Des difficultés pour lire cette lettre ? Cliquez ici : lettre en ligne - Pour vous désabonner, ici : désinscrire

ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine

n°541 - vendredi 1 juin 2007

Envoyé à 78 courriels inscrits

Mode d'emploi:

Adhésion de soutien:
Bien que le journal électronique soit rédigé par des contributeurs non rémunérés, nous devons faire face à des frais (notamment informatique). C'est pour cela que votre aide financière est la bienvenue pour nous permettre de continuer à vous informer sur les combats de la Gauche Républicaine et Laïque. Pour ce faire vous pouvez faire une adhésion de soutien en vous inspirant du barème ci-après et en nous envoyant sur papier libre vos Noms, Prénoms, Adresse et courriel à :

Les Amis de ReSPUBLICA
27, rue de la Réunion
75 020 PARIS

Barème indicatif :
Chômeurs, RMIstes, Etudiants: 10 euros
SMIC et au-delà: entre 25 euros et 100 euros

1 - chronique d'Evariste

1 - Qui va payer les nombreuses exonérations fiscales promises par Nicolas Sarkozy ?

Il devrait y avoir des élections plus souvent. La déclaration de Nicolas Sarkozy, au Havre, mardi soir, affirmant que les propriétaires d’emprunt pour leur résidence principale déduiront de leurs impôts environ 20 à 25 % de leurs remboursements ne pourra que combler d’aise des millions de propriétaires qui ont pris un emprunt pour quinze, vingt ou vingt-cinq ans pour financer leur prêt. Et il a ajouté que c’était sa façon de lutter contre la pensée unique ! Vraiment très fort ! Mon amie, qui s’apprête à acheter le premier appartement de sa vie, a déjà fait ses calculs, et ne jure plus que par Nicolas. Empruntant 120.000 euros sur vingt ans, elle économiserait aux alentours de 800 euros d’impôts par an, jusqu’en 2027. Elle devrait donc pouvoir me payer plus souvent des restaurants.

Prise au nom de la France des propriétaires, cette mesure devrait avoir de bonnes retombées électorales pour le parti du président, lors des prochaines législatives, ce qui est de bonne guerre. En France, 58 % des ménages sont propriétaires de leur appartement, contre 84 % en Espagne, 78 % en Belgique et 75 % au Portugal.

On va donc vers une hausse des propriétaires, dans ce pays, et quand ils vont mourir, ils ne paieront plus de droits de succession pour leurs enfants. Qui pourrait être contre de telles mesures, qui paraissent aller dans le sens des intérêts populaires ? Les éternels grincheux diront que cela va faire monter les prix de l’immobilier, qui ont déjà décollé, et surtout qu’il manquera 4 milliards d’euros dans les caisses de l’Etat, soit près de 10 % du montant de l’impôt sur le revenu.

Mais les faits sont là : on a un nouveau président qui passe son temps à baisser le montant de nos remboursements, quand le secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, promettait aux Français qui gagnaient 4000 euros par mois et plus, de payer une nouvelle CSG.

Pourtant, le discours à la mode, sur la baisse des impôts ne devrait-elle pas interpeller tout citoyen sensible à la justice sociale ? Je fais partie de la moitié des contribuables de ce pays qui paient des impôts sur le revenu. Bien sûr, j’y suis favorable, mais je les trouve, comme tout bon Français un peu gaulois, trop élevés. Sans doute parce que je fais également partie de ceux qui n’ont aucun conseiller fiscal pour opérer des déductions. Je connais pourtant des gens qui gagnent bien plus que moi, sans avoir besoin, comme Johnny, de s’exiler, et qui ne paient pas d’impôts sur le revenu.

Je sais, entre autres, qu’on peut employer un salariés à domicile, le déclarer (c’est mieux que de le payer au noir) et déduire un fort pourcentage du salaire qu’on lui octroie de ses impôts. Le comble du système est que ce salarié, payé au smic, va acquitter des impôts, alors que son employeur, malin, peut ne pas en payer.

Ajoutons le bouclier fiscal de Sarkozy, qui favorisera les plus fortunés en limitant leurs prélèvements.

La réalité du système de l’impôt sur le revenu, aujourd’hui, avec la multiplication des niches fiscales favorisant les plus aisés, et le fait qu’un Français sur deux, pas toujours les plus démunis, n’en paie pas, fait que ce sont les classes moyennes qui en assurent l’essentiel.

Notons que le budget de la France, en 2006, se chiffre à 353 milliards d’euros. La part de l’impôt sur le revenu n’est que de 57 milliards, alors que la TVA se monte à 163 milliards. Il est aisé de comprendre le scénario qui se dessine.

L’impôt sur le revenu est payé de manière progressive, tandis que les taxes sont les mêmes pour tous les citoyens.

Le premier, plus juste, républicain, solidaire, est en train de fondre comme neige au soleil, et il faudra bien trouver d’autres financements.

Certes, on va faire des économies chez les fonctionnaires, en ne les remplaçant pas tous, mais on leur a promis des augmentations de salaires.

Certes, les petits malins qui misaient sur l’amnistie présidentielle pour les délits routiers sont de la revue, et vont passer à la caisse, ce qui fait des rentrées fiscales supplémentaires.

Certes, grâce à mes amis de la sécurité routière, jamais à court d’imagination, les délinquants automobilistes vont se faire encore sanctionner davantage, et donc alimenter les caisses de l’Etat. Outre la profusion de nouveaux radars, ils ont trouvé deux nouvelles combines.

Première astuce, en finir avec le kit main libre, qui faisait que vous pouviez téléphoner dans votre voiture, en tenant le volant des deux mains. Terminé, les statistiques sont claires : on est moins concentré, donc plus dangereux, nouvelles amendes, nouveaux points en moins, nouveaux retraits de permis en vue !

Deuxième astuce, on retire les panneaux signalant la présence des radars. En voilà une idée qu’elle est bonne, même si l’argument de la sécurité donné pour justifier les mesures en prend un coup ! J’ai été cette semaine témoin d’un gâchis incroyable. Je conduisais sur l’autoroute, et je me suis laissé aller à mes pensées, oubliant de regarder mon compteur. Soudain, je lis, sur un grand panneau lumineux, le numéro d’immatriculation de ma voiture, avec un avertissement écrit en gros : ralentissez ! Je sursaute, et regarde mon compteur : je roulais à cent cinquante kilomètres-heure. L’Etat investit dans des panneaux lumineux qui ne rapportent rien, alors qu’un bon vieux radar m’aurait piqué des points, et coûté une bonne centaine d’euros d’amende.

Tout cela sera certes fort utile pour remplir les caisses, mais l’an passé, les amendes n’ont rapporté que 600 millions d’euros, même si on les majore, si on en met davantage, cela ne suffira pas.

Si on baisse l’impôt sur le revenu, il faudra augmenter les ressources autrement, et cela sera la TVA, payée de la même façon par l’ensemble des citoyens, qui remplacera l’impôt républicain, proportionnel, donc plus juste.

Au nom du moins d’impôts, slogan démagogique repris par l’ensemble des gouvernements de ces vingt dernières années, on verra donc les moins aisés payer en taxes apparemment indolores, ce que les plus favorisés ne paieront plus en impôts.

Cela risque d’être douloureux, mais les mauvaises surprises viendront après les élections.

Si la droite a milité de tout temps pour le moins d’impôts, voire pour la suppression de l’impôt sur le revenu, la gauche a souvent contribué à épouser cette ligne, en relayant ce démagogique discours.

Un vrai projet de gauche, qui se substitue au discours libéral, devrait constituer au contraire à réhabiliter l’impôt républicain, qui soit progressif.

Il serait payé par tous, même les plus démunis, de manière symbolique, et bien sûr on devrait mettre fin à toutes les exonérations qui en vident aujourd’hui totalement le sens.

Dans cet esprit, une réflexion est indispensable sur le quotient familial, qui occasionne des déductions bien plus importantes pour les gros revenus que pour les foyers modestes.

Dernière chose, un discours de gauche ne doit pas faire l’impasse sur l’ensemble des économies que devrait faire l’Etat, car c’est l’argent de tous les contribuables dont il est question, et chacun peut constater régulièrement des gaspillages qui montrent que l’intérêt général est loin d’être toujours pris en compte.

Cela ne s’oppose pas au fait de dire que, bien sûr, le premier gaspillage de notre société, c’est de laisser délibérément inactifs des millions de salariés privés d’emploi.

Évariste Pour réagir aux articles,
écrire à evariste@gaucherepublicaine.org

2 - société

1 - La Brute et l’éducateur

Cher Evariste,

J'ai écrit le texte suivant à chaud, sous le coup de l'émotion. Je veux faire connaître cet épisode d'insécurité. Pour cela, c'est à Respublica que je m'adresse en premier, étant très proche de son esprit et de ses prises de position.

Mon neveu a passé une bonne partie de sa vie à remplir une mission d'éducateur. Un métier qu'il aime, qu'il continue à exercer malgré la malencontreuse maladie qui l'affaiblit et dont il ne parle jamais. Ce n'est pas un homme qui se plaint.

Toujours souriant, toujours optimiste, il est éducateur des rues. C'est dire qu'il en a rencontrés des cas de délinquance, des jeunes violents, malheureux, sans repères auxquels il faut parler fermement mais sans brutalité.

En ce mardi du mois de mai, étendu sur le sol, l'éducateur pense à sa carrière écoulée.

Comme si un point final venait de l'interrompre. En l'occurrence un puissant coup de poing vient de l'abattre, décoché par une jeune brute aux muscles d'acier. Le coup a été si puissant que les os ont craqué. J'ai appris plus tard que cette brute doit son efficacité à une longue pratique de la boxe. Ses poings sont d'autant plus redoutables qu'il les met au service d'une haine primaire, accompagnée d'un langage sommaire et ordurier: « Je vais t'emplâtrer!" avait-il prévenu , à plusieurs reprises, auparavant.
Jusqu'alors c'était des menaces que les responsables de l'ordre, alertés, n'ont pas voulu prendre au sérieux. Il est bien connu que la police n'intervient pas sur de simples présupposés de dangers, mais uniquement quand l'acte est perpétré, quand il y a des morts ou des blessés. Tout le monde déplore le fait qu'il faut attendre qu'il y ait un malheur pour que la force publique se mobilise.
Mais il peut arriver que, même après le passage à l'acte, rien ne bouge du côté de la protection civile, comme nous allons le relater dans les lignes qui suivent.
Car aujourd'hui la brute est passée à l'acte.
En un éclair, avant de sombrer dans l'inconscience, mon neveu pense à sa carrière, à son travail d'éducateur. Ces jeunes n'étaient pas faciles, il y avait les risques du métier, mais jamais aucun de ces révoltés n'avait levé la main sur lui. Educateur d'un naturel pacifique, raisonneur, conciliateur, à la fois ferme et amical, une relation d'humanité s'instaurait entre lui et ces êtres à demi sauvages qu'il s'agissait de rassurer et de dompter pour leur ouvrir une place dans le corps social.

Non, les coups qu'il reçoit aujourd'hui ne proviennent pas des risques de son métier, mais d'une ordinaire querelle de voisinage. Un couple de voisins, guère plus âgés que les jeunes dont il s'occupe, auxquels il demande poliment de bien vouloir ne plus profiter de son absence pour débrancher son cable de télévision pour brancher le leur à la place. Il faut bien expliquer à ces gens-là, très frustes, qu'une antenne privée placée sur un toit privé est à usage privé et que la formule simpliste « Lève-toi de là que je m'y mette » relève d'une loi de la jungle et n'a pas cours dans une société civilisée...

Le langage choisi et courtois de mon neveu demeure lettre morte, c'est même une langue étrangère pour ces jeunes gens qui ne possèdent pas d'autre cadre conceptuel qu'un répertoire limité d'idiomes orduriers très sommaires (« Tu me cherches ? »... » « Je vais t'emplâtrer la gueule!... »). L'homme brutal, qui n'a pas la moitié de l'âge de l'éducateur, n'a pour argument que ses poings, pour faculté d'analyse que sa rage.
La communication, c'est un peu le métier de mon neveu : il connaît... Mais là, il est dépassé car toute parole raisonnable, conciliante, est perçue par la brute comme un signe de faiblesse qui va déclencher la violence. Même un signe apaisant de la main est interprété comme une insulte primaire (« Ah! Tu m'as fait le doigt !» expression qui évoque le bras d'honneur très usité dans les conflits de bas étage).
Donc, communication impossible, la jeune brute projette son propre langage sur les mots et les gestes de son interlocuteur et vit les propos apaisants comme autant d'agressions qui vont déclencher le passage à l'acte. Certes, la psychiatrie saurait poser un diagnostic sur ces mécanismes de projection. Elle saurait établir, par là-même, la dangerosité du personnage. Peu importe, ce qui est malheureux à dire c'est que certains êtres, déséquilibrés à ce point, ne peuvent se corriger par le raisonnement et les bonnes paroles et que, dès lors, pour se protéger et protéger les siens, il convient de les tenir à distance et de les empêcher de nuire. C'est pour cela que nous avons besoin d'une police dans notre société.

