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ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine

n°567 - samedi 10 novembre 2007

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1 - chronique d'Evariste

1 - La nécessaire convergence des aspirations de gauche

La liste est loin d'être close, et pourtant elle est déjà bien longue pour ce début Novembre : mobilisation des étudiants contre l'entrée des entreprises dans le fonctionnement des universités ; manifestations des marins pêcheurs ; contestation dans la magistrature face aux objectifs de réduction présentés par la chouchou du président parachutée ministre de la justice ; contestation de la réforme des retraites ; grèves à Air-France ; mécontentement dans la fonction publique face aux réductions drastiques d'effectifs ; grondes dans l'enseignement suite aux orientations données par le gouvernement ; malaise généralisé de la profession journalistique qui réclame à présent des lois protégeant son travail d'utilité publique contre les puissances économiques ; et on apprend à présent que la grogne monte également chez les syndicats de police : politique de « rendements et du chiffre », réforme du statut des officiers qui sont invités à devenir des cadres (comprendre : ne plus avoir de limite sur le nombre d'heures de travail). Si le gouvernement avait pour intention de mettre la France sans dessus-dessous, on peut dire qu'il s'en sort très bien.

Mais, hors cela, que montrent ces mouvements ? Simplement le fait qu'une vision du monde est en conflit avec une autre. Il ne s'agit pas seulement d'une vision économique et sociale, ce qui est en jeu est à un niveau plus fondamental. Exactement comme le pouvoir au moyen âge avait eu besoin d'une éthique chrétienne pour asseoir sa domination économique, le libéralisme économique a besoin que les individus adhèrent à une culture et une éthique de vie afin qu'il puisse asseoir son emprise sur les esprits et rendre nulle toute forme de résistance. Le système culturel et l'éthique supportant le libéralisme anglo-saxon est en lutte contre le système qui porte le modèle de la République française. Ce conflit est global, généralisé. En ce mois de Novembre, l'explosion du nombre de luttes sociales partout en France n'est que l'expression de cette réalité sous-jacente.

Que l'on ne s'y trompe pas, l'Angleterre a connu sous Thatcher le même type de période, mais dans une moindre mesure. En effet, si l'Angleterre a vu son système social et économique complètement détruits (au point d'obliger Tony Blair à revenir sur le terrain social), la culture anglaise est davantage propice au libéralisme de part ses racines anglo-saxonnes (encore une fois, intégrer Max Weber est une nécessité pour la reconstruction de la gauche). Cette vulnérabilité a fait de l'Angleterre la première cible européenne du néolibéralisme, dès les années 70.

Pour sa part, la République française s'oppose plus radicalement sur le plan culturel et éthique, la colonisation de la France doit donc passer par une phase d'éducation éthique et culturelle des individus afin de rendre « normales » les valeurs de vie qui sous-tendent le fonctionnement du libéralisme anglo-saxon. Ce choc se traduit par des attaques en règle de la laïcité, par le martelage du sentiment de peur à travers les média (là où le courage était une vertu du citoyen), par le nombre croissant de discours imposant la responsabilité individuelle comme seule valable, et par la vision d'un déterminisme individuel (pouvant aller jusqu'à la détermination génétique) contre lequel l'individu ne peut rien. La « nature » contre la « culture », la « fatalité de sa condition » contre « la possibilité de son émancipation », la recherche française en biologie connaît depuis longtemps les assauts et les tentatives du déterminisme génétique pour influencer la perception qu'un individu a de sa propre existence.

Face à cela, que faire ?

D'abord, intégrer que la dimension sociale et économique ne suffira pas à elle seule à contrecarrer l'assaut du monde libéral. Seule l'intégration de la dimension culturelle et éthique permettra d'asseoir nos valeurs et de provoquer le refus massif de cette vision de la vie individuelle et des règles de la société libérale.
Ensuite, cette compréhension doit passer par la construction d'un projet sociétal neuf, issu des traditions de la gauche française, mais en les élargissant et en intégrant d'autres référents qui, eux, tiennent compte du système culturel et éthique individuel. La réponse apportée par la gauche a été fondamentale pendant des décennies, mais faute d'ouverture intellectuelle connaît aujourd'hui des limites. La force des militants sera de réclamer cette ouverture de la pensée, la responsabilité et la fierté des militants de gauche portent sur le devoir de progrès, non sur celui de la conservation.

Enfin, sur le terrain immédiat de la lutte, la partition et la stricte division des conflits serait une erreur grave. La culture française a toujours reposé sur cette dualité : l'individualité et le collectif. L'individu est citoyen parce qu'il est armé du Pacte Républicain fondé par l'ensemble des individualités. C'est la conscience de partager un avenir commun qui fonde le Pacte Républicain entre les individus. Ce pacte n'est pas une masse informe, il est l'expression d'un projet commun, de volontés individuelles, de désir d'édifications et de progrès. Les luttes actuelles ne doivent pas se morceler, mais se rassembler. Et ce rassemblement ne doit pas être une simple addition des manifestants et des réclamations, il doit être réfléchi, travaillé pour réclamer des statuts communs, des revendications plus globales et exprimer, non une simple liste d'exigences, mais un réel projet global. Là réside la force de la gauche, l'esprit de gauche ; le même qui habitait le CNR.
Ainsi, il faudra lutter contre les tentations de divisions qui ont souvent eu pour origine les directions syndicales. D'ailleurs, la direction de la CFDT, jamais en reste dès qu'il s'agit de poignarder les employés, a annoncé d'ores et déjà qu'elle approuvait la nouvelle Constitution européenne libérale, et – ce qui est encore mieux ! – qu'elle soutenait le fait que la ratification du traité constitutionnel ne fasse pas l'objet d'un référendum. Non seulement, la direction de la CFDT est ouvertement favorable au libéralisme institutionnalisé en Europe, mais fait en sorte que les citoyens soient rendus muets (au cas où ils auraient des cerveaux pour comprendre... ).
La force et la construction d'un réel projet alternatif réside bel et bien dans la conscience qu'en ont les citoyens qui s'y engagent, et non dans les décisions des directions syndicales. D'ailleurs, il est notoire que le dépassement des directions syndicales par la base des citoyens est souvent un bon indicateur pour mesurer la réussite d'un projet...

Pendant ce temps, comme pour l'écriture pathétique d'un livre d'histoire au goût douteux, le président Sarkozy aux Etats-Unis d'Amérique, signe une fois de plus l'allégeance de son action à la vision globalisante des libéraux anglo-saxons ; ceux-là mêmes, dont le modèle sociétal prend eaux de toute part sur la planète.

Évariste Pour réagir aux articles,
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2 - le non de gauche

1 - « To be or not to be ? » La direction du PS répond : « Not to be ! »

La semaine dernière, un article de Respublica (cf. « TCE-bis : le coup d'Etat de Sarkozy ») concluait sur une direction du Parti Socialiste qui pèserait de tout son poids pour une absence de référendum sur le TCE-bis. Cette abstention permettant ainsi de faire adopter le TCE-bis sans soucis et de ne pas se retrouver dans le porte à faux entre un électorat refusant le libéralisme et une direction approuvant le TCE.

Une semaine plus tard, il est bien triste de constater que la seule connaissance du calcul politicien et de la « culture de la gagne » suffisent désormais à prédire les agissements et les prises de position de la direction du Parti Socialiste. Toute considération politique, toute pensée profonde, ont déserté les dirigeants de ce parti. La position du PS est en totale opposition avec les résolutions du congrès du Mans de Novembre 2005 qui reconnaissait le non français sur le TCE (et le TCE-bis est identique), et qui indiquait que le PS s'opposerait à toute proposition d'une nouvelle constitution qui ne ferait pas l'objet d'un référendum. Mieux ! La candidate officielle du parti à l'élection présidentielle s'était engagée à un référendum. Mais dans la direction du PS, la parole ne vaut rien.

De la lâcheté que l'on sauve par de l'apparence

En effet, la direction du PS se ménage la possibilité de « s'abstenir » sur le TCE-bis. Le TCE serait de toute façon adopté, mais on ne pourrait pas dire que les élus socialistes auraient voté « oui »... Lamentable mascarade ! Combien faut-il avoir peu d'honneur et de dignité pour mener un tel discours et se regarder toujours en face ! Combien la parole d'un dirigeant socialiste pèse peu après de telles décisions ! Combien le calcul « politicar » se révèle être la seule force véritable d'un Hollande ou d'un Fabius ! Aujourd'hui, la direction du Parti Socialiste incarne la honte de tout ce que la gauche peut être, car au delà de toute considération sur les valeurs de ces personnes, c'est bien plus le mépris pour le citoyen – y compris pour le sympathisant socialiste ! – qui éclate au grand jour.

