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ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine

n°587 - lundi 21 avril 2008

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Un numéro un peu allégé pour cause de vacances !
La Rédaction

1 - chronique d'Evariste

1 - La culture libérale ruine la « création de richesses » au profit de la «production d'objets de valeurs »

Les lycéens dans la rue sont toujours une occasion de se tourner non vers la jeunesse, mais vers l’avenir de cette jeunesse qui est d’ors et déjà la génération qui aura 40 ans dans les années 2030. Agitateurs, fainéants, les sobriquets dont on les affublent vont bon train car il est plus commode " libéralement parlant " de voir en eux des glandeurs-sécheurs de cours de maths ou de français, que des individus " presqu’adultes " en plein apprentissage des réalités de cette vie que leurs sages aînés leur ont façonnée. Sécurité sous couvert de protection, sous-emploi pour sous-existence, culture de l’avoir et de la possession, médias éducateurs et police vigilante, le tout pour le bon plaisir d’une clique d’actionnaires. On relira avec plaisir Raoul Vaneigem passant au crible le formatage des jeunes esprits dans son avertissement aux écoliers et lycéens... Qu’ils aillent dans la rue, battre le pavé, expérimenter et apprendre ce qui leur sera certainement utile pendant encore bien des années : l’engagement, l’esprit critique, l’énergie dépensée pour un but, la fraternité entre eux, la solidarité entre les générations et le refus de la croyance benoîte pour les belles paroles de politiciens carriéristes, ces laquais de financiers pour lesquels l’existence humaine est un moyen, la possession un but. Dans ces manifestations et ces revendications, il y a toute la symbolique du refus d’un monde pour en proposer un autre : professeurs qui ne veulent pas brader leur fonction d’enseignants des individus-citoyens de demain, parents qui ne veulent pas voir leurs enfants sacrifiés, enfants qui refusent la nouvelle logique de construction du monde dont on veut qu’il soit le leur.

Car la logique est bien là ! Et l’école républicaine est le point d’affrontement entre ces deux logiques : celle du libéralisme, point culminant du capitalisme, qui ne vise que la production " d’objets de valeurs ", monnayables, échangeables, achetables ; contre celle du Pacte Républicain qui vise la production de " richesses " : le savoir, la culture, la construction durable, la paix sociale, la dignité, et avec pour bases les richesses individuelles : l’amitié, la fraternité, la laïcité, la possibilité de vivre sereinement sa vie intime, la disposition personnelle de son corps, le plaisir de mener une existence la plus heureuse possible. De fait, pour la culture et l’éthique libérale, l’école républicaine et sa fonction d’instruction et de construction de la citoyenneté sont des " erreurs " ! Choc brutal entre deux cultures, deux éthiques, qui ne peuvent cohabiter.
L’éthique libérale conditionne chaque jour notre vision de l’économie, notre façon de penser ce qu’est "la richesse". Depuis le XIXe siècle - y compris à gauche ! - domine la vision d’une économie de la valeur, des objets et services ayant de la valeur, c’est à dire monnayable. La culture libérale oriente la compréhension de l’économie et des échanges uniquement vers ce qui est directement échangeable contre de l’argent, autrement dit vers de la possession. Pour cela, cette culture instruit depuis deux siècles des réflexes de pensée identifiant le terme de "richesse" avec ce qui n’est jamais qu’un objet de valeur. Que la droite cultive, entretienne et alimente sans cesse cet obscurantisme est somme toute parfaitement compréhensible ; plus les individus sont prisonniers d’un système de pensée, plus leurs outils pour réfléchir sur leurs existences sont faux et décalés, et plus la domination de leurs existences est aisée. Mais à l’inverse, que la gauche ne discute pas cette différenciation fondamentale est aujourd’hui une erreur profonde et un signe qu’une évolution des mentalités doit se faire pour qu’arrive un projet social autre, distinguant la "richesse" de la "valeur". Fonder la pensée de gauche sur une économie de la valeur revient à lier les cerveaux et juguler les esprits en les emprisonnant dans une rhétorique n’offrant aucune solution pour aller vers la production des vraies richesses que sont la construction pour l’avenir, la solidarité, l’instruction, les savoirs, la santé, la laïcité en acte, la disposition de son corps, un cadre de vie sain. Toujours, y compris à gauche, la culture de l’ " économie de la valeur " garantit l’impossibilité de penser l’économie en terme de richesses. L’amalgame entre " richesse " et " valeur " ne doit plus avoir sa place dans nos vies quotidiennes, dans nos paroles, dans nos pensées. La résistance au libéralisme passe, là encore par le refus individuel de le porter plus avant.

Car hélas, la culture de la valeur est dominante. Pour preuve cette culture de la consommation - c’est à dire de la possession de ce qui a de la valeur ! - qui culmine à l’heure même où le développement durable devient une nécessité impérieuse pour la sauvegarde de la planète. La planète ? ! C’est à dire les conditions d’existence de ceux qui battent aujourd’hui le pavé des villes de France : ces enfants de moins de 20 ans.
A l’évidence l’école est le microscope, le concentré, la loupe, où se caricature ses camps. Culture libérale de la possession, de l’avoir, des objets, et de la valeur, contre la culture de "la richesse". Autrement dit, culture de la "voiture au vernis gris-anthracite qui va encore plus vite" contre la culture visant la formation de futurs individus instruits, critiques et désirants. Culture des rayons de jouets où l’on apprend aux petites filles à être de dociles futures "maman-cuisinières-femmes-de-ménage", contre la culture de la découverte de la nature, de l’interrogation et du questionnement sur le monde, de la création et de l’encouragement à la passion personnelle.

Encore et toujours, le refus du libéralisme passe par un refus individuel définitif. A nous, dans nos vies, d’affirmer simplement que la culture délivrée à grand renfort de médias ne nous concerne "plus". Contrairement à ce que l’on pense, le courage n’est pas une nature, il est juste une décision que l’on prend à un instant : avant on ne disait rien, on acceptait ou on ne savait pas quoi faire ; et à partir d’un certain instant, on refuse de poursuivre, de continuer, on refuse d’être le collaborateur de ce qui nous détruit, et là on trouve quoi faire et quoi dire à la place. Clairement, la gauche se construira sur le courage d’opposer une contre-culture, et notamment une distinction claire et définitive entre ce qui est un objet ou un service de valeur, et ce qui est une richesse.

Pourquoi ce refus du libéralisme ne peut-il être que "définitif" ? Simplement parce qu’il n’y a pas de place pour une logique financière dans un hôpital, dans une école, dans un organisme de recherche, lieux où les individus-citoyens, membres du Pacte Républicain, ont voulu, non pas la création de "valeurs", mais justement la création de "richesses". On le constate, tout ce qui porte la trace du Pacte Républicain s’inscrit dans cette logique : transports, énergies ou communications, mais aussi laïcité, contraception, droit à disposer de son corps. Aussi bien dans ce que l’on nomme "service public", que dans nombre de lois touchant l’existence intime des individus, la logique de la production de "richesses" est sous-jacente. Nous devons la porter au jour, l’utiliser dans nos vies, la cultiver. Alors nous opposerons un mode de vie, une culture et une éthique, résolument de gauche.

Évariste Pour réagir aux articles,
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2 - laïcité

1 - Vivons sans espérer !

Croire à une transcendance est aujourd’hui fort bien vu. Loin de s’opposer aux "idéologies" du XXe siècle, cette célébration du "retour du religieux" n’en est jamais que le revers: idéologies et transcendance sont deux versions symétriques d’une fétichisation des désirs que fédère le terme "espérance". Or l’espérance est le corrélat de la crainte: en substituant le salut au bonheur, toutes deux rendent les hommes à la fois vulnérables et féroces.
Il est bon de rappeler, comme le fait ici Jean-Michel Muglioni, que, tout comme la crainte, l’espérance n’est pas une vertu.

L’illusion eschatologique

Dans la confusion ordinaire des débats publics, le retour du religieux et la fin des idéologies sont généralement liés. Le naufrage des régimes communistes, qui promettaient un monde meilleur, a provoqué le retour de la croyance en l’au-delà. Il arrive même qu’on s’en réjouisse, parce que les crimes du siècle dernier viendraient d’une politique athée. Qu’enfin cette espérance en une autre vie parle à nouveau dans le cœur des hommes, et nous éviterons le pire ! On appelle dans cette affaire " idéologies " les illusions eschatologiques. Et il est vrai qu’on promettait des lendemains qui chantent, allant jusqu’à nier qu’il y ait une nature, pour soutenir que tout en l’homme et hors de l’homme peut être transformé : c’était croire en la régénération de l’humanité sur terre. Auss peut-il paraître étrange d’opposer l’espérance en l’au-delà à ce vain espoir qui n’en était que la sécularisation. Il y a quelque chose de religieux dans toute eschatologie, qui, même athée, conçoit une révolution telle qu’après ne soit plus en rien comme avant.

Stoïciens et chrétiens

Sans doute peut-on sauver l’espérance : certaines grandes âmes, seules devant Dieu, espèrent sans fanatisme. Mais dès qu’une foule espère, et l’Eglise est aussi une foule, tout est perdu, un orateur promet, l’ébranle et la conduit où il veut. Le Proche Orient s’en souvient encore, les croisades ont fait couler des ruisseaux de sang. Les stoïciens considéraient l’espérance comme un vice et non comme une vertu. L’attitude des premiers chrétiens les a confortés dans cette certitude. Marc Aurèle y voit certes une preuve que nous sommes capables de résister à la douleur et à la crainte de la mort : un fou par erreur ou un chrétien par opiniâtreté peuvent ne pas craindre la douleur et sembler plus sages que le sage dans le taureau de Phalaris [1]. Le sage y demeure maître de lui-même par un jugement vrai.

Consentir au monde

Les hommes sont malheureux parce que, les événements étant contraires à leurs désirs, ils ne savent pas changer leurs désirs quand ils ne peuvent changer l’événement. Comme ils jugent des choses selon leurs craintes et leurs espérances et non selon la raison, ils sont sans cesse déçus par le cours du monde. Juger selon la raison, qui est en nous une part du souffle divin, c’est juger selon la nature que ce souffle anime. Car la raison est la pensée en tant qu’elle connaît les choses telles qu’elles sont. Le jugement formé dans l’intériorité de la conscience est en plein accord avec l’ordre rationnel du monde. Se rappeler à soi-même que la sagesse consiste dans la souveraineté de son jugement et se rappeler que la vie du sage est conforme à la nature, et donc en harmonie avec le cours du monde, c’est la même chose. La vraie sagesse requiert que nous n’espérions rigoureusement rien, que nous n’attendions rien des événements ni de Dieu, et que nous apprenions à vouloir le monde tel qu’il est. La prière au monde de l’empereur Marc Aurèle n’est pas une requête, elle ne fait que chanter la beauté du monde.

Tout me convient qui te convient, ô monde ! Rien n’est pour moi trop précoce ou trop tardif qui soit à point pour toi. Tout ce que produisent tes saisons, ô nature, est pour moi un fruit ; tout vient de toi, tout est en toi, tout revient à toi. Tel a dit : " Chère cité de Cécrops ! " [2] ; ne diras-tu pas, toi : " Chère cité de Zeus "[3] ?