L'éducateur pense donc à sa carrière écoulée et que c'est bête et inutile de recevoir des coups sans raison, sans même avoir le sentiment, comme dans les guerres stupides, d'avoir défendu une cause. C'est pour rien qu'il risque de mourir le visage écrasé sur le bithume. On dira de lui qu'il n'a pas eu de chance, qu'en rentrant chez lui après sa journée de travail social, il est passé au mauvais endroit au mauvais moment.

L'insécurité urbaine, c'est cela. Elle ne relève pas forcément d'une révolte idéologique, ni de la misère, ni du crime organisé. Insécurité parce qu'on est à la merci d'un déséquilibre mental ou d'un individu qui, faute d'éducation ou de structures mentales est resté à l'état brut de la bête malfaisante et gratuitement agressive (toutes mes excuses à mes amies les bêtes qui ne méritent sans doute pas d'être comparées à un tel être...).

Cet être fruste et inquiétant, physiquement bien bâti, dans la force de ses vingt-cinq ans, n'hésite pas à taper haineusement sur cet homme doux, pacifique et grisonnant, qui pourrait avoir l'âge de son père. Passons sur cet aspect du drame qui n'est qu'un cas d'espèce, relevant de l'hygiène mentale. C'est la faute à « pas de chance » de s'être trouvé sur le passage d'une brute de cette espèce. La faute à « pas de chance » si la famille de mon neveu vit actuellement un stress qui la bouleverse et dont on ne connaît pas encore les conséquences sur l'équilibre des enfants et de l'épouse.
Par contre, là où le bât blesse, c'est de constater qu'il n'y a pas eu , du côté des autorités policières, dont le rôle est de nous protéger, de mesures préventives quand elle ont été avisées du danger. De plus, cette même police, alertée par les secours, n'est pas intervenue auprès de la brute (il n'y avait pas d'équipe disponible, ont-ils dit...). Lors du dépôt de la plainte, il a été signifié à l'épouse qu'on n'a pas le droit de pénétrer au domicile des agresseurs (!). Ironie du sort: dans la même semaine, quelque part en France, une équipe de gendarmes est disponible pour poursuivre un voleur d'essence. Hélas! cela tourne au drame. Deux blessés , un mort parmi les gendarmes... mais la France entière est déjà au courant car les médias répercutent largement l'événement. Et bienheureusement le fauteur de troubles est arrêté aussitôt, mis hors d'état de nuire comme il se doit. On peut concevoir qu'il est plus grave de meurtrir des gendarmes qu'un simple éducateur des rues. On peut concevoir comme prioritaire la nécessité de se saisir d'un agresseur de gendarmes. Plus difficile de concevoir qu'une équipe soit prête à poursuivre un voleur d'essence pendant qu'ailleurs aucun représentant de l'ordre ne peut intervenir pour arrêter le massacre d'un simple citoyen. A l'heure où j'écris ces lignes, mon neveu est toujours à l'hôpital. On a dû l'opérer car des os de la face sont fracturés et qu'il faut consolider l'ensemble avec des plaques et des vis, avec toutes les complications possibles liées à son état de fragilité (diabète avancé). Ses enfants, pré-ado et ado, bouleversés par la violence gratuite qui a frappé un père aimé et sécurisant, essaient, par des comportements inhabituels, de conjurer l'angoisse qui s'est installée en eux. Ils ne sont d'ailleurs pas à l'abri de la bête furieuse laissée libre après son forfait. Ma nièce, par sa fenêtre, observe le sinistre individu qui se promène dans la rue, sifflotant, fier de lui, impuni, goguenard.
Les voisins ont assisté au spectacle gratuit. Car cela a fait grand bruit dans le quartier. Ils étaient très nombreux dans la rue pour assister à l'immolation d'un honnête citoyen par la jeune brute aux muscles d'acier. Ils l'ont vu s'écrouler sur l'asphalte, ils ont vu sa femme l'aider à se relever, l'accompagner jusqu'au hall d'entrée où il s'est à nouveau écroulé. L'un d'entre eux, il est vrai, avait essayé de retenir la brute. Mais quand le forfait fut accompli, la rue s'est vidée comme par enchantement, les pompiers ont fait leur boulot (ils étaient navrés que la police n'intervienne pas), la famille de la victime s'est retrouvée aussitôt dans la solitude de sa peine et dans l'attente anxieuse de nouvelles agressions. Une plainte ayant été déposée, il faut imaginer que l'agresseur sera bientôt convoqué dans un commissariat, que peut-être il en sortira libre, et libre d'aller frapper un enfant où la femme de sa victime. Et les voisins ? ceux qui, après le "spectacle" se sont empressés de s'enfermer chez eux , accepteront-ils de témoigner de ce qu'ils ont vu, ou bien, lâchement, auront-ils peur d'éventuelles représailles?... Auquel cas on ne pourrait même pas leur en vouloir: quand on a peur pour les siens et que l'insécurité règne dans la rue, la lâcheté peut se comprendre. Et, plusieurs jours après le dépôt de la plainte, le dangereux personnage est toujours en liberté !...

Cet épisode s'est déroulé à Marseille, aurait pu se dérouler n'importe où. Cela peut arriver à n'importe qui. C'est tellement banal et courant que la presse n'en a pas parlé. Quand cela vous arrivera, comme moi vous serez triste et vous voudrez, comme moi, qu'on en parle, que l'on s'afflige quelque part, et surtout que l'on soit protégé par ceux dont c'est la mission. Ces derniers mois ont vu se dérouler une campagne pour l'élection d'un Président où il a été beaucoup question de la sécurité publique. Des promesses ont été faites. Des jeunes gens se sont trouvés immédiatement incarcérés à l'issue de manifestations violentes. Par contre, la nouvelle législature commence bien mal dans le quartier de mon neveu.
Il est encore tôt pour juger. Attendons. La balle est dans le camp, des forces de l'ordre d'abord, de la justice ensuite. La balle est aussi dans le camp des médias auxquels je m'adresse par cette lettre.

Lien vers le site de CBB

Claude-Bernard Berkiwitz

3 - Elections 2007

1 - En trente ans, la gauche a-t-elle brûlé tous ses jokers ? (suite et fin)

Lire la 1ère partie

Les électeurs ont imposé la victoire du « non » en 2005 parce qu’ils ont compris que la continuation de la construction européenne sur les bases de Maastricht et des différents traités qui l’ont suivis signifiait la fin de la spécificité du modèle républicain, social et laïque de la France, et, par le principe de concurrence libre et non faussée, une pression supplémentaire contre le monde du travail.

La faillite des lendemains de victoire de la campagne du non

Ils attendaient des leaders du non de gauche qu’ils entraînent l’ensemble des citoyens, y compris ceux qui, de droite, avaient voté « non », dans des perspectives qu’ils n’ont jamais été capables de tracer, coincés par le problème d’une grande partie de la gauche avec le mot « Nation » et par un discours réclamant une impossible Europe sociale. Ainsi, personne n’a osé interpeller Chirac pour qu’il ait un geste fort, notamment provoquer la crise, et sortir de l’Europe comme de Gaulle l’avait fait en 1967.
Les électeurs espéraient au moins que de cette campagne naîtraient des nouveaux projets organisationnels qui pourraient se mettre en place lors des présidentielles.
La synthèse du Mans, six mois après le 29 mai, et la ralliement à la direction Hollande de la plupart des militants socialistes qui avaient fait campagne pour le « non », a été un premier coup d’arrêt à ces espoirs.
Dans les collectifs unitaires, les intérêts d’appareils ont rapidement pris le dessus sur l’intérêt général, aboutissant à un éparpillement de candidatures aux présidentielles, qui a découragé beaucoup de militants qui s’étaient investis dans la campagne, et espéraient de nouvelles perspectives au lendemain du 29 mai 2005.
Tous ces militants montreront leur détermination dans les mobilisations contre le CPE, une année plus tard.
Mais ils en tireront comme conclusion qu’aujourd’hui, la gauche de la gauche n’offre pas d’alternative politique crédible à l’hégémonie du PS.
Dans le Parti socialiste, Laurent Fabius fera un score très faible, lors des primaires, beaucoup de partisans du « non » voteront utile dès les premier tour, pour battre la droite et empêcher une nouvelle catastrophe, comme en 2002.

Pourquoi Sarkozy a gagné en reprenant un discours républicain abandonné par la gauche

Il a su aborder frontalement des questions qu’un discours politiquement correct de gauche a longtemps étouffées.
Sur les salaires, la politique de rigueur mise en place en 1983 par Delors, ainsi que la montée du chômage de masse, avaient déjà constitué un coup d’arrêt à la progression du pouvoir d’achat. Mais à partir des années 1990, notamment sous l’impulsion de la deuxième gauche, on a commencé à théoriser la fin du travail, sous l’impulsion d’un chercheur économiste américain, Jérémy Rifkin, qui écrira un ouvrage sur ce thème, préfacé par Michel Rocard. La création du RMI s’inscrit dans cette démarche.
Dans une période de chômage de masse, avec la mondialisation libérale et la concurrence internationale, le salarié travaillant en France est considéré comme un privilégié devant faire des sacrifices pour garder son emploi.
Le discours de l’abbé Pierre, stigmatisant les fonctionnaires qui réclament des augmentations de salaires, s’inscrit dans cette logique.
Le salarié qui entend la gauche néo-libérale ne plus défendre les salaires, qui vit sous la peur d’une délocalisation, et qui écoute des organisations d’extrême gauche réclamer la régularisation de tous les sans-papiers, et la liberté d’installation en France, ne peut que se sentir abandonné.
Dans le même temps, la montée du Front national, spectaculaire dans des quartiers populaires, provoque, chez certains sociologues, des discours considérant que le peuple se lepénise, ce qui accentue leur mépris pour le monde du travail. Le film « Dupont Lajoie » montre l’image d’une France raciste et haineuse, nostalgique de son passé colonial. Pour contrer le discours du Front national, toute une partie de la gauche a cru bon longtemps de nier la montée de la délinquance juvénile (ce sera le fameux « sentiment » d’insécurité), puis de victimiser les délinquants, dans les quartiers, quand ils sont issus de l’immigration. Ils ne voient, dans la demande de sécurité des citoyens, que la seule influence des idées de Le Pen.
Autre exemple, l’Education nationale, depuis trente ans, est victime d’une lente dégradation. Certains pédagogistes ne considèrent plus que la transmission des savoirs soit essentielle. On a baissé le nombre d’heures de français et de calcul dans le primaire. Les mauvaises notes sont considérées comme une violence faite à l’enfant, les enseignants se voient progressivement dépossédés de toute autorité.
Le niveau d'orthographe devient catastrophique, et de plus en plus d'élèves arrivent en sixième en sachant à peine lire et compter (cela n’empêche pas qu’on attribue le bac à plus de 80 % d’élèves, dont certains auraient éliminés au certificat d’études du temps de nos parents). On est dans le culte de l’enfant au centre de son apprentissage !
La violence, longtemps niée, perturbe le quotidien dans trop d'écoles publiques. De plus en plus de parents, même ceux de gauche, contournent la carte scolaire, ou mettent leurs enfants dans l'école privée. Mais c’est un sujet tabou, officiellement, l’école publique va bien, les résultats du bac en attestent.
De même, tout débat sur l’immigration a longtemps été impossible à gauche, à cause de la progression du Front national. L'intégration républicaine, qui a permis qu'en France, un Français sur trois a un grand-parent issu de l'immigration, est considérée comme une forme de prolongation du colonialisme par des organisations communautaristes. Une grande partie de la gauche ferme les yeux sur la montée de l'islamisme, dont les premières victimes sont surtout les jeunes filles issues de l'immigration, mais aussi les jeunes garçons. On abandonne les principes égalitaires républicains, pourtant historiquement portés par la gauche, au détriment d’un droit à la différence qui va vite devenir une demande permanente de différence des droits. Plutôt que de mettre en avant ce qui rassemble et unit les citoyens, on privilégie les revendications communautaristes, qu’elles soient régionalistes, linguistique, ethniques ou religieuses. On brocarde des valeurs comme la Nation, la République et la laïcité, considérées comme ringardes et des obstacles à la construction européenne.
Les sifflets de « La Marseillaise », lors du match de football France-Algérie, à Saint-Denis, en 2001, sont totalement minimisés par une partie de la gauche, qui accentue le discours de la repentance, dont les communautaristes religieux savent remarquablement jouer.
Les émeutes de banlieue, en décembre 2005, rencontrent les mêmes ambiguïtés de la part d’une gauche que les citoyens ressentent plus prompte à dénoncer le ministre de l’Intérieur et la police, plutôt qu’à condamner ceux qui ont brûlé deux cent cinquante écoles, des entreprises, des voitures d’ouvriers ou de chômeurs, des bus, sans parler de l'agression mortelle de deux passants.
Pour le ministre de l’Intérieur et son gouvernement, en difficulté socialement, et qui ont subi une lourde défaite en 2004, ces émeutes sont politiquement une aubaine, en remettant au premier plan le problème – par ailleurs réel – de l’insécurité.
Sarkozy saura jouer le rôle de celui qui défend les habitants des classes populaires, contre les « racailles ». Certains, proches de la mouvance des « Indigènes de la République » verront dans ces révoltes la naissance d’une nouvelle avant-garde sonnant la révolte des quartiers, oubliant la lecture de Marx sur le lumpen-prolétariat.
Le chef de l’UMP a compris, un an avant les présidentielles, qu’il ne pourrait pas gagner en tenant un discours atlantiste, ultra-libéral, communautariste et anti-laïque. Il se met alors, sous les conseils d’Henri Guaino, qui devient sa plume, à évoquer Blum, Jaurès, la France qui se lève tôt, le monde du travail, une école où les enfants réapprennent les savoirs, le droit à la sécurité pour les plus pauvres, le respect de l’autorité, les salaires, le protectionnisme, s’oppose à un nouvel élargissement de l’Europe, et parle de la fierté de vivre dans un pays comme la France, etc. Un discours qui séduit les classes populaires, mais qu’il est souvent impossible de prononcer, à gauche, sans se faire traiter de populiste et de réac.
Il est donc facile à Sarkozy, qui tenait un discours sur la discrimination positive et vantait les modèles du modèle anglo-saxon, de prendre de court des adversaires qui n’ont tiré aucune leçon du séisme de 2002, et d’apparaître comme celui qui n’a pas peur de mettre les pieds dans le plat.
Cela ne signifie surtout pas que Sarkozy soit devenu un adepte de Jaurès, cela veut dire que, contrairement à une gauche souvent ambiguë avec le communautariste, il a compris qu’on ne pouvait pas gagner une élection, en France, deux ans après la victoire du non, sans tenir un discours républicain s’appuyant sur la Nation. Le ralliement, sincère, de Ségolène Royal à ces valeurs lui vaudra d'ailleurs des procès d'intention très violents, dans son propre camp.
Face à un Parti socialiste miné par des conflits internes, et une gauche de la gauche qui s'est durablement discréditée dans la multiplication de petites candidatures, le candidat de l’UMP, qui était en ordre de marche depuis cinq ans, s’est montré convaincant, déterminé, volontaire, et a su séduire des pans importants des classes populaires, qui, cette fois, n’ont plus eu envie de donner une nouvelle chance à l’opposition, ne sentant pas un projet alternatif crédible face au candidat de l’UMP. Il a infligé une défaite idéologique majeure à une gauche en perte de repères.
Comment expliquer que plus personne n’ose parler de nationalisation, par exemple pour l’eau ?
Comment expliquer que personne n’ose dire qu’aucune politique sociale ne sera possible, aujourd’hui, en France, en restant dans l’Union européenne, aujourd’hui forte de vingt-sept membres, et en acceptant les règles du libre-échange et la dictature d’une BCE privant tout Etat d’une politique monétaire indépendante ?
Pourtant, depuis trente ans, le peuple français est le symbole de la résistance au libéralisme, il est le mouton noir des libéraux de Bruxelles.
Il a depuis 1986, systématiquement redonné une chance à la gauche, après que la droite soit revenue au pouvoir.
Il a souvent voté à gauche, davantage par réflexe du moindre mal que par une franche adhésion au programme qu'on lui présentait.
Après les cinq années de Chirac, Raffarin et Villepin, entre 2002 à 2007, il a vraiment fallu que le fossé se creuse entre le peuple et sa gauche, pour que les électeurs ne redonnent pas une nouvelle chance à la gauche, et que la France se donne à Sarkozy. Pour regagner le peuple, on n’échappera pas à une reconstruction idéologique de toute la gauche. Sarkozy a compris les leçons de Gramsci, sur l’importance de la bataille des idées. Il a gagné cette bataille idéologique, à cause du flou et des ambiguïtés de notre camp sur un ensemble de questions clés. Salaires, services publics, protectionnisme, système de santé, Europe, Nation, énergie, retraites, régimes spéciaux, immigration, école, laïcité, environnement, sécurité, autant de questions où les discours officiels de la gauche sont inaudibles, et surtout décalées par rapport aux attentes populaires.
Trop souvent, les débats sur ces questions ont été rendus impossibles par le poids du « politiquement correct ». Vous réclamez du protectionnisme, vous êtes un affreux nationaliste ! Vous réclamez des services publics, vous êtes un nostalgique de l’Union soviétique. Vous réclamez de la sécurité, vous êtes un adepte de Le Pen ! Il n’est pas étonnant que la crise soit profonde et que de nombreux conflits éclatent, que cela soit au PS, au PC, chez les Verts, chez les radicaux, et dans des associations comme Attac. La seule opposition au libéralisme est nécessaire, mais n’est pas un axe suffisant. Il n’y a pas de projet politique possible pour les défenseurs de la République sociale avec des communautaristes ou avec des militants qui manifestent aux côtés de l’extrême droite islamiste.
Sarkozy a décomplexé la droite, il faut décomplexer la gauche, non par une fuite en avant maximaliste et gauchiste, ni par une diabolisation contre-productive de Sarkozy, mais par des réponses crédibles, qui montrent qu’une alternative républicaine et sociale est possible face à la politique que veut mettre en place le nouveau président de la République.
Il est temps d’appliquer les propos de Jaurès : « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques ».

