n°642 - 14/10/2010

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Chronique d'Evariste
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2005, 2010 : lorsque que le peuple résiste à la politique des choses

par Évariste
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Si « comparaison n’est pas raison », certaines analogies sont susceptibles de faire apparaître des effets de structure et de rendre ainsi le réel plus intelligible. Tel est le cas de la mise en parallèle de ces deux séquences que sont mai 2005 et octobre 2010. La première correspond au référendum sur le Traité Constitutionnel Européen, la seconde, à la mise en oeuvre de la contre-réforme des retraites.
Malgré des différences évidentes, il est néanmoins possible de faire apparaître cinq marqueurs communs.

L’alliance des notables

En 2005, les socio-démocrates et les représentants de la droite néo-libérale étaient tous vent debout pour défendre le TCE. Les premiers avec, il est vrai, quelques états d’âme, tant l’Europe entérinée par ce traité écrit sous l’égide de Valéry Giscard d’Estaing était loin de ressembler à « l’Europe sociale » promise depuis vingt ans. Mais l’Europe valait bien ce nouveau sacrifice. C’est ainsi que les « progressistes » se retrouvèrent, une fois encore, du côté des conservateurs pour appeler les électeurs à « dire oui à l’Europe », quelle que soit cette Europe, et quel que soit le prix que les peuples auraient à payer.
Sur la question des retraites, l’alliance des notables est aujourd’hui plus masquée, et ce pour deux raisons au moins. Le Parti Socialiste ne peut plus ignorer ce qui lui en coûte électoralement de se couper du peuple. Il ne peut pas non plus faire comme si la retraite à 60 ans ne figurait pas parmi les grandes conquêtes sociales de 1981. Cela n’a cependant pas empêché quelques couacs : de la part de sa première secrétaire Martine Aubry, d’abord, qui, en janvier dernier, disait concevoir un recul de l’âge légal à 61 ou 62 ans ; de la part de Dominique Strauss-Kahn, ensuite, qui, en mai dernier, assimilait la retraite à 60 ans à un « dogme » qu’il se faisait fort de refuser. La droite sarkozyste ne se prive pas de rappeler ces déclarations et de brandir le Livre blanc de Rocard. C’est de bonne guerre, après tout : toute la prudence politique que peut déployer le PS ne suffit pas à masquer l’alliance des notables, qui est bien réelle. Cela fait longtemps que les socio-démocrates se sont ralliés à l’idée que la retraite par répartition exigeait le sacrifice du report de l’âge légal et de l’allongement de la durée de cotisation.

La politique des choses1

Toute la stratégie de communication du gouvernement consiste à entretenir une confusion : présenter comme une nécessité ce qui est en réalité un choix politique favorable à la classe dominante. Ministres, députés et sénateurs le répètent ad nauseam : tout cela est arithmétique, réformer est une nécessité, tous les cris que vous pourrez pousser n’y feront rien, etc. Chacun doit ainsi se résoudre à l’ordre des choses et adopter la seule attitude rationnelle qui soit : travailler plus longtemps. Il n’est pourtant pas difficile de distinguer ce qui relève de l’ordre du fait (la situation déficitaire des retraites) et ce qui relève de l’ordre politique (les choix qui ont conduit à cette situation déficitaire d’une part et les solutions que l’on peut apporter pour y remédier d’autre part).
Ce discours n’est pas sans rappeler celui qui, en 2005, a envahi les médias dès lors que le « non » a commencé à monter dans les sondages. Sentant le roussi, les partisans du « oui » ont alors asséné l’argument ultime : il n’y a pas de plan B. Ce qu’il fallait ainsi comprendre, c’est qu’il n’y avait pas d’autre politique possible que celle qui était conforme à la politique des choses, c’est-à-dire aux intérêts des puissants : pas d’autre Europe possible que celle des experts, où ce ne sont pas les peuples qui sont souverains, mais les mécanismes implacables du marché.

La critique de la singularité française

Refuser de se résigner à la politique des choses revient à se singulariser. Mais se singulariser revient à afficher qu’il y a d’autres politiques possibles que la politique des choses. Que, dans l’ordre du politique, tout n’est pas affaire de nécessité. Qu’il y a place à la délibération et prise à la volonté humaine. Or cela n’est pas acceptable, car cela va à l’encontre des intérêts des puissants. C’est ainsi qu’on entend à nouveau une critique qui, en 2005, a été tant de fois formulée : la France ne peut pousser le ridicule jusqu’à se singulariser par rapport à ses « voisins ». Il faut le faire parce que tous les autres vont le faire : tel était l’argument. On sait ce qui advint : un mois après, le peuple néerlandais rejetait le TCE à plus de 61 %. On se garda bien ensuite de s’exposer une nouvelle fois à un démenti aussi cruel. Il reviendrait désormais aux parlements nationaux de ratifier le TCE. La version 2010 est légèrement différente : il faut le faire parce que tous les autres l’ont fait. Ce qui est vrai, juste et bon étant, c’est bien connu, unanimement partagé, la singularité est signe d’une ridicule persévérance dans l’erreur et dans l’aveuglement. La France ne peut donc être le seul pays européen à maintenir l’âge légal du départ à la retraite à 60 ans. Il faut se résigner et s’aligner. On ne peut avoir raison contre tout le monde, dit le gouvernement. On ne discutera pas ce lieu commun tant il est ténu. Un fait, massif, suffit à le faire voler en éclats : en 1789, la France avait raison contre tout le monde. En montrant que la Monarchie n’était pas le seul régime politique possible, en décidant dans la nuit du 4 août l’abolition des privilèges, la France n’a pas craint, alors, de se singulariser.

La férocité des chiens de garde

Mai 2005, octobre 2010 : voilà deux moments où les chiens de garde ont montré les dents. Il n’est pas si fréquent que la vérité du système médiatique se dévoile aussi complètement. Aujourd’hui comme en 2005, les discours incantatoires sur la liberté de la presse et la neutralité des journalistes ne parviennent plus à masquer la collusion entre les médias et les puissants. Même ceux qui croyaient encore aux vertus des journalistes ont du mal à retenir, sinon un rire, du moins un haussement d’épaules lorsqu’ils entendent la corporation se plaindre d’être clouée au pilori. Il suffit d’écouter ces radios où l’on invite complaisamment les auditeurs à se répandre sur les privilèges des fonctionnaires, il suffit d’entendre certains journalistes confondre allègrement question et opinion (« vous êtes bien d’accord pour dire qu’il faut travailler plus longtemps quand on vit plus longtemps ? »), il suffit de voir les mêmes arguments passer comme par magie de la bouche des politiques à celle des journalistes pour se convaincre que, loin d’être le reflet de l’opinion dominante, les médias sont le vecteur de l’opinion des dominants. Tout cela n’est pas sans rappeler le triste spectacle de ces journalistes qui, en 2005, devenaient hystériques lorsqu’ils recevaient un partisan du « non », abdiquant toute impartialité, cessant de raisonner, surtout si ce dernier était de gauche.

La résistance du peuple

En 2005, le « non » l’a finalement emporté. En 2010, la mobilisation contre la politique gouvernementale en matière de retraites ne faiblit pas. Dernier point commun aux deux séquences : nonobstant l’alliance des notables qui voudraient nous faire croire qu’il n’y a pas d’autre politique possible que le sacrifice des acquis sociaux, que nous devrions avoir honte de nous singulariser, nonobstant la vigilance des chiens de garde, force est de constater que le lavage de cerveau ne marche pas. Les manifestants défilent toujours en nombre dans la rue, la mobilisation est soutenue très majoritairement par l’opinion, la question de la reconduction de la grève est désormais sur la table. Bref, le peuple résiste.
Avec son « mini-traité », Sarkozy a montré en 2008 jusqu’où les puissants étaient prêts à aller pour sauvegarder leurs intérêts : jusqu’à considérer comme nul un acte de la volonté générale. Face à la résistance du peuple, il fait preuve aujourd’hui d’une brutalité analogue : il refuse d’ouvrir les négociations avec les syndicats, rompant, en cela, avec la stratégie mise en oeuvre par Chirac et Raffarin en 2003, qui avait conduit la CFDT à jouer la carte du « syndicalisme d’accompagnement » et, finalement, à « trahir ». En voulant passer en force et en s’appuyant sur sa majorité parlementaire, Sarkozy mène une lutte des classes implacable et ne prend même plus la peine de faire une génuflexion devant la démocratie sociale. Ce faisant, il semble dire en creux que si le peuple ne veut pas de cette réforme, il n’a qu’à bloquer le pays. Curieuse façon de gouverner. Le mouvement social saura s’en souvenir.

  1. Note : Cf. Jean-Claude Milner, La politique des choses, Navarin éditeur, 2005. L’une des thèses défendues par Jean-Claude Milner dans ce livre est que nous assistons aujourd’hui à l’accomplissement de ce qui fut un rêve du XIXème siècle : « que le gouvernement des choses se substitue aux misérables décisions humaines ». La politique des hommes, paradoxalement, a cédé progressivement la place à la politique des choses. De là découle que le principal rôle des politiques se résume à « faire accepter à tous la conviction que personne ne peut jamais rien changer à rien ». []
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Financement des retraites : oui aux cotisations, non à l’impôt !

par Charles Arambourou
militant au Front de Gauche ; praticien des finances publiques.

Dans une tribune libre de l’Humanité du 22 septembre 2010, Liêm-Hoang-Ngoc, secrétaire national adjoint du PS, présente les propositions de son parti pour une réforme du financement des retraites. Il s’agirait de recourir à l’impôt (« fiscalisation »), plutôt qu’aux cotisations : « [le projet du PS] fait jouer la solidarité nationale à travers l’impôt (…), à côté des cotisations, dont l’augmentation exclusive (dans une logique pure de salaire indirect) aurait nui au pouvoir d’achat des salariés et à leur emploi dans les PME. »

Or la « fiscalisation » des prélèvements sociaux est un projet 1) économiquement pervers, 2) socialement inéquitable, et 3) fatal à la solidarité.

1 – Pourquoi « économiquement pervers » ? Parce que brisant un lien « économiquement vertueux ».

