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ReSPUBLICA, le journal de la gauche républicaine

n°595 - jeudi 21 août 2008

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1 - chronique d'Evariste

1 - La Laïcité c'est la République !

Dans ce climat d’attaque permanent de la laïcité, ReSPUBLICA a tenu à réaliser un numéro spécial afin d’éclairer le débat et de donner l’accès à plus d’informations. Pour introduire l’ensemble de ces textes, deux nous semblent importants à exposer tant il est indispensable d’ancrer la laïcité dans son contexte : la laïcité comme pièce constitutive du Pacte Républicain et sa place dans l’identité française.

Le Pacte Républicain et la laïcité forment un tout indivisible

Contrairement à l’idée que l’on tente d’imposer aujourd’hui, la laïcité n’est pas un artifice annexe à la République, une loi parmi tant d’autres, un ajout résultant d’un lobbying de politiques minoritaires aujourd’hui obsolètes. Bien au contraire, la laïcité est une construction philosophique et intellectuelle née d’un contexte bien précis : celui d’une République imparfaite dans sa tâche consistant à assurer la paix à tous les citoyens et entre les citoyens. Elle résulte d’une lutte - qui fût parfois violente tant les passions étaient grandes - pour imposer l’idée qu’une religion d’état ne peut garantir la tranquillité et l’égalité dont tout individu-citoyen a besoin pour mener son existence. De fait, nous constatons que la laïcité est un élément clé dans la construction du Pacte Républicain en tan que remplissant sa mission unique et souveraine : la paix.
Car la paix est la pièce centrale. Elle est le fondement de la République, son essence première et incontestable. Défendre la République sans avoir ce but à l’esprit reviendrait à un combat stérile. "La République pour la République", c’est-à-dire une position idéologique digne de n’importe quelle autre orthodoxie aveugle.
Depuis 1789, des individus ont conclu et entamé la construction du Pacte Républicain dans le but d’assurer à tous les contractant - les citoyens - l’assurance de la paix. Or, une société ne saurait vivre en paix sans que les individus qui la composent ne vivent eux-mêmes en paix, les uns avec les autres, et chacun d’entre eux en paix avec dans son existence personnelle et intime. Or, une religion d’état, de par même l’appareil social et politique qu’elle implique, interdit à tous ceux qui ne sacrifient pas aux dogmes dominants le statut égalitaire.
D’où les questions : Comment vivre sa vie en étant minoré ? Comment se concevoir comme citoyen sachant que l’on est seulement toléré ? Comment, en tant qu’individu, se construire une existence équilibrée avec soi-même lorsque l’on sait, et que l’on reçoit de toutes parts, les signaux comme quoi on est inférieur, juste toléré, mis en retrait et accepté par simple bonté ?
C’est parce qu’aucune construction sereine de l’identité individuelle et citoyenne n’est possible dans de telles conditions que le Pacte Républicain a nécessairement évolué vers cette pièce manquante : la laïcité. La paix sociale ne peut se construire, et se fortifier, sur l’inégalité et la frustration d’une partie des individus qui la compose. Tout ou tard, la guerre est le lot de telles incohérences. C’est cette lente - mais décisive ! - prise de conscience qui conduisit de 1789 à la loi de 1905, et ce raisonnement est indispensable à la compréhension de l’évolution du Pacte Républicain.
Notons par ailleurs que la laïcité, depuis son intégration en tant que loi, en 1905, est passée dans les esprits du statut de "loi" au statut de "marque identitaire" ancrée dans le Pacte Républicain. Ce changement de statut, purement symbolique dans les esprits des individus- citoyens, est la preuve que cette loi est plus qu’une simple option. Elle est un indice révélant que la laïcité était, depuis la naissance même de l’idée de Pacte Républicain en 1789, un élément qui serait tôt ou tard incontournable ; une pièce du puzzle qu’il faudrait un jour ou l’autre assembler avec les autres.

L’identité française

C’est au regard de cette problématique et de la constitution du Pacte Républicain que l’identité française est abordable. Là où la laïcité et la constitution de l’individu en tant que citoyen récusent toute identité autre qu’individuelle, la notion de groupe n’existe en France qu’à l’échelle citoyenne. Depuis 1789, la culture de notre pays est viscéralement politique, républicaine et laïque. Là est notre identité. Là est notre signature. Tout au long de notre histoire, la culture de cette identité trouve maints représentants : de Blanqui à Jaurès, de Louise Michel à De Gaulle, tous incarnent cette culture identitaire de la chose publique comme une marque de l’individu qui se reconnaît et s’affirme comme Français. Jusque dans notre tradition insurrectionnelle, nous sommes français. Même les discours que l’on a vu naître au lendemain des émeutes de 2005 affirmaient le désir "d’être dans la République", non d’en sortir. Encore une preuve que l’ancrage républicain et laïque est plus qu’un simple oripeau face aux communautaristes qui alimentent les angoisses existentielles d’individus à l’abandon.

Pour la gauche, la culture de l’identité française est une nécessité car elle répond à une réalité voulue par les individus-citoyens. Déjà aux lendemains de la révolution, la Constitution précisait que tout individu défendant la République, subvenant aux besoins d’un orphelin ou d’un vieillard, et embrassant les idéaux de la République, devenait, de fait, un citoyen français, membre du Pacte Républicain. Acte politique fondateur, d’une puissance symbolique fondamentale, cet article constitutionnel sur l’acquisition de la citoyenneté a gravé dans le marbre notre identité politique. Depuis lors, elle est pour notre pays plus qu’un simple repère individuel, elle est un atout, une force, une marque de fabrique.

Le courant de la gauche

Deux courants politiques traversent la France depuis plus de deux siècles : l’un révolutionnaire et progressiste, humaniste au sens de l’ouverture sur le monde, porteur des Lumières et d’une vision universaliste de la condition humaine, porteur des savoirs et constructeur de la paix pour tous. Ce courant éthique et culturel a façonné la laïcité.
Il est si puissant que depuis des années, il existe également des courants parmi les croyants de notre pays qui sont de grands défenseurs de la laïcité et qui s’opposent aux positions officielles de leurs propres églises des voies où leur religion doit évoluer pour intégrer la laïcité. Ces positions révolutionnaires de croyants (comparables au bouleversement qu’a été le passage du polythéisme au monothéisme) sont la preuve que la laïcité est une composante de notre identité et de notre culture, et que cette identité va jusqu’à travailler les croyances.

L’autre est un courant contre-révolutionnaire et réactionnaire, porteur de la division de la population humaine (y compris en France où il place d’un côté les "bons français", de l’autre ceux qui ne sont pas " français " même s’ils vivent et travaillent sur ce sol). Ce courant distille un discours qui engage la France sur le chemin de la déshumanisation, de la déstructuration de son tissu, de sa culture, de sa tradition, sous prétexte de la "préserver" d’un danger. Le pétainisme fut la dernière incarnation de cette politique de trahison de la France de 1789, proposant le pacte avec les nazis pour soi disant sauver la France. Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy, sous prétexte de préserver la France, l’enfonce dans le libéralisme le plus sauvage, segmente notre société, brise le Pacte Républicain et attaque la laïcité. Sarkozy est l’incarnation de ce courant revanchard contre juin 36 ou mai 68 qui traverse l’histoire de France et face auquel nous devons opposer une résistance à toutes les échelles, du collectif des grandes actions jusqu’à l’individu dans les positions qui guident sa vie personnelle. Notre culture et notre identité est porteuse de cette composante laïque et politique. Le peuple de gauche doit être le porteur de cet idéal.

Évariste Pour réagir aux articles,
écrire à evariste@gaucherepublicaine.org

2 - Entretiens

1 - Interview-vidéo de Bernard Teper sur la Laïcité

Respublica est allé rencontrer Bernard Teper, président de l'Union des FAmilles Laïques pour lui demander de répondre à quelques questions concernant la laïcité. A travers ces différents points (l'histoire de la laïcité, l'actualité, le féminisme, etc. ) nous lui avons demandé d'expliquer les grandes lignes de ce à quoi correspond la laïcité de nos jours et où elle est impliquée dans notre vie de tous les jours.

Les vidéos ont été faites dans le but de permettre à tous de comprendre les différents enjeux que représente la laïcité, pour notre pays, mais aussi dans la lecture de l'évolution internationale. En espérant que ce type de support vous plaira, nous vous souhaitons une bonne écoute !

Vidéo 1, Vidéo 2, vidéo 3, vidéo 4.

Pour accéder à l'ensemble: playlist (pour avoir les vidéos les unes à la suite des autres).

ReSPUBLICA

2 - Entretien avec Christian Terras rédacteur en chef de la revue Golias

Voici un entretien avec Christian Terras rédacteur en chef de la revue Golias

ReSPUBLICA : Christian Terras, vous êtes rédacteur en chef de la revue Golias. Quelle est l'histoire de votre mouvement ? Quelles sont ses bases et pourquoi milite-t-il ?

