n°880 - 29/06/2018
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DEUX BATAILLES CENTRALES POUR LES PROCHAINS MOIS…

par Évariste

 

Après le mirage de l’assurance-chômage, se préparer à la bataille contre le projet des retraites Macron et contre les traités de l’Union européenne.

Pendant que le nombre de chômeurs augmente lorsque l’on cumule les chômeurs des catégories A, B, C, D et E, les médias néolibéraux déclament que les chômeurs de catégorie A décroissent légèrement.
Mais un chômeur précaire qui travaille deux heures par jour reste un chômeur, mais de catégorie B ! Voilà le projet final du néolibéralisme, le précariat pour le plus grand nombre.
Si on rajoute que les taux de morts ou d’accidents du travail sont deux fois plus élevés chez les intérimaires que pour les salariés en CDI, on voit quel paradis nous réserve le néolibéralisme.
Mais la loi «Liberté de choisir son avenir professionnel » était censée créer une « assurance chômage universelle », incluant les indépendants et les démissionnaires. Un mirage de plus. Seuls 15.000 indépendants sur 3 millions y auront droit. Pour les démissionnaires, seuls une petite minorité agrée par un comité de contrôle y aura droit.
Pôle emploi n’accompagnera plus les chômeurs en recherche d’emploi mais se contentera de contrôler les chômeurs pour en indemniser le moins possible (nous sommes aujourd’hui déjà à seulement 42% de chômeurs indemnisés).
Et pendant ce temps là la dette de l’UNEDIC de 35 milliards est financée par les marchés financiers qui se sucrent sur le dos des chômeurs sans que l’on puisse connaître les noms des créanciers!
Devant l’avalanche de projets du mouvement « réformateur » néolibéral développé par le gérant du capital, Emmanuel Macron, il faut garder la tête froide et partir d’une vision globale de l’histoire. A savoir que toutes les contre-réformes néolibérales ne répondent qu’à une nécessité pour l’oligarchie capitaliste : celle de maintenir des taux de profit élevés dans le capitalisme. La seule méthode qu’il lui reste est celle de baisser la masse des salaires directs et socialisés. Comme le prix à payer pour cela est la succession de crises majeures financières, économiques ou politiques, l’oligarchie capitaliste a comme feuille de route de retarder, tant que faire ce peut, la crise paroxystique qui viendra compléter les crises précédentes. La dernière en date est celle de 2007-2008. Si la grande bourgeoisie n’y arrive pas, elle cherchera à s’en sortir toujours en gardant les pouvoirs qui actuellement sont dans ses mains. Et pour le camp progressiste, la priorité est de travailler aux conditions de la bifurcation post-capitaliste lors de la prochaine crise systémique. Pour cela il faut définir, dès maintenant, toutes les tâches qui sont les nôtres pour rassembler les travailleurs et les citoyens et leur permettre d’être à la hauteur des enjeux à ce moment-là.
Mais il n’empêche qu’aujourd’hui, nous devons expliquer spécifiquement d’une part le rôle nocif du projet retraites d’Emmanuel Macron. Surtout en ce qu’elle représente comme nouvelle phase de destruction de la protection sociale solidaire et d’autre part, de dire la vérité sur l’Union européenne, ses traités et la zone euro puisque les citoyens sont appelés aux urnes l’année prochaine.

Comprendre la nouvelle offensive patronale sur contre les retraites à prestation définies.

