Nous y sommes. Nul doute qu’il aurait aimé avoir tort. Reste que nous y sommes. Le vent mauvais de la pandémie balaie un système public de santé qui menaçait déjà ruines.

Comme les historiens nous l’ont appris, dans toute crise se combinent facteurs de long terme et conjoncture. En l’occurrence, l’incurie des pouvoirs publics se joue dans ces deux temporalités.

Depuis le début des années 2000 avec le retour des maladies émergentes, l’OMS et, à sa suite, les pays développés, ont adhéré à une logique de « preparedness » : soit, en langage non ésotérique, se préparer au pire dans un contexte d’incertitude radicale. D’Ebola à l’attaque bioterroriste, toute éventualité devait être envisagée et la société méticuleusement préparée (cette préparation s’appelant « résilience ») à une adversité d’ampleur catastrophique. La protection de la sécurité physique de la population est au cœur de la légitimité de l’État. Jusque-là, rien à dire, hormis cette extension inquiétante du « principe sécurité » qui amène, progressivement, à la banalisation de l’état d’exception7. Sauf que… Des scénarios catastrophe à la réalité de la préparation, il semble y avoir un gouffre. Pas assez de masques, pas assez de tests, pas assez de lits de réanimation. Par contre, les libertés publiques sont bien ciblées par le pouvoir. La mise en scène médiatique de l’interpellation d’un couple en promenade sur la plage déserte de la Baule suscite quelques inquiétudes. Idem pour des joggers respectant la distance sociale. En effet, quelle logique de santé publique préside à un tel rappel à l’ordre ? Aucune. On a affaire simplement à des gens qui cherchent à préserver un minimum de santé mentale et qui respectent la « distanciation sociale ». La soutenabilité psychologique du confinement est loin d’être la chose la mieux partagée du monde, selon que vous êtes l’écrivaine Leila Slimani, « incarcérée » dans sa maison de campagne normande et qui réserve la primeur de ses cahiers de prison au quotidien Le Monde, ou que vous êtes embastillé dans un appartement de 60 m2 à sept dans un HLM de la Courneuve.

Tous les commentateurs, y compris et surtout ceux de droite, célèbrent désormais l’État providence et le camp progressiste se réjouit. Peut-être un peu trop vite. Le néolibéralisme agonisant pourrait enclencher une fuite en avant autoritaire. On entend de plus en plus parler d’hôpitaux de campagne, d’armée, de confinement total, de la discipline des « Asiatiques »… Il y a de quoi rester vigilant ! La remise en cause des libertés publiques pourrait très bien profiter de l’impréparation totale du pouvoir, en contradiction totale avec la doctrine de la « preparedness ». On connaît la capacité incroyable du néolibéralisme à recycler ses propres externalités négatives – les problèmes économiques, sociaux, écologiques – pour se renforcer8. La Chine sera peut-être le prochain « modèle » de nos élites, remplaçant l’Allemagne dans leur cœur. De la sécurité sanitaire à la sécurité nationale, puis à la sécurité intérieure tout court, les glissements sont faciles. Le souvenir de la répression féroce des gilets jaunes nourrit l’inquiétude.

Cela étant dit, le principe cardinal de la santé publique new-look est de procéder à des « retours d’expérience ». Pour le coup, c’est un violent retour de kick. Comme nous l’avions écrit dans de précédents articles et livres, la mise à mal des différents piliers du service public de santé révèle, dans ce contexte dramatique, ses funestes conséquences. La désorganisation de la médecine libérale qui aurait dû, depuis longtemps, s’il y avait eu un peu de courage politique, être réformée en service public de la santé de proximité, de même que la pauvreté chronique du médico-social et la crise de la psychiatrie publique débouchent mécaniquement sur l’engorgement des urgences hospitalières. Cette embolie des urgences se propage aux autres services hospitaliers. Le caractère systémique de la crise ne concerne pas que la finance. L’hôpital de « flux » ou « hub » rêvé par Mme Buzyn et son successeur9 – fantasme de la la « liquidité » de la finance étendue à toutes les activités humaines – devient vulnérable à tout surcroît d’activité, et, a fortiori, à une crise de santé publique majeure. Ici, « l’efficience » de l’hôpital technologique du futur vient s’écraser contre la falaise de la pandémie. En un sens, cela n’est guère étonnant : plaquer le court-termisme de la logique financière à l’hôpital revient à croiser les doigts ou, en d’autres termes, à parier que rien d’exceptionnel n’arrivera. Pas de chance, l’exceptionnel est survenu. Avec le réchauffement climatique, il y a même fort à parier que l’exceptionnel deviendra la routine, il suffit de penser à la fonte du permafrost et aux « mégavirus » dormants qui vont se réveiller….