Christian Terras : Le terme "mouvement" n’est peut-être pas le mieux adapté à la raison d’être de Golias, qui est d’abord une revue et vise, comme toute publication, à informer et à faire connaître les points de vue de son équipe de rédaction et de ses collaborateurs. La revue ne possède pas de structure organisée visant à regrouper ses lecteurs, même si des liens se sont créés à la suite de courriers ou de rencontres. Mais l’organisation d’un "mouvement" n’est pas dans nos perspectives, beaucoup de nos lecteurs restant pour nous des inconnus.
Le premier numéro de Golias est sorti en février 1985, réalisé avec la participation de militants "locaux" de la région lyonnaise : il s’agissait de quelques feuillets "tout faits mains", tirés sur une petite ronéo, agrafés et expédiés à des personnes connues pour partager les mêmes questions sur le devenir de la foi chrétienne et de l’Eglise catholique. Un tel lancement s’est fait sans publicité, sans appui financier, comme un simple bulletin de liaison entre gens ayant des préoccupations communes... Le lancement de Golias pourrait se comparer à la mise en place d’un blog, avec comme seul moteur de développement "le bouche à oreille". Et pendant les premières années, la revue a fait très lentement son trou...
C’est la parution, en 1990, du premier "Trombinoscope des évêques de France" qui a fait connaître le nom de Golias dans le milieu catholique de France et même au-delà. Dans ce numéro spécial de la revue, nous y analysions le comportement pastoral de chaque évêque de France à qui était attribué un certain nombre de "mitres", comme en gastronomie des "étoiles", en fonction de ses qualités pastorales. Les meilleurs recevaient cinq mitres, alors que les derniers de la classe se voyaient honorés d’une mitre tournée en travers pour figurer un bonnet d’âne. La sortie de ce petit ouvrage (qui depuis a été réédité et mis à jour régulièrement en s’étoffant) ne passa pas inaperçue. Son impertinence plut à beaucoup, mais aussi... déplut ailleurs, surtout en haut lieu. Les questions concernant Golias se posèrent alors, et se posent encore aujourd’hui : qui sont ces gens qui s’affirment chrétiens et qui prennent autant de liberté avec la hiérarchie et la pensée officielle ? Que veulent-ils ? Qui les financent ? A ces questions, la réponse a toujours été simple : les "gens de Golias" sont des chrétiens qui veulent faire entendre une autre voix que celle du "religieusement correct", et cela au nom même de l’Evangile auquel ils croient. Ils n’acceptent plus que les défis lancés à la foi chrétienne par le monde moderne soient passés sous silence. Dans les premières années, les médias cathos ayant pignon sur rue ont pris de haut cette petite revue, laissant planer des doutes sur les origines de son financement et pensant qu’elle ne durerait guère... En ce qui concerne le financement, la réponse est claire : il n’est assuré que par les abonnements et la vente des livres de la maison d’édition, le fonctionnement reposant en grande partie sur des participations bénévoles, y compris celle du directeur. Golias est le fruit d’un travail de militants, avec des frais généraux réduits au minimum. C’est ce qui lui permet d’être indépendant et de "tourner", même si c’est souvent avec des difficultés.
Dans les années 1990, beaucoup ne donnait pas cher de l’avenir de Golias, considéré comme un simple "coup de gueule" sans lendemain. Des procès lui furent intentés, y compris par l’épiscopat, dans le but unique de "taper à la caisse", là où se joue la survie quotidienne. Pourtant, il dure, comme durent les problèmes qu’il soulève. Ses vingt-trois ans d’histoire pourraient s’écrire en citant simplement les thèmes des grands dossiers parus avec des procès collatéraux, pratiquement tous gagnés : l’extrême-droite de Dieu, Touvier et ses réseaux, l’épiscopat français pendant la guerre 1940-45, l’Opus Dei, mais surtout, le génocide rwandais avec l’implication d’un certain nombre de gens d’Eglise, missionnaires "blancs" comme prêtres autochtones. Ce combat pour que la lumière soit faite sur le rôle de l’Eglise dans la tragédie fut très dur (la revue y a joué son existence). Il n’est pas encore terminé, même si l’action de la justice (quatorze ans après !) commence à nous donner raison. D’autres dossiers aussi ont été "chauds", comme celui de la gestion, par les responsables de l’Eglise, des comportements pédophiles de certains clercs. Plus récemment c’est sur la dérive sectaire de mouvements reconnus par l’Eglise qu’ont porté nos investigations... En même temps, et depuis les débuts, nous faisons connaître les recherches actuelles sur la lecture de la foi et de l’Evangile et sur une théologie capable de répondre, en pleine laïcité, aux interrogations du chrétien du XXI° siècle... Nous voulons apporter notre pierre à cette recherche qui engage l’avenir même de la foi chrétienne, au moins sur nos terres occidentales. Nous avons même la prétention de penser qu’elles peuvent rendre quelques services à la société la plus laïque.
Voilà quelques-unes des préoccupations qui font le cœur de notre travail. Nous pourrions être considérés comme des marginaux dans l’Eglise si nos contacts et les courriers reçus ne nous révélaient pas quantité de "groupes" de croyants, plus ou moins informels, qui cherchent dans le même sens. Et qui ne se sentent plus représentés par les responsables religieux actuels

Quelles sont les motivations de l'équipe de Golias ?

Chrétiens nous sommes et chrétiens nous voulons rester. Mais notre foi nous fait refuser l’intégrisme, le fondamentalisme, le repli identitaire dans une communauté qui deviendrait "totalitaire" si ses chefs (pape et évêques) ignoraient les limites de leur pouvoir. Pour les croyants que nous sommes à l’intérieur de l’Eglise, seule est valable une démarche libre de foi, protégée de toute contrainte politique, sociale ou clanique... et c’est la laïcité qui assure cette liberté. La foi chrétienne, sauf à se replier dans la sécurité d’une secte, n’a d’avenir que dans l’ouverture réfléchie et constructive à la modernité qui est forcément plurielle, donc à la laïcité.
Pour nous, la laïcité n’est pas seulement une nécessité sociale, pour que puissent vivre en cœxistence pacifique les différentes familles de pensée, croyantes, agnostiques ou positivement athées. Elle est un fruit (même si la maturation en a été longue et n’est pas encore terminée) de l’enseignement évangélique. Le fameux "Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu" que Jésus oppose à ses contradicteurs qui voulaient le "coincer" sur la légitimité de l’impôt versé à l’empereur romain, permet aujourd’hui encore aux chrétiens de "creuser" la question de l’autonomie de l’homme en société. Comment croire en Dieu, en refusant des rails liberticides posées de toute éternité ? Pour nous, Dieu n’est pas l’architecte dont nous n’aurions qu’à réaliser les plans au iota près. Même la manière de la foi est à inventer. L’histoire de notre pays illustre bien ce long passage, et pas toujours pacifique, d’une société de "sujets" du roi et de l’Eglise à une société de citoyens, responsables collectivement de leur devenir. Même si tous les habitants de notre pays étaient baptisés et croyants, la laïcité s’imposerait, au nom de la liberté des hommes et des femmes, au nom de l’autonomie de l’humain. Nous voulons être des citoyens dans l’Eglise comme nous le sommes dans la République, même si évidemment les fonctionnements internes en sont différents.
Nous pensons, en prenant le risque d’en faire bondir certains, que l’Evangile a participé à sa manière, à l’élaboration des "valeurs" fondatrices de nos sociétés. Même la devise républicaine : "liberté, égalité, fraternité" a reçu quelque chose de l’Evangile et ceci est dit en sachant très bien que des avancées sociales ont été longtemps combattues par l’Eglise, Si bien qu’on en arrive à ce paradoxe énorme que l’institution ecclésiastique n’a pas reconnu et même a parfois combattu les fruits de ce qu’elle avait semé. On ne peut prêcher pendant des siècles : "Aimez-vous les uns les autres" sans voir fleurir d’abord la "charité", puis le refus de l’injustice, puis l’aspiration à l’égalité et à la liberté dans une société démocratique... Cheminement très complexe, si complexe même qu’aucune religion, aucun courant de pensée ne pourra prétendre être "le fondateur" de notre société d’aujourd’hui... C’est de la vie sociale globale, dans ses tensions, ses espérances mortes (songeons aux "lendemains qui chantent"), ses mobilisations, ses bouleversements, ses débats... que sortent les progrès.
La diversité du monde chrétien d’aujourd’hui fait qu’une espèce de "laïcité civile" est nécessaire à l’intérieur même de nos propres communautés de croyants chrétiens. Il n’y a pas, dans l’Eglise de France, d’uniformité sociale ni de consensus politique, qui d’ailleurs ne sont pas recherchés. On y retrouve la même diversité que dans la société civile dont d’ailleurs les chrétiens font partie et sont aussi des acteurs, de toutes couleurs et de toutes étiquettes. Qu’il y ait des tentatives de reprise en mains cléricales de la part de prêtre et d’évêques de "la nouvelle génération", c’est un fait, et Golias se veut, sans prétention et avec d’autres, une vigie face à ces dérives. C’est aux chrétiens d’abord qu’il revient de "faire le ménage" chez eux, de manière à ce que nous puissions tous vivre ensemble, croyants et incroyants, et parmi les croyants spécialement les chrétiens, les musulmans et les juifs. Et nous pensons que le témoignage d’une laïcité pacifiée vécue enfin par les chrétiens peut aider les derniers arrivants, peu préparés à cette forme de cœxistence dans le pluralisme, à découvrir les avantages de la laïcité à la française, qui leur garantit, à chacun, la liberté de religion comme de non-religion, dans le cadre général de la liberté de penser. Il y a, pour eux, parfois, des renoncements non fondamentaux à faire, mais quel bonheur de pouvoir les uns et les autres se sentir respectés et reconnus par delà la diversité de croyances ou d’incroyance. C’est peut-être de la part de Golias une charmante utopie, mais n’est-ce pas avec des utopies semblables que s’est faite la France d’aujourd’hui, où Golias peut parler dans Respublica, en attendant le retour de l’échange ?

ReSPUBLICA

3 - laïcité

1 - Le discours du latran : un manifeste global

Le discours de Latran prononcé par Nicolas Sarkozy le 20 décembre 2007 a soulevé une vive polémique. Jean-Luc Mélenchon a produit à cette occasion une critique structurée de l'orientation que le chef de l'état donne à notre pays en matière de laïcité. La publication de son texte dans ReSPUBLICA n'est pas un retard, elle rentre dans un projet global de réflexion politique et de construction d'un projet global. Si le traitement "à chaud" du discours de Latran a permis de soulever efficacement l'opposition à la laïcité "positive pour les religions" (cf. ReSPUBLICA n° 570 ), la relecture quelques mois plus tard du texte de Mélenchon permet cette fois une approche moins émotionnelle, moins épidermique et, de fait, plus profonde de la défense de la laïcité. L'esprit de gauche s'incarne par sa capacité à joindre d'une part l'esprit de révolte, l'émotion spontanée et le désir de construire, et d'autre part la réflexion, la construction des idées et l'édification des citoyens. La justesse de cette équilibre fonde la gauche et ce cadre est celui que se donne ReSPUBLICA.