Connaissant la loi de l’univers, l’empereur romain se sait citoyen du monde, et consent à n’être que ce qu’il est, un instant du devenir universel :
Ce petit instant de la vie, le traverser en se conformant à la nature, partir de bonne humeur, comme tombe une olive mûre, qui bénit la terre qui l’a portée et rend grâce à l’arbre qui l’a fait pousser.[4]

Poésie rustique, paradoxale comme le voulait Platon : sans regrets, sans lamentations, sans dramatisation de la mort. Elle inverse le sens des symboles et refuse la séduction des chants désespérés. Sa beauté revigore. On ne pleure pas la mort d’une olive. Ainsi encore, chez Marc Aurèle, les roses ne symbolisent pas notre fragilité, qu’il faudrait pleurer, mais la beauté du monde qu’il faut louer. Que serait une rose immortelle ? Faut-il, insensé, ne vouloir ni les épines de la rose, ni l’hiver, ou regretter que les olives meurent et que le lait des figues brûle la peau des hommes ? La même illusion fait considérer la brièveté de la vie comme un argument contre la providence. Notre malheur n’est pas de n’être qu’une partie éphémère du monde, mais d’être partiaux : nous jugeons du tout sans savoir que la partie n’existe et n’a de sens que par le tout. Concevant et chantant au contraire la vie de l’univers, nous pouvons aimer notre propre vie : l’aimer tout entière, aimer aussi la quitter, et non pas vivre comme un fruit qui se plaindrait de devoir tomber après avoir mûri. Seuls les fous s’interrogent avec angoisse sur la mort. Le sage sait se situer dans le monde et parce qu’il s’élève à la contemplation du tout, il se réjouit d’être mortel et de ne vivre qu’un jour. Marc Aurèle se donne à penser la vérité des mythes païens, la poésie du paganisme, paysanne. Tel est aussi le sens du cycle toujours recommencé des saisons, éternel retour : il n’y a pas d’au-delà.

Bonheur et non salut

L’affirmation stoïcienne du destin, c’est-dire de la nécessité de tout ce qui est, est libératrice, parce qu’elle nous ôte toute espérance. Et par là elle ne fait pas du monde l’enfer de Dante, à l’entrée duquel est inscrit : Lasciate ogni speranza, voi che’entrate ![5] Mais l’âme raisonnable qui nous anime, partie du souffle divin, cessera d’être séparée de lui avec la mort. Sagesse de l’immanence et non de la transcendance. Sagesse et non obsession du salut personnel. Ainsi, avec Marc-Aurèle et les stoïciens, nous avons tout le contraire d’une religion de l’espérance ou d’une philosophie de l’histoire : ces hommes seulement hommes et pleinement hommes savaient se tenir droit sans rien attendre des événements ni du ciel, sans rien attendre de meilleur ni pour demain, ni pour l’éternité. Et le sage vivait donc heureux comme les dieux. Pour les chrétiens, quel orgueil ! Or l’espérance ne risque-t-elle pas de se métamorphoser en nihilisme ? S’il est trop orgueilleux de dire son bonheur divin, espérer en un monde meilleur, c’est tenir ce monde-ci pour inacceptable : il faut s’en sauver ! L’idée de salut est étrangère à la philosophie antique parce qu’elle accepte le monde : l’homme y est chez lui et n’espère pas un autre monde, et pour cette raison il y remplit simplement sa fonction. Le refus du monde fait l’impatience révolutionnaire et nihiliste. On assassine pour réaliser la justice en ce monde, ou pour le détruire parce qu’il est injuste. Pendant des siècles au contraire les stoïciens ont concouru à la bonne marche de l’administration de l’empire, chacun jouant son rôle là où le destin l’avait placé. Sans espérance.

Annexe. Rappelons-nous deux pages célèbres:

Montaigne, Essais, III, Chapitre X, De ménager sa volonté.
La plupart de nos vacations sont farcesques. Le monde entier joue la comédie (Pétrone) . Il faut jouer dûment notre rôle, mais comme rôle d’un personnage emprunté. Du masque et de l’apparence il ne faut pas faire une essence réelle, ni de l’étranger le propre. Nous ne savons pas distinguer la peau de la chemise. C’est assez de s’enfariner le visage, sans s’enfariner la poitrine. J’en vois qui se transforment et se transsubtantient en autant de nouvelles figures et de nouveaux êtres qu’ils entreprennent de charges, et qui se prélatent jusques au foie et aux intestins, et entraînent leur office jusques en leur garde-robe. Je ne puis leur apprendre à distinguer les bonnetades qui les regardent de celles qui regardent leur commission ou leur suite, ou leur mule. Ils s’abandonnent tellement à la fortune qu’ils en oublient jusqu’à la nature (Quinte-Curce). Ils enflent et grossissent leur âme et leur discours naturel à la hauteur de leur siège magistral. Le Maire et Montaigne ont toujours été deux, d’une séparation bien claire. Pour être avocat ou financier, il n’en faut pas méconnaître la fourbe qu’il y a en de telles vacations. Un honnête homme n’est pas comptable du vice ou sottise de son métier, et ne doit pourtant en refuser l’exercice ; c’est l’usage de son pays, et il y a du profit. Il faut vivre le monde et s’en prévaloir (= en tirer avantage) tel qu’on le trouve. Mais le jugement d’un Empereur doit être au-dessus de son empire, et le voir et considérer comme accident étranger ; et lui, doit savoir jouir de soi à part et se communiquer comme Jacques et Pierre, au moins à soi-même.

Montesquieu Considérations sur les causes de la grandeur des romains et de leur décadence. XVI, De l’état de l’empire, depuis Antonin jusqu’à Probus.

Dans ces temps-là, la secte des stoïciens s’étendait et s’accréditait dans l’empire. Il semblait que la nature humaine eût fait un effort pour produire d’elle-même cette secte admirable, qui était comme ces plantes que la terre fait naître dans des lieux que le ciel n’a jamais vu.

Les Romains lui durent leurs meilleurs empereurs. Rien n’est capable de faire oublier le premier Antonin, que Marc-Aurèle qu’il adopta. On sent, en soi-même, un plaisir secret lorsqu’on parle de cet empereur ; on ne peut lire sa vie sans une espèce d’attendrissement : tel est l’effet qu’elle produit, qu’on a meilleure opinion de soi-même, parce qu’on a meilleure opinion des hommes.

Notes

[1] Instrument de torture

[2] Athènes

[3] Marc Aurèle, Pensées pour moi-même, IV 23, traduction Emile Bréhier, Les stoïciens, Pléiade

[4] Ibid. IV, 48

[5] Laissez toute espérance, vous qui entrez !

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Jean-Michel Muglioni

2 - Quand les tenants de la culture anglo-saxonne sapent les fondements de notre République

Le discours du président de la République devant le chapitre de Saint jean de Latran, est une parole officielle prononcée au nom de la République française. C’est celle du président de la République es qualité, représentant tous ses concitoyens français, au moment ou il accepte d’endosser une fonction honorifique liée par tradition folklorique à sa charge, celle de chanoine de Latran, paroisse de l’Etat du Vatican dans la ville de Rome. Sur le moment, puis à la suite de son allocution, le président a souligné à diverses occasions l’importance particulière de ce discours. Il s’agit bien d’une définition des principes et de la vision auxquels il entend se référer à propos de la place du fait religieux dans la vie des sociétés modernes en général et de la religion catholique en France en particulier. Les discours qu’il a ensuite prononcé à Ryad en Arabie saoudite, puis pour ses vœux devant le corps diplomatique ou à l’occasion de la réception des chefs religieux à l’Elysée ont confirmé l’importance du discours de Latran dans la définition de la politique que veut conduire le chef de l’Etat.

C’est dans ce contexte que sont apparues début 2008 deux propositions complémentaires (en l’esprit du moins) :

Quitte à être taxé de paranoïaco-républicaniste, je n’hésite pas à rejoindre Henri PENA-RUIZ et Caroline FOUREST qui voient dans ce projet de nouvelle révision constitutionnelle la volonté concertée d’adapter nos principes républicains universalistes issus des Lumières à la conception anglo-saxonne de la Société, telle qu’elle sévit dans le Traité Constitutionnel Européen que le gouvernement français vient de ratifier sans même en référer au Peuple Souverain. Lorsque je mets en rapport cette intention d’introduire des DROITS DIFFERENTS selon l’origine communautaire de telle ou telle partie constitutive de la Nation avec d’autres projets en cours, je ne peux - en bon Instituteur - me dire que " 2+2=4 "… Qu’on en juge:

Oui, tout ceci va bien dans le même sens, celui du retour en force du " goupillon " au secours du " sabre " économique : prétendre, comme le fit M. SARKOZY à Rome, qu’il n’y a de réelle espérance que dans la transcendance post-mortem, c’est affirmer qu’il est vain de construire nos vies sur le progrès social et la transmission des connaissances (d’où la prééminence qu’il accorde au Curé sur l’Instit), c’est se donner les moyens idéologiques de mieux faire passer la paupérisation des classes moyennes et des retraité(e)s pour leur faire financer les cadeaux au CAC40… Pour ce faire, il faut décloisonner le cultuel et le culturel et transformer la République en une mosaïque de " différences " juxtaposées… telle qu’elle était aux temps bénis où la France n’était que la Fille-aînée-de-l’Eglise avant d’engendrer la-Liberté-éclairant-le-monde….

Thierry Pontillon Directeur d’école primaire - syndicaliste

3 - Manifeste : La raison, la recherche scientifique et l’avenir de la planète

L’aventure humaine ne saurait être dissociée du rôle fondamental de la raison. Cet exercice d’une fonction critique fondée sur le libre examen du réel, s’il est indispensable à la science, l’est tout autant pour faire progresser la démocratie.
Le rôle de la science et la notion même de progrès sont aujourd’hui contestés. Beaucoup reconnaissent que le progrès scientifique a contribué à rendre possible l’allongement considérable de l’espérance de vie et l’amélioration du niveau de vie moyen dans les pays développés, et dans une moindre mesure dans le reste du monde. Mais ils constatent aussi que le développement de l’économie que ces progrès ont permis n’a pas fait disparaître l’inacceptable misère qui est encore le sort de tant d’êtres humains, qu’un gaspillage des ressources et des atteintes de plus en plus graves à l’environnement l’ont accompagné. Nous savons désormais que l’avenir de la planète est en question et que l’on ne peut plus poursuivre aveuglément le modèle de développement qui a jusqu’ici servi de référence. La situation exige des changements profonds dans les priorités économiques comme dans les comportements. Elle exige aussi, avec la prise en compte du principe de précaution, celle du principe de progrès ouvrant la voie aux découvertes futures.

Le progrès scientifique n’entraîne pas automatiquement celui de la société, mais il en est plus que jamais une condition nécessaire. On ne saurait agir efficacement face aux problèmes d’environnement mondiaux, aux endémies, aux menaces de pandémie ou au sous-développement sans des efforts pour mieux comprendre notre monde, alors que certains voudraient que les chercheurs aient pour seul rôle de répondre aux préoccupations immédiates des institutions, des entreprises ou de la société. Nous appelons les communautés scientifiques à s’impliquer plus fortement dans les réflexions collectives et les actions à engager pour l’avenir de la planète. Elles sont les mieux placées, dans un effort international, pour établir et actualiser régulièrement les bilans de connaissances acquises et pointer celles à approfondir. Nous appelons à mobiliser sans frilosité les technologies disponibles, à en développer de nouvelles, à développer les débats démocratiques sur les choix à effectuer pour permettre la transition nécessaire vers un développement durable assurant une meilleure qualité de vie.

Il n’y aura pas de contribution significative de la France à de tels objectifs sans un nouvel élan à la recherche scientifique. Une politique de recherche ambitieuse ne peut réussir qu’en s’appuyant sur l’initiative des chercheurs dans les universités comme dans les centres de recherches publics ou privés, en leur donnant la parole et en les libérant du fardeau d’une bureaucratie envahissante, en soutenant vigoureusement la recherche fondamentale dans sa diversité. L’histoire montre que c’est de celle-ci que surgissent les applications de la science les plus novatrices. Des avancées réelles face aux défis posés par la préservation de l’environnement appellent de même une vision à long terme du développement de nos connaissances, sur la nature et sur les sociétés humaines, combinant projets finalisés et exploration de domaines sans rapports directs avec les préoccupations immédiates.