Le projet néolibéral consiste à détruire un système de répartition à prestations définies1 (par la délibération politique par laquelle la lutte sociale peut peser !) pour le transformer petit à petit en système de répartition à cotisations définies. Dans ce dernier cas, plus de délibération pour définir le taux de cotisation, la retraite baissant avec le volume du financement, et comme le but du capitalisme aujourd’hui est la baisse des salaires socialisés pour financer les forts taux de profit de l’oligarchie capitaliste, la boucle est bouclée. Puis de passer d’un système de répartition à cotisations définies vers un système mixte où la solidarité (à chacun selon ses besoins, chacun y contribuant en fonction de ses moyens) est transformé petit à petit en charité, c’est-à-dire dans un système de capitalisation pour les plus aisés et d’assistance pour les pauvres. Pour aller vite, le stade de répartition à prestations définies, c’est la Sécurité de 1944-46. Le stade de répartition à cotisations définies, c’est aujourd’hui le système de l’Ircantec (retraites dans la fonction publique des salariés non titulaires ) dont Emmanuel Macron souhaite la généralisation à tous les travailleurs. L’Ircantec est le système le plus mauvais pour les travailleurs qui fournit le plus grands nombres de retraités pauvres. C’est le système à points qui permet la dévalorisation facile de la valeur du point. Il peut être affiné par un système en comptes notionnels qui est un compte à points dans lequel on a introduit la prise en compte de l’espérance de vie de la tranche d’âge. On comprend vite que les ouvriers victimes des inégalités sociales de santé perdront 7 années de retraites car ils vivent 7 ans de moins qu’un cadre ! Passé ce stade, le passage à la capitalisation pour les plus aisés et à la charité pour les plus pauvres peut-être fait très rapidement. Par ailleurs, il n’est pas exclu que la pension de réversion disparaisse. Ce qui accentuerait encore plus les inégalités hommes/femmes, mais surtout ferait baisser considérablement les pensions de nombreuses femmes. Le montant moyen de la pension de réversion est de 642€ pour les femmes (304€ pour les hommes). On imagine la baisse de revenu que cela représenterait !
Attention ! Contrairement à ce qui circule dans certains tracts syndicaux et politiques, le système AGIRC-ARRCO n’est pas encore un système à points même s’il y a un décompte à points : il reste encore théoriquement la délibération des partenaires sociaux. Dans le système à points, il n’y a plus de délibération sur le taux de cotisation. Et il n’y a plus de sécurité pour le montant de la retraite y compris pour ceux qui sont aujourd’hui à la retraite. Dans le système à points, la chute du montant de la retraite est aisément pilotable par l’oligarchie capitaliste directement par les ordinateurs. La loi Balladur de 1993 est responsable de l’abaissement de plus de 20% des retraites d’aujourd’hui. Ce sera au moins une décote de même ampleur avec le système à points ou en comptes notionnels d’ici 2030-2040.
Ne jamais oublier également que la retraite, qu’elle soit par répartition ou par capitalisation est toujours payé par les actifs et non par les cotisations payées par le travailleur avant son passage en retraite. Croire que la capitalisation permet de se payer personnellement une retraite est un mirage idéologique du capitalisme (de même nature que le fait de croire que le soleil tourne autour de la terre !). Et la capitalisation peut fondre au soleil comme cela a été le cas du fonds de pension Enron aux Etats-Unis.
Le Réseau Education Populaire et Respublica reste sur ce sujet à votre disposition pour toute intervention en formation et en réunion publique d’information.