Ce discours ne doit pas être lu comme l’expression de la sensibilité personnelle de Nicolas Sarkozy en matière religieuse. Certes, le président est, selon ses propres termes, un « catholique de tradition et de coeur ». Personne ne lui en fait grief. C’est une conviction qui relève de la sphère privée.
Au demeurant il n’est pas le premier président de la république française à être croyant et pratiquant.
Le discours du président de la République devant le chapitre de saint jean de Latran, est une parole officielle prononcée au nom de la République française. C’est celle du président de la République es qualité, représentant tous ses concitoyens français, au moment où il accepte d’endosser une fonction honorifique liée par tradition folklorique à sa charge, celle de chanoine de Latran, paroisse de l’Etat du Vatican dans la ville de Rome. Sur le moment, puis à la suite de son allocution, le président a souligné à diverses occasions l’importance particulière de ce discours. Il s’agit bien d’une définition des principes et de la vision auxquels il entend se référer à propos de la place du fait religieux dans la vie des sociétés modernes en général et de la religion catholique en France en particulier. Les discours qu’il a ensuite prononcés à Ryad en Arabie saoudite, puis pour ses voeux devant le corps diplomatique ou à l’occasion de la réception des chefs religieux à l’Elysée ont confirmé l’importance du discours de Latran dans la définition de la politique que veut conduire le chef de l’Etat. Il existe ainsi une sorte de continuité entre ses différentes expressions qui se complètent de façon assumée. Elles dessinent un tableau d’ensemble. Il se fonde sur une analyse du rapport de la société humaine au fait religieux. Il s’articule, par degré, avec une approche qui prétend ancrer la démonstration dans une prétendue aspiration irrépressible des individus pour la transcendance.
Le discours de Latran est assumé comme un discours de rupture avec les précédentes prises de position des présidents de la république française à propos des rapports avec l’église catholique. Mais cette rupture n’est pas seulement l’énoncé d’un nouveau cadre conceptuel. Elle fonctionne comme une transgression, c'est-à-dire comme une inversion du point de vue qui avait prévalu jusqu'à présent.
On constate en premier lieu que le président Nicolas Sarkozy a adopté l’angle sous lequel l’église catholique romaine se situe dans ses controverses avec la république française depuis sa fondation et même face à ses rois sous l’ancien régime. De bien des façons c’était le préalable à l’énoncé de la nouvelle politique.

ReSPUBLICA

2 - Les religions sont-elles d’intérêt public ?

Le sophisme du terrain de rugby.

"Pourquoi ne pas financer les religions puisqu’on finance des stades de rugby (sport que tout le monde n’aime pas) ou des choses qui concernent encore moins de monde comme l’enseignement du grec ancien ou les recherches en métrique classique ? " L’argument est d’une telle vulgarité intellectuelle qu’on en reste pantois. Ainsi avec un sophisme d’écolier, on balaierait d’un revers de main l’article 2 de la loi de 1905 et avec lui toute la pensée laïque... Il serait malvenu de se boucher le nez devant ce qui n’est qu’une astuce : il importe de la démonter.

Lisant le texte "Sauver la laïcité" que j’ai cosigné dans Libération le 26 février, un contradicteur en extrait une phrase : "Payé par tous, l’impôt doit être dépensé pour tous" et m’envoie une objection censée invalider toute l’argumentation. Il le fait en des termes tels que je préfère, par égard pour lui et pour la tenue de ce blog, ne pas publier son intervention dans les commentaires. Néanmoins le sophisme avancé paraît si péremptoire et il semble si répandu qu’une réponse s’impose sur le fond.

Le sophisme se présente ainsi : puisqu’on finance des stades de rugby avec de l’argent public, et que tous ne sont pas amateurs de rugby, pourquoi ne financerait-on pas les religions ? Et lorsque, commentant la Déclaration américaine des droits, Condorcet déclarait, au sujet d’un impôt destiné aux cultes : "Toute taxe de cette espèce est contraire au droit des hommes qui doivent conserver la liberté de ne payer pour aucun culte, comme de n’en suivre aucun", il suffirait selon notre contradicteur de remplacer "culte" par "sport" pour voir que ce grand esprit écrit une sottise... Un simple exercice de substitution à la portée du premier écolier venu anéantirait donc aussi l’article 2 de la loi de 1905 "La République ne reconnaît, ne subventionne ni ne salarie aucun culte". On se demande comment on n’y avait pas pensé plus tôt, depuis le temps... ! On en reste étourdi.

Etendons l’argument : pourquoi ne pas financer des cultes puisqu’on finance des musées, du sport, des services sociaux, des orchestres symphoniques ? Pourquoi ne pas financer une religion, puisqu’on finance l’enseignement du grec ancien ? Pourquoi ne pas financer des cultes qui ont des millions d’adeptes puisqu’on finance la recherche pour des maladies qu’on n’a pratiquement aucune chance de contracter?
D’ou le titre de cet article : les religions sont-elles d’intérêt public, ce qui légitimerait un financement total ou partiel par l’impôt ? La réponse est non.
Le point central, à travers la notion d’"’intérêt de tous" touche la question de la volonté générale: ce qui est de l’intérêt de tous doit pouvoir être voulu par tous, c’est la définition même de la loi et du champ d’exercice de la puissance publique. Mais ce "tous" ne s’apprécie pas statistiquement, même s’il est ancré dans le suffrage : c’est la volonté d’un citoyen pris en général, elle construit un "nous-citoyen" qui n’a rien à voir avec un "nous-communautaire"[1]. Ainsi, je consens comme citoyen au principe de l’impôt, alors que j’aimerais parfois y échappper comme particulier ; je consens au principe de la propriété privée, et il m’arrive souvent de ne pas pouvoir l’exercer ; je consens à payer pour une piscine municipale même si je déteste me baigner... Cette volonté est générale dans son essence : elle n’émane d’aucune personne particulière ni d’aucune portion particulière des citoyens. Elle est également générale dans ses objets et ses bénéficiaires : personne n’est a priori écarté, par définition, des droits et des devoirs qu’elle établit.

La religion n’est pas d’intérêt public 1° : la distinction du cultuel et du culturel

Faisons varier les exemples en ordre décroissant.
Il est de l’intérêt de tous que la loi existe, qu’elle soit la même partout et appliquée de la même manière. Il est de l’intérêt de tous que la force publique soit la seule habilitée aux tâches de maintien de l’ordre.
Il est de l’intérêt de tous que chacun ait une retraite et une couverture sociale minimale. Il est de l’intérêt de tous que la maternité soit protégée (et pourtant seules les femmes accouchent...). Il est de l’intérêt de tous qu’on étudie à l’école des disciplines que tous, empiriquement, n’étudieront pourtant pas. Il est de l’intérêt de tous que la recherche fondamentale (qui ne sert à rien dans l’immédiat et à laquelle tous, empiriquement, ne s’intéressent pas, et que beaucoup trouvent superflue) soit promue et encouragée. Il est de l’intérêt de tous que les maladies "rares" soient diagnostiquées et soignées...
On voit bien, sur cette première série d’exemples, que le mot "tous" ne désigne pas (dans l’expression "intérêt de tous") un ensemble empirique, mais un universel. Même si je sais que je n’apprendrai jamais l’astrophysique, il est de mon intérêt de citoyen en général que cette discipline soit développée.

Poursuivons la série en la compliquant.
Il est de l’intérêt de tous que la culture soit soutenue et développée. Les missions de service public touchent justement ce domaine. Par exemple il y a des théâtres, des orchestres entièrement subventionnés.
Il y a aussi et ensuite des zones intermédiaires, que l’Etat encourage mais qu’il ne prend pas entièrement à sa charge : on peut prendre l’exemple des transports publics, de certains musées, de certains théâtres, d’installations sportives - et généralement des établissements à financement mixte. Certaines publications sont soutenues par la puissance publique (Centre national du livre) sans être entièrement financées par elle.
L’exemple des installations sportives peut prendre place ici et montre que la notion de soutien public peut s’investir dans des domaines qui n’allaient pas de soi il y a 100 ou 200 ans ; la question n’est jamais définitivement close et c’est le rôle des assemblées d’en décider. Amateur de rugby, je ne vais jamais voir de foot, mais je trouve qu’il est acceptable et normal de soutenir ce sport. Et lorsqu’un conseil municipal se propose de soutenir telle ou telle association, il se pose la question de savoir si cela entre dans son champ de vision. Oui, mais alors on s’entêtera de plus belle: pourquoi, sur cette voie, ne pas soutenir des associations cultuelles ?

L’exemple de la rénovation de la façade d’une cathédrale mobilisant des moyens puisés dans les impôts des contribuables nous amènera au plus près du point litigieux. Il illustre bien la distinction entre le culturel et le cultuel. La façade de Notre-Dame de Paris est rénovée grâce à mes impôts : mais ce n’est pas pour y prier que le bâtiment est rénové. Il se trouve qu’on y prie aussi (il est mis à la disposition d’un culte), mais c’est un monument public. Le caractère religieux de l’édifice y est traité dans ce cas comme une pensée (on se renseignera par exemple pour savoir quels attributs donner à tel ou tel saint) et non comme une croyance, et le bâtiment lui-même comme un monument du patrimoine, et non comme un acte de foi. On ne m’impose aucun acte de foi en rénovant des statues, on ne s’introduit pas dans ma conscience. On me fait savoir que la puissance publique s’intéresse à sauvegarder un monument qui fait partie du patrimoine commun. Et quand je commente avec mes étudiants Jésus guérissant les aveugles de Poussin, je ne les convie à aucun acte de foi. Je les mets en présence d’une pensée, d’une iconographie, avec un recul critique, mais jamais en présence d’un credo ni d’une "vérité" unique. Je ne leur demande pas de croire à Jésus-Christ ni de croire qu’il a vraiment guéri des aveugles à Jéricho et à Capharnaüm[2].

Voilà une des raisons pour lesquelles aucune religion en tant que telle, c’est à dire en tant que système de croyance, (ni aucun ensemble de religions) ne peut entrer dans le domaine du service public, ni même dans celui des choses culturelles que la puissance publique peut soutenir financièrement. Car soutenir un culte c’est soutenir une croyance, et l’Etat ne doit imposer ni accréditer aucune croyance. Soutenir l’athéisme serait du même ordre : ce serait financer l’imposition d’une incroyance. En revanche l’étude des religions fait partie du culturel, et entre dans le champ des sciences humaines, lequel est enseigné dans les établissements payés ou soutenus par la puissance publique.

