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Chronique d'Evariste
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  • République sociale

Objectif République sociale !

par Évariste

 

Le capitalisme détruit nos vies, nos relations humaines. Il nous impose d’abord de vivre sous un rapport d’exploitation par autrui, Le tout agrémenté de dominations de toutes sortes, quand elles ne vont pas jusqu’à l’expropriation dans certains cas. Le capitalisme nous pousse à la concurrence guerrière de tous contre tous. Nous passons d’une crise à l’autre quand ce n’est pas un bouquet de crises multidimensionnel. On pressent que nous risquons d’entrer dans une crise systémique voire paroxystique. Actuellement crise humaine, sanitaire, sociale, écologique, démocratique et laïque. Et si la crise sanitaire était due à la destruction de notre écosystème par le capitalisme ? Capitalocène plutôt qu’anthropocène ! Les capitalistes ont gagné un tel pouvoir en France depuis 1983 qu’ils iront jusqu’au bout dans la dévastation et l’exploitation.

Voilà pourquoi les solutions de type social-démocrate ou paritariste deviennent obsolètes, ce que le peuple comprend de plus en plus. Vivement que les responsables de la gauche politique et syndicale le comprennent également ! Certains voient poindre chez les capitalistes et leurs alliés des velléités humanistes, ce ne sont que des « croyants » politiques car les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Tout le reste n’est que manipulation médiatique. La séquence dite des Trente glorieuses n’était qu’une parenthèse sans lendemain car les fondamentaux du capitalisme ont repris le chemin de la lutte des classes au profit du capital ; de plus, la praxis (lien dialectique entre théorie et pratique) dominante de la gauche ne fut pas à la hauteur des enjeux quand il fut clair que le capitalisme ne tiendrait aucun compte du vote populaire du 29 mai 2005 par la forfaiture de 2008 et que les grandes organisations politiques et syndicales de gauche ne luttaient plus contre cette forfaiture.

La lueur de 2017 fut de courte durée. La lutte des classes fut abandonnée par les organisations politiques et syndicales de la gauche. Pire, les organisations politiques et syndicales abandonnèrent la classe populaire ouvrière et employée alors que celle-ci représentait 53 % de la population française (actifs et retraités). (1) Pour rire un peu, voilà comment un ancien secrétaire général du PCF, Robert Hue, fut en 2019 congratulé pour sa trahison par le président Macron, lors de la remise la Légion d’honneur (https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2019/11/18/remise-collective-de-legions-dhonneur) : «  La politique française ne fabrique peut-être plus assez de grands destins républicains comme le vôtre… Quand, je dois bien le dire, à la surprise de tous et surtout à la vôtre, Georges Marchais fait de vous son successeur à la tête du Parti communiste en 1994, vous entamez avec courage une mutation du parti… Candidat aux élections présidentielles de 1995 et de 2002, vous vous lancez à la conquête des Français en leur proposant un Parti communiste qui change et qui progresse… De là est venue précisément votre volonté de sortir progressivement d’un système qui ne voulait pas se réformer pour fonder, en 2009, votre propre mouvement : le Mouvement unitaire progressiste. De là est venue votre force d’agir par-delà les clivages politiques, de faire front, à mes côtés, pendant la campagne présidentielle de 2017… Nous manquons de dirigeants comme vous. » Plus pathétique que cela, tu meurs ! D’où l’abstention massive de cette dernière (au moins 60 % de la classe ne participe plus aux élections). Disons-le haut et fort, sans le soutien de la grande majorité de cette classe, aucune révolution citoyenne n’est possible ! Surtout si on abandonne la référence à la conscience de classe pour la remplacer par une conscience terrienne et citoyenne ou si on refuse de combattre le néolibéralisme et l’ordolibéralisme lors d’alliances contre nature ou si on ne négocie que pour accepter un recul moins important !

D’où le mouvement des gilets jaunes massivement alimentés par cette classe et par les nouveaux prolétaires issus des couches moyennes déclassées. Le mépris de classe de la majorité des couches moyennes à leur égard fut pathétique, y compris dans ses formes organisées.

Car ils ne suffisait pas de dire que l’on comprenait ce mouvement, mais de travailler à la convergence avec les organisations syndicales et politiques via des pratiques d’éducation populaire refondée comme moyen de pratiquer la convergence. Elle ne fut pas possible. Et donc la parenthèse se referma.

Que faire aujourd’hui ?

D’abord l’analyse du réel en ne faisant pas du copié-collé avec la ligne stratégique perdante de la gauche qui permet à des associés-rivaux de se partager près de 70 % des votants aux élections (l’extrême centre macroniste, la droite installée et l’extrême droite)(2) Nous devons continuer à critiquer les associés-rivaux, d’une part, et la gauche identitaire, d’autre part, car elle crée un écosystème défavorable à la lutte contre l’oligarchie capitaliste.. Etre majoritaire dans les urnes en laissant se développer le mépris de classe envers la classe ouvrière et employée majoritaire dans le peuple est politiquement et arithmétiquement impossible.

Puis, il faudra oser les principes constitutifs de la République sociale sans les travestir comme le fait la gauche identitaire et la gauche néolibérale (toutes deux diviseuses de la gauche et abandonnant le primat de la lutte des classes dans le dispositif global de lutte contre toutes les discriminations) : liberté, égalité, fraternité, laïcité, démocratie, solidarité, sûreté, universalité concrète et non abstraite, souveraineté populaire et développement écologique et social.