Notre vérité sur l’Union européenne,
les traités et la zone euro

En 2019, les élections européennes donneront un nouveau visage de l’état de conviction des citoyens européens. On peut déjà voir que les extrêmes droites profitent de la désillusion de l’européisme ordolibéral contrairement aux forces progressistes. Car il y a bien trois camps. Dont deux sont directement dirigés par le capital. Comme à la fin des années 1920 et des années 1930. L’intelligence politique du capital fait qu’il a toujours deux fers au feu. Il soutient d’abord l’européisme ordolibéral et oblige l’alliance droite –extrême droite quand l’européisme ordolibéral seul n’est plus tenable. Au prix d’un passage de la démocratie à la démocrature bien sûr dont on voit déjà les effets en Hongrie, en Pologne, en Autriche, en Tchéquie, en Italie, etc.
Quant au camp progressiste qui ne peut gagner qu’en étant autonome des deux autres camps adverses, il est aujourd’hui divisé et amoindri d’une part par les pensées magiques (revenu « universel », capitalisme vert, etc.) et surplombantes (par exemple, vouloir l’alliance de tous les critiques de l’Union européenne quitte à se retrouver in fine courroie de transmission des extrêmes droites ou encore vouloir s’allier électoralement aujourd’hui avec des partis néolibéraux écologistes ou de gauche) et par l’importation des pensées néolibérales (communautarisme, éclatement des cadres démocratiques efficaces, etc.).
Dans ce cadre, plusieurs forces politiques ont déjà posé les jalons de leurs projets politiques. Les partisans du plan A (qui croient en la possibilité de sortir des traités de l’intérieur de l’Union européenne et de la zone euro), comme Attac, Copernic, la direction du Pcf bien que le Pcf ne soit pas homogène sur ce point), etc., se sont déjà positionnés. La dernière tribune parue dans Libération donne le la de cette optique. Les économistes d’Attac et de Copernic terminent leur tribune par la phrase suivante digne de la méthode Coué: « Combattre un tel gouvernement suppose de rompre avec les politiques actuellement menées pour imposer une Europe de la justice sociale. Il est temps de s’y mettre. » Pas un mot sur le « comment » quand on sait que changer les traités demandent l’unanimité des Etats. De quoi faire rire les dirigeants de Malte  et de certains autres Etats !
Les partisans du plan A/B, plan des responsables de la France Insoumise ont clairement balisé leur positionnement. Ce plan consiste à tenter la négociation interne (plan A) dans l’Union européenne et dans la zone euro pour changer les traités européens mais en se réservant la possibilité de sortir de l’UE et de la zone euro (plan B) en cas de non-réussite du plan A. Deux livres sont emblématiques de cette position. Le livre de François Cocq « Alerte à la souveraineté européennes » avec comme sous-titre « La chimère de Macron contre la souveraineté populaire » et celui de Mathias Tavel « Insoumis, en Europe aussi ». Tous les deux édités par Eric Jamet éditeur. Dans ces deux livres, la critique de l’Union européenne et de la zone euro est très bien faite. L’explication donnée pour justifier la nécessité de sortir des traités également. Rien que pour cela, la lecture de ces deux livres est intéressante. Mais on reste sur notre faim sans études de cas sur la façon d’appliquer concrètement le plan B (voir ci-dessous) en liaison avec un agenda précis prévisible.
D’autres organisations beaucoup plus petites développent l’idée du plan B direct et immédiat mue par un simple volontarisme du peuple sans plus présenter les politiques concrètes. Pensée magique, quand tu nous tiens…
Quant à Respublica, nous pensons que l’Union européenne et la zone euro sont des constructions qui empêchent toute politique progressiste. Mais que la sortie de cette union et de la zone euro n’est pas possible en dehors d’une crise centrale qu’elle soit financière, économique, écologique ou politique. Pour le comprendre, il convient de travailler en étude de cas sur les neuf façons théoriques concrètes de sortir des traités. Et de voir à chaque fois, quelles sont les armes que chaque camp peut utiliser et de comprendre dans chaque cas, le niveau nécessaire de cohésion de la majorité politique acquise en cas de transition longue. Par exemple, pour remettre des billets en circulation, il faut 18 mois après la décision. Parler d’un contrôle des capitaux ne doit pas obérer l’idée que, sans crise paroxystique, l’entièreté des capitaux de l’oligarchie aura quitté l’hexagone bien avant la victoire éventuelle d’un gouvernement progressiste. S’il y a sortie de l’euro, est-ce que la nouvelle monnaie sera introduite au FOREX (marché des changes) en totale convertibilité et en liberté de flottement ou est-ce que ce sera une monnaie plus ou moins réglementée ? Comment remplacer les transactions qui passent aujourd’hui par Target 2 (système de paiements en temps réel de l’Eurosystème) ? Etc.
La période 1981-1983 (même si ce n’était pas l’euro mais le SME –Serpent Monétaire Européen-), et l’épisode de la Grèce en 2015, montrent bien que le manque de préparation en amont pousse les gouvernants à choisir la porte de sortie néolibérale même contre leur gré. Si on ne le veut pas, il est nécessaire de sortir des slogans élaborés par des économistes non formés aux circuits financiers et bancaires et d’utiliser toutes les compétences pour la préparation méticuleuse d’un avenir construit.
En cas de crise paroxystique (dont on sait qu’elle adviendra mais sans en connaître la date), l’oligarchie ne pourrait plus faire fonctionner tous les atouts qui sont aujourd’hui entre ses mains. Et pour Respublica, les dernières actualités (protectionnisme de droite, affrontement des impérialismes, poussée des extrêmes droites, début des alliances droite –extrême droite en Europe, gonflement des bulles financières, dettes publiques et privées à un niveau plus fort qu’en 2007, croissance exponentielle des migrations Sud –Nord, continuation du développement du relativisme culturel et du communautarisme, approfondissement des périodes de récession de l’économie américaine, part des salaires en chute dans le PIB, baisse des commandes de l’industrie allemande, baisse des investissements internationaux, etc.) montrent que nous allons pas seulement vers un réchauffement climatique mais aussi vers une crise paroxystique qui peut permettre la bifurcation post-capitaliste si les forces progressistes ont d’ici là surmontées leurs impasses notées ci-dessus, mené la bataille pour une nouvelle hégémonie culturelle (y compris en leur sein), et promu un nouveau modèle politique alternatif au modèle du mouvement « réformateur » néolibéral, tout cela étant nécessaire à ladite bifurcation post-capitaliste.
La « librairie militante » du site de Respublica, les intervenants de Respublica et du Réseau Education Populaire sont à votre disposition pour approfondir cette analyse. La rédaction d’un livre et la construction de stages de formation sont en cours.

