Chronique d'Evariste
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De pire en pire

par Évariste
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Commençons par une bonne nouvelle : le mariage pour tous est passé ! Mais nous avons vu ce dont était capable la réaction : la connivence droite-extrême droite, la complaisance avec la violence des milices d’extrême droite, notamment religieuses. Ne nous y trompons pas : l’opposition au mariage pour tous est une première étape du rassemblement réactionnaire dans un pays où la gauche est minoritaire. Nous rappelons notre analyse du premier tour de la présidentielle de 2012 qui montre la gauche largement minoritaire et comment la victoire de François Hollande n’a été possible que parce la gauche s’est rassemblée et que les droites sont restés divisées.
Malheureusement, François Hollande n’a pas eu la stratégie voulue pour maintenir et développer le rassemblement de la gauche qui s’était réalisé au deuxième tour de la présidentielle. Pire, il a décidé un virage à droite en appliquant la politique du Medef, qui n’en demandait pas tant. Appliquant à la lettre la stratégie du club Terra Nova d’abandon des couches populaires ouvriers et employés (53 % de la population), il parie sur le fait que ces couches continueront à s’abstenir massivement (l’abstention est le premier choix de ces couches sociales loin devant les choix - dans l’ordre -FN, PS, UMP et Front de gauche en 5e position). Il parie sur la sur-mobilisation des couches moyennes intermédiaires (24 % de la population) et des cadres salariés (15 %). Mais cette stratégie présidentielle produit la désespérance et favorise la droite et l’extrême droite comme l’a montré l’élection partielle de l’Oise en mars 20131.
François Hollande décide même de malmener la gauche de gauche. Il a donné 5 mois à la réaction pour mobiliser contre le mariage pour tous mais seulement trois semaines à la gauche de gauche pour déployer sa mobilisation tant sur le traité budgétaire que sur la « loi Medef » sur la sécurisation des licenciements. Celle-ci est donc obligé de se rebiffer. L’aile gauche du PS renâcle et Gérard Filoche, qui s’est bien battu contre la loi Medef sur la sécurisation des licenciements, a même été demandé comme conférencier par des assemblées citoyennes du Front de gauche ! Le Front de gauche décide de manifester le 5 mai pour la VIe République pour exprimer son ras le bol de la stratégie de François Hollande. Il sera rejoint par une minorité de militants d’EELV-les Verts.

Car sur le plan économique et social, c’est de pire en pire. Le numéro de 117 de Respublica a montré l’attaque en règle de la protection sociale par l’ordolibéralisme au pouvoir.
L’oligarchie capitaliste a d’abord tenté de régler la crise du capitalisme (baisse du taux de profit dans l’économie réelle) par le développement de la spéculation internationale. Puis, elle a réussi à enrayer l’écroulement bancaire et financier privé en faisant appel à l’argent public contrôlé par les amis des oligarques à la tête des États. La dette publique, déjà mise à mal par les cadeaux fiscaux aux rentiers et aux revenus des couches aisées et riches, s’est alourdie en venant sauver les institutions bancaires et financières internationales. Alors, pour financer la dette publique, les oligarques ont décidé que ce sont les salariés des couches populaires et des couches moyennes intermédiaires qui paieront la note via les politiques d’austérité. Ces politiques d’austérité basées sur la baisse des dépenses publiques ont comme conséquence de diminuer les recettes fiscales des États d’un montant supérieur à la baisse des dépenses publiques. L’effet multiplicateur joue à fond et oblige les oligarques à redoubler d’intégrisme dogmatique en demandant un nouveau tour de vis austéritaire.

Cette évolution touche la majorité des pays de la zone euro puisque nous savons aujourd’hui qu’entre mars 2011et septembre 2012, la dette de la zone euro a augmenté de 86 à 90 % et que les capacités de production baissent dans la plupart des pays européens.
Il est à noter que nous voyons de plus en plus l’intégrisme ordolibéral européen (version extrémisée du néolibéralisme mondial) verser dans la spirale austéritaire alors que les politiques des Etats-Unis, du Japon et des BRICS (pays émergents) sont moins extrémistes.
Il n’en faut pas moins aux économistes dits atterrés néo-keynésiens pour en appeler à une relance globale salariale et budgétaire.2 Comme s’il suffisait de le dire pour le faire ! Pour que cela marche (car une relance simple favoriserait principalement les pays industriels excédentaires), il faudrait allier la relance à une énorme augmentation de la demande des pays excédentaires (tels l’Allemagne), avec un néo-protectionnisme, etc.
Comme si l’Allemagne allait accepter de payer et comme si l’oligarchie allait faire ce cadeau au peuple. Alors pour l’instant, l’austérité ne permet pas de résoudre la crise, soit, mais continue à financer l’oligarchie. C’est tout ce qu’elle demande !
Nos néo-keynésiens oublient le moteur de l’histoire : la lutte des classes. L’oligarchie ne se laissera pas déloger par une stratégie « bisounours », elle n’écoutera pas plus les donneurs de conseils qui n’ont ni le pouvoir ni l’influence.

D’autres plus hardis nous décrivent le bout du chemin auquel ils nous convient mais sans nous dire quel chemin on doit emprunter pour arriver à cet éden ! Désobéissance européenne, réquisition de la banque de France, cotisation économique, soit, mais avec quelle majorité ? Quel soutien populaire ? Avec quelle bataille pour l’hégémonie culturelle ? Et avec quelle pratique sociale pour obtenir ce Graal ? Comment obtenir le soutien des couches populaires ouvriers et employés pour faire alliance avec les couches moyennes intermédiaires ?
Pour nous, le chemin est aussi important que le bout du chemin. Notre chemin, ce sont les luttes sociales des salariés et l’éducation populaire que nous sommes capables de produire dans ce cadre. Le reste, c’est pour la société du spectacle !
N’hésitez pas à demander les conférenciers de Respublica  et du Réseau Education Populaire pour en débattre !

