Une grande réforme de la Sécurité sociale : son extension à la sécurité économique "Penser la République Sociale pour le XXIe siècle". T. II

NDLR – Extrait abrégé des pp. 219 à 240 de Penser la République Sociale pour le XXIe siècle. II – Du salariat aux travailleurs associés (Eric Jamet éditeur, 2015. Voir le Sommaire). Pour une présentation graphique de ce qui suit, voir aussi le diaporama associé :  Sécurité Economique et Sociale.

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Le principe

La proposition de Caisse de Sécurité Économique à l’ambition de répondre à un objectif concret fédérateur : « La garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaire pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes ». Ordonnance de 1945 sur la Sécurité sociale

En synergie avec la socialisation progressive, la Caisse de Sécurité Économique supprimera la précarité. Elle permettra d’assurer la sécurité de l’activité de production pour l’ensemble des acteurs (salariés, travailleurs non salariés, entreprises, entrepreneurs) par mutualisation du risque, selon le même principe que la Sécurité sociale et par un système de cotisations des entreprises dont la double assiette sera la valeur ajoutée nette (c’est-à-dire les richesses produites) (1)En moyenne, quand 10 € vont aux salaires super-bruts, 2 vont aux amortissements, 1 à l’investissement, 1 en profit non réinvestis. La valeur ajoutée nette est de 14 moins 2. et les profits non réinvestis dans l’appareil productif. (L’intérêt de cette double assiette est de pouvoir avoir un taux élevé sur la part des profits non réinvestis dans l’appareil productif sans pénaliser l’investissement productif.) Cette Caisse organisera donc par la loi une solidarité économique entre les entreprises, grandes et petites, face aux variations d’activité.

La Caisse de Sécurité Économique se substituera aux employeurs pour financer la baisse du temps de travail en cas de baisse de commandes, et assurer le maintien des salaires, ainsi que la continuité du contrat de travail et de la rémunération en cas de graves difficultés économiques ou de disparition de l’entreprise.

L’assiette du financement de la protection sociale sera donc proportionnelle à l’activité (valeur ajoutée nette), en contrepartie de maintien des effectifs en cas de baisse d’activité, en particulier pour les petites entreprises qui, parfois, ne survivent pas à une baisse temporaire de commande. En contrepartie, le recours au contrat à durée déterminé sera fortement pénalisé, et nous interdirons les licenciements boursiers.

En cas de suppression de poste, la Caisse de Sécurité Économique assurera le maintien de la rémunération, à l’image de ce qui existe actuellement, par exemple pour les enseignants, et qui sera étendu à l’ensemble des travailleurs. Elle étendra le principe fondateur de la Sécurité sociale, tel qu’il est déjà appliqué à la maladie et la maternité, à l’ensemble des situations où les travailleurs sont dans l’incapacité d’assurer leurs moyens d’existence par le travail pour des raisons indépendantes de leur volonté, en application du préambule de la constitution de 1946 (« Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. »)

La Caisse de Sécurité Économique apportera aux entreprises des fonds propres, obtenus par mutualisation, sans le besoin de recourir à des fonds extérieurs privés. En tant qu’institution collective des travailleurs, elle sera donc propriétaire d’une part des entreprises, comme le proposait Jaurès.

Elle fournira également des financements longs, par le crédit à taux bas ou nul pour les TPE/PME. En association avec la socialisation progressive, elle éliminera progressivement les capitaux privés des entreprises pour leur substituer des capitaux socialisés, ce qui assurera donc la sortie du capitalisme par la disparition des rentiers en tant que classe.

Les caisses seront dirigées par des représentants élus des salariés (comme cela était le cas pour la Sécurité sociale jusqu’en 1963), élus sur liste syndicale, qui disposeront d’une majorité de sièges aux conseils d’administration des caisses. Des représentants des collectivités et des employeurs sont également associés à la gestion des caisses.