Pierre Cassen

2 - Comment le traité Sarkozy enterre le « Non » français

Pendant toute la campagne présidentielle, Sarkozy a fait mine de vouloir respecter le Non français. Dans le débat d’entre deux tours, il ira même jusqu’à reprocher à Ségolène Royal de vouloir ramener la Constitution européenne en proposant de consulter à nouveau les Français par référendum. A l’inverse, son « mini-traité » ratifié par le Parlement était censé tourner la page de la Constitution. Le bal des puissants de l’Europe du Oui qui s’organise depuis quelques semaines autour de Sarkozy montre au contraire que ce changement de forme n’est là que pour maintenir le cap de fond d’une construction européenne libérale et anti-démocratique. Le traité Sarkozy est ainsi en train de s’intégrer utilement dans la stratégie de tous ceux qui veulent que l’Europe continue sur les mêmes rails. Une entourloupe que la gauche gagnerait à placer au cœur du débat des élections législatives.

La méthode Sarkozy pour contourner le non

« Ce soir, la France est de retour en Europe ». Personne n’a vraiment relevé la portée très ambiguë de ces déclarations de Sarkozy le soir de son élection. Vues depuis l’Europe du Oui, ne signifiaient-elles pas clairement que son élection allait marquer la fin de la « parenthèse » du Non français ouverte en 2005 ? Pour cela, Sarkozy fait comme si l’élection présidentielle avait représenté un deuxième vote européen des Français après celui du 29 mai 2005. Il affirme en effet carrément qu’il a obtenu du peuple français « un mandat pour négocier un traité qui sera ratifié par le Parlement». En votant pour lui, les Français auraient ainsi décidé d’abdiquer par avance leur droit de se prononcer sur un nouveau traité européen dont ils n’ont pourtant qu’une idée très floue. D’autant que la seule conclusion que Sarkozy prétend retenir du Non des Français est purement formelle. Peu importe le contenu, mais « cela ne peut pas être une Constitution, les Français ont dit non » (avec Barroso le 23 mai). Incroyable détournement du sens du vote du 29 mai qui fait comme si les Français avaient dit non ce jour-là au principe même d’une Constitution, sans se préoccuper du contenu politique du texte. Une fois de plus, Sarkozy est pris en flagrant délit de camouflage de tout ce qui pourrait le ramener au débat sur le libéralisme. Et en bon militant du Oui, Sarkozy ne manque pas de reprendre à propos de son traité simplifié la rhétorique de « la seule solution possible » (avec Barroso le 23 mai), pour mieux étouffer toute velléité de solution alternative.

Le traité simplifié : continuer la Constitution par d’autres moyens

L’activisme diplomatique de Sarkozy en direction des gouvernements des principaux pays du Oui (Allemagne, Espagne, Italie) et des chefs des institutions européennes (présidents de la Commission et du Parlement européen) vise à les persuader qu’ils peuvent conserver le fond libéral de leur projet pour l’Europe pour peu qu’ils acceptent d’en changer la forme en guise de concession de pure forme au Non français. Tous n’avaient pas saisi la manoeuvre et avaient même commencé, comme Prodi ou le président SPD de la Commission constitutionnelle du Parlement européen, à dénoncer le « mini-traité inacceptable ». Sarkozy était même désormais suspect de conversion aux arguments du non du fait de la tonalité très eurocritique de sa campagne électorale. Voyant le danger d’être incompris, Sarkozy a immédiatement envoyé les signaux nécessaires pour rassurer l’Europe du Oui. Le « mini-traité » est ainsi devenu subitement un « traité simplifié », formule qui a le mérite d’afficher une continuité avec le projet de constitution, qu’il n’est plus question de remplacer en tant que tel mais de « simplifier ». Même si très peu de commentateurs ont alors relevé ce glissement, les principaux intéressés ne s’y sont pas trompés et ont commencé à réviser leurs appréciations sur le projet de traité Sarkozy. L’Allemagne n’est plus opposée à un traité simplifié pourvu que la « substance » du traité constitutionnel soit préservée. Cela tombe bien, c’est exactement ce qu’explique dans le détail l’émissaire officieux envoyé par Sarkozy pendant la campagne, le député UMP Pierre Lequiller, qui explique que le traité Sarkozy vise à simplifier « sans perdre l’essence » du traité constitutionnel. L’Italie a aussi embrayé en saluant désormais la volonté de Sarkozy de « renforcer les institutions européennes » et de « conforter notre vision de l’Europe », autrement dit de continuer dans la même voie. Même son de cloche du côté du président du Parlement européen Hans Pöttering qui a désormais bon espoir qu’avec la proposition Sarkozy, le Conseil européen de juin puisse aboutir à « une solution marquée par la stabilité » (suite à sa rencontre avec Sarkozy le 22 mai 2007). Le message le plus clair est enfin venu de la Commission elle-même qui a confirmé par la bouche de son président Barroso (23 mai) que le projet Sarkozy était une bonne base pour aboutir à « une formule qui puisse répondre aux préoccupations qui sont les nôtres de sauvegarder beaucoup d'aspects de la substance du traité constitutionnel, et en même temps montrer que nous avons écouté les préoccupations de ceux qui n'ont pas voulu le traité ». Ajustement sur la forme et continuité sur le fond, les partisans du Oui n’ont donc pas renoncé à un seul de leurs objectifs initiaux, comme l’a d’ailleurs rappelé Barroso lui-même dans la suite de sa déclaration : « Nous soutenons les valeurs, les principes, l'acquis du traité constitutionnel. » Les stratèges du Oui sont même en train de réaliser que le projet Sarkozy de traité simplifié peut faire consensus avec les plus eurosceptiques des libéraux européens (Pologne, Royaume-Uni, République tchèque) dans la mesure où il sauve l’essentiel qui est leur plus petit dénominateur commun : le cours libéral de la construction européenne. Pour cela, la présidence allemande est en train d’inventer un système d’Europe à la carte dit « opt-in, opt-out », qui serait greffé sur le traité Sarkozy et permettrait des avancées optionnelles sur le modèle de l’Euro. Rien de tel, pour diluer encore plus l’Europe en un simple grand marché, aggraver l’impuissance publique européenne et empêcher tout essor d’une souveraineté populaire européenne.

Source

Pour La République Sociale (PRS)

3 - Impressions d’un jeune militant de gauche sortant d’une réunion publique

Cher Evariste,

Quelques lignes d’abord pour me présenter, puis je vous donnerai mon sentiment sur le spectacle peu encourageant dont j’ai été témoin en cette semaine de campagne législative.

J’ai 28 ans et j’ai longtemps été socialiste par hérédité. J’ai commencé à militer au PS en 2001, quand ma ville d’alors s’est éveillée de cinquante ans de règne communiste plus ou moins heureux pour tomber dans les bras de Jean-Christophe Lagarde, charmant centriste élu avec les voix (et le discours) du Front National. La section PS locale était à l’état de ruine, il y a avait du boulot pour les bonnes volontés. Boulot intéressant au plan local, décevant au niveau national, au point que quarante-huit heures avant le premier tour de la présidentielle de 2002 je ne savais pas pour qui voter de façon "naturelle".
Deux ou trois détails m’ont finalement fait opter pour Jospin. Puis, la claque que l’on sait. Puis, le grand n’importe quoi au PS pour les législatives, à tous les niveaux cette fois – les appétits s’étant réveillés localement, les momies ressortant des placards appâtées par la gloire illusoire du scrutin...
Bref, j’ai quitté le PS et me suis sevré d’action politique quelques temps. Temps mis à profit pour commencer de forger un minimum de culture politique au travers de lectures diverses.
J’ai suivi avec intérêt la naissance du MARS et de la Gauche Républicaine, j’ai un temps flirté avec le PCF du côté de chez Braouezec, j’ai fait ma petite campagne autour de moi contre le TCE, pris des contacts pour participer à ce qui me semblait un mouvement de fond à gauche. Puis je suis parti deux ans à l’étranger, laissant un peu tout ça en plan.

Je suis rentré il y a deux mois. Depuis un an, j’ai suivi avec beaucoup d’intérêt ce qui se passait à gauche du PS, et je suis devenu un lecteur assidu de votre journal. J’ai été fort dépité par le déroulement de la campagne, et bien sûr par le résultat. Je garde néanmoins comme beaucoup l’optimisme qu’il y a quelque chose à faire à gauche pour repartir sur de meilleures bases, et j’attendais avec impatience que les grandes déclarations de reconstruction (qu’on entend depuis 2002 au moins) se concrétisent en quelque chose à laquelle je pourrais apporter ma modeste contribution.
Aucun mouvement ne m’a pour l’instant suffisamment convaincu pour que je franchisse le pas et redevienne un militant actif, mais je penche de plus en plus fortement vers le MARS-GR. Penchais.