  1. Nous l’avons écrit précédemment : Alors que la candidate socialiste a presque fait jeu égal en juin 2012 en perdant que de 63 voix au deuxième tour, elle a subi le syndrome jospinien de 2002 : elle est éliminée dès le premier tour au profit du Front national. Mais cette fois-ci ce dernier fait presque jeu égal avec la droite au deuxième tour malgré le soutien du PS au candidat UMP. Le candidat du Front de Gauche perd des voix tout en augmentant légèrement en pourcentage (+1,4 % pour finir à 6,4 %). []
  2. Comme l’a analysé Michel Zerbato, le keynésianisme, qui tint le haut du pavé pendant les 30 glorieuses puis fut tant décrié, retrouve du lustre parce que ses mécanismes globaux de base, bien que schématiques, restent fonctionnels : l’austérité pèse sur une demande déjà atone et conduit inéluctablement à la récession puis à la déflation, au chômage et à la misère ; sa généralisation enclenche alors une spirale déflationniste (baisse des prix et hausse du chômage) car l’austérité des uns ferme les débouchés des autres. []
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Quartiers Nord de Marseille : un témoignage et un appel aux autorités publiques

par Yamina BENCHENNI
yaminaben@numericable.fr

 

NDLR - Depuis plusieurs décennies, les quartiers populaires des banlieues permettent à beaucoup de “gloser”. Seuls les groupes mafieux et intégristes s’installent durablement dans ceux-ci. Les pouvoirs publics avalisent le retrait des services publics, de l’école laïque et républicaine, des systèmes de santé et de protection sociale, le retrait des politiques de développement économique et social, le retrait des politiques sociales de logement, le retrait des politiques culturelles et d’éducation populaire pour instrumentaliser ses quartiers par des discours sécuritaires et ou communautaristes.
Donnons la parole à ceux qui veulent le changement ici et maintenant.

Aperçu : Construire avec la participation directe des habitants des quartiers populaires une stratégie globale d’intervention de prévention et de sécurité contribuant à mettre en place des moyens pour lutter contre l’occupation des lieux par des jeunes identifiés par la police : cages d’escalier, entrée principale des cités, installation « conviviale » sur les parking des cités, des espaces verts, devant les collèges, les lycées, devant les alimentations de nuit… Cette manière d’occuper ces « espaces » qui sont souvent mobiles dans un même territoire pour fuir les représailles d’autres réseaux démontre que la vente de stupéfiants est connue, au vu et au su de tous. C’est même parfois des lieux où les plus petits se retrouvent recrutés occasionnels. Ces lieux démontrent aux yeux des habitants que la vente de produits se banalise et devient un simple business. Ce marché fonctionne bien et les revendeurs deviennent « des voisins » pour les jeunes.
Les familles fragilisées devront bénéficier d’un accompagnement social et psychologique adapté.

Une législation sur la dépénalisation /légalisation de la vente de résine de cannabis
La protection des mineurs devra faire l’objet d’une attention particulière ainsi la prévention de la récidive pour éviter l’accumulation des délits qui alourdissent le parcours du jeune. L’idéal pour supprimer le trafic, c’est d’introduire la dépénalisation dans l’immédiat, suivie d’un travail saisi par une commission parlementaire sur la légalisation de la consommation de la résine de cannabis. Les associations spécialisées sur les conduites additives et les associations de parents et d’usagers devront participer.

Le contexte

Au terme de l’année 2012, nous avons décompté 24 morts par homicides (sans compter les blessés) dans les quartiers populaires de Marseille. Ces meurtres ont été associés à une nouvelle forme de criminalité, notamment autour de l’activité de revente de produits stupéfiants. Les événements récents nous permettent d’affirmer que l’année 2013 risque de venir marquer de façon tout aussi dramatique les quartiers. Les réseaux de trafiquants se reconstruisent aussi rapidement qu’ils sont démontés par les forces de l’ordre. Nous n’avons aucune information sur les arrestations des « têtes de réseaux », un sentiment d’inégalité de traitement est ressenti par les habitants à l’égard des grands trafiquants qui en tirent profit.
Les plus jeunes sont pris dans « l’engrenage » du réseau faute de prise en charge concrète et de réponses efficaces. Les familles n’en peuvent plus et souhaitent des moyens humains et matériels (éducateurs spécialisés dans les addictions et le décrochage scolaire, mise en place de séjours spécifiques permettant un éloignement des adolescents en danger ou en situation de l’être).

Aujourd’hui, les habitants des quartiers populaires interpellent les pouvoirs publics.
Les inquiétudes des habitants que nous sommes n’ont pas été entendues. Les habitants sont traités souvent par les médias, les politiques, d’une façon stigmatisante qui laisse penser que les quartiers populaires tirent bénéfice de ces activités et demeurent, sans réaction, dans l’omerta par intérêt ou par peur.

Rassurer les habitants et les protéger contre les fauteurs de troubles est une nécessité
Il est souhaitable qu’un seul service spécialisé puisse prendre en compte les problèmes liés aux trafics de stupéfiants. Il faut garantir la protection des familles et des jeunes en situation de « dépendance » pour recourir à une vie normale. Pour vaincre la peur, une relation entre police et citoyen devrait se développer avec un représentent de la justice et de l’État. Cette garantie permettra de redonner confiance aux habitants sur la capacité de la police à traiter le trafic dans nos quartiers.

Les citoyens/habitants
La mobilisation actuelle des parents prouve qu’ils sont des citoyens de la République à part entière et qu’ils ont droit comme tous à la sécurité pour eux-mêmes et pour leurs enfants. Confrontés de longue date à la visibilité et la prégnance des réseaux de trafics, nous restons seuls face à une organisation criminelle où les plus jeunes payent le prix de leur vie, nous constatons que l’intervention publique n’est pas la hauteur, nous en avons une connaissance et une expérience qui nous conduisent à saisir l’ampleur et la complexité des réponses que les autorités publiques devraient entendre et nous aider à mettre en place.

Pourquoi ?
Nous savons sur quel terreau (celui de la précarité et de l’abandon public), sur quelles impasses sociales et sur quels liens complexes avec le territoire s’installent et fonctionnent ces réseaux. Nous avons pu constater de quelles façons sont mises en œuvre les stratégies de maîtrise des territoires par certaines têtes de réseaux, et comment ces réseaux tissent des liens avec les habitants, se réorganisent rapidement ; recrutent régulièrement les plus jeunes et et les familles les plus vulnérables.
Nous sommes lucides : l’attractivité et la force des réseaux ne reposent pas sur le fait qu’ils constituent une manne financière ou ressource permanente qui alimenterait les quartiers populaires. Si l’activité est fort lucrative, elle est loin de l’être pour tous.
Par contre ces réseaux, au delà de l’accès à des ressources ponctuelles pour certains, sont producteurs d’autres bénéfices. Il peut s’agir de liens sociaux, de sentiment de reconnaissance ou d’appartenance pour un jeune en déficit d’affiliation, de formes de solidarité ou de protection qui ne peuvent plus être dispensées par les institutions ou le fait d’avoir (ou de ne pas avoir) une place dans une activité économique légale, qualifiante et correctement rétribuée…

Projet d’insertion pour les jeunes sortis de prison
C’est un groupe qui donne l’apparence de construction de lien social, les jeunes le vivent bien jusqu’au jour où la prison introduit une rupture. La sortie carcérale est aussi problématique que l’enfermement et nous souhaitons éviter la prison à ces jeunes et la récidive(être repris dans le système de l’économie parallèle). Une prise en charge sociale et psychologique avec le jeune et sa famille serait un début de réponse à la récidive et à la mise en place d’un projet d’insertion pour les jeunes sortis de prison.