Outre sa finalité première, « la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaire pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes », la Caisse de Sécurité Économique et Sociale aura comme effets induits :

  • de faire reculer l’insécurité des personnes et des biens en assurant une rémunération aux personnes sortant de détention, comme à tout citoyen, et ainsi limiter les motifs économiques de la récidive et de la délinquance.
  • de favoriser les créations d’emploi, particulièrement pour les artisans et les PME, en limitant au salaire net effectivement versé le risque économique que représente une embauche en CDI pour les employeurs, et en protégeant les entreprises contre les aléas du marché.
  • de favoriser, plus généralement, la prise de risque entrepreneuriale (création d’entreprises, innovations, nouvelles activités, nouveaux produits…) grâce à la limitation du risque économique par la sécurité apportées par la Caisse de Sécurité Économique.
  • de permettre à tous de bénéficier des mêmes possibilités d’accès aux loisirs, à la culture, et aux vacances que les salariés des grandes entreprises qui disposent d’un Comité d’Entreprise, grâce aux activités proposées par le Comité d’Établissement de leur caisse départementale de rattachement.
  • de permettre une simplification et une efficacité administrative accrue, la Caisse départementale de Sécurité Économique et Sociale étant à terme un « guichet unique » pour toutes les questions relevant du travail, regroupant les fonctions actuellement assurée par les chambres de commerce et d’industrie, de la Sécurité sociale, et de Pôle emploi.
  • d’améliorer l’adéquation entre l’évolution des qualifications des travailleurs et les besoins de l’économie, la Caisse assurant le financement de la formation continue et sa maîtrise d’œuvre.

Les antécédents historiques

« Toutes les grandes révolutions ont été faites dans le monde parce que la société nouvelle, avant de s’épanouir, avait pénétré par toutes les fissures, par toutes ses plus petites racines, dans le sol de la société ancienne. » Jean Jaurès, Discours des deux méthodes, 1900

La Caisse intempéries du bâtiment et travaux publics (BTP), créée en 1946, se substitue aux employeurs pour verser les salaires en cas d’intempéries. Elle verse également les congés payés.
Elle est financée par mutualisation du risque sous la forme d’une cotisation des employeurs. La Caisse de Sécurité Économique est une forme d’extension à l’ensemble des branches du principe de la Caisse du BTP, pour parer à l’insécurité due aux « intempéries économiques ».

La Caisse de Sécurité sociale et économique est aussi une extension du système mis en place à la Libération dans la branche IEG (Industrie Electrique et Gazière), la CCAS, (Caisse Centrale des Activités Sociales). La CCAS (initialement CCOS) a été crée en 1947 sous l’impulsion du ministre communiste et ouvrier électricien Marcel Paul. Contrairement à une idée répandue, la CCAS n’est pas le « CE d’EDF ». Il s’agit d’une organisation de branche, qui couvre 157 entreprises, y compris des filiales de groupes étrangers en France. Elle a près de 700.000 ayants droit (actifs, retraités et leur famille). Il s’agit de l’organisation des travailleurs de la branche, gérée par eux, qui assure des activités mutualisées : accès pour tous à des centres de vacances, aux loisirs, à la culture, mais aussi formation, restauration collective, et assurances. Elle est associée à des structures locales, les CMCAS.

Dans la République sociale, cette organisation de travailleurs des IEG, très avancée, obtenue de haute lutte à la Libération, mais limitée à une branche où le rapport de force était plus favorable (les IEG), sera étendue à l’ensemble des travailleurs. La Caisse de Sécurité sociale et économique sera une « super CCAS » étendue à toutes les branches, et assurant à tous les travailleurs, y compris ceux des petites entreprises et les travailleurs disponibles (ie temporairement sans emploi), l’accès aux mêmes droits. Ce sera « l’association de tous les travailleurs associés. ».

A noter également que le principe de financement des retraites qui a existé jusqu’en 2004 à EDF-GDF, la « contribution d’équilibre », est aussi étendu dans la République Sociale à l’ensemble des travailleurs. A EDF-GDF, il n’y avait pas de « retraités » à proprement parler jusqu’en 2004, mais des agents actifs et des agents inactifs, dont les revenus étaient versés en fonction de leur qualification, au même titre que les agents actifs, avec un financement par les recettes de l’entreprise comme pour les actifs, donc sans cotisation assise sur les salaires. Sa limite était son périmètre restreint à une seule branche, sans mutualisation inter-branches, qui faisait reposer sur une seule branche le financement des retraites des agents inactifs de la branche, alors que le ratio entre actifs et inactifs était élevé dans la branche IEG. Dans la République sociale, la mutualisation sera étendue entre les branches.