Mais pour cela, il faut assumer de façon concomitante les quatre ruptures : démocratique, laïque, sociale et écologique. Et enfin engager la stratégie de l’évolution révolutionnaire (Marx 1850). Et en comprendre les conséquences, à savoir : l’exigence de dégager du marché capitaliste la sphère de constitution des libertés (école, sécurité sociale et services publics) et travailler à son extension, l’indispensable refondation européenne contre l’actuelle Union européenne, véritable carcan contre l’émancipation humaine, la centralité d’une réindustrialisation massive sous transition écologique et énergétique, l’exigence d’une refondation des droits de la nationalité et de l’immigration en reprenant ce qu’il y a eu de meilleur dans l’histoire de France en matière d’humanisme émancipateur, celle d’une véritable égalité femmes-hommes qui soit sociale et pas seulement sociétale, et la libération du travail de la subordination salariale.

Pour cette dernière exigence fondamentale, cela veut dire rompre avec le tabou de la propriété, engager un processus de socialisation des entreprises, finir le travail entamé à la Libération pour que la Sécu puisse assurer pour toutes et tous une protection égalitaire de la naissance à la mort. Et enfin engager la transition du salariat vers les travailleurs associés, liés par une démocratie pleine et entière sans subordination à un employeur, en développant l’actuel système des intermittents du spectacle à commençer par les métiers où la révolution numérique a rendu la conception prédominante dans la chaîne des valeurs du processus de travail. Mais sûrement pas en supprimant le lien entre le travail et la rémunération ou en ne tenant pas compte des lois monétaires et de l’anthropologie humaine. Méconnaître cela a le même résultat que méconnaître les lois de la gravitation universelle.

Dit autrement, rien ne sera possible sans écarter l’ensemble des pensées magiques qui veulent résoudre les problèmes sans changer le réel et principalement les rapports sociaux de production et d’échange. Les pensées magiques ne travaillent que pour l’oligarchie comme le montre le livre de Milton Friedman Capitalisme et liberté écrit en 1962, avec l’exemple d’une pensée magique comme le revenu universel inconditionnel de base. Mais il y en a plein d’autres…

Mais ce projet doit faire l’objet d’un débat consciencieux, argumenté et respectueux des débatteurs. Tout le contraire de ce que la gauche identitaire produit (remplacement du débat argumenté par des injures, censures, attaques en meute sur les réseaux sociaux, intimidation des organisations politiques et syndicales de gauche, etc. par exemple contre des chercheurs comme Beaud, Noiriel, Pierru, etc.)
Alors, créons des lieux de débat argumenté dans les 101 départements français avec des acteurs sociaux, des militants, des intellectuels, des citoyens curieux, sur la situation sociale, politique et idéologique ! C’est une tâche importante de la période.

Notes de bas de page

1 Pour rire un peu, voilà comment un ancien secrétaire général du PCF, Robert Hue, fut en 2019 congratulé pour sa trahison par le président Macron, lors de la remise la Légion d’honneur (https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2019/11/18/remise-collective-de-legions-dhonneur) : «  La politique française ne fabrique peut-être plus assez de grands destins républicains comme le vôtre… Quand, je dois bien le dire, à la surprise de tous et surtout à la vôtre, Georges Marchais fait de vous son successeur à la tête du Parti communiste en 1994, vous entamez avec courage une mutation du parti… Candidat aux élections présidentielles de 1995 et de 2002, vous vous lancez à la conquête des Français en leur proposant un Parti communiste qui change et qui progresse… De là est venue précisément votre volonté de sortir progressivement d’un système qui ne voulait pas se réformer pour fonder, en 2009, votre propre mouvement : le Mouvement unitaire progressiste. De là est venue votre force d’agir par-delà les clivages politiques, de faire front, à mes côtés, pendant la campagne présidentielle de 2017… Nous manquons de dirigeants comme vous. » Plus pathétique que cela, tu meurs !
2 Nous devons continuer à critiquer les associés-rivaux, d’une part, et la gauche identitaire, d’autre part, car elle crée un écosystème défavorable à la lutte contre l’oligarchie capitaliste.
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Les projets et perspectives de ReSPUBLICA

Après une récente AG

par ReSPUBLICA

 

Pour son vingt-et-unième printemps, votre revue veut faire peau neuve !

L’assemblée générale 2020-2021 de l’association « Les amis de Respublica » a eu lieu en visioconférence le 29 mars dernier. Nous reproduisons ci-après le texte du rapport moral de son président Philippe Hervé. Ses propositions ont été approuvées à l’unanimité et vont être mise en oeuvre au cours des prochaines semaines. Cela signifie que nous reviendrons prochainement vers vous pour vous les préciser et pour vous présenter les modalités du financement participatif mis en place.