La religion comme issue de secours
Parfois la religion reste pour eux la seule porte de sortie concrète pour démontrer le changement, ils deviennent des « frères » assidus et sont donc protégés par la communauté religieuse. Ces jeunes constituent un groupe « identitaire ». La communauté religieuse possède des savoirs et des réelles compétences pour protéger et garantir la faisabilité de réinsertion des jeunes ; ce sont parfois des anciens détenus, qui ont connu la galère pour s’en sortir. Ils ne remettent pas en cause le système, leur objectif est de pouvoir aider un jeune qui trouve « refuge » afin de lui permettre de revenir dans le droit chemin. Si la religion n’est pas la seule à pouvoir faire rempart contre la délinquance, elle reste du moins appréciée par les familles et les habitants qui mesurent les résultats concrets à travers des témoignages de jeunes qui en sont sortis depuis des années.

L’État : garant de la sécurité de tous les habitants
L’Etat de droit est fragilisé sur les quartiers et les habitants ont le sentiment d’être abandonnéq par les pouvoirs publics et politiques. Ainsi les responsables des réseaux gagnent du terrain et démontrent de sérieuses « capacités » à maintenir cette forme d’organisation malgré les fréquents contrôles de police. Leur mobilité sur le territoire entraîne des « règlements de comptes » entre eux pour reconquérir de nouveaux espaces tout en occupant ce qu’ils avaient quitté « provisoirement » ; leur crédibilité à tenir le réseau est à la hauteur du prix à payer de leur vie.
Ces réseaux de revente sont cependant aussi en train d’imposer des règles et normes de gestion voire de domination de l’espace public dans les quartiers, souvent avec le recours à l’intimidation et bien sûr la violence. De plus en plus coercitifs dans leur pratique, les consignes qu’ils dispensent concernent aussi les pratiques ou l’espace privé (laisser les portes des appartements ouvertes en cas de repli face une intervention policière… ne pas garer son véhicule à proximité d’un lieu de revente pour en faciliter l’accès et la surveillance… pression pour camoufler des produits à domicile, des armes à feu et de l’argent…)
Pression sur les consommateurs et mauvais payeurs qui se retrouvent harcelés, menacés. Certains ont recours aux vols pour rembourser et pour d’autres ce sont les familles qui déboursent des sommes importantes, parfois plus de 2 000 euros pour éviter la descente en enfer.

Un processus d’insertion et de réinsertion géré par des dispositifs pour les jeunes en grandes difficultés des quartiers populaires fait défaut.
Les dispositifs de droit commun ne sont pas adaptés à ce public et les points accueil jeune sont démunis. Les animateurs qui gèrent ces PAPJ relèvent d’un financement précaire dans le cadre de la politique de la ville. Quand Pôle Emploi met en CDI ces salariés, les animateurs de l’éducation populaire se retrouvent avec une précarité instaurée depuis des années par les institutions publiques et les partenaires sociaux de la convention cadre des centres sociaux.
Comment dans ces conditions l’accès égal pour tous à un emploi, à une formation qualifiante peuvent-ils être possibles pour un public en grande difficulté d’insertion ? Même l’école de la Deuxième « chance » de Marseille se retrouve en difficulté pour recruter et diversifier les formations professionnelles. Il est temps d’agir sur ces dispositifs pour leur redonner de la légitimité et de la crédibilité par un renforcement de moyens et de personnes qualifiées.

Rupture avec le système de trafic : un sérieux casse-tête pour les familles
La rupture avec le système devient un casse-tête pour la famille (éloignement, voyage au pays d’origine…), un rapport de force s’instaure avec les têtes de réseaux par les familles les plus déterminées, afin de protéger un de leurs membre. Vivre dans ces conditions nous habitants, entraîne un positionnement radical et engagé (s’arrêter de travailler, se mettre en longue maladie, changer de ville…) pour éviter une mort certaine du fils, du neveu, du frère. La tension est permanente et la peur au ventre peut amener un jour une mère, un père, un frère ou une sœur à aller vers un acte irrémédiable.

Les 23 demandes des habitants

1. Les habitants demandent la mise en place d’une instance officielle de dialogue et de travail permanente avec les institutions publiques au plus haut niveau de décision (Préfets, Procureur, élus…). Celle-ci pourra être saisie par les habitants sur l’ensemble des données concernant la situation des quartiers populaires. Nous souhaitons que cette situation et plus particulièrement l’activité des réseaux de trafic et leur évolution soient observées en permanence. Nous attendons de ce travail des résultats mesurables et des interventions régulières du préfet de police pour nous tenir informer des avancements sur la sécurité dans nos quartiers.

2. Nous souhaitons que ces états des lieux, l’analyse de ces problèmes et la recherche de solutions fassent l’objet d’un débat public entre les institutions (dont les élus), les professionnels de terrain et les habitants. Nous souhaitons que les réponses mises en place soient suivies et évaluées par les pouvoirs publics et avec les habitants. Nous souhaitons que les habitants puissent participer activement aux espaces de travail inter-institutionnels et ce, sur le long terme.

3. Les habitants retiennent l’idée portée désormais par les pouvoirs publics que la seule intervention répressive et pénale ne peut répondre à la situation.
La prévention de la récidive est importante pour les familles, les bracelets électroniques ne peuvent suffire à l’insertion, cela devrait être accompagné d’une politique spécifique d’aide et d’accompagnement des jeunes à l’insertion vers l’emploi, à la formation, et au relogement si nécessaire des familles en difficulté.

4. Si l’intervention policière démontre une certaine efficacité, tous craignent que la logique des réseaux reprenne le dessus aussi tôt la police partie. Cette intervention, conçue comme elle l’est à présent, va augmenter la frustration des habitants, les tensions, la perte de confiance et mettre de la distance avec les institutions voire contribuer à déstabiliser les équilibre fragiles de nos quartiers dès la première occasion. Il faut agir de façon concertée. La réponse publique doit nécessairement articuler répression / prévention / éducation / soins /réduction des risques / aménagement urbain (favoriser les chantiers d’insertion, chantiers humanitaires…) / accès à l’emploi / suivi de formation qualifiante.