Dès lors, cette crise sanitaire ne doit pas être l’occasion de couler une chape de béton tchernobylienne sur le débat mais, tout au contraire, elle appelle son ouverture. Il faut commencer dès maintenant le retour d’expérience, si pénible soit-il pour nos gouvernants, d’aujourd’hui et d’hier. Car c’est peu de dire que l’actuel pouvoir n’aime pas la critique. Avec lui, c’est toujours la faute des autres.

Il ne s’agit pas de regretter ce qui a été fait et pas fait, c’est, par construction, trop tard mais de tirer les conséquences logiques de la désorganisation actuelle : la pandémie joue comme un révélateur photographique d’une crise sans fin du système de santé, l’hôpital public étant devenu le symptôme de ladite crise. L’hôpital high tech, gouverné par des managers imprégnés de rationalité industrielle et marchande faisait déjà faillite avant la pandémie. Cette dernière l’accélère. Comme dans toute crise paradigmatique, il convient donc de tout revoir.

Cependant, avant d’en arriver aux détails, fixons un horizon capable de susciter adhésion, sinon enthousiasme : il nous faut penser un hôpital public ancré dans ses missions de santé publique et ayant les moyens matériels, humains et financiers de faire face à une double épidémie ; celle qu’incarne en ce moment le Covid-19 ; celle des maladies chroniques10. Un hôpital de santé publique est le contraire de l’hôpital-entreprise que les gouvernements de droite et de gauche nous ont vendu depuis des décennies. Dès lors que l’hôpital-entreprise est devenu une réalité perverse pour les soignants et les patients grâce à des boîtes noires gestionnaires, il nous faut ouvrir ces dernières, en analyser les rouages afin d’en substituer d’autres, vertueux.

Une épidémie peut en cacher une autre

La pandémie actuelle de Coronavirus, qui phagocyte l’actualité, ne doit pas cacher une épidémie, d’une ampleur et d’un coût largement aussi graves : l’épidémie de maladies chroniques.

Faire face à ces deux défis de santé publique suppose de repenser la place de l’hôpital dans l’offre, non seulement de soins, mais de santé. Il nous faut une organisation sanitaire plus intégrée, ou, si l’on veut, coordonnée, là où règnent, pour le moment, le chaos et la méfiance : méfiance entre médecine de ville et médecine hospitalière, entre celle-ci et médico-social. Dire cela est simple. Toutefois, dans les faits, cela suppose des bouleversements d’ampleur qui vont de la formation des soignants – par exemple, ne pas sélectionner par l’échec au concours de l’internat les médecins généralistes – jusqu’aux modes de financement et de gouvernance. Jusqu’à aujourd’hui, les gouvernements n’ont rien trouvé de mieux que d’étendre un mode de financement dysfonctionnel – le paiement à l’acte – à l’hôpital, de surcroît dans un budget fermé, dans lequel la rémunération est flottante : plus vous faites d’activité, plus le tarif baisse ! Bref, une incitation à médicaliser les souffrances sociales pour ne pas perdre de revenu… De même, actuellement, l’État et l’Assurance-maladie sont des associés-rivaux qui veulent mettre chacun la main sur le compartiment que gère l’autre. A ce jeu, la médecine libérale et les cliniques ont tiré leur épingle du jeu en reportant la contrainte budgétaire sur les hôpitaux publics.

A l’aune de la pandémie actuelle, tous les acteurs du système de santé doivent assumer la dimension collective de leur activité. La médecine libérale, définie en 1927, fondée sur un individualisme boutiquier, est obsolète. Il nous faut désormais un véritable service public de la santé de proximité, associant, dans des « mini-cliniques » publiques, l’ensemble des professionnels de santé – médecins généralistes, infirmiers, kinésithérapeutes, diététiciens, travailleurs sociaux, etc. L’organisation du premier recours, adossé à la santé publique, doit devenir la priorité des priorités. Le premier recours doit être le lieu d’une prise en charge globale en lien étroit avec les équipes hospitalières. Si les Français sont autant attachés à l’hôpital public, c’est que ce dernier assure, par exemple, la permanence des soins que les autres ne font plus. De même, il faut mettre un terme à ce scandale qu’est la crise de la psychiatrie publique. Où l’on revient à l’épidémie de maladies chroniques. Les malades en décompensation psychologique viennent aux urgences car ils ne peuvent plus être suivis correctement par les Centres Médico-Psychologiques et il n’y a plus suffisamment de lits en institutions hospitalières. Certains tentent héroïquement, comme le Dr Patrick Chemla au Centre Antonin Artaud à Reims, de maintenir à flot un centre ambulatoire, qui est aussi un lieu d’innovations stupéfiantes, contre vents et marées budgétaires. Mais, ils ne peuvent tenir indéfiniment. C’est une honte pour le pays que de ne pas soutenir de telles institutions qui, malgré l’épuisement des personnels, empêchent l’engorgement des urgences.