Explication : les cotisations, fondement principal du financement de la protection sociale en France (hors fonction publique), constituent un prélèvement direct « à la source », sur la richesse créée (« valeur ajoutée » des entreprises). D’un côté, la part du travail : salaires direct et cotisations sociales (patronales et ouvrières) ; de l’autre, celle du capital : « l’excédent brut d’exploitation ». Ce « partage de la valeur ajoutée » est un des enjeux du débat (pas le seul).

Or l’économie « classique » (y compris Marx) a montré que le travail humain productif était la vraie source de la « valeur » économique. La connexion entre l’économique et le social établie par les cotisations est donc, à la fois, socialiste d’inspiration (partager la richesse produite) et profondément « vertueuse » économiquement.

2 - Financer la protection sociale par l’impôt serait socialement inéquitable. Car l’impôt ne frappe que le revenu final des agents économiques, non la valeur créée à la source, et repose à 80% sur les salariés, dépourvus des moyens « d’optimiser » leur fiscalité (voir la CSG, invoquée néanmoins comme modèle par le projet du PS).

Pour les entreprises, au contraire, il y a loin de la « valeur ajoutée » qu’elles produisent au « résultat courant avant impôt » : entre ces deux « soldes intermédiaires de gestion » s’opère l’essentiel de la prédation capitaliste, via notamment les « charges financières » (les prélèvements de la sphère financière), et les « provisions ». Sans oublier, in fine, la rémunération des actionnaires. Tendre la sébile fiscale après le passage de la finance, c’est ne ramasser que des miettes !

Ce serait donc aux salariés de payer la « solidarité nationale ». Et l’on ne parle que de l’impôt direct : la TVA est encore plus injuste… Quant au capital, il verrait mécaniquement s’accroître sa part dans la « valeur ajoutée », et diminuer ses « charges salariales » : merci l’impôt !

3 – Que deviendrait enfin le principe de solidarité ? Rappel : les actifs financent les retraités, non leur propre retraite ; les bien portants (même s’ils ont une santé de fer) payent pour les malades, etc. C’est ce qui permet d’adosser la protection sociale, non au crédit, ni à une « capitalisation » aléatoire (et juteuse pour la finance), mais aux richesses produites « ici et maintenant ».

Les cotisations sociales représentent –à la différence des « salaires directs » -une part socialisée des revenus du travail, et non une « charge de plus pour les entreprises » (même les PME !). Les considérer comme un « salaire indirect » (article cité), est donc impropre, puisqu’elles bénéficient, non à chacun selon son travail, mais à tous selon leurs besoins, via leur affectation au système solidaire.

Ainsi, l’augmentation faible mais « égalitaire » des cotisations patronales et salariales (l’alouette et le cheval ?), proposée par le PS, outre qu’elle masque le transfert à l’impôt de l’essentiel du financement social, interdirait tout rééquilibrage dans la répartition de la richesse créée. Paradoxe : Liêm-Hoang-Ngoc, comme économiste, a contribué à dénoncer le déséquilibre intervenu au profit du capital dans le partage de la valeur ajoutée. Or en la matière, il le sait, l’impôt ne permet d’agir qu’à la marge…

Certes, l’impôt, et en priorité l’impôt direct, à condition qu’il retrouve son rendement et sa progressivité, peut et doit être un instrument complémentaire de répartition plus équitable. Mais la protection sociale, donc les retraites, doit rester liée à la richesse produite, et rendue aux salariés, non étatisée. Financement par les cotisations, et gestion socialisée sont à défendre avec autant d’acharnement que l’âge de départ à la retraite. Les propositions de fiscalisation, au contraire, représentent pour la gauche un danger « de l’intérieur ».

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Pourquoi nous refusons l'écologisme benêt d'Arthus-Bertrand

par Aurélien Bernier
secrétaire national du M’PEP, auteur de « Ne soyons pas des écologistes benêts » (Mille-et-une-Nuits)

Source de l'article

Par Aurélien Bernier, secrétaire national du M’PEP, auteur de « Ne soyons pas des écologistes benêts » (Mille-et-une-Nuits) ; Paul Ariès, directeur du Sarkophage, théoricien de la décroissance, auteur de « La simplicité volontaire contre le mythe de l’abondance » (La Découverte) ; Yann Fiévet, président d’Action consommation, auteur de « Le monde en pente douce » (Golias) ; Corinne Morel-Darleux, secrétaire nationale du Parti de gauche et conseillère régionale Rhône-Alpes, auteur de « L’écologie, un combat pour l’émancipation » (Bruno Leprince).

Tribune publiée dans le journal L’Humanité le 9 octobre 2010. Quand l’écologie émergea dans le débat public au cours des années 1960 et 1970, elle fut d’emblée fortement politisée. L’économie productiviste, la répartition des richesses, les rapports Nord/Sud, la lutte pour la démocratie, la dénonciation des multinationales faisaient partie intégrante du discours des principaux mouvements. Aux États-Unis, le militantisme de Rachel Carson ou Barry Commoner eut des effets concrets sur la législation américaine, aboutissant à l’interdiction de produits chimiques ou à la création de l’Agence pour la protection de l’environnement (EPA). Les Nations Unies ne purent éviter de lier la question environnementale à la question sociale, et la notion d’écodéveloppement portait des revendications pour protéger la planète, mais également pour mieux répartir les richesses et partager le travail.

Puis vint le tournant de la mondialisation. Le capitalisme se fit néolibéral en se réorganisant à l’échelle planétaire, afin de bénéficier des coûts de production les plus faibles et de mettre en concurrence les salariés des économies industrialisées avec les salariés des pays émergents. Repris en main par les gouvernements, le discours sur l’état de la planète changea profondément de nature. Les chocs pétroliers furent l’occasion de réclamer aux citoyens des gestes responsables pour réduire leurs consommations, moins pour des raisons écologiques que pour limiter les déficits commerciaux. Le basculement dans l’écologie individuelle était amorcé. Après l’énergie, ce fut le tri des déchets afin de permettre le recyclage, avec là aussi des motivations liées au commerce extérieur. Puis, afin de lutter contre le changement climatique, le citoyen fut mis à contribution pour réduire ses gaz à effet de serre.

Le développement durable se substitua à l’écodéveloppement pour gommer toute revendication radicale et pour faire de chaque citoyen le responsable de la dégradation de la planète. Dans cette construction idéologique, le pollueur n’est plus l’industriel qui met sur le marché de futurs déchets, mais l’acheteur qui remplit sa poubelle. Ce n’est plus le fabricant d’un produit bon marché mais polluant, c’est le ménage à faible revenu qui ne prend pas la peine d’acheter “vert”. Ce ne sont plus les multinationales responsables des délocalisations dans les pays où l’on peut polluer gratuitement, mais les salariés obligés de prendre leur voiture pour aller chercher un travail de plus en plus rare et donc de plus en plus éloigné de leur lieu d’habitation.

Bien-sûr, les comportements individuels doivent évoluer vers un plus grand respect de l’environnement. Il n’est pas question de le nier ni de sous-estimer l’évolution positive des mentalités. Mais l’objectif du discours dominant sur l’écologie vise tout autre chose : un véritable transfert des responsabilités.

Yann Arthus-Bertrand est-il naïf lorsqu’il porte l’image d’une écologie totalement dépolitisée, fondée sur le “tous coupables” et qu’il prétend dépasser les clivages gauche-droite avec les financements du groupe Pinault-Printemps-La Redoute ? Peut-être. En tout cas, la démarche est dangereuse. Sa dernière initiative, “10:10”, fait songer à l’école des fans : tout le monde fait un geste et tout le monde gagne, avec une pensée émue pour les générations futures. La lutte contre le productivisme et l’économie capitaliste, pour la répartition des richesses et la relocalisation n’ont pas la moindre place dans son raisonnement.

Pourtant, le bilan écologique du capitalisme néolibéral est sous nos yeux. Entre 1997 et aujourd’hui, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont progressé d’environ 25%. La principale raison n’est pas le développement du marché intérieur des pays émergents, mais bien l’augmentation continue du commerce international, la surconsommation des pays riches et le renforcement des délocalisations. La dictature de la finance empêche quant à elle l’émergence d’activités réellement durables, basées sur des raisonnements de long terme. Et, lorsqu’il s’agit de lutter contre le changement climatique, la communauté internationale décide justement de confier aux fonds d’investissements un juteux marché des “droits à polluer”, qui, de produits dérivés en manoeuvres spéculatives, nous emmène doucement mais sûrement vers un prochain krach boursier.

Loin des discours de Daniel Cohn-Bendit ou de Yann Arthus-Bertrand, l’écologie politique ne trouvera un avenir que dans une rupture franche et concrète avec le capitalisme néolibéral. Nous devons aborder les sujets qui fâchent. La répartition des richesses, avec par exemple un revenu maximum et une fiscalité de justice sociale. Le commerce international et la relocalisation de l’activité industrielle et agricole, avec des taxes écologiques et sociales sur les importations. L’asphyxie des marchés financiers, en commençant par la fermeture de la Bourse des droits à polluer. Autant de mesures qui vont à l’encontre des règles de l’Union européenne, de l’Organisation mondiale du commerce et du Fonds monétaire international, qu’il faut impérativement dénoncer. Nous laissons donc à Yann Arthus-Bertrand et ses financeurs du CAC 40 la grande cause des lumières éteintes et des robinets fermés. Notre objectif se situe à l’opposé. Il s’agit de mettre de l’écologie dans la politique et, surtout, de mettre de la politique dans l’écologie.

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Le Front de gauche acceptera-t-il longtemps des alliances à la carte ?

par Zohra Ramdane

Aux dernières élections régionales, les alliances ont été à la carte : des communistes alliés dès le premier tour avec le PS, des communistes alliés dès le premier tour avec les écologistes et des communistes sur les listes du Front de gauche.

Il semble bien à la lecture des circulaires internes que les trois partis constitutifs du Front de gauche soient prêts à recommencer cette confusion.
On voit bien le soubassement politique de cette décision. Pour les élections locales, chacun fait ce qu’il veut indépendamment de la ligne nationale. Avec, heureusement, une majorité sur la ligne stratégique nationale. Et on espère que pour les élections nationales, tout le monde acceptera la ligne nationale.

En est-on si sûr?