Le pourrissement de la situation

Les municipales approchent et le PS s'imagine les affronter sereinement après ce qu'il estime être une grande victoire pour son unité. Mais de quelle unité s'agit-il ? De celle des citoyens ? De celle des sympathisants socialistes ? De la gauche ? Rien de tout cela ! Et c'est bien le pathétique de l'histoire. La seule unité préservée est celle qui unit les dirigeants socialistes « ouiouistes ». Voilà la seule ridicule unité que la direction du PS vient de sauver par cette position.
Mais pour combien de temps ? D'abord le débat sur le référendum sur le TCE-bis n'est pas clos (20 dirigeants ont tenu leur parole en réclamant un référendum et soutenant le non des citoyens au TCE). Ensuite, si une partie de la base du PS est notoirement suiviste de la direction de Hollande, les minorités sont actives, et gageons qu'elles feront tout pour que les choses ne restent pas en l'état (tant sur le référendum que sur les conséquences électorales d'une telle décision). Enfin, que vont penser les sympathisants socialistes ? Ceux-là mêmes qui avaient voté « non » au TCE. Ils représentent plus de 60% de l'électorat socialiste ! Le vote pour les municipales est dans 7 mois et la campagne commence dès Janvier 2008. Seront-ils idiots ? Stupides ? Semblables à des bovidés incapables de réflexion ? C'est un bien profond mépris de ses électeurs qu'a la direction du PS si elle s'imagine que de telle décision ne sont pas à même de modifier un bulletin de vote ...

À tous les militants et sympathisants véritablement socialistes et soucieux de leur parti, Respublica envoie son soutien dans cette épreuve identitaire. L'âme du socialisme, incarné par un Jaurès, reste un repère, et il n'est pas besoin d'être au Parti Socialiste pour poursuivre une telle oeuvre.

À gauche, rien de nouveau

Face à cela, le PCF reste dans un silence assourdissant. L'opportunité est pourtant aujourd'hui fabuleuse : fonder une force unitaire à gauche, usant des richesses des différentes cultures politiques. Une force rassemblant les militants de divers horizons, cherchant non une alliance de circonstance, mais une réelle opportunité de propulser la gauche, de lui ouvrir une richesse nouvelle. Seule une telle force neuve proposerait le cadre solide dont rêvent aujourd'hui tant de militants désireux de se s'impliquer pour un projet sociétal novateur. En Allemagne, une telle entreprise a réussi, pourquoi pas en France ?
Mais le PCF fait mine de ne rien entendre, jouant le pourrissement au PS, espérant peut-être récupérer quelques électeurs déçus et sauver ainsi ses élus aux municipales. Fonder une nouvelle force réclame un vouloir un changement moteur (donc l'abandon d'une partie de soi), un désir d'ouverture à la nouveauté, une volonté de s'aider des forces de l'autre et non de l'asservir à sa propre pensée. L'union est l'inverse d'une colonisation. Pour l'heure, les directions du PCF, comme de la LCR, ne parle d'union que dans le but d'avoir des militants supplémentaires dans leurs rangs. Gageons que les militants volontaires de ces partis finiront par bousculer leurs hiérarchies respectives et par leur faire comprendre que l'on ne s'unit jamais pour gagner un serviteur zélé, mais pour être à plusieurs face aux épreuves et conjuguer les points forts dans la construction de projets mobilisateurs. Il faut avoir foi dans son partenaire.

 

Vidéo sur le site de Marianne : Sur un banc du Sénat, avec le visage de celui qui voit son parti s'enfoncer de plus en plus bas, le sénateur Jean-Luc Mélenchon parle, explique et commente ce qu'est devenue la direction du Parti Socialiste et ce que ses membres ont comme projet.

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2 - Un nouveau traité européen contraire à la laïcité

Le nouveau traité européen est actuellement dans le débat public.

Il ne se contente pas de décrire une vision économique et une méthode institutionnelle. Il va plus loin. Il expose aussi une vision des relations entre les Etats et les Eglises, une vision de la laïcité, dite « ouverte ».

La laïcité, telle qu’issue des Lumières, pose comme principe l’universalisme et l’égalité absolue de tous les être humains au-delà de leurs différences d’origine et de condition, ainsi que la reconnaissance d'une séparation stricte entre la sphère privée et la sphère publique. Ainsi, la laïcité permet à l’État de proposer un Pacte Républicain qui repose sur ce qui nous unit et non sur ce qui nous divise. Quelles que soient nos cultures ou nos religions, la loi est élaborée par tous et applicable à chacun, puisque cette loi n’est pas l’otage de tel ou tel particularisme qui exclurait certains citoyens de son élaboration ou de son application.. La laïcité, condition de l'émancipation, nous permet de nous penser comme un parmi des égaux dans la sphère publique.

Le nouveau projet de Traité européen est aux antipodes de la laïcité républicaine. Le préambule, en rappelant l’héritage culturel et religieux de l’Europe, place la construction européenne dans une filiation identitaire. L’article 2, portant sur les "valeurs" de l’Union, affirme reconnaître "l’identité" et la "contribution spécifique" des religions. Une ou plusieurs cultures et religions auraient façonné l’identité de l’Union européenne, et cette identité doit "inspirer" l’action de l’Union européenne. De fait, la nouvelle Europe se place aux antipodes du Pacte Républicain laïque qui refuse toute considération sur les origines des êtres humains en les instaurant comme des citoyens libres et souverains face au poids de la tradition, des clergés et des lobbies.

Une contribution spécifique des croyants

Cependant, le projet de Traité va plus loin avec un nouvel article, TFUE, article 15-3 : «Reconnaissant leur identité et leur contribution spécifique, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ces églises et organisations.» Le nouveau traité reconnaît donc l'existence de communautés avec lesquelles l'Europe dialogue, alors que d'autres groupes de personnes sont exclues de ce dialogue, notamment les athées et les agnostiques. Cette approche communautariste conduit l’Union Européenne à intégrer parmi ses valeurs le "respect des minorités", ou à autoriser des lois créant "des avantages spécifiques" pour certaines minorités. Notons d'ailleurs que ces raisonnements à partir des minorités conduisent à mettre dans un même sac les handicaps, le sexe ou les religions !

Une nouveauté sous forme de retour aux débats de 1905

Depuis la séparation de l’Eglise et de l’Etat (loi de 1905), le ministère de l'Intérieur, c'est-à-dire de la police, est aussi chargé des cultes, compris comme expression publique des religions, susceptible de troubler l'ordre public. Le ministre ne dialogue pas pour reconnaître « la contribution spécifique » mais pour entendre les représentants religieux afin de s’assurer de l’ordre public. Prenons des exemples. Si les catholiques organisent une grande manifestation, l’ordre public est troublé. Le ministre de l’Intérieur cherche alors à encadrer cette manifestation afin qu’elle se déroule dans de bonnes conditions (les hôpitaux de fortune lors des JMJ, les barrières le long des routes, etc…). Si des musulmans ou des juifs sont victimes d’oppression (croix gammées sur les murs des moquées ou synagogue) le ministre de l’Intérieur les entend et cherche des solutions avec les représentants de ces lieux de cultes (ronde plus régulière des policiers devant ces bâtiments, mise en place d’une enquête avec plus de moyens). Si le ministre s’aperçoit d’une montée des intégrismes, il peut prendre des mesures pour remédier à cela.
Le dialogue reste en quelque sorte de l’ordre du technique, de la politique du maintien de l’ordre. L’Etat veille à ce que chacun puisse exercer son culte dans les meilleures conditions sans perturber, outre mesure, la vie de ceux qui ne partagent pas les mêmes opinions religieuses.

Le nouveau traité, en revanche, procède bien d’un autre état d’esprit. Il explique que les religions apportent un plus dans le fonctionnement de l’Etat (dialogue pour contributions spécifiques). Le traité estime même que le contact doit être régulier. Il cherche à favoriser l’entrée en puissance d’une certaine vision du monde : celle des croyants ; une vision cléricale. Un tel processus exclut de fait les agnostiques et les athées de toute reconnaissance et de toute influence équivalente à celle des religions sur la politique européenne.
N’est-ce pas source de danger ? On peut le penser fortement.
Se penser comme des égaux est un fait culturel, ce n’est pas inné, et l’Union européenne telle qu’elle se construit pousse les hommes à penser leurs différences avant leur universalisme.

Thierry Duval

3 - politique française

1 - Médecine du travail: l'autre caisse noire du Medef

Comment l'argent de la santé des salariés finance les comités locaux du patronat. Une enquête Rue89/France Inter.

C'est un autre scandale du financement occulte du patronat. Bien loin de l'énorme caisse noire de l'UIMM, un vaste système s'est déployé depuis des années, dans toute la France, pour faire vivre les comités locaux du Mouvement des Entreprises de France. Un petit secret de famille que tous les protagonistes de ce milieu connaissent bien, et qui permet de financer emplois fictifs, voyages somptueux, notes de frais et salaires de complaisance. Tout cela, grâce à la médecine du travail. Selon l'enquête conjointe de France Inter et Rue89, le patronat français puise allègrement dans les caisses d'un système censé s'occuper de la santé des salariés.

