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Chronique d'Evariste
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Avec Macron, le « théorème de ReSPUBLICA » va encore s’appliquer !

par Évariste

 

Mais quel est-il ? Eh bien le voici : « Depuis le tournant néolibéral de 1983, tous les gouvernements ont approfondi la ligne néolibérale et donc chaque gouvernement a fait pire pour les travailleurs que le précédent ». Macron s’apprête à faire vivre ce « théorème ». Pas parce qu’il est plus méchant ou moins volontaire, mais tout simplement parce que, comme nous l’avons précisé dans notre dernière chronique, il n’y a plus place pour l’émancipation dans le capitalisme et que si on souhaite rester dans le capitalisme, la ligne néolibérale s’impose du fait des lois tendancielles du capitalisme.

Alors, le premier gouvernement Macron, de quoi est-il le nom ? C’est un gouvernement totalement ordo-libéral, c’est-à-dire libéral-austéritaire en économie tout en étant soucieux de cohésion sociale (Solidarités et Santé, Cohésion des territoires, etc.) mais qui dépolitise la gestion de l’ensemble des problèmes économiques et sociaux en mettant aux manettes des politiques économiques des ministres le plus à droite possible et aux manettes des politiques régaliennes des anciens socialistes ; cerise sur le gâteau, l’entrée en fanfare des technocrates intimement insérés dans l’oligarchie capitaliste pour représenter la société civile. Maintenant, on sait ce que veut dire « venant de la société civile » : cela veut dire « technocrates intimement insérés dans l’oligarchie capitaliste ». Là, au moins, c’est clair ! Reste le cas Hulot, un intégriste de l’anti-croissance dans un gouvernement pro-capitaliste… Alors que l’écologie est par nature anti-productiviste et le capitalisme par nature productiviste et destructeur de l’écosystème. Fermez le ban !

Dans son discours de présentation de sa politique, lors de sa prise de fonction, Bruno Le Maire a directement prôné l’équilibre budgétaire. En français populaire, cela veut dire intensification des politiques austéritaires pour les couches populaires et les couches moyennes intermédiaires. Prendre comme ministre de l’Éducation le directeur d’une école privée catholique pour l’élite commerciale et financière, proche de l’Institut Montaigne, spécialiste des lancements des gadgets médiatiques en matière scolaire, quel beau symbole ! Une ministre du Travail qui passe directement d’une direction des ressources humaines de multinationale du CAC 40 au gouvernement, quel présage pour la loi Travail II ?

Avec la nouvelle secrétaire d’État (non, pas de ministère…) à l’égalité entre les femmes et les hommes, on atteint du lourd.  Le 22 juillet 2014, celle-ci a publié dans le Huffington Post une tribune qui s’en prend à la loi de 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles à l’école. « L’article 1er de la loi de 1905 prévoit que la République “ne reconnaît ne salarie ne subventionne aucun culte”. Ni plus ni moins. Interdire le voile c’est reconnaître le voile comme signe religieux, donc reconnaître une religion, interdire le voile à l’école est donc contraire à la loi de 1905 ». Un sommet de sophisme que seuls les islamo-gauchistes applaudiront !

On a aussi une ministre de la Santé qui avait déclaré au Sénat, selon I le 20 juillet 2016 : « On commence à avoir des experts institutionnels qui n’ont plus aucun lien avec l’industrie pharmaceutique et dont on peut se demander, à terme, quelle va être leur expertise, puisqu’ils ne sont plus à aucun “board”. »

Voilà qui est pour le moins ambigu sur les conflits d’intérêts, non ? Et elle vient de prendre comme directeur de cabinet un dirigeant des assurances privées. Elle est pas belle l’histoire !

Mais l’oligarchie est structurée. Le président de la Fédération des hôpitaux de France (FHF) est immédiatement entré en soutien à la nouvelle ministre en proposant d’intégrer dans le service public les cliniques privées à but lucratif pour les actionnaires. Les partenariats public-privé, nouvelle manière. Mieux que cela, il a dénoncé la démobilisation et la démoralisation des personnels alors qu’il a lui-même contribué à la politique de l’hôpital-entreprise en se félicitant que l’hôpital ait gagné des « parts de marché ». On ne se préoccupe pas des besoins et des inégalités sociales de santé grandissantes, mais seulement « des parts de marché ». Il préconise un nouvel alourdissement de la tarification à l’activité pour tenir compte de la qualité alors que c’est la tarification à l’activité qui en est l’une des causes de la baisse de qualité !

En voilà encore un auquel s’applique la phrase modifiée de Bossuet que nous notions dans la chronique d’Evariste n° 841 : « Que de discours  dans la campagne du deuxième tour pour détourner la France des malheurs publics, émanant  de ceux qui ne s’opposent pas à la politique qui est la source de ces mêmes malheurs. Que dis-je? Qui l’approuvent, qui y souscrivent ! »

Et pourtant, malgré les différents dispositifs d’aide à l’accès aux soins : PUMA (Protection universelle maladie), CMU-C (couverture maladie universelle complémentaire) et ACS (aide à l’acquisition d’une complémentaire santé), près d’un quart des assurés sociaux renoncerait aux soins. C’est ce que révèle une étude menée par l’Odenore (Observatoire des non-recours aux droits et aux services) auprès de 28 452 usagers de l’assurance maladie, dans 18 départements répartis sur l’ensemble du territoire. Mais de cela, point de souci pour le gouvernement Macron-Philippe. Car l’oligarchie est au-dessus de ces contingences terrestres.