Comment peut-on concevoir une discipline de parti sur des élections nationales si on tolère des alliances à la carte sur des élections locales ? Mais peut-être que certains veulent transformer les partis en réseau sans aucune discipline ? Ou faire de la discipline à la carte ?
Nous avons vu aussi des militants NPA sur les listes Front de gauche et d’autres sur des listes autonomes.
Nous avons vu après les élections régionales, des élus du Parti de gauche refuser de sièger dans le même groupe que le Parti communiste. Probablement une réponse du berger à la bergère !
Tout cela fait désordre et n’engage pas la clarification nécessaire.
Nous avons besoin, pour gagner les votes des couches populaires (ouvriers, employés, majoritaires dans le pays), que les positions de la gauche anti-libérale soient claires tant sur les contenus que sur la stratégie. Sinon, au final, on aura le choix entre l’incohérence du PS et l’incohérence de la gauche anti-libérale.
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Elections au Brésil : le Grand Oubli des grands médias

par Christian Berthier

A en croire les grands organes écrits et visuels de prêt-à-penser médiatique, Dilma Rousseff, la candidate du PT brésilien aurait subi une quasi “défaite” en ne faisant que frôler la majorité absolue à la présidentielle avec 46,9% des votes contre ses adversaires « sociaux-démocrates» 32,6 % et « écologiste » (19,3%).
Mais il y a “pire” encore et c’est peut être pour cela que ces grands médias vous le cachent, ce même Parti des Travailleurs aurait subit une cinglante “défaite” en obtenant 88 sièges en 2010 contre 83 en 2006.
Désormais, la coalition de Gauche a 309 des 513 sièges de l’Assemblée législative fédérale.
Au Sénat, où deux tiers des sièges étaient à pourvoir, le Parti des Travailleurs a remporté 49 sièges sur un total de 81.
Pour l’électeur ordinaire, cela s’appellerait plutôt des « progressions », voire des « victoires » et le PT peut gouverner majoritairement avec ses alliés sans l’aide des écologistes.
A l’inverse, le PSDB, le Parti de José Serra, “social-démocrate” selon les mêmes média a perdu un nombre important de sièges. En effet, alors que l’opposition à Lula détenait 153 sièges en 2006, elle n’en possède aujourd’hui plus que 111.
Notons que la “social-démocratie” de José Serra, comme celle de son mentor F. H. Cardoso a été acquise sur les bancs des meilleures universités américaines et certifiée par leur direction d’un gouvernement « libéral » sans compromis ayant privatisé les grandes entreprises et banques publiques brésiliennes.
En notre France si intelligente, avec cette manière de “voir” médiatiquement les choses, c’est Ségolène Royal qui aurait gagné les dernières présidentielles en France et Sarkozy qui les aurait perdues.
Illusions médiatiques qui, aussi et par exemple, oublient le refus de près des deux tiers des Français de voter pour leurs grands partis depuis plus de deux ans. Une abstention d’autant plus massive qu’elle concerne les communes les plus pauvres. La télé dit aussi : « les moins favorisées ».

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Rébellion policière en Equateur : Complot contre une Assemblée constituante et le parlement élu ?

par Christian Berthier

Il faut s’incliner devant les victimes de la rébellion policière du 30 septembre à Quito, équateur. Nous saluons le courage du Président élu Rafael Correa, qui a défendu la loi votée par le parlement jusque devant les policiers mutinés. Nous saluons le courage des milliers de femmes et d’hommes qui ont affronté la répression policière pour tenter de libérer Rafael Correa.

Par sa gravité et sa préparation, cette rébellion policière n’a pu être jugulée que par les tirs d’une importante intervention militaire d’une demi-heure.
Nous suivons avec attention le parcours de Rafael Correa en Equateur, pays d’Amérique Latine dont les institutions et partis sont proches de ceux que nous connaissons en Europe et plus démocratiques que ceux que nous connaissons en France.

Il faut saluer la force de conviction de Rafael Correa, 47 ans, ministre des finances en 2005-2006 qui a démissionné pour refuser le projet américain de Traité de Libre Commerce (TLC).

Au cours de sa candidature à l’élection présidentielles de décembre 2006, Rafael Correa a porté ce refus du TLC ainsi que l’exigence d’une nouvelle Constitution représentant réellement les intérêts de la majorité des familles populaires équatoriennes.

Au premier tour de cette campagne, il ne fut soutenu que par les représentants des populations indigènes et une partie des organisations syndicales contre une quinzaine de partis se réclamant de programmes voisins de ceux que nous connaissons en Europe.

Néanmoins, il arrive en seconde position et affronte au second tour Alvaro Noboa, le très riche « roi de la banane », pour la troisième fois candidat unique et caricatural de la droite et des intérêts américains.

Les uns après les autres, ses autres concurrents ont du céder à la pression de leurs bases populaires et se désister en faveur de Rafael Correa.

Vainqueur par 57% des voix, Rafael Correa fait élire et réunit une Assemblée constituante qui, après de longs débats entre toutes les tendances représentées, soumet au vote populaire en septembre 2008 un projet de constitution qui détaille les droits les plus concrets des citoyens et peuples de l’Equateur. Il est ensuite réélu au premier tour en 2009, avec 55% des voix.

Il n’est pas sans signification que ce soit après le vote d’un nouveau statut unifié de la fonction publique, que fut déclenchée une rébellion, dont l’apparente spontanéité ne trompe personne.

Il est urgent que chacun médite l’expérience récente des peuples d’Equateur et pour en tirer toutes les leçons constitutionnelles et politiques pouvant s’appliquer à la situation en France.

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Une « construction modérée » dans les colonies, ça n’existe pas

par La Paix Maintenant
www.lapaixmaintenant.org

par Akiva Eldar

Ha’aretz, 10 avril 2010

Traduction ; Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant

Quelques rappels “douloureux” à Benjamin Netanyahou (comme ses fameuses « concessions » ?) , sous forme d’une lettre (ironique et fictive) de Mahmoud Abbas.

Benjamin Netanyahou a tout à fait raison. « Une construction modérée et restreinte en Judée et Samarie dans l’année qui vient n’affectera en aucune sorte la carte de la paix » , a-t-il déclaré.

Car après tout, il ne s’agit que du simple problème humanitaire de quelques milliers de jeunes couples qui veulent avoir un toit. Qu’est-ce qu’ils veulent de nous, que nous ordonnions un gel du taux de natalité au-delà de la ligne Verte ? Que nous interdisions les crèches et les écoles ? Peut-on concevoir que des goys interdisent à des Juifs d’ériger une synagogue dans la cité des Patriarches ? Est-ce pour cela qu’un Etat juif a été créé ? Pour qui se prend-il, cet Hussein Obama ? Pense-t-il pouvoir nous acheter avec ses armes et ses garanties ? Attend-il de Bibi qu’il renonce à « une construction modérée et restreinte en Judée et Samarie dans l’année qui vient, qui n’affectera en aucune sorte la carte de la paix » pendant 60 jours pleins en échange d’un contrôle à long terme sur la sécurité dans la Vallée du Jourdain ? Si j’étais le president Mahmoud Abbas, j’écrirais sur-le-champ à Bibi la lettre suivante :

« Monsieur le Premier ministre, je vous comprends. Quel besoin d’en faire des tonnes pour quelques centaines d’appartements en plus pour des jeunes couples et une poignée de crèches ? Moi aussi, j’ai des enfants et des petits-enfants. Après tout, dans un an, nous serons en train de signer un accord sur la fin des colonies et les frontières définitives. Vous l’avez dit. Alors oublions les violations par Israël de ses engagements officiels (la feuille de route, vous vous souvenez ?) de geler la construction dans les colonies, y compris pour répondre à une croissance naturelle.

Je veux bien, même, ne pas tenir compte des colonies sauvages que vous avez construites sur la terre de paysans pauvres. Soit dit en passant, j’ai retrouvé dans mes archives le fait qu’en janvier 2006, vous aviez promis, dans votre discours d’Hertzliya, que si le gouvernement Sharon décidait d’évacuer les colonies, le Likoud voterait pour. Dans votre discours de Bar-Ilan, vous avez dit que vous comptiez démanteler les colonies sauvages. D’après les chiffres de Shalom Arshav, plusieurs dizaines de caravanes et de maisons préfabriquées, même de bâtiments en dur, s’y sont rajoutées depuis. Sous le nez de l’armée et de l’Administration civile.

Je ne poserai qu’une condition : Au lieu de suspendre la construction pour les Juifs, reprenons la construction pour tous les habitants de Cisjordanie. Y compris en zone C, que, dans notre grande naïveté, nous avons accepté de remettre sous votre contrôle. Cela, en plus du vieux tour que vous avez appris des Ottomans - la qualification de « terres d’Etat , où environ un million de doums des terres ont été confisqués et transformés en terres juives. Vous vous souvenez certainement qu’en 1995, quand nous avons signé les accords d’Oslo, qui plaçaient entre vos mains 60% de la Cisjordanie occupée, on nous avait promis que ce n’était que provisoire.

Vous vous souvenez certainement qu’en 1998, Yasser Arafat et Bill Clinton ont signé avec vous l’accord de Wye qui stipulait que 13% des terres de la zone C devaient passer sous notre contrôle. Mais que, là encore, les colons vous ont fait plier et que cet accord a été jeté aux oubliettes. Au bout du compte, vous n’y aviez rien gagné et perdu le pouvoir. Sans alternative, ils bâtissent sans permis, puis l’administration civile démolit ces bâtiments. Car j’ai du nouveau pour vous : il y a aussi un taux de natalité à Ramallah !

Pendant toutes les années de votre domination, vous n’avez pas construit un seul village dans les territoires. Et maintenant que nous sommes en train de construire notre première ville près de Ramallah, vous avez peur des colons et refusez de laisser passer dans la zone C la route menant à Rawabi.

Mon peuple à Jérusalem Est dit que leurs conditions de vie (en fait, vos conditions de vie, après tout c’est vous qui dites que les mêmes règles s’appliquent à Jérusalem comme à Tel-Aviv) se font dans une telle surpopulation que Jérusalm-Est commence à ressembler à Gaza. Nir Barkat [le maire de Jésusalem, ndt] distribue plus volontiers aux Palestiniens des décrets de démolition que des permis de construire. Le manque de logements à Jérusalem-Est est estimé en dizaines de milliers. Même votre Haute Cour a tancé le ministère de l’éducation pour le manque criant de classes.