Le rapport moral d’une association loi 1901, dont l’objet principal est d’éditer le média en ligne Respublica, doit bien sûr tenir compte de la situation idéologique de notre pays en cette année 2021.
La profonde crise économique et financière, que nous traversons depuis 2007- 2008,  a engendré au fil des ans une crise politique et idéologique de forte ampleur. La pandémie de la Covid 19 a accéléré le processus de contradiction de manière intense et exponentielle. La situation est d’autant plus tendue que la France est un parent pauvre du processus de globalisation en cours depuis une trentaine d’année.
Dans cette conjoncture d’extrême tension, apparaît une nouvelle conjoncture sur le plan idéologique. En effet, le capitalisme financier a désormais renoncé à défendre de manière directe son système de valeur comme il pouvait le faire jusqu’au début des années 2010. L’économie capitaliste n’est plus « le meilleur des mondes ».  La « main invisible du marché » n’est plus le régulateur universel, juste et généreux, apportant le bonheur sur terre. La défense idéologique du système d’exploitation se fissure totalement.
Alors que reste-il pour faire tenir l’édifice malgré les secousses telluriques ? Eh bien, demeure la confusion ; elle est en quelque sorte l’arme ultime dans une période où la réalité concrète n’est plus présentable car elle provoque un rejet brutal des citoyennes et des citoyens. Et cette confusion idéologique est méthodiquement organisée, structurée, médiatisée jour après jour pour désorienter, démoraliser. Le but ? Rendre passif le peuple, dépourvu d’un quelconque pouvoir politique réel.
Dans la conjoncture dans laquelle nous nous situons, notre combat pour la République sociale est confronté à un rapt, une sorte de hold-up conceptuel mené par le pouvoir actuel sur certaines notions et en particulier celle de laïcité.
Notre média a cherché à répondre aux impératifs du moment et à contrer en particulier cette offensive de détournement du sens des mots. Et d’ailleurs, nous avons marqué quelques points en ces périodes de confinement des êtres et des esprits. Avec nos modestes moyens, nous avons essayé de riposter en clarifiant les termes du débat, en particulier sur le plan du combat laïque que nous considérons indissociable du combat social. Bref, nous avons tenu notre position sans compromis ou compromission. La flamme est restée vive.
Cela dit, soyons clairs et réalistes, nos moyens sont trop modestes, notre diffusion encore trop confidentielle. Bref, notre travail est positif mais doit permettre d’influencer de manière plus ample qu’aujourd’hui le cours des choses.
Or, nous ne pouvons disposer que de nos propres forces pour ne pas sombrer dans je ne sais quelle manipulation. Heureusement, sur ce plan, nous avons des atouts comme l’a révélé d’ailleurs de manière assez surprenante la dernière souscription. En effet, un très confidentiel « appel au peuple », pour nous permettre de rassembler les moyens minimum afin d’éditer Respublica, a été largement entendu. Il nous a permis de disposer pour la première fois d’une petite trésorerie. Cela démontre l’attachement à ce journal bien sûr, mais aussi c’est un acte politique conscient : nos contributeurs financiers nous ont dit en quelque sorte : « il faut continuer et se développer maintenant et rapidement ! ».
Alors, tentons d’être à la hauteur de cet impératif : de fait, pour se développer Respublica doit se moderniser et se rénover. Notre système de diffusion numérique, son ergonomie et son graphisme datent d’il y a plus de vingt ans. Il faut donc entamer un grand chantier de rénovation pour permettre une meilleure diffusion et augmenter notre influence. Cela exige des moyens financiers importants. Nous avons, comme je l’ai déjà dit, une petite réserve et ne partons pas de rien. Mais pour compléter, il nous faut entre 5 et 10 000 euros. Nous proposons donc de lancer une souscription participative pour recueillir cette somme. Cela permettra d’en faire un acte politique et de lancer une dynamique positive. Il nous faudra expliquer et motiver cette demande auprès des citoyennes et des citoyens et clarifier encore mieux notre positionnement politique.
Je crois vraiment que nous pouvons réussir car beaucoup de nos camarades lecteurs et contributeurs sont conscients que l’année 2022 sera difficile et dangereuse pour la France et qu’il faut disposer en ces temps incertains, à défaut d’un grand phare dans la tempête, du moins d’une balise au signal fort et clair !
Voilà en quelques mots notre bilan et surtout notre perspective pour 2021.

 

Crise sanitaire
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Seuil des 100 000 morts, triste résultat d’un an de ratages

par Rachel Haller

 

Alors que le gouvernement vient de décider un troisième confinement, la France franchira dans quelques jours le cap des 100 000 morts dus au Covid-19 (en réalité, ce seuil a sûrement déjà été franchi puisque les morts à domicile – qui représentent au minimum 12 % des décès – n’ont pas encore été comptabilisés, contrairement à ce qu’avait promis Olivier Véran en juin 2020). L’occasion de faire le bilan de plus d’une année de mauvaise gestion de cette crise sanitaire (1)Voir aussi le bilan de l’Insee de la mortalité en 2020..

Ratage après ratage

Nous l’avons déjà écrit précédemment (voir notre précédente chronique) : au printemps 2020, au tout début de la pandémie, Emmanuel Macron et son gouvernement ont commencé par confiner trop tardivement le pays, conduisant à une situation extrêmement tendue dans les hôpitaux qui n’ont tenu que grâce à des mesures exceptionnelles (renfort en provenance des régions moins touchées et de volontaires, transferts de patients chez nos voisins). Manquant de masques et de tests, notre pays s’est retrouvé moins bien armé pour faire face à cette crise sanitaire d’une ampleur inédite. Face à ces manques, non seulement le gouvernement n’a pas pris les mesures adéquates (comme la socialisation des moyens de production pour les masques et le matériel médical, ainsi que nous le réclamions), mais en plus il a préféré mentir grossièrement (en particulier sur les masques) plutôt que de reconnaître ses erreurs ! Il a ensuite mal préparé le déconfinement, ouvrant plus tôt les écoles par rapport à ce que conseillait le conseil scientifique. Pendant cette crise, l’industrie française a pris un retard considérable dans le séquençage du virus et de ses mutations et s’est révélée incapable de produire un vaccin (Sanofi préfère à la place faire un nouveau plan social !), nous rendant encore une fois dépendants de firmes et de pays étrangers. La France a ensuite peiné à acheter des doses des vaccins existants, puis c’est sur le déploiement de la vaccination qu’elle a pêché ! Alors que cette pandémie dure, les différences sont désormais criantes entre notre pays qui accumule les erreurs de gestion depuis plus d’un an et d’autres pays qui commencent à reprendre ou ont repris une vie presque normale, soit grâce à la vaccination massive de la population, soit grâce à une stratégie zéro-Covid qui a porté ses fruits. Au bout d’un an, notre gouvernement n’a toujours pas de stratégie claire et préfère naviguer à vue, tentant tant bien que mal de préserver l’économie au détriment de la santé, mais il finit par perdre sur les deux tableaux comme le montre le triste bilan auquel nous aboutissons, et ce n’est malheureusement pas fini.

