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Un parcours en Cisjordanie

Suite d’un premier article : De Amman à Hébron via Jérusalem

Nous irons à Jénine une journée. Je retrouve avec difficulté une association culturelle visitée voici 5 ans. Trois femmes nous accueillent. Café. La femme rencontrée en 2009 est repartie en France. Le lendemain c’est un aller-retour à Tulkarem. Islam nous accompagne et nous emmène à l’Université. Bien qu’elle soit mixte la cafétéria est squattée par les hommes. Les groupes hommes femmes ne se mélangent pas. Je me dis que les luttes des années 70 ont laissé bien peu de traces. Il y a cependant un peu d’agitation sur le campus. Françoise ramasse un tract qu’Islam traduit de façon fantaisiste. (Nous le découvrirons plus tard à Amman). Je voudrais revoir R., femme prisonnière à qui nous écrivions jusqu’à sa libération. En 2009 je l’avais visitée. Elle habitait le camp de réfugiés. Elle est policière. Un groupe de policiers palestiniens se renseigne par téléphone. R. est maintenant à Kalkilia.

A Naplouse, Islam nous parle d’affrontements dans un camp. « Allons-y ! ». Je m’aperçois alors qu’Islam dit n’importe quoi mais surtout qu’il n’irait pour rien au monde dans un camp. Les réfugiés sont des parias pour lui. En effet les plus combatifs sont les gens des camps et les Israéliens les répriment avec la plus grande violence. En 2002 le camp de Jénine fut bombardé pendant 13 jours sans interruption, jour et nuit et ni la presse ni les secours ne purent y pénétrer. La classe moyenne est beaucoup plus résignée.
Nous partons pour Jéricho. C’est la seule ville qui est complètement sous administration palestinienne (1994, Oslo II). Autonomie illusoire puisque les Israéliens contrôlent toute la Cisjordanie. L’hôtel bon marché Hisham Palace est fermé. Nous devons aller à 3 km avec des « services ». La région jouit d’un climat favorable et de sources. Palmeraies et cultures maraîchères. Mais il est temps de repasser en Jordanie.
Le jour du départ commence bien. Le cafetier nous offre le café. Le taxi dit qu’il nous prend pour le pont Allenby. Mais au check-point à 3 km, surprise. Il fait demi-tour. Avec son taxi palestinien il n’a pas le droit de passer. Il le sait bien sûr. Nous refusons un taxi israélien trop cher. Les soldats nous montrent un autre check-point à 1 km et nous laissent passer à pied. Là-bas les militaires nous expliquent que nous ne pouvons continuer qu’en taxi. Je tente ma chance auprès d’une grosse voiture officielle (à la frontière l’homme viendra s’excuser, il ne pouvait nous prendre. il est norvégien. Je lui dis savoir ce que la Norvège fait pour la Palestine) et le taxi israélien nous embarque.
Les formalités de départ sont rapides, assorties d’une dernière mauvaise surprise qui n’existait pas en 2009 : taxe de sortie de 41 euros par personne ! C’est la meilleure ! non seulement ils occupent ce pays mais ils se font de l’argent sur les visiteurs, les marchandises d’exportation, le ciment qui servira à reconstruire ce qu’ils ont cassé…
Nous retrouvons l’hôtel fréquenté par les Asiatiques, une jeune femme polyglotte qui travaille en Jordanie depuis 9 à 10 mois et qui a des avis très pertinents sur la Jordanie et… deux communistes palestiniens dont l’un est un journaliste écrivain indésirable pour les Israéliens et pour l’Autorité palestinienne. Il a installé son QG dans un coin du café chicha que nous fréquentons et passe 10 heures par jour sur son ordinateur, carburant au café. Il jongle avec la censure du Royaume et quand il est dans le collimateur il bascule sur un site hébergé aux USA. Il ne parle pas français mais connaît bien la littérature française, Hugo, Aragon (il a appelé sa fille Elsa). Il nous emmène à l’Union des écrivains, au Syndicat des artistes et à un concert (style égyptien). Par curiosité vous pouvez aller sur le site originalityonline.blogspot.fr , c’est en anglais et en arabe et c’est lui, Nazmi, que vous voyez fumant sa cigarette sur le trottoir à Amman. Nous nous voyons tous les jours.

 

 

 

 

Une escapade à Petra,                l’incontournable site nabatéen et c’est le retour en France.

Post-scriptum

En ce 10 décembre, de retour en Auvergne, nous apprenons la mort d’un ministre palestinien qui intervenait contre une colonie illégale. Un commentateur de France Inter a parlé de bousculade !  Quel culot ! Vous avez vu le soldat le saisissant à la gorge ? On en parle parce qu’il s’agit d’un ministre mais il faut dire que c’est du quotidien pour la population.

Au retour, nous avons pu voir au cinéma à Clermont-Ferrand un document israélien exceptionnel, The Lab de Yotam Feldman : son dernier passage sur la Chaîne parlementaire LCP est programmé dans la nuit du 16 au 17 janvier : http://www.lcp.fr/emissions/docs-ad-hoc/vod/165360-vendeurs-de-guerre
Le cinéaste interviewe des fabricants et marchands d’armes en Israël. Ces gens sont d’un cynisme et d’un racisme inégalés. Ils ont reconstitué un « village palestinien » où ils s’entraînent au tir. Ils ont le fusil à tirer dans les coins : risque zéro pour le tireur. Ils sont les plus avancés du monde en matière de drones militaires. On comprend que les 3 massacres à Gaza leur servent de terrain d’expérience, de « labo » grandeur nature pour améliorer leurs armes et ils s’en vantent… Israël est le 4e vendeur d’armes dans le monde mais le 1er si vous tenez compte de la taille et de la population du pays. On comprend surtout que – comme les USA – le complexe militaro-industriel est tel qu’Israël ne veut pas de la paix ! La société israélienne charrie tellement d’inégalités et de contradictions que la guerre et la soi-disant insécurité lui servent de ciment social. Ces gens ne parlent pas de religion.
Contrairement à nos islamo-gauchistes qui, en France, se sont spécialisés dans l’islamophobie et n’ont fait qu’introduire de la confusion dans le débat alors que – en tant qu’anciens gauchistes –  ils devaient montrer que la religion est une affaire privée et que le vrai problème est le racisme qui est hélas un fléau mondial. Si vous avez un doute, allez voir « christianophobie » par curiosité… et vous comprendrez que ce nouveau vocabulaire est un piège.

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