Comment avez-vous dit, cher Monsieur ? Tout ce dont nous nous occupons, c’est “d’une construction modérée et restreinte en Judée et Samarie dans l’année qui vient qui n’affectera en aucune sorte la carte de la paix”. Je suis convaincu que vous ne pensiez pas seulement aux enfants juifs. Alors, allons-y ! Construisons pour tout le monde, partout. D’ailleurs, comme vous dites, dans un an, nous serons en train de faire la paix. »

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Il y a 25 ans : L'Accord de Plazza dévalue le dollar américain et déclenche la réévaluation forcée des monnaies concurrentes

par Christian Berthier

Le 22 septembre 1985 réunis à l’Hôtel de Plazza à New York, les gouvernements des cinq plus grandes économies capitalistes du monde, USA, Japon, Allemagne de l’Ouest, France et Grande Bretagne décidèrent de dévaluer le dollar américain. 10 milliards de dollars furent ainsi dépensés pour un effet spectaculaire. En quinze mois, le dollar effaçait toute sa montée par rapport au Deutsche Mark et retrouvait, fin 1986, son plus bas niveau historique de 1979.

La décision avait pour but de réduire le déficit croissant du commerce extérieur américain qui avait atteint 3.5 % du PIB en 1985 et contraignait les USA à s’endetter rapidement. Les USA demandaient à leurs principaux concurrents de faire redémarrer l’économie des USA qui croissait beaucoup plus lentement que les leurs !

La crise des années 80 provenait des taux d’intérêts élevés imposés par la Réserve Fédérale américaine de Paul Volcker. Pour lutter contre l’inflation, réduire les salaires et utilisez le chômage de masse comme une arme contre la classe ouvrière, la Federal Reserve Board avait augmenté les taux d’intérêt réels aux USA jusqu’à une moyenne d’environ 7.5 %entre 1981 et 1985. Cela a provoqué la récession de vastes secteurs industriels, ruiné les agriculteurs, déclenché un afflux massif d’investissements spéculatif et a augmenté la valeur du dollar, rendant les marchandises américaines moins compétitives sur le marché mondial. L’Accord de Plazza avait pour but de renverser partiellement cette tendance.

Les conséquences de la décision furent de grande envergure. Le doublement de la valeur du yen a séparé la production industrielle de l’Asie orientale de celle du Japon et l’a repoussée vers les pays émergeants au profit des groupes financiers US. Elle a créé au Japon une bulle de spéculation financière, boursière et immobilière qui s’est dégonflée en 1989. Mais la réduction de la valeur du dollar n’a pas modifie la tendance au déclin économique et à l’endettement du capitalisme américain. L’industrie n’est pas repartie et la crise de son système bancaire a continué dans l’émission continue de titres de la dette américaine.

D’ailleurs, dès le 22 février 1987, les accords du Louvre tentaient d’arrêter la machine infernale mise en route à Plazza. Les pays du G5 et le Canada signaient à Paris des accords destinés à enrayer la baisse du dollar. Mais après une pause dans le courant de l’année 1987, le dollar continuait sa chute pendant dix ans.

Ceci révélaient les déséquilibres nés des désaccords masqués à Plazza et au Louvre et conduisait à une forte hausse des taux d’intérêt à long terme, puis le 19 octobre 1987 au krach des marchés des obligations et des actions. Reste que le Japon en fut la principale victime et contraint à délocaliser son industrie, baisser le niveau de vie de ses habitants et à effondrer ses taux d’intérêts pour soutenir son marché intérieur.

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Développement et banalisation de l'extrême droite en Europe

par Bernard Teper

Aux élections européennes de juin 2009, l’extrême droite a réalisé un score à deux chiffres dans sept États membres (Pays-Bas, Belgique, Danemark, Hongrie, Autriche, Bulgarie et Italie), et une performance entre 5 et 10 % dans six autres États (Finlande, Roumanie, Grèce, France, Royaume-Uni et Slovaquie). On peut rajouter la dernière percée de l’extrême droite suédoise (5,7 %) en 2010. Après la poussée de l’extrême droite dans quelques pays, dont la France avec le FN dans les années 80, la dernière période est marquée par une généralisation de l’implantation de l’extrême droite en Europe. Cette généralisation s’accompagne d’une banalisation dommageable de l’extrême droite :

  • dans plusieurs pays, elle est au gouvernement ce qui lui permet de s’implanter dans l’appareil d’État. Ce n’est pas encore le cas en France heureusement.
  • dans plusieurs pays, cet état de fait organise une pression sur les droites dont une partie semble réceptive aux sirènes de cette extrême droite. C’est le cas de la France malheureusement.
  • dans plusieurs pays dont la France, des militants de la gauche et de l’extrême gauche font le virage vers l’extrême droite comme dans les années 30 avec les dérives de Doriot, Déat et de leurs séides.

Bien évidemment, tout cela est dû à la crise du capitalisme et à l’incapacité des gauches de fournir une alternative radicale, mais crédible alors qu’elles se sont vautrées dans l’acceptation d’une alternance conduite avec le même paradigme que les politiques néo-libérales. Il va de soi par exemple en France que l’incapacité des gauches y compris certaines qui sont anti-libérales de faire leur autocritique sur la période passée et notamment de la période Jospin risque d’être lourde de conséquences.
Qu’on se le dise, la montée de l’extrême droite n’est que la conséquence de l’inconséquence des gauches dans un état donné de la crise du capitalisme. Pour combattre les extrêmes droites, il faut d’abord les combattre pied à pied sans indulgence, développer des stratégies à front large, mais aussi proposer une alternative radicale aux politiques jusqu’ici employées. Il faut donc changer de paradigme.
Sans ce changement de paradigme, les couches populaires (ouvriers, employés, majoritaires dans le pays) ne s’allieront pas avec les couches moyennes (minoritaires dans ce pays, mais très influentes) et dans ce cas, la situation continuera de développer la tendance notée ci-dessus.
Mais comment construire une alternative sans faire son deuil de la sinistre CMU anti-populaire mais charitable (avec son effet de seuil) pour lui préférer la solidarité et donc l’accès à la prévention et aux soins de qualité partout et pour tous sans effet de seuil ?
Mais comment construire une alternative sans dire que plus jamais la gauche ne devra diminuer le temps de travail en baissant le salaire des ouvriers et des employés comme elle l’a fait sous le gouvernement Jospin lors de la deuxième loi sur les 35 heures alors qu’elle ne l’avait pas faite en 1936 et en 1981 ?
Mais comment construire une alternative sans remettre en cause l’ensemble des politiques menées par les gouvernements de gauche au pouvoir y compris lorsque ces gouvernements avaient comme ministres des dirigeants aujourd’hui à la tête de partis sociaux-libéraux ou anti-libéraux ! Car leurs politiques n’avaient pas rompu alors avec la logique néolibérale sur de nombreux sujets importants ( la protection sociale, les services publics, l’école dans tous ses secteurs, l’Union européenne, la laïcité, la politique, recherche et innovation industrielles, l’économie républicaine de gauche, répartition des richesses, etc.) ?
Mais comment construire une alternative crédible en défendant aujourd’hui sur les retraites, la répartition par le revenu différé avec neutralité actuarielle qui entraîne un écart hommes-femmes abyssal de 38 % alors que le dépassement du capitalisme appelle à lui préférer la répartition par le salaire socialisé lié à la qualification ?
Mais comment construire une alternative sans organiser une éducation populaire de grande ampleur pour tous y compris chez les ouvriers et les employés pour mettre en débat non seulement la nécessaire résistance aux politiques néolibérales, mais aussi la politique alternative nécessaire ? Ce ne sont pas les programmes des partis de gauche et d’extrême gauche réalisés par un petit cénacle dans chacun des partis sans aucun débat démocratique d’ampleur qui sont à la hauteur des enjeux. Les congrès-grands-messes qui font « écho aux applaudissements imbéciles » (alors que Jean Jaurès dans son discours à la jeunesse à Albi disait : « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; c’est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe, et de ne pas faire écho, de notre âme, de notre bouche et de nos mains aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques. ») ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Faudra-t-il vivre sous une autre forme ce que l’humanité a déjà vécu ?
Aujourd’hui, même en France, nous avons cette politique anti-républicaine contre les Roms. Comment est-ce possible ? La réponse est ci-dessus.
Est-il possible de vivre un sursaut des gauches ou sommes nous condamner à revivre le passé si bien décrit par ce texte de Martin Niemöller, pasteur protestant, arrêté en 1937 et envoyé au camp de concentration de Sachsenhausen puis transféré en 1941 au camp de concentration de Dachau, où il écrivit ces lignes :
« Quand ils sont venus chercher les communistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes,
Je n’ai rien dit,
Je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n’ai pas protesté,
Je n’étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher
Et il ne restait personne pour protester.
»

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Les projets syndicaux d’un ancien chef skinhead

par Le blog "Droite(s) Extrême(s)"
Abel Mestre et Caroline Monnot, journalistes au Monde, décryptent les populismes de droite

Source de l'article

Investir le champ syndical. C’est le nouvel objectif de Serge Ayoub. Ancien chef des skinheads d’extrême droite parisiens, M. Ayoub vient de lancer “Troisième voie, pour une avant-garde solidariste”. Le but: conquérir les “travailleurs”.

Déjà, dans les années 1980, M. Ayoub et son groupe politique de skins les Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), appartenaient au mouvement Troisième voie (TV) de Jean-Gilles Malliarakis dont le slogan le plus connu était “Ni trust, ni soviet” (Voir ici l’article très complet de Nicolas Lebourg sur le site Fragments sur les temps présents). Le sigle était le trident, symbole repris sur le site internet que vient de lancer M. Ayoub.

TV s’inscrivait dans la mouvance solidariste qui développait un aspect “social” dans son discours, plus ou moins hérité du fascisme de la République sociale Italienne et du Front noir des frères Strasser. “On n’a pas choisi le nom par goût du vintage. C’est le nom qui s’applique le mieux. Ca n’a pas grand-chose à voir avec le TV de Malliarakis. Mais le terme est toujours valable”, expose M. Ayoub. Depuis la manifestation du 9 mai 2010 (rendez-vous annuel de l’extrême droite radicale), M. Ayoub a aussi redonné vie aux JNR, dont le slogan “Croire, combattre, obéir”, est une reprise du fascisme italien. [Un lecteur nous signale que c’est aussi  un gros clin d’oeil  au groupe de oï Evil Skins qui a utilisé cette devise pour l’un de ses titres phare].