Une chose est sûre : comme nous l’avons dit dans notre dernière chronique, il va falloir être déterminés dans la séquence des législatives, plus forts dans les luttes sociales et enfin plus nombreux à mener la bataille de l’éducation populaire refondée, seule possibilité pour produire une nouvelle hégémonie culturelle.

Hasta la victoria siempre !

Politique française
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Pour gagner, il faut choisir

par Brigitte Dionnet

 

Texte repris de L’Humanité du 18 mai 2017 : http://www.humanite.fr/pour-gagner-il-faut-choisir-636282
Brigitte Dionnet est ancienne membre du Conseil national du PCF

Nous vivons aujourd’hui les tristes conséquences pour le peuple d’un refus par la direction du PCF de rompre avec la stratégie d’union avec le PS en lieu et place d’un objectif politique de transformation sociale. Depuis le « programme commun » puis l’élection de François Mitterrand, nous n’avons eu de cesse de courir derrière le PS pour d’hypothétiques positions électorales se soldant à chaque fois par, au contraire, un affaiblissement électoral de notre parti. Et plus on s’affaiblissait, et plus on se mettait en position de demandeur à son égard… Jusqu’au choc de 2002 ! Nous osons alors en 2004 présenter des listes autonomes du PS aux élections régionales dans certaines régions, et en 2005 affronter la social-démocratie en affirmant à propos du TCE « quand on est de gauche on vote non ». Nombreux sont celles et ceux qui se souviennent avoir eu à subir alors les assauts de certains dirigeants communistes contre cette affirmation! Pourtant, la victoire de ce rassemblement, sur un contenu et non sur des ententes d’appareil, ouvrait  tous les espoirs pour qui croyait que l’ambition révolutionnaire avait encore de l’avenir dans notre pays.

Mais il y a eu 2007 et le 1,9 % de la candidature communiste. La rudesse du choc n’a eu d’égal que l’audace de la rupture stratégique qu’il provoqua  avec la décision de travailler à une autre construction à gauche trouvant, avec la sortie de Jean-Luc Mélenchon du PS, la possibilité de créer le « Front de Gauche ». Malheureusement, là encore, dès les régionales de 2010 il fut impossible d’envoyer un message clair à notre peuple avec partout de belles listes « Front de gauche » autonomes. Et au congrès de 2010 les mêmes qui, aujourd’hui, ont condamné le Front de gauche au prétexte qu’il était trop structuré « par le haut »,  repoussaient la proposition de créer une « association des partisans du Front de gauche » pour permettre à des femmes, des hommes , des syndicalistes responsables d’associations ou autres de participer, à  égalité, à une dynamique politique et citoyenne originale. Et le bon résultat de Jean-Luc Mélenchon en 2012 a provoqué dans la direction du PCF une véritable angoisse alors que le PS allait de nouveau avoir toutes les clés des affaires de la France en mains. Et plutôt  que de mener le débat politique et de permettre qu’il se développe au sein de notre parti, la direction lança en pâture aux adhérent-e-s les leurres des « egos »  alors qu’elle  refusait, en fait, de porter l’idée d’une « opposition de gauche » dans le pays et au sein de l’Assemblée Nationale.

Ce que nous vivons aujourd’hui est la triste suite logique de ce long processus. Une tristesse partagée par de nombreux adhérent-e-s  qui sont aussi  en colère de ne pas être écoutés par leur direction dans leur volonté de construire du neuf. 

Car,  le 10 janvier 2016, un appel à une primaire « de gauche » était lancé dans Libération par Thomas Piketty, Daniel Cohn-Bendit, etc… et la direction de notre Parti lui emboitait le pas sans demander l’avis des communistes. Jean-Luc Mélenchon  annonçait alors sa candidature en février, après le refus du Parti communiste de sortir de ce processus qui cassait la démarche du Front de gauche. Que dire enfin des atermoiements à mettre en discussion dans le parti la proposition de candidature de Jean Luc Mélenchon, y compris au congrès en juin. Et pour finir, jusqu’à ce que les sondages témoignent du piètre résultat qu’allait réaliser Benoit Hamon, la même direction du Parti ne ménageait pas ses efforts pour en appeler au retrait de la candidature de Jean-Luc Mélenchon au nom d’une pression politique insistante en faveur d’une « candidature de rassemblement à gauche ».

La situation à la veille de ces élections législatives n’a donc rien d’étonnant. Elle tient encore au refus de la direction de notre parti à rompre une bonne fois pour toutes avec une stratégie d’alliance avec le PS- ou ce qu’il en reste- pour construire autrement et avec d’autres l’alternative politique indispensable à la nouvelle révolution que comme communiste on peut avoir envie de construire. 