5. Faciliter l’accès aux services des sports : des heures d’ouverture adaptées et l’accès gratuit
La prévention des plus jeunes devrait être soutenue par le conseil général et la Ville de Marseille, notamment par la gratuité des transports, l’ouverture de toutes les piscines avec des horaires adaptés aux publics allant jusqu’à 21h), l’accès aux stades qui peut être géré par les associations sportives durant les vacances scolaires. Les gymnases également devraient être ouverts durant les vacances scolaires, comme les écoles primaires pour les centres aérés gérés par les associations d’éducation populaire.
Nous demandons à ce que soient multipliées les mesures ou offres de services qui redonnent une activité à nos enfants (projet jeune à visée humanitaire, transports gratuits l’été..). Il s’agit de reconnaître les associations sportives du quartier et le bénévolat des adultes qui œuvrent depuis des années à s’occuper des plus petits. La pratique du sport est très répandue dans nos quartiers et l’école de la République ne peut être seule à enseigner et bénéficier des équipements sportifs. Le partage des équipements sportifs semble indispensable et les responsables publics et politiques ont le devoir de nous aider à cette occupation pour l’intérêt commun.

6. Renforcer le soutien scolaire
Le soutien scolaire devrait bénéficier de moyens matériels et humains à la hauteur des attentes des familles. Il faut /diversifier l’offre : intervention dans les familles, petit groupe de travail avec la présence des parents, ou d’un adulte aidant,enseignants, travailleurs sociaux, stagiaires, étudiants issus de divers origines sociales. La création d’associations de parents au niveau des collèges, formera et responsabilisera les bénévoles pour être en interface parents/enseignants (expérience de l’association de 14 avenue).

7. La culture pour tous
La culture devrait s’adaper aux besoins des habitants, les équipements culturels de proximité devraient prendre en compte la créativité des groupes de jeunes, et soutenir les projets innovants, permettre aux habitants à travers des associations d’animer ces lieux. Les habitants des quartiers populaires fréquentent peu ces lieux pour la simple raison qu’ils ne se sentent pas concernés par la programmation. Le développement de la culture est un projet nécessaire aux habitants qui souhaitent bénéficier également de programmation réfléchie avec nous. Il faut faire des réunions de programmation pour garantir la culture pour tous.

8. Interdiction de vente d’alcool dans les épiceries
Les réponses mises en œuvre doivent être concrètes et avoir des effets directs sur les territoires (à court, moyen et long terme).  : Renforcer les contrôles de consommation d’alcool dans les bars auprès des mineurs (appliquer la loi). Interdiction de vente d’alcool dans les épiceries de nuit qui font office de bistrot d’appoint, un véritable sas d’influence nocturne pour les plus jeunes. Un encadrement et une lisibilité réglementaire s’imposent.
Et renforcer le cadre réglementaire du contrôle des armes à feu .

9. Prendre soin des malades psychiques en associant la famille
Création d’une association des familles et des proches atteints atteints de souffrance psychique.
Contrôle des médecins généralistes sur les ordonnances de complaisance sur les médicaments psychotropes et antidépresseurs. Un soutien efficace auprès des familles dont les jeunes et adultes sont suivis par les CMP et CMPP. Création d’une association de parents et des familles atteint par la maladie mentale. Nous demandons que ne soient pas traités de façon pénale la vulnérabilité psychique ou les troubles psychiques des enfants. Pour ce, les services de pédo-psychiatrie sont à renforcer sur ces territoires, ils doivent travailler de façon étroite avec l’institution scolaire. Ils sont à intégrer dans le principe du suivi éducatif.
Aides aux familles confrontées aux problèmes d’addictions des jeunes mineurs et jeunes adultes par la création et le soutien d’associations (de parents). Il s’agit de mettre en œuvre par tous les moyens le rôle important des familles dans la prévention et le suivi thérapeutique.
La place des parents est aussi importante et nécessaire que celle des travailleurs sociaux et du corps médical. Le rôle des parents et de la famille est déterminant dans la prévention et la réinsertion.

10. Protection des mineurs et jeune majeur
Nous demandons en priorité que les enfants qui cèdent à l’attractivité des réseaux et en subissent ensuite l’emprise soit pris en compte et protégés au titre de l’ordonnance de 1945 sur la protection des mineurs. Nous demandons à ce que ceux ci bénéficient d’une prise en charge spécifique. Nous demandons à ce que soient reconnues la gravité des menaces et les risques qui pèsent sur eux. Les familles souhaitent aussi pouvoir être concrètement soutenues pour permettre aux enfants de trouver des alternatives à l’attractivité des réseaux ( emplois – formation – suivi éducatif – déplacements…).
Nous demandons à ce que soient entendues et reconnues les situations réelles de coercition, de menaces ou d’emprise subies par les enfants quand ils souhaitent se mettre à distance des réseaux et de leur activité (relogement possible - changement de quartier - éloignement du territoire…). A cet effet, nous pensons que les moyens doivent être donnés aux services qui assurent la gestion des mesures de protection. Les suivis doivent être resserrés et inscrits dans le temps.

11. Nous voulons une prise en charge éducative qui s’inscrive au moins sur 10 ans
Les enfants et jeunes concernés devraient pouvoir bénéficier de prise en charge dans des établissements innovants, à créer, qui les aident à sortir de la logique d’échec social et scolaire tout en prenant en compte leurs difficultés antérieures avec les institutions.
Les enfants identifiés comme étant en difficulté en milieu scolaire devraient pouvoir bénéficier au plus tôt d’un suivi coordonné, sur une période de 10 ans par un référent unique mandaté par les autorités et susceptible de mobiliser les autres services, et ce en lien étroit avec les familles.

12. Les parents dont les enfants sont “pris dans l’engrenage” dans les activités des réseaux ou subissent la pression de ceux-ci demandent un soutien de type “aide aux victimes” auprès des institutions publiques et de professionnels (lieu d’accueil, d’écoute et de conseils pratiques) mais aussi des lieux qui permettent la rencontre et le croisement des expériences et difficultés parentales.

13. Nous attendons que les services sociaux aident de façon plus efficace à régler les problèmes qui engendrent des situations d’endettement et mettent certaines familles, en particulier les mamans seules, en position vulnérable face aux réseaux. L’endettement doit être considéré comme un sérieux problème qui exige des réponses rapides. Prendre en compte ces problèmes en amont, c’est assurer la prévention en direction des familles vulnérables.

14. La prolifération de l’offre accentue une hausse de la consommation. Nous souhaitons pouvoir être informés sur les risques liés à la consommation de produits psycho-actifs, nous souhaitons que des services spécialisés reviennent sur le territoire, aillent au devant de habitants, et puissent se rendre dans les familles. Réinstauration de points écoute jeune et famille, avec une approche pluridisciplinaire. Nous souhaitons que nos enfants puissent rencontrer des adultes et professionnels qui les aident à prendre conscience des risques qu’ils prennent en consommant les produits présents dans nos quartiers.