Un pactole d'un milliard d'euros

La médecine du travail a été créée de toute pièce par les patrons français en 1946. Le principe est simple: les entreprises versent une cotisation pour salarier des médecins, qui vont s'assurer de la bonne santé des travailleurs et de leur environnement.

Un véritable pactole, car la cotisation est obligatoire. En moyenne, comptez 75 euros par salarié et par an. Soit au total, d'après le Cisme (Centre interservices de santé et de médecine du travail en entreprise), une manne d'un milliard d'euros!

Aujourd'hui, 95% des 6500 médecins du travail sont employés par des associations. Celles-ci sont toutes contrôlées par des représentants du Medef ou de la CGPME. Depuis 2004, la loi impose la parité dans leur conseil d'administration: 2/3 de patrons, 1/3 de salariés. Dans les faits, seuls les employeurs ont les moyens de contrôler ces activités. Et d'en abuser.

Principaux abus: financement du siège, emplois fictifs et grosses notes de frais

En trente-huit ans de médecine du travail, le docteur Jean Noeuvéglise a pu constater de nombreuses fraudes. Comme praticien et comme syndicaliste à la Confédération générale des cadres (CGC). Des dérives fréquentes, au vu et au su de tous, sans que les mécanismes de contrôle ne soient en mesure de les prévenir ou de les empêcher. (Voir la vidéo)

D'après notre enquête, le cas le plus classique est le financement en sous-main des biens immobiliers du Medef. Avec un montage croisé: une société civile immobilière aux mains des entrepreneurs possède le siège du comité local, tandis qu'une société de moyens, abondée par la médecine du travail, finance l'acquisition de l'immeuble ou de l'appartement. Un système très en vogue dans les Hauts-de-Seine.

Mieux: à Issy-les-Moulineaux, en 2001, le SMIBSO (Service médical interentreprises de la banlieue Sud-Ouest) passe une convention avec le Medef Hauts-de-Seine Sud. Ce texte stipule que le service de médecine du travail prendra en charge "à hauteur de 75%" les frais de secrétariat, ainsi que la moitié du salaire du "secrétaire général" du Medef, la moitié des "frais de prise en charge du véhicule de tourisme" du Medef. Sans oublier les "frais de photocopies, d'affranchissement et de diverses fournitures (...) en fonction de leurs utilisations spécifiques".

Depuis 2005, cette convention a été remplacée par un forfait de 80000 euros par an pour faire tourner le comité patronal... au détriment de la médecine du travail. Sollicités, ni le président, ni le directeur du SMIBSO n'ont souhaité répondre à nos questions.

Des abus tellement manifestes que l'administration n'ose s'y attaquer

Dans le Var, l'Association interprofessionnelle de santé au travail du Var (AIST 83) est l'un des plus gros services de France: 70 médecins couvrent les besoins de 200000 salariés. Le président de l'association est un pilier de la vie économique varoise. Ancien président de la Chambre de commerce, Albert Bessudo est un promoteur immobilier prospère. Arrivé à la tête de l'AIST 83, il fait voter en comité d'entreprise la décision de s'attribuer un salaire, une pratique pour le moins extravagante, et explicitement bannie ailleurs. Le récit du docteur Patrick Fortin, délégué CGC à l'AIST.

Certains médecins du service s'insurgent et alertent les organismes de contrôle: la direction du travail et le Cisme. Tout le monde se défile... La directrice de l'AIST 83, Corinne Jénin, nous a confirmé l'existence de ce salaire, sans vouloir nous en indiquer le montant. D'après nos informations, il s'élèverait à 2000 euros.

A la Réunion, c'est encore plus simple. Après avoir licencié pour faute la très active directrice du service Intermetra, le président de l'association, Jean-Pierre Haggai, s'est arrogé les fonctions directoriales. Cette fois-ci, pas de salaire, mais des avantages en nature: un aller-retour par mois à Paris pour assister aux réunions du Cisme (là où ses prédécesseurs en faisaient deux par an) et un 4X4 d'une luxueuse marque allemande comme voiture de fonction.

A Pau, un goût immodéré pour les voyages a été épinglé par les salariés du service. En 1999, la comptable de l'association (dont le directeur, lui aussi comptable, travaillait pour un cabinet dirigé par un ancien président du Medef local) a tenté le coup: 12 chèques pour payer, à elle et à sa famille, des vacances en Turquie, en Indonésie et au Brésil. Les chèques étaient signés par le directeur de l'association. L'affaire a déclenché un tel tollé que les représentants patronaux ont dû, cette fois-ci, battre en retraite. Une (petite) victoire, mais pour combien de défaites?

"L'Etat laisse pourrir les choses"

Pour la première fois, le président des médecins du travail de la Confédération général des Cadres (CGC), syndicat le plus représentatif, s'en prend publiquement au système. Prudemment, le docteur Bernard Salengro dénonce le monopole de fait du Medef sur une institution censée protéger la santé des salariés. Il pointe aussi l'écrasante responsabilité de la Direction du travail qui "laisse pourrir les choses" et des élus qui "ne se rendent pas compte" des dégâts. (Voir la vidéo)

Yvon Gattaz (CNPF) reconnaît l'existence de "dérives" passées

Ancien président (1981-1986) du CNPF, l'ancien nom du Medef, Yvon Gattaz a été le premier à dire publiquement que la caisse noire de l'UIMM a bien financé les syndicats. Nous l'avons interrogé sur les relations incestueuses avec la médecine du travail. Face à notre insistance, l'ancien patron des patrons reconnaît l'existence de "dérives", mais il prétend qu'elles ont été "corrigées" il y a quelques années, grâce à un "coup de balai"! (Voir la vidéo)

Sollicité à plusieurs reprises, le Medef national n'a pas souhaité réagir à nos informations. Et pour cause: c'est aussi parce que le Medef national siphonne les cotisations des grandes entreprises que les comités locaux se rabattent sur la médecine du travail.

En rendant publics les comptes patronaux, Laurence Parisot n'a pas fait de commentaires sur la disparité des ressources du Medef: d'un côté 19,28 millions d'euros pour les grandes fédérations nationales, de l'autre 1,86 million d'euros pour les comités locaux. Ces derniers doivent se contenter des restes. Et des coups de pouce que leur fournit, dans l'ombre, la médecine du travail.

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David Servenay Rue89

2 - Vente des Echos : pour une alerte aux lecteurs!

Pour le deuxième jour consécutif, le quotidien économique Les Echos n'est pas en kiosque : ses salariés s'opposent frontalement au rachat de leur journal par LVMH. Ils ne doivent pas rester seuls!

Aujourd'hui encore le quotidien Les Echos ne paraît pas, ses journalistes refusant le rachat du journal par LVMH. Aujourd'hui encore l'Elysée, par la voix de George-Marc Bénamou, minore le problème de conflit d'intérêts posé par cette opération qui voit l'un des groupes français les plus puissants prendre la direction du premier quotidien économique. «C'est une formidable nouvelle pour la presse qu'un groupe ait dépensé une telle somme pour acheter un journal», a même osé George-Marc Benamou, tandis que la conseillère Christine Albanel, qui n'est plus que l'ombre de l'esprit indépendant que l'on connaissait, a déclaré que «le groupe LVMH a pleinement respecté le droit de la concurrence.»

Circulez, il n'y a rien à voir : quand l'ami du président veut son jouet, il ne reste plus qu'à s'exécuter. Pourtant, le refus des salariés et des journalistes des Echos est pleinement motivé : LVMH n'est pas un acteur vierge du monde de l'information. Le représentant du groupe Pearson peut bien, comme hier devant les salariés des Echos, prétendre que les garanties qui leur ont été octroyées par LVMH sont exceptionnelles. L'expérience pratique de la gestion de la Tribune témoigne pleinement contre le groupe de luxe.

Un autre fait, déjà souligné par Marianne2.fr, devrait constituer un signal d'alarme pour les professionnels et pour l'Etat : contrairement à ce que titrait Le Monde du 7 novembre, le prix acquitté par LVMH semble bien être de 340 et non de 240 millions d'euros. En effet, en plus des 240 millions d'euros payés cash, LVMH reprend une dette du groupe Pearson de 100 millions d'euros. Hier au siège des Echos, cette information, contestée par LVMH, nous a été confirmée. Elle pose un vrai problème : à ce prix là, l'effort consenti par LVMH est hors de toute rationalité économique. Pour amortir son investissement, il faudrait 24 ans d'activité au quotidien sur la base des 10 millions d'euros de bénéfices de 2006 (qui sera bien moindre cette année). Autant dire que le prix acquitté par Bernard Arnault montre que ses motivations ne sont pas économiques. Dès lors, le risque est grand que, comme pour la Tribune, la motivation d'Arnault soit une ambition d'influence. Si cela était le cas, le quotidien perdrait de sa crédibilité. C'est donc bien la valeur de l'entreprise de presse que ses salariés défendent en faisant grève.