Les sociétés modernes ont des besoins croissants de chercheurs, d’ingénieurs et de techniciens, mais elles ont aussi impérativement besoin de citoyens formés à l’esprit et aux méthodes de la science. Nous appelons à agir pour changer une situation où la science et la recherche n’ont aucune place ou une place très réduite dans la culture générale, y compris celle des élites intellectuelles et politiques. L’enjeu est aussi important pour la démocratie que l’alphabétisation en d’autres temps. Un objectif majeur de l’enseignement, scientifique en particulier, devrait être de promouvoir l’esprit critique, la curiosité et la rigueur de raisonnement illustrés par les processus de recherche. C’est le moyen de préparer les esprits à reconnaître et rejeter les fausses sciences, de faire reculer les tentations obscurantistes et le développement d’un relativisme pernicieux. Si la science se remet perpétuellement en question, cela ne saurait signifier qu’elle efface l’œuvre du passé, elle la transforme et l’enrichit.

Nous défendons l’apport des Lumières et récusons les offensives spiritualistes en science. On ne saurait réduire celle-ci à ses aspects utilitaires en oubliant sa valeur culturelle, en sous estimant ou même en niant le rôle émancipateur du progrès des connaissances. Il n’y a pas de culture humaniste moderne sans intégration des apports de ces progrès au mouvement historique des idées, de la morale et de l’éthique. Il n’y a pas de culture humaniste moderne sans intégration des valeurs de la laïcité : la laïcité est un puissant facteur d’unité entre des citoyennes et des citoyens, croyants ou incroyants, confrontés aux mêmes difficultés, appelés à se construire un même avenir. C’est un garant du refus d’endoctrinement des esprits, de l’indépendance de la recherche scientifique par rapport aux tabous religieux ou autres, une référence pour celle des moyens de communication et des média, une garantie essentielle pour la liberté d’expression.

Nous appelons à réhabiliter le rôle de la raison dans son exercice critique. Nous appelons à une refondation des rapports de la science et de la société, au développement de la culture scientifique dans la culture générale et à la défense de la laïcité comme garantie du respect des droits de l’homme et de la liberté de penser.

Union Rationaliste

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Hélène Langevin-Joliot

Edouard Brézin

4 - Entretien avec Ze’ev Sternhell

mis en ligne le jeudi 17 avril 2008
par Ari Shavit, Ze’ev Sternhell

Sternhell aborde ici des sujets qu’il a rarement touchés, et dans cet entretien très personnel, l’émotion affleure à chaque instant. Son enfance en Pologne, la chasse aux Juifs, son attrait pour le catholicisme, son rapport à la France et aux Lumières, les identités mouvantes, le nationalisme (dont il est spécialiste), ce que sont pour lui Israël et le sionisme et les dangers qui les guettent, à commencer par l’occupation.

Ha’aretz, 7 mars 2008

Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant?

Cet entretien avec l’historien Ze’ev Sternhell, alors que le Prix Israël venait de lui être décerné, était censé porter sur les idées et avoir un caractère très politique. Quelque chose sur les Lumières et les anti-Lumières en Europe. Sur les racines nationalistes du mouvement ouvrier israélien. Mais une question posée incidemment sur son enfance dans l’Europe des années 40 nous a menés sur un tout autre terrain. Dans son modeste appartement de Jérusalem, l’historien des idées a commencé à raconter l’histoire de sa vie, histoire dont seule une minuscule partie peut être contée ici, dans l’espace d’un supplément hebdomadaire.

Dans les années 70, il écrivit sa thèse de doctorat sur le nationalisme français et devint en même temps l’un des intellectuels les plus influents de la gauche israélienne. Dans les années 80, il provoqua un petit scandale en France en affirmant dans son livre Ni droite ni gauche : l’idéologie fasciste en France (Seuil, 1983) que le régime de Vichy n’avait pas été imposé aux Français par les Allemands, mais qu’il exprimait un courant d’idées authentique en France, qui avait préparé le terrain à l’arrivée du fascisme.

Dans les années 90, il suscita également un débat en Israël quand il affirma dans son livre Aux origines d’Israël : entre nationalisme et socialisme (Gallimard, 2004) que le mouvement ouvrier historique n’était pas réellement socialiste et que son objectif premier était l’établissement en Palestine[1]. Ces 10 dernières années, Sternhell s’est penché plus particulièrement sur l’analyse des Lumières en tant qu’axe central dans l’histoire de l’Europe moderne. Il a également publié dans notre journal des articles furibonds contre la droite nationaliste, la droite économique, le capitalisme israélien et l’occupation[2]. Pour beaucoup, Sternhell est l’héritier de Jacob Talmon, Yehoshua Arieli et Yeshayahou Leibowitz, le professeur gardien du temple, l’universitaire sûr de lui qui hurle à l’establishment les vérités qu’il refuse d’admettre. Aujourd’hui, pourtant, avec sa femme Ziva près de lui et sa fille Yaël qui écoute depuis la pièce d’à côté, Sternhell n’est ni critique ni sûr de lui. Il ajuste ses lunettes et fixe un point dans l’espace, qui semble lui inspirer ses mots. Réfléchi, parfois ému, il tente d’être aussi précis que possible. Image après image, personnage après personnage, période après période, il essaie de raconter son histoire, juive et israélienne. Cette histoire parle de faiblesse et de force, de croyance et d’hérésie, d’identités mouvantes. Parfois, elle prend par surprise le conteur lui-même.

Un monde de survie

- Q. : Votre carrière universitaire, pour laquelle vous recevez cette année le Prix Israël, comprend l’étude des sources idéologiques du fascisme. Y a-t-il un lien avec le fait que vous-même avez été victime du fascisme quand vous aviez cinq ans ?
- Ze’ev Sternhell : Peut-être inconsciemment. Quand j’étais jeune, le projet était que je fasse mon droit et devienne avocat. Mais j’ai fini par devenir historien, spécialiste de l’Europe du 20e siècle. Il n’est pas possible de déconnecter cette décision du contexte de mon enfance. J’ai grandi dans un monde très civilisé, le monde hautement protégé d’une famille bourgeoise européenne. Et soudain, à l’âge de cinq ans, ce monde s’est écroulé. En un instant. Il est difficile de décrire cette transition, de la tranquillité et la sécurité à la chute, la désintégration. Quand les choses dont vous pensiez qu’elles étaient immuables s’écroulent instantanément. Quand ce vous croyiez être l’ordre naturel des choses est annihilé. Et très rapidement, du jour au lendemain. Je ne suis pas certain de ce que j’avance, mais il est très possible qu’à un certain niveau, cette expérience a influencé mon travail universitaire et intellectuel. Pour moi, il a été important de comprendre comment un ordre démocratique et libéral s’était effondré si rapidement dans une Europe repue et cultivée. Comment il s’est fait que tout se soit cassé. Comment le monde européen a sombré dans la catastrophe. Et nous aussi, notre ville, notre famille, mes parents et moi. Mon grand-père est un gros négociant en tissus, papa est associé dans l’affaire. Maman s’occupe de moi à la maison avec l’aide d’une domestique et d’une nurse. Ma sœur, de 13 ans mon aînée, est une sorte de deuxième mère. Ma chambre verte, située entre deux étages d’une grande maison, était capitonnée de beaucoup d’amour. Jusqu’aujourd’hui, mon souvenir le plus fort est celui de mon père qui me serre dans ses bras, joue contre joue. La chaleur de cette joue. Et la chaleur de maman, bien sûr. Papa, maman et ma sœur Ada me submergent de toute la bonté du monde. Et puis, la guerre éclate, je me réveille en pleine nuit, les lumières sont allumées et mon père vient me dire au revoir, en uniforme de l’armée polonaise. Il part à la guerre. Quelques semaines après son retour de la défaite, tous ses systèmes s’effondrent, et il meurt. Heureusement pour lui, de mort naturelle. Mon grand-père meurt, lui aussi. Et les Russes prennent le contrôle de la Pologne orientale, et aussi de la moitié de notre maison. D’un seul coup, il n’y a plus, ni domestique, ni nurse, la moitié de maison est réquisitionnée. Maman doit se mettre à travailler. Avec beaucoup de difficultés, on se procure de la nourriture dans les villages. Pourtant, alors qu’il n’y a plus de protection, ma mère et ma sœur tentent de me protéger du mieux qu’elles peuvent. Dans un monde où la stabilité a disparu, elles seules sont stables. Elles sont mon unique ancre.
- Q. : Quand les Allemands arrivent-ils ?
- Z. S. : En été 1941. J’ai six ans. L’opération Barbarossa débute sous notre fenêtre, au bord de la Vistule. Je me souviens de nos fenêtres qui tremblent. Les tirs infernaux. La puissance incroyable des Allemands. Puis, très vite, les longs convois de prisonniers russes effrayés. Quelques mois plus tard, nous aussi sommes conduits au ghetto. Transition abrupte, de notre grande maison et ma chambre verte à un taudis dans le ghetto. La promiscuité, les maladies. Et puis, les Aktion.
- Q. : Vous souvenez-vous des Aktion ?
- Z. S. : Le ghetto a été liquidé par étapes. Une Aktion en suivait une autre, chacune d’un type différent.
- Q. : Vous rappelez-vous avoir été pourchassé ?
- Z. S. Oui. Et je me rappelle m’être caché avec maman et ma sœur pendant trois jours dans une espèce de fosse, sous la terre. C’était une sorte de grotte, il y avait là d’autres gens et nous nous cachions, alors que, dehors, on était en train de liquider le ghetto. Il y avait une espèce de fente à travers laquelle je regardais. Et ce que j’ai vu dehors, c’était une chasse. J’ai vu comment on abattait des gens qui cherchaient à s’échapper. Comment on tirait sur des gens perchés sur des arbres. Des enfants aussi. Très vite, j’ai appris à discerner les soldats allemands des officiers, par leur couvre-chef. Et aussi parce que les officiers tiraient avec des pistolets et les soldats avec des fusils. C’était leur méthode pour dépeupler le ghetto. Pour faire disparaître la population. A l’époque, les gens étaient tués dans le ghetto même. Et moi, petit garçon, je voyais à travers cette fente d’autres petits garçons cachés en haut des arbres se faire abattre et tomber.
- Q. : Et que ressentiez-vous dans ce trou ?
- Z. S. : Je ne sais pas bien. J’étais déjà dans un monde où tout s’écroulait. Un monde de survie. De survie à tout prix. Mais je sais que quand des camarades de combat sont morts à côté de moi pendant la campagne du Sinaï et la guerre des Six jours, j’ai pensé qu’au moins, ils mouraient en êtres humains, et non victimes d’une chasse dans une rue. En ce sens, pour moi, Israël n’est pas une question politique. C’est quelque chose de beaucoup plus profond, élémentaire. C’est un retour à l’humanité. Revivre en êtres humains, parce que là-bas, dans le ghetto, on perdait son identité humaine. Vous n’aviez plus rien d’humain, vous n’étiez plus une personne. `
- Q. : La première Aktion se termine, mais une autre suit. Que se passe-t-il cette fois ?
- Z. S. : C’était une journée d’été, et les Allemands recommençaient à chasser du Juif. Une véritable chasse. Puis il y a eu une proclamation : les gens sans permis de travail devaient se rassembler quelque part dans le ghetto. Ma mère et ma sœur y sont allées. Je me souviens comme si c’était hier de ma sœur disant à ma mère : ’Nous sommes jeunes, nous travaillerons, nous nous en sortirons. " Elles savent qu’elles se séparent de moi. Elles savent que seul Dieu sait ce qui va arriver. Mais elles ne voulaient pas me faire peur. Et elles voulaient espérer.
- Q. Comment vous expliquez-vous qu’elles soient parties si facilement ?
- Z. S. : Parce qu’elles espéraient. Parce que quand des gens sont placés face à une réalité incompréhensible, ils en créent une autre, faite d’illusions. Elles voulaient croire qu’elles avaient un avenir, qu’il y avait la vie, qu’elles me reviendraient. Moi non plus, je n’imaginais pas que je ne reverrais jamais ma mère ni Ada. Elles m’ont serré dans les bras, embrassé, et m’ont laissé avec ma tante. Je les vois encore partir et disparaître au loin.
- Q. : Et à partir de là, vous êtes seul ?
- Z. S. : Je suis avec ma tante, qui a fait tout ce qu’elle a pu pour pallier l’absence de ma mère, je suis avec mon oncle, qui a fait preuve d’une imagination extraordinaire et nous a fait sortir du ghetto. Mais profondément, je suis seul. Seul depuis l’âge de 7 ans. Je n’ai personne à qui raconter, à qui parler. Je sais que personne ne m’aidera, que je dois me débrouiller seul pour survivre. Que ce que je ne ferai pas, personne ne le fera à ma place. Cette solitude, cette conscience que je n’ai personne sur qui compter, personne à qui demander quoi que ce soit, même si je suis encore censé être un enfant.
- Q. : Après vous être évadés du ghetto, vous, votre oncle, votre tante et votre cousin vous faites passer pour catholiques.
- Z. S. : Oui. Quelque chose nous est arrivé, de l’ordre du miraculeux. Mon oncle a trouvé quelqu’un qui possédait une maison à Lvov. C’était un officier polonais, et non seulement il n’était pas antisémite, mais il était prêt à cacher des Juifs. Au milieu du terrible antisémitisme qui existait en Pologne, c’était un cas sur 100 000. Et puis, il y a eu une autre famille qui nous a aidés, une famille de la classe ouvrière. Grâce à ces deux familles, nous avons survécu. Il faut savoir qu’en Europe, il n’y a pas un seul Juif qui a pu survivre pendant ces années sans l’aide de quelqu’un. Mais l’antisémitisme était partout. En particulier en Pologne. C’était un endroit où il était impossible de vivre, pendant la guerre et après. Dans un certain sens, le pire est arrivé après la guerre. Après tout ce qui s’était passé, alors que tout le monde savait ce qui s’était passé, à chaque pas dans la rue, on respirait la haine des Juifs. Je me souviens d’une femme qui hurlait à des Juifs : « Sales animaux, vous êtes sortis de vos trous, dommage qu’on n’ait pas fini le travail. » Et je me souviens de Juifs rescapés des camps, qui cachaient leur identité. Et quand elle était découverte, ils étaient insultés et battus. Les rumeurs de pogroms perpétrés après la guerre étaient nombreuses. C’est précisément là, alors que les Nazis étaient partis, qu’il devient clair que les Juifs n’ont aucun avenir en Pologne. Après ce que nous avions vu, il fallait en finir, changer absolument d’identité, et faire en sorte d’être rattachés à l’Eglise.