  1. Aujourd’hui, chacun sait combien il/elle va toucher comme pension de retraite au moment où il/elle part. C’est une prestation définie. []
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MARX, L’ÉCOLOGIE, LE CAPITALISME ET LES BALEINES

par Michel Marchand

 

C’est en 1866 que le mot « écologie », la science des rapports des organismes avec le monde extérieur, proposé par le biologiste allemand Ernst Haeckel, entrait dans la littérature scientifique1. Pour placer le cadre dominant de l’époque, la conquête coloniale du globe s’achève, les sociétés européennes sont en pleine expansion industrielle, mais sous cette belle assurance du progressisme dominant, se manifestent déjà des inquiétudes sur les effets dévastateurs de l’industrialisation.

Il n’en demeure pas moins que la tendance générale est de considérer la science comme toujours apte à régler positivement des contradictions jugées passagères. Ainsi le chimiste allemand Justus von Liebig2, théoricien de la chimie agricole, publie en 1840 un traité de la Chimie organique appliquée à la physiologie végétale et à l’agriculture et décrit le fonctionnement des cycles chimiques, notamment de l’azote et du phosphore qui président à la fertilité des sols. Karl Marx, comme le rappelle John Bellamy Foster3, s’appuie sur les travaux de Liebig pour analyser la production agricole capitaliste en Angleterre qui épuisait la fertilité des sols. Ainsi, pour compenser l’appauvrissement que le système de production agricole faisait subir aux sols, l’Angleterre importait comme engrais, dans un premier temps de plus en plus d’ossements, y compris ceux laissés sur les champs des batailles napoléoniennes, avant d’importer dans un second temps le guano péruvien qui s’avérait être une ressource peu chère capable de remplir les même fonctions nutritives. Ces ressources très rapidement épuisées révélait la fragilité intrinsèque d’un tel système et ouvrait la voie au développement industriel des engrais synthétiques. Les observations de Marx, suivies d’autres, ajoutent une perspective environnementaliste au changement social, permettant plus une critique socio-écologique plus large de la société capitaliste.