Aussi lorsqu’il y a une semaine j’ai reçu une invitation (via le PCF de l’Île Saint Denis qui continue à m’écrire alors que ça fait deux ans que je ne leur ai plus donné de nouvelle, ils doivent avoir du fric à gâcher encore au fond des tiroirs ; mais c’est une autre histoire...) à une réunion publique avec les candidates aux législatives pour ma circonscription, candidature unitaire PCF-MARS-GR-Altertrucbidule (n’y voyez aucune condescendance, juste un peu d’ironie face à un certain manque de lisibilité...), j’ai pensé que c’était une bonne occasion de prendre contact et d’aller voir quel était le projet porté par cette merveilleuse alliance.

Du beau monde était annoncé, Halphen, Autain, Braouezec (que je n’ai d’ailleurs pas vu). J’y suis allé plein de questions, j’en suis reparti avant la fin, lassé et sans réponse ou presque.

Pendant deux heures (sachant que la réunion a commencé avec quarante-cinq minutes de retard, le temps que tout le monde se dise bonsoir) j’ai écouté les intervenants (sur l’estrade et dans la salle) prêcher en terrain conquis. Nul ici n’avait besoin d’être convaincu que la politique de Nicolas Sarkozy serait foncièrement destructrice.

Prenant la parole au bout d’une heure, M. Halphen s’étonna de la froideur de la salle, réclamant de sentir que ses propos trouvaient de l’écho dans l’assistance. Peut-être tout simplement n’y avait-il pas d’écho parce que les discours sonnaient creux et sentaient le réchauffé...

Ce que j’aurais aimé entendre (et je ne suis probablement pas le seul, vu le nombre de personnes qui ont quitté la salle bien avant moi) ce sont des propositions concrètes, optimistes et volontaires sur l’avenir de "la gauche de la gauche". La candidature commune est séduisante, mais n’est-ce pas mettre la charrue avant les bœufs quand on ne sait pas clairement où doit nous porter cette initiative ?

Quel est le projet, ce fameux projet de société global appelé par Mme Autain ? Que se passera-t-il après les législatives, le soufflé retombera-t-il comme en 2005, ou bien nous approchons-nous peut-être enfin d’engagements durables à travailler ensemble à l’élaboration d’un programme réaliste – mais ambitieux ? Et à quelles échéances ?

Seules à esquisser un début de réponse ce soir-là : Mmes Ben Saida et Autain. Le reste ne fut que constats sur le passé, parfois lucides comme celui de M. Coquerel, mais déjà ressassés, et méthode Coué : « il faut reconstruire ! » Reconstruire, oui, mais dites-nous quoi, et comment !

Mon vote lors de ces législatives sera sans illusion : que le député de ma circonscription soit PS ou altertrucmachin ne pèsera guère, face aux 380 députés UMP qui soutiendront sans faille Sarkozy.
La résistance s’organisera, comme depuis cinq ans, comme depuis toujours me semble-t-il, dans les milieux associatifs, syndicaux (?) et dans la rue, sur le terrain.
Je ne néglige pas l’aspect médiatique, ni l’aspect financier, mais franchement, ils me paraissent assez dérisoire face aux machines des grands partis – d’autant que convaincre de nouveaux militants aussi, ça ramène quelque sou et ça élargit l’audience.
Bref, mon vote aura pour sens, s’il va à Mmes Dhalfa et Rouillon, un encouragement à donner forme à cette volonté de reconstruction à gauche.

Hélas après le verbiage dont j’ai été témoin mercredi dernier, sans même parler de l’organisation très verrouillée des débats (j’adore quand les gens font la réponse avant même de poser la question ; si l’on n’était pas "connu", hors de question d’avoir le micro ; et la seule personne de l’assistance à avoir un discours critique mais constructif s’est fait rembarrer... bref), je ne saurais dire où ira mon vote.

Il reste quelques semaines, j’espère que cela suffira pour qu’un peu plus de substance remplisse le discours de ces candidatures d’union, et que les incantations maintes fois répétées dans vos colonnes prennent enfin forme.

Notez, je l’avoue à peine honteux, que moi-même je ne fais pas grand’chose. Trop peur, encore, de m’égarer dans une voie sans issue ? Peut-être est-ce la même frilosité qui inhibe tous ces gens. Mais à quoi bon ces incantations alors ?

Amicalement,

Iyhel

 

Réponse d’Evariste. Ce courrier d’un de nos lecteurs illustre le désarroi de toute une partie de l’électorat de gauche devant la défaite idéologique, comme l’a fort justement dit Jean-Luc Mélenchon, subie par la gauche, toute la gauche, lors de cette élection. Nous ne sommes pas certains, à vous lire, que la cohabitation de militants de la gauche républicaine, comme Mars et la Gauche républicaine, avec une militante des « Indigènes de la République », comme Halima Ben Sadia, et une sympathisante, comme Clémentine Autain, soit de nature à permettre la construction de l’alternative républicaine et sociale que nous appelons de nos voeux.

Iyhel

4 - La crise de l'assurance maladie est avant tout une crise sanitaire

Avec ses propositions d'instauration d'une TVA sociale et d'un système de franchises, le candidat Sarkozy a le mérite de faire de l'assurance maladie une question majeure. Les derniers chiffres du déficit sur 2006 (5,9 milliards d'euros) montrent l'échec de la réforme de 2004, annoncée pourtant comme devant permettre le retour de l'équilibre en 2007. Ils vont s'ajouter à la dette déjà accumulée de 102 milliards et dont le remboursement est aujourd'hui renvoyé sur les générations futures (jusqu'à 2024).

Cette situation jamais vue d'un système de protection sociale finançant à crédit son fonctionnement montre l'impasse dans laquelle nous sommes et l'urgence de changer de logique. Mais on observera que le président Sarkozy ne veut pas changer véritablement de logique. La TVA sociale mettrait un terme au mode de financement actuel basé sur la CSG et les cotisations sociales patronales. Quant aux franchises, elles seraient fixées en fonction des déficits. Dans les deux cas, c'est le consommateur et l'assuré, c'est-à-dire le citoyen, qui paiera. Là est la /«nouveauté» /: un nouvel allègement de charges pour le patronat... En aucun cas, l'objectif n'est de maîtriser les dépenses de santé. En jugeant au contraire leur accroissement inéluctable à cause du vieillissement et du coût du progrès médical, Nicolas Sarkozy exprime, sans surprise, une convergence de vue avec l'industrie pharmaceutique qui mène campagne pour une augmentation de ces dépenses à + 2 % au-dessus du PIB.
Cette analyse a sous-tendu les politiques de tous les gouvernements depuis trente ans. Elle ne prend pas en compte le véritable caractère de la crise, qui est avant tout sanitaire. Les faits sont pourtant patents comme l'OMS Europe l'a affirmé dans sa déclaration de septembre 2006 sur l'épidémie de maladies chroniques : avec 86 % des causes de décès et 77 % des causes de morbidité, les maladies chroniques mettent en péril les systèmes d'assurance maladie. Cela se traduit en France par l'explosion des affections de longue durée (ALD) : + 73 % en dix ans. 85 % des dépenses en ALD viennent de quatre groupes de maladies : maladies cardio-vasculaires, cancer, diabète et affections mentales. Les 12 % de la population reconnus en ALD représentent 60 % des dépenses, et ce poids va croissant puisque 77 % des dépenses nouvelles de santé en 2004 sont dues aux nouvelles ALD. A contrario, si nous avions le même taux d'ALD qu'il y a dix ans, l'assurance maladie serait largement excédentaire !
Face à ces épidémies modernes, notre système de santé est dans une relative impuissance parce qu'il est organisé sur le soin, et laisse la prévention à la marge du système. L'OMS estime pourtant que 80 % des maladies cardio-vasculaires et du diabète de type 2 (celui dû à l'obésité), 40 % des cancers pourraient être évités par une action sur les causes, c'est-à-dire notre mode de vie et de travail, l'alimentation et les pollutions. Qui peut croire sérieusement que c'est le nouveau médicament de Sanofi-Aventis qui va arrêter l'épidémie d'obésité ? C'est plus sûrement une action sur la malbouffe et sur la sédentarité, c'est-à-dire une action sur l'alimentation et l'éducation, qui peut la stopper. De même, c'est principalement l'élimination des cancérogènes de notre environnement, notamment à la suite du règlement européen Reach, qui arrêtera l'épidémie de cancer, plutôt que le développement des chimiothérapies.
Le projet de la droite ne résout aucun problème, ni économique ni sanitaire. Au contraire, il ne fera que les amplifier pour justifier de passer le témoin à l'assurance privée. C'est l'argument qui a été utilisé dans un pays comme les Pays-Bas pour mettre fin en janvier 2006 à un système de caisses d'assurance maladie proche de celui de la France, et on peut penser que c'est l'aboutissement du projet du président Sarkozy. L'avenir de l'assurance maladie est bien un enjeu majeur de cette élection.

André Cicolella président de la commission santé des Verts.
Auteur du Défi des épidémies modernes. Comment sauver la Sécu en changeant le système de santé, éditions La Découverte.

5 - Voulons-nous un système de santé à l’américaine ?

Un peu inquiet, la main endolorie, l’homme attend le diagnostic du médecin. C’est en fait un devis que celui-ci lui propose, car son patient, pardon son client, souffre de fractures à deux de ses doigts. Le prix de la « réparation » sera donc évolutif, suivant les soins prodigués. Or l’accidenté n’a pas les moyens de se faire traiter les deux doigts, et il l’annonce au praticien. Le médecin pose alors cette question à peine croyable : « Quel doigt voulez-vous que je vous soigne ? »

Cette scène est tirée du dernier film de Michael Moore, consacré au système de santé américain. Plusieurs chaînes de télévision en ont parlé. Est-ce vers cette médecine à deux vitesses que la France se dirige ? On peut le craindre, car la dérive libérale est chez nous bien amorcée.
Et nous ne manquons pas d’exemple dans le sud 77 avec les 2 projets de partenariat public-privé des centres hospitaliers de Melun et Fontainebleau.
En effet le projet du futur hôpital de Melun répond à la politique de la droite en matière de santé. Il prévoit une répartition minutieuse qui donne au privé la chirurgie, la cardiologie, la propriété du bloc opératoire, bref toutes les activités les plus lucratives et laisse au public la psychiatrie, le long séjour, la maternité, tout ce qui est jugé coûteux.

Le projet de l’hôpital de Fontainebleau est moins avancé, mais il s’inscrit dans la même démarche Déjà on a fermé l’activité chirurgicale de l’hôpital de Nemours pour la transférer à Fontainebleau. On peut fortement redouter que cette réduction des activités de l’hospitalisation publique ne se traduise là aussi par des fermetures totales au bénéfice du privé. Il s’agit d’une profonde remise en cause du principe même de service public de santé.

Alors que, les dépassements d’honoraires pratiqués dans les structures privées entraînent l’exclusion d’une partie de la population. Au fil du temps, lorsque l’offre publique de soins comme la chirurgie aura définitivement disparue, ces pratiques s’amplifieront. Il faudra montrer carte bleue pour être soigné ! Pourtant, des moyens existent pour financer les hôpitaux publics, par exemple : il faut en finir avec les exonérations de cotisations patronales, qui représentent 23 milliards d’euros par an, et supprimer la taxe sur les salaires pour les hôpitaux publics.

Le projet de l’Hôpital de Melun doit rentrer au plus vite dans sa phase de réalisation, on a trop tergiversé. Pour autant, nous affirmons que l’accès réel à des soins de qualité pour tous suppose que le Centre Hospitalier de Melun, 1er établissement de santé publique du sud 77, dispose d’un plateau technique de chirurgie performant et soit en capacité de développer dans tous les domaines (médecine, chirurgie, obstétrique…) les réponses à vos besoins de santé et de prévention.

Source

Pierre Carassus Maire de Vaux–le-Pénil

4 - combat laïque

1 - Un débat sur le christianisme sur France 3 avec un collaborateur de Respublica

Ce lundi de Pentecôte, notre collaborateur Jocelyn Bézecourt, auteur, avec Gérard da Silva, du livre « Contre Benoit XVI, le Vatican ennemi des libertés » était invité à l’émission de France 3 « Ce soir ou jamais », animée par Frédéric Taddéi. Le thème de l’émission était « Etre chrétien au 21e siècle ». Etaient présents sur le plateau, outre Jocelyn, Henri Pena Ruiz, Caroline Fourest, Jean-Claude Guillebaud, ancien journaliste du « Monde » récemment revenu au christianisme, Frédéric Lenoir, directeur du « Monde des religions », et Christophe Geffroy, qui défend des positions plus fondamentalistes de l’Eglise catholique.