De la même façon, financer correctement le « risque dépendance » et le médico-social , devenu au fil du temps plus social que médical, permettrait de délester l’hôpital public de patients qui pourraient être humainement soignés dans le cadre de de vie, institution ou domicile, plutôt que de rester des heures sur un brancard des urgences, voire, pour certain.e.s y mourir.

Les missions de l’hôpital public dans ce système de santé repensé changent alors radicalement. Certes, il y aura toujours une place pour les prouesses technologiques et la médecine hyper-spécialisée. L’hôpital est et restera un lieu d’innovations technologiques, pas forcément source de profits. Mais à l’heure de l’épidémie de maladies chroniques, il est loin de se résumer aux images fascinantes de la Start-Up Nation. Plus prosaïquement, il lui faudra prendre en charge, en lien avec le service public de la santé de proximité, des diabétiques, des hypertendus, des malades du cancer, des patients souffrant de maladies psychiatriques… La technique y jouera certes un rôle. Mais l’essentiel, comme la vérité, est ailleurs. Il est dans le rapport entre le malade, l’équipe de soins de proximité et l’équipe hospitalière. Il est aussi dans l’éducation thérapeutique du patient. Pas l’éducation thérapeutique normée, standardisée, protocolisée vendue par les industriels, mais celle basée sur la confiance entre malade et soignants, entre soignants, ce qui suppose stabilité des équipes et financement pertinent, de type forfaitaire. La maladie chronique est un parcours de vie qui, en aucun cas, se laisse tronçonner en actes auxquels seraient accolés des tarifs calculés on ne sait comment. Certes, le « financement au parcours » de santé est devenu le nouveau leitmotiv de nos gouvernants. Mais en matière de politique de santé, les discours et les actes entretiennent un rapport pour le moins distendu. Deux ans et demi après les annonces du candidat Macron, rien, ou presque, n’a été fait. Le président Emmanuel Macron a certes déclaré devant la « vague pandémique » que la « santé n’a[vait] pas de prix »11 – quel chemin parcouru en quelques semaines par celui qui appelait les jeunes à devenir milliardaires ! – et fait l’éloge du dévouement des soignants, mais, pour le moment, nous en sommes restés au stade des vœux pieux. Rappelons-nous 2007-2008 : une telle conversion face à la dure réalité (le réel c’est ce qui résiste et nargue nos plans a écrit Régis Debray) n’emporte en soi aucune promesse. Pire : elle peut annoncer la pire des restaurations. Jugeons donc l’arbre à ses fruits !

Trois enjeux prioritaires

Trois sujets, sur une liste loin d’être exhaustive tant la réforme d’un système de santé est complexe et s’inscrit dans le temps long, doivent être traités d’urgence.

  • Le premier, décisif, est relatif à l’attractivité du service public hospitalier. Il ne s’agit pas de contester l’émulation que peut représenter la coexistence avec des acteurs privés à but non lucratif, car le lucratif n’est en rien compatible avec une socialisation de la dépense de santé via la Sécurité Sociale. Les traitements des fonctionnaires du service public hospitalier, infirmier.e.s en tête, doivent être immédiatement revalorisés tant le fait pour un pays comme la France de figurer au 28e rang de l’OCDE est un véritable scandale. De même des conditions de travail décentes devrait être la norme pour un pays développé comme la France. Si « DRH » a un sens autre que sabrer dans les effectifs, ou que celui de « cost-killers »12, il est plus que temps d’en faire la démonstration.
  • Le second a à voir avec ce que « faire de la santé publique » veut dire. Pour l’instant, il s’agit de saupoudrer des financements indécents sur des priorités multiples, afin de ne fâcher personne. Pire : on en appelle à la « responsabilisation » des individus, ce qui a pour avantage de ne pas fâcher les puissants groupes d’intérêt qui, chaque jour, détériorent notre environnement physique, social, économique. C’est exactement le contraire qu’il faut faire, quitte à affronter le chantage à l’emploi. De plus, une politique de santé publique nécessite de hiérarchiser les priorités et les objectifs, quelle que soit l’ampleur du financement consacrée à la santé. Qui et comment décider des priorités, en fonction de quels critères ? Comme les poupées russes, cette question renvoie à des interrogations emboîtées les unes dans les autres. L’articulation entre expertise et décision en est une. L’articulation entre démocraties sanitaire, sociale et politique, participative et représentative en est une autre.
  • Le troisième sujet est afférent à la recherche, à la production et aux prix des médicaments. On a assisté ces dernières années au renforcement sans précédent du droit des brevets concourant ainsi au blocage de la recherche et de l’innovation, à des orientations radicales des politiques publiques de recherche vers le recours à la propriété intellectuelle, à la captation des résultats de la recherche et des fonds publics par l’industrie pharmaceutique, à la délocalisation en Chine de la production, etc. La question de l’industrie du médicament n’est pas uniquement le fait qu’elle n’ait pas été protégée sur notre territoire. Il en va de même pour la recherche, au-delà de la question du financement : après avoir incité très fortement les chercheurs à breveter leur découvertes et inventions, on en appelle aujourd’hui à une collaboration forte fondée sur l’ouverture et la mise à disposition immédiate des résultats et ce dans un souci d’efficacité sanitaire ! Ici, les réflexions foisonnantes sur les communs s’avèrent précieuses13.