Un second exemple permet de mesurer la logique productiviste et destructrice d’un système qui ne peut, par sa nature même, respecter les ressources naturelles de la planète. Les ressources océaniques sont d’accès libre et elles ont presque toujours été utilisées à l’excès4. La chasse à la baleine en est un cas exemplaire. Les baleines ont connu une existence paisible pendant des millions d’années, ayant peu de prédateurs. La chasse a commencé à l’époque préhistorique et s’est poursuivie sur un mode quasi identique (poursuite de la proie et harponnage de l’animal) jusqu’au 19ème siècle. Les Vikings et les Basques furent les pionniers de cette chasse en pleine mer, mais certaines indications suggèrent que les japonais ont pratiqué cette chasse mille ans avant les Basques. La révolution industrielle a accéléré le rythme de la chasse à la baleine, l’huile de cachalot servant de lubrifiant pour les machines et les fanons trouvant de multiples usages dans les corsets, parapluies et haubans. En 1860, les espèces les plus faciles à capturer avaient pratiquement disparu. La chasse se porta sur les espèces boréales vivant en mer de Béring. Les campagnes d’extermination menées par les Américains en 1890 amena la famine parmi les populations locales Aléoutes et Tchouktches. Les espèces survivantes appartenaient au groupe des rorquals (grandes baleines à fanons, notamment la baleine bleue le plus grand animal dans l’histoire de la vie de la planète) dont la nage est trop rapide pour une poursuite en canot à rames5. La relance de la chasse à la baleine fut redevable à Svend Foyn, capitaine norvégien d’un baleinier, qui mit au point la technique du canon-harpon qui permet de lancer des grenades explosives sur les baleines. Le carnage reprit de plus belle avec une seconde innovation technologique, concevant l’installation d’une rampe de soute sur un baleinier et permettant de hisser à bord une baleine bleue de 100 tonnes, de la dépecer, rendant ainsi possible le concept du bateau-usine. Le carnage devenait rentable et de nombreux pays y prirent part :Grande-Bretagne, Norvège, Argentine, États-Unis, Danemark, Allemagne, Japon, URSS. La cuisson de l’huile de baleine donne comme sous-produit de la glycérine, nécessaire à la fabrication de la dynamite (nitroglycérine). L’ingéniosité humaine, le savoir chimique transforma des millions de baleines en margarine, en savon et en explosifs. Dans l’océan Austral, 150 000 à 200 000 baleines bleues étaient estimées en 1900, il n’en restait plus que 500 en 1990. Dès 1935 des réglementations furent mises en place sous l’égide de la Société des Nations, sans effets. En 1946 se créa la Commission Baleinière Internationale dont le premier objectif visait à la défense du prix de l’huile de baleine et non des baleines. Dans les années 1960, la Commission changea d’approche et se décida à préserver les stocks de baleines. Le moratoire conclu dans les années 1980 fut contourné par les norvégiens, islandais et japonais, arguant que les baleines étaient tuées chaque année « à des fins scientifiques » échappant ainsi aux obligations du moratoire. On estime que les innovations technologiques permirent la prise de 1,5 millions de baleines dans l’Océan Austral entre 1904 et 1985. Les chasseurs de baleine au 20ème siècle ont littéralement tué la poule aux œufs d’or de manière délibérée. Les baleines se reproduisent lentement et il n’était pas rentable de soutirer une telle ressource tout en la préservant. La rationalité économique capitaliste du court terme dictait donc de liquider toutes les baleines aussi vite que possible.

1Deléage Jean Paul, 1991 Une histoire de l’écologie, ed. La Découverte, coll. Points

2Liebig J., 1845 Lettres sur la chimie et sur ses applications à l’industrie, à la physiologie et à l’agriculture », Charpentier, Fortin et Masson, p. 325.

3Voir les deux précédents articles dans Respublica consacrés à la pensée écologique chez Karl Marx : « l’emprise mortelle du capitalisme ou ce que tout écologiste doit savoir à propos du capitalisme » (http://www.gaucherepublicaine.org/international/lemprise-mortelle-du-capitalisme-ou-ce-que-tout-ecologiste-doit-savoir-a-propos-du-capitalisme/7401648) et « Karl Marx, penseur de l’écologie » (http://www.gaucherepublicaine.org/a-lire-a-voir-a-ecouter/mexique-des-insoumis-et-karl-marx-penseur-de-lecologie/7401631).

4McNeill John, 2010, Du Nouveau sous le Soleil. Une histoire de l’environnement mondial au XXè siècle. Ed. Champ Vallon

5 Relire l’épopée du capitaine Achab dans le roman de Melville « Moby Dick »

Lutter contre le néo-libéralisme
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Projet de loi Agriculture et Alimentation : pour un changement de modèle !

par Nicolas Girod

 

Depuis ses débuts, la Confédération paysanne défend des valeurs sociales, de qualité d’alimentation, de préservation de l’environnement et bien entendu de défense des paysans.