On vit surtout, lors de ce débat, la différence entre les croyants laïques et les intégristes qui veulent imposer leur point de vue à l’ensemble de la société.
Il est vrai que les propos de Christophe Geffroy étaient sans ambiguïté. Remise en cause de la liberté d’expression dès que les croyants se sentent insultés, avortement comparé à un génocide, condamnation de l’homosexualité, il y avait tout le discours traditionnel des intégristes qui veulent imposer leur foi et leur pratique à l’ensemble de la société. Jocelyn fit remarquer que la position de l’Eglise catholique, qui parle de droit sacré de la vie, pouvait provoquer la mort de la mère et il a évoqué les propos suivants de Joseph Ratzinger : « Quand l'utérus (par exemple à cause de césariennes précédentes) se trouve dans un tel état que, bien qu'il ne constitue pas en lui-même un danger actuel pour la vie ou la santé de la femme, l'on prévoit qu'il ne sera plus capable de porter à terme une future grossesse sans danger pour la mère, danger qui pourrait s'avérer assez grave dans certains cas, est-il licite de l'enlever (hystérectomie) pour prévenir cet éventuel danger futur provenant d'une conception? ». A cette question, et Geffroy assuma cette position, l’église catholique dit encore aujourd’hui : « non », préférant créer les conditions de la mort probable de la mère.

Tout au long du débat, Guillebaud et Lenoir se différencièrent clairement de l’intégriste, et défendirent les principes laïques et la séparation du politique et du religieux. Guillebaud fut par ailleurs irritant, interrompant sans arrêt ses interlocuteurs, pour montrer l’étendue de son savoir. Lenoir fit une comparaison intéressante entre le discours des catholiques et celui des évangéliques, montrant que les premiers promettent le bonheur pour la suite de la vie, alors que les seconds, autour d’un discours de combat, le promettent déjà sur terre.

Henri Pena Ruiz sut mettre en avant les principes laïques, avec, comme il sait le faire, de remarquables citations. Il signala le rôle réactionnaire de l’Eglise catholique en Pologne et en Espagne, actuellement.

Caroline Fourest sut décortiquer certains aspects du discours de Benoit XVI, notamment l’hypocrisie qui consiste à condamner les prêtres qui font de la politique quand il s’agit de la théologie de la libération, tout en démontrant que les fondements du discours du Vatican sont profondément politiques et réactionnaires.

A l’arrivée, le constat était assez clair. Le clivage principal ne se situait pas entre le fait de croire ou pas, mais bien entre les laïques, qui tiennent à la séparation du religieux et du politique, et les cléricaux qui, tel Christophe Geffroy, entendent imposer leurs principes à l’ensemble de la société.

Cela n’empêche pas, et on peut faire confiance à notre ami Jocelyn, que les laïques doivent continuer à se battre pour la libre critique de toutes les religions, sous toutes les formes scientifiques, humanistes et artistiques.

Pierre Cassen

2 - Laïcité : vigilance accrue

Prier relèverait-il de l’initiative publique ?
Croire en une divinité imposerait-il à l’autorité publique l’obligation d’ériger le lieu de l’affirmation de la croyance ?
La religion deviendrait-elle un service public au même titre que l’éducation ou la santé, et obligerait-elle l’Etat républicain à considérer le croyant en lieu et place du citoyen ?

C’est ce qu’on est en droit de se demander quand on lit, sur le site www.saphirnews.com, l’interview d’un obscur chercheur obscurantiste du CNRS ( qui sévit également à l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix en Provence) – un certain Frank Frégosi - qui demande aux musulmans de ce pays d’agir avec force pour obtenir « la révision du droit commun en matière de financement des activités cultuelles » (à l’instar de ce que préconisait le rapport « Machelon » que même le candidat Sarkozy avait enterré…), pour obtenir l’argent des contribuables (de tous les contribuables) nécessaire à la construction de leurs mosquées (et autres écoles coraniques).

La tentative n’est pas nouvelle, et, si la période électorale que nous connaissons laisse pendante cette question, on peut être sûr qu’il y aura un déferlement de projets constructifs cultuels (islamiques ou autres) dès l’approche des municipales, l’épouvantail du vote « communautariste » ( musulman en particulier) sera alors appelé à la rescousse par tous ceux qui y auront intérêt…comme par tous ceux qui cultivent l’image saugrenue et exagérée de « l’islam des caves et garages » à des fins prosélytes…Une population de 4% de français de religion musulmane, dont un quart à peine pratique , ne requiert pas les besoins cruciaux dont on voudrait nous persuader : dans les Pyrénées Orientales, 20 000 musulmans ( dont 10 % de pratiquants) disposent de 10 mosquées dont « une grande » de 1200 places….(AFP du 8 /12 /06 )

Il faut le dire et le redire : la religion n’est pas un service public, la République « connaît » les religions mais ne les reconnaît pas, l’article 2 de la loi de 1905 est intangible et non négociable, l’argent de tous n’a pas à satisfaire les supposés besoins de certains, et la ressource publique est destinée à la construction des écoles, des centres de santé, des logements, des espaces sportifs… au soutien de l’emploi, de la culture…à la sécurité collective et à l’exercice de la justice…et non à permettre la constructions de mosquées (même affublées d’un masque culturel…), d’églises, de temples (solaires ou évangéliques), de pagodes et autres synagogues, de maisons de la « pensée libre »ou de « palladium(s) » de l’athéisme !!!

Il faut le dire et le redire. Aussi reprendrai-je ici ce que j’écrivais dans le numéro 535 de « Respublica » : « , depuis le 01 /01 /1906 , le problème des constructions des lieux de culte est résolu au point qu’aujourd’hui, on peut en tracer le processus : création d’une association spécifique, acquisition d’un terrain dans un espace prévu au plan d’urbanisme local, montage d’un dossier de permis de construire conforme à le loi générale en vigueur, élaboration d’un cahier des charges organisant légalement le fonctionnement de la structure, plan privé de financement ( avec contrôle des capitaux éventuellement) , gestion de l’ensemble ainsi créé dans le respect de l’ordre public…Rien dans la loi générale ne s’oppose à ce qu’un culte érige un lieu dévolu à son seul bénéfice et assis sur ses seules ressources : c’est cela « connaître » les cultes, et « assurer la liberté des cultes » , chacun dans son domaine propre d’intervention , l’Etat chez lui , « l’Eglise » chez elle…

Il faut le dire et le redire : la religion musulmane a trouvé en France un pays déjà constitué, avec une Histoire, des valeurs, des modes d’organisation et de fonctionnement politiques, sociétaux, individuels, des infrastructures de toutes sortes , dans lesquels elle doit se couler sans vouloir les distordre à sa façon (et, à fortiori, les détruire), auxquels elle doit s’adapter sans vouloir y substituer ses propres lois, notamment pour ce qui est de l’assise laïque (et de la loi de 1905 qui l’institutionnalise) de notre société… laïcité qui lui permet d’organiser son culte, de le pratiquer en toute liberté et en toute sécurité dans le respect de la loi générale et dans des lieux qu’elle construit avec ses financements propres – garantie première de l’autonomie de la religion face à l’Etat Républicain. Tout autre comportement, toute autre revendication relèveraient d’une propension au communautarisme religieux…

Tout récemment, à propos des projets de construction de mosquées à Marseille et à Montreuil, les Tribunaux Administratifs , dans leurs décisions, ont montré combien la loi de 1905 était une garantie pour maintenir l’espace laïque républicain… désignant par là le terrain que les défenseurs de la laïcité se doivent d’occuper : celui du juridique, en portant systématiquement devant la justice les textes et délibérations des conseils municipaux et des maires quand ils ne respectent pas la loi organique. Sans cesser d’occuper le terrain du politique où il convient de lutter pour amener ceux qui veulent diriger à quelque niveau que ce soit à défendre les textes fondamentaux de la laïcité…et à en tenir compte dans leurs décisions !

« L’Observatoire Permanent de la Laïcité », en cours de constitution à Marseille à l’initiative d’une dizaine d’associations de défense de la laïcité, a pris en compte cette double fonction dans ses projets d’actions et va mettre en place les moyens de la réaliser… La structure « souple » des « Laïques en Réseau » pourra s’insérer dans cette démarche pour y donner une ampleur nationale …Ainsi se précise la création d’un « pôle » juridique mis à la disposition de toutes les structures de défense de la laïcité afin qu’elles puissent agir de conserve et en permanence contre les atteintes à la loi de 1905 en utilisant un terrain sur lequel elles manquent de présence…

Pour défendre et promouvoir la laïcité, beaucoup est à faire…Faisons-le ensemble !
Nombreux et divers sont les adversaires de la laïcité…Affrontons-les unis !

Robert Albarèdes Comité pour le Laïcité et la Démocratie

3 - Les islamistes et nous

Plutôt que de résumer mon livre, je vais situer la question politique qui nous concerne directement. Par « nous », j’entends tous ceux qui adhèrent au principe de séparation de la société civile et de la société religieuse : peu importe qu’ils soient des athées ; des croyants qui refusent d’être réduits à leur appartenance religieuse ; ou des individus indifférents à leur groupe religieux de naissance. Peu importe aussi, qu’ils soient Français, Algériens, Syriens ou Indiens, car je ne parle pas d’un problème français ou européen, mais d’un problème politique quasi-planétaire, présent là où militent des islamistes.

Je sais bien que l’emploi de ce mot est souvent critiqué, notamment à gauche. Combien de fois n’a-t-on pas lu que « islamiste » est un terme d’insulte raciste, destiné à stigmatiser les populations issues de l’immigration. A part les terroristes - les adeptes du jihad -, nous dit-on, il n’existerait aucun « islamiste ». Dans cette vision des choses, les populations issues de l’immigration sont, en tout et pour tout, des « Indigènes de la République », des victimes de la colonisation, de l’impérialisme et du racisme.
Reste qu’il existe des individus, des groupes et des mouvements qui se désignent eux-mêmes comme « islamistes » ou « salafistes » (adeptes du retour aux premiers temps de l’islam), qui affichent des programmes politiques et qui les mettent en œuvre. Qu’ils puissent être, par ailleurs, anti-impérialistes comme la plupart d’entre nous n’abolit pas la différence : eux sont salafistes ou islamistes, pas nous.
Par islamistes, j’entends ceux des musulmans fondamentalistes pour qui l’islam constitue une doctrine indissolublement religieuse et politique, une doctrine dont les impératifs absolus priment ceux de l’Etat et les droits des citoyens. Nous, gens de gauche, ne sommes les fondamentalistes d’aucune religion ; et, quel que soit le mépris dans lequel certains d’entre nous tiennent les idéaux et les institutions démocratiques, il ne nous viendrait pas à l’idée de leur redonner force en les soumettant à un absolu religieux.
Parmi ces islamistes, il y en a qui ont opté pour la terreur systématique contre tout « impie » - qu’il soit chrétien ou musulman - pour réaliser leurs objectifs politiques : je les appelle « jihadistes ».

Deux précisions.

D’une part, un musulman peut être fondamentaliste sans être islamiste. Il peut considérer, par exemple, que le retour aux fondamentaux de l’islam, tel qu’il l’envisage, peut se faire dans le cadre des lois françaises. Certes, il est réactionnaire : il réprouve l’ampleur du droit à la liberté d’expression, le libéralisme des lois sur l’égalité des sexes et des sexualités, il condamne l’étroitesse des lois de laïcité… Mais, pour autant que ce musulman-là s’engage dans une action politique (car il en existe de réactionnaires et de dépolitisés), il l’inscrira dans le cadre de la démocratie parlementaire. J’en montre un exemple dans mon livre, l’imam Fethi Alev.
D’autre part, un islamiste peut n’être pas un jihadiste : il peut partager avec lui l’exigence d’un retour aux fondamentaux de l’islam, mais rejeter sa stratégie politique, la terreur.
Les islamistes dont il est question dans Comment produire une crise mondiale avec douze petits dessins ne sont pas jihadistes, mais ils ne sont pas pour autant des « modérés » ou des « démocrates » : tous sont violents, plus ou moins selon les nécessités du moment. Ce n’est pas être raciste que de dire ceci. Quand des attentats terroristes se produisent - 2001, aux USA ; 2004, à Madrid ; 2005, l’assassinat de Theo van Gogh à Amsterdam ; 2005, les attentats de Londres –, il est normal que la presse interroge les islamistes : car ils ont toujours affiché un projet politico-religieux analogue à celui des groupes jihadistes. Ce n’est pas suspecter leur qualité de citoyens de plein droit que d’interroger la vigueur et la sincérité de leur rejet du terrorisme : par exemple, en comparant ce qu’ils en disent dans la presse danoise, sur les sites web, dans les mosquées, dans les réunions publiques, dans les médias arabes à l’étranger…

De même, il est normal qu’on vérifie si la violence et l’intimidation physique sont vraiment absentes de leur action dans le milieu de leurs adeptes potentiels - ceux qu’ils déclarent être des « musulmans », et dont ils se proclament les leaders naturels ;
normal qu’on examine s’ils utilisent seulement la persuasion pour que les habitants du quartier se conforment à leur idéal politico-religieux ;
normal qu’on vérifie si les femmes, les homosexuels, les athées, les agnostiques, les buveurs, les fêtards, les musiciens… sont libres d’afficher des choix différents.
Pour ce qui concerne les islamistes de mon livre, la réponse à ces questions est clairement non. Dire qu’ils sont des « islamistes modérés » du seul fait qu’ils répudient l’impératif d’élimination systématique des « impies » est carrément léger.