Non, on ne peut plus louvoyer et espérer conserver des positions électorales sur  « le tapis vert » des alliances de couloir. Soit on choisit une nouvelle construction politique soit on tente de colmater des brèches avec des alliances à géométrie variable continuant d’inclure le PS ou ses satellites. Et qu’on ne vienne pas me dire qu’il ne faut pas exclure «  les électeurs socialistes » de cette construction. C’est justement par respect pour ces femmes et ces hommes qu’il faut définitivement retirer au social- libéralisme toute possibilité de capter les aspirations populaires pour mieux les étouffer. Un des aspects les plus encourageants de cette campagne est justement d’avoir permis à notre peuple de se mêler de son avenir en débattant d’un projet politique et d’un contenu programmatique fondamental. Alors que d’aucuns voulaient le cantonner au seul objectif de lutter contre le FN sans mettre en avant les raisons qui conduisaient à sa montée.

Alors maintenant les cris d’orfraie et les nouveaux mensonges et sous-entendus pour faire passer les pilules de l’inconsistance politique ça suffit !

Il faut à l’Assemblée Nationale des député-e-s incorruptibles et engagés sur une politique résolument ancrée sur les intérêts populaires. Et pour cela, des alliances claires entre les forces qui veulent y contribuer. La politique de l’alliance de la carpe et du lapin n’a plus lieu d’être. Il faut reprendre le chemin de la démarche qui a conduit à construire le Front de gauche : celle de la résistance au libéralisme, de la confiance dans le peuple  et du courage politique pour faire valoir, avec lui, ses intérêts.

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Aujourd’hui et demain : qui va s’occuper de nos malades âgés ?

par Christophe Trivalle

 

Le Dr Christophe Trivalle est chef de service SSR Alzheimer, Hôpital Paul Brousse, AP-HP

Un rapport récent de la Drees a été largement repris dans la presse car il annonçait une baisse de l’hospitalisation des personnes âgées d’ici 2030. Cette baisse concernait surtout un scénario très optimiste et un peu un scénario médian, et reposait principalement sur un développement de l’ambulatoire. Or ce développement de l’ambulatoire ne peut se faire correctement et en toute sécurité pour les malades que s’il y a suffisamment de médecins, d’infirmières, de kinésithérapeutes pour s’occuper des malades en ville, et pour les plus âgés d’aides-soignantes ou d’auxiliaires de vie. Ce qui n’est pas du tout le cas aujourd’hui et la situation va plutôt s’aggraver dans les années à venir si rien n’est fait au niveau national. De plus, le virage ambulatoire n’est pas du tout adapté aux plus de 75 ans, et la Drees prévoit d’ailleurs une augmentation des séjours hospitaliers pour cette tranche d’âge.

Or, dans le nouveau gouvernement qui a été nommé le 18 mai rien n’a semble-t-il été prévu pour les personnes âgées, ce qui est un premier signal plutôt négatif.

Quelle est la situation actuelle de la gériatrie et comment
va-t-elle évoluer ?

Il n’est pas nécessaire de rappeler les chiffres concernant le vieillissement de la population française dans les années à venir. On peut quand même donner l’exemple le plus frappant, c’est celui des centenaires : ils étaient 200 en 1950, 23 000 aujourd’hui et seront plus de 200 000 en 2060. Or, plus l’âge augmente, plus le nombre moyen de pathologies par personne augmente. Même si on fait d’énormes progrès sur la prévention (ce qui n’est pas dans la culture française) et si on s’améliore sur la prise en soin des pathologies chroniques (où on est déjà plutôt bons) il y aura quand même une augmentation significative des personnes âgées malades et dépendantes. Par ailleurs il y a aussi le fléau de la maladie d’Alzheimer et des pathologies apparentées, pour lesquelles nous n’avons aucun traitement et dont on n’est pas sûr de pouvoir les traiter un jour. Du coup, qui s’occupe de ces malades aujourd’hui et qui va s’en occuper demain ?

On sait qu’il y a une pénurie de médecins généralistes (mais aussi de spécialistes) et de nombreux déserts médicaux en France. Ces déserts concernent même les grandes villes, y compris l’Île-de-France et certains arrondissements parisiens. Mais ces déserts s’étendent aussi de plus en plus à l’hôpital, ce qui a largement été favorisé depuis plus de 10 ans par une politique dite d’efficience qui consiste principalement à réduire les recrutements.

Depuis plusieurs années j’alerte sur la situation dramatique en gériatrie et sur les conséquences prévisibles de la réforme du 3e cycle des études médicales. Cette réforme a été envisagée uniquement sous l’angle « formation » des étudiants sans jamais tenir compte du rôle important des internes dans le fonctionnement de l’hôpital ! Tout le monde a oublié le titre historique qui était « internes des hôpitaux ». L’hôpital étant un lieu d’enseignement et d’accompagnement, permettant aux médecins en formation de voir une médecine de pointe et des personnes présentant des pathologies plus ou moins complexes. C’est un lieu où on se crée souvent ses futurs réseaux, où l’on apprend à raisonner, à rationaliser ses prescriptions (examens complémentaires et traitements) et à synthétiser son raisonnement médical. Certaines maladies sont difficiles à suspecter si on ne les a jamais vues. Les futurs médecins généralistes qui feront par la suite toute leur carrière en ville n’auront souvent plus l’occasion de travailler à l’hôpital. Il est dommage que la réforme actuelle ne soit envisagée que sous l’angle d’éviter l’hôpital, alors que ces futurs médecins, généralistes ou spécialistes en libéral, auront toute leur vie professionnelle pour bien comprendre les subtilités administratives du travail en cabinet !