Les JNR le 9 mai/DR

Aujourd’hui, Serge Ayoub décrit Troisième voie comme une alternative au “capitalisme cynique et [au] gauchisme benêt” ou encore comme une solution entre “un monde libéral et un monde marxiste”“On pense que le dernier rempart des acquis sociaux, c’est la Nation”, explique ainsi M. Ayoub. En tout cas, il a vu les choses en  grand: un site internet, un manifeste; une charte; un livre -G5G La guerre de 5e génération (coécrit avec Michel Drac, ancien d’Egalité et réconciliation, et “M. Thibaud”); et surtout Le Local.

“Lobby des travailleurs”

Ce cercle privé associatif a été créé au départ avec Alain Soral pour abriter, notamment, les réunions d’Egalité et réconciliation. Depuis, les deux hommes sont fâchés et Serge Ayoub a gardé ce lieu qui est devenu le point de rendez-vous de toute l’extrême droite radicale parisienne. Des conférences y sont régulièrement tenues, où interviennent des gens aussi variés que Pierre Cassen de Riposte laïque, Jérôme Bourbon de Rivarol, ou encore Gabriele Adinolfi, militant italien nationaliste-révolutionnaire ancien activiste néofasciste dans les années 1970.

L’objectif est de transformer “les syndicats en lobby des travailleurs. Si des gens comme nous rentraient dans les syndicats, on pourrait faire bouger les choses”“Les directions syndicales n’ont plus rien à voir avec la base. Ce sont des syndicats de collaboration, leurs représentants sont adoubés par le système qu’ils combattent. Ça devient des courroies de transmission”, ajoute M. Ayoub. Il utilise une métaphore pour donner sa définition des syndicats: “C’est comme dans la crevette, tout est bon, sauf la tête.”

Mais le but est aussi politique: “Pour changer radicalement les choses, il faut prendre le pouvoir. Le prendre de force pour instituer une démocratie directe . Les élites sont corrompues, déviantes et vicieuses. On va remettre de l’intérêt général et un peu de sain. On le fera par la grève générale”, annonce Serge Ayoub.

La “nation” est le thème central de la démarche, érigée en seul “rempart” contre les inégalités sociales et seul “projet commun” pour les travailleurs. Mais “pas sur une base ethnique ou racialiste. La race n’est pas le problème majeur en Europe ou dans le monde. Mais un problème économique, de rapport de force”, explique l’ancien skinhead. Il pense que “la stratégie électorale ne marche pas. Le FN a des milliers d’électeurs et pas un élu au Parlement”.  Et estime désormais “que le seul contre-pouvoir véritable, c’est le syndicat”.

Ce discours syndicaliste-révolutionnaire sorélien, ici teinté de national-syndicalisme phalangiste, Troisième voie et les JNR veulent le porter dans des structures existantes. M. Ayoub affirme avoir des contacts parmi “les cheminots et à FO pénitentiaire, ou encore à la Poste”. [Dans la deuxième partie des années 80, le Troisième Voie de Jean-Gilles Malliarakis avait déja lancé un Collectif syndical nationaliste, lequel, selon le Dictionnaire de la mouvance droitiste et nationale de Jacques Leclercq, “comptera une importante section chez les cheminots”, avec un bulletin intitulé Train fantôme et dont les membres “militaient en général à FO”.]

“Syndicalisme catégoriel”

“Georges”, un de ses amis, partie prenante de ce projet et qui dit être syndicaliste à la FGAAC ( syndicat autonome de conducteurs de train depuis peu affilié à la CFDT), assure que “quand on discute avec des gens de la base, il y a des ouvertures”. Lui, plaide pour “un syndicalisme catégoriel” et ne “croit pas [contrairement à Serge Ayoub] à la lutte des classes”.

Serge Ayoub mise sur le développement de ce qu’il appelle “les bases autonomes”, pour construire, entre autres, des “grèves durables”. Ces bases autonomes seraient plus ou moins copiées sur les centres sociaux de l’extrême gauche italienne qui ont déjà inspiré les neofascites romains de la Casa Pound.

Le Local serait la “base autonome” de Paris. En province, il y a la Vlaams Huis (dans le Nord) et Lyon Dissident, qui sont devenus “partenaires” du Local depuis août 2010. “On veut adopter la technique de la “peau de panthère” pour que, peu à peu, les tâches deviennent le fond”, indique Serge Ayoub.

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Organisation féminine et organisation féministe

par Hakim Arabdiou

On observe fréquemment l’emploi à tort comme synonymes, des termes féminine et féministe. Ce sont pourtant deux notions différentes, car l’une n’implique pas forcément l’autre, et inversement.

L’épithète «féminine » concerne exclusivement le genre humain, en l’occurrence féminin, composant une organisation, mais aussi une section d’un parti, d’une armée, d’une entreprise, etc. En revanche, l’épithète « féministe » renvoie aux idéaux de modernité, ayant trait à l’égalité totale en droit et en dignité entre les hommes et les femmes.

Aussi, une organisation féminine peut ne pas être féministe, et peut même être antiféministe, comme il existe chez les Evangélistes, les Juifs ultra-orthodoxes, les islamistes… Inversement, une organisation peut parfaitement (du moins dans l’absolu) ne pas être féminine, mais mériter largement le qualificatif de féministe, si ses adhérents consacrent l’essentiel de leurs actions à la lutte pour l’égalité totale entre les sexes.

Il arrive toutefois que des féministes prennent des positions antiféministes, comme on l’a constaté, lors par exemple de la bataille, de 2003-2004, en France ; bataille relative à la défense du caractère laïque de l’Ecole publique, par le refus du port du voile islamiste en son sein. Ces féministes avaient pris fait et cause pour les intégristes musulmans, qui voulaient manipuler l’islam à cette fin, au grand dam de la grande majorité des musulmans, et surtout des musulmanes de France.

Pour autant, ces positions antiféministes font-elles des intéressées des antiféministes ? Non ! Le Nouveau parti anticapitaliste, de tendance trotskiste, mais aux positions pro-islamistes notoires, se trouve dans la même situation. A-t-il cessé d’être de gauche ? Assurément, non !

Il en est de même, mais en sens inverse, de quelques rares associations –féminines- islamistes en France, en Occident et dans quelques pays musulmans. Ces associations avancent un certain nombre de revendications effectivement féministes.

C’est ainsi qu’elles affirment qu’elles partent de leur corpus théologique musulman, afin de déboucher sur une conception universaliste de la défense des droits des femmes. Ceci par le biais d’une relecture non machiste de l’islam. Autrement dit, leur substitution progressive d’une interprétation égalitaire de l’islam entre croyante et croyant, à un islam fait par les hommes (musulmans) et pour les hommes (musulmans).

Pour autant, ces revendications et proclamations font-elles de celles-ci des organisations féministes ? Non ! Car leur discours et surtout leur pratique politiques demeurent, malgré tout, à prédominance antiféministe. D’abord, par leur dénigrement systématique des féministes universalistes, auxquels elles doivent pourtant une partie de leurs droits, ainsi que des valeurs de la modernité, qu’elles assimilent par ignorance à l’Occidenlisme. Elles sont confortées en cela par certaines féministes européennes et Nord américaines, inféodées aux islamistes, quand il s’agit d’islam.

On ne les entend guère non plus prendre la défense des musulmanes opprimées en France et à travers le monde.

Encore récemment, on les a vues s’opposer à une loi interdisant le hidjab intégral, voile qu’elles reconnaissent qu’il n’a rien d’islamique. Ou bien leur silence coupable devant la condamnation à mort par le régime théocratique iranien de Madame Sakineh Mohammadi Ashtiani, par la méthode barbare de la lapidation, conformément à la « chari’a ».

Elles sont en revanche actionnées, comme des marionnettes, par les hommes islamistes, pour faire la promotion ou tenter d’imposer au nom de l’islam des revendications attentatoires à certains droits des musulmanes, tant leurs consciences sont encore aliénées aux intégristes musulmans.

Seront-elles un jour des organisations authentiquement féministes ? Possible ! Si elles parviennent à se délester complètement de leurs autres interprétations machistes de l’islam ; et à s’émanciper de leur chaperonnage politique, idéologique et intellectuel par les partis intégristes, comme ont réussi à le faire la majorité des chrétiennes du mouvement du christianisme social.

Il faudrait pour cela que s’aiguisent davantage les contradictions au sein même de la mouvance islamiste, comme c’est prévisible, grâce entre autres à l’irrésistible ascension des femmes dans toutes les sphères des sociétés musulmanes et d’Occident.

C’est une tendance lourde qui se dessine d’ores et déjà, et à laquelle nous devons, en tant que féministes et progressistes, y prêter attention.

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Lapider pour dissuader ! une justice d’abattoir visant à contrôler le corps des femmes !

par Ana Pak

Pendant longtemps, la lapidation me faisait tellement horreur et ELLE m’effrayait AU POINT que je n’osais m’arrêter pour savoir qui était lapidé, et pourquoi.

De loin je soutenais des actions contre la lapidation, je signais des pétitions, sans vouloir comprendre son mécanisme de près.

Ce fût en 2008 et avec la lapidation d’Esha, une enfant somalienne, que j’ai compris que cette chose était encore plus abominable que je ne pouvais l’imaginer!

Esha m’habitera pour toujours. Pour elle et pour toutes les petites filles qui risquent être lapidées, qu’il faut exiger l’abolition de cet acte.

Alors j’ai commencé à confronter de près la réalité de la lapidation. Au musée du Louvres deux œuvres dont une de Nicolas Poussin inspiré de la Bible, met en scène cette barbarie.

Les deux tableaux montrent une jeune femme à terre et des hommes jetant des pierres sur elle. L’une gît par terre, seule, brisée, accroupie et déshumanisée, les hommes sont debout en meute déchaînées, assaillants.

Qui vise-t-elle, la lapidation ? Et pourquoi ?