Le principe de financement des retraites décrit plus haut est donc une extension de ce principe à l’ensemble des travailleurs et des entreprises, et la continuité du rêve de Marcel Paul et du CNR.

La Caisse de Sécurité Économique et Sociale est aussi la déclinaison du projet de Jean Jaurès, tel que décrit par Philippe Chanial (« La république, la question sociale et l’association », Annales de la recherche urbaine n° 89) :

Dès 1886, Jaurès dépose sur le bureau de la Chambre une proposition de loi relative à l’organisation générale des caisses corporatives de secours, de retraite et de coopération pour les travailleurs des diverses industries. L’inspiration associationniste de cette proposition est explicite. Jaurès se revendique de l’héritage de 1848. La fonction de ces sociétés, à la différence du système allemand, n’est pas seulement une fonction de protection.
En même temps qu’elle pourvoit au strict nécessaire, cette proposition « tourne les yeux de tous les travailleurs vers cet idéal d’indépendance économique […] que nos maîtres de 1848, avaient si présent, si lumineux au cœur et à l’esprit, l’émancipation définitive des travailleurs par l’association et le capital collectif ».
La fonction essentielle de ces caisses de retraite consiste à préparer les ouvriers à la pratique de l’association et à leur permettre la constitution d’un patrimoine collectif. Grâce à ce capital collectif, géré par les ouvriers eux-mêmes, ces sociétés démocratiquement élues et leurs conseils pourront réaliser leur mission véritable, devenir les « banquiers naturels des associations ouvrières », bref contribuer à financer graduellement l’appropriation collective, c’est-à-dire associative, des moyens de production.

Les modalités pratiques

Nous allons décliner ci-dessous une forme opérationnelle de la Caisse de Sécurité Économique et Sociale, car il s’agit d’une réforme concrètement applicable sous forme d’une loi. Il ne s’agit pas de simples déclarations théoriques, mais de vastes projets précis et pratiques, avec une forme juridique et économique définie. Diverses variantes des modalités pratiques proposées ci-dessous sont donc possibles.

La Caisse comprend des caisses départementales, régionales, et une nationale comme la Sécurité sociale actuelle, dont elle est une extension du principe. L’ensemble forme la Caisse de Sécurité Économique et Sociale.