La pandémie du Covid-19 est une crise au sens rigoureux et hippocratique du terme : elle est ce moment crucial – le Dr Salachas a évoqué devant M. Macron, lors de sa visite à La Pitié-Salpêtrière, le « kairos », ce petit dieu ailé qu’il faut savoir saisir à temps par les cheveux – où se décide la survie ou non du patient. Le patient a ici un nom : le service public de la santé.

Au sortir de la Seconde guerre mondiale, les sociétés européennes ont compris que l’on ne pouvait faire face à l’adversité que collectivement14. Il en a résulté la mise en place de la Sécurité sociale et, un peu plus tard, du service public hospitalier. « Nous sommes en guerre ». Certes. Mais cette guerre a deux sorties : celle, néolibérale et autoritaire, qui restreindra de plus en plus nos libertés publiques ; celle qui nous sortira enfin de ce cauchemar néolibéral qui n’en finit pas et débouchera sur un nouveau programme du type « Les Jours Heureux ».

Frédéric Pierru
CNRS-CERAPS. Chercheur associé au LISE, Conservatoire National des Arts et Métiers.
Co-auteur avec Pierre-André Juven et Fanny Vincent de La Casse du siècle. A propos des réformes de l’hôpital public, Paris, Raisons d’Agir, 2019 Les responsables des éditions Raisons d’Agir ont décidé, avec bien entendu l’accord des auteurs, de mettre en ligne gratuitement le livre en cette période de pandémie.)
Co-directeur avec André Grimaldi de Santé : urgence, Paris, Odile Jacob, avril 2020.

NOTES

1 Le Monde, 17 mars 2020.

2 Emmanuel Todd, La lutte des classes au XXIème siècle, Paris, Seuil, 2020.

3 Patrick Zylberman, Tempêtes microbiennes, Paris, Gallimard, 2013.

4 Hugo Huon (dir.), Urgences : Hôpital en danger, Paris, Albin Michel, 2020.

5 On apprend avec stupéfaction en effet que la France a littéralement « bazardé » son stock de masques, sans avoir les moyens d’en produire et dépend désormais de la Chine qui, c’est de bonne guerre (puisqu’on l’est, apparemment), se réserve le gros de la production.

6 Frédéric Lordon, « Coronakrach », blog La pompe à Phynances, 11 mars 2020.

7 Frédéric Gros, Le Principe sécurité, Paris, Gallimard, 2012.

8 Christian Laval, Pierre Dardot, Ce cauchemar qui n’en finit pas, Paris, La Découverte, 2016.

9 André Grimaldi, Anne Gervais, Olivier Milleron, « Coronavirus : L’hôpital ne peut pas fonctionner comme une clinique privée qui choisit ses patients pour optimiser sa plomberie », Le Monde, 11 mars 2020.

10 André Grimaldi et al. (dir.), Les maladies chroniques : vers la troisième médecine, Paris, Odile Jacob, 2017.

11 Discours du 12 mars 2020.

12 Didier Bille, DRH. La machine à broyer, Paris, Cherche Midi, 2018.

13 Marie Cornu, Fabienne Orsi, Judith Rochfeld (dir.), Dictionnaire des biens communs, Paris, PUF, 2017.

14 Alain Supiot, L’esprit de Philadelphie. La justice sociale face au marché total, Paris, Seuil, 2010.



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