Alors que faire ? Il est clair qu'une grève ne permettra pas aux journalistes des Echos d'enrayer le processus. C'est d'ailleurs le sens de la poursuite de leur mouvement mardi 6 novembre : les salariés entendaient se donner les moyens d'expliquer clairement le sens de leur combat dans le quotidien daté de jeudi 8 novembre, qu'il faudra absolument acheter. Il faut donc que l'action s'élargisse à toute la presse; que les sociétés de journalistes, qui réunissent cette semaine leur nouveau bureau, appellent à une action concertée dans tous les médias : pourquoi pas prendre de l'espace média (télé, radio, presse) pour expliquer aux téléspectateurs, aux auditeurs et aux lecteurs en quoi la liberté dinformer des journalistes est menacée ? Pourquoi ne pas prolonger la lutte des journalistes des Echos par l'exigence commune d'une reconnaissance des sociétés de journalistes ? A suivre donc.

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Philippe Cohen journaliste à Marianne

3 - De République à Jaurès

Ironie de la Préfecture de police, le parcours de la manif de Riposte à la droite organisée par le PCF, samedi 27 octobre, se déroulait de République au métro Jaurès. Pour reprendre l’offensive face à la régression sociale et démocratique orchestrée par Nicolas Sarkozy.

Après des semaines d’attaques du gouvernement contre la santé, les retraites, de chasse aux migrants et de traque ADN, je me suis rendue à la manif comme on assiste à une réunion de famille qu’on n’a pas vue depuis longtemps, mais dont on ne refuse pas l’invitation quand les choses vont mal et qu’on risque de perdre gros. A l’arrivée, face au canal devant l’écluse, la scène est montée, la sono crache, et quelques merguez fument entre les drapeaux rouges et les banderoles. Mais comme dans ces fêtes de famille où le cœur n’y est pas, on se force un peu à sourire en comptant les absents. Bien sûr, les vieux de tous les combats sont toujours là, badge collé au pardessus, écharpe rouge et casquette sur cheveux blancs. A la périphérie du métro, il traîne toujours un jeune révolutionnaire acnéïque aux tracts vengeurs pour rappeler le 90ème anniversaire de la révolution russe de 1917. On reconnaît les familiers : élus aux écharpes tricolores, syndicalistes, permanents, militants associatifs et provinciaux venus en car. Il y a aussi les badauds du quartier, les curieux et quelques travailleurs africains aux djembés politisés. Mais comme dans ces cérémonies rituelles que les plus jeunes désertent, les électeurs de gauche, les actifs, trop affairés dans leur vie pour pouvoir être là, sont peu représentés.

Chômeurs à l’Elysée

Sur scène, Eric, représentant de la marche des chômeurs, prend la parole. « Travailler plus pour gagner plus, c’est des mensonges ! Alors on est venu apporter nos CV à Sarkozy ! » A l’initiative de cinq parlementaires communistes du Nord-Pas-de-Calais, qui soutiennent une proposition de loi pour un droit opposable à l’emploi, la marche rassemblaient une centaine de chômeurs. Partis à pied de Lille mercredi, après les dernières étapes à Saint-Quentin, ville du ministre Xavier Bertrand, puis à Creil, ils sont arrivés samedi matin pour déposer 4500 CV à l’Elysée. « Moi je croyais que maintenant qu’il est divorcé, il n’avait rien de mieux à faire de ses week-ends que de nous recevoir», ironise Eric, « mais, non, Sarkozy n’a pas voulu nous rencontrer !» Il témoigne pourtant de l’accueil et du soutien rencontrés en route : de la révolte des salariés en lutte contre les licenciements boursiers, de la grogne des chômeurs radiés abusivement des Assedics sous prétexte de rendez-vous non tenus, sans lieux ni dates fixés. De la colère et du désabusement des jeunes des cités. « Tout seul, on n’est rien. Mais tous ensemble, on peut tout » conclut-il. « Alors, c’est des milliers de CV qu’il faut continuer à envoyer à Sarkozy ! ». C’est au tour de Dominique Noguère, avocate et vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme de dénoncer les tests ADN et l’ensemble de la loi Hortefeux sur l’immigration. « Nous assistons actuellement à une remise en cause gravissime des libertés fondamentales, pour l’ensemble de la population », souligne-t-elle, dénonçant en vrac, une politique sécuritaire : des test ADN applicables à n’importe quel citoyen à la loi sur la récidive, de l’institution de fichiers et de la vidéo-surveillance aux atteintes répétées au droit et à la présomption d’innocence, du climat d’intimidation à l’incitation à la délation exercée auprès des fonctionnaires et des travailleurs sociaux pour dénoncer les sans-papiers. De la foule écoeurée fusent des exclamations :« Sarko ! facho ! le peuple aura ta peau ! »

Menteurs à l’Assemblée

L’ambiance se réchauffe encore quand Christian Lehmann, initiateur de la pétition contre les franchises médicales, prend la parole. « Plus vous serez malade, plus vous paierez ! » s’insurge le médecin généraliste. « Le gouvernement fait croire que la franchise sera plafonnée à 50 euros et que les pauvres seront exonérés. En deux phrases, deux mensonges ! ». Le texte de loi votée de nuit par 44 députés UMP ne comporte en réalité aucune garantie de plafonnement. Alors que le groupe d’assurance santé privée Médéric, présidé par Guillaume Sarkozy, frère du président plaide pour une franchise de 600 euros, il y a tout lieu de s’inquiéter. Malgré la pétition qui a recueilli plus de 60 000 signatures, malgré le mouvement des 20 000 internes dans la rue, la protection sociale pour tous, mise en œuvre par le Conseil national de la Résistance, ne représente pour la droite libérale qu’une « parenthèse », comme l’exprimait récemment ouvertement Denis Kessler, N° 2 du Medef dans le magazine Challenge. Une parenthèse, que notre Président, qui s’imagine élu avec les plein-pouvoirs, et son gouvernement entendent bien refermer au plus vite. Car avec une CMU plafonnée aux revenus de 618 euros, et un seuil de pauvreté fixé à 817 euros, le coût de ces franchises supportées par la grande majorité des Français va pénaliser l’accès aux soins des plus pauvres, des plus faibles et des plus dépendants. « Ne nous y trompons pas, ce sont les cancéreux, les dialysés, les victimes de l’amiante, les adultes handicapés que le gouvernement veut responsabiliser !» s’enflamme Christian Lehmann, qui se demande au passage où est passé le plan Alzheimer, rappelant le pourcentage « ridicule» de taxation sur les stock-options qui a réduit les 3,5 milliards d’euros attendus pour financer ce plan, à 250 millions d’euros. De l’instrumentalisation des figures de gauche au cassage honteux et abject du système de protection sociale, Christian Lehmann démontre la cohérence du programme Sarkozy. « C’est le gouvernement Fillon qui orchestre la fermeture des hôpitaux, des centres de santé et des maternités de proximité. Les jeunes médecins refusent d’être les boucs émissaires d’un système sanitaire qui s’effondre. Ou bien nous résistons ensemble, ou nous risquons d’être laminés séparément les uns après les autres ». « Il est bien ce mec là ! Il est au Parti ? » se demande un militant derrière sa banderole, réchauffé par ces paroles.

Ensemble le 20 novembre

Dans l’humidité blanche et froide de cette fin d’après-midi d’automne, les gens se rapprochent les uns des autres. On mesure la casse sociale et des services publics : les 5000 suppressions de postes dans l’Education nationale, plus 11 000 en 2008, dénoncés par la FSU. La fermeture programmée de 300 gares, et des tarifs SNCF à deux vitesses. On fait le bilan du 18 octobre et on compte ses forces : 300 000 manifestants dans 70 départements, 70 % de grévistes à la SNCF et la RAPT et 80% à EDF/GDF. La CGT annonce des actions plus dures : « pour le droit de grève, contre le service minimum, et pour un service public maximum sur l’ensemble du territoire ». On bat le rappel pour la journée d’action pour l’emploi, le 20 novembre, lancée par les syndicats de la fonction publique. On se prend à espérer un front commun pour reprendre en main le pacte social et républicain. Les uns avec les autres. Nous, qui sommes riches de nos multiples solidarités et résistances.

L’envoyée Spéciale Envoyée spéciale

4 - International

1 - La gauche au pouvoir au Guatemala : un signe fort du recul de l’Amérique de Bush

Les médias nationaux n’ont pas accordé beaucoup d’importance à la victoire au Guatemala du social-démocrate Alvaro Colom dimanche dernier avec 52,8% des suffrages exprimés, devançant de cinq point son rival le général Otto Perz Molinas.. Or, pour les Latino-américains, l’événement est à proprement parler extraordinaire.