15 . Nous demandons à ce que la gestion de l’espace public soit améliorée et sécurisée (ex: éclairage public, enlèvement d’épaves …).
Nous demandons sur de nombreux quartiers à ce que soit repensée la question de l’aménagement en lien avec la sécurisation de l’espace (présence de commerces de proximité, circulation dans la cité …).
Un aménagement des espaces publics pour les enfants et les personnes âgées devrait être pensé avec les associations de locataires et les bailleurs sociaux.

  • Renforcer la relation intergénérationnelle par l’amélioration du cadre de vie pensé avec et pour l’habitant.
  • Les aînés immigrés sortent peu et sont souvent confinés dans leurs cités, prendre en compte les besoins des « chibanis » et apporter des réponses diversifiées.
  • La mixité sociale tant voulue apparaît comme une non mixité de fait et renvoi à la question de la mobilité des ménages sur le parc de logement en HLM.
  • Demande de transparence dans les attributions des logements sociaux et présence des habitants, création d’un conseil des sages.

16. Nous demandons le retour d’une police de proximité en lien permanent avec chacun des quartiers et ceux qui y vivent ou y travaillent.

17. Nous voulons rendre inconfortable les lieux du trafic par des transformations physiques de l’espace (murs, éclairage..) en lien avec les bailleurs sociaux. Les organismes HLM devront participer à la transformation rapide dès que des lieux sont occupés par des trafiquants, les centres sociaux réinvestir les espaces pour les animer avec les habitants par des projets spécifiques, avec un financement rapide qui n’attende pas l’année prochaine. C’est une mobilité de l’action entre bailleurs et associations de prévention et centres sociaux, pour occuper les espaces et ne pas les laisser abandonnés par la peur et l’inertie des dispositifs.

18. Nous demandons à ce que les bailleurs sociaux s’engagent à permettre de vivre en toute tranquillité (fermeture des halls, entretiens des espaces communs, fermeture sécurisée des boîtes de compteurs d’eau, d’électricité, de gaines, faux plafonds…).

19. Nous demandons à être associés à la création d’activités économiques rémunérées.

20. Nous souhaitons que soient valorisées les trajectoires de réussite des jeunes issus des quartiers. (Ainsi le film récent de « Approches, cultures et territoires », Vivre et grandir au lycée nord).

21 .Éducation populaire
Il est urgent que les centres sociaux reviennent à leur véritable mission d’éducation populaire, qu’ils soient représentatifs des habitants et ouvert aux attentes des jeunes de plus 10 ans, porteur de projet collectif élaborer avec et pour les habitants. Nous souhaitons qu’ils aient les moyens d’agir et que les professionnels qui y travaillent ne soient plus sur des emplois précaires et sous-qualifiés. Notre jeunesse a besoin d’un encadrement de qualité.

22. Les habitants au cœur du projet
Une réelle représentativité dans les conseils d’administration des centres sociaux par les habitants devrait être assurée, dans les fédérations d’éducation populaire qui gère ces équipements afin de permettre une formation permanente des citoyens habitants. La participation des habitants doit être plus qu’une participation réduite à un simple comité usager autour d’un conseil. La visée de ce projet est de permettre aux habitants d’être une force de proposition et d’être garants du bon fonctionnement de la démocratie participative.
Nous, habitants acteurs, nous voulons être pris en considération dans les projets développement social local. Les projets pertinents devront être retenus et reconduit sur une base de 3 ans afin de mettre ensemble un processus d’évaluation sur le long terme (par un conseil d’évaluation d’acteurs habitant et professionnels et élus..). Il s’agit de mesurer l’efficience du projet (par les actions engagées ) évaluation ; amélioration, et ajustement du projet au regard de sa visée.

23. Nous voulons reprendre confiance avec les institutions publiques. Nous avons besoin de leur présence. Une attention particulière doit être exercée sur l’usage des financements publics attribués sur nos quartiers. Les associations « qui servent de vivier électoraliste » doivent être identifiées et être soumises à un audit externe et interne pour remédier à ce dérapage. Création d’une commission pour les associations qui bénéficient des financements publics par des tiers (personnalités irréprochables, habitants, militants associatifs connus pour leur intégrité …)

Combat social
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La direction nationale de la CFDT pousse dehors son coordonnateur Sanofi

par Bernard Teper
Co-animateur du Réseau Education Populaire.
Auteur avec Michel Zerbato de « Néolibéralisme et crise de la dette ».
Auteur avec Catherine Jousse et Christophe Prudhomme « Contre les prédateurs de la santé ».

http://wwww.reseaueducationpopulaire.info

 

La CFDT reste cohérente avec sa nouvelle ligne stratégique. Son alliance stratégique avec le Medef l’entraîne à faire la chasse aux responsables locaux “coupables” de manifester contre la loi du Medef avec la CGT. La direction confédérale, droit dans ses bottes, visait particulièrement Pascal Vially, coordonnateur CFDT chez Sanofi, l’entreprise spécialiste des licenciements boursiers (voir la vidéo que Respublica a effectué avec Laurent Ziegelmeyer, responsable CGT de la même entreprise, en octobtre 2012 http://www.gaucherepublicaine.org/respublica/sanofi/5054 ). Véronique Pamiès, déléguée CFDT de Sanofi Lyon avait lancé avec d’autres camarades une pétition pour soutenir Pascal Vially. La direction confédérale lui a alors retirée son mandat syndical. Anticipant son tour, Pascal Vially démissionne de la CFDT et retourne travailler sur un poste de travail Sanofi. Voici quelques phrases significatives de la longue lettre expliquant son geste :

En préambule je souhaite rappeler que contrairement aux idées reçues véhiculées par les structures CFDT  je suis personnellement très attaché à la culture du dialogue et de la négociation chers à la CFDT. J’en apporte pour preuve si besoin était, le nombre très élevé d’accords que j’ai pu signer, chaque fois à l’issue d’un processus démocratique de prise de décision collective des équipes CFDT concernées…

Tout a changé lorsque la nouvelle Direction de Sanofi est arrivée, en 2009, avec de nouveaux objectifs et de nouvelles méthodes….