La nostalgie de Noël

- Q. : Ce que vous êtes en train de dire, c’est que vous ne vous êtes pas seulement fait passer pour catholique, vous êtes réellement devenu catholique. Vous vous êtes réellement converti.
- Z. S. : J’ai été officiellement baptisé. En ce qui concerne l’Eglise, je suis catholique.
- Q. : Baptisé pendant la guerre ou après ?
- Z. S. : Après. Pendant la guerre, c’était trop dangereux. De toute façon, à cause des lois raciales, cela n’aurait servi à rien. Mais à la fin de la guerre, quand nous avons constaté que les Juifs ne pouvaient plus vivre en Pologne, nous sommes devenus chrétiens. Avec l’eau bénite et tout. Avec mon nom polonais : Zbigniew Orolski. ?
- Q. : Je ne comprends toujours pas. S’agissait-il d’un jeu pour la survie, comme les marranes en Espagne, ou d’un véritable acte de foi ?
- Z. S. : Pendant la guerre, cela a commencé par être un jeu. Nous avions de faux papiers aryens et une fausse identité catholique polonaise. C’est pourquoi, pour éviter que nous soyons pris, ma tante m’a enseigné les prières, les concepts et les histoires. Il était important que nos voisins voient que nous vivions en bons catholiques, que nous parlions comme des catholiques. Mais, petit à petit, cela a cessé d’être un jeu. J’ai commencé à aimer cela, Pâques, Noël, les cadeaux, l’histoire de Jésus, l’image de la Sainte Vierge. Vous savez, le catholicisme est une religion de génie. Jésus s’est sacrifié pour l’humanité, et pour vous aussi personnellement, Marie surveille le monde, et vous, vous priez pour elle, vous voulez qu’elle vous aide. On sent là une source de salut. Vous n’êtes pas seul, comme les juifs et les protestants. On en appelle à une sorte d’entité humaine, et non à quelque chose d’abstrait. Quand on est un petit garçon au milieu d’une guerre horrible, que tout est horreur autour, que le papa est mort, que la maman est partie, on se saisit facilement de cette foi religieuse, et de l’espoir qu’elle vous sauvera. On n’est plus seul ni abandonné. On a quelqu’un vers qui se tourner. Alors, on regarde cet autel, on s’agenouille devant lui, et on murmure ce qu’on est censé murmurer.
- Q. : Vous aviez un autel chez vous ?
- Z. S. : Oui, j’avais un petit autel que j’avais confectionné pour moi-même.
- Q. : Qu’y avait-il dessus ?
- Z. S. : Marie, le petit Jésus, une ou deux bougies, un peu de verdure. C’était comme une petite crèche de Noël.
- Q. : Et vous priiez devant cet autel ?
- Z. S. : Je priais toutes les nuits. C’était bien vis-à-vis des voisins, oui, mais aussi pour moi. Vous savez, le catholicisme est vraiment une religion extraordinaire. Elle caresse, elle pardonne. Et ses rituels marchent. A l’église, il y a le parfum de l’encens, l’orgue, les chœurs, on ressent quelque chose. Une sorte d’élévation, il n’y a aucun doute. Jésus et Marie vous emplissent d’une sorte de sentiment qui transcende le monde cruel et terrible que l’on voit tout autour. Il y a quelque chose d’autre, de meilleur. En dépit de tout, il y a de l’espoir. Tout ce qu’il y a d’horrible passe, mais le bien est éternel. C’est consolateur. Dans un monde où tout part en morceaux, cela vous donne de la force.
- Q. : Faisiez-vous le signe de croix ?
- Z. S. : Bien sûr, tous les jours. Et même plus. Après la guerre, j’ai été enfant de chœur dans la cathédrale de Cracovie. Mon rôle était de suivre le prêtre, je portais une robe et de l’encens. Je priais avec le prêtre, m’agenouillais avec lui, je l’aidais à donner l’hostie. J’étais le serviteur du prêtre, qui lui-même servait Dieu. Etre le serviteur d’un serviteur de Dieu vous donne une certaine proximité avec Dieu.
- Q. : Ce que vous dites, c’est que pendant trois ans, vous avez renié votre judéité
- Z. S. : Je voulais oublier que j’étais juif. Etre juif, c’était être constamment en état d’alerte, cacher des choses, mentir. Je me suis coupé de tout cela, pour pouvoir vivre, il me fallait être catholique. Voilà pourquoi j’ai effacé ma judéité. Je peux dire qu’à cette époque, pendant ces trois ans, je n’ai pas été juif.
- Q. : Quand avez-vous cessé d’être catholique ?
- Z. S. : En 1946, un train de la Croix-Rouge m’a emmené de Pologne en France. J’avais 11 ans et, de nouveau, j’étais complètement seul. Quand je suis arrivé en France, j’ai effacé tout ce qui avait existé en Pologne. Je ne voulais me souvenir de rien. J’ai même effacé le polonais, ma langue maternelle. En effaçant tout le passé, j’ai effacé le catholicisme en même temps. Soudain, cela me semblait ridicule, risible, humiliant. Pendant longtemps, je n’ai pas voulu me rappeler que j’avais jamais fait partie de cela.

Le jeune homme d’Avignon

- Q. : Et en France, vous avez adopté une nouvelle identité, vous êtes devenu français ?
- Z. S. : J’ai appris le français très rapidement. Le français est devenu ma première langue. Je me suis battu pour être accepté dans un lycée d’Avignon et, deux ans après, j’étais déjà immergé dans la culture française. La France m’a donné un goût sans limites pour la liberté, les droits de l’homme et la laïcité. Jusqu’aujourd’hui, je pense que ce sont les fondamentaux d’une société digne de ce nom. La France m’a apporté les principes de l’universalisme et de la séparation de la religion de l’Etat. Très vite, j’ai excellé dans sa langue, son histoire, sa culture. Même mon accent n’était plus celui d’un étranger. Mais je ne me suis jamais senti Français. Je savais que je n’étais pas un Français authentique. Même si je suivais un cursus qui m’aurait facilement conduit à devenir avocat à Paris ou professeur à la Sorbonne, j’avais conscience de ne pas être chez moi en France. J’ai du mal à l’expliquer, mais c’était ainsi. Je pense que, malgré tous mes efforts pour effacer le passé, il y a eu des choses que je n’ai pas effacées. Je n’ai pas effacé la mémoire de mes parents ou de ma sœur. Ni le fait que ma mère et ma sœur sont mortes parce qu’elles étaient juives. Et moi, en tant que juif, j’étais d’ailleurs. Je ne pourrais jamais être entier en France. Il y aurait toujours une sorte de barrière.
- Q. : Quand avez-vous commencé à penser à Israël ?
- Z. S. : Avant la guerre, en Pologne, ma famille était sioniste. Et la tante qui s’occupait de moi en France était active au sein du Fonds National Juif. Il y avait des affiches, du militantisme, j’entendais des choses. A Avignon, je lisais trois journaux par jour, et je suivais les événements en Palestine. Puis est arrivée la déclaration d’indépendance de l’Etat d’Israël, en mai 1948. Votre génération ne peut pas comprendre l’enthousiasme qui nous a saisis. Cela ne faisait que quatre ans que l’Armée Rouge nous avait libérés, six ans depuis que les Nazis avaient liquidé le ghetto. Et la transition, de cette horreur et de cette impuissance, vers un Etat juif qui gagne une guerre. J’étais un garçon de 13 ans, j’avais très peur que les Arabes massacrent les Juifs. Il semblait n’y avoir que 60. 000 Juifs entourés de millions d’Arabes. Et puis, le fait que l’armée des Juifs ait combattu, gagné, et que l’Etat soit né, pour moi, c’était quelque chose au-delà de l’imaginable. Le fait même que ces Juifs, qui venaient du ghetto, qui avaient été pourchassés dans les rues, tués, massacrés, se levaient et créaient un Etat pour eux, je voyais vraiment cela comme un miracle, un événement historique d’une dimension quasi métaphysique. Soudain, il y avait des Juifs ministres, officiers. Et un passeport, des uniformes, un drapeau. Maintenant, les Juifs avaient ce qu’avaient les goyim (non juifs). Ils ne dépendaient plus des goyim. Ils pouvaient s’occuper de leurs affaires. La création de l’Etat d’Israël a été pour moi comme la création du monde, cela m’a mis dans une sorte d’extase.
- Q. : Ce que vous dites, c’est que cet enthousiasme était dû en partie au fait que ce que qui s’était produit dans le ghetto n’était pas seulement une terrible catastrophe, que c’était aussi une humiliation.
- Z. S. : Humiliation, c’est peu dire. Dans le ghetto, cela allait bien au-delà. C’était la transformation du Juif en un grain de sable. En rien. Ou en quelqu’un dont la vie ne valait absolument rien. C’était cela qui était terrible pendant ces années. L’enfant qui voit sa mère et sa sœur lui être prises. L’enfant qui voit les Juifs battus comme des animaux et conduits à l’extermination. Et soudain, là, sur la Terre d’Israël, les Juifs se battent comme les gens doivent le faire. Se battent et gagnent. On les voit, sur les photos, aux actualités cinématographiques, jeunes et forts, le fusil à l’épaule. Oui, ce sont des êtres humains comme les autres, capables de se battre pour leur liberté. Ce ne sont plus des créatures qu’on peut tuer, réduire en esclavage ou chasser. Ils ne peuvent plus être traités comme des bêtes.
- Q. : Vous dites quelque chose de brutal : dans le monde d’avant, le monde de la Shoah, les Juifs avaient perdu toute image humaine, et seule la création de l’Etat d’Israël la leur a rendue ?
- Z. S. : Ce n’est même pas la perte de l’image humaine. Car là-bas, il n’y a jamais eu d’image humaine. Les Juifs n’étaient rien. Rien, rien, rien. Les Juifs étaient de la poussière humaine. On les tuait comme on ne tue pas les animaux. Je veux dire que c’étaient des non-entités, moins que des animaux. Pour un animal, on peut ressentir de la pitié, pour les Juifs, non. Le Juif était un sous-homme. Et là, quelques années après seulement, d’un être défectueux, le Juif devient un être complet. Et cela marche. Il fait preuve de qualités humaines comme le courage et le sens du sacrifice. Pour moi, dans le sud de la France, il y avait là quelque chose d’extraordinaire, que je suis incapable de définir.