Pour nous Français, le Guatemala est un petit pays au sud du Mexique, peuplé de 8 millions d’habitants pour la plupart d’origine mayas. Il y a encore quelques mois les meilleurs experts du sous-continent auraient pronostiqué, non sans raison, l’impossibilité d’une victoire de la gauche car les Etats-Unis ne l’auraient pas permis. En effet, le Mexique et le Guatemala sont assimilés par l’hyper puissance à leur frontière sud, ne pouvant y tolérer autre chose qu’un régime à sa botte. Si les Etats-Unis sont interventionnistes sur l’ensemble de l’Amérique latine, ils étaient intraitables depuis plus d’un demi -siècle quant à ces deux pays. En 1954, la CIA et la compagnie bananière United fruit a soutenu un coup d’état qui renversa le président démocrate Jacobo Arbenz, provoquant une guerre civile atroce qui fit 200 000 morts qui et s’acheva en 1996. Encore aujourd’hui, Molina, le candidat conservateur a bénéficié de tout le soutien possible du grand voisin nord américain pour sa campagne électorale. L’argent a coulé à flot, non seulement pour la campagne officielle mais aussi pour acheter les voix. Pourtant, ni les moyens ni la démagogie n’ont réussi à enrayer le basculement à gauche. Comme en France en 2002, la droite guatémaltèque a fait campagne sur l’insécurité en proposant ni plus ni moins qu’un état de siège permanent pour contrer les Maras, ces gangs de jeunes hyper violents alors même que ces derniers se sont développés sous les gouvernements conservateurs.

La gauche latino-américaine : dix ans d’avance sur l’Europe ?

Mais la victoire du camp populaire a été possible grâce à deux éléments déterminants : d’une part, l’unité de l’ensemble de la gauche depuis les modérés jusqu’aux tendances d’extrême gauches issues des ex-guérillas et, d’autre part, une campagne très politique et claire sur les choix économiques. Colom a orienté son discours vers les 80% de pauvres en proposant une intervention de l’Etat pour assurer un minimum de santé, d’éducation et de services publics. Pour lui, la délinquance des Maras est la conséquence de cette misère et, pour l’éradiquer, il faut créer 700 000 emplois. Colom a également promis d’augmenter la pression fiscale qui est au Guatemala de 10% du PIB, l’une des plus faible du continent.
Ainsi, le parti du nouveau président, l’Unité National de l’Espérance (UNE), a misé sur l’intelligence de thèmes de campagne clairement positionnés à gauche. Et comme dans le reste de l’Amérique latine, c’est la « martingale » gagnante pour les forces progressistes qui, en moins de dix ans, ont quasiment fait disparaître les régimes ultra-libéraux qui dominaient la vie politique dans les années 90. Du rose de Luiz Lula au Brésil ,ou de Michelle Bachelet au Chili, et plus récemment de Cristina Kirchner en Argentine, au rouge vif de Juan Morales en Bolivie ou de Hugo Chavez au Venezuela, il ne fait pas bon défendre le libéralisme des néo-conservateurs au sud de Rio Grande. Pour cette région du monde, comme pour l’Asie par exemple (nous le verrons daogie capitaliste anglo-saxonne est impressionnant. Il est d’autant plus dommage que les Français vivant sous le Sarkoshow soient à contretemps d’une tendance historique de fond.

Philippe Hervé

5 - combat laïque

1 - Logiques de combat

La nouvelle ne date pas d'hier, mais elle est toujours interessante à rappeler. Le combat pour définir ce qui est immoral est toujours d'actualité. Par "moral", il faut comprendre : "normal", "bien", "honnorable", "respectable".

Celui qui détient le pouvoir de définir tout ce qui rentre dans cette catégorie possède le pouvoir sur les individus, sur leur vies et donc sur leur maniere de vivre (via entre autre, mais pas seulement, le système économique et social).
Ce combat éthique et culturel, le libéralisme anglosaxon nous donne la démonstration de son importance tous les jours. Rentre dans la normalité de ce système : l'appétit frénétique du gain, l'économie comme une activité détachée de tout impact sur la vie des gens, la peur comme une marque de maturité, le consumérisme et la définition de son identité personnelle par les biens à la mode, la consommation télévisuelle à outrance, "l'individualisme" identifié à "l'égoïsme". Autant de points d'ancrage dans notre vie de tous les jours qui permettent à la pensée libérale néoconservatrice de destruire de manière diffuse - mais certaine ! - notre mode de vie, nos facultés de résistance face à l'oppression, nos valeurs républicaines et laïques.

Ce combat de contamination éthique et culturelle, la religion en connait l'importance depuis que la prêtrise existe. L'esclave est celui qui aime ses chaînes. En grand missionaire, le pape n'a de cesse de valoriser des valeurs de vie objectivement ascétiques, contre les plaisirs de l'existence, contre la liberté d'usage de son propre corps, contre les femmes. La prise de conscience de l'importance de ce terrain éthique et culturel (qui rend possible - ou non ! - la résistance sur les terrains politique, économique et social) est l'un des grands enjeux de la construction d'une force politique et d'un projet sociétal moteur à gauche.

Pour ce qui est de la croisade du pape, peut être y aura t-il, en France, un pharmacien pour tenter cette objection de conscience, et que sa cliente aura alors le bon gout de porter plainte. On aura alors le plaisir de voir la justice rappeler, une fois de plus, qu'un commerçant (parce que le pharmacien en est un, au même titre qu'un propriétaire de gîte) n'a pas le droit de refuser les services auxquels il s'est engagé de par l'exercice son activité professionnelle, même s'il a pour cela des problèmes avec ses "sentiments personnels".

Guillaume Desguerriers

 

Benoît XVI réclame le droit à l'objection de conscience pour les pharmaciens

Le pape Benoît XVI a estimé lundi que les pharmaciens devaient avoir le droit à "l'objection de conscience" pour pouvoir refuser de délivrer des médicaments favorisant l'avortement et l'euthanasie.

L'objection de conscience "est un droit qui doit être reconnu à votre profession, vous permettant de ne pas collaborer, directement ou indirectement, à la fourniture de produits ayant pour but des choix clairement immoraux, comme par exemple l'avortement et l'euthanasie", a déclaré le pape en recevant les délégués au 25e congrès des pharmaciens catholiques.

"Il n'est pas possible d'anesthésier les consciences" et "le pharmacien doit inviter chacun à un sursaut d'humanité pour que tout être soit protégé depuis sa conception jusqu'à sa mort naturelle", a affirmé Benoît XVI, selon le texte de son discours en français publié par le Vatican.

"L'être humain, parce qu'il est image de Dieu, doit toujours être au centre des recherches et des choix en matière biomédicale", a estimé Benoît XVI.

Le pape a en outre exhorté les pharmaciens à "avoir un souci de solidarité (...) pour permettre un accès aux soins et aux médicaments de première nécessité de toutes les couches de la population (...) notamment pour les personnes les plus pauvres".

"Il vous revient aussi d'aider les jeunes qui rentrent dans les différentes professions pharmaceutiques à réfléchir sur les implications éthiques toujours plus délicates de leurs activités et de leurs décisions", a-t-il ajouté.

29 octobre 2007 http://www.lemonde.fr/web/depeches/0,14-0,39-33010534@7-50,0.html

Guillaume Desguerriers

2 - Clause de conscience contre les droits des femmes

Recevant à Rome le 29 octobre dernier les participants du 25ème Congrès international des pharmaciens catholiques, le pape Benoît XVI les a invité à défendre leur droit à l'objection de conscience pour "ne pas collaborer directement ou indirectement, à la fourniture de produits ayant pour but des choix clairement immoraux, comme par exemple l'avortement et l'euthanasie". La dépêche, largement reprise par la presse, a fait le tour des rédactions sans susciter de commentaires sur ce qui est en jeu dans cette affaire. Un rapide tour d’horizon sur les sites internet des associations et journaux catholiques témoigne pourtant d’une nouvelle offensive des mouvements catholiques intégristes et d’extrême-droite contre la maîtrise de leur fécondité par les femmes et les couples, acquise grâce aux luttes féministes depuis les années 70 jusqu’à aujourd’hui.