  1. Les droits et obligations de l’assuré

  • Chacun, à sa sortie de sa formation initiale, s’il exprime le souhait d’occuper un emploi, est automatiquement affecté à la caisse de son département d’habitation, et signe un contrat de travail avec cette caisse.
  • La signature du contrat entre le travailleur et sa caisse de rattachement engage les deux parties. Par ce contrat, l’assuré (sur le plan social comme économique) exprime son souhait d’occuper un emploi et son acceptation de mettre sa qualification (en tant que redevable de l’investissement de la société dans sa formation) au service d’une communauté de travail, dans des conditions d’acceptation définies par la loi. En contrepartie la caisse lui est redevable d’une rémunération de 80 % du salaire correspondant à sa qualification dans sa convention collective de rattachement, si la caisse n’est pas en mesure de lui faire des propositions conformes aux conditions d’acceptations définies par la loi.
    Selon le code du travail, le salaire d’un salarié rémunère le temps de mise à disposition et non le travail fourni. Le salarié étant, au cours de sa vie active, soit à disposition de la caisse, soit à disposition d’un employeur, il est donc rémunéré par l’un ou l’autre respectivement. Il s’agit donc d’une extension du droit existant, une forme « d’extension du salariat tout au long de la vie ». À la situation de « privé d’emploi » (chômeur) se substitue donc un nouveau statut de « salarié disponible ».
  • En vertu du « droit à l’emploi pour tous », la caisse doit proposer un emploi correspondant à la qualification de l’assuré. Ce n’est donc pas à l’assuré de chercher un emploi, mais il lui est également possible de solliciter directement des employeurs.
  • L’assuré est sous contrat avec sa caisse de rattachement qui est son employeur de droit. Le statut de l’assuré qui occupe un emploi dans une communauté de travail est celui de «mise à disposition» au sens du code du travail.
  • Un salaire net de tout prélèvement est versé par l’employeur au salarié. Il ne peut être inférieur au minimum fixé par la convention collective pour le niveau de qualification de l’assuré, conformément au code du travail. Dans le cas d’une mise à disposition à durée déterminée, il est majoré de 20 %.
  • Nul n’est contraint de signer de contrat avec sa caisse de rattachement, et ce contrat est résiliable par les deux parties. Dans ce cas, les parties ne sont plus tenues à leurs obligations contractuelles respectives.
  • Chacun bénéficie d’une qualification mais nul n’est contraint en retour de mettre cette qualification au service d’une communauté de travail. Ainsi, en sortant de formation initiale, ou à n’importe quelle période de la vie active, chacun peut décider de ne plus mettre sa qualification au service d’une communauté de travail, par exemple pour élever des enfants. Dans ce cas, le contrat avec la caisse est rompu. Un nouveau contrat peut prendre effet à tout moment à l’initiative de l’intéressé (e).
  • La caisse peut également mettre fin au contrat si les obligations du bénéficiaire ne sont pas respectées, dans des conditions définies par la loi.
  • En cas de privation de liberté pour motif judiciaire, le contrat est suspendu, et reprend en fin de peine. Ainsi, toute personne privée de liberté à la garantie de pouvoir subvenir à ses besoins en sortant de détention, comme tout citoyen. Cette disposition contribue à diminuer à la source la troisième forme d’insécurité, l’insécurité des personnes et des biens.
  • Le contrat est maintenu lors de la cessation définitive d’activité, le bénéficiaire étant dispensé de ses obligations de mise à disposition de communautés de travail. Des cessations d’activité progressive (diminution progressive de temps de travail) peuvent être mise en œuvre dans des conditions définie par la loi, la caisse assurant le maintien de la rémunération.
    La caisse étant employeur de droit, le salarié bénéficie des droits attachés au contrat de travail : il bénéficie en particulier, y compris pendant les périodes où il est rémunéré par la caisse, du droit à la formation, du droit aux activités culturelles et sportives du comité d’établissement de sa caisse de rattachement. Ces droits sont ainsi étendus à l’ensemble du salariat, qu’il occupe un emploi ou non.
    Ces droits deviennent ainsi attachés à la personne tout au long de sa vie, et forment le nouveau statut des salariés tel que revendiqué par la CGT.
  • Le contrat stipule la durée hebdomadaire pendant laquelle le bénéficiaire souhaite mettre sa qualification au service d’une communauté de travail (temps plein ou temps partiel). La rémunération de 75 % correspond à cette durée au taux horaire conventionnel (par exemple elle est de moitié pour un souhait de mi temps).
  • Un travailleur qui ne souhaite pas mettre sa qualification au service d’une communauté de travail ne bénéficie pas des prestations de la Caisse de Sécurité Économique. Il peut selon ses souhaits :
    – ne pas avoir d’activité rémunérée s’il dispose d’autres moyens d’existence.
    – mettre sa qualification au service d’un employeur de droit public et avoir donc le statut de fonctionnaire, c’est à dire bénéficier également de la sécurité économique.
    – avoir une activité indépendante, sans être relié par contrat de travail à un employeur quelconque.
  1. Les travailleurs non salariés

Dans le cas d’une activité indépendante, les revenus sont issus de la vente de produits ou de prestations de service. Il s’agit donc également d’une activité à risque (l’insécurité commerciale), et ces travailleurs, chefs d’entreprises non salariés, artisans, commerçants, artistes, travailleurs indépendants de toute nature, doivent également bénéficier d’une sécurité économique, et la création d’activité de ce type doit être encouragée dans l’intérêt général.

Tout travailleur exerçant une activité indépendante, s’il estime qu’elle ne lui permet pas d’assurer ses moyens d’existence, peut redevenir assuré, à temps plein ou à temps partiel, dès qu’il en exprime le souhait.