Depuis les années 80, le nombre des pays musulmans qui calquent leurs lois sur le modèle de l’Arabie-Saoudite, et s’empressent d’appliquer la charia dans leur code pénal est en augmentation.

Il ne faut pas chercher longtemps pour s’apercevoir que la lapidation concerne à 99% les femmes. Dans ces pays majoritairement misogynes, les hommes s’appuient sur des lois religieuses archaïques afin de contrôler les femmes.

Comme toujours, la première chose que font les intégristes en prenant le pouvoir dans un pays, c’est d’aller chercher une femme pour la punir et la lapider ! dit Ali Erishe.1

Souvenons en 2003, d’Amina, Nigerienne, accusée d’adultère et condamnée à cette mort atroce parce qu’elle avait osé d’avoir un enfant hors du mariage !2
Souvenons en 2004 de Muktar, 18 ans, condamnée par la justice tribale du Pakistan à un viol collectif, uniquement parce que son frère de 12 ans avait été vu en compagnie d’une jeune fille qui appartenait à une caste plus élevée. Dans ce même pays les femmes voulant des relations amoureuses choisies subissent les pires des châtiments !

Souvenons, en 2007 de Doa irakienne, lapidée par des centaines d’hommes, dont ses frères. Elle était étudiante en art et accusée d’être amoureuse.
Puis en 2008, la petite Somalienne, Esha, 13 ans, accusée d’adultère, après avoir subie un triple viol. Elle avait osé porter plainte contre ses violeurs, la justice islamiste l’avait condamnée à mort par lapidation !3
Cette pratique gagne du terrain en Somalie, au Nigeria dans les Etats du Nord, au Soudan, en Afghanistan, au Yémen, aux Emirats Arabes Unis, voire au Kurdistan Irakien dans des populations non-musulmanes où dans la communauté Yézidi, une jeune fille a été lapidée récemment à la demande de son oncle car elle était coupable d’aimer un musulman !

Et aujourd’hui avec Sakineh, les cris de toutes ces femmes et fillettes lapidées arrivent aux oreilles du monde ! Tant que cette barbarie n’arrête pas, les cris des ces femmes doivent sortir de nos gorges et ENVAHIR le sommeil de leur assassins !
La lapidation est la forme ultime de contrôle de la société sur la sexualité féminine et la liberté individuelle! Elle commence à partir du moment où la société voile les femmes ! Et finit lorsqu’elle les massacre par des pierres. En latin, Lapidation signifie massacrer.

Mais combien de temps faudra-t-il pour que ces crimes soient extirpés des codes et des mœurs, non seulement en Iran, mais dans tous les pays où les hommes osent la pratiquer.

Et que pouvons-nous faire d’autre que vomir lorsque plus près de chez nous, et il y a juste quelques jours, le directeur du centre islamique de Genève, le célèbre Hani Ramadan (frère de Tarik), à priori irrité par la mobilisation contre la peine de mort et surtout contre la lapidation de Sakineh déclare : « la condamnation à la lapidation a un but dissuasif…»! Ouf !

Et Tarik Ramadan n’a pas dénoncé cette position de son cher frère.

Le mécanisme ?

La femme ou l’homme adultères, c’est à dire coupables de relations sexuelles hors mariages, ce qui peut même être le cas d’un viol pour les femmes, sont revêtus d’un linceul et enterrés dans un trou rempli de terre, l’homme jusqu’à la taille avec les bras dégagés, la femme jusqu’au-dessus des seins les bras attachés, et ils sont ensuite lapidés !

La femme ne pourra objectivement pas s’échapper, des hommes se sont parfois échappés gagnant ainsi la liberté.

Ensuite ils se précipitent pour jeter des pierres, car ce sont pratiquement toujours des hommes qui jettent des pierres. Pas de trop grosses pierres. Car il ne faut pas tuer trop vite ! Il faut faire durer l’agonie, le supplice !
Les images d’une récente manifestion des Afghanes
Et le supplice dure aussi longtemps que s’entendent les râles de la condamnée à mort. Les hommes retirent alors un linceul rougi qui contient une bouillie humaine faite de sang, de chairs, d’os et de matière cérébrale.
En Iran, depuis les années 2000, des féministes sont à l’origines d’une campagne contre la lapidation . Et récemment en Afghanistan des femmes ont lancé la campagne de «50%»4. Elles organisent des manifestations, recueillent des pétitions, et demandent aux femmes d’écrire des lettre au président Karzaï, pour en finir avec la lapidation, cette pratique et cette idéologie.

On lit sur leur pancarte «la loi oui, la régression non !».

Cet acte barbare, venu depuis le fond de l’obscurité lointaine de l’histoire des hommes, pratiquée en tant que tradition, religion, ou légalisation ne vise que les femmes.

Il faut continuer à croire que les pressions peuvent aboutir à des lois internationales qui punissent les pays ou les individus qui pratiquent cette barbarie patriaco-phallocentrique ! Luttons pour son abolition !

La peine de mort quelque soit sa forme doit être abolie !

  1. néerlandaise d’origine somalienne et obligée de quitté l’Europe pour les USA, car l’on ne peut assurer sa sécurité ! []
  2. l’Association Femmes Solidaires avait mené une importante action de soutien à cette époque. []
  3. Les cinquante hommes qui l’ont lapidée, l’avaient déterrée trois fois pour s’assurer s’ils avaient enfin réussi à l’assassiner. []
  4. Pour dire 50% des votants sont des femmes ! []
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Etat bigot et confessionnel

par Tarik Mira
Député algérien, non inscrit

L’acquittement des deux non jeûneurs de Ain El Hammam, le 05 octobre dernier, est à la fois un soulagement et en même temps une interrogation.Soulagement parce que le droit et la raison l’ont emporté. Interrogation car, en réalité, ce procès n’aurait jamais du avoir lieu.  Sa tenue est une prime à la crispation identitaire et à la provocation. C’est dire la régression que l’on a subi depuis l’indépendance à ce jour et les écarts que l’on a pris avec les principes et fondements du Mouvement national dans l’ensemble de ses composantes, y compris avec les Ulémas de l’époque. C’est dire également à quoi mène la concurrence – biaisée par nature – entre  l’Etat et les intégristes sur un terrain balisé par ceux là, et ce dans toute l’aire musulmane. De glissement en dérapage, on quitte la patrie spirituelle pour entrer dans l’Etat confessionnel qui revêt les habits de la bigoterie et de l’intolérance, les deux piliers qui mènent tout droit à l’inquisition. La poursuite judiciaire des non jeûneurs – incroyants ou chrétiens – relève de ce phénomène où l’Etat brandit la coercition, là où il n’y a que liberté de conscience. Ce faisant, l’Etat séculier perd ses oripeaux un à un, au grand soulagement des intégristes qui voient leur travail s’accomplir par procuration. Nos dirigeants doivent se rappeler que l’inquisition est née au Moyen âge, en Espagne, par l’obligation faite aux  musulmans et aux juifs de se convertir. Puis ne croyant pas en leur apostasie car « dissimulateurs ayant fait semblant d’avoir adopté la vraie foi», les Rois catholiques et leurs descendants décidèrent de « purifier les cœurs et les âmes » de ces damnés par la violence. Voilà la préfiguration des purifications  ethnique, religieuse et idéologique du XXème siècle et du début de l’ère actuelle. La décennie noire est un avatar de cette configuration où la terreur a fait office de justice. L’avenir est parsemé d’embûches aux conséquences redoutables si les digues de la liberté ne sont pas mises en place face aux douaniers de la pensée.

LE DROIT DE LA FORCE ?

Devant la montée de l’uniformisation religieuse,  il faut se battre pour des choses simples mais essentielles : les libertés démocratiques. La liberté de croire, de s’exprimer, entre autres, sont constitutives de la dignité de la personne humaine. Le pacte civil et des droits de l’homme de 1966, ratifié par  l’Algérie en 1989, est cet égard suffisant pour cet ensemble des droits et libertés, notamment celui de l’exercice du culte. La constitution, qui vient en seconde position dans la hiérarchie des normes juridiques, confirme cet engagement. Dés lors, pourquoi a-t-on peur des convertis au christianisme ? L’islam n’est il pas la religion de la tolérance ? Comment peut-on s’indigner chaque fois des difficultés des musulmans à exercer leur culte dans des espaces décents en Occident et ne pas le faire pour les chrétiens en Algérie?

C’est pour « exercice illégal du culte » que les quatre prévenus de Larbaa Nath Irathen seront déférés devant le tribunal, le 10 octobre 2010. Sans rentrer dans les arcanes de la justice, il y a comme une contradiction entre la difficulté d’obtenir des endroits publics pour exercer son culte et l’arrestation des fidèles dés lors que ceux-ci dégagent un espace privé pour ce but ? Quel crime y a-t-il à cela ? Combien y –t-il de mussalat dans des lieux publics et privés de rite musulman sans autorisation ? Que dit à ce sujet l’ordonnance régissant la pratique cultuelle ? Deux poids et  deux mesures ?

La République à laquelle nous croyons, issue des limbes du Mouvement national, est fondée sur l’exercice des droits et libertés.  L’égalité des droits est l’alpha et l’oméga de cette citoyenneté républicaine. Peut-on rappeler que des Chrétiens – Français et Algériens – se sont engagés pour l’indépendance de l’Algérie parce que précisément la justice est indivisible. Les textes et les paroles de Jean Amrouche notamment ont été des balles assassines  contre le colonialisme afin qu’advienne l’Algérie, libre et indépendante.

CROYANT OU CITOYEN

A l’instar des pays musulmans, l’Algérie est confrontée au salafisme – intolérant, uniformisateur et dominateur – qui semble s’infiltrer dans les interstices de l’Etat pour en modifier la substance idéologique. Atteint par un déficit de légitimité à cause du mariage raté entre la République et la Démocratie, le pouvoir cède d’autant plus facilement aux revendications salafistes que celles-ci permettent le contrôle social sur les masses. La citoyenneté cède le pas, trahie.

Le combat entre le citoyen et le croyant est relancé de façon inattendue par ces multiples affaires de Aïn El Hammam, Larbaa Nath Irathen et Ighzer Amokrane.  Auparavant, c’était Tiaret.