Notre gouvernement n’a pas su tirer les leçons des autres pays

Il faut souligner qu’à chaque fois, la France se trouvait dans une situation plutôt avantageuse face à ses voisins puisqu’elle a été frappée plus tard par le virus ou ses mutations. Lors de la première vague de l’épidémie, le gouvernement aurait du tirer les leçons du cas italien touché quelques semaines avant notre pays et lors de cette troisième vague due au variant britannique, elle avait l’exemple de la situation en Angleterre pour pouvoir anticiper l’évolution de la crise. Mais à chaque fois, le président Emmanuel Macron n’a pas su tirer profit de ces exemples et a pris les mauvaises décisions ! N’écoutant ni le conseil scientifique pourtant dévolu à cette tâche, ni la représentation nationale qui comme elle l’a dénoncé la semaine dernière est devenue une simple « chambre d’enregistrement », Macron s’est proclamé « épidémiologiste en chef » du pays ! Le Monde rapporte ainsi les mots ahurissants de Jean-Michel Blanquer : « Le président a acquis une vraie expertise sur les sujets sanitaires. Ce n’est pas un sujet inaccessible pour une intelligence comme la sienne et au regard du temps important qu’il y consacre depuis plusieurs mois. »

Contre l’avis du conseil scientifique qui préconisait d’étendre les vacances d’hiver pour fermer les écoles pendant un mois, Emmanuel Macron a préféré faire le pari d’un ralentissement de l’épidémie grâce à la vaccination. Tout le monde, sauf le président malade de son hubris, peut constater aujourd’hui l’échec cuisant de cette décision hasardeuse. Depuis quelques jours, les professionnels de la santé tirent la sonnette d’alarme et le pic de personnes admises en réanimation des suites de la Covid-19 lors de la deuxième vague a déjà été dépassé. Cette situation laisse craindre des prochaines semaines extrêmement difficiles pour nos soignants alors que les conditions sont encore plus défavorables : il n’y a plus de réserve sanitaire disponible, les nouveaux patients atteints par le variant anglais restent plus longtemps en réanimation et sont plus instables, ce qui empêche les évacuations sanitaires, contrairement aux deux premières vagues. Là encore, il faut insister sur le fait que le gouvernement s’est révélé incapable depuis un an d’améliorer le problème du manque de moyens matériels et humains à l’hôpital public. Force est de constater que le Ségur de la Santé n’a pas été à la hauteur et alors que le président promettait en octobre 12 000 lits de réanimation, nous en sommes qu’à 7 000.

Cette suite de mauvaises décisions va se traduire par des morts supplémentaires : décès liés au Covid-19 (insistons à ce propos sur le fait que trois études viennent de conclure à une surmortalité liés à la saturation des services de réanimation (2)Lire à ce sujet : https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/04/01/covid-19-la-saturation-des-reanimations-une-impasse-dangereuse_6075185_3244.html ), mais aussi décès indirects puisque la seule variable d’ajustement est désormais la déprogrammation d’opérations…

Le bilan de notre pays, déjà particulièrement médiocre, devrait donc encore s’alourdir. Il n’est pas inutile de rappeler que l’Allemagne, avec 17 millions d’habitants de plus que la France, déplore 20 000 morts de moins et que sa dirigeante, Angela Merkel, débat régulièrement pendant plusieurs heures avec les présidents de région (dans des réunions filmées et diffusées) pour trouver un consensus, ce qui donne le sentiment à la population que les décisions sont prises dans la transparence et démocratiquement, ce qui manque cruellement à notre pays où c’est Jupiter qui est le maître des horloges ! De ce fait, nos concitoyens consentent de moins en moins aux efforts à fournir pour ralentir la propagation du virus, las de cet « absurdistan ». Puisque le président a décidé de décider seul, qu’il soit désigné comme le seul responsable et sanctionné seul !

Notes de bas de page

Education populaire
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Prolongez la lecture des articles du journal par des podcasts

... avec les chercheurs S. Beaud, G. Noiriel et F. Pierru

par ReSPUBLICA

 

Parce que les enregistrements audio sont un outil militant en plein développement, les podcasts du Réseau Education populaire se multiplient. Vous en retrouverez la totalité  sur https://podcast.ausha.co/reseau-education-populaire.

Les deux derniers réalisés sont particulièrement en phase avec l’actualité et avec des articles récents du journal. Ainsi :

Race et sciences sociales : Echange entre S. Beaud, G. Noiriel et F. Pierru [30-03-21]1h04

Pour ce cinquième épisode de la saison 2 d’EducPod, Franck et Frédéric Pierru reçoivent l’historien Gérard Noiriel et le sociologue Stéphane Beaud, qui viennent de publier un livre « Race et sciences sociales : Essai sur les usages publics d’une catégorie » aux éditions Agone. Nous aborderons dans cet épisode la façon dont ce livre a été reçu par la presse et d’autres chercheurs. Mais aussi de la question identitaire, de la parole dominante de ceux qui s’autoproclament porte-parole d’une catégorie…

Ecouter : https://podcast.ausha.co/reseau-education-populaire/educpod-s2ep5-race-et-sciences-sociales
et retrouver l’article paru dans ReSPUBLICA : https://www.gaucherepublicaine.org/debats-politiques/retour-a-lenvoyeur/7420676

Analyse d’une crise sanitaire prévisible avec Frédéric Pierru [29-03-2021] 53 mn

Pour le quatrième épisode de la nouvelle saison d’EducPod, Franck reçoit Frédéric Pierru, sociologue et politiste, chercheur au CNRS, qui a réalisé de nombreuses publications et ouvrages sur les politiques de santé et sur l’hôpital public. Nous aborderons dans cet épisode la façon dont les politiques « néolibérales » ou à court terme, ont détricoté notre système de santé français depuis le début du siècle et comment la gestion catastrophique actuelle était prévisible.