Voilà pourquoi la substitution entre "culte" et "sport" dans la phrase de Condorcet est un sophisme ; ce sophisme s’appuie sur la confusion du cuturel et du cultuel. Seuls ceux qui pensent que les religions sont une espèce de service public peuvent imaginer une telle substitution. L’efficacité de ce sophisme n’est pas dans ce qu’il dit, mais dans ce qu’il présuppose : elle est de faire admettre implicitement la confusion entre le cultuel et le culturel.

La religion n’est pas d’intérêt public 2° : toute religion est par nature exclusive

Réfléchissons maintenant sur l’autre angle d’attaque permettant de caractériser la volonté générale et la notion d’"intérêt de tous".
Qui est bénéficiaire des décisions publiques engageant les deniers publics ? Tous.
Alors là, laissez-moi rire, dira notre contradicteur : il y a bien des postes publics réservés à ceux qui ont tel ou tel diplôme, qui sont pourvus sur titres ou sur concours? C’est exact, mais personne a priori n’est exclu en vertu de ce qu’il est ou de ce qu’il croit : passer un examen ou un concours n’est pas réservé à telle ou telle portion de la population. L’accès est a priori et en droit ouvert, quelle que soit l’origine, la croyance, etc. On n’est pas admis à un examen parce qu’on est noir ou parce qu’on croit à la résurrection des corps. Pour que je jouisse ici de mon droit, on n’exige pas de moi que je croie à telle ou telle divinité, on ne m’impose pas telle ou telle pratique, telle ou telle forme de croyance ou d’incroyance : on me demande de satisfaire à des conditions techniques ou scientifiques que tous peuvent viser et remplir en droit.

Et le stade de rugby ? Tous n’y vont pas, cela est sûr. Mais tous peuvent y aller en droit. On ne fait pas le tri entre les spectateurs sur des critères a priori comme leur appartenance, leur lieu de naissance, leur couleur, leur croyance.
Et le droit de propriété ? Tous ne l’exercent pas. Mais tous peuvent en droit l’exercer. C’est là que je me permettrai une petite vulgarité : l’argent n’a pas d’odeur...
Quand on rénove la façade d’une cathédrale avec une partie de l’argent public, la jouissance de cette rénovation est proposée et accessible à tous. Du reste, les églises, édifices publics, ne peuvent pas être entièrement soustraites à la visite du public, sauf pour des raisons de sauvegarde et de sécurité comme n’importe quel bâtiment public. Lorsque j’entre dans la cathédrale de Rouen, personne ne s’inquiète de savoir je me signe, personne n’exige de ma part un acte d’appartenance.

On voit clairement pourquoi les religions ne peuvent entrer dans cette sphère accessible en droit à tous : c’est que par définition elles sont réservées à ceux qui les embrassent. Une religion, on ne le souligne peut-être pas assez souvent, exclut a priori tous ceux qui n’y croient pas. L’"intérêt commun" que vise une religion est donc celui d’une communauté. Le "nous" des croyants n’est pas un "nous" de citoyen, c’est un "nous" communautaire[3] : sa capacité d’exclusion est corrélative de sa capacité d’inclusion. Une grande idée du catholicisme, c’est de prétendre à l’universalité : mais cette universalité ne peut s’effectuer qu’en niant la liberté de ne pas croire ou de croire autre chose... elle est indissociable de ces deux formes d’exclusion.
L’inclusion dans l’association civile ne s’accompagne pas d’une telle corrélation : l’association civile, quand elle est laïque, ne réclame aucune appartenance. Voilà la question que se posent les élus lorsqu’ils s’interrogent sur l’opportunité de voter une subvention : ils ne se demandent pas seulement si telle association est utile, ils se demandent aussi si sa nature exclut a priori une partie des administrés. On aura donc des motifs valables pour soutenir telle association de charité notoirement tenue par une confession religieuse, à condition qu’elle ne réserve pas ses secours aux seuls fidèles de cette religion et qu’elle ne se livre pas au prosélytisme dans ce cadre. Mais on ne pourra pas subventionner un culte en tant que tel, qui ne peut pas, par sa nature, satisfaire cette condition. Et on ne pourra pas (c’est un exemple fictif) réserver des créneaux horaires d’une piscine municipale aux seules femmes musulmanes.

Terminons sur Condorcet, dont la pensée devait être balayée par un exercice d’écolier. Ceux qui ont lu les Cinq mémoires sur l’instruction publique savent qu’il se donne bien du mal pour expliquer que l’école est de l’intérêt de tous, et que dans le système d’instruction publique il est de l’intérêt de tous qu’on étudie des disciplines qui peuvent sembler éloignées de l’intérêt immédiat. Il a bien du mal car autour de lui beaucoup de révolutionnaires pensent qu’on n’a pas besoin de sciences trop pointues, que c’est un reste de l’Ancien régime, que c’est réactionnaire, qu’il faut s’en tenir à ce qui est immédiatement utile. Il a encore plus de mal à expliquer que l’instruction des filles doit être la même que celle des garçons car beaucoup pensent que l’instruction des femmes n’est pas dans l’intérêt de tous... Il explique que tous, sans exclusive a priori, ont droit à la jouissance du savoir et que c’est un devoir de la puissance publique de le mettre à disposition de tous. La culture est de l’intérêt de tous et elle s’adresse à tous.
C’est pour les mêmes raisons qu’il écrit la phrase déclarant que les cultes ne doivent pas être subventionnés : le cultuel n’est pas de l’intérêt de tous, mais seulement de quelques-uns, de ceux qui professent telle ou telle croyance. Financer un ou des cultes en tant que tels, ce serait financer des particularités et régler la dépense publique en tenant compte de critères d’appartenance préalable. Ce serait dire aux citoyens : pour bénéficier de cette partie de l’argent public, vous devez croire à tel dieu, procéder à tel acte de foi. Le "service" que rendrait une croyance en utilisant de l’argent public, elle le rendrait donc à ceux qui en sont les adeptes à l’exclusion des autres : pourquoi devrais-je payer pour un culte que je réprouve ?

© Catherine Kintzler, 2008

Notes

[1] Le "nous" citoyen construit une classe paradoxale, alors que le "nous communautaire" est une collection empirique. Je me permets de renvoyer à mon Qu’est-ce que la laïcité? (Paris|_|: Vrin) p. 41-47.

[2] Le tableau de Poussin qu’on appelle aussi Les Aveugles de Jéricho est-il situé à Jéricho ou à Capharnaüm|_|? C’est l’objet d’une passionnante discussion dans la Conférence de l’Académie royale de peinture du 3 décembre 1667. Voir Les Conférences de l’Académie royale de peinture et de sculpture au XVIIe siècle, édition par Alain Mérot, Paris|_|: Ecole nationale supérieure des Beaux Arts, 1996.

[3] Voir la note 1.

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Catherine Kintzler www.mezetulle.net
Auteur de "Qu’est-ce que la laïcité ?", publié chez Vrin, 2007.

3 - La critique est-elle un sacrilège et la caricature un blasphème?

Comment le relativisme nourrit l'intégrisme

La liberté d’opinion comprend la liberté de critique

La liberté d’opinion ne signifie pas que toutes les opinions sont respectables, mais que chacun doit pouvoir s’exprimer publiquement, que ses propos plaisent ou non aux puissants, aux prêtres ou à quiconque. Chacun doit pouvoir participer au débat public et donc accepter la contradiction. Socrate désirait qu’on le réfute. La liberté d’opinion comprend par essence la liberté de critique : « Notre siècle, disait Kant en 1781, est proprement le siècle de la critique à laquelle tout doit se soumettre. La religion par sa sainteté et la législation par sa majesté veulent ordinairement s’y soustraire. Mais alors elles éveillent contre elles un juste soupçon et ne peuvent prétendre à ce respect sincère que la raison accorde seulement à ce qui a pu soutenir son libre et public examen. »[1]

La tolérance sceptique est le refus du dialogue

Nous ne sommes plus au siècle des Lumières. La plupart croient que toutes les opinions ont un droit égal à être exprimées parce qu’elles se valent toutes, ce qui ruine tout droit de les critiquer. Ne peut en effet examiner au lieu de croire en aveugle, qu’un esprit capable par nature de voir clair, et donc de distinguer la vérité et l’erreur : toute opinion ou toute croyance est pour lui par principe susceptible d’être remise en cause et considérée comme fausse – ou même méprisable. Si toutes les opinions et toutes les croyances se valent, aucune n’est erronée, et l’idée de libre examen n’a plus de sens. Toute discussion devient vaine : à chacun sa vérité, comme on dit ! L’idée même de vérité est abolie : deux hommes disant le contraire l’un de l’autre ont également raison, pourvu que chacun se croie dans le vrai. Deux avis opposés coexistent sans que la contradiction éclate et que le dialogue s’instaure qui force chacun à sortir de sa subjectivité.
Lorsque la liberté d’opinion n’a plus pour fondement la volonté de rechercher la vérité en commun, mais la renonciation à la vérité, réfuter une opinion n’a pas plus de sens de que de dire à un homme qui n’aime pas tel mets qu’il est dans l’erreur. Il est vain alors de chercher à obtenir par des raisons que le malade qui trouve le vin amer reconnaisse qu’il est doux. Chacun reste enfermé en lui-même : étrange tolérance, cette coexistence des hommes sans communication réelle entre eux. Chacun tolère que les autres pensent différemment de lui sans qu’un accord soit envisageable, sinon sur le fait que tous doivent vivre ensemble malgré leur désaccord. Ce consensus est le contraire d’une véritable entente.

Quand toute critique est un sacrilège Si une opinion doit être respectée, la critiquer est un sacrilège : c’est porter atteinte à celui qui la professe. Toute mise en question d’une croyance est vécue très sincèrement par le croyant comme une attaque personnelle. Vouloir délivrer un homme d’une erreur est un crime pire que le vol, car c’est le déposséder de lui-même. Et comme les opinions qu’on croit les plus personnelles sont généralement celles du groupe au sein duquel on vit, chaque communauté considère la critique comme une agression et porte plainte. Les tribunaux sont donc appelés à condamner quiconque exerce le droit de critique. Ainsi, ce qui est aux yeux des croyants un blasphème une fois reconnu comme tel par le droit, on en arrive au même point que dans les régimes théocratiques. Il est dans la nature des choses que le relativisme et le fanatisme religieux s’en prennent aujourd’hui ensemble aux Lumières.