Intervention à Marseille, librairie Paidos, le 10 mai 2007

Jeanne Favret-Saada chercheur en anthropologie. Elle vient de publier un livre sur l'affaire « des caricatures de Mahomet » : Comment produire une crise mondiale avec douze petits dessins, Paris, 2007, Les Prairies ordinaires.

4 - Pétition en Belgique : La place des convictions philosophiques à l’école

Parce qu’une question comme celle du port de signes religieux à l’école, qui concerne la manière dont se conçoit l’enseignement bénéficiant de subsides publics, ne peut être laissée à la responsabilité exclusive des chefs d’établissements ;
parce que des questions telles que la place des convictions philosophiques au sein de l’école ou l’application des principes de mixité sociale et des sexes – notamment l’égalité en droits et en devoirs des hommes et des femmes – constituent des questions politiques essentielles qui doivent être tranchées par la puissance publique et le pouvoir politique, garants des valeurs fondatrices de notre société ;
parce que laisser les écoles décider souverainement en la matière, c’est contribuer au renforcement de la dualisation de l’enseignement au nom de la coexistence de projets éducatifs contrastés ;
parce que les établissements bénéficiant de subsides publics n’ont pas à s’organiser en fonction de prescrits, dogmes et autres interdits présentés à tort ou à raison comme religieux, sous peine de voir leur mission première gravement compromise ;
parce que nous voulons qu’à l’école au moins, les jeunes, garçons et filles, aient la possibilité d’expérimenter l’égalité et la mixité dans toute leur richesse émancipatrice ;
parce que l’enfant et l’adolescent sont des consciences en cours d’élaboration qu’il importe de protéger contre toute forme d’endoctrinement ;
parce que l’interdiction des signes ostensibles d’appartenance philosophique ou religieuse à l’école ne dénie en rien aux jeunes le droit à des convictions philosophiques, mais les invite à leur intériorisation et à leur dépassement en vue de s’ouvrir à l’universel de la connaissance ;
parce que nous constatons que de plus en plus de revendications religieuses ou présentées comme telles s’introduisent dans l’espace pédagogique : créationnisme, refus de la mixité, prescrits alimentaires, contestation des contenus mêmes de certains cours (biologie, éducation sexuelle, éducation physique, littérature, etc.) :
nous demandons aux responsables politiques et aux ministres compétents en matière d’enseignement de légiférer dans le sens de l’interdiction de tout signe ostensible d’appartenance philosophique ou religieuse dans le cadre scolaire, pour les élèves et a fortiori pour les enseignants, et ce dans tous les établissements scolaires bénéficiant de subsides publics ;
de mettre tout en œuvre pour préserver l’école des tentatives d’immixtion du religieux dans les décisions concernant le contenu des enseignements et les critères d'organisation de la vie scolaire, partant du principe que la méthode scientifique et le libre examen doivent continuer à y prévaloir sur tout dogmatisme ou vérité révélée.

Pour cosigner cette pétition, envoyez-nous un mail à ecolereligion@hotmail.com

Source

Ecoleetreligion

5 - combat féministe

1 - Religions, fondamentalismes et Femmes

Comment les hommes utilisent-ils les religions pour posséder le corps et l’esprit des femmes?

Construction de la hiérarchie patriarcale

Partout, dans l’espace et dans le temps, on observe les rapports de hiérarchie patriarcale et d’assujettissement des femmes.

Les religions depuis les origines de l’humanité ont mis en place la hiérarchie hommes/femmes. Pour que la race des hommes se perpétue, les hommes doivent s’approprier une femme qui leur donnera des fils. Le culte aux aïeux servira de prétexte pour contrôler que leurs fils soient bien les leurs.

Les philosophes grecs ont théorisé l’infériorité des femmes, le droit romain l’a légalisé. Mais cette subordination ne se constate pas seulement dans le monde méditerranéen.

Traditions et religions ont « expliqué » les incapacités des femmes en faisant appel à la Nature en interprétant des faits biologiques (sang menstruel, désir charnel). A partir des notions de pur et d’impur, découlent celles de licite et de l’illicite, du permis et de l’interdit.

Les femmes vont être dans le même temps intellectuellement stérilisées par une masse d’obligations ridicules et tatillonnes (interdits alimentaires, tâches domestiques ritualisées, etc. ;).

Emancipation des femmes

Des hommes et des femmes ont dénoncé cette sujétion, de manière singulière d’abord puis collective.

2 grands courants fondateurs de l’émancipation des femmes :

C’est par les revendications de disposer librement de leur corps, d’avoir la maîtrise de leur désir d’enfant que les femmes vont s’affranchir du poids des religions. Au milieu du xx° siècle, l’avancée des droits des femmes était visible dans tous les pays du monde.

Instrumentalisation des religions par les régressifs

La maitrise par les femmes de leur désir d’enfants, de leur autonomie financière, de leur corps et leur esprit a paniqué les machocrates qui ont appelé à leur secours les religions.

Les fondamentalismes religieux, ou prétendu tels, considèrent l’émancipation de la femme comme la cause de tous les fléaux de la société, maux qui disparaîtraient si l’on revenait aux conceptions théocratiques patriarcales de domination des hommes et à l’acceptation par les femmes de leur soumission.
Bouddhistes, catholiques intégristes, hindouistes, islamistes, juifs orthodoxes, protestants fondamentalistes, sectes même objectif : maintenir les femmes dans leurs obligations : reproduction de la famille et gratification sexuelle du mari. Les tenants de l’islam politique vont, en plus de la peur de l’autonomie des femmes, utiliser la haine de l’Occident pour obtenir l’asservissement volontaire des femmes.

Tous vont tenter de convaincre les femmes de revenir aux modes de vie antérieurs, la soumission à dieu se matérialisant sur terre par la soumission aux hommes. Ils vont utiliser pour cela toute la gamme qui va des discriminations aux violences symboliques, psychologiques et physiques.

Tentatives de régression sur les droits à la contraception, à l’Interruption volontaire de grossesse, à la procréation assistée, se multiplient, soit par des lois contraires aux droits des femmes, soit de manière insidieuse et sournoise.

Conditionnement des enfants par l’éducation familiale, dès le plus jeune âge, pour intégrer la subordination des filles et l’obligation de virilité agressive des garçons. Les fillettes sont préparées à une servitude qu’elles penseront volontaire, à être séparées du reste de la société, des hommes, mais aussi des femmes qui n’ont pas la même pratique religieuse. Au non-accès des filles au droit commun s’ajoute un risque de fragmentation de la société.

Divorce, garde d’enfants, etc.

Conclusion

Préconisations du Conseil de l’Europe du 4 octobre 2005 : « Garantir la séparation nécessaire entre les églises et l’Etat pour que les femmes ne soient pas soumises à des politiques et à des lois inspirées de la religion (par exemple dans le domaine de la famille, du divorce et des lois contre l’avortement) » article 7.3.

Ne pas être dupe ni complice du discours englobant, négation de l’autonomie de l’individu, des fondamentalistes religieux. Pour cela :

  1. Affirmer les principes universels d’égale dignité des hommes et des femmes.
  2. Toutes les femmes et jeunes filles dans un pays ont les mêmes droits. Refuser toute justification religieuse d’atteinte aux droits des femmes.
  3. Ne pas s’enfermer dans des discussions sur les interprétations des textes religieux, dans l’exégèse, mais rester dans le domaine du droit positif.
  4. Dénoncer l’argument du relativisme culturel qui permet aux fondamentalistes religieux d’opprimer leurs coreligionnaires, à commencer par les femmes.

TOUTES LES FEMMES DOIVENT AVOIR ACCES AUX DROITS FONDAMENTAUX UNIVERSELS DE LA PERSONNE HUMAINE.

Séminaire organisé par le Lobby européen des femmes et Deutschen Frauenrat
18 mai 2007, à Potsdam

Source

Michèle Vianès Présidente de Regards de Femmes
Auteur de " Un voile sur la République " Stock, et " Les islamistes en manoeuvre Silence, on manipule "
Editions Hors Commerce

6 - Energies

1 - L'urgence énergétique (VI-1): Scénarios énergétiques

Le 6ème et dernier volet de cette étude nous amène au coeur des questions énergétiques actuelles: l'humanité est-elle en passe de changer profondément et irréversiblement le climat ou son action est-elle négligeable à l'échelle géologique? A-t-elle les moyens de répondre aux besoins de son développement pérenne et équitable sans remettre en cause sa propre existence? A-t-elle le temps de mettre en place des mesures énergétiques raisonnables et acceptables à court terme pour préparer les stratégies énergétiques à long terme compatible avec le principe de précaution climatique et écologique? Quels axes faut-il privilégier dès maintenant pour une politique énergétique efficace en France et en Europe?

Unités employées : taux de carbone dans le CO2 : 27,3% (1 tonne C = 3,7 tonnes CO2; 1 Gt = 1 gigatonne)

1. Réalité du changement climatique

1.1. La dérive des gaz à effet de serre

En 1900, l'humanité rejetait environ 1 milliard de tonnes de carbone par an (1 GtC/an) dans l'atmosphère, essentiellement sous forme de CO2. Depuis, ses rejets se sont accrus chaque année de 1,1% par an pour atteindre 8 GtC/an (29,3 Gt CO2 /an) dont 6,4 GtC/an produites directement par les activités humaines et 1,6 GtC/an produites par déforestation 1.
La biosphère (végétation continentale, océans) n'en absorbe que 56%, d'où une accumulation annuelle de plus de 12,8 milliards de tonnes de CO2 dans l'atmosphère (3,5 GtC/an).
Mais cette tendance s'accélère dangereusement du fait de la pollution des pays émergeants comme la Chine et l'Inde 2: depuis l'année 2000, l'augmentation des rejets de CO2 atteint le taux de 3,3% par an, avec des rejets annuels de 34,5 milliards de tonnes de CO2 par an (9,4 GtC/an), ce qui dépasse les prévisions les plus pessimistes des scénarios du GIEC-IPPC 3 qui estimait les rejets annuels de CO2 à 32,3 GtCO2/an (8,8 GtC/an) en 2005 et prévoyait 57,2 GtCO2/an (15,6 GtC/an) en 2050 si rien ne change dans la politique mondiale: les prévisions du GIEC sur l'avenir du climat à l'horizon du siècle apparaissent aujourd'hui déjà trop modérées et risquent d'être largement débordées par la réalité.
La Chine (11,7% des rejets mondiaux en 2004), qui talonnait les États-Unis (21,9%) et dépassait déjà l'Union Européenne (15,2%), est devenue le premier émetteur mondial de CO2 en 2007 d'après l'AIE (Agence Internationale de l'Énergie). Quand on rapporte ces rejets à la population, on ne peut qu'être inquiet de la suite des événements: la Chine (1,01 tC/hab) et surtout l'Inde (0,28 tC/hab) sont encore très loin d'atteindre les USA (5,48 tC/hab) ou l'UE (2,56 tC/hab)!
L'accumulation du CO2 dans l'atmosphère a fait passer sa concentration dans l'air (troposphère) de 280 ppm (1 partie par million = 0,0001%) en 1850 avant l'ère industrielle à 380 ppm aujourd'hui, et elle pourrait atteindre entre 790 et 1000 ppm en 2100 d'après les simulations numériques des équipes scientifiques internationales si l'on poursuit le développement actuel (scénario « business as usual »).
Autre gaz à effet de serre, le méthane CH4 produit par l'agriculture (fermentations) pose un sérieux problème: si sa durée de vie atmosphérique (12 à 18 ans) est plus courte que celle du CO2 (120 ans), il absorbe 48 à 90 fois plus que le CO2 le rayonnement infrarouge terrestre sur les 20 premières années, et 20 à 43 fois plus sur un siècle! C'est peu dire que la brutale augmentation de sa concentration dans l'air de 715 ppb (1 partie par milliard = 0,001 ppm) en 1850 à 1774 ppb en 2005 a un impact significatif dans l'effet de serre d'origine anthropique (environ 16%)...
Le protoxyde d'azote N2O, directement produit par l'élevage et la riziculture, mais aussi par la décomposition des engrais et certaines combustions industrielles, présente quant à lui un temps de séjour atmosphérique de 121 ans et un effet de serre 290 fois supérieur à celui du CO2 sur 20 ans (330 fois sur 100 ans). Sa concentration est passée de 270 ppb en 1850 à 319 ppb en 2005 (5% de l'effet de serre anthropique).
Les halocarbures (comme les fameux CFC, HFC, HCFC, utilisés comme fluides réfrigérants ou extincteurs), composés totalement artificiels relâchés en grandes quantités dans l'atmosphère par l'industrie depuis seulement quelques décennies, présentent un énorme pouvoir d'effet de serre : 3300 fois celui du CO2 sur 20 ans et 1300 fois sur 100 ans pour le R134a utilisé comme fréon dans les climatiseurs ! Et 6200 fois sur 20 ans pour le halon 1301 (5600 fois sur 100 ans), etc... Or ces composés sont encore très largement utilisés... et relargués, de sorte qu'ils interviennent d'ores et déjà pour 13% de l'effet de serre et risquent d'augmenter encore fortement s'ils ne sont pas remplacés par d'autres corps... comme le CO2 par exemple source GIEC-IPPC.
Mais il faut aussi compter avec l'ozone O3, qui n'est pas directement produit par l'activité humaine mais indirectement par réaction photochimique à partir des autres pollutions gazeuses dans l'air que nous respirons (troposphère). Il représente aujourd'hui quelque 12% de l'effet de serre, et n'est que très partiellement compensé par l'ozone stratosphérique protecteur produit naturellement dans la haute atmosphère et menacé par certains CFC et par les vols aériens.
Et la vapeur d'eau dans tout ça? C'est le principal gaz à effet de serre, mais comme l'eau est essentiellement à l'état liquide dans la biosphère, toute la vapeur d'eau produite par les activités humaines est condensée et ne contribue que marginalement à l'effet de serre anthropique. En revanche, le taux de vapeur d'eau atmosphérique augmente avec la température et amplifie le réchauffement atmosphérique!