Ce que j’ai vu ces derniers mois dépasse l’entendement et mérite que l’on s’attarde. Le 11 juin 2012, le Secrétaire Général de la FCE-CFDT m’appelle pour me dire qu’une réunion va avoir lieu en toute confidentialité, entre la Direction Sanofi, la confédération CFDT en la personne de son secrétaire général F. Chérèque, et la fédération en sa propre personne, et me demande de lui transmettre un bilan de la situation chez Sanofi. Je lui adresse en réponse le travail réalisé en intersyndicale Sanofi, qui a été envoyé dans la foulée à différents ministères car nous anticipions à l’époque une annonce imminente de nouveau plan de restructuration à visée financière. Je lui précise être en désaccord avec la méthode : une réunion secrète au plus haut en amont des annonces, en dehors du cadre légal de négociation et des instances représentatives du personnel, qui laisse le doute sur la possibilité d’accords cachés, et je lui demande la possibilité d’évoquer cette réunion et son contenu en toute transparence avec les équipes CFDT, ce qui m’est refusé.

Le 29 juin 2012, le Secrétaire général de la FCE-CFDT me … donne les consignes suivantes : « Ne pas faire d’intersyndicale avec la CGT, ne pas agiter les chiffons rouges, ne pas faire trop de bruit dans les medias, et le message à retenir est le suivant : ce plan permet de sauvegarder la recherche en France, et la compétitivité de Sanofi.

l’intersyndicale (de Sanofi, NDLR) évaluera le nombre réel de suppressions de postes à environ 2000, alors que le groupe réalise des milliards d’euros de bénéfices, et confirmera l’analyse selon laquelle ce plan est uniquement financier dans le cadre d’un plan d’économies drastiques et d’une augmentation de la proportion des bénéfices remontée aux actionnaires sous formes de dividendes. L’intersyndicale dénonce l’externalisation de la R&D et des fonctions support, les délocalisations de vaccins, la désorganisation, la financiarisation…   Au vu de ces faits, le comité de liaison CFDT Sanofi (composé de 16 représentants nationaux de la CFDT Sanofi) a décidé dès le départ à l’unanimité de combattre fermement ce plan au sein d’une intersyndicale qui regroupera les 5 organisations syndicales représentatives au niveau national, plus Sud qui est notamment bien représenté à Toulouse. Contrairement aux consignes données par notre fédération, la CFDT Sanofi s’investit fortement dans une mobilisation sans précédent à l’échelle du Groupe, toutes décisions validées au préalable démocratiquement, dans un contexte très fortement médiatisé dont je deviens personnellement l’une des figures au sein de Sanofi avec plusieurs prestations télévisées, et multiplie les interventions auprès des politiques pour solliciter leur intervention et leur soutien (élus locaux, maires, députés et sénateurs, ministères, Elysée…) avec en points d’orgue des auditions auprès de l’Assemblée Nationale et du Sénat et plusieurs échanges avec M. Montebourg.   Dans toutes nos actions, la CFDT s’est faite le relai d’une exigence de retrait d’un plan social dévastateur, inefficace et motivé par les seuls impératifs financiers, et d’une demande de loi contre les licenciements dans les groupes qui font de larges bénéfices. A l’inverse, la confédération CFDT, qui a brillé par son absence comme toutes les autres confédérations dans toutes nos manifestations, a multiplié des interventions médiatiques (dès le 6/07/2012 !) visant à minorer l’impact social de ce plan, à justifier sa nécessité, et à refuser toute législation contre les licenciements financiers. Et pour cause ! La confédération CFDT s’était engagée dans une tout autre orientation dans le cadre de la conférence sociale, qui allait accoucher d’un ANI qui va plutôt dans le sens d’une plus grande souplesse des licenciements économiques…

… Un débat interne dans la CFDT Sanofi a confirmé ce que nos adhérents et militants de terrain pensent de cet ANI : deux tiers des sections donnent un avis négatif…

…le constat pour nombre de militants de ces entreprises, est qu’aucune confédération syndicale ne souhaite organiser vraiment une convergence de toutes les manifestations contre les licenciements financiers.

Dernier point en date : j’ai eu confirmation de la bouche de la Direction Sanofi, d’une rumeur qui m’était revenue aux oreilles. Dans le cadre des mesures d’accompagnement du plan de restructuration, figure un volet qui permet à des seniors de partir travailler pour des associations tout en étant payés par Sanofi. Il est aujourd’hui clairement établi que les Organisations Syndicales pourront bénéficier de cette mesure, en accueillant de nouveaux permanents syndicaux dans les structures syndicales, payés par Sanofi, grâce au plan social : n’y a-t-il pas là un conflit d’intérêt évident ?

N’est-ce pas une triste histoire de voir des militants sincères, utilisant l’argumentation, le débat, la démocratie, pour faire leur travail syndical se faire malmener par une organisation syndicale défendant de façon opaque d’autres intérêts dans une culture de soumission exclusivement descendante?
Malheureusement, beaucoup d’organisations politiques, syndicales, associatives ou mutualistes sont dans ce même déni de démocratie.
Notre conviction est que cette affaire ne doit pas seulement amener de la compassion pour les militants incriminés mais faire réfléchir l’ensemble du mouvement social et politique. Notre conviction est que parmi, les ruptures nécessaires pour mener la transformation sociale et politique, la rupture démocratique est la première des ruptures nécessaires. Cette rupture doit être fait dans le champ politique, le champ social et dans l’entreprise. Mais la crédibilité des organisations qui le disent n’existera que si elles commencent par l’appliquer dans leur propre organisation. Et on en est loin ! Voilà pourquoi les conférenciers de Respublica et du Réseau Éducation Populaire font une large place à l’enjeu démocratique.

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Liberté d'expression au Maghreb : deux appels

par ReSPUBLICA

 

Appel à défendre et à sauver la liberté d’expression en Tunisie

Deux ans et demi après la « révolution de la liberté et de la dignité » en Tunisie, qui a brisé les chaînes étouffant la liberté d’expression et d’information, les composantes de la société civile, signataires du présent appel, estiment qu’il est de leur devoir d’alerter l’opinion publique contre les tentatives incessantes visant à empêcher que la réforme du secteur de l’information soit conduite conformément aux règles de la profession et aux standards internationaux de la liberté d’expression, et à utiliser, de nouveau, les médias comme instruments de propagande, ce qui représente un réel danger pour le processus de transition démocratique et risque de préparer le retour de la dictature.
Parmi les multiples indices et exemples qui attestent que la liberté d’expression en Tunisie est encore en danger, nous citons, notamment :

1- L’inscription dans l’avant-projet de la future Constitution d’un ensemble de dispositions qui sont contraires aux fondements de la liberté d’expression et aux standards internationaux dans ce domaine, ainsi que la tentative de revenir sur le principe de l’indépendance effective des instances constitutionnelles en charge des secteurs de l’information et de la magistrature.