Le refus d’apprendre

Alors partout, à l’école ou dans la rue, sur toute chose, en matière de goût, en politique, la moindre croyance est une opinion qui compte, c’est-à-dire qui est comptée ou collectée dans un sondage ; mieux, chacun doit avoir une opinion, parce qu’étant homme et libre, il est l’égal des autres, de sorte que la distinction entre le savoir et l’ignorance est contestée au nom de l’égalité démocratique. Alors chacun est sommé de ne jamais s’instruire avant de juger. Apprendre porterait atteinte à la liberté d’avoir son opinion bien à soi, à l’abri de toute critique. Les maîtres d’école perdent toute autorité dans un monde où la tolérance est fondée sur la renonciation à la vérité et à la critique. Les directives officielles imposent qu’on demande leur avis aux élèves avant de les instruire. Le cours magistral est proscrit. Celui qui par malheur s’imagine qu’une opinion non informée est vide passe pour prétentieux : c’est un dictateur. Son savoir n’est qu’un instrument du pouvoir.

Le retour du religieux

Le relativisme est un nihilisme : tout se vaut ; il n’y a plus d’échelle des valeurs et donc plus de valeur. La distinction du beau et du laid n’a plus cours, pas plus que celle de l’honorable ou du honteux. La vulgarité règne sans pouvoir être dénoncée. Non seulement les prêtres saisissent l’occasion qui leur est offerte de faire passer à nouveau la critique pour un sacrilège et la caricature pour un blasphème, mais les dérives sectaires sont inévitables. Lorsque le sens de la critique est perdu, en effet, la crédulité et la superstition fleurissent, et le premier gourou venu séduit.

© Jean-Michel Muglioni et Mezetulle, 2008

Notes

[1] Préface de la 1° édition de la Critique de la raison pure, 1781, Traduction Patrice Henriot, Hatier.

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Jean-Michel Muglioni

4 - Article réservé aux hommes...

Une affaire, celle du Gymnase de Vigneux (Essonne). Une seconde, celle de la non-mixité, dans les piscines. Une troisième, celle de l’agression, très probablement à caractère antisémite, du 19^e arrondissement. Une quatrième, celle de l’annulation du mariage pour cause de non-virginité ou pour reprendre les termes consacrés, pour mensonge sur « les qualités essentielles ». Est-il nécessaire d’en rajouter ou cela est-il suffisant pour voir que cette société est définitivement malade de ses intégristes, de ses islamistes, eux-mêmes, malades de leurs frustrations, de leur crise identitaire, de l’idéologie malsaine qui n’a d’égale que le niveau de leurs revendications.
Chaque jour, des signes - d’ailleurs pas forcément religieux - nous montrent que la communautarisation de la société française est loin d’être une simple vue de l’esprit de la part de quelques âmes excitées, intolérantes et, accessoirement, « islamophobes ». Les différentes affaires révèlent également le désarroi, mais aussi la lâcheté de beaucoup d’élus locaux et autres politiques qui, pour acheter la paix sociale, sont prêts à mettre en faillite l’esprit républicain. L’offensive des religions - et singulièrement de l’islam - sur les terres de France ne fait plus aucun doute, tout comme le repli sur soi et le communautarisme ambiant.

Au moment où une France cherche à s’ouvrir davantage à l’Europe et au monde, une autre France, celle des communautés, ethniques ou religieuses, celle du régionalisme, celle qui a peur de « l’autre » et de tout, cherche à se refermer sur elle-même. Une et indivisible, la République l’est-elle encore lorsqu’on parle de quartiers arabes ou musulmans, noirs ou africains, juifs, asiatiques ou chinois ? Une et indivisible, la France l’est-elle encore lorsque des murs invisibles, des frontières dis-je, séparent les citoyens d’un même pays, les membres d’une même société les empêchant de vivre ensemble sereinement ? Une et indivisible et laïque, cette République l’est-elle encore lorsque des rabbins s’émeuvent de voir des étudiants de confession juive convoqués aux examens jour de shabbat et lorsque des imams s’insurgent de constater que les cantines scolaires refusent de servir des repas sans porc ? Une et indivisible, cette France l’est encore lorsque des élus ou des hommes politiques pensent adapter les lois aux « communautés » au lieu d’exiger que ces « communautés » se plient aux lois et aux règles de ce pays ?
Pour dire les choses de manière triviale, la France, me semble-t-il, file du mauvais coton. Ce pays vit une profonde crise qui risque à terme de provoquer un véritable désastre. Je pense - et plusieurs signes le montrent - que de larges couches au sein de la société française sont prêtes à accepter le « communautarisme » comme nouveau modèle pour la société française. Hormis, les quelques personnes qui s’élèvent, de temps à autre, pour rappeler les valeurs fondamentales qui constituent l’âme de ce pays, pour crier leur colère devant une démission semi-collective, pour alerter sur les dangers qui nous guettent, et qui, au passage, se font traités tantôt de « raciste », tantôt d’« islamophobe », si ce n’est d’« excités » et d’« intégristes de la laïcité », plus personne, ou presque, ne se sent concerné par ce qui se passe autour de nous. Certes, les autres préoccupations sont légitimes : pouvoir d’achat, retraite, gardes d’enfants, etc. Mais tout de même, à quoi ressemblerait un pays dans lequel, l’on mangerait à sa faim, l’on prendrait sa retraite à 50 ans, l’on peut se soigner gratuitement si en même temps, ce pays perd son âme et ce qui est sensé faire son originalité ? Je vous laisse méditer.
J’ai quitté un pays pour fuir, les islamistes, les voilà qu’ils me pourchassent pourtant dans les rues de Paris. J’ai quitté un pays qui ne voulait surtout pas entendre parler de laïcité, me voilà face à un autre qui est en train de céder la sienne. J’ai quitté un pays où les gouvernants sont lâches et médiocres, me voilà face à d’autres lâches et à d’autres médiocres. J’ai quitté un pays qui a choisi de composer avec des religieux, me voilà dans un autre qui n’hésite pas, parfois, à leur décerner la Légion d’honneur. J’ai quitté un pays où l’on vous agresse par intolérance religieuse, me voilà dans un autre, où l’on agresse pour une kippa ou pour des propos jugés trop « mécréants ». La liste est longue, mais je vais m’arrêter là. Je dirais seulement que parfois j’ai l’impression que la France m’a menti sur ses « qualités essentielles », mais je n’irais pas demander, je vous rassure, l’annulation du mariage.
Je vois de loin des militants d’extrême droite, les intégristes de tous poils et les racistes de tous bords me lancer « nous n’avons rien à foutre, dégage, rentre chez toi puisque tu n’aimes pas ce pays ». Faux ! J’aime ce pays, qui est devenu aussi le mien, comme j’ai aimé mon pays d’origine. Ce que je n’aime plus, ce sont les débiles qui nous mènent vers l’abîme. Ceux que je ne supporte plus de croiser dans la rue, ce sont ces intégristes qui défilent dans les villes de France et défient la société et les valeurs auxquelles je suis tant attaché. Ceux que je ne supporte plus, ce sont ces pauvres mecs qui se sentent autorisés à agresser une fille en minijupe ou un homme en kippa. Voltaire disait : « il faut écraser l’infâme ». Je fais mienne cette phrase. Oui ! J’agresserai l’infâme, sans assener de coups, en rappelant ses méfaits, son côté pervers et pernicieux, son hypocrisie, ses mensonges, son idéologie abjecte, la violence qui le caractérise, son fascisme.
J’agresserai l’infâme en rappelant combien le voile asservit la femme, combien les religions, surtout lorsqu’elles sont suivies bêtement, emprisonnent les individus et combien les idéologies intégristes manipulent les Êtres pour les faire passer de vie à trépas.
Enfin, je terminerai par ce message personnel à ces personnes qui m’inondent de versets coraniques ou de psaumes. J’ai la prétention et la faiblesse narcissique de dire aux uns et aux autres que je crains fort que j’ai lu ces livres que sont le Coran et le Nouveau Testament, il y a fort longtemps. Quand probablement Dieu était pour eux une vague idée ou la marque d’un produit de vaisselle. Si je ne publie pas ces messages, ce n’est pas par censure, tant s’en faut. Je ne cesse d’expliquer - et je comprends que ce soit dur pour un prosélyte illuminé - que je suis fermement attaché à la laïcité et que, par ailleurs, ce modeste blog, qui se veut un lieu d’échange avec des lecteurs et des téléspectateurs, partageant avec moi, non pas les mêmes opinions, mais les mêmes valeurs, n’est pas un outil d’endoctrinement. Donc, inutile de vous fatiguer, je ne lis même plus ce genre de messages. Par ailleurs, il y a certains militants d’extrême droite qui m’envoient de pseudo messages de soutien. Ils sont facilement identifiables À ceux-là, je tiens à dire la chose suivante : je ne fais aucune différence entre les racistes et les tenants de l’intégrisme religieux. Qu’ils gardent alors leurs messages pour leurs semblables. Ici, il n’y a pas de place pour les racistes et les nazillons.

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Mohamed Sifaoui Journaliste, Ecrivain et Réalisateur.
www.mohamed-sifaoui.com/

5 - Sauver la laïcité: appel de 8 personnalités laïques

Cet appel a été lancé en février 2008.

La laïcité est en péril. Ce n'est plus, cette fois, le résultat d'attaques détournées, mais une remise en cause violente et globale. Le président de la République, déjà inspirateur de la commission Machelon, mène l'offensive avec la plus grande brutalité. Nul procès d'intention de notre part, mais de simples constats :

Face à une offensive sans précédent depuis longtemps, la plus large mobilisation pour la laïcité est à l'ordre du jour. L'enjeu est de taille : assurer la coexistence sereine de personnes issues des traditions les plus diverses en émancipant la loi commune de tout particularisme. Avant toute chose une parfaite clarté sur les objectifs s'impose. Bien sûr, il faut réaffirmer la liberté de conscience, premier des principes laïques. Mais celle-ci doit aller de pair avec l'égalité de traitement des convictions, second principe rendu possible par la neutralité de la République et la loi qui sépare l'Etat des autorités religieuses. Selon le troisième principe, les institutions publiques ne doivent pas avoir d'autre but que l'intérêt de tous. Le moment est venu de réaffirmer ces trois principes et de les défendre comme un tout face aux empiètements dont la laïcité ne cesse de faire l'objet. Et de rappeler fermement que ces empiètements ne sauraient faire jurisprudence.