Que se passe-t-il avec cette réforme, en dehors des 3 phases : socle, approfondissement et consolidation ? Deux choses : une formation de plus en plus ambulatoire de la médecine générale dont les responsables ne voient pas l’intérêt de faire des stages à l’hôpital et la création d’un DES (diplôme d’études spécialisées) de gériatrie, dont les coordonnateurs n’ont qu’une vision universitaire, sans appréhender les besoins immenses qu’il y a en dehors des CHU (centres hospitalo-universitaires) : ville, EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), services de réadaptation, unités de long séjour, etc. Il est aussi intéressant de noter que les responsables de la médecine générale ne voient pas l’utilité de rendre obligatoire un stage de 6 mois en gériatrie.

A l’occasion de cette réforme, deux nouveaux DES sont créés : la médecine d’urgence et la gériatrie. Il est clair que les ambitions de ces deux disciplines ne sont pas les mêmes : ainsi, le DES de médecine d’urgence a obtenu la création (théorique) de 470 postes au niveau national (90 en Île-de-France) contre seulement 250 pour la gériatrie au niveau national (60 en Île-de-France)… Jusqu’à maintenant, il existait deux voies pour devenir gériatre. La première voie était celle du DESC (diplôme d’études spécialisées complémentaires) de type 2 (le DESC créé en 1988 est devenu qualifiant en 2004, lorsque la gériatrie a été reconnue officiellement comme spécialité), qui était initialement surtout validé par des DES de médecine interne avec souvent une perspective universitaire. Secondairement, la médecine générale étant devenue une spécialité, ce sont les DES de médecine générale qui ont fourni 90 % des effectifs du DESC de gériatrie. La deuxième voie était celle de la capacité de gérontologie créée elle aussi en 1988. Ce système a d’abord permis à des médecins généralistes déjà installés et plus rarement à des spécialistes de se reconvertir à la gériatrie. Depuis plusieurs années, ce sont aussi les médecins à diplôme étranger qui choisissent cette voie pour valider leur procédure d’autorisation d’exercice (PAE). La capacité a fourni de très nombreux médecins coordonnateurs d’EHPAD, de médecins de SLD (soins de longue durée) et aussi de SSR (soins de suite et de rééducation) gériatriques : 88,5 % des gériatres hospitaliers sont détenteurs de la capacité de gérontologie et seulement 8 % du DESC… Rien que pour les médecins coordonnateurs d’EHPAD, les besoins estimés sont de 6 000 médecins pour environ 10 000 établissements dans les secteurs public, privé et associatif.

En Île-de-France, il y a actuellement 130 internes en UGA (unités de gériatrie aigüe) et 194 en SSR, presque exclusivement de médecine générale. Pour novembre 2017 (phase socle), il est prévu d’ouvrir 30 postes de DES de gériatrie, uniquement en UGA, et seulement dans des services universitaires (les seuls ayant un niveau de formation suffisant…) avec quelques services ayant comme responsable un ancien chef de clinique assistant. Pour la phase 2 (approfondissement) il n’est prévu que 15 postes en SSR ! Comme la médecine générale ne donnera son agrément que pour les services ayant déjà l’agrément en gériatrie (qui du coup seront aussi les seuls à avoir l’agrément pour la PAE), il est facile d’imaginer la catastrophe annoncée !

La situation est bien sûr différente d’une région à l’autre et selon les structures. De nombreuses structures privées n’ont jamais eu d’internes et ont été créées sur cette base. En province ou en Île-de-France dans la deuxième couronne, de nombreux hôpitaux ont également modifié leur fonctionnement pour survivre sans internes. Et ceci grâce aux médecins à diplôme étranger qui pendant longtemps pouvaient être recrutés très facilement et pour un coût financier très acceptable. Depuis les règles de recrutement sont devenues de plus en plus restrictives avec en particulier la création de la PAE (procédure d’autorisation d’exercice). De très nombreux services, à chaque fois qu’ils perdaient des internes ont survécu par ce biais. Mais aujourd’hui ce robinet est presque fermé et ceux qui avaient été recrutés, dès qu’ils sont inscrit au conseil de l’Ordre, quittent l’hôpital pour s’installer dans le privé (SSR ou EHPAD) où ils sont largement mieux payés et avec moins de contraintes (pas de gardes, ni de week-ends). Dans le même temps, de nombreux praticiens hospitaliers quittent l’hôpital public pour aller dans le privé.