La clause de conscience a été introduite en médecine en 1975 par la loi sur l’IVG (dite loi Simone Veil). Elle permet à un médecin ou un auxiliaire médical de refuser de pratiquer ou de concourir à l’IVG, à l’IMG ( interruption médicale de grossesse) pour des raisons professionnelles ou personnelles. Dans la bataille gagnée de haute lutte par les « 343 salopes » et des milliers de femmes pour ne pas subir de grossesses non désirées, jouir sans entrave, et maîtriser leur destin, la clause de conscience témoigne de l’hostilité et du frein du pouvoir médical et légal de l’époque face aux désirs d’émancipation et d’évolution des rapports hommes-femmes dans la famille et la société. En dépit de la loi et de l’évolution des mentalités, cette clause de conscience a longtemps permis aux chefs de services obstétriques et gynécologiques hostile à l’IVG, d’exercer une influence sur les équipes, avec pour conséquence, dans le service public, de limiter l’accès au droit à l’IVG pour toutes les femmes, en premier lieux, aux plus démunies. En raison de cette clause de conscience, et faute d’un manque réel de moyens et de formation consacrés à cette activité, ce n’est pas un hasard si un nombre considérable de Françaises se voient aujourd’hui encore, contraintes d’avorter en Espagne ou en Hollande.

25 ans après la loi sur l’IVG, et après des années de revendications féministes, la loi du 4 juillet 2001 a élargi le droit à la contraception et l’avortement : allongement du délai légal de recours à l'IVG de 10 à 12 semaines, introduction de l’IVG médicamenteuse en ville (RU486), aménagement de l'autorisation parentale pour les mineures. En outre, la loi de 2004 a consacré l’obligation pour les chefs de services de gynécologie-obstétrique d’appliquer la loi et d’organiser la pratique des IVG. Ainsi, si à titre individuel, un médecin conserve le droit de ne pas pratiquer d’IVG, un chef de service ne peut plus désormais refuser, pour des raisons de conscience, d’organiser la pratique d’IVG dans un établissement de santé public. En matière de contraception, la loi autorise la vente libre de la contraception d’urgence (pilule du lendemain), ainsi que sa délivrance aux mineures par les infirmières scolaires.

Nouvel avatar de l’opposition au droit à l’avortement

Au regard de ces évolutions, ce n’est pas un hasard si aujourd’hui l’offensive catholique porte sur la profession des pharmaciens pour tenter d’entraver la liberté des femmes et des couples, en revendiquant un élargissement du droit à l’objection de conscience. L’objectif était déjà clairement identifié dans l’encyclique du pape Jean Paul II, Evangelium Vitae , en août 1993. La clause de conscience est « un droit essentiel qui, en tant que tel, devrait être prévu et protégé par la loi civile elle-même. Dans ce sens, la possibilité de se refuser à participer à la phase consultative, préparatoire ou d’exécution de tels actes contre la vie devrait être assurée aux médecins, au personnel paramédical et aux responsables des institutions hospitalières, des cliniques et des centres de santé. Ceux qui recourent à l’objection de conscience doivent être exempts non seulement de sanctions pénales, mais encore de quelque dommage que ce soit sur le plan légal, disciplinaire, économique ou professionnel ». La revendication actuelle de l’extension du droit de conscience aux pharmaciens s’incrit dans cette ligne. Actuellement, ceux-ci ne peuvent invoquer la clause de conscience pour se soustraire à leurs obligations. Plusieurs décisions de justice se sont fondées sur le refus de vente pour sanctionner une pratique ostentatoire de conviction religieuse de la part de pharmaciens. « En l’état actuel du droit positif, le pharmacien peut échapper aux sanctions du refus de vente en s’abstenant de détenir des produits contraceptifs ou abortifs dans son officine » peut-on lire sur certains sites catholiques, sous forme de conseil à peine voilé pour contourner la loi, en exerçant une pression sur les femmes.

Face à ces refus déguisés, si dans les grandes villes, il est facile de boycotter une pharmacie et de s’adresser à une autre, que se passera-t-il dans les petites villes de province, où les distances sont plus importantes, pour les femmes et les jeunes filles confrontées au refus d’un pharmacien de leur délivrer la pilule du lendemain ?

Ne nous y trompons pas. La campagne idéologique et médiatique orchestrée par l’église qui dispose de relais politiques et de moyens considérables pour revendiquer l’extension du droit de conscience, est lourd de menaces pour les droits des femmes et la laïcité. Face à cela, réagissons : vérifions auprès de nos pharmacies si la pilule du lendemain est disponible. Répertorions les officines qui ne l’ont pas. Boycottons–les. Signalons les refus et faisons circuler l’information, pour nous donner les moyens d’agir.

Agnès Boussuge Auteurs de “ j’appelle pas ça de l’amour, la violence dans les relations amoureuses”, Syros, Mai 2007

3 - Belgique: Manifeste pour la promotion d'un Etat laïque

Port du voile islamique à l’école ;
Introduction du créationnisme en milieu scolaire ;
Mises en cause de la mixité ;
Refus par des hommes de voir leur femme soignée par un médecin masculin ;
Mariages forcés et crimes d’honneur ;
Etc.

Comme la France, la Belgique doit faire face, ces dernières années, à la montée des intégrismes et communautarismes, lesquels se traduisent par des revendications qui, sous couvert de respect des particularismes religieux, menacent l’espace public, semblant même parfois lui dénier toute légitimité : comme si l’individu, lui-même subsumé dans une communauté religieuse, était roi. Comme si nul n’avait le droit de restreindre la sacro-sainte liberté religieuse, fût-ce dans des espaces qui sont l’émanation de l’Etat et qui, comme tels, devraient être neutres : administrations publiques, écoles, hôpitaux. Comme si des valeurs aussi essentielles que l’égalité ou la mixité étaient renégociables. À la différence de la France cependant, la Belgique ne peut s’arc-bouter sur le concept-clé de laïcité pour répondre à ces revendications. La Belgique, en effet, n’est pas un Etat laïque. Tout au plus y parle-t-on de neutralité. Une neutralité qui se comprend trop souvent comme une neutralité d’abstention, dénuée du moindre contenu positif. Comment, dès lors, articuler la liberté religieuse et le souci du vivre ensemble ? Comment faire en sorte que la première, en s’imposant à tous les niveaux de la vie en société, ne compromette lentement mais sûrement le second ?

Il y a quelques mois, à l’initiative de Chemsi Cheref-Khan, Pierre Efratas et Nadia Geerts, une trentaine de citoyens ont lancé une pétition contre l’immixtion du religieux à l’école. Cette pétition fut signée par 3700 personnes. Ce n’était cependant qu’un début, tant il était évident que les problèmes ne se limitaient pas à la sphère scolaire. Le 6 novembre dernier, ces trente citoyens ont donc présenté à la presse leur nouvelle initiative, bien plus ambitieuse, puisqu’il s’agit ni plus ni moins que de réclamer l’inscription du concept de laïcité politique dans la Constitution belge et dans les dispositifs légaux des entités fédérées.

Le manifeste, que vous trouverez ci-dessous, vise à fédérer toutes les forces laïques en Belgique. Parce que la laïcité est le garant du vivre ensemble.

Nadia Geerts

 

MANIFESTE POUR LA PROMOTION D’UN ETAT LAIQUE

Nous,
Citoyennes et citoyens, groupements et associations,
croyants ou non,
attachés aux valeurs humanistes et démocratiques,
soucieux d’égalité et de mixité sociale et culturelle,
considérons que :

En conséquence de quoi nous appelons à l’inscription du principe de laïcité politique dans la Constitution belge et dans les dispositifs légaux des entités fédérées.

Afin de réaliser ces objectifs qui nous paraissent essentiels pour le vivre-ensemble au XXIe siècle, nous rassemblons et coordonnons nos actions au sein du

Réseau d'Actions Pour la Promotion d’un Etat Laïque (R.A.P.P.E.L.)

Si vous partagez nos principes et nos objectifs, merci de bien vouloir signer et faire signer ce manifeste citoyen/nes, groupements et associations.

Comment ? Envoyez-nous un mail comportant vos nom, prénom et adresse complète à l'adresse reseaulaicite@yahoo.fr .

Philipp Bekaert, Yvan Biefnot, Chemsi Cheref-Khan, Yeter Celili, Dominique Celis, Elie Cogan, Paul Danblon, Philippe de Menten, Gisèle De Meur, Bahareh Dibadj, Pierre Efratas, Farouk el Boustami , Catherine François, Tamara Galperin, Nadia Geerts, Guy Haarscher, Lara Herbinia, Martine Hissel, Claude Javeau, Jacques Lemaire, Abdellatif Mghari, André Nayer, Michèle Peyrat, Anne-Marie Roviello, Philippe Schwarzenberger, Fatoumata Sidibe, Jamila Si M’hammed, Sam Touzani, Pierre Van den Dungen, Georges Verzin, Mohammad Zahedi...