Si un travailleur souhaite créer ou reprendre une activité indépendante, il peut recevoir, sous réserve d’acceptation de la caisse, un revenu temporaire de 75 % du salaire correspondant à sa qualification, pendant la période de mise en place de son activité, avec un maximum de deux ans. Il est alors en quelque sorte « mis à la disposition de lui même » par la caisse, en tant que travailleur indépendant qui est son propre employeur.

  1. Les droits et obligations des employeurs

Rappelons que « l’employeur » est ici une communauté de travail, suite à la socialisation progressive.

Dans le cas d’une mise à disposition à durée indéterminée, la mise à disposition est subordonnée à l’accord des deux parties (l’employeur et l’assuré).

Dans le cas d’une mise à disposition à durée déterminée, sur demande d’un employeur, l’assuré affecté à l’emploi l’est par la caisse, en respect des conditions d’acceptation définies par la loi.

  • Un salaire net de tout prélèvement est versé par l’employeur au salarié. Il ne peut être inférieur au minimum fixé par la convention collective pour le niveau de qualification de l’assuré, conformément au code du travail. Dans le cas d’une mise à disposition temporaire, il est majoré de 20 %.
  • En cas de difficultés économiques (baisse prolongée de commandes, interruption d’activité pour force majeure…), l’employeur peut diminuer le temps de travail. Dans ce cas, sous réserve d’acceptation par la caisse, l’employeur verse le salaire correspondant au temps de travail réalisé aux salariés, qui reçoivent le complément de la caisse.
    Ces dispositions permettent une sécurisation de l’activité économique pour les employeurs, elles facilitent l’adaptation aux variations d’activité, elles facilitent l’embauche et limitent le recours aux suppressions d’effectif (celles ci n’étant plus que des « remises à disposition de la caisse », et non des licenciements, puisque la caisse est employeur de droit). Les licenciements sont donc de fait supprimés.
  • L’employeur est responsable de sa gestion et de ses investissements. Par la mise en œuvre de la loi sur la«socialisation progressive», les communautés de travail deviennent progressivement leur propre employeur, en proportions variables avec les autres parties prenantes.
  • Il peut être mis fin à une mise à disposition à durée indéterminée, ou de manière anticipée pour une mise à disposition à durée déterminée, dans des conditions définies par le code du travail. La caisse assure à l’assuré la continuité du contrat de travail et une rémunération de 80 % au minimum de son ancien salaire.
    Cette différence, fixée ici à 20 % (pour une même qualification), entre le revenu d’un salarié disponible et celui d’un salarié qui contribue effectivement à une communauté de travail, est déterminée par la loi, selon ce que la société estime être une juste reconnaissance d’une contribution effective à une communauté de travail par rapport à une disponibilité.
  • Les employeurs sont responsabilisés collectivement. La cotisation forfaitaire des employeurs du département diminue s’ils augmentent leurs effectifs, et augmente à l’inverse s’ils diminuent leurs effectifs. En effet, la contribution forfaitaire est une contribution d’équilibre au niveau de la caisse départementale, c’est à dire que les contributions des employeurs du département couvrent les dépenses de rémunération des salariés disponibles du département. Une péréquation est assurée par les caisses régionales et par la caisse nationale pour compenser les inégalités de territoires. La contribution forfaitaire est majorée en cas de recours à des mises à disposition à durée déterminée.
  • Les caisses sont dirigées par des représentants élus des salariés, élus sur listes syndicales, qui disposent d’une majorité de sièges aux conseils d’administration des caisses. Des représentants des collectivités et des employeurs sont également associés à la gestion des caisses.
  1. Le financement de la Caisse

Dans le salariat, la cotisation est du salaire socialisé. Dans la République sociale, les travailleurs sont des producteurs associés. La cotisation devient donc de la production socialisée, et non du salaire socialisé.

L’employeur verse à la Caisse de Sécurité sociale et économique une cotisation forfaitaire, proportionnelle dans son principe à la Valeur Ajoutée réalisée (chiffre d’affaires moins consommations intermédiaires), en lieu et place des cotisations salariales et patronales actuelles assises sur les salaires individuels. Cette cotisation est donc proportionnelle à l’activité, ce qui limite fortement l’insécurité liée à la contribution fixe actuelle.