On se retrouve donc aujourd’hui avec des services, surtout en gériatrie et en SSR, dans lesquels il manque des praticiens hospitaliers, des médecins étrangers, et pour lesquels on enlève progressivement les internes depuis un an et demi. A Paul Brousse par exemple, nous avons cet été 6 internes au lieu de 14, et en novembre, probablement 0, 1 ou 2 ! Nous avons déjà fermé 45 lits, mais en novembre ce sera une centaine. Et cela sur un seul site. Cette situation va aller en se multipliant, et il est bien évident que c’est tout le système hospitalier qui va en subir les conséquences. Ceux qui ne voient rien venir vont vite comprendre quand il n’y aura plus de filière d’aval pour accueillir leurs malades et conserver leur durée moyenne de séjour (DMS) dans les bornes autorisées ! Par ailleurs, l’activité en SSR va s’effondrer au moment où on passe (enfin ?) à la DMA (dotation modulée à l’activité, une sorte de T2A – tarification à l’activité – « light »).

Comme on le voit, on va droit dans le mur. On a laissé les coordonnateurs de DES gérer la santé à leur guise sans aucun contrôle et personne ne se pose de questions. Est-ce aux directeurs d’hôpitaux de réagir ? Est-ce aux ARS (agences régionales de santé) ? Est-ce à la DGOS (Direction générale de l’Organisation des soins) ? Est-ce à la nouvelle ministre de la Santé ? En tous cas il y a urgence. Lorsque les services auront fermé, pour beaucoup on ne pourra plus revenir en arrière.

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Le chef de l’État intérimaire, Michel Temer, accusé de corruption : où va le Brésil ?

par Jean-Jacques Kourliandsky

 

Source – Analyse IRIS, 19 mai 2017 : http://www.iris-france.org/95123-le-chef-de-letat-interimaire-michel-temer-accuse-de-corruption-ou-va-le-bresil/
Suite à la révélation de corruption accusant le président brésilien Michel Temer, oppositions, grande presse et bourse réclament sa démission. L’analyse de Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’IRIS.
Ce scandale pourrait-il mener à la destitution ou à la démission du président Michel Temer ? Quelle serait alors l’alternative politique envisageable ?

Les faits reprochés au président pourraient effectivement le conduire à démissionner. À la suite de révélations similaires, le sénateur et président du Parti social-démocrate brésilien (PSDB) – candidat malheureux aux présidentielles de 2014 -, Aecio Neves, vient de se voir retirer son mandat de sénateur. Il a en conséquence démissionné et remis à disposition du PSDB sa charge de président du parti. Sa principale collaboratrice – qui se trouve être sa sœur – est actuellement en prison. Ainsi, pour le même type d’accusation, ce sénateur a été contraint de s’écarter du jeu politique.

Le cas du président Michel Temer est certes différent. En tant que président de la République, il bénéficie d’un statut judiciaire particulier – comme dans d’autres pays. Cela étant, compte-tenu de l’ampleur du scandale, combien de temps va-t-il pouvoir résister ? Déjà une demi-douzaine de demandes de destitution ont été présentées à la justice brésilienne par des parlementaires. Beaucoup d’élus considèrent que la meilleure solution serait que le président présente volontairement sa démission. Néanmoins, si effectivement sous la pression des élus, de la presse – en particulier du groupe Globo, dont le rôle avait déjà été très important en 2016 pour la destitution de Dilma Rousseff – de la bourse et de la rue, Michel Temer démissionnait, une grande inconnue demeurerait : dans quelles conditions le Brésil pourrait-il être dirigé jusqu’aux prochaines élections d’octobre 2018 ? La Constitution prévoit l’organisation d’élections pour suppléer la vacance au sommet de l’État survenue durant les deux premières années d’un mandat présidentiel. Ce délai étant dépassé, c’est au vice-président d’assurer la fin du mandat. Le pays est déjà dans ce cas de figure puisque l’an dernier, la présidente Dilma Rousseff, élue en 2014, a été écartée du pouvoir par un coup d’État parlementaire dont les motivations strictement politiques n’ont rien à voir avec des scandales de corruption – contrairement à ce que disent souvent les médias français. La Constitution ne prévoit pour une nouvelle relève en fin de mandat présidentiel qu’une seule option : l’élection de l’éventuel successeur du chef de l’État, ou du vice-président intérimaire, par un candidat élu par les parlementaires. Or, quand on connaît l’état politique et éthique du Parlement élu en 2014, il est difficile de penser que cette solution serait acceptée comme satisfaisante par les Brésiliens.

La destitution constitutionnelle, au cas où le président refuserait de démissionner, suppose la mise en œuvre d’une procédure initiée par les élus. DilmaRousseff avait été instruite par une commission d’enquête créée avec l’aval et les encouragements du président du Congrès de l’époque, Eduardo Cunha, actuellement emprisonné pour corruption. Celui-ci, avec une majorité d’élus eux-mêmes accusés de corruption, avaient écarté la présidente en détournant les dispositifs requis par la Constitution. Cette dernière ne prévoit une relève présidentielle que dans le cas où une violation grave de la Constitution et de la morale publique était constatée. Ce cas de figure pourrait être appliqué avec pertinence pour destituer Michel Temer. Mais cette voie apparaît peu crédible compte tenu du sinistre moral, politique et économique ambiant, de même que du discrédit du Parlement et des élus.
En quoi la corruption représente-t-elle un sujet particulièrement sensible au Brésil ?