Non à toute réécriture de la loi du 9 Décembre 1905 !
Non à son contournement insidieux par quelque voie réglementaire que ce soit !
Non au tarissement de l'action publique à finalité universelle !
Non à la généralisation des entorses multiformes à la laïcité !

Le mouvement laïque saura s'unir pour empêcher toute régression de la laïcité, qui signerait une régression de la république elle-même.

Auteurs :

Un Collectif

6 - Sarko veut le retour du catéchisme à l'école publique

Personne n’y a prêté attention mais dans son discours au dîner du CRIF, le Président de la République a bel et bien annoncé qu’il entendait introduire un enseignement religieux à l’école publique. « Bakchich » décrypte le propos présidentiel, qui évoque des rencontres avec des « religieux » engagés, et livre les pièces du dossier.

C’est l’autre bombe du discours prononcé par Nicolas Sarkozy au dîner annuel du CRIF, le 13 février. Une bombe encore plus lourde de conséquences que la proposition de confier aux élèves de CM2 la mémoire des 11 000 enfants français juifs exterminés par les nazis.

En violation du principe de séparation de l’’Eglise et de l’Etat, le Président de la République a tout simplement annoncé son intention d’introduire à l’école publique un enseignement religieux. Une intention formulée en ces termes : « Nos enfants ont aussi le droit de rencontrer, à un moment de leur formation intellectuelle et humaine, des religieux engagés qui les ouvrent. »
« Formation intellectuelle et humaine ». Que faut-il entendre par là ? Que tous les enfants de France ont le droit de se rendre, en dehors de leurs heures de cours – sauf dans le cas d’un établissement confessionnel, bien sûr - dans une église, une synagogue ou une mosquée ? Mais ce droit, acquis, n’est nullement remis en cause par qui que ce soit. Aucune menace ne plane.

S’agit-il des aumôneries installées à proximité des établissements scolaires ? Là encore, leur existence n’est pas en péril.
Pour Sarko, morale laïque et morale religieuse sont complémentaires

C’est donc bien dans l’enceinte de l’école, lieu privilégié de la « formation intellectuelle et humaine » que cette rencontre avec des religieux doit intervenir. Le cheminement rhétorique qui conduit à cette annonce est, sur ce point, sans équivoque.

Premier mouvement, Nicolas Sarkozy se prononce pour l’enseignement d’une morale laïque à l’école. Il souligne aussitôt que morale laïque et morale religieuse sont complémentaires. Dès lors, il peut revendiquer – c’est le troisième mouvement de la démonstration – une place pour l’enseignement religieux, au moins équivalente à celle qu’occupera l’enseignement de la morale laïque.

Raisonnement dont on discerne tout de suite la faille : la laïcité, par un tour de passe-passe sémantique (laïcité/ morale laïque), devient une… confession parmi d’autres, alors qu’elle se borne à organiser leur coexistence.

Formulation mal maîtrisée ? Improvisation ? Pas du tout. Quelques phrases plus loin l’annonce présidentielle est répétée : « Je pense que si nos jeunes peuvent, à un moment de leur vie, être initiés à ces questions-là, c’est mieux que s’ils ne le peuvent pas. Ils en feront ce qu’ils en voudront, mais nul n’est en droit de présumer à leur place. »

Dans l’esprit de Nicolas Sarkozy, cette initiation religieuse s’adressera donc à tous les enfants, quelle que soit leur confession ou leur absence de confession. Et on peut supposer qu’elle ne sera pas ponctuelle. Pour que les religieux en question « ouvrent les enfants à la question spirituelle et à la dimension de Dieu », il faudra certainement plus d’une réunion.

Bref, le catéchisme est de retour dans l’école publique.
Une annonce éclipsée par celle du parrainage des enfants de la Shoah

Pourquoi personne n’a réagi, demandera-t-on ? La charge émotionnelle que représente le souvenir des 11 000 enfants français de confession juive morts dans les camps, et la proposition de parrainage qui lui a été associée, ont, ce soir-là, bouleversé et déconcerté l’assistance du dîner du CRIF.

En outre, y assistaient majoritairement des convives engagés dans une démarche religieuse. Le propos présidentiel ne les aura pas fait autant sursauter – même si leur attachement à la laïcité républicaine n’est pas en cause – que s’il s’était agi, mettons, d’une réunion de libres penseurs. La cascade de réactions politiques qui a suivi la proposition présidentielle sur la mémoire du génocide a fait le reste. L’annonce de l’introduction d’un enseignement religieux est tombé dans les oubliettes.

Le chef de l’Etat en a trop dit ou pas assez. A tout le moins, ce propos appelle des explications de la part de celui qui l’a prononcé. Pour l’heure, ce vœu pieux ressemble furieusement à une déclaration de guerre à la loi de 1905.

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Serge Faubert

4 - International

1 - Les défis de la laïcité belge

Il n’existe pas en Belgique (comme d’ailleurs dans aucun autre pays européen) de référence explicite à la laïcité, ni dans la Constitution, ni dans aucun texte organique du type de la loi française de 1905. Toutefois, plusieurs dispositions de la Constitution belge garantissent également la liberté de conscience, le libre exercice des cultes, et le principe de non-discrimination qui fondent le devoir d’impartialité des pouvoirs publics et qui interdisent en principe de favoriser une religion ou une conviction quelle qu’elle soit.

Face à l’absence officielle et effective de séparation Eglise-Etat en Belgique, un mouvement laïque s’est développé durant tout le XXe siècle au départ du milieu associatif et grâce au bénévolat de ses militants.
Ce mouvement s’est constitué en associations sans but lucratif (cfr associations loi 1901) sous le nom de "Centre d’Action Laïque" pour la Belgique francophone et "Union des Libres penseurs - UVV" pour la partie néerlandophone.
Ces deux associations ont uni leurs efforts pour obtenir que la Constitution consacre explicitement, en son article 181, le principe de "reconnaissance" des conceptions philosophiques non-confessionnelles, au même titre que les cultes, ainsi que le principe de subventionnement des "organisations qui offrent une assistance morale fondée sur une conception philosophique non-confessionnelle" comme c’était déjà le cas pour les ministres des cultes.
Le concept de laïcité pour le Centre d’Action Laïque se définit statutairement à deux niveaux :

La démocratie ne peut se concevoir sans laïcité politique. Tout démocrate digne de ce nom, quelles que soient ses convictions philosophiques ou religieuses, doit revendiquer la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

En ce sens, la laïcité n’est pas à comparer à un courant de pensée à mettre sur le même pied que les religions. La laïcité doit se concevoir comme un principe d’organisation de la chose publique, fondé sur une vision universelle de la société.

Outre cette exigence d’impartialité et d’indépendance des pouvoirs publics vis-à-vis des convictions privées, le terme " laïcité " recouvre aussi une conception de vie dénuée de tout fondement confessionnel et de toute référence divine, surnaturelle ou transcendante. Cette conception de vie implique l’adhésion à un ensemble de valeurs positives comportant un impératif humaniste et une dimension éthique.

Ce courant de pensée est guidé par le principe du libre-examen qui implique de rejeter tout dogme et donc de procéder avec un esprit critique à la mise en question de toutes les idées reçues. Le libre-examen permet de revendiquer le droit à l’absolue liberté de conscience. Il entraîne l’obligation de développer sa réflexion critique personnelle et contribue dans un contexte de laïcité politique, à garantir aux autres le droit et la possibilité d’en user de même.

En ce qui concerne l’impartialité de l’Etat, le CAL mène un combat incessant pour obtenir la disparition de toute référence religieuse dans la vie publique : symboles religieux dans les édifices publics, modification de l’ordre protocolaire du Nonce apostolique et abolition de la coutume d’assortir les fêtes officielles d’un Te Deum.
En Belgique, le mouvement laïque, souvent soutenu dans ses combats par la Franc-maçonnerie, s’est battu pour conquérir des libertés et faire évoluer la société conservatrice dominée par les dictats du catholicisme.
A titre d’exemples :

Pour mener à bien ses actions, le CAL est structuré en sept régionales dont une pour la Région bruxelloise, appelée " Bruxelles Laïque ".
L’intervention de Bruxelles Laïque se définit comme un travail didactique et social de mise en valeur de la laïcité comme alternative humaniste, sociale et culturelle. Elle vise à cet effet à prévenir contre les intolérances et les dogmes, à éduquer à la diversité, à l’esprit de progrès, d’ouverture et de solidarité.
Bruxelles Laïque développe des actions sur les plans :

Le CAL a aussi à cœur de diffuser nos valeurs hors de nos petites frontières, notamment au travers de la Fédération Humaniste Européenne (dont le président est belge). Il mène aussi une action en Amérique latine, en soutenant la création d’Instituts Laïques d’Etudes Contemporaines. Un séminaire international regroupant le CAL, Bruxelles Laïque et les ILEC est organisé chaque année dans un pays différent sur ce continent.
Enfin, il faut évidemment préciser que, comme en France, nous sommes confrontés à de nouveaux défis qui se nomment : retour du phénomène religieux et développement du communautarisme.
Pour de plus amples informations sur nos activités : ici et ici

Ariane Hassid présidente de Bruxelles laïque www.irahm.be

2 - Laïcité : Les accommodements raisonnables au Québec et ailleurs…

Les discussions, voire les polémiques, qui ont lieu au Québec actuellement à propos des accommodements raisonnables (terme assez cocasse qui laisse supposer que les sujets de cette province pourront choisir la sauce à laquelle ils seront mangés!), que certains interprètent comme des droits à la différence, sinon à la différence de droits, commencent à empoisonner sérieusement la vie publique, et à diviser les Québécois. Au point que le Premier ministre, M. Charest, a dû mettre sur pied le 9 février 2007, une Commission présidée par le sociologue Gérard Bouchard et le philosophe Charles Taylor, pour dresser un état des lieux concernant les pratiques cultuelles dans La Belle Province.