Ecouter : https://podcast.ausha.co/reseau-education-populaire/educpod-s2ep4-analyse-d-une-crise-sanitaire-previsible-avec-frederic-pierru-29-03-2021

et relire les derniers articles correspondants du sociologue F. Pierru liés à la crise sanitaire :

Laïcité
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Le régime laïque ne s'applique pas en Guyane

par Hai Quang Ho

 

Ho Hai Quang est auteur de l’ouvrage Le Capital en toute simplicité que l’on peut retrouver dans notre Librairie militante.

Colonie de la France depuis la seconde moitié du XVIIe siècle, la Guyane a été pleinement intégrée au territoire national en 1946 en devenant un département d’outre-mer. Cette intégration n’est en rien changée quand ce DOM a été érigé en Collectivité territoriale unique avec les compétences « attribuées à un département d’outre-mer et à une région d’outre-mer et toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi pour tenir compte de ses caractéristiques et contraintes particulières« . Ces particularités expliquent que toutes les lois de la République ne s’appliquent pas en Guyane. C’est notamment le cas de la loi du 9 décembre 1905 qui a instauré la séparation des églises et de l’État en proclamant : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte« .

Cette loi n’a pas été étendue à la Guyane. Aujourd’hui encore, les relations entre l’État et les religions reposent principalement sur deux textes promulgués sous la Restauration. Il s’agit d’abord de la Charte constitutionnelle du 4 juin 1814 qui déclare :

Article 5. Chacun professe sa religion avec une égale liberté, et obtient pour son culte la même protection.
Article 6. Cependant la religion catholique apostolique et romaine est la religion de l’État.
Article 7. Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine et ceux des autres cultes chrétiens reçoivent seuls des traitements du trésor royal.  

Cette Charte est la base juridique d’une ordonnance royale du 27 août 1828 sur le gouvernement de la Guyane qui décide dans son article 36 :

1) Le gouverneur veille au libre exercice et à la police extérieure du culte, et pourvoit à ce qu’il soit entouré de la dignité convenable.
 2) Aucun bref ou acte de la cour de Rome, à l’exception de ceux de la pénitencerie ne peut être reçu ni publié dans la colonie qu’avec l’autorisation du gouverneur, donné d’après nos ordres.

L’État favorise donc une seule religion, le catholicisme, établit sur lui un contrôle, paie les ministres du culte, finance la construction et l’entretien des édifices religieux. Il en est ainsi parce que la religion est une auxiliaire de la colonisation : si la conquête de nouveaux territoires déjà peuplés se fait par l’épée, la domination coloniale se maintiendra ensuite d’autant plus facilement que les colonisateurs parviendront à y diffuser leurs idées, leurs croyances. Or, au XIXe siècle, tous les colons de Guyane, ainsi que leurs esclaves étaient catholiques. En effet, après la révocation de l’Édit de Nantes (1685), la seule religion autorisée en France est le catholicisme et, concernant les esclaves, l’article 2 du Code noir, appliqué en Guyane à partir de 1704, déclare : « Tous les esclaves qui seront dans nos îles seront baptisés et instruits dans la religion catholique, apostolique et romaine« .

Pour permettre la pratique de cette religion et en même temps favoriser sa diffusion parmi les populations indigènes, il faut payer des prêtres, construire et entretenir des lieux de culte. Le catholicisme étant la religion de l’État, il appartenait logiquement à celui-ci de régler toutes ces dépenses.

Quel a été le sort de l’ordonnance de 1828 après le vote de la loi de 1905 portant séparation des églises et de l’État ? Il était prévu que son application dans les colonies serait ultérieurement organisée par des règlements d’administration publique. De tels règlements ont effectivement été pris pour l’Algérie, la Martinique, la Guadeloupe, La Réunion, Madagascar. Mais d’autres colonies ont échappé à cette normalisation : la Guyane, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, les Terres australes et antarctiques françaises, la Nouvelle-Calédonie[1].

Concernant la Guyane, le gouvernement a suivi l’avis de la commission coloniale du 1er avril 1911 qui, sous la pression des colons guyanais et de leurs élus, avait demandé de ne pas y appliquer la loi de 1905. Cette situation perdure encore aujourd’hui de sorte que l’ordonnance 1828, dans ses grandes lignes, reste en vigueur en Guyane. En fait, la seule modification apportée à ce texte a concerné la charge des dépenses de personnel et de matériel liés à la pratique du catholicisme : en 1900, un décret a transféré cette charge du Trésor au budget de la colonie de Guyane ; rien n’a été changé quand cette colonie est devenue un DOM en 1946, puis une Collectivité territoriale en 2016. Actuellement cette charge s’élève à 1 million d’euros par an.

En 2017, estimant que l’ordonnance de 1828 et le décret de 1900 étaient contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution, la collectivité de Guyane a posé une « question prioritaire de constitutionnalité ». Le Conseil constitutionnel lui a répondu que ces deux textes étaient conformes à la Constitution.

Au-delà du débat juridique, la question est de savoir pourquoi, au plan politique, l’État tient à favoriser exclusivement le catholicisme en Guyane.

Une réponse avait été donnée par le ministre de l’intérieur Jules Moch qui, dans une lettre du 27 mai 1948 adressée à René Mayer, ministre des Finances, expliquait qu’il existe  « des raisons d’opportunité politique à maintenir la pratique actuelle de la rétribution des ecclésiastiques par le département de la Guyane et non par le budget de l’État… Pour ma part, j’estime qu’en raison de la pauvreté des habitants de la Guyane et de la nécessité de les soustraire aux influences étrangères que favoriserait le départ des missionnaires catholiques, il est souhaitable, ainsi que le suggère le Préfet, de maintenir la rétribution des desservants, les subventions pour la construction et les réparations des édifices cultuels ainsi que les subventions aux congrégations de femmes assurant le service de diverses œuvres de bienfaisance, notamment des léproseries. »[2]

En définitive, jusqu’à présent, l’État a considéré que le catholicisme constitue un rempart contre la progression des autres croyances religieuses en Guyane. C’est pourquoi, il a repoussé toutes les attaques juridiques, politiques…, d’où qu’elles viennent, contre l’ordonnance de 1828. Au plan juridique, il s’appuie sur la décision du Conseil constitutionnel du 2 juin 2007, qui a jugé ce texte « conforme à la Constitution ». La laïcité n’est donc pas respectée en Guyane. Jusqu’à quand ?