1.2. Le passé climatique de la Terre

Si l'on totalise les gaz à effet de serre (GES) d'origine anthropique (moins de 0,05% de l'atmosphère!), voire l'ensemble des gaz à effet de serre (moins de 1%), on peut se demander si finalement l'impact humain n'est pas négligeable à l'échelle des millénaires... Il n'en est rien!
C'est l'étude du passé géologique et astronomique de la Terre qui nous donne la réponse. Plus précisément, les mesures effectuées sur les bulles d'air emprisonnées dans les carottages forés dans les glaces antarctiques nous permettent de connaître précisément la température atmosphérique moyenne et les concentrations des GES depuis 800 000 ans 4:
le taux de CO2 a périodiquement oscillé seulement entre 180 et 300 ppm au cours des différentes périodes glaciaires et interglaciaires survenues pendant l'ère quaternaire. Mais en un siècle, nos rejets l'on fait passer à 380 ppm et cela accélère ;
le taux de méthane a oscillé entre 300 et 750 ppb. Aujourd'hui, il grimpe à 1774 ppb ;
la température de l'air (troposphère) était plus basse qu'aujourd'hui de 5 degrés seulement lors du dernier maximum glaciaire il y a 20000 ans (la glace recouvrait toute l'Europe du Nord et le niveau des océans était 120 m plus bas!). Il y a 120000 ans (interglaciaire Éémien), elle était plus chaude de 3°C; toute la banquise avait fondu et les océans étaient plus hauts de 6 mètres. Tout ceci est parfaitement expliqué par les facteurs astronomiques. Mais depuis l'ère industrielle, la température a augmenté de 0,74 degré, et les simulations prévoient un réchauffement moyen de +2 à +6 degrés d'ici 2100 que la Terre n'a pas connu depuis des millions d'années la température de l'atmosphère a varié sous l'effet des variations de l'excentricité de l'orbite elliptique terrestre autour du Soleil dues aux autres planètes (périodicité 100000 et 400000 ans), des lentes variations de l'inclinaison de l'axe de rotation de la Terre (périodicité de 41000 ans) et du mouvement de précession de cet axe (périodicité de 19000 et 23000 ans). Du point de vue astronomique, notre période interglaciaire actuelle (holocène), commencée il y a 11000 ans est analogue à celui intervenu il y a 400000 ans et devrait durer encore probablement 20000 à 40000 ans, même en l'absence de toute perturbation humaine 5 6 ces variations astronomiques ont entraîné des variations de température atmosphérique qui ont entraîné des variations corrélées des teneurs en CO2 et CH4 qui ont induit de fortes variation de l'effet de serre qui ont été amplifiées par les variations d'étendue et d'épaisseur de la calotte polaire arctique, ce qui a amplifié la variation initiale de la température atmosphérique il y a une corrélation étroite entre la teneur en GES et la température atmosphérique par le biais du bilan radiatif terrestre: l'ensemble des GES contribue aujourd'hui directement pour 2,64 W/m2 à l'accroissement de rayonnement absorbé par l'atmosphère (forçage radiatif) et plus généralement pour 3,01 W/m2 en tenant compte de l'ozone. Or l'histoire du climat permet de chiffrer la sensibilité du climat à 0,75 degré par watt et par mètre carré, et de prévoir un réchauffement de 3 degrés environ pour un doublement de la teneur en CO2 7 le forçage solaire lui-même dû aux fluctuations cycliques de l'intensité du Soleil (0,2 W/m2) ne compte guère que pour 8% environ du forçage radiatif total (4% actuellement): il est très loin d'expliquer le réchauffement climatique actuel!

1.3. Les risques d'un emballement climatique

L'influence des gaz à effet de serre est déterminante pour l'évolution de l'atmosphère dans le siècle à venir comme elle l'a été dans le passé. Qu'on y songe un peu: sans cette petite fraction de gaz (moins de 1% de l'atmosphère), la température de notre atmosphère serait de -18 degrés au lieu des +15 degrés actuels!
Toutes les mesures effectuées dans le monde depuis un siècle montre les signes d'un réchauffement et d'une modification accélérés du climat: températures moyennes, températures arctiques, teneurs en GES, fontes des calottes polaires et de la banquise arctique, fonte des glaciers, augmentation des fréquences et des intensités des cyclones atlantiques, élévation des océans, diminution de la biodiversité continentale et océanique, dépérissement des coraux, etc.
La question qui se pose est de savoir si ces perturbations intenses et rapides de l'atmosphère risquent de diverger de manière chaotique vers un emballement irréversible. En effet, le système physique, chimique et biologique {atmosphère, océans, continents} présente une instabilité élevée du fait de nombreuses rétroactions amplificatrices de l'effet de serre:
l'accroissement des teneurs en GES augmente la température globale de l'atmosphère;
l'échauffement atmosphérique provoque la fonte rapide des glaciers, de la banquise, des océans, des pergélisols, l'augmentation de la teneur en eau de l'atmosphère, l'extension des zones désertiques, l'accroissement des périodes de sécheresse ;
la fonte des calottes polaires diminue l'albédo (coefficient de réflexion) de la surface terrestre et accroît la surface absorbante des toundra, ce qui accroît le réchauffement climatique ;
la fonte partielle des pergélisols (Groenland, Canada, Russie) risque d'entraîner un relâchement massif et rapide des milliards de tonnes de méthane hydraté et gelé (clathrates) qu'ils contiennent, responsable d'un gigantesque effet de serre totalement irréversible ;
le réchauffement des océans diminue sa capacité d'absorber l'excès croissant de CO2 et diminue la quantité de plancton capable de produire l'oxygène à partir du CO2 ;
l'augmentation du CO2 atmosphérique augmente l'acidité des eaux froides profondes des océans aux latitudes élevées (le pH a diminué de 0,1 depuis 1850 et risque de diminuer de 0,6 à la fin du siècle), ce qui dissout une proportion croissante des coquillages marins, et plus particulièrement du zooplancton marin à squelette carbonaté (foraminifères) qui fixe une masse importante du CO2 atmosphérique et alimente les réserves halieutiques des océans (elles sont déjà gravement menacées), ce qui aura de graves répercussions sur l'alimentation et les activités humaines liées à la pêche en mer ;
l'élévation de l'évaporation de l'eau accroît l'absorption du rayonnement infrarouge par la vapeur d'eau et donc la température atmosphérique ;
l'élévation de la température des sols risque d'accroître les émissions de méthane par l'humus, aggravées par les labours, et d'accroître la sécheresse des sols, causant une diminution de la fixation du CO2 par les arbres et une augmentation des risques d'incendies de forêts, avec relargage dans l'atmosphère du carbone stocké naturellement ;
le réchauffement des pôles risque de diminuer la circulation thermohaline des eaux océaniques (du Gulf Stream en particulier), et donc d'abaisser l'absorption du CO2 atmosphérique (cet effet pourrait cependant être contrebalancé par un renforcement du courant de l'atlantique vers la banquise arctique par effet de densité saline).

La quinzaine de modèles numériques fiables et validés mondialement qui simulent le climat terrestre conduisent aujourd'hui à des prévisions convergentes et relativement peu dispersées sur lesquelles le GIEC s'est fondé pour affirmer que « l'essentiel de l'accroissement observé sur la température moyenne globale depuis le milieu du XXème siècle est très vraisemblablement dû à l'augmentation observée des concentrations des gaz à effet de serre d'origine anthropique » 3. Selon Michel PETIT (Société Météorologique de France), « ce processus rigoureux et lourd, nécessitant plusieurs années de travail, permet au GIEC de produire des rapports qui sont considérés comme fidèles par la communauté scientifique et comme objectifs par tous les États sans exception, quels que soient leurs intérêts propres » 8.

L'inertie séculaire du système Terre nous oblige à ne pas attendre la réponse complète aux doutes très marginaux qui peuvent encore subsister chez quelques scientifiques atypiques. Car c'est l'irréversibilité des dommages causés à cette fragile pellicule gazeuse de 60 km qu'on nomme atmosphère et où nous vivons à plus de 6 milliards d'êtres humains, et peut-être l'inhabitabilité de notre minuscule planète que nous sommes possiblement en passe de produire!

Que faire?

 

Prochain volet : L'urgence énergétique (VI-2) : séquestrer le CO2 ?

 

1 Stabilization wedges: solving the climate problem for the next 50 years with current technologies, S. PACALA et R.SOKOLOW, Science, vol. 305, pp 968-972 (2004)
2 Global and regional drivers of accelerating CO2 emissions, M.R. RAUPACH, G. MARLAND, P. CIAIS, C. LE QUÉRÉ, J.G. CANADELL, G. KLEPPER, C.B. FIELD, PNAS (mai 2007)
3 Climate Change 2007: the physical science basis. Summary for policy makers, IPPC (Intergovernmental Climate Change Panel)-GIEC (Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Évolution du Climat) (février 2007)
4 Les archives de l'Antarctique, J. JOUZEL, D. RAYNAUD, Sciences et Avenir, n°150 (2007)
5 An exceptionally long interglacial ahead?, A. BERGER, M-F. LOUTRE, Science, vol 297, pp 1287-1288 (2002)
6 Planète sous influence, A. BERGER, M-F. LOUTRE, Sciences et Avenir, n°150 (2007)
7 Une influence humaine dangereuse, J. HANSEN, Pour la science, Dossier 54 (2007)
8 Comment fonctionne le GIEC?, M. PETIT, Sciences et Avenir, n°150 (2007)

Thierry DE LAROCHELAMBERT Chaire supérieure de Physique-Chimie en CPGE,
Professeur de mécanique des fluides en École d'Ingénieurs,
Chercheur à l'Université.

7 - Proche-Orient

1 - Les Palestiniens de Nahr El-Bared dénoncent Fatah Al-Islam

Réfugiés à Baddawi, les Palestiniens qui ont fui le camp de Nahr El-Bared près de Tripoli au Liban expliquent comment le groupe extrémiste a pu s'implanter.

Nahr el Bared, « la Rivière du Froid », ne porte pas très bien son nom. Depuis cinq jours, les 40 000 habitants de ce camp palestinien, à une dizaine de kilomètres au nord de Tripoli au Liban, vivent une nouvelle période de turbulence.

Sur la voie rapide qui longe le camp en direction de la frontière syrienne, la circulation se fait rare après les derniers barrages de l’armée libanaise. Les voitures passent en trombe, des rafales de mitrailleuses crépitent dans l’air chaud. Les immeubles et les maisons s’étalent en contrebas jusqu’au bord de mer.

Par milliers, les Palestiniens de Nahr El-Bared ont déserté les lieux, depuis que de violents affrontements entre les combattants du groupuscule islamiste Fatah Al-Islam et l’armée libanaise ont apporté leur lot de souffrance et de désolation. De nombreux civils ont été tués ou blessés, des logements sont en ruines.

Mayssan, 56 ans, fait partie de ces nouveaux « réfugiés-déplacés » qui ont trouvé refuge dans le camp voisin de Baddawi. « Pour moi, dit-il, c’est une catastrophe après l’autre. Tout a commencé à la fin de l’été dernier, quand les militants du Fatah Al-Islam sont arrivés, sous couvert du Fatah-Intafida, une organisation palestinienne dissidente pro-syrienne. Au début, ils étaient très courtois et plutôt discrets. Avec leur argent, ils ont pu acheter ou louer un grand nombre de maisons au prix fort. Au fil des semaines, leur comportement a changé. Ils ont fait la loi, affiché leur appartenance au Fatah Al-Islam et pris le camp en otage. »

Avant le début des affrontements, 700 combattants

Selon lui, avant le début des affrontements, le camp abritait plus de 700 combattants. Il y a des Palestiniens, des Syriens, des Irakiens, des Jordaniens, des Pakistanais, des Bangladeshis, des Saoudiens et des Yéménites mais la plupart sont des Libanais, originaires de Fneidek et Sir Al-Dinniyé, dans la région du Akkar, à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Tripoli.