Nadia Geertz

4 - AFFAIRE « CAMINO 999 »: Procès en diffamation de l’Opus Dei conte le roman Camino 999

EDITIONS APRES LA LUNEs

COMMUNIQUE DE PRESSE des éditions Après la Lune

AFFAIRE « CAMINO 999 »: Procès en diffamation de l’Opus Dei contre Jean-Jacques Reboux, directeur des éditions Après la Lune et Catherine Fradier, auteure du roman Camino 999

Audience publique : mercredi 7 novembre 2007 à 14 h 15
17e chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris

RAPPEL DES FAITS

Mars 2007. Parution en librairie de Camino 999 de Catherine Fradier. C'est une fiction. 31 mai. L'Opus Dei, représentée par son avocat Alexandre Varaut, intente un procès en diffamation à l'éditeur du livre, Jean-Jacques Reboux, en qualité d'auteur principal, et son auteure, Catherine Fradier, en qualité de complice, et réclame 30.000 € de dommages et intérêts, 5.000 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, ainsi que la publication à leurs frais d'un communiqué dans un journal choisi par le plaignant, dans la limite de 15.000 €.

LES PROTAGONISTES

Créée en 1928 en Espagne à l'initiative de José Maria Escriva de Balaguer, prêtre canonisé en 2002 par Jean-Paul II, l'Opus Dei, prélature de l'Eglise catholique, est une organisation présente dans le monde entier.
Maison d'édition fondée en mars 2006, Après la Lune est une SARL au capital de 26.000 €. A noter que lors de la sortie du best-seller planétaire Da Vinci Code, l’Opus Dei, irritée par le livre de Dan Brown, semble-t-il, n’avait néanmoins pas intenté de procédure, se contentant de le vouer aux gémonies sur son site Internet.

QUE NOUS REPROCHE-T-ON ?

On nous reproche de faire référence dans le titre, Camino 999, à l'oeuvre de Escriva de Balaguer El Camino (Le Chemin), composée de 999 maximes spirituelles.
On nous reproche de porter atteinte à l'honneur et à la considération de la Prélature de l'Opus Dei en reprenant une expression pourtant utilisée dans les médias pour qualifier l’Opus Dei, de même que certains faits de l’affaire Matesa, qui défraya la chronique espagnole dans les années 70.
On nous reproche de « mêler la fiction et la réalité sans avertir le lecteur sur la distance qu'il conviendrait de prendre quant aux faits énoncés et sans jamais l'inviter à faire la différence entre fiction et réalité. » Sur le site officiel de la Prélature, son porte-parole va même jusqu’à inventer le barbarisme de “fiction journalistique”.
Enfin, dans un second temps, on nous reproche d’avoir donné de la publicité à cette affaire en publiant le texte de l’assignation sur le site des éditions, et en faisant certaines déclarations à la presse, notamment au journal Le Monde, alors que dans le même temps l’Opus Dei a envoyé un communiqué à l’AFP, relayé par certains médias étrangers, notamment de nombreux sites Internet espagnols, brésiliens, roumains, italiens.

MORCEAUX CHOISIS

L’extrait suivant de l’assignation de l’Opus Dei est éloquent.
« Nous ne demandons en aucune manière que le livre soit interdit ou censuré, mais seulement que les passages diffamatoires soient jugés tels par l’autorité compétente. Les lecteurs de Catherine Fradier y gagneront, car ils pourront bénéficier à la fois d’une oeuvre littéraire et d’une information authentique sanctionnée par l’autorité judiciaire. »
L’ennui, c’est qu’à aucun moment l’Opus Dei ne cite ces fameux passages prétendument diffamatoires. Ce qui n’a finalement que peu d’importance, puisque, comme il est indiqué dans leurs “conclusions” : « Il est manifeste que M. Reboux et Mme Fradier savent bien pour leur part ce qui leur est reproché par l’Opus Dei. » (!)
Fort de cette bonne logique, la Prélature va jusqu’à demander à la justice de poursuivre « l’ouvrage qui doit être considéré comme entièrement diffamatoire en ce compris la première et la 4e de couverture » – c’est-à-dire la totalité des 396 pages ! Relevant le reproche fait par notre avocat de ne pas citer les passages incriminés, Me Varaut balaie l’argument d’un revers de robe magistral : « La seule autre solution eut été de proposer une citation de plusieurs centaines de pages en reproduisant la totalité de l’ouvrage… » alors que la première référence à l’Opus Dei dans Camino 999 n’apparaît que dans la seconde moitié du roman ! Notre avocat, Me Emmanuel Pierrat, a donc soulevé la nullité de l’assignation, au motif que la non-citation des passages incriminés ne nous permet pas de nous défendre équitablement. Les magistrats de la 17e chambre du TGI auront à trancher cette question.

LES CONSEQUENCES D’UNE EVENTUELLE CONDAMNATION

Avec ce type d'assignation, c'est la liberté d'expression et de création littéraire qui est mise en danger. Le but de l’Opus Dei semble être d’empêcher l’expression sur leurs activités, en s’attaquant à un petit éditeur, ceci alors que de nombreux livres – des essais pour la plupart – ont, ces trente dernières années, critiqué l’Opus Dei, de façon souvent virulente, sans que leurs auteurs aient été pour autant traînés en justice, à notre connaissance.
Moins médiatique que le procès des caricatures contre Charlie-Hebdo, ce procès s’inscrit dans le champ du nouvel ordre moral qui sévit depuis quelque temps, en France et ailleurs.
En second lieu, c'est l'existence même d'une maison d'édition qui est menacée. Face à une organisation argentée, une petite maison lutte pour sa survie. Si nous perdions ce procès, il est évident qu’Après la Lune, actuellement dans une situation économique délicate, n’aurait d’autre choix que de mettre la clef sous la porte.

 

CAMINO 999, c’est aussi un roman…
… qui fait partie des 3 romans finalistes du prix Polar SNCF, décerné en janvier 2008. Rappelons que le précédent roman de Catherine Fradier, La colère des enfants déchus, paru chez le même éditeur, a obtenu le Grand prix de littérature policière 2006.

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Jean-Jacques Reboux Après la Lune

5 - Les Pays-Bas laissent partir Hirsi Ali mais accueillent Ramadan

Après la Suisse, les États-Unis (où il a été finalement interdit de permis de travail) et l'Angleterre, Tariq Ramadan se voit offrir une nouvelle fois une chaire d'enseignement dans une université : The University of Leiden aux Pays-Bas. Où il occupera la chaire sur l"Islam" financée par le Sultan d'Oman.

Suivant l'exemple de son grand-père et modèle, Hassan al-Banna, Tariq Ramadan ne refuse jamais un poste d'où il pourra "évangéliser" et diffuser sa vision politique de l'islam héritée des Frères musulmans. La méthode n'est pas nouvelle. Dans les années 80, l'Arabie Saoudite a soutenu la diffusion de l'islam fondamentaliste en Europe en sponsorisant l'ouverture de Centres islamiques sous la houlette de Saïd Ramadan, le père et l'autre modèle de Tariq Ramadan...

Le VVD, parti de centre droit où a été élue Ayaan Hirsi Ali, a protesté. Mais l'université regarde ailleurs. En 2007, Tariq Ramadan a d'ailleurs été accueilli comme professeur "visiteur" à l'Université Erasmus de Rotterdam, pour donner conférence sur "Citoyenneté et Identité". Quitte à servir de relais à une propagande dont ces lieux universitaires préfèrent visiblement ignorer la portée.

C'est une nouvelle très rude pour ceux qui connaissent l'impact de Tariq Ramadan chaque fois qu'il prend un poste dans un pays. Et plus encore pour ce pays déjà déchiré par l'affaire Van Gogh. A la croisée des chemins pour adapter son multiculturalisme à l'exigence de vivre ensemble, Les Pays-Bas vont bientôt voir de plus en plus leur débat public parasité par un discours poliment fondamentaliste mais fermement méprisant envers les musulmans laïques. Qui n'avaient pas besoin de cela.

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Caroline Fourest

6 - Scandale : quand le Pape béatifie des tortionnaires

Assassiné durant la guerre civile, le père Gabino Olaso Zabala faisait partie de l’ordre des Augustins. Pourtant, il a lui-même martyrisé un autre prêtre. Sa victime : Mariano Dacanay, un prêtre philippin accusé de sympathiser avec un mouvement qui demandait le départ des Espagnols de leur ancienne colonie.

Le traité de Paris du 10 décembre 1898, mettant fin à la guerre hispano-américaine, prévoyait que l’Espagne cède ses dernières colonies, dont le Philippines où les combats pour l’indépendance se poursuivront jusqu’en 1902.

Dans la biographie d’Olaso Zabala, le récent béatifié, rien n’évoque cet aspect peu glorieux de son parcours. Il est simplement annoncé : “Il a été ordonné prêtre en 1893. L’année suivante, il a été envoyé aux Philippines comme missionnaire et professeur du séminaire Conciliar de Vigam. Il est retourné en Espagne en 1900.

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Les 498 martyrs de la guerre d’Espagne place Saint Pierre
crédit : Golias

DES CADAVRES DANS LE PLACARD DES BEATIFICATIONS.