Le terminus

- Q. : Faites attention, vous parlez comme un sioniste.
- Z. S. : Je ne suis pas seulement sioniste, je suis super sioniste. Pour moi, le sionisme a été et demeure le droit pour les Juifs d’avoir leur destin et leur avenir entre leurs mains. Je considère le droit des hommes à être maîtres de leur destin comme un droit naturel. Un droit dont les Juifs ont été privés par l’histoire, et que le sionisme leur a rendu. C’est son sens profond. En cela, c’est réellement une révolution qui retentit sur la vie de chacun d’entre nous. J’ai ressenti cette révolution quand j’ai immigré en Israël, seul, à l’âge de 16 ans. Alors seulement, quand j’ai débarqué à Haïfa, j’ai cessé d’être objet de l’action d’autres et je suis devenu sujet.
- Q. : Vous arrivez en Israël à l’hiver 1951. C’est l’austérité et vous êtes seul. N’était-ce pas déprimant ?
- Z. S. : Dans le bateau, il y avait de nombreux enfants de Marseille. C’était surpeuplé, mais heureux. Je me souviens de nous debout sur le pont regarder s’approcher le Mont Carmel. Et le sol de la Terre d’Israël. Quand nous avons débarqué, quelques-uns ont réellement embrassé le quai. Moi non. Mais il y avait le sentiment étrange que j’étais arrivé, que c’était le terminus.
- Q. : Dans quel sens était-ce le terminus ?
- Z. S. : Le terminus de l’errance, des changements d’identité. D’une certaine fausseté qui faisait partie intégrante de tout cela. De ne pas être soi. Et ici, cette fausseté disparaissait soudain. Quelque chose d’artificiel se défait, quelque chose qui, parfois, pouvait être effrayant, qui avait à voir avec le besoin constant de se justifier, d’expliquer que vous vous trouviez là où vous vous trouviez. Mais ici, en Israël, il n’était plus nécessaire d’expliquer ou de justifier quoi que ce soit, et c’était un énorme soulagement. Vous ne parlez pas encore hébreu, vous ne savez pas ce que vous allez devenir, et vous êtes seul, sans rien. Mais ce que vous avez, c’est le sentiment très fort que le parcours intolérable que vous avez accompli est arrivé à son terme.
- Q. : Vous êtes un homme de gauche célèbre, un historien critique, et aujourd’hui, vous sortez du placard et devenez un sioniste de la vieille école, un véritable nationaliste israélien.
- Z. S. : Je suis un sioniste de l’ancienne gauche, à la fois sur le plan national et social. Si vous voulez, je suis un Israélien nationaliste. Il est probable que certains de mes amis dans le monde n’apprécieront pas, mais je ne leur ai jamais demandé de m’apprécier. Je suis quelqu’un qui a passé la 2e Guerre Mondiale, qui a vu la création de l’Etat, qui a immigré seul avant l’âge de 16 ans, avec pour seul but de vivre dans un Etat-nation juif. Il y a deux dimensions. L’une est que je ne crois pas possible de défendre notre existence ici sans Etat-nation. Je ne me fais aucune illusion. Je pense que si les Arabes pouvaient nous annihiler, ils le feraient avec joie. Si les Palestiniens, les Egyptiens et tous ceux qui ont signé avec nous des accords de paix pouvaient faire en sorte que nous disparaissions, ils en seraient ravis. Nous faisons encore face à un danger existentiel, et la force est toujours notre police d’assurance pour notre survie. Même si je suis contre l’occupation, et même si je souhaite que les Palestiniens aient les mêmes droits que nous, je comprends que j’ai besoin du cadre d’un Etat-nation pour me défendre. Mais il y a une autre dimension. Je suis sans religion. Je n’ai ni la sécurité ni l’arme qu’offre la religion. Ainsi, sans le cadre d’un Etat-nation, je demeurerais une personne détachée, sans lien. C’est un paradoxe. Aujourd’hui, les religieux sont ceux qui parlent au nom d’un nationalisme que je n’admets pas parce qu’il n’accepte pas le nationalisme de l’autre, le nationalisme palestinien. Mais, à vrai dire, notre besoin, celui des Israéliens laïques, du cadre d’un Etat-nation est beaucoup plus grand que celui des religieux. Si on m’enlève Israël, il ne me reste rien, je suis complètement nu. Voilà pourquoi Israël est si important pour moi. Et je ne peux pas traiter son existence comme un simple fait accompli, normal, mais comme quelque chose qui doit être constamment sauvegardé, dont nous nous assurions qu’il ne disparaisse pas. Car les choses disparaissent aisément, nous sommes instruits par l’expérience. Et parfois très vite, du jour au lendemain.
- Q. : Vous recevez le Prix Israël l’année des 60 ans de l’Etat. Tout pousse partout, Israël prospère. 57 ans après que vous avez débarqué, de quelle menace de disparition parlez-vous ?
- Z. S. : Je ne pense pas que le sionisme ait été un mouvement colonial, il n’est pas né pour prendre le contrôle d’une population, de ses ressources naturelles ni de la route vers l’Inde. Pour garantir le droit des Juifs à la liberté et à la sécurité, il avait besoin d’un bout de terre où se poser. Mais le danger est qu’à cause de l’occupation de 1967, le sionisme ne devienne rétrospectivement un mouvement colonial. Aujourd’hui déjà, nous connaissons une situation semi coloniale dont nous ne parvenons pas à nous libérer. Si nous ne trouvons pas l’énergie nécessaire pour évacuer au moins une partie de ce qui existe de l’autre côté de la ligne Verte, nous courons à la catastrophe. Nous devrons choisir entre un colonialisme au sens propre et un bi-nationalisme. Chacune de ces situations signifie pour moi la liquidation du sionisme. Un Etat colonial finira par provoquer une révolte terrible de la part de la population occupée, et un Etat binational ne mènera nulle part et débouchera sur un bain de sang. Je ne suis pas venu en Israël pour vivre dans un Etat binational. Si j’avais voulu vivre en minorité, j’aurais pu choisir des endroits plus agréables et plus en sécurité. Mais je ne suis pas venu non plus en Israël pour être un colonialiste. A mes yeux, un nationalisme qui n’est pas universaliste, qui ne respecte pas les droits nationaux des autres, est un nationalisme dangereux. C’est pourquoi je pense que le temps presse. Nous n’avons plus le temps. Ce qui m’inquiète, c’est que la vie facile que nous avons ici, l’argent, la bourse, l’immobilier à Manhattan, tout cela ne produise une terrible illusion. Après tout, il est clair que les choses ne peuvent pas durer ainsi pendant 100 ans - je ne suis pas sûr qu’elles puissent durer 10 ans. Ma génération, la génération des premières années de l’existence de l’Etat, pour qui l’existence même de cet Etat est un miracle, est en train de disparaître lentement. Pour nous, voir ce qui arrive est une tragédie. Pour moi, c’est réellement la fin du monde. Chacun veut assurer l’avenir de ses enfants et de ses petits-enfants. En tant que citoyen, je veux assurer l’avenir de la société dans laquelle je vis. Et en tant que personne, j’aspire à laisser quelque chose, une trace. Je veux être sûr que, quand je viendrai vérifier, mes filles et mes petites-filles continueront à mener ici une vie normale. C’est tout ce que je souhaite. Mais aujourd’hui, il ne me semble pas que cette vie normale soit assurée, ni l’avenir de mes filles et petites-filles. Et cela me hante véritablement. Ce qui me hante, c’est de savoir que ce qui existe aujourd’hui pourrait disparaître demain.

Notes

[1] Ce qui occasionna un débat, intellectuel mais d’une violence inouïe, en particulier avec l’historienne Anita Shapira, sorte de « gardienne du temple » du mouvement ouvrier israélien (ndt).

[2] Voir (entre autres) : « Sionisme ou colonialisme ? » [charger le lien], « L’impasse comme solution idéale » [charger le lien], « Il est temps d’agir » (appel à la révolte) [charger le lien], « Une colonisation post-sioniste » [charger le lien], ou encore « La culture du factionnalisme » [charger le lien]

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3 - débats politiques

1 - Le profond malaise d’une élue de la «Gauche » qui a gagné !

Je ne vais pas bien du tout ! Depuis le soir du premier tour des municipales et des cantonales, mais plus encore depuis le soir du 2nd tour, l’antienne de tous les lou ravis qui dirigent les différents partis de gauche me semble un immense et collectif gargarisme obscène. " Victoire de la gauche ! ", " désaveu de la politique sarkosiste ! ".
Je ne parle pas du pendant, encore plus obscène, de la droite qui affirme que le peuple (rien de moins !) réclame une accélération des " réformes ", car ce n’est pas là mon propos. Ce qui me préoccupe, c’est cette gauche, enfin, cette tranche de la représentation politique française qui se réclame de la gauche. Car, moi, je ne sais pas, je ne sais plus du tout, ce que signifie aujourd’hui le terme de gauche !
Je devrais pourtant le savoir : je suis conseillère municipale PCF, dans une ville dirigée par une liste d’union PCF (communistes et républicains) - PS, dirigée par un maire communiste ! Je dois ajouter : une ville bien gérée et dont les habitants sont très majoritairement fiers ! Une ville qui a réélu avec une forte majorité un Conseiller général communiste, comme elle l’avait fait aux dernières cantonales sur l’autre partie de la même ville ! Mais le problème n’est pas ma ville.

L’échec d’une victoire

Mon malaise date très exactement des lendemains de ce qui apparaissait comme un succès encore plus net : celui du " non " au référendum sur le traité constitutionnel européen.
Une bonne partie de ces dirigeants de gauche qui avaient appelé alors à voter pour le " oui " au traité, qui avaient donc été désavoués, s’est aussitôt attelée à confisquer une victoire populaire, aidée en cela par d’étranges silences complices des Fabius et consorts plus préoccupés par des ambitions personnelles nécessitant de larges consensus parmi les socialistes !
Ce sont encore les ambitions personnelles, la soif incœrcible du pouvoir, qui ont abouti à la transformation ultra rapide d’une victoire en échec, et cela au sein même des " collectifs pour le non " et des tentatives de rassemblement qui ont suivi le référendum. C’est qu’il y avait une présidentielle à la clé ! Alors, fini le large rassemblement populaire. Et on s’étonne de l’importance de l’abstention. Tiens, même moi, petite élue municipale, j’ai tellement fort pensé " élections, piège à cons " que dans le silence de ma conscience je me suis sentie obligée de me repentir ! Ah ! L’empreinte de la tradition judéo-chrétienne du repentir !
Mais j’ai voté ! Prise aussitôt d’une furieuse envie de casser l’urne pour retirer mon bulletin (au 2nd tour, bien sûr, pas au premier) : je me disais que dans un cas comme dans l’autre je votais libéral. Libéral affiché avec Sarkozy, libéral à peine camouflé avec Royal !

Où est-elle cette gauche qui a gagné ?