La citoyenneté, qui se base sur la non discrimination, doit l’emporter car elle inclut la croyance. Le contraire n’est pas toujours vrai. Ce postulat doit se manifester, aujourd’hui, à Larbaa, comme demain à Akbou, afin que le vivre ensemble se passe dans l’harmonie et le respect des uns envers les autres. Auparavant, la parole doit se libérer de l’auto censure face « des sujets délicats et sensibles » qui, si on les attaque pas de front, vont demain constituer la norme culturelle, sociale et politique.

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L'islam et la laïcité : entre malentendu lexicologique et refus de voir plaquer un concept ressenti comme étranger (3e partie)

par Dominique Gaurier

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Lire la 1ère partie et la 2e

3 - Incompatibilité ou compatibilité de la laïcité à l’Islam ? Un débat mal parti et donc mal engagé

Si le départ a été en partie raté, la poursuite de la quête d’une laïcité en terre d’Islam est-elle pour autant définitivement perdue et pour longtemps ? Difficile à dire, d’autant que nous ne lisons pas dans le marc de café et que l’on aurait mauvaise grâce à nous poser comme un prophète averti ; ceux-ci ne se trompent-ils généralement pas, qui nous annoncent de bons ou de mauvais futurs de façon savante et prétendument éclairée. On se bornera donc à proposer quelques petites observations à partir desquelles l’auditeur restera libre de choisir et de se prononcer lui-même sur la chose.

Contrairement à ce qu’ont pu longtemps ressasser les orientalistes occidentaux qui, malgré leur très bonne connaissance de la pensée musulmane, n’ont pu totalement s’empêcher de la formuler d’après leurs propres concepts, cette pensée musulmane a, semble-t-il, 25 ans après la mort du Prophète, lors de la grande fitna (10) ou séparation entre courants religieux, n’a jamais formulé l’idée que la khalifa, ou l’imâmat, serait une obligation de religion, sans doute celui-ci est-il pour les sunnites une obligation « de tradition » ; pour les shiites, la question semble partager les clercs, certains la posant comme un pilier de la religion, d’autres en faisant simplement une obligation « de raison », mais en tout cas pas de religion.

Ce qui oblige à constater que la question politique autour du khalifa, ou juridique, autour de la shariâ, n’ont jamais fait partie que de ce que l’on nomme en droit musulman les furû, ou « branches, institutions, droit appliqué, dépendances » et non des uçûl, ou « principiologie, questions fondamentales ». la question politique, clairement, ne fait donc pas partie des piliers de l’Islam, et cela même chez l’un des inspirateurs de la tendance extrémiste contemporaine, Ibn Taimiyya (1263-1328). Ibn Khaldun (1332-1406) dans ses Muqaddima, ou Prolégomènes, le dit lui-même : « La doctrine sur laquelle les chiites sont d’accord est que l’imamat n’est pas une simple question d’intérêt général qui doit être du ressort de la communauté musulmane, laquelle en investit une personne de son choix. Il est pour eux le pilier de la religion et le fondement de l’Islam » (11).

En d’autres termes, l’imamat est du seul ressort de l’intérêt général et se situe donc bien au niveau des furû, dès lors que l’intérêt général, ou maçlâha, est l’une des sources productives de normes juridiques au sein de certaines écoles de l’Islam sunnite. Si l’on veut maintenant retenir Ibn Taimiyya, sa véritable doctrine ne se dégage que dans les cadres habituels de la scolastique sunnite. Cette dernière posait alors la question de savoir si l’investiture d’un imam, ou d’un khalif, à la tête de la communauté était une obligation de religion. La doctrine sunnite conclut que l’imamat était bien obligatoire, mais la nature de cette obligation fut diversement comprise en fonction des différentes écoles. Al Ghazali ne réussit jamais, malgré ses efforts en ce sens, à trouver à cette obligation formulée dans le Coran, ou dans la Sunna, ou tradition du Prophète. Il se borna finalement à affirmer que la religion était intimement liée au temporel et que, pour pouvoir librement, elle exigeait l’ordre et la paix sociale.

Par ailleurs, ce grand auteur, qui n’est pourtant pas l’un des plus libéraux, dit dans l’un de ses ouvrages, les Fadha Acih al-bâtiniyya, ou Révélations de ce qui est caché, que « les questions de droit sont de l’ordre du positif et du conventionnel. Elles diffèrent selon les situations des Prophètes et selon les époques et les communautés » (12). Il s’attaque donc à l’importance excessive que les shiites donnent à cette question qui ne fait ni partie des questions importantes de la scolastique, ni de celles qui relèvent de la raison ; aussi, plutôt que de susciter de fanatiques querelles, vaut-il mieux s’abstenir d’en parler. C’est ainsi dans le cadre de ce débat purement scolastique que s’inscrit Ibn Taimiyya, membre de l’école hanbalite, qui est la plus rigoriste de l’Islam sunnite. Il va considérer que l’imamat du Prophète était divinement inspiré, donc du domaine de la perfection idéale.

L’imamat des quatre khalifes de Médine qui prirent sa suite n’a, quant à lui, qu’une perfection relative et conditionnelle ; il se justifie comme une obligation par le fait que le Prophète aurait ordonné de suivre ces quatre successeurs, d’autant qu’ils passaient pour avoir été les meilleurs des musulmans et que l’excellence de leur politique vient confirmer leur précellence. Ils présidèrent sur un Etat musulman unitaire. Mais l’évolution politique de la communauté unitaire de départ a fait prévaloir la multiplicité et ainsi, à ces khalifes canoniques succédèrent des rois temporels, mulouk. Dès lors, le khalifa unitaire ne présente plus aucun caractère d’obligation, d’autant plus que le Livre Saint lui-même n’a nullement décidé de la forme du gouvernement musulman et n’a en tout cas, pas tranché la question de la succession du Prophète. Le nombre des imams n’est donc pas limité dans l’Islam sunnite, au contraire de l’Islam shiite.

Décréter que le khalifa est une nécessité canonique reviendrait à placer les croyants devant une double alternative : leur imposer une tâche impossible en exigeant un unique chef pour une communauté qui a perdu toute cohésion, ou admettre la légitimité d’une institution devenue une pure fiction et introduire ainsi dans la vie sociale et politique un formalisme et une contrainte qu’Ibn Taimiyya chercha toujours à briser dans sa théorie des contrats (13). Ce qui veut dire que nulle part, si ce n’est chez les shiites et chez les plus extrémistes, jamais cette tradition n’a été vraiment contestée et surtout révisée. De la même façon, jamais en matière de sharf a, les divergences n’ont été vues entre les divers courants comme rédhibitoires : la pensée musulmane les a même d’une certaine manière magnifiées en les rattachant à un hadith du Prophète qui aurait affirmé que la divergence était une bénédiction de Dieu (14).

Tant la question du politique (siyasa) que du droit (fiqh) ne font partie que des questions subsidiaires et conformément à cela, peuvent faire l’objet de controverses et de divergences. Plusieurs hadith font même dire au Prophète : « Je ne suis qu’un homme, si je vous ordonne quelque chose de votre religion, suivez-le. Si je vous ordonne quelque chose relevant de l’opinion, je ne suis qu’un homme », et aussi « pour ce qui est des affaires de votre religion, cela me revient, pour ce qui est des affaires de votre monde ici-bas, vous êtes mieux à même de le savoir ». On voit donc ici être nettement formulée par le Prophète lui-même une distinction sans équivoque de la religion et du monde et ne peut-on se demander alors si nos orientalistes ne se sont pas laissés gouverner par les idées que les religieux musulmans entendaient leur faire soutenir en prônant une non séparation de principe du spirituel et du temporel, qui serait quasi constitutive de l’Islam ? Ils auraient été ainsi aisément gagnés aux thèses extrémistes, sans en avoir conscience, ou avec des buts parfois plus inavoués, comme on peut parfois le relever chez un chercheur américain pourtant fort sérieux, mais ferme partisan de l’Etat d’Israël, Bernard Lewis.

En somme, faut-il que les peuples musulmans souffrent de l’inquisition religieuse que nos pays ont connue durant de longs siècles depuis la fin de l’Antiquité sous la férule du christianisme d’Etat (Edit de Thessalonique de 380 ap. l-C.), qui dura en France jusqu’à la séparation de 1905, avant d’accéder à cette liberté de pénsée ? L’un des premiers auteurs à vouloir abattre les mythes forgés sur cette « unicité » du spirituel et du temporel dans le monde musulman est tout à fait intéressant ; il s’agit de Aalî Aabdarrâziq qui, lui-même théologien et enseignant dans la grande faculté religieuse Al Azhar du Caire, dont on peut penser qu’il connaissait bien ses sources, publia en 1925 un petit ouvrage, qui devait se révéler comme un véritable brûlot sous le titre AI Islâm wa uçûl al-hukm, ou L’Islam et les fondements du pouvoir. Il prit de parti de retracer l’histoire de l’institution califale en mettant à plat toutes les occultations dont elle avait fait l’objet et les mystifications qui l’avaient entourée dans l’imaginaire musulman.

Cet ouvrage a été récemment republié en langue française (15). L’auteur s’est attaché à montrer que le pouvoir temporel du Prophète sur la communauté multiconfessionnelle de Médine n’avait pas de rapport avec son rôle comme Prophète. Quand ce dernier mourut en 632, sa succession ne concerna jamais que les seules fonctions temporelles et il posa quelques observations qui fâchèrent l’institution à laquelle il était rattaché, qui le condamna pour « hérésie blasphématoire », lui fit perdre son poste et fit brûler son ouvrage. Examinons quelques-unes de ses conclusions. Sur l’institution califale elle-même : « On voit donc que ce titre de « calife » (successeur et vicaire du Prophète) ainsi que les circonstances qui ont accompagné son usage (…) ont été parmi les causes de l’erreur qui s’est propagée dans la masse des musulmans, les conduisant à prendre le califat pour une fonction religieuse et à accorder à celui qui prend le pouvoir parmi les musulmans le rang occupé par le Prophète lui-même ».