Cela aura au moins pour mérite de provoquer un débat sur la pertinence d’une laïcité dont le modèle souvent cité, surtout par ses détracteurs, est le modèle français régi par la Loi de 1905. Mais vu le passé des deux responsables de cette commission, il est fort probable que les conclusions seront aussi pertinentes que celles de la Commission française Stasi-Ferry du 15 mars 2004, ou les recommandations du Rapport canadien de Marion Boyd du 20 décembre 2004, en Ontario [1].
Les premières consultations de la Commission ont eu lieu le 24 août 2007. Les deux coprésidents ont été ravis d’ouïr les jeunes - entendez par là le Québec de demain- leur déclarer qu’ils étaient, pour la plupart, favorables aux accommodements raisonnables.[2]
Avec ces résultats, les duettistes auraient tout intérêt à interroger les nouveaux nés qui par un " arreuh " significatif apporteraient leur soutien marqué à leurs accommodements.
Ainsi la bigoterie et le jeunisme auraient raison de la Raison ! Et de la majorité. Car si l’on en croit les sondages seulement 34 % des jeunes de 18 à 24 ans estiment que la société est trop tolérante. En comparaison, les adultes de 25 à 34 ans le pensent dans une proportion de 65,4 %. Chez les personnes de 55 à 64 ans, cette proportion atteint 67,5 %.
J’ignore ce que les Québécois entendent par Tolérance, la définition n’étant pas précisée dans le sondage.
À l’instar des moines de l’abbaye de Montmajour qui creusaient quotidiennement dans le roc une partie de leur tombe, les jeunes crédules préparent donc l’avenir…
Le reste des audiences publiques a tourné à la pantalonnade. Des religieux de tout poil les ont considérées comme des tribunes pour exprimer leur volonté de retourner au passé. Ainsi le Maire de Saguenay, Jean Tremblay, prétendant sans vergogne parler au nom de sa ville, a-t-il vilipendé la laïcité, conchié la Révolution tranquille, [3] et prôné le retour aux valeurs religieuses d’antan. [4]
Sans doute ces prémisses ont-elles incité le 10 octobre 2007, le Gouvernement de M. Charest a envisager de légiférer rapidement pour assurer l’égalité de tous devant la Loi, en repoussant tout accommodement religieux, et ce sans attendre les résultats de la commission qu’il avait lui-même convoquée.

Il est certain qu’en matière de laïcité les opinions divergent en fonction des intérêts politiques, des manœuvres électoralistes, des vues à court terme, des convictions religieuses militantes, des pays, du laxisme civique, et que sais-je encore. La laïcité est accommodée, selon les intérêts du locuteur, à toutes les sauces… Qualifiée de laïcisme par ses ennemis religieux, qui traitent aussi de laïcards ses défenseurs, pronée ouverte, tolérante, par les communautaristes, c’est devenu un concept volontairement brouillé, une vraie bouteille à l’encre dont les laïcs et les athées font régulièrement les frais.
L’obsession des intégristes est de les exclure du débat. La rhétorique, comme toujours, consiste en la ringardisation du modèle français. Un front commun de toutes les confessions s’est réalisé contre les laïcs et les athées pour tenter de les réduire, par tous les moyens, au silence [5]. Alors que les seuls athées au Québec étaient au nombre de 413 185 au recensement de 2001, donc plus nombreux que les musulmans, les juifs, les sikhs, les bouddhistes et les hindous réunis!
Je rappellerais les accommodements raisonnables dont a bénéficié Théo Van Gogh, le procès de Charlie Hebdo à propos des caricatures de Mohamet, et la fatwa contre Robert Redeker.
En 2005, Samira Munir, une politicienne norvégienne d’origine pakistanaise, qui militait pour l’abolition du voile islamique dans les écoles, meurt malencontreusement en tombant du train en banlieue d’Oslo. Le 11 décembre 2007, un Musulman torontois tue sa fille de dix ans qui refusait de porter le hidjab. J’en passe et non des moindres.

Rappelons ce qu’est le paradigme laïc français?
Le concept de laïcité à la française, établi par la Loi de 1905, est de toute évidence très différent de celui adopté par le Canada, et les États-Unis.
Le modèle républicain fusionnel est fondé sur le résultat d’une soustraction des signes religieux, l’autre est fondé sur une conception éclatée d’un communautariste de juxtaposition (patchwork), sans liens et sans ciment national, de ces mêmes signes. Une communauté des communautés, comme la définissent Robert Stanfield et Jœ Clark, ex- Premiers ministres canadiens conservateurs fédéraux.
Pourquoi ces deux interprétations? Simplement en raison des Constitutions nationales. Si la France à exclu au moins théoriquement Dieu des débats politiques, il n’en va pas de même au Canada, y compris le Québec toujours membre de la confédération.
Dieu est présent dans la Constitution canadienne qui, bien que jamais ratifiée par le Québec l’y assujettit. Il est présent aussi - c’est normal puisqu’il a le don d’ubiquité- dans le préambule de la Charte des Droits et Libertés. Il y est écrit : " Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit…. ".
En fait le concept de laïcité est totalement absent des droits civils canadien et québécois.
Le 19 février 2007, le Mouvement Laïque Québécois dénonçait cet état de fait, sommait le gouvernement de chasser Dieu des institutions et l’invitait à se tourner vers une laïcité en tout point identique au modèle français, sans toutefois le citer.
Quant à l’école laïque censée être le lieu d’émancipation garantie par l’État, des citoyens par rapport à la famille, et aux communautés religieuses, comment pourrait-on y appliquer cette conception au Canada où la Charte garantit la liberté individuelle d’exprimer son appartenance religieuse dans tous les espaces publics?
On ne s’étonnera pas que dans ce contexte, le concept français soit taxé d’intolérant, et que l’on aboutisse à des obligations d’accommodements raisonnables…

Les lieux publics n’échappent donc plus aux tentatives des intégristes d’occuper tous les espaces possibles, sous le couvert du politiquement correct.
Ainsi, par exemple, à Montréal, Radio Canada nous apprenait le 7 novembre 2006, que le YMCA de l’Avenue du Parc avait fait installer des verres dépolis aux fenêtres d’une salle d’entraînement. Cela en raison d’une plainte de la communauté hassidique qui n’appréciait pas que les enfants puissent voir les sportives en tenue jugée trop légère. Cette communauté est allée jusqu’à payer les frais d’installation des carreaux ! Une pétition, lancée par l’opposante Renée Levaillante a déclanché une nouvelle polémique. Mais elle a porté fruit : le 25 mars, soit cinq mois plus tard, Radio Canada annonçait que le YMCA allait remettre, à ses frais, des glaces transparentes avec des stores, aux mêmes fenêtres! La suite au prochain numéro. Sans doute pour un nouveau remplacement des carreaux par des vitraux multiconfessionnels.
Le 24 juillet 2006, (Tiens pendant les vacances scolaires !) donc un peu plus de quatre mois auparavant, la Cour suprême autorisait au jeune Sikh Singh Multani à porter un kirpan, petit poignard symbolique (sic), à l’école Marguerite Bourgeois, sous prétexte que l’interdiction de port constituait une restriction de la liberté religieuse.
Le Danemark a interdit ce petit symbole inoffensif le 24 octobre 2006, ainsi que la Californie le 30 janvier 2007, surtout dans les aéroports.
Rappelons tout de même que ce mignon petit bibelot avec sa lame d’au moins 15 cm, reste de l’aveu même des Sikhs une arme destinée à défendre les faibles contre la tyrannie et l’esclavage! (reSikh si j’ose dire).
L’affaire du kirpan n’a été possible que parce qu’il y avait eu un précédent. Il remonte à 1990. Le 15 mars, Radio Canada annonçait que conformément à la Charte des droits et libertés, et à la politique multiculturelle d’Ottawa, les policiers de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) seraient autorisés désormais à porter le turban dans le cadre de leurs fonctions.
À quand une gendarmette en niqab?
Défense de rire ! L’Angleterre championne toutes catégories des communautarismes commence à en revenir, depuis qu’elle a eu sur le dos une affaire d’enseignante, à Dewsbury, suspendue pour avoir refusé d’ôter le niqab en classe, en novembre 2006.
Qui d’ailleurs d’autre que les médecins anglais auraient pu inventer la célèbre Inter-Faith Gown, burka médicale employée pour la première fois en septembre 2006 au Royal Preston Hospital de Londres ? C’est vrai, peut-être Louis de Funès ! (par un jeu de cinq pièces, elle ne dévoile que les parties à ausculter !)
Dernière en date des plaisanteries sur le niqab : 23 mars 2007. Après avoir tergiversé plus d’une semaine, le directeur des Élections du Québec, sous les pressions de l’opinion publique et politique du PQ (Parti Québécois), se décide à déclarer que les électeurs devront voter à visage découvert, et non sur simple présentation d’une pièce d’identité, et d’une déclaration d’une tierce personne attestant de l’identité de l’électrice enfouie dans ses voiles.
Le 24 mars, le même Directeur revient sur sa décision. Les musulmanes en niqab n’auront pas à découvrir leur visage. Sans doute a-t-il inventé un nouveau jeu : Un coup j’te vois, un coup j’te vois pas! Que ne ferait-on pour vous complaire!. Et cela en dépit de la réprobation du Premier Ministre Stephen Harper qui, au sommet de l’APEC 2007, en Australie, a déclaré que cette décision allait à l’encontre de celle prise par le Parlement. Ah ! Accommodements quand vous nous tenez!
Flash back : Noël 2002. La ville de Montréal, dans un souci de ne pas porter ombrage aux fidèles de diverses confessions, renomme l’arbre de Noël "arbre des fêtes". La même année Toronto confrontée à la même situation, maintient l’appellation d’arbre de Noël. Mais à Noël 2006, un juge de la Cour de Toronto ordonne le retrait d’un sapin de la Cour de Justice afin de ne pas offusquer les non chrétiens ! Bis et repetita placent !
L’ignorance est assassine ! Comme chacun sait, l’arbre de Noël n’est en rien un symbole chrétien mais celtique, pour commémorer le solstice d’hiver. Oui, je sais l’Église l’appelle l’arbre du Christ depuis que les Alsaciens l’ont adopté en 1521, sans doute "malgré eux". En effet il n’est pas douteux que ce soit bien sous un sapin que le Christ a vu le jour.
Je continue… Je reste au Canada mais je vous emmène en Saskatchewan. Dimanche 17 décembre 2006… Tiens comme c’est curieux, toujours autour de Noël ! Deux médecins, Carrie Levick et Jacquie Bourgeois dénoncent la décision de l’administration de leur hôpital de cesser de procéder à des ligatures de trompes sur la directive de l’évêque du diocèse. L’hôpital en question c’est celui de Humbolt, le St-Elizabeth. Financé par l’argent des contribuables et géré par les curés ! N’allez pas croire à l’exception. Il existe au Canada, selon les réalisateurs de l’émission Second Regard de Radio Canada, quatre-vingt- dix hôpitaux gérés par l’Église mais financés par des fonds publics!
Allons maintenant faire un tour en Colombie britannique. L’air des Rocheuses est propice à la liberté. Surtout celle que prennent les Mormons avec les Lois canadiennes qui interdisent la polygamie. Dans le petit village de Bountiful au sud-est de la province, ils batifolent allègrement depuis une soixantaine d’année avec leur harem, au grand dam du Procureur général Wally Oppal. Ce dernier, exaspéré, est allé en décembre 1995 en Utah, voir comment les Yankees ont pu arrêter les leaders de la communauté, sans soulever l’ire des défenseurs de la polygamie, comme ces trois penseurs géniaux, Martha Bailey, Beverley Baines, professeurs de droit à l’université Queen de Kingston, et le professeur de droit, lui aussi, Alain Roy de l’université de Montréal, qui ont proposé de la décriminaliser. Pourquoi pas ?
À quand un rapport d’universitaires favorables à la polyandrie ? à l’excision ? à la lapidation ?
Bon, je n’en finirais pas de citer au Canada, et dans le monde entier les abus dus à la "tolérance", aux accommodements raisonnables et autres amusettes pseudo progressistes faisant le jeu des sectes de tout poil.
La France, modèle supposé de laïcité n’a pas été à l’abri d’une lente mais sûre érosion de la Loi de 1905.
Exemples : Delanoë, le maire socialiste de Paris, outre qu’il ait baptisé le Parvis de Notre Dame Parvis Jean Paul II, a trouvé le moyen le 19 octobre 2006 en compagnie du communiste- oui du communiste, Daniel Vaillant- d’aller offrir une école maternelle au recteur de la mosquée de Paris, M. Boubakeur, afin de la transformer en Institut musulman, qui à terme deviendra une mosquée… financée par l’argent public. Saluons ce geste qui honore Delanoë et la Laïcité conformément à la Loi de 1905 !
La triste affaire des caricatures du Jyllands- Posten, et le procès ridicule intenté à Charlie Hebdo, sont là pour nous rappeler que toute concession à l’obscurantisme constitue une grave atteinte à la Liberté.
Le véritable accommodement raisonnable est celui qui consiste à rejeter Dieu de la vie civile et des Constitutions, et à le reléguer à la sphère privée individuelle. Il convient de ne pas le mêler à la vie publique. Surtout sans son consentement écrit.
Ce n’est pas à autre chose que vise la Loi de 1905. Elle consacre la séparation des Églises et de l’État. Elle proclame que :