Certainement pas dans ceux qui ont rallié l’agité qui nous gouverne (car, non, il ne se contente surtout pas de présider, il préside et gouverne). Leurs silences honteux s’expliquent : on ne parle pas la bouche pleine, et ils sont trop occupés à laper la soupe.
Elle n’est pas, non plus dans le contentement repus dans Strauss K, ou dans Royal, celle qui croit toujours qu’elle a gagné la présidentielle : leur libéralisme à peine caché les met difficilement dans le camp de la gauche.
Le PCF s’est contenté de (bien) résister, et c’est déjà pas mal alors qu’on le donnait plus que moribond, disparu. Mais en se gargarisant de " victoire de la gauche ", il donne un label de bonne conduite à une aile de la politique qui n’en est justement plus, de gauche ! Celle-là même qui poursuit l’espoir, même plus secret, de le faire disparaître...
Et, même là, chez mes amis politiques, elle me semble quelque peu spécieuse cette gauche, qui, pour tenter de refaire des troupes, pêche dans les eaux bien troubles du communautarisme. Je bondis lorsque j’entends parler de " laïcité ouverte ", ou " tolérante ", et là aussi, je cherche la gauche !

Est-il encore temps d’agir ?

N’est-il pas trop tard pour créer un véritable rassemblement de gauche ? Pas un amalgame personnel de petit facteur qui essaie de créer un mouvement autour de sa personne en s’appuyant, lui aussi, sur les communautaristes. Un vrai rassemblement avec " toutes les forces éparses de la gauche sociale et républicaine ".

Très sincèrement, il y a peu, je me disais que c’était foutu pour plusieurs années, qu’il n’y avait plus que la Révolution, la vraie, avec son lot d’arrestations, de morts… Et il y a eu des voix. Des lecteurs qui ont écrit là où on voulait bien diffuser leurs courriers. J’en ai lu d’excellents, intéressants à plus d’un titres, dans des journaux " de gauche ". Il y a eu aussi l’appel d’Evariste, il y a trois/quatre semaines.Je lui ai répondu. Je lui ai dit que moi aussi, j’appelais de tous mes vœux une évolution visant toutes les forces éparses de la gauche sociale et républicaine. Je lui ai dit que je voulais travailler sur cette ligne avec ces forces éparses, et ces divers égos capables de voir un peu plus loin que leurs carrières politiques personnelles. Ce courrier qu’il m’a proposé de faire dans Respublica, c’est ma première participation.

Josiane Romero Conseillère municipale communiste
Saint-Etienne-du-Rouvray (76)

2 - Ethnodifférentialisme et ethnonationalisme, quand tu nous tiens

L’ex-Yougoslavie, la Belgique, la Chine, voilà des sujets inépuisables des impasses dans lesquels sont rentrés la droite néolibérale, la gauche social-libérale mais aussi une partie de la gauche du non au traité de Lisbonne.

Que l’extrême droite soit ethno-différentialiste et ethno-nationaliste, c’est dans sa nature et son objet.
Que la droite néolibérale promotionne les communautarismes et l’ethno-nationalisme, rien de plus normal vu que cela répond au système d’alliances des dirigeants du monde pour engager la marchandisation et la privatisation de toutes les activités humaines.
Que la gauche social-libérale emboîte le pas à la droite néolibérale, nous y sommes malheureusement habitués en regard de ce qui se passe dans l’Union européenne.
Mais que cela vienne aussi dans le non de gauche et d’une façon aussi nette, il ya de quoi se taper la tête contre les murs !
La dernière livraison de Démocratie et Socialisme, revue de Gérard Filoche et de ses amis politiques est de ce point de vue remarquable.
Numéro 153 de mars 2008 exceptionnel jusqu’à la page 21 avec de bons articles sur le social et le politique de Gérard Filoche lui-même et surtout de Jean-Jacques Chavigné. Et puis, la catastrophe arrive, éloge du nationalisme ethnique page 22 et article qui mérite un prix de la CIA page 24. A quand un référendum d’autodétermination dans tous les cantons français ! A quand l’éloge des 17 communautés institués du Liban ! Vive le Limousin libre !
Pierre Ruscassié y défend la thèse du nationalisme ethnique face au nationalisme étatique au nom du droit à l’autodétermination de toutes les ethnies. Il reproche simplement que l’autodétermination du Kosovo n’ai pas été prise après un processus référendaire.
Vincent Présumey, lui s’empêtre dans une acception erronée de la phrase Un peuple qui en opprime un autre ne saurait être libre et part du postulat que le "séparatisme" est voulu par les tibétains. Vérité révélée s’il en est ! Tout en disant qu’il faut que son soutien soit compris en dehors de la "dalaï-lama connexion" ! Mais alors, c’est qui les "bonnes organisations" au Tibet ?
Heureusement, Jean-Luc Mélenchon a sauvé l’honneur du Non de gauche (voir RESPUBLICA n°585). Cela devenait insupportable. Le simplisme trotskiste des "ennemis de mes ennemis qui deviennent mes amis" est tout bonnement insupportable. Je préfère toujours mieux l’analyse politique à l’aune de la promotion des principes républicains sans en oublier un seul (liberté, égalité, fraternité, laïcité, solidarité, développement durable, souveraineté populaire, sûreté et démocratie).

Hasta la victoria siempre (jusqu’à la victoire finale !)

Jérôme Manouchian

4 - politique française

1 - Lettre à Maurice Thorez

Pour rendre hommage à Aimé Césaire, nous vous proposons ce morceau d'Histoire, la lettre de démission d'Aimé Césaire au PCF datée de 1956 et qui permet de comprendre les principes qu'il n'a eu de cesse de défendre au cours de sa vie.
La Rédaction

AIMÉ CÉSAIRE, Député de la Martinique à MAURICE THOREZ Secrétaire Général du Parti Communiste Français.

Paris, le 24 octobre 1956

Il me serait facile d’articuler tant à l’égal du Parti Communiste Français qu’à l’égard du Communisme International tel qu’il est patronné par l’Union Soviétique, une longue liste de griefs ou de désaccords.
La moisson a été particulièrement riche ces derniers temps et les révélations de Khrouchtchev sur Staline sont telles qu’elles ont plongé, ou du moins, je l’espère, tous ceux qui ont, à quelque degré que ce soit, participé à l’action communiste dans un abîme de stupeur, de douleur et de honte.

Oui, ces morts, ces torturés, ces suppliciés, ni les réhabilitations posthumes, ni les funérailles nationales, ni les discours officiels ne prévaudront contre eux. Ils ne sont pas de ceux dont on conjure le spectre par quelque phrase mécanique.

Désormais leur visage apparaît en filigrane dans la pâte même du système, comme l’obsession de notre échec et de notre humiliation.

Et bien entendu, ce n’est pas l’attitude du Parti Communiste Français, telle qu’elle a été définie en son XIVe Congrès, attitude qui semble avant tout avoir été dictée par le dérisoire souci des dirigeants de ne pas perdre la face, qui aura permis de dissiper le malaise et obtenu que cesse de s’ulcérer et de saigner au plus vif de nos consciences une blessure.
Les faits sont là, massifs.

Je cite pêle-mêle : les précisions données par Khrouchtchev sur les méthodes de Staline ; la vraie nature des rapports entre le pouvoir de l’Etat et la classe ouvrière dans trop de démocraties populaires, rapports qui nous font croire à l’existence dans ces pays d’un véritable capitalisme d’Etat exploitant la classe ouvrière de manière pas très différente de la manière dont on en use avec la classe ouvrière dans les pays capitalistes ; la conception généralement admise dans les partis communistes de type stalinien des relations entre états et partis frères, témoin le tombereau d’injures déversées pendant cinq ans sur la Yougoslavie coupable d’avoir affirmé sa volonté d’indépendance ; le manque de signes positifs indiquant la volonté du Parti Communiste Russe et de l’Etat soviétique d’accorder leur indépendance aux autres partis communistes et aux autres états socialistes ; ou alors le manque de hâte des partis non russes et singulièrement du Parti Communiste Français à s’emparer de cette offre et à affirmer leur indépendance à l’égard de la Russie ; tout cela nous autorise à dire que - exception faite pour la Yougoslavie - dans de nombreux pays d’Europe, et au nom du Socialisme, des bureaucraties coupées du peuple, des bureaucraties usurpatrices et dont il est maintenant prouvé qu’il n’y a rien à attendre, ont réussi la piteuse merveille de transformer en cauchemar ce que l’humanité a pendant longtemps caressé comme un rêve : le Socialisme.

Quant au Parti Communiste Français, on n’a pas pu ne pas être frappé par sa répugnance à s’engager dans les voies de la déstalinisation ; sa mauvaise volonté à condamner Staline et les méthodes qui l’ont conduit au crime ; son inaltérable satisfaction de soi ; son refus de renoncer pour sa part et en ce qui le concerne aux méthodes antidémocratiques chères à Staline ; bref par tout cela qui nous autorise à parler d’un stalinisme français qui a la vie plus dure que Staline lui, même et qui, on peut le conjecturer, aurait produit en France les mêmes catastrophiques effets qu’en Russie, si le hasard avait permis qu’en France il s’installât au pouvoir.

Ici comment taire notre déception ?

Il est très vrai de dire qu’au lendemain du rapport Khrouchtchev nous avons tressailli d’espérance.

On attendait du Parti Communiste Français une autocritique probe ; une désolidarisation d’avec le crime qui le disculpât ; pas un reniement, mais un nouveau et solennel départ ; quelque chose comme le Parti Communiste fondé une seconde fois… Au lieu qu’au Havre, nous n’avons vu qu’entêtement dans l’erreur ; persévérance dans le mensonge ; absurde prétention de ne s’être jamais trompé ; bref chez des pontifes plus que jamais pontifiant, une incapacité sénile à se déprendre de soi même pour se hausser au niveau de l’événement et toutes les ruses puériles d’un orgueil sacerdotal aux abois.

Quoi ! Tous les partis communistes bougent. Italie. Pologne. Hongrie. Chine. Et le parti français, au milieu du tourbillon général, se contemple lui, même et se dit satisfait. Jamais je n’ai eu autant conscience d’un tel retard historique affligeant un grand peuple…

Mais, quelque grave que soit ce grief - et à lui seul très suffisant car faillite d’un idéal et illustration pathétique de l’échec de toute une génération - je veux ajouter un certain nombre de considérations se rapportant à ma qualité d’homme de couleur.

Disons d’un mot : qu’à la lumière des événements (et réflexion faite sur les pratiques honteuses de l’antisémitisme qui ont eu cours et continuent encore semble-t-il à avoir cours dans des pays qui se réclament du socialisme), j’ai acquis la conviction que nos voies et celles du communisme tel qu’il est mis en pratique, ne se confondent pas purement et simplement ; qu’elles ne peuvent pas se confondre purement et simplement.

Un fait à mes yeux capital est celui-ci : que nous, hommes de couleur, en ce moment précis de l’évolution historique, avons, dans notre conscience, pris possession de tout le champ de notre singularité et que nous sommes prêts à assumer sur tous les plans et dans tous les domaines les responsabilités qui découlent de cette prise de conscience.

Singularité de notre "situation dans le monde" qui ne se confond avec nulle autre.

Singularité de nos problèmes qui ne se ramènent à nul autre problème.

Singularité de notre histoire coupée de terribles avatars qui n’appartiennent qu’à elle.

Singularité de notre culture que nous voulons vivre de manière de plus en plus réelle.

Qu’en résulte-t-il, sinon que nos voies vers l’avenir, je dis toutes nos voies, la voie politique comme la voie culturelle, ne sont pas toutes faites ; qu’elles sont à découvrir, et que les soins de cette découverte ne regardent que nous ? C’est assez dire que nous sommes convaincus que nos questions, ou si l’on veut la question coloniale, ne peut pas être traitée comme une partie d’un ensemble plus important, une partie sur laquelle d’autres pourront transiger ou passer tel compromis qu’il leur semblera juste de passer eu égard à une situation générale qu’ils auront seuls à apprécier.