NOTES

[1] En France métropolitaine, la loi de 1905 n’est pas appliquée en Alsace et dans le département de la Moselle.

[2] Lettre citée dans l’exposé des motifs de la proposition de loi portant extension de la loi du 9 décembre 1905 à la collectivité territoriale unique de Guyane.

 

Combattre le racisme
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L'idéologie ambiante

Les races existent ! Les femmes n'existent pas ! Mais encore ?

par Vincent Présumey

 

NDLR : pour prolonger le débat entourant la parution de l’ouvrage de Stéphane Beaud et Gérard Noiriel Race et sciences sociales : Essai sur les usages publics d’une catégorie, la Rédaction recommande la lecture du long article de Vincent Presumey paru chez Mediapart « L’idéologie ambiante », remarquable critique des théories racialistes et décoloniales.

 

I. Les races existent !

Depuis une dizaine d’années, l’expression « personnes victimes du racisme », désignant des individus ou des groupes, est progressivement supplantée par l’expression « personnes racisées ». Nul doute que beaucoup de ceux qui emploient cette dernière expression l’entendent dans un sens exactement synonyme à « personnes victimes du racisme ». Mais alors, pourquoi ce changement progressif de langage ? La nouvelle expression, souvent entendue comme un terme convenu et obligatoire, charrie sciemment un contenu idéologique tenu pour « correct » par ses promoteurs, à savoir que les personnes « racisées » sont instituées, par le racisme, en groupe racial – en race.

Auparavant, dans la tradition du mouvement ouvrier, des luttes de libération nationale et des combats démocratiques, il était entendu que les races n’existent pas, le fait décisif étant le racisme, lequel consiste justement à prétendre qu’il y a des races, et inégales. Historiquement le racisme est étroitement lié à l’esclavage, singulièrement à l’esclavage-marchandise, où des êtres humains sont vendus. La dévalorisation morale et physique des esclaves était courante dans l’Antiquité gréco-romaine puis chrétienne. Lorsqu’un groupe de populations devient le réservoir des esclaves, il est envisagé comme servile par nature : ceci est sans doute arrivé aux peuples d’Europe centrale et orientale qualifiés au haut Moyen Age d’esclavons ou de « slaves », puis, de manière certaine, aux peuples africains à pigmentation noire dans lesquels les grands marchands musulmans achetaient et kidnappaient des esclaves en grand nombre, les Zendjs. L’apparition de représentations associant le physique, les odeurs, la sexualité, et la dévalorisation intellectuelle, à l’encontre des « noirs », se produit massivement dans le califat abbasside, vers les II°-III° siècles de l’Hégire. Cette dévalorisation des noirs est reproduite et amplifiée par les sociétés européennes dès le XVe siècle et massivement à partir du moment où les économies mercantiles euro-américaines y ont recours (XVIIe siècle notamment). Né autour de l’esclavage, le racisme est alors institué de manière théorique dans une partie des ouvrages de la science européenne naissante, et généralisé au XIXe siècle en relation avec la colonisation. Les États-Unis sont, outre plusieurs États africains et antillais, l’État moderne le plus important dont la construction nationale n’a pas surmonté la marque de l’esclavage et du racisme.

Mais les luttes antiracistes et l’échec du national-socialisme allemand ont donné plein champ à la conception scientifique selon laquelle, chez Homo Sapiens, les différences génétiques ne permettent pas de parler de « races » et ne recoupent pas les races phénotypiques du XIXe siècle et des colonies, en saisissant l’importance majeure du métissage, depuis la préhistoire. Par conséquent, jusqu’à l’arrivée de la conception qui sous-tend l’expression « personnes racisées », la lutte antiraciste allait de pair avec la réfutation de la réalité des races, liée à la négation de leur réalité biologique telle qu’elle avait été fantasmée et proclamée par une « science » raciste à peu près dominante jusqu’en 1945. Il y a donc, avec le terme « racisés », un retour de « la race », qui est présenté par ses promoteurs comme tout à fait différent du racisme biologique d’autrefois.

La race existerait, mais serait une construction sociale et idéologique. C’est là enfoncer une porte ouverte : ce qui est décrit ainsi s’appelle, non la race, mais le racisme. « … le terme « racisé » met en évidence le caractère socialement construit des différences et leur essentialisation. », nous explique le site de la LDL (Ligue des Droits et Liberté, association québécoise, qui nous offre en langue française une catéchèse caractéristique sur ces questions). Cette affirmation ne repose sur rien : le caractère socialement construit des représentations racistes et leur action étaient déjà connus, et loin d’éviter l’« essentialisation », c’est-à-dire l’érection d’une catégorie en catégorie naturelle, ou éternelle, le terme « racisé » entend au contraire signifier que la personne racisée fait partie d’une « race », de manière pérenne, « structurelle ». Le même site nous offre une autodéfense tout aussi caractéristique : « Le terme « racisé » permet de « rompre avec ce refus de prendre publiquement au sérieux l’impact social du concept de race, refus qui n’obéit ni à un manque ou à une cécité, mais permet justement de reconduire les discriminations et hiérarchies raciales. ». Ici, si « racisé » exprime nécessairement la prise « au sérieux » de « l’impact social du concept de race », alors sa non prise « au sérieux » et « la reconduction » des discriminations passent par le fait de ne pas l’employer : celui qui ne dit pas « racisé » est donc raciste, ou, plus exactement, dirons-nous, raciseur : il fait exister la « race », puisqu’elle existe, par sa faute.