2- L’insouciance du gouvernement à l’égard des textes de loi régissant le secteur de l’information, et la violation de leurs dispositions, ce qui a entraîné un vide juridique délibéré qui a favorisé l’émergence de certains médias, politiquement alignés et aux financements douteux, outre les nominations arbitraires à la tête des médias publics et les agissements irresponsables à l’égard de ces médias, tels que les menaces de les privatiser.

3- La remise à l’ordre du jour d’un ancien projet de loi organique, présenté en septembre 2012 à l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) par des élus du Congrès Pour la République (CPR), visant à abroger le décret-loi N°115 de l’année 2011, relatif à la liberté de la presse, de l’impression et de l’édition, et à le remplacer par un texte liberticide qui pénalise la liberté d’expression et prémunit les responsables politiques contre la critique. Ce projet de loi organique comporte plus de 13 articles prescrivant des peines privatives de liberté.

4- Le blocage du processus d’application du décret-loi N°116 de l’année 2011, depuis plus de 28 mois, et le non-respect des conditions fixées par ce texte de loi qui prévoit la création d’une Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA), après que le Président de la République eut abdiqué ses prérogatives en faveur des partis de la Troïka, en particulier du parti « Ennahdha », qui a entravé la création de la HAICA, en écartant les candidats connus par leur compétence et leur indépendance d’esprit et de caractère, et en proposant à leur place des personnes fidèles et dévouées ou qui n’ont jamais brillé par leurs positions en faveur de la liberté de la presse.

5- La multiplication des agressions contre les journalistes dont certains ont reçu des menaces de mort, dans l’indifférence des autorités publiques et leur incapacité à les protéger et à arrêter leurs agresseurs qui profitent de l’impunité totale, outre les poursuites judiciaires engagées contre les professionnels des médias, sur la base du code pénal au lieu du décret-loi N°115.

Les associations signataires du présent appel mettent en garde contre la gravité de la situation et contre les menaces qui guettent la liberté d’expression. Elles appellent l’opinion publique ainsi que tous les hommes et toutes les femmes libres à faire face aux tentatives visant à étouffer la liberté de presse et d’expression, le principal acquis réalisé depuis la révolution et sans lequel la Tunisie n’a aucune chance d’accomplir une transition démocratique réelle.

Le 25 avril 2013

- Ligue Tunisienne de défense des droits de l’Homme (LTDH)
- Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT)
- Association « Yakadha » (Vigilance)pour la démocratie et l’État civique
- Syndicat Général de la Culture et de l’Information relevant de l’UGTT
- Syndicat Tunisien de la Presse Indépendante et de la presse des Partis (STPIP)
- Syndicat Tunisien des Radios Libres (STRL)

Soutien à l’intellectuel et militant amazigh Ahmed Aassid

Nous venons d’apprendre à FORSEM [Forum de Solidarité Euro-Méditerraneénne] que notre ami Ahmed Aassid - membre de l’Observatoire amazigh des droits et libertés, qui a récemment donné, à notre invitation, une conférence sur l’actualité marocaine le 15 mars à l’École normale supérieure de Lyon, après avoir donné une brillante conférence cette semaine à l’occasion du congrès de l’Association marocaine des Droits Humains (AMDH) où des groupes intégristes l’ont accusé à tort d’avoir insulté et traité le prophète de terroriste - aujourd’hui fait l’objet de menaces et d’intimidations. Son courage civique et intellectuel mérite d’être salué.
Ahmed Aassid, que nous tenons en grande estime, est un intellectuel, chercheur  universitaire, écrivain connu pour sa finesse, sa courtoisie et son respect de l’autre. C’est un intellectuel de renom et nous avons le plus grand respect pour ses travaux.
Nous connaissons bien Ahmed Aassid en tant que militant et écrivain et nous pouvons affirmer que l’accusation dont il est l’objet est dénuée de tout fondement ; son seul tort aux yeux de ces accusateurs – mais pour nous son plus grand mérite - est d’être un esprit libre et critique des idées intégristes et extrémistes.
Nous espérons que l’acharnement des salafistes dans la persécution d’Ahmed Aassid sera contrecarré par une mobilisation générale des composantes de la société civile et politique marocaine et bien au-delà. Les pouvoirs publics doivent assumer leur responsabilité en assurant sa sécurité.
FORSEM appelle de ses vœux qu’en France et en Europe, une chaîne de solidarité avec l’écrivain se mettra sans délai en place pour que la liberté de pensée triomphe sur la pensée unique et obscurantiste partout dans le monde.
En ces moments difficiles qu’il traverse, FORSEM tient à lui affirmer toute sa solidarité, et nous voulons croire à un réveil de la société et de la justice marocaine pour que tels agissements ne se reproduisent plus. Il est inconcevable que des voix minoritaires, aussi bruyantes et agressives soient-elles, viennent à bout des avancées démocratiques au Maroc grâce justement aux luttes menées depuis si longtemps par des militants, intellectuels, artistes, journalistes… militants et universitaires à l’exemple de Ahmed Aassid.

Contact : zharir@forsem.fr

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Deux films sur le conflit israélo-palestinien

par Jean Rabinovici
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A voir, l’un sur grand écran et l’autre chez vous.

En France le film documentaire a de plus en plus de public. A commencer dans le milieu cinéphilique. Des festivals entièrement consacrés aux documentaires comme ceux de Lussas, de Marseille et le Cinéma du Réel de Paris ont joué un rôle important dans la multiplication d’événements de ce type à travers l’hexagone.
Les tensions internationales comme celles du Moyen-Orient ont amené les cinéastes à apporter leurs témoignages, leurs prises de position. C’est le cas avec deux films qui en ce début d’année 2013 se sont vus « nominés » aux Oscars d’Hollywood et qui abordaient de deux manières différentes le conflit israélo-arabe. Même s’ils n’ont pas emporté la célèbre statuette dans leur catégorie, on a beaucoup parlé d’eux.

1/ Primé au Festival International de la Production Audiovisuelle (le FIPA) de Biarritz de cette année en tant que reportage, The Gatekeepers est constitué des ix entretiens d’anciens responsables du Shin Beth, le service de renseignement et d’action d’Israël. Dror Moreh, réalisateur israélien de ce film, sans faire un réquisitoire montre la convergence de ces hommes qui font chacun de leur côté un bilan négatif de leur action.Le recrutement d’indicateurs, les interrogatoires, la torture, les frappes ciblées et les dommages collatéraux: depuis plus de 30 ans, Israël s’emploie à renforcer sa sécurité par des méthodes suscitant toujours plus de haine et de vengeance.
Un événement a marqué ces six hommes : l’assassinat du premier ministre Itzhak Rabin en 1995. Il révèle non seulement le laxisme des autorités face à l’extrémisme juif mais tue littéralement leur seul espoir de paix. « Nous sommes devenus cruels envers la population que nous contrôlons sous prétexte de lutter contre le terrorisme », affirme l’un d’eux.
Et pour ces anciens du Shin Beth, Itzhak Rabin aura été le seul des premiers ministres israéliens à s’intéresser au peuple palestinien et à envisager véritablement la mise en place d’un Etat à part entière.