Ici il est clair que je fais allusion au vote du Parti Communiste Français sur l’Algérie, vote par lequel le parti accordait au gouvernement Guy Mollet Lacoste les pleins pouvoirs pour sa politique en Afrique du Nord - éventualité dont nous n’avons aucune garantie qu’elle ne puisse se renouveler. En tout cas, il est constant que notre lutte, la lutte des peuples coloniaux contre le colonialisme, la lutte des peuples de couleur contre le racisme est beaucoup plus complexe - que dis-je, d’une tout autre nature que la lutte de l’ouvrier français contre le capitalisme français et ne saurait en aucune manière, être considérée comme une partie, un fragment de cette lutte.

Je me suis souvent posé la question de savoir si dans des sociétés comme les nôtres, rurales comme elles sont, les sociétés de paysannerie, où la classe ouvrière est infime et où par contre, les classes moyennes ont une importance politique sans rapport avec leur importance numérique réelle, les conditions politiques et sociales permettaient dans le contexte actuel, une action efficace d’organisations communistes agissant isolément (à plus forte raison d’organisations communistes fédérées ou inféodées au parti communiste de la métropole) et si, au lieu de rejeter à priori et au nom d’une idéologie exclusive, des hommes pourtant honnêtes et foncièrement anticolonialistes, il n’y avait pas plutôt lieu de rechercher une forme d’organisation aussi large et souple que possible, une forme d’organisation susceptible de donner élan au plus grand nombre, plutôt qu’à caporaliser un petit nombre. Une forme d’organisation où les marxistes seraient non pas noyés, mais où ils joueraient leur rôle de levain, d’inspirateur, d’orienteur et non celui qu’à présent ils jouent objectivement, de diviseurs des forces populaires.

L’impasse où nous sommes aujourd’hui aux Antilles, malgré nos succès électoraux, me paraît trancher la question : j’opte pour le plus large contre le plus étroit ; pour le mouvement qui nous met au coude à coude avec les autres et contre celui qui nous laisse entre nous ; pour celui qui rassemble les énergies contre celui qui les divise en chapelles, en sectes, en églises ; pour celui qui libère l’énergie créatrice des masses contre celui qui la canalise et finalement la stérilise.

En Europe, l’unité des forces de gauche est à l’ordre du jour ; les morceaux disjoints du mouvement progressiste tendent à se ressouder, et nul doute que ce mouvement d’unité deviendrait irrésistible si du côté des partis communistes staliniens, on se décidait à jeter par dessus bord tout l’impedimenta des préjugés, des habitudes et des méthodes hérités de Staline.

Nul doute que dans ce cas, toute raison, mieux, tout prétexte de bouder l’unité serait enlevé à ceux qui dans les autres partis de gauche ne veulent pas de l’unité, et que de ce fait les adversaires de l’unité se trouveraient isolés et réduits à l’impuissance.

Et alors, comment dans notre pays, où le plus souvent, la division est artificielle, venue du dehors, branchée qu’elle est sur les divisions européennes abusivement transplantées dans nos politiques locales, comment ne serions~nous pas décidés à sacrifier tout, je dis tout le secondaire, pour retrouver l’essentiel ; cette unité avec des frères, avec des camarades qui est le rempart de notre force et le gage de notre confiance en l’avenir.

D’ailleurs, ici, c’est la vie elle-même qui tranche. Voyez donc le grand souffle d’unité qui passe sur tous les pays noirs ! Voyez comme, çà et là, se remaille le tissu rompu ! C’est que l’expérience, une expérience durement acquise, nous a enseigné qu’il n’y a à notre disposition qu’une arme, une seule efficace, une seule non ébréchée : l’arme de l’unité, l’arme du rassemblement anticolonialiste de toutes les volontés, et que le temps de notre dispersion au gré du clivage des partis métropolitains est aussi le temps de notre faiblesse et de nos défaites.

Pour ma part, je crois que les peuples noirs sont riches d’énergie, de passion qu’il ne leur manque ni vigueur, ni imagination mais que ces forces ne peuvent que s’étioler dans des organisations qui ne leur sont pas propres, faites pour eux, faites par eux et adaptées à des fins qu’eux seuls peuvent déterminer.

Ce n’est pas volonté de se battre seul et dédain de toute alliance. C’est volonté de ne pas confondre alliance et subordination. Solidarité et démission. Or c’est là très exactement de quoi nous menacent quelques uns des défauts très apparents que nous constatons chez les membres du Parti Communiste Français : leur assimilationisme invétéré ; leur chauvinisme inconscient ; leur conviction passablement primaire - qu’ils partagent avec les bourgeois européens - de la supériorité omnilatérale de l’Occident ; leur croyance que l’évolution telle qu’elle s’est opérée en Europe est la seule possible ; la seule désirable ; qu’elle est celle par laquelle le monde entier devra passer ; pour tout dire, leur croyance rarement avouée, mais réelle, à la civilisation avec un grand C ; au progrès avec un grand P (témoin leur hostilité à ce qu’ils appellent avec dédain le "relativisme culturel", tous défauts qui bien entendu culminent dans la gent littéraire qui à propos de tout et de rien dogmatise au nom du parti).

Il faut dire en passant que les communistes français ont été à bonne école. Celle de Staline. Et Staline est bel et bien celui qui a ré introduit dans la pensée socialiste, la notion de peuples « avancés » et de peuples « attardés ». Et s’il parle du devoir du peuple avancé (en l’espèce les Grands Russes) d’aider les peuples arriérés à rattraper leur retard, je ne sache pas que le paternalisme colonialiste proclame une autre prétention.

Dans le cas de Staline et de ses sectateurs, ce n’est peut-être pas de paternalisme qu’il s’agit. Mais c’est à coup sûr de quelque chose qui lui ressemble à s’y méprendre.

Inventons le mot : c’est du « fraternalisme ».

Car il s’agit bel et bien d’un frère, d’un grand frère qui, imbu de sa supériorité et sûr de son expérience, vous prend la main (d’une main hélas ! parfois rude) pour vous conduire sur la route où il sait se trouver la Raison et le Progrès.

Or c’est très exactement ce dont nous ne voulons pas. Ce dont nous ne voulons plus.
Nous voulons que nos sociétés s’élèvent à un degré supérieur de développement, mais d’ elles-mêmes, par croissance interne, par nécessité intérieure, par progrès organique, sans que rien d’extérieur vienne gauchir cette croissance, ou l’altérer ou la compromettre.
Dans ces conditions on comprend que nous ne puissions donner à personne délégation pour penser pour nous ; délégation pour chercher pour nous ; que nous ne puissions désormais accepter que qui que ce soit, fût-ce le meilleur de nos amis, se porte fort pour nous. Si le but de toute politique progressiste est de rendre un jour leur liberté aux peuples colonisés, au moins faut-il que l’action quotidienne des partis progressistes n’entre pas en contradiction avec la fin recherchée et ne détruise pas tous les jours les bases mêmes, les bases organisationnelles comme les bases psychologiques de cette future liberté, lesquelles se ramènent à un seul postulat : le droit à l’initiative.

Je crois en avoir assez dit pour faire comprendre que ce n’est ni le marxisme ni le communisme que je renie, que c’est l’usage que certains ont fait du marxisme et du communisme que je réprouve. Que ce que je veux, c’est que marxisme et communisme soient mis au service des peuples noirs, et non les peuples noirs au service du marxisme et du communisme. Que la doctrine et le mouvement soient faits pour les hommes, non les hommes pour la doctrine ou pour le mouvement. Et bien entendu cela n’est pas valable pour les seuls communistes. Et si j’étais chrétien ou musulman, je dirais la même chose. Qu’aucune doctrine ne vaut que repensée par nous, que repensée pour nous, que convertie à nous. Cela a l’air d’aller de soi. Et pourtant dans les faits cela ne va pas de soi.

Et c’est ici une véritable révolution copernicienne qu’il faut imposer, tant est enracinée en Europe, et dans tous les partis, et dans tous les domaines, de l’extrême droite à l’extrême gauche, l’habitude de faire pour nous, l’habitude de disposer pour nous, l’habitude de penser pour nous, bref l’habitude de nous contester ce droit à l’initiative dont je parlais tout à l’heure et qui est, en définitive, le droit à la personnalité.

C’est sans doute là l’essentiel de l’affaire.

Il existe un communisme chinois. Sans très bien le connaître, j’ai à son égard un préjugé des plus favorables. Et j’attends de lui qu’il ne verse pas dans les monstrueuses erreurs qui ont défiguré le communisme européen. Mais il m’intéresserait aussi et plus encore, de voir éclore et s’épanouir la variété africaine du communisme. Il nous proposerait sans doute des variantes utiles, précieuses, originales et nos vieilles sagesses nuanceraient, j’en suis sûr, ou compléteraient bien des points de la doctrine.

Mais je dis qu’il n’y aura jamais de variante africaine, ou malgache, ou antillaise du communisme, parce que le communisme français trouve plus commode de nous imposer la sienne. Qu’il n’y aura jamais de communisme africain, malgache ou antillais, parce que le Parti Communiste Français pense ses devoirs envers les peuples coloniaux en termes de magistère à exercer, et que l’anticolonialisme même des communistes français porte encore les stigmates de ce colonialisme qu’il combat. Ou encore, ce qui revient au même, qu’il n’y aura pas de communisme propre à chacun des pays coloniaux qui dépendent de la France, tant que les bureaux de la rue Saint- Georges, les bureaux de la section coloniale du Parti Communiste Français, ce parfait pendant du Ministère de la rue Oudinot, persisteront à penser à nos pays comme à terres de missions ou pays sous mandat. Pour revenir à notre propos, l’époque que nous vivons est sous le signe d’un double échec : l’un évident, depuis longtemps, celui du capitalisme. Mais aussi l’autre, celui, effroyable, de ce que pendant trop longtemps nous avons pris pour du socialisme ce qui n’était que du stalinisme. Le résultat est qu’à l’heure actuelle le monde est dans l’impasse.

Cela ne peut signifier qu’une chose : non pas qu’il n’y a pas de route pour en sortir, mais que l’heure est venue d’abandonner toutes les vieilles routes. Celles qui ont mené à l’imposture, à la tyrannie, au crime.

C’est assez dire que pour notre part, nous ne voulons plus nous contenter d’assister à la politique des autres. Au piétinement des autres. Aux combinaisons des autres. Aux rafistolages de consciences ou a la casuistique des autres.

L’heure de nous mêmes a sonné.

Et ce que je viens de dire des nègres n’est pas valable que pour les nègres. Oui tout peut encore être sauvé, tout, même le pseudo socialisme installé çà et là en Europe par Staline, à condition que l’initiative soit rendue aux peuples qui jusqu’id n’ont fait que la subir ; à condition que le pouvoir descende et s’enracine dans le peuple, et je ne cache pas que la fermentation qui se produit à l’heure actuelle en Pologne, par exemple, me remplit de joie et d’espoir.

Ici que l’on me permette de penser plus particulièrement à mon malheureux pays : la Martinique.

J’y pense pour constater que le Parti Communiste Français est dans l’incapacité absolue de lui offrir une quelconque perspective qui soit autre chose qu’utopique ; que le Parti Communiste Français ne s’est jamais soucié de lui en offrir ; qu’il n’a jamais pensé à nous qu’en fonction d’une stratégie mondiale au demeurant déroutante.