De fait, le verbe arabe khalafa, duquel provient le nom khalifa, embrasse un champ sémantique assez large qui va de « prendre la place, remplacer » à « succéder, hériter ». Ce dernier terme est utilisé au singulier dans le Coran seulement deux fois, dans la sourate II, 30 et XXXVIII, 26 et a toujours été traduit de façon systématique en conformité avec le sens que lui avaient déjà attribué les grands commentateurs du Coran par « vicaire », « lieutenant » (16). Or, il semble bien que le verbe lui-même renvoie très directement à une succession temporelle et que, par conséquent l’être humain n’est pas un « lieutenant » de Dieu, mais son successeur, son remplaçant.

Laïcité musulmane

Mais la muraille théologique reste campée sur ses fondements. Tout cela remet bien en perspective la responsabilité propre et l’autonomie des gouvernements. L’auteur continue en concluant sur le rôle tenu par le pouvoir politique dans l’avènement de cette institution : « Il était de l’intérêt des rois de diffuser pareille illusion dans le peuple en vue d’utiliser la religion comme moyen de défense de leurs trônes et de répression de leurs opposants. Ils ont œuvré sans répit dans ce sens par de multiples voies (…) jusqu’à inculquer la croyance que l’obéissance aux dirigeants équivaut à l’obéissance à Dieu … que l’on se rappelle ici le propos tenu par Habib Bourguiba en 1975 -, et la révolte contre eux à la rébellion contre Dieu (…). Le système du califat a été par la suite annexé aux études religieuses, placé ainsi au même rang que les articles de la foi (…) Tel est le crime des rois et le résultat de leur domination despotique (…).

Au nom de la religion, ils se sont appropriés les musulmans, les ont avilis et leur ont interdit de réfléchir sur les questions relevant de la politique (…) ». La confusion entre spirituel et temporel tient donc seulement aux gouvernants eux-mêmes, non à l’Islam comme tel : « En vérité, cette institution que les musulmans ont convenu d’appeler califat est entièrement étrangère à leur religion, tout comme les honneurs, la puissance, les attraits et l’intimidation dont elle a été entourée. Le califat ne compte point parmi les actions prônées par la religion, pas plus que la judicature ou n’importe quelle fonction gouvernementale ou étatique. Ce ne sont là que des actes purement politiques, pour lesquels la religion n’a aucun intérêt, qu’elle ne cherche ni à connaître ni à ignorer, et ne peut ni recommander ni rejeter.

La religion les a abandonnés aux hommes pour qu’ils agissent en la matière conformément aux lois de la raison, à l’expérience des nations et aux règles de la politique. Il en est de même de l’administration des armées islamiques, de la construction des villes et des fortifications, de l’organisation des administrations, lesquelles ne constituent en rien des questions qui intéressent la religion. Elles relèvent plutôt de la raison et de l’expérience, des règles de la guerre, ou bien de l’art de la construction et des avis des experts. Aucun principe religieux n’interdit aux musulmans de concurrencer les autres nations dans toutes les sciences sociales et politiques. Rien ne leur interdit de détruire ce système désuet qui les a avilis et les a endormis sous sa poigne. Rien ne les empêche d’édifier leur Etat et leur système de gouvernement sur la base des dernières créations de la raison humaine et sur la base des systèmes dont la solidité a été prouvée, ceux que [’expérience des nations a désignés comme étant parmi les meilleurs » (17).

Face à une telle remise en cause de la « bonne pensée », cultivée par des tyrans qui se réclament trop souvent de la religion pour se trouver une forme de légitimité, seuls les procédés traditionnels ont été utilisés : l’anathème, l’injure, les pressions sur le pouvoir pour obtenir des sanctions contre l’ hérétique, mais en tout cas, aucune proposition d’analyse des arguments présentés, dès lors qu’ils n’étaient pas même examinés, puisque d’emblée vus comme hérétiques, et partant blâmables. Il est assez curieux de voir qu’aujourd’hui, ceux qui restent malgré tout des « modernistes », prennent de multiples précautions pour éviter les foudres des salafistes, grossièrement, les tenants de la tradition des pères, dont certains hérauts sont même des cocottes de la presse occidentale, comme Tariq Ramadan, qui n’est que la face « correcte » de son frère, moins montrable en quelque sorte, et qui véhicule les idées les plus conservatrices.

Nos pouvoirs politiques se font ainsi les meilleurs relais de ces tendances, eux-mêmes sans doute également interpellés sur leur propre légitimité. Il reste aujourd’hui aux intellectuels musulmans à se ressaisir hardiment de la pensée de leurs ancêtres et à reconsidérer les données de leurs propres cultures, voire les images longtemps portées, pour faire naître une laïcité musulmane, compatible avec les données de la religion, mais une religion cultivée et dégagée des pesanteurs de ceux qui n’entendent pas laisser couper la branche sur laquelle, à l’ombre des pouvoirs des dictateurs, ils sommeillent béatement, comme l’ont fait les clercs absolument partout. Pour conclure, ne peut-on dire que ce ne sont pas seulement les pays d’Islam qui sont traversés de tendances au repli sur soi-même si c’est pour dire une banalité. Remarquons que nos cultures, qui se présentent comme un phare pour le monde, ne sont pas à l’abri de ces mêmes reculs.

La proposition de laïcité positive, telle que notre président l’avait faite valoir après avoir reçu son chapeau de chanoine du Latran auprès du pape, et tente encore de la faire valoir au gré des sondages, vise à remettre le religieux dans l’espace public en France, principalement le religieux catholique, un peu comme aux USA, dont on sait que notre président a fait son modèle, sans toujours en reprendre malheureusement le meilleur. Les énormités et les vulgarités que beaucoup, pas seulement l’ homme de la rue, mais aussi des hommes et des femmes de gouvernement, ont pu lâcher au cours du débat sur l’identité nationale, se sont focalisées sur un Islam phobique et duquel on a aussi la phobie, oubliant que les mêmes idées sont partagées par de nombreux groupes juifs, catholiques, évangéliques, que l’on peut tous qualifier d’intégristes.

Mais de là à dire que tous les tenants de ces confessions, Islam compris, sont complices de telles dérives, c’est aller beaucoup trop loin : la grande majorité des musulmans français, tout comme leurs concitoyens juifs, protestants, ou catholiques, n’aspirent qu’à une chose, c’est que des lieux décents de culte leur soient proposés et que la liberté de conscience, garantie par la Constitution leur soit aussi garantie ; tous ne sont pas partisans d’un retour fantasmé à la shari a et se satisfont fort bien de la laïcité à la française. Si donc il y a une inquiétude, c’est sans doute là qu’elle se trouve. Il suffit de regarder que les pays européens se laissent gagner par la sottise la plus crasse soutenue par l’Intelligent Design, remettant en cause des acquis scientifiques pourtant solides et les réfutant au nom d’une idéologie devenue englobante et totalitaire.

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Le Grand Orient de France : une association initiatique

par Carolus Structor
(pseudonyme d’un membre du GODF)

Le numéro 641 de Respublica évoque l’initiation des femmes au GODF. Lecteur de votre publication, ayant personnellement joué quelque rôle dans cette évolution –strictement interne-, je souhaiterais apporter un éclairage complémentaire.

Tout d’abord, il n’y a pas eu « d’accouchement de la mixité au forceps». Comme l’indique d’ailleurs plus justement un intertitre suivant, celle-ci « reste à la discrétion des Loges », et le GODF n’est pas devenu une Obédience mixte. Le Convent, à la suite de l’interprétation souveraine de la Justice interne du GODF, a simplement confirmé que les conditions statutaires d’admission à l’association « n’impliquent aucune considération de sexe ».

Mais il ne saurait découler de cette évolution la moindre obligation pour une Loge d’admettre une femme « au motif de son sexe » ! L’admission se fait par cooptation, à une majorité très stricte (plus de 75% des suffrages), et dans le secret du vote. Il en va de même pour les hommes : telle candidature écartée par une Loge, peut être acceptée dans une autre.

Que l’on puisse y voir un progrès « sociétal », opinion éminemment respectable que je partage à titre personnel, risque de faire perdre de vue que le GODF n’est pas une association comme les autres. Sa « Constitution » dispose en effet que son « caractère propre » (pour parler en juriste) est « l’initiation », et que celle-ci ressortit « exclusivement » à la souveraineté de chaque Loge. La Loge n’est donc pas une image en réduction de la société « profane » (comme disent les Francs Maçons), mais un lieu collectif où se construit un « itinéraire initiatique » d’ordre éminemment intime, où « l’amélioration de soi-même » est liée à celle de « l’humanité ». (Il est permis d’en sourire, mais comme de tout choix de conscience, que nul n’est tenu de partager !)
La définition de cet itinéraire par chaque Loge, et son vécu par chaque « Frère »…ou « Sœur », dans le cadre librement admis des objectifs de l’association, est donc forcément diverse. Ainsi, contrairement à une opinion répandue, une Loge du GODF peut parfaitement « travailler à la gloire du Grand Architecte de l’Univers », ou (pour la plupart), s’en tenir à une « neutralité spirituelle ». (Acceptons encore les sourires de certains amis lecteurs).

Il est donc parfaitement compréhensible qu’après quelques siècles de « masculinité » imposée (au forceps, pour le coup !) beaucoup de Loges du GODF se trouvent un peu dépourvues à l’idée de coopter des femmes, et que certains Frères ne se sentent pas prêts à travailler sur eux-mêmes en présence de Sœurs. On ne saurait leur jeter la pierre : l’exemple du mouvement sportif montre que l’égalité des femmes n’y a été admise que très récemment, et les équipes et compétitions sont, dans la plupart des ports, « unisexes ».

Enfin, rendons à César… Les premières initiations modernes de femmes au GODF (mai et juin 2008) ne sont pas seulement le fait de 5 Loges, mais du Grand Maître et de l’exécutif de l’époque, qui, sans pour autant approuver la démarche, se sont mis en règle avec les statuts de l’Obédience –ce qui n’avait jamais été fait. Ces initiations, et les deux années de « parcours maçonnique » consécutives, ont été régularisées « à part entière » par l’exécutif sortant du GODF en juillet 2010, suite à la décision favorable de la « justice maçonnique ».
Il serait donc par trop réducteur de ramener cette « révolution de velours » à un combat entre « la base » et « le sommet », ou entre les « conservateurs » et les « progressistes ». Les choses sont plus complexes dans les organismes à caractère initiatique, ou spirituel : on attend toujours l’ordination des femmes par l’église catholique…