La corruption est un thème de débat sociétal et politique dans tous les pays se trouvant dans une situation socio-économique compliquée, ce qui est le cas du Brésil. Depuis le rétablissement de la démocratie dans le pays, le fonctionnement du système politique et des règles électorales pose des problèmes récurrents, politiques comme éthiques. Dans ce pays fédéral, le système électoral éclate la représentation partisane. Ainsi, depuis le rétablissement de la démocratie, tous les gouvernements ont été à majorité composite avec des têtes de file venant la plupart du temps du PSDB ou PT (les deux grands partis). Cependant, ces partis ont toujours été très minoritaires au Parlement et ont donc dû négocier avec cinq à dix autres formations, plus ou moins importantes. Bien souvent, des compensations sont exigées par ces alliés de circonstance, ce qui ouvre la voie à toute sorte d’abus et de fait, de corruption.

La réforme politique et électorale est un serpent de mer de la vie politique brésilienne. Tout le monde sait qu’il faudrait assainir la vie politique en modifiant le mode d’élection pour simplifier le fonctionnement de la vie partisane, ainsi que procéder à de profondes réformes institutionnelles. Néanmoins, aucun président n’a eu soit le courage d’affronter les petits partis du Congrès, soit n’a eu la capacité de pouvoir le faire. La crise de l’an dernier a été démonstrative de ces dysfonctionnements. Les députés opposés au programme économique de Dilma Rousseff ont voté sa destitution, alors qu’ils étaient en théorie membres de sa majorité. Ils ont basculé de la majorité vers l’opposition du jour au lendemain, du fait de leur manque de « consistance » idéologique et morale. DilmaRousseff a fait l’objet d’une manipulation parlementaire et politique visant à l’écarter du pouvoir pour changer de politique économique et sociale. Parallèlement, des collaborateurs des présidents Lula et Rousseff ont été mis en examen et condamnés pour des faits de corruption, relevant du mode de fonctionnement institutionnel brésilien, signalé supra.  L’ex-président Lula a fait l’objet de poursuites nombreuses, qui n’ont pas abouti mais qui se sont accentuées depuis l’an dernier.

Mais l’affaire actuelle, qui vise Michel Temer, l’ex-sénateur Aecio Neves, ainsi que leurs amis politiques du PMDB et du PSDB, a révélé qu’une fois lancée, la justice ne peut pas s’arrêter aux affaires concernant le seul PT : tout le système étant gangrené, de fil en aiguille tous les partis politiques sont aujourd’hui sur la sellette. On assiste, comme en Italie avec l’opération « Mani pulite », à l’explosion du système politique brésilien, ce qui pose trois sortes de problèmes. Le premier concerne la gouvernabilité du pays. Le deuxième a trait au devenir de la démocratie brésilienne. Le troisième concerne les conséquences sur le contexte économique déjà difficile dans lequel est plongé le pays depuis plusieurs années.

Un an après sa prise de fonction controversée, quel est le bilan global de la présidence Temer ? La multiplication des manifestations illustre-t-elle une crise politique et socio-économique d’une ampleur sans précédent dans le pays ?

Le président Temer est arrivé au pouvoir au terme d’un coup d’État parlementaire, alimenté par un certain nombre d’élus proches des milieux d’affaires et des medias dominants. Ceux-ci considéraient la politique suivie par Dilma Rousseff et le PT comme trop favorable aux catégories populaires, empêchant la mise en œuvre d’une autre politique économique, nécessaire au rétablissement « des grands équilibres ». Selon eux, le Brésil se devait de pratiquer une politique d’austérité, coupant dans les budgets sociaux et d’investissements et réorientée vers les États-Unis et l’Europe.

Conformément à cette orientation, Michel Temer a pris des mesures d’austérité. La plus spectaculaire a consisté à geler le budget de l’État fédéral pendant vingt ans au niveau de celui de 2016. Cela a provoqué des troubles et des revendications sociales, ainsi qu’un regain de popularité pour l’ex-président Lula. Ces mesures n’ont par ailleurs pas redressé la situation de l’économie. La croissance n’est toujours pas au rendez-vous, tandis que le chômage réel s’élève aujourd’hui à 24% de la population active, soit deux points de plus qu’en 2016. La crise que vivait le Brésil à l’époque de Dilma Rousseff, loin de s’atténuer, s’est donc approfondie. C’est peut-être l’une des clefs des révélations faites par le journal brésilien OGlobo, qui avait aussi été à la manœuvre pour la destitution de Rousseff et que l’on retrouve en première ligne aujourd’hui. Les milieux d’affaires sont insatisfaits. Michel Temer n’a non seulement pas su redresser la situation économique mais il n’a pas réussi non plus à arrêter les processus judiciaires en cours, qui déstabilisent la plupart des grandes entreprises brésiliennes ayant donné de l’argent aux partis politiques. Le délateur à l’origine des déboires de Michel Temer n’est rien moins que Joesey Batista, le patron du numéro 1 mondial de la viande froide, JBS.