Mariano Dacanay, qui a eu la chance de survivre à son supplice, a laissé dans ses écrits un témoignage de ce qu’il a enduré : “La victime est obligée de se tenir accroupie. On lui attache les mains à une canne de bambou placée sous ses genoux. Dans cette position, elle est comme un ballon qui roule sur le sol au moindre mouvement. Dans cette position humiliante et douloureuse, des gardes me frappaient et m’insultaient chaque fois que je ne disais pas ce qu’ils voulaient entendre, me laissant le corps enflammé et terriblement meurtri. Au lieu d’être solidaires de ma souffrance, le prieur et sept responsables du séminaire observaient mon martyre avec des signes visibles de plaisir. Parmi ceux qui demandaient aux gardes de me traiter avec plus de cruauté, il y avait le père Gabino Olaso. Quand je tombais à cause des coups et roulais sur le sol, je recevais des coups des pieds comme si j’étais une balle, et on me frappait la tête contre un poteau. Une fois, alors que je roulais près du père Gabino, en train de contempler tranquillement la scène, ce dernier me donna un terrible coup sur la tête qui me laissa anéanti.

Il y a dans ces faits comme un air d’Inquisition... Le cas de Mariano Dacanay n’est sûrement pas unique, et sans doute pas mal d’autres y ont-ils laissé leur vie. Comme les prêtres et religieux basques exécutés par les franquistes, Dacanay fait partie des laissés pour compte de l’histoire.

Le national-catholicisme cher à Franco et à la hiérarchie catholique espagnole ne donne pas dans le détail.

BEATIFICATIONS : FOI OU NOSTALGIE D’ UN ORDRE ANCIEN ?

Avocat et membre du Forum pour la mémoire de Tolède, Emilio Sales Almazan s’exprimait en octobre dans le mensuel espagnol Rebelion . Texte dont nous reproduisons de larges extraits, qui développe une réflexion à partir de l’exécution d’un prêtre engagé dans une action à caractère politique en faveur des milieux fortunés et conservateurs.

En guise de préambule, Emilio Sales Almazan entend répondre aux interventions de Lopez Teulon dans la revue du parti d’extrême-droite Fuerza Nueva . Résidant à Talavera, en Castille, confesseur des sœurs du collège religieux de Santo Domingo, ledit Lopez Teulon est par ailleurs l’un de promoteurs des 497 béatifications célébrées à Rome le 28 octobre. “Un événement qui devrait être inscrit au Mondial des records Guinness”, note Emilio Sales Almazan. “D’entrée il y a un sérieux doute que les supposés martyrs soient morts pour la cause de leur foi, et j’ai ici l’un d’eux auquel on va rendre hommage dans cette localité” ( Talavera ).

Il s’agit de Don Saturnino Ortega, qui fut curé de Santa Maria la Mayor et archiprêtre de Talavera .

” Une mort qui n’est sans doute pas étrangère à ses activités politiques, si l’on se réfère à l’ouvrage de José Perez Conde, Juan Carlos Jimenez Rodriguez et Benito Diaz Diaz intitulé : la Guerre civile à Talavera de la Reina, conflit armé, répression et vie quotidienne, couronné par le prix Jimenez de Gregorio 2006. “Dans ses pages 196 et 197, l’ouvrage établit le profil de Don Saturnino Ortega. Celui-ci était un clair représentant de l’Eglise la plus conservatrice, ferme soutien des secteurs économiques les plus puissants de la ville. Face aux revendications des associations ouvrières qui essayaient d’améliorer de lamentables conditions de travail et de vie, Saturnino Ortega plaidait pour la résignation chrétienne, l’acceptation des injustices et la pratique de la charité. Avec l’intention d’affaiblir les syndicats et les partis ouvriers, il fonde un syndicat dit Syndicato de la aguja, établi dans le collège des religieuses de la Ensenanza.

Loin de formuler une quelconque revendication pour de meilleures conditions de travail, ce que cherchait ce prétendu syndicat était d’endoctriner les jeunes et leur faire la morale, en les éloignant des associations domiciliées dans la Casa del Pueblo (maison du peuple). Il voulut aussi créer un syndicat pour les ouvriers, mais sur ce point il connut un échec retentissant. Son attitude entraîna des affrontements continus avec le monde ouvrier et réformiste, étant donné la défense outrancière que le curé faisait des milieux les plus fortunés et conservateurs.”

LES OUBLIES DE L’ EGLISE.

Don Saturnino Ortega sera exécuté par un groupe de républicains, après avoir été emprisonné et molesté. “Dites-moi, poursuit Almazan, si sa tâche n’excédait pas ses responsabilités spirituelles, et s’il ne se posait pas en soutien des puissants comme c’est habituel dans la hiérarchie catholique. (...) Son idéologie politique ne justifie pas sa mort. Pas plus que cette mort justifie qu’on le considère comme un martyr. Il n’a pas été tué pour avoir récité le rosaire ou avoir donné une aumône aux pauvres.”

“Son assassinat, si déplorable soit-il, ne justifie pas le coup d’Etat de Franco, les fusillés de Badajoz , ni les exécutions qui eurent lieu à Talavera lorsque le troupes de Yagüe entrèrent dans la ville. (général Juan Yagüe Blanco, un des acteurs du complot militaire avec Franco, après la victoire du Frente Popular aux élections du 16 février 1936). Sa mort ne justifie pas davantage l’attitude de l’Eglise qui s’est ralliée à la junte militaire, laquelle assassinait en masse les paysans, les syndicalistes, les républicains, les gens de gauche, dont le seul délit était de défendre leurs idéaux... Ce qui en soi est parfaitement anti-chrétien.”

“Retour sur les béatifications, qui coïncident avec l’élaboration de la loi sur la mémoire historique. “On pourrait le considérer comme un hasard ou un manière de vouloir occulter les milliers de tombes anonymes dans les fossés, l’emprisonnement d’hommes en lutte pour la légalité, et une répression qu’on peut considérer comme la plus grande tuerie d’Espagnols de toute l’histoire du pays. (...) L’assassinat de Don Saturnino ne fut pas un acte planifié, consenti, par le gouvernement de la République, mais une réponse incontrôlée, la haine semée durant des décennies, lorsque la misère absolue est face à un pouvoir exercé au nom du Christ. (...)”

“A la différence de la République, les putschistes planifièrent l’assassinat au plus haut niveau de tout élément d’opposition, fusillant sans justice, ni pitié, plus de sept cents personnes rien que dans les prisons de Talavera . Victimes toujours oubliées de l’Eglise catholique, si ce n’est un Don Saturnino Ortega qui prêchait la soumission et l’acceptation de la pauvreté, fruit de la volonté divine à laquelle l’homme doit se plier (...) Bien que l’Eglise prédise une meilleure vie après la mort, elle veille à ce qu’il ne manque rien à ses alliés de classe.”

Emilio Sales Almazan s’attarde ensuite sur les incendies et destructions d’œuvres d’art, toiles et statuaire dans les églises, évoquées par Lopez Teulon dans la revue du parti Fuerza Nueva. “On parle du remplacement de ces biens, mais pas du travail de restauration assuré par des prisonniers. Travail assimilé, d’après les investigations faites par la suite, à l’esclavagisme. On peut citer la cathédrale de Vich , l’église del Carmen de Valladolid, le couvent des Adoratrices , le séminaire de Vich , celui de Ervedelas ... L’Eglise allemande a indemnisé, pour des motifs similaires, les esclaves du nazisme qui travaillèrent pour elle.”

“De tout cela, il y a une analyse que la Curie n’a pas faite” :

“pourquoi, dans un moment déterminé, des groupes ou des personnes focalisèrent-ils leur colère contre les prêtres et leurs églises ?”

“Comment fut-il possible, que profitant du secret de la confession, des prêtres aient pu réunir des informations de leurs paroissiens et... les transmettre aux chefs factieux ?”

“ Il est curieux de constater que les prêtres qui moururent de la main des phalangistes et des groupes franquistes ne soient pas dans la liste des béatifiés. Comme ces curés basques qui se positionnèrent contre Franco ”.

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Eva Lacoste www.golias.fr

Agenda

samedi 19 janvier 2008, 08:00

1ère CONFERENCE DU SUD DE LA FRANCE SUR L'HOMOPARENTALITE

CENTRE RABELAIS
Boulevard Sarrail (Esplanade)
MONTPELLIER

APGL organisée par l'Antenne Languedoc-Roussillon de l'Association des Parents Gays et Lesbiens (APGL)

Le programme de cette conférence se veut d'aborder toutes les situations rencontrées par les homosexuels pour fonder une famille et vivre leur parentalité. Des thèmes encore peu accessibles comme le désir d'enfant chez les transexuels et la gestion pour autrui (GPA, mères porteuses) seront aussi abordés.

Toutes les infos (inscriptions, programmes, etc) à cette adresse: http://conf.homoparentalite.free.fr/

Voir l'agenda complet en ligne

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