2/ L’autre film, Cinq Caméras brisées, est très original de par sa forme et sa co-réalisation. Avant tout il y a cette somme d’images du célèbre village de Bil’in de la Cisjordanie occupée, proche de Ramallah, qu’un jeune Palestinien, Emad Burnat passionné de vidéo a engrangé tout au long de cinq années passant des vidéos familiales à une relation cinématographique de la vie de son village. Car Bil’in a été le lieu privilégié d’une lutte non violente contre l’occupation israélienne et contre la politique de séparation entre Israéliens et Palestiniens au moyen de murs sophistiqués et accapareurs de parts de territoires du futur Etat de Palestine.
D’où une coréalisation déjà rendue nécessaire par le fait qu’il fallait filmer Emad dans sa vie à la fois familiale et de chroniqueur permanent de cette lutte non-violente, toujours au premier rang, aux côtés de ceux de Bil’in qui seront souvent blessés et parfois tués par les forces de répression israéliennes avec leurs gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc et aussi réelles tirées par les jeunes recrues israéliennes. Ce fut l’un des rôles de Guy Davidi, cinéaste israélien qui travailla aussi aux côtés d’Emad pour monter ce film qui s’impose pour ses qualités cinématographiques. Pas étonnant qu’il ait reçu rapidement des prix dans des festivals à travers le monde comme ceux de Sundance aux USA et d’Amsterdam et de se retrouver nominés dans la finale des Oscars de cette année avec le film de Dror Moreh.

On peut encore voir les Cinq Caméras brisées à Paris dans des salles comme l’Espace Saint-Michel ou la Clef et dans des salles de l’Hexagone. Alors ne manquez pas ce film en salles et aussi le DVD de The Gatekeepers qui, lui déjà diffusé sur ARTE, sortira prochainement dans le commerce. Mais il faudra un peu de patience pour ce dernier.

NOTE

  • Pour The Gatekeepers de Dror Moreh, il faut aller sur le site d’ARTE. Fr et sur VOD.Arte. L’annonce de la possibilité de revoir ce documentaire, annoncée prochainement, vous précise que vous serez averti sur votre adresse mail. Un DVD devrait être ensuite mis en vente par ARTE.
  • Cinq caméras brisées, film coréalisé par Emad Burnat et Guy Davidi, est sorti en France le mercredi 20 février 2013en partenariat avec Le Monde, Courrier international, Le blog documentaire,Le Monde libertaire. Et avec le soutien des organisations suivantes : AFPS (Association France Palestine Solidarité), Attac, CVPR-PO (Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche Orient), FIDH, LDH, Plateforme des ONG pour la Palestine, UJFP (Union Juive Française pour la Paix). Pour la diffusion dans les salles du film, prendre contact avec Philippe Hagué (Zeugma Films) : philippe.hague@gmail.com
Courrier des lecteurs
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Les Ligues fascistes renaîtraient-elles de leurs cendres ?

par ReSPUBLICA

 

Courrier reçu de Claude Jenger, Valence

Non, nous ne sommes pas au milieu des années 30 ; non, les nervis d’extrême droite n’ont pas encore tiré sur les policiers, pourtant la “crise” qui n’en finit pas de finir (pourquoi finirait-elle puisque les vrais responsables et leurs errements continuent ?) ressemble à celle de 1929 et à ses conséquences.

Selon les cas, les spécialistes écrivent, soit que : “l’histoire est un éternel recommencement”, soit : “qu’elle ne se répète pas”. La vérité reste que “si on ignore l’histoire, on est condamné à en revivre les pires moments” !
On voit se multiplier les exactions, les provocations et la violence est de plus en plus présente et grave … que les catholiques extrêmes (et les autres) n’aient pas jugé utile de manifester avec autant de vigueur contre l’exclusion, les privilèges éhontés et la pauvreté que contre le “mariage pour tous” en dit long sur leurs “vraies” valeurs.
Excités par les déclarations va-t-en-guerre de leurs responsables, évêques et cardinaux, ils ont le sentiment de mener une croisade contre les mécréants (au passage, on sait comment ont fini les croisades).

Débordés, dépassés par leurs propres troupes et le cortège des provocateurs et casseurs de tous poils, voilà que les hurluberlus, bobos de droite parisiens qui ont entraîné dans leur sillage la bourgeoisie bien-pensante des presbytères, en appellent à la police et au gouvernement pour les débarrasser des cohortes fascisantes … alors que simultanément, ils appellent eux-mêmes à la radicalisation par des propos ahurissants proches de l’appel au meurtre, accompagnés par des élus qui ne sont pas en reste !

Tout le monde s’accorde pour dire que le sang-froid et la retenue sont les principales qualités requises pour les chefs d’entreprises, les cadres dirigeants, les responsables d’organisation et … les élus de la République !
Or, que voyons-nous et qu’entendons-nous ? Des députés qui accusent le gouvernement de “meurtres d’enfants”, d’autres quittent leur banc pour tenter d’agresser physiquement leurs homologues et un membre de cabinet ministériel et auraient frappé une huissière de l’Assemblée nationale venue s’interposer.
Les vidéos nous montrent un Christian Jacob, Président du groupe UMP, aboyant, éructant, hurlant de haine, postillonnant, les yeux révulsés, se croyant sans doute dans les suites trop arrosées d’un comice agricole (un truc à faire regretter que dans certains cas, l’ascenseur social ne se soit pas arrêté plus tôt).
Les choses ne s’arrangent pas, quand on passe d’un Clemenceau, Barrès, Poincaré, Debré (pour ne citer que des présidents de groupe de droite) à un tel foutraque, tout en constatant que le niveau et le choix correspondent bien au groupe parlementaire concerné. Au passage citons quelques autres Présidents de groupe de gauche, Mendès-France, Jaurès, Blum, Herriot, tous, les uns comme les autres, choisis parmi les meilleurs orateurs et les esprits les mieux faits.

Stupéfiante régression qui déconsidère la vie politique et “qui ferait passer Marine Le Pen pour un mélange de Mme de Staël et de George Sand” (François Darras).
Pendant ce temps, il y a en France 6 millions de sans emploi et quasiment 10 millions de gens qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, parmi lesquels plus de 2 millions d’enfants.  Je trouve les évêques, cardinaux et grenouilles de bénitier bien silencieux en la matière.