Sous couvert de dénoncer l’ « essentialisation », celle-ci est ici à l’œuvre, et à fond. Il y a donc des « racisés », c’est-à-dire des races, et des raciseurs. En toute rigueur il n’y a plus des victimes du racisme et des racistes, termes d’autrefois appelés à être progressivement remplacés. Les racisés forment une race, les raciseurs, puisqu’ils sont les « dominants », sont, eux aussi par essence, non victimes, puisque faisant des victimes : ils sont une race non racisée, si l’on veut, une anti-race qui fait les races. Et comment savoir qui fait partie de l’un et de l’autre groupe ? C’est très simple : le critère, implicite, non forcément avoué, mais pleinement usité, eh bien, mais c’est le phénotype, la couleur de la peau !

Il y a donc des « racisés » repérables à la couleur de leur peau (je reviendrai plus loin sur l’autre signe admis : le voile islamique). Quant aux raciseurs, de manière tout aussi essentialisée, ils ne peuvent pas être racisés : ils sont blancs, sans guillemets, et le « concept » qui leur convient est donc la « blanchité » et expressions correspondantes (« privilège blanc », « fragilité blanche », « panique morale blanche » supposée saisir le blanc quand on lui montre qu’il est un raciseur qui fait des racisés, etc. ; un « racisme anti-blanc » est impossible : le blanc ne saurait être le racisé puisqu’il est, par essence, le raciseur)

La suite de l’article est à lire sur le site de Mediapart.

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Occupations dans les théâtres : une mobilisation pour la culture et contre la précarisation

par Rachel Haller

 

Entamé début mars, le mouvement d’occupation des lieux culturels a essaimé à travers la France et ne semble pas faiblir. Alors que les professionnels de la culture sont toujours dans l’attente de perspectives pour le secteur, la mobilisation continue et cherche à tendre vers la convergence des luttes.

La culture malmenée

Rappelons pour commencer que si, à l’instar de la France, d’autres pays européens ont fermé complètement leurs lieux culturels (Pays-Bas, Grèce), plusieurs pays ont choisi de redémarrer des activités culturelles : les musées ont par exemple réouvert au Luxembourg, en Pologne, en Autriche et en Italie dans certaines régions, tandis qu’en Espagne on peut même aller au cinéma. La question de leur réouverture est devenue de plus en plus pressante alors que le secteur culturel souffre particulièrement et que ces lieux se semblent pas présenter de risque important pour les contaminations. Une étude allemande a notamment conclu que les théâtres, salles de concert et musées respectant les consignes sanitaires habituelles apparaissent comme les lieux les plus sûrs par rapport à une liste incluant les supermarchés, les bureaux en open space ou les écoles. En outre, on peut pointer l’incohérence de leurs fermetures alors que jusqu’à très récemment en France, le public était très nombreux dans les galeries qui avaient le droit d’ouvrir parce que les œuvres d’art exposées étaient à vendre.
Ainsi, le 4 mars dernier, c’est à la suite d’une manifestation pour demander la réouverture des lieux culturels que l’occupation du théâtre de l’Odéon a débuté, à l’appel de la CGT-Spectacle, du Syndicat des cirques et compagnies de création et de la Société des réalisateurs de films. Les occupants ont choisi ce théâtre du Ve arrondissement pour sa valeur symbolique : le théâtre a déjà occupé lors de luttes, notamment en Mai 68 et plus récemment au moment de Nuit debout.

Des revendications contre la précarité

Dès le début de l’occupation, les revendications concernant le secteur ont été élargies à une lutte globale contre la précarisation, puisque les professionnels demandent (voir le communiqué) :

– un retrait pur et simple de la réforme de l’assurance-chômage ;

– une prolongation de l’année (l’année blanche est une prolongation des droits d’un an au chômage, obtenue par les intermittents du spectacle — artistes et techniciens du spectacle vivant, du cinéma et de l’audiovisuel — au début de la crise sanitaire. La fin de cette année est fixée au 31 août 2020, or à cette date, très peu de personnes auront pu travailler assez pour renouveler leurs droits au chômage : elles se retrouveront donc en grande difficulté), son élargissement à tous les travailleurs précaires, extras et saisonniers entre autres, qui subissent les effets, à la fois de la crise et des politiques patronales, ainsi qu’une baisse du seuil d’heures minimum d’accès à l’indemnisation chômage pour les primo-entrants ou intermittents en rupture de droits ;

– de toute urgence, des mesures pour garantir l’accès à toutes les travailleuses et travailleurs à l’emploi discontinu et autrices et auteurs aux congés maternité et maladie indemnisés ;

– un financement du secteur culturel passant par un plan massif de soutien à l’emploi en concertation avec les organisations représentatives des salariés de la culture ;

– des moyens pour garantir les droits sociaux – retraite, formation, médecine du travail, congés payés, etc. – dont les caisses sont menacées par l’arrêt des cotisations.