Cette cotisation forfaitaire est de 30 % de la valeur ajoutée brute environ (taux effectif actuel), soit 35,5% de la valeur ajoutée nette.
Plus précisément, les cotisations des entreprises seraient basées sur la double assiette, la valeur ajoutée nette (c’est-à-dire les richesses produites) et les profits non réinvestis dans l’appareil productif (L’intérêt de cette double assiette est de pouvoir avoir un taux élevé sur la part des profits non réinvestis dans l’appareil productif sans pénaliser l’investissement productif). Cette cotisation forfaitaire sur la VAN est aussi infiniment plus simple que le système actuel qui a une multitude de taux. (2)À noter que la commission économie du PCF est opposée à l’assiette Valeur ajoutée, celle-ci étant censée inciter à des externalisations.
Au contraire, c’est le système actuel qui pousse à l’externalisation, car externaliser un salarié c’est aujourd’hui externaliser les « charges sociales » (assises sur les salaires) en même temps. Plus fondamentalement, cette opposition est l’expression d’un attachement au « salaire socialisé », c’est-à-dire au salariat, le salariat étant devenu « indépassable » idéologiquement à gauche suite au tabou de la propriété.

Les dépenses supplémentaires nécessaires pour assurer « La garantie donnée à chacun en toutes circonstances » d’une rémunération de 80 % de celle correspondant à son niveau de qualification est de moins de 2% de la Valeur Ajoutée dans l’hypothèse de la situation de l’emploi actuelle. La plus grande partie de cette dépense proviendrait de la garantie de rémunération pour les moins de 30 ans, qui sont fortement touchés par la précarité et mal indemnisés aujourd’hui. Contrairement à ce qu’il peut sembler au premier abord, le financement d’une garantie de revenu pour tous n’est pas une difficulté majeure, d’autant plus qu’elle peut être mise en place progressivement, et que l’impact positif sur l’emploi de la Caisse de Sécurité Économique diminuera les dépenses de la caisse tout en augmentant ses recettes.

De même, le maintien des rémunérations en cas de baisse du temps de travail suite à une baisse d’activité ne pose pas de problème de financement majeur : au plus fort du ralentissement économique, en 2009, les dépenses pour le chômage partiel se sont élevées à moins de 400 millions d’euros en France, et 4,6 Mds € en Allemagne, ou ce système existe déjà de manière généralisée. Cela aurait représenté au maximum en France 0,3 % de la valeur ajoutée, en 2009 dans une situation exceptionnelle, c’est-à- dire que l’impact moyen de cette disposition sur le besoin de financement de la Caisse de Sécurité Économique est marginal. La suppression de la précarité pour les moins de 30 ans représente le besoin principal de financement.

  1. La contribution des caisses de Sécurité Économique et Sociale à la Socialisation des entreprises

La mise en place initiale du fonds de roulement (Fonds propres) des caisses est assurée par un prélèvement exceptionnel sur la trésorerie des grandes entreprises. En effet, le taux d’autofinancement des entreprises du CAC 40 est de 120 % et leur trésorerie s’élève à ce jour à 170 milliards d’euros, ce qui leur permet cette avance. En revanche, le taux d’autofinancement des PME n’est que de 50 %.

Ce capital est ensuite en partie réinvesti sous forme d’augmentation de capital dans ces entreprises, ce qui assure aux caisses la propriété d’une part du capital, et la restitution à ces entreprises de la trésorerie prélevée par cette opération comptable.

Les représentants des caisses exercent leur droit de vote correspondant en assemblée générale des actionnaires, et sont représentées au conseil d’administration le cas échéant.

Les caisses, dotées du statut d’établissement bancaire, peuvent utiliser l’effet de levier bancaire à partir de leurs fonds propres, et investir leurs fonds en apportant des fonds propres aux entreprises selon la politique décidée par les caisses. Elles peuvent également accorder des prêts aux entreprises de leur territoire.

Comme les caisses sont financées par la cotisation, il n’y a pas de risque de défaillance de caisse comme pour un système par capitalisation. Il s’agit d’un système de financement mutualisé : seule une faillite généralisée et soudaine de tout le système de production pourrait entraîner la faillite de la Caisse. Une éventuelle baisse importante de la bourse serait sans incidence pour la caisse : elle se traduirait par une baisse