Article 1er : "la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes... ".

Article 2 : "La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte... "

Le premier problème c’est qu’à l’époque, elle ne visait que le catholicisme, la confession d’Augsbourg, c’est-à-dire les Protestants luthériens, les Réformés calvinistes et les Israélites.
Aujourd’hui d’autres confessions ont pénétré l’occident.
Le second problème est que cette Loi a subi des altérations continuelles, toujours dans une optique d’apaisement.
On n’en finirait pas d’énumérer les coups de canif, voire de couteau de boucherie infligés à la Loi de 1905 jusqu’aujourd’hui. Même la France a ses accommodements raisonnables avec le concordat d’Alsace-Moselle de 1801, le Concordat de Napoléon de 1802 pour Mayotte, les Comores et la Guyane où le Christ est toujours roi. Et ce n’est pas fini : Au plan des accommodements raisonnables politiques, il y a Wallis et Futuna, ces deux confettis perdus dans le Pacifique Sud sont des royaumes français. Oui vous avez bien lu, des royaumes où règnent trois rois sur 192, 5 km2 et 14 944 sujets. Des rois subventionnés par l’argent des contribuables républicains ! Et protégés par Dieu… dont ils sont les représentants sur ces îles.
Quant à Sarkozy lui-même, il est évêque de Latran… à titre honoraire, je précise !
Si, comme il le souhaite, la Loi doit être "toilettée", ce n’est sûrement pas dans le sens qu’il préconise. Il convient non seulement de la ramener à son expression initiale de 1905, mais encore d’inclure à l’école, dans les programmes de véritables cours d’histoire et de philosophie respectant le rationalisme, et présentant les religions pour ce qu’elles sont : des mythes.
La paix civile est à ce prix.
Il n’est plus besoin d’aller réinventer la roue. L’Histoire nous apporte ses leçons. Paraphrasant Thoreau, le philosophe américain, je dirais que qui ignore le passé est condamné à le revivre. Encore quelques guerres de religion ? Non merci !

Notes

[1] Ce rapport vient confirmer la loi ontarienne de 1991 sur l’arbitrage. Cette loi avait été fortement contestée par des musulmans qui avaient annoncé leur intention de créer un tribunal islamique à l’instar de ce qui existait déjà dans les communautés juive et chrétienne. Marion Boyd prétend qu’il n’a pas été prouvé que les femmes souffrent de discrimination à la suite d’arbitrages de différends en droit de la famille par les “tribunaux“ religieux.

[2] M. Bouchard a attribué à leur jeunesse ce degré d'ouverture et cette confiance en leur identité collective. «C'est une génération qui semble avoir pris ses distances par rapport à des inquiétudes, des facteurs d'insécurité qu'on voit assez souvent se manifester chez leurs aînés, pas tous leurs aînés, mais un certain nombre de leurs aînés. Ici, ça ne semble pas exister. Ces gens-là se trouvent bien comme Québécois. Ils ont une identité qui est extrêmement ouverte.»

[3] La Révolution tranquille est une période de changements rapides vécue par le Québec de 1960 à 1966.

[4] Selon Jean Tremblay, la religion catholique est avec la langue française l'une des grandes richesses du Québec et a permis de mettre en place les valeurs importantes de notre société. M. Tremblay pense donc que, dans le respect des autres religions, l'on devrait redonner sa place au catholicisme, auquel adhère, selon lui, 95 % de la population.Bien qu'il affirme parler au nom de la Ville de Saguenay et assure que tous les conseillers municipaux ont été informés de ce qui se trouve dans le mémoire présenté, M. Tremblay avoue être l'auteur principal du document.

[5] Les Catholiques et les Musulmans ont déposé un mémoire commun auprès de la Commission Bouchard-Taylor, le 21 novembre 2007.

Gilles Bachelier Président de l'Internationale gaulliste

5 - à lire, à voir ou à écouter

1 - La nouvelle de l'été troisième partie

Respublica innove et vous propose la lecture d'une fiction écrite par un jeune auteur, Elie Maucourant. Ce texte est diffusé en 5 parties. Nous espérons qu'il vous plaira. Ci-dessous, la deuxième partie.

(Pour lire les parties précédentes, rendez-vous ici)

Tautéric ouvrit sa dixième cannette de bière. Il avait quelques remords à sacrifier sa collection mais Karim lui en fournirait bien d’autres. Du moins, il l’espérait : les réserves de bières finiraient bien par se tarir.

Un peu saoul, il se saisit de la Fovéa d’Honneur. Cette distinction était l’une des plus prestigieuses que pouvait fournir la ControlaCom. Il l’avait acquise durant la dernière campagne lunaire. A l’époque, sa cams avait filmé ses exploits et beaucoup de gens l’avaient admiré pour sa bravoure. Songeur, il se rappela…

- Les forces vont se poser d’ici un quart d’heure.
Son officier le fixait froidement, lui et toutes les jeunes
recrues. Ils revenaient juste de Mexico-T 42. Le combat avait été facile. La 4e d’infanterie des marines avait courageusement exterminé les derniers civils survivants de l’engloutissement par les flots de toute l’Amérique Centrale et du Sud. Maintenant, ils fonçaient vers la Lune, là où se défendaient rageusement les Asténiens, les derniers croyants du cosmos. Les Asténiens vénéraient Dolta, une femme à la lance et au bouclier.

- On enfonce la position des hoplites et ont nettoie les derniers fortins. Après ça, le service de colons prendra le relais, cria leur officier.

Tautéric regarda à travers le hublot. Sur la toile noire tâchée d’étoiles scintillantes, flottait la Lune. La terra formation avait quelque peu raté et malgré l’oxygène et la température acceptable de quarante degrés, le sol s’était transformé en un désert orange incultivable. En conséquence, les Asténiens ne vivaient que de l’élevage nourri aux os broyés.

Le vaisseau trembla. Ils traversaient la bataille orbitique.

- On nous a réservé un couloir spécial au milieu de ce carnage. Nos spationefs d’engagement sont aux prises avec les peltastes des Asténiens. Toutes nos forces aériennes sont occupées. Une fois sur le terrain, on devra se passer de leur aide.

Ils atterrirent en même temps que les terrians, les chinooks qui transportaient l’artillerie tactique et les mowaks, qui portaient dans leurs cales les chars d’assaut Mohamet. Tous étaient venus du 2e de cavalerie.

Le camp fut vite dressé et tous les soldats de la 4e eurent droit à un briefing de leur supérieur. Tautéric faisait partie d’un groupe de trois cent soldats. Leur supérieur au torse bardé de décoration et au ventre bien pesant les aligna, en rang.

- Ecoutez-moi attentivement. La 2e de cavalerie va pilonner les positions des hoplites à l’artillerie tactique, ensuite, on lance les Mohamet à la charge. Normalement, leur puissance devrait suffire à enfoncer les lignes adverses. Nous, on va attendre gentiment derrière les blindés. On passe à l’assaut que si ça tourne au vinaigre. Des questions ?

Un silence.
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