Dans le même ordre d’idée, les occupants de l’Odéon ont lancé depuis le 16 mars les « vendredis de la colère » et ont appelé à une « mobilisation générale contre le projet de réforme de l’assurance chômage » (60 théâtres ont signé cet appel) ; une agora participative, avec prises de parole et performances artistiques, se tient également tous les jours à 14 h (elles sont filmées et retransmises en ligne). Une collecte a été lancée pour aider à la poursuite de l’occupation : https://www.helloasso.com/associations/fnsac/collectes/occupationodeon

De nombreux lieux mobilisés en France avec une stratégie de convergence des luttes

Actuellement, 90 salles seraient occupées en France et aussi à La Réunion. Les occupations ont lieu dans plusieurs types de salles : des centres dramatiques nationaux (Lille, Montluçon, Rouen, Limoges), des scènes nationales (Brest, Châteauroux, Périgueux), des salles de concert (Bourg-en-Bresse, Nîmes), des théâtres indépendants (Noyon ou Avignon) et même une agence Pôle emploi (Alès)… Dans certains cas, les directions sont plutôt favorables au mouvement (les occupants respectent des consignes sanitaires strictes), mais dans deux lieux (la Manufacture d’Arts, ancienne école des Beaux-Arts de Saint-Étienne et Bordeaux), les occupants ont été délogés par les forces de l’ordre.

À plusieurs endroits, les occupants se sont regroupés en collectifs, à Aurillac ils se nomment « Culture préoccupée 15 » et à Clermont-Ferrand « Culture en danger 63 ». Pour ce dernier, la visée est également la convergence des luttes : des professionnels de la santé ont été invités à une agora. Les prises de parole font apparaître les préoccupations diverses que traversent les différents acteurs du secteur : certains professionnels n’avaient pas pu travailler suffisamment d’heures (507 heures de travail pour une période de 12 mois) pour bénéficier du statut d’intermittent du spectacle, tandis que d’autres (artistes plasticiens) ne peuvent tout simplement pas y prétendre. Plusieurs professionnels alertent également sur les difficultés rencontrées par les élèves des disciplines artistiques : ceux-ci (comédiens, musiciens mais aussi danseurs) sont privés du contact avec le public pourtant essentiel à leurs formations.

Dans sa dernière allocution du 31 mars, Emmanuel Macron a annoncé la réouverture de certains lieux de culture pour la mi-mai, alors que la ministre de la culture Roselyne Bachelot est toujours hospitalisée des suies de la Covid-19 et n’a donc pas pu rencontrer les représentants du secteur. En revanche, une première réunion a eu lieu jeudi 25 mars entre des membres du cabinet de la ministre et six étudiantes du mouvement d’occupation. Ces dernières – non affiliées aux structures syndicales – ont demandé de meilleures mesures d’accompagnement pour la création théâtrale et ont fait part de leurs idées alors qu’un embouteillage s’annonce pour les événements culturels. Elles ont notamment proposé que tous les thtéâtre subventionnés créent des mini-troupes composées de jeunes sortis d’école et que l’accès au régime de l’intermittence soit facilité pour les étudiants.

Dans tous les cas, alors que le pays est pour le moment toujours privé de culture, ces occupations, que l’on espère de plus en plus nombreuses et revendicatives, sont l’occasion pour les artistes de trouver une manière de s’exprimer à nouveau et de tisser aussi des liens de solidarité, avec d’autres groupes et notamment des gilets jaunes mais aussi entre artistes, ce qu’il n’est pas toujours aisé de faire dans ce secteur assez concurrentiel.

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Pour combattre l’archipellisation de la gauche de transformation sociale et politique...

... faisons connaître et converger les actuelles « îles » de la pensée critique !

par Zohra Ramdane

 

L’une des causes (mais pas la seule !) du manque d’efficacité de la gauche actuelle provient sans nul doute de son archipellisation qui rend invisible chacune des îles de l’archipel au plus grand nombre, alors que c’est dans le grand nombre que la puissance populaire se trouve. Travaillons donc à faire converger et rassembler ceux que la ligne stratégique devrait rapprocher. Mais pour cela, il est nécessaire d’abord de mieux connaître l’archipel. Puisque nous incitons les autres « îles » à ce travail, commençons nous-mêmes par vous présenter une autre île !

Nous sommes tombés sur la revue Le Militant avec comme sous-titre « Bulletin marxiste pour la France insoumise ». Cela a suffit à nous questionner ! Nous avons lu les bulletins n°159 intitulé « La santé malade du capitalisme » et son dossier sur le coronavirus et le n° 160 du premier semestre 2021 intitulé « l’Ecologie en question ». Nous avons pu voir que de nombreux débats et questionnements sur l’actuelle gauche politique et sociale y sont posés.

Par exemple, des titres évocateurs sont fournis dans ces numéros comme la vidéo intitulée « Vol au dessus d’un nid de bobos » par Jean-Pierre Garnier, ancien directeur de recherches au CNRS en sociologie de l’urbanisme, ou une rencontre sur le livre C’est mon choix disent les femmes soumises , de Myassa Messaoudi ou encore le colloque organisé sur le centenaire de la naissance du parti communiste en fin d’année dernière ou le débat intitulé « Déconfinons le socialisme ».

Et les articles «  La collapsologie : le renoncement au changement », « Le féminisme identitaire », « Contre le socialisme municipal : une lettre de Friedrich Engels » , « L’histoire des JCR, entre bobards et amateurisme », « Le développement durable : polluer moins pour polluer plus longtemps », « Sur l’hostilité à la civilisation urbaine », « Grenoble : le laboratoire du verdissement techno-capitaliste ».

Nous pourrions citer d’autres analyses de l’actualité, par exemple « Après l’assassinat de Samuel Paty » ou « la guerre des races aura-t-elle lieu ». Ou encore une  nécrologie émouvante comme celle d’Ernesto Cardenal écrite par Régis de Castelnau ! Ou une nouvelle lettre de Friedrich Engels : « Le malthusianisme : une déclaration de guerre contre le prolétariat » ou une critique de « la FI de Tous-Centre qui promeut un think tank néolibéral ».

Alors, vous pouvez donc vous ruer sur cette publication et faire connaître. Merci à son directeur de la publication, Raymond Maillard, de nous avoir permis de la recenser cette publication grâce aux deux numéros les plus récents.

« Iliens » proches de notre ligne stratégique, contactez-nous, connaissons-nous et convergeons !

 



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