« Des incidents ont éclaté, poursuit Mayssan. Avec mes quatre frères, nous habitions juste à côté de leur quartier général. Il y avait toujours des problèmes mais personne n’osait leur parler parce qu’ils étaient toujours lourdement armés. Au moindre prétexte, ils n’hésitaient pas à vous jeter une grenade. On ne pouvait pas les empêcher de monter sur notre toit pour tirer sur l’armée libanaise. Le 3 mai, mon fils Ahmad, 24 ans, a reçu une balle perdue lors d’une altercation entre un de leurs combattants et un membre de la famille. Ahmad a perdu la mémoire et l’usage de la parole. Il est devenu hémiplégique. Aujourd’hui, nous n’avons plus de maison et, bientôt, il ne me restera plus d’argent pour faire soigner mon fils. »

Dans le camp de Baddawi, les Palestiniens de Nahr El-Bared se sont installés dans les écoles de l’URNWA, l’agence de l’ONU, et dans les mosquées. Sous le préau, dans la cour de l’école Nazareth, Ferial Sabini accuse la terre entière, coupable de se liguer contre les Palestiniens.

« C’est un complot contre nous, lance-t-elle. Tous les leaders palestiniens et libanais sont responsables de ce qui nous arrive. C’est le gouvernement libanais, Saad et Bahia Hariri (NDLR : le fils et la sœur de Rafic Hariri, l’ancien premier ministre libanais) qui ont amené Fatah Al-Islam pour contrer les chiites du Hezbollah et cela n’a pas marché. Pourquoi le fils Hariri a-t-il fait voter au parlement l’amnistie pour les insurgés de Dinniyé ? Pourquoi l’armée libanaise n’a-t-elle pas riposté quand il y a eu des accrochages avec des salafistes à Saïda en janvier dernier ? Aujourd’hui, ce sont les mêmes qui nous distribuent de la nourriture mais nous n’en voulons pas. »

"L’armée libanaise a agi trop tard"

Faelia, 35 ans, s’est installée dans une salle de classe avec ses cinq enfants. Toute la famille s’est enfuie vers Baddawi. « L’armée libanaise a agi trop tard. Il aurait fallu intervenir il y a des mois. Les combattants du Fatah El-Islam sont des criminels et des terroristes. Cela fait plus de six mois que nous vivons dans la terreur. Ce sont des gens qui n’ont rien à perdre et qui ont aussi beaucoup d’argent. Même si elle détruit tout le camp, l’armée n’arrivera pas à les éliminer. »

Dans son bureau décoré d’un grand portrait de Yasser Arafat, faisant le V de la victoire, El-Hajj Abou Taan, 70 ans, responsable du Fatah pour le Liban-Nord, affirme que « la solution militaire prend le dessus ». « J’espère que cela n’arrivera pas en raison du prix à payer pour la population du camp même si 80 % des habitants ont quitté Nahr El-Bared », explique ce vieux cadre de l’OLP qui a passé vingt ans et trois mois de sa vie dans les geôles syriennes.

« Ce groupe a profité du fait qu’aucune faction palestinienne n’avait la responsabilité pleine et entière de la sécurité dans ce camp, ajoute-t-il. Ils sont arrivés sous l’égide du Fatah-Intifada et quand ils sont devenus de plus en plus forts, ils se sont regroupés et se sont présentés comme le Fatah El-Islam. La population du camp ne les a pas adoptés. Les habitants sont victimes d’un complot intérieur et extérieur mais je suis sûr que la responsabilité du gouvernement libanais n’est pas engagée car cela va à l’encontre de ses intérêts. »

à Nahr El Bared-Baddawi

Source

François D’ALANÇON

8 - à lire, à voir ou à écouter

1 - Ma vérité sur la planète, par Claude Allègre

Editions Plon/Fayard

Ce livre va faire du bien à tous ceux que la « secte verte » terrorise. En le lisant, les réfractaires au « retour à la bougie » vont se sentir moins seuls.

Fidèle à son personnage, l’auteur ne passe pas par quatre chemins pour dire ses vérités sur la planète et pour dénoncer l’absurdité de la théorie de la décroissance prônée déjà dans les années 70 par les quelques scientifiques visionnaires du Club de Rome.

Claude Allègre n’aime pas les dictateurs de la pensée unique en matière de protection de l’environnement.
Il y a le « bon » Nicolas Hulot, la « brute » José Bové et le « truand » Al Gore Ces gourous médiatiques de l’écologie-catastrophe jouent, comme tous les ayatollah de la pensée, sur la peur, le sentiment de culpabilité, le devoir de repentance, l’obligation de réparation.
Mais voilà, « la caractéristique des gourous, nous dit Claude Allègre, c’est de ne pas appliquer pour eux-mêmes ce qu’ils recommandent aux autres » et ça c’est un peu gênant. Nicolas Hulot, par exemple, l’Indiana Johns d’Ushuaïa, se déplace en hélicoptère, véhicule excessivement polluant et son émission, financée par la vente de produits dérivés, coûte 1 million d’euros par épisode.
Al Gore, auteur d’un film propagande pour le moins inquiétant, en bon écolo-businessman millionnaire, utilise sans restriction des jets privés.
José Bové, le « fossile de Mai 68 », possède, lui, une ferme à la pointe de la technologie moderne.

« Pour la secte verte, il faut en baver dans la joie. Voilà l’avenir ! ».

Même dans la joie et l’allégresse, Claude Allègre, est de ceux qui n’ont pas du tout l’intention d’en baver. Il fustige le pacte de Nicolas Hulot qui, s’il était appliqué, mènerait la France à une crise économique et sociale grave.
Car ce pacte de décroissance, affirme t-il, fondé sur une écologie dénonciatrice et rétrograde, est une imposture intellectuelle.
L’auteur de ma vérité sur la planète nous propose un autre pacte où la croissance est possible. Car l’écologie, explique t-il, peut être un formidable levier du développement économique et social dans tous les pays. Bien sûr, il faut chercher des solutions aux multiples problèmes liés à la pollution et au développement de l’activité humaine. Mais ces solutions doivent stimuler la croissance en créant des emplois, en combattant les inégalités, la faim dans le monde, la pauvreté, les épidémies.

Claude Allègre est un chercheur mais c’est d’abord un homme qui aime la Terre. « Je lui ai consacré le demi-siècle de ma vie scientifique » écrit-il en introduction. Géologue de formation, par ailleurs passionné de physique et de chimie, il raconte comment ses nombreuses missions à travers le monde l’ont amené à découvrir des phénomènes naturels étonnants et lui ont permis de participer, comme il le dit lui même « à la plus extraordinaire révolution scientifique qu’aient jamais vécues les sciences de la Terre ».

Lorsque Claude Allègre parle du changement climatique, il refuse, en proposant des solutions concrètes à la réduction des gaz à effet de serre, de cautionner la théorie de l’influence de l’homme sur le réchauffement de la planète.
Il démontre que rien ne prouve que ce réchauffement soit dû uniquement au gaz carbonique (CO2) d’origine humaine. Partisan du nucléaire, des voitures propres, des OGM, du développement de certaines énergies renouvelables (il dénigre les éoliennes), cet amoureux des sciences parle d’« écologie réparatrice et évolutive » comme facteur de progrès pour l’humanité. Il faut, dit-il, développer l’économie écologique, investir, entre autre, dans la recherche industrielle pour séquestrer le CO2 (vaste programme) et se préoccuper de la gestion de l’eau sur notre planète.
Et surtout ne pas tout mélanger, tout confondre et tout dénoncer et distinguer les problèmes qui se posent à l’échelle mondiale de ceux qui concernent notre pays et dont la solution dépend essentiellement de nous.

La lecture de ce livre a quelques peu ébranlé certaines de mes convictions.
Il fut un temps où les propos de Monsieur Allègre m’auraient fait bondir d’indignation (j’étais à Malville en 76). Je trouve aujourd’hui ce livre rassurant et honnête. Il est probable que d’autres comme moi y trouveront de quoi se ressourcer les méninges. Claude Allègre piétine les plates-bandes de la pensée dominante en matière d’écologie-catastrophe et tant mieux si cela dérange.

J’en arrive à espérer qu’il soit invité au Grenelle social sur l’environnement par son nouvel ami, Nicolas Sarkozy, histoire de mettre de l’ambiance.

Brigitte Bré Bayle

Agenda

vendredi 1 juin 2007

Conférence-débat sur le Darfour

3, place Georges Braque, La Courneuve

Organisée par Africa
avec la participation de
Dominique Sopo, Président de S.O.S. Racisme

En silence, tout comme il y a 12 ans au Rwanda, se déroule le premier génocide du 21ème siècle dans une région de l’ouest du Soudan : Le Darfour.

Depuis l’hiver 2003, 300.000 hommes, femmes et enfants y sont morts de l’incurie médiatique et politique.

Pour comprendre la situation, et afin d’organiser la nécessaire solidarité, AFRICA organise une conférence-débat informative.

Restauration rapide sur place

lundi 4 juin 2007

L’idée républicaine en Europe et dans le monde

Espace l’Harmattan, 21 bis, rue des Ecoles, 75005.

Rencontre débat avec Paul Basquiat et Emmanuel Dupuy, auteur de « L’idée républicaine en Europe et dans le monde »

mardi 5 juin 2007

« LA PAIX MAINTENANT »: APPEL A RASSEMBLEMENT

Rassemblement devant le Mur de la Paix, Champ de Mars, face à l'Ecole Militaire.
M° Ecole Militaire

Le 5 juin prochain marquera les 40 ans du déclenchement de la guerre des Six jours, avec les conséquences qui s'en sont ensuivies : occupation, colonisation, souffrances, blocage de toute solution politique.

Un mois après cette guerre, la Ligue arabe, réunie à Khartoum, proclamait ses célèbres "Trois Non" : Non à la négociation avec Israël, Non à la reconnaissance d'Israël, Non à la paix. Depuis, la situation a bien changé :
Oslo, Genève, l'initiative saoudienne, etc. Les peuples palestinien et israélien veulent la paix. Elle est possible, et ses contours sont clairs.
Mais leurs dirigeants respectifs manquent du courage nécessaire pour la faire.

Au mois de juin, partout en Israël et en Palestine, et dans le monde entier, les partisans de la paix manifesteront. C'est dans ce contexte que nous appelons à ce rassemblement.

Ont répondu à notre appel et seront avec nous : Ni Putes Ni Soumises, l'AJHL (Association des Juifs Humanistes et Laïques), Hachomer Hatzaïr, le Conseil Français des Musulmans Laïques, l'UFAL (Union des Familles Laïques) et SOS Racisme.

Il est essentiel que nous soyons nombreux!

Mots d'ordre :
40 ans, ça suffit!
OUI à la négociation!
OUI à la reconnaissance mutuelle!
OUI à la paix!
Deux Etats pour Deux Peuples!

La Paix Maintenant

mercredi 6 juin 2007

L’innovation, une affaire d’Etat

IMPGT, 21 Rue Gaston de Saporta, Aix-en-Provence

Claude Rochet présentera son dernier livre:

L’innovation, une affaire d’Etat

samedi 9 juin 2007

Rencontre avec Julien Landfried sur "Contre le communautarisme"

à la librairie l’Apostrophe
2 rue Théophile Roussel
75012-Paris
Métro : Ledru-Rollin (ligne 8)

"République et Socialisme - C.E.R.I.S.E" vous convie au 4ème samedi de CERISE

Plan d’accès sur mappy.com / pagesjaunes.com en cliquant ici

mardi 12 juin 2007

Afrique, pillage à huis clos

dans les salons de la Fondation des Français Libres
59, rue Vergniaud, 75013 Paris - 01.53.62.81.81

105e dîner-débat de l’Académie du Gaullisme

Animé par Jacques Dauer, président de l’Académie du Gaullisme

et présidé par

Xavier Harel, écrivain, journaliste à La Tribune

Thème : Afrique, pillage à huis clos

Avec précision et force détails, Xavier Harel analyse et démontre que le cynisme de quelques grands dirigeants, qu’ils soient « politiques » ou à la tête de sociétés multinationales, n’a d’égal que leur cupidité et leur amoralité ; ils pillent sans vergogne l’une des principales richesses de l’Afrique : l’or noir, contribuant ainsi à accentuer la pauvreté des populations. La corruption est leur arme préférée.

Pour participer, écrire à Jacques Dauer
18, rue Fouquet, 77920 Samois-sur-Seine
(accompagné de votre chèque à l’ordre de l’Académie du Gaullisme)
06.81.24.15.95 - 01.64.24.65.98

Prix du repas : adhérent 38 € ; non-adhérents 41 € ; moins de vingt-cinq ans 25 €.

samedi 16 juin 2007

ECRIRE CONTRE L’INTEGRISME

Maison des Associations du 3eme arrondissement 5, rue Perrée 75003 PARIS

L’Association "Pour une école républicaine et citoyenne" P.E.R.E.C.
9 Bd du Temple 75003 Paris

Issue de l’ouvrage collectif dirigé par E. Brenner " les Territoires perdus de la République”

vous invite à participer à la réunion publique sur le thème ECRIRE CONTRE L’INTEGRISME

Participeront à cette rencontre :

samedi 16 juin 2007

La vie chère

Salle de la Maison des syndicats, place de la Myrpe, à Bergerac

Réunion – débat

Avec Pierre Cassen, rédacteur en chef de Respublica, porte-parole de l’Ufal 78

Débat organisé par la Libre-Pensée Dordogne

Voir l'agenda complet en ligne

ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine est édité par l'association:
"Les Amis de ReSPUBLICA"
27 rue de la Réunion
75020 PARIS

Courriel: respublica@gaucherepublicaine.org
Site: http://www.gaucherepublicaine.org