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A l’agenda dans le Tarn : Les Petites Poucettes, les mineurs isolés étrangers 

7, 8 et 9 juin 2017 : Journées régionales d'études

par ReSPUBLICA

 

Journées régionales d’études organisées par le Réseau National d’Éducation Populaire 

Des adolescent-e-s d’ici et d’ailleurs, quelle responsabilité collective pour quel devenir ? 

Mercredi 7 juin
Le contexte : les questions sociales aujourd’hui
Conférence débats
A 20h Salle de l’Albaret, Chemin de l’Albaret, 81160 Saint-Juéry

La protection sociale et la Sécurité sociale aujourd’hui
avec Bernard Teper
Animateur du Réseau d’Éducation Populaire (REP), Co-auteur de Néolibéralisme et crise de la dette, Laïcité: plus de liberté pour tous, La laïcité pour 2017 et au-delà, de l’insoumission à l’émancipation, Contre les prédateurs de la santé, Retraites : l’alternative cachée, Penser la République sociale pour le 21ème siècle, Repenser la protection sociale du 21ème siècle.

Les alternatives agricoles à la croissance : le monde agricole, un monde d’accueil
Philippe Maffre
Agriculteur dans le Tarn et syndicaliste à la confédération paysanne

Contrats d’Impact Social
avec Vincent Plouvier
Professeur d’économie en classes préparatoires et intervenant bénévole en milieu carcéral à Lille

Jeudi 8 juin
Présentation du projet REP-TSC (Travail Social et Culturel) Occitan et introduction à la question des migrations 

A l’Imagin’Cinéma – 3 place Rives Thomas, 81600 Gaillac
De 18h 30 à 20h
avec Bernard Teper, animateur du Réseau d’Éducation Populaire.
Christian Dulieu, co-animateur du REP-T S C. Co-auteur de L’Éducateur d’une métaphore à l’autre (sous la direction de Jean Brichaux) Éres 2004. Co-auteur de L’invention de l’enfance inadaptée (sous la direction de Maurice Capul), Éres 2010.
et des membres du REP-TSC du Nord
De 20h à 21h – Apéritif concert avec Didier Dulieux

De 21h à 22h – Projection du documentaire Un paese di Calabria de Shu Aiello et Catherine Catella

A la librairie L’Autre Rive – 24 avenue Etienne Billières, 31300 Toulouse
A 19h
Rozenn le Berre, éducatrice dans un service d’accueil pour Mineurs Non Accompagnés (MNA) à Calais, présentera son livre De Rêves et de papiers (La découverte 2017)

Vendredi 9 juin
Le Forum de la Méthode : accueil et accompagnement des Mineurs Non Accompagnés (MNA) 

A la Commanderie des Templiers – Vaour (Tarn)
De 9h à 9 h30 – accueil des participants.

De 9h 30 à 11h
Le contexte des politiques sociales et de l’aide sociale à l’enfance
avec Jésus Sanchez
Maître de conférences associé à l’institut d’Études Politiques, formateur chargé de mission à l’école de Saint Simon, sur le Droit dans l’accueil et l’accompagnement des MNA.

Contrats à Impact Social : le cas des accompagnements des MNA
avec Vincent Plouvier, Professeur d’économie en classes préparatoires et intervenant bénévole en milieu carcéral à Lille.

Comment le néolibéralisme de mutation en mutation affecte-t-il le processus de socialisation des adolescents
avec Marie-Jean Sauret
psychanalyste (co-créateur de l’Association de psychanalyse Jacques Lacan), chercheur au Pôle de Clinique psychanalytique du sujet et du lien social, auteur entre autres de De l’infantile à la structure (PUM), et d’une trilogie Psychanalyse et politique (PUM).

De 11h à 12h 30
Table ronde
avec des équipes de professionnels accueillant des MNA et Rozenn le Berre,

Animateur de cette matinée : Christian Dulieu

Petites Poucettes, Déambulation et Spectacle
De 16h 30 à 18h 30
De Tonnac à Les Cabannes
Déambulation mise en musique par Claude Sicre, ses amis et Anouk qui se conclura par l’accrochage d’œuvres d’enfants réfugiés, réalisées avec l’artiste kurde Rebwar Saeed.

Le Colombier – Les Cabannes, Cordes
De 19h30 à 22h – Le Spectacle du monde
Lecture, musique et théâtre
– Témoignages de migrants et textes de Marie-Laure Malric par La Pluie d’Oiseaux (Roubaix)
– Pièce en création de La compagnie 13r3p (Lille), Bureau des exils, adaptée du livre De rêves et de papiers de Rozenn Le Berre et du reportage Je implore toi s’il vous plait dormir couloir paru dans Libération.
– Trois comédien-ne-s occitan-e-s liront des textes de Bernard-Marie Koltès, d’Erri de Luca et de Patrick  Chamoiseau.
– Participation de Claude Sicre des Fabulous Troubadours, membres du Carrefour culturel Arnaud Bernard de Toulouse.