J’y pense pour constater que le communisme a achevé de lui passer autour du cou le nœud coulant de l’assimilation ; que le communisme a achevé de l’isoler dans le bassin caraïbe ; qu’il a achevé de le plonger dans une manière de ghetto insulaire ; qu’il a achevé de le couper des autres pays antillais dont l’expérience pourrait lui être à la fois instructive et fructueuse (car ils ont les mêmes problèmes que nous et leur évolution démocratique est impétueuse) : que le communisme enfin, a achevé de nous couper de l’Afrique Noire dont l’évolution se dessine désormais à contre-sens de la nôtre. Et pourtant cette Afrique Noire, la mère de notre culture et de notre civilisation antillaise, c’est d’elle que j’attends la régénération des Antilles j pas de l’Europe qui ne peut que parfaire notre aliénation, mais de l’Afrique qui seule peut revitaliser, repersonnaliser les Antilles. Je sais bien. On nous offre en échange la solidarité avec le peuple français ; avec le prolétariat français, et à travers le communisme, avec les prolétariats mondiaux. Je ne nie pas ces réalités. Mais je ne veux pas ériger ces solidarités en métaphysique. Il n’y a pas d’alliés de droit divin. Il y a des alliés que nous impose le lieu, le moment et la nature des choses. Et si l’alliance avec le prolétariat français est exclusive, si elle tend à nous faire oublier ou contrarier d’autres alliances nécessaires et naturelles, légitimes et fécondantes, si le communisme saccage nos amitiés les plus vivifiantes, celle qui nous unit à l’Afrique, alors je dis que le communisme nous a rendu un bien mauvais service en nous faisant troquer la Fraternité vivante contre ce qui risque d’apparaître comme la plus froide des abstractions. Je préviens une objection. Provincialisme ? Non pas. Je ne m’enterre pas dans un particularisme étroit. Mais je ne veux pas non plus me perdre dans un universalisme décharné.

Il y a deux manières de se perde : par ségrégation murée dans le particulier ou par dilution dans l’"universel".

Ma conception de l’universel est celle d’un universel riche de tout le particulier, riche de tous les particuliers, approfondissement et coexistence de tous les particuliers. Alors ? Alors il nous faudra avoir la patience de reprendre l’ouvrage, la force de refaire ce qui a été défait ; la force d’inventer au lieu de suivre ; la force « d’inventer » notre route et de la débarrasser des formes toutes faites, des formes pétrifiées qui l’obstruent. En bref, nous considérons désormais comme notre devoir de conjuguer nos efforts à ceux de tous les hommes épris de justice et de vérité pour bâtir des organisations susceptibles d’aider de manière probe et efficace les peuples noirs dans leur lutte pour aujourd’hui et pour demain : lutte pour la justice ; lutte pour la culture ; lutte pour la dignité et la liberté ; des organisations capables en un mot de les préparer dans tous les domaines à assumer de manière autonome les lourdes responsabilités que l’histoire en ce moment même fait peser si lourdement sur leurs épaules.

Dans ces conditions, je vous prie de recevoir ma démission de membre du Parti Communiste Français.

AIME CÉSAIRE.
Paris, le 24 octobre 1956

Aimé Césaire

2 - Franchises médicales : une mesure "stupide et obscène"

Nous vous proposons cet article de Rue89.com comme compte-rendu d'un évènement que nous avons soutenu.
La Rédaction

Des boîtes de médicaments ont été déposées devant les préfectures pour dénoncer ce financement de la Sécu par les malades.

Entrées en vigueur le 1er janvier, les franchises médicales ont toujours du mal à passer. A l’appel du Collectif national contre les franchises médicales, plusieurs centaines de personnes dans toute la France sont allées déposer samedi des boîtes de médicaments vides devant les préfectures en signe de protestation. Ainsi que devant le ministère de la Santé à Paris 50 centimes d’euro par boîte de médicaments et par acte paramédical, 2 euros par transport sanitaire, le tout dans la limite de 50 euros par an. La recette des franchises médicales devrait permettre, selon le gouvernement, de dégager 850 millions d’euros par an et de financer des dépenses nouvelles pour le plan Alzheimer, l’amélioration des soins palliatifs et la lutte contre le cancer.

Mais les griefs faits à leur encontre sont multiples. D’abord sur l’application. Le collectif, composé de 70 associations, syndicats et partis de gauche, dénonce :

"Les franchises sur les soins sont appliquées avec un tel zèle que certaines caisses de Sécurité sociale continuent de les prélever au-delà du plafond de 50 euros, tandis que des patients renoncent à certains soins."

Ensuite sur le principe même du dispositif. Instaurer les franchises médicales revient à faire financer le système d’assurance maladie par les malades eux-mêmes. Avec la stigmatisation des patients atteints d’ALD (Affection de longue durée), l’argument est au cœur du combat de Bruno-Pascal Chevalier, malade du Sida en grève des soins, qui a lancé une pétition déjà signée par 170000 personnes.

"Le montant peut être augmenté par décret du jour au lendemain"

Deux millions de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté ne sont pas non plus exonérées de ces franchises médicales. Pas assez riches pour figurer au-dessus de ce seuil, mais trop riches pour ne pas avoir à payer ces frais médicaux supplémentaires.

Car ces frais s’ajoutent à d’autres franchises déjà existantes. Depuis 2004, la Sécu perçoit en effet un euro sur chaque consultation ou acte médical, également dans la limite d’un plafond de 50 euros par an.

Le docteur Christian Lehmann, porte-parole du collectif, précise qu’à cette double franchise s’en ajoutent encore deux de plus, qui sont "un forfait de 18 euros sur les actes techniques de 93 euros et un forfait hospitalier journalier de 15 euros" :

"Seul le principe de la franchise a été voté au Parlement, rappelle enfin Christian Lehmann, et son montant peut être augmenté par décret du jour au lendemain. " C’est pour éviter une telle augmentation qu’il participait ce samedi à la manifestation, même s’il confie n’attendre "rien de Nicolas Sarkozy" et "rien de Roselyne Bachelot". La ministre de la Santé qui n’était pas présente samedi pour voir les marches de son ministère jonchées de boîtes de médicaments vides.

Voir cet article sur son site d'origine

Julien Martin rue89.com

3 - T’as pas cent balles ?

En ces temps ou le pouvoir d’achat fait débat dans notre pays, il serait temps de s’interroger sur la vision qu’ont nos élus des valeurs de partage.

On a beaucoup glosé sur les 200 % d’augmentation que s’est quasi attribué notre Président, protestant qu’il était moins payé que le premier Ministre.
Il est vrai que sans être méchant, on ne peut que constater, en forçant un peu le trait, que l’un des deux abat un boulot monstre, et que l’autre est plutot dans la passivité.%%

Mais que pense la démocratie de tout çà ?

Clisthène, fondateur de la démocratie, était, ne l’oublions pas , un aristocrate.
le principe de la démocratie était fondée sur l’égalité des riches et des pauvres.
Elle affirmait « plus le pouvoir est grand, moins il risque de durer ». leçon à méditer pour ceux qui ont les dents longues.
La démocratie était beaucoup moins généreuse avec les élus à ses débuts et la règle était de verser un salaire symbolique aux élus.
% Il en est autrement aujourd’hui, puisque les élus touchent un pactole considérable, sans compter les avantages en nature, les frais de secrétariat, de déplacement, etc, qui multiplie plus que par deux l’argent perçu. Sans parler des allocations chomages versées pendant de nombreuses années après que l’élu ne le soit plus.
Le détail le voici : lorsqu’on ajoute tous les avantages prévus qui s’ajoutent au salaire : ’un sénateur coûte à l’état 2557 € par jour, un député 2384 € par jour, un conseiller européen 22000 euros par mois, plus 3785 € pour les frais.
Quand aux conseillers généraux, et régionaux, ils ne sont pas en reste : leur salaire n’est pas non plus négligeable et varie en fonction du nombre des administrés.
Et n’oublions pas la retraite qui se monte pour les députés à 2192 par mois, et à 3294 euros pour les sénateurs.
Et puis il y a les président des communautés d’agglomération qui ont vu leurs salaires augmenter de 56% en moins de trois ans.
Je ne parle pas des ministres, puisque chacun sait qu’ils sont nommés, et non pas élus, ce qui est contraire aux principes de la démocratie.
Pour le détail de toutes ces prestations, faites un tour à « cequenouscoutentnosélus » sur le moteur de recherche de votre choix.
Certains préconisent un système plus juste, basé sur l’euro symbolique, tous frais payés, ce qui correspond à peu près à ce qui se passait dans la Grèce antique, berceau de la démocratie.
L’avantage serait double, celui de réduire les dépenses de l’Etat, (autrement qu’en diminuant le nombre des fonctionnaires) et de décourager les candidats opportunistes tentés de s’engager dans la politique, par seul intéret financier.
Nous nous retrouverions avec des citoyens vraiment désireux d’œuvrer pour le bien des concitoyens, sans être tentés de s’installer dans la carrière politique, dont on connaît les tentations et les errements.
Les valeurs de notre pays ne sont-elles pas basées sur l’égalité, la fraternité ?
Quelle égalité entre un élu qui touche un pactole chaque mois, et le smicard qui se contente de quelques miettes, à qui l’on dit que les caisses de l’état sont vides après s’etre octroyé un salaire de nabab et à qui l’on conseille de travailler plus pour s’en sortir ?
A un moment ou la baguette de pain a augmenté de 85% en six ans, le lait 183 % en six ans, le café dans les bistrots passé de 6F (0,91 €) à 1,50 euros en six ans, Le smic lui n’a augmenté que de 36% en sept ans.
Suggérons à notre président de réduire le salaire des élus, en augmentant celui des smicards.
Aujourd’hui, nous en sommes à un nouveau concept, travailler plus pour gagner moins.

Car comme disait un vieil ami africain :
« tout a une fin, sauf la banane qui en a deux ».

Olivier Cabanel

5 - à lire, à voir ou à écouter

1 - PROCHOIX n°43

Fin de vie - Certifiées vierges - Sans papières - Droit à l'IVG - Identité confessionnelle (Printemps 2008)

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crédit : © www.prochoix.org

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ReSPUBLICA

Agenda

lundi 5 mai 2008, 18:45

Pourquoi est-il nécessaire de lier le combat laïque au combat social ?

Salle Quintrand,
04100 MANOSQUE
Alpes de Haute Provence

Réunion publique, avec Bernard TEPER Président National de L'UFAL

à l'initiative de l'UFAL 04 soutenue par le "Collectif 04 des Services publics", Attac - LCR - PCF - Les Amis de l'Humanité - Fondation Copernic... (Liste en cours)

Contact: 06.62.85.73.38

jeudi 8 - dimanche 11 mai 08

UFAL: 4ème édition de l’Université populaire laïque

Mazères (09)

L’UFAL organise sa 4ème université populaire laïque à Mazères (Ariège) du 8 au 12 mai. Profitons du pont et des beaux jours pour se rencontrer, débattre et se détendre dans un cadre relaxant.

Cet événement crucial pour la campagne d’éducation populaire de l’UFAL a besoin de vous pour construire la meilleure stratégie d’action. Le programme fourni de l’UPL abordera tous les thèmes qui constituent le combat global et progressiste de notre association laïque et républicaine.

Télécharger le bulletin d'inscription et toutes les informations nécessaire ici.

 

Programme

Jeudi 8 mai

Vendredi 9 mai

Samedi 10 mai

Dimanche 11 mai

samedi 24 mai 2008, 10:00

"Quelle modernité pour la laïcité ?"

en Sorbonne (amphi Milne Ewards)
Paris

Attention les horaires ne sont pas encore connu, 10h est à titre indicatif, voir les détails à cette adresse: Philosophe dans la Cité

Le premier colloque du Philosophe dans la Cité

Deux discussions :

Les religions ont-elles besoin du concept de laïcité positive ?

Faut-il réinventer la laïcité à l'aune des enjeux du XXIe siècle ?

Une table ronde : Quelle laïcité européenne ?

Ce premier colloque est parrainé par Mr Pierre-Henri TAVOILLOT (Sorbonne - Collège de Philosophie).

Voir l'agenda complet en ligne

ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine est édité par l'association:
"Les Amis de ReSPUBLICA"
27 rue de la Réunion
75020 PARIS

Courriel: respublica@gaucherepublicaine.org
Site: http://www.gaucherepublicaine.org