La défense des paysans passe par l’acquisition d’un revenu pour toutes et tous, revenu provenant de la vente de nos productions à hauteur de prix rémunérateurs permettant de couvrir nos coûts de production. La rémunération paysanne donne également la possibilité de réfléchir à la transition des modèles vers plus d’agriculture paysanne : une agriculture où le paysan est remis au cœur du système, où l’environnement n’est pas subi mais choisi, où l’autonomie décisionnelle, technique et financière reprend une place prépondérante, où le lien au vivant animal et végétal est réhabilité, où les valeurs économiques sont présentes sans prendre toute la place. Finalement un projet agricole qui permet de redonner du sens à nos pratiques paysannes et de faire écho aux attentes sociétales en termes d’emploi, d’alimentation, de dynamiques territoriales et de transition environnementale.

Ce changement de modèle, cette transition que nous mettons à l’œuvre sur nos fermes, doit s’amplifier et s’accélérer en permettant à la fois de donner des perspectives économiques aux paysans et aussi de répondre à l’urgence climatique, environnementale et sociale.
C’était tout l’enjeu du projet de loi Agriculture et Alimentation, faisant suite aux états généraux de l’alimentation. Il devait redonner du revenu aux paysan-ne-s, sans faire peser cette augmentation sur le seul maillon « consommateur » et poser les bases d’un nouveau modèle agricole répondant mieux aux attentes citoyennes.
Aujourd’hui, ce projet de loi ne se donne ni les moyens d’arracher un revenu paysan aux crocodiles de l’agro-alimentaire et de la grande distribution, ni l’ambition d’acter un début de transition des systèmes pourtant à bout de souffle.

La Confédération paysanne réclame une loi contraignante où l’État reprendrait sa place d’arbitre des relations commerciales pour ainsi imposer la redistribution de valeur ajoutée : celle-ci est bien présente dans les filières, il n’y a qu’à voir l’enrichissement personnel de certains grands patrons d’industries !!
Cette meilleure répartition de valeur serait la première pierre de la transition agricole que nous voulons tous : sans revenu, les paysannes et les paysans resteront coincés dans des systèmes vides de sens pour tous. Systèmes que nous subissons par la mise en place de politiques publiques françaises et européennes qui nous poussent toutes et tous dans le mur du productivisme et de l’ultra libéralisme.
Ce gouvernement ne remet pas du tout cela en cause. Pire il fait croire à une évolution par des discours ambitieux mais renvoie la responsabilité de ce changement aux filières et aux acteurs agricoles qui sont depuis toujours tenus par le syndicalisme majoritaire lui aussi passé maître dans l’art du double langage, de la langue de bois et des fausses solutions.

Ne nous y trompons pas, en donnant les clés une fois encore aux tenants de l’immobilisme et du marché roi, ce gouvernement fait preuve non seulement d’aucune trace de caractère mais nous laisse à penser également que l’industrialisation de l’agriculture et toutes ses dérives ont encore malheureusement de beaux jours devant elles !!
Cette loi devait redonner du sens à nos pratiques en liant mieux les actes de production avec les attentes de la société, et par le fait faire mieux accepter le prix d’une alimentation de qualité, rémunérant le paysan et préservant l’environnement et le territoire. Non seulement elle sonne comme un échec, mais elle pourrait creuser davantage encore le fossé d’incompréhensions entre des citoyens en attente et des paysans et des paysannes perdus sur un chemin que plus personne ne maîtrise, ni nous, ni les politiques qui font là encore la preuve de leur incapacité à intervenir dans les rapports de force déséquilibrés.

Seul le marché et la recherche de rentabilité immédiate semblent guider ce développement et nous emportent tous dans une dérive de compétition qui nous fera mourir les uns après les autres et la planète avec.
La solution est là, pourtant, dans un système relocalisé, performant socialement et environnementalement, porteur de richesses et d’espoir pour les territoires et les Hommes. Mais il faut croire que l’urgence du moment ne suffit toujours pas à mobiliser les énergies et à surmonter les obstacles de l’argent-roi.
La Confédération paysanne reste mobilisée aujourd’hui, comme hier et encore demain pour faire entendre cette position de bon sens pour nous, nos enfants et pour la planète !

Nicolas Girod, secrétaire national de la Confédération paysanne



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