Restauration à la Commanderie et à Les Cabanes (Cordes) préparée par Ici Hospitalité-Migrants et leurs amis

Entrée libre mais réservation conseillée : chdulieu@hotmail.fr ou par téléphone : 06 07 51 17 24 

Marraine et parrain pressentis de l’opération : Christiane Taubira et Patrick Chamoiseau

Partenaires :
Conseil Régional Occitanie
Commune de Saint Beauzile et son comité des fêtes
Communes de Vaour et de Les Cabannes
Communauté d’agglomération du Rabastinois–Tarn & Dadou – Vère Grésigne – Pays Salvagnacois
Librairies L’Autre Rive et Le tracteur savant
Revue Lien social, Edition Eres
Imagin’Cinéma Gaillac
Associations Le Colombier (Les Cabanes), Les 400 coups de Gaillac, L’Été de Vaour,
Ici Hospitalité-Migrants et La Pluie d’Oiseaux (Roubaix), La compagnie 13r3p (Lille)

Le Réseau National d’Éducation Populaire

A lire, à voir ou à écouter
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La laïcité: un enjeu de souveraineté, par Simone Lafont - Le débat autour du "voile" comme révélateur d'enjeux politiques généraux, par Jeanne Bénigne

par Bernard Teper

 

Ce livre de 46 pages édité par Inclinaison (www.inclinaison.fr) au prix de 4,5 euros est d’un grand intérêt. Pour le premier texte de Simone Lafont sous-titré “Repères historiques”, il est intéressant de voir que pour l’auteure, la laïcité est plus qu’un principe d’organisation sociale et politique car elle est un enjeu majeur de la souveraineté.

Dit autrement, pas de souveraineté de la nation sans laïcité. Pour elle, la souveraineté doit combattre contre tous les pouvoirs qui souhaitent l’assujettir. Et les pouvoirs cléricaux avec les forces sociales et politiques alliés font partie avec d’autres de ceux qui souhaitent museler la souveraineté du peuple.
Elle développe l’idée que c’est la conjonction de la liberté de conscience individuelle et de la souveraineté du peuple qui seule peut s’opposer aux emprises communautaires. Et pour cela, elle part des positions de Ferdinand Buisson puis de Jean Jaurès pour mener son analyse.
On pourra juste regretter que dans son analyse de la Convention européenne des droits l’Homme, elle omette d’analyser l’article 9.2 qui limite l’article 9.1 qu’elle analyse très bien.

Par contre, elle redonne à juste titre de l’importance au rapport de la Commission Debré alors que beaucoup de discours font comme s’il n’avait existé que la Commission Stasi. On comprend bien après avoir lu son texte pourquoi le lobby catholique est intervenu auprès de la Présidence de la République contre la le rapport de la Commission Debré. Et Jacques Chirac mis alors en place la commission Stasi.
C’est cette thèse que je défends dans mon livre Laïcité: plus de liberté pour tous (voir la “Librairie militante” du site de Respublica).

Et puis, elle montre dans son texte, ce que nous disons dans ce journal – largement cité dans cet opuscule – : que la lutte de classes est intimement liée à la défense de la forme républicaine de l’Etat. Et là à partir de la pensée de Marx, elle montre (pages 22 et 23, comment cet aspect essentiel est « peu évoqué dans le débat actuel ». Elle montre que que souvent « le contexte historique est mis entre parenthèses » comme le rapport de la Commission Debré. Puis que ” »’on porte un médiocre intérêt aux contenus comme aux formes des offensives menées par les différentes classes détentrices des grands pouvoirs… ». Et elle montre « l’absence d’études approfondies » des rapports qui se jouent entre les États féodalo-capitalistes enrichis par la rente pétrolière et les grandes puissances impérialistes.

Elle termine son propos ainsi : « il importe de ne pas commettre une erreur d’aiguillage à l’instar de ceux qui, notamment à l’extrême gauche, sous l’influence des forces sociales régressives (arborant l’habit des opprimés), prônent les alliances de classes et les bricolages idéologiques les plus réactionnaires. »

Dans le deuxième texte, de Jeanne Bénigne, nous pouvons revivre la fine analyse des arguments des uns et des autres contre et pour la loi du 15 mars 2004. Puis, l’auteure fait état des débats au sein de la Commission Stasi avec des précisions qui en apprendraient beaucoup à ceux qui en parlent si souvent ! Les positions d’Henri Pena-Ruiz, membre de la Commission Stasi sont souvent citées. Elle montre que “l’affaire du voile” n’est qu’un épisode d’une offensive politique d’ensemble des forces réactionnaires de l’oligarchie capitaliste avec les idiots utiles de l’extrême gauche communautariste. Elle appelle à « ne pas substituer le combat identitaire à la lutte pour l’émancipation sociale » et se demande même si l’exploitation du malaise social par les forces réactionnaires « n’a pas été rendue possible par la désintégration des organisations politiques du peuple ». Et elle termine par une analyse de l’ambiguïté et des ambivalences du rapport de la Commission Stasi.

Ce petit livre permettra à tous les militants progressistes et laïques de travailler aux conditions de la Révolution citoyenne nécessaire. Il permettra aussi de sortir le débat laïque de sa ghettoïsation, voulue par certains, vis-à-vis des autres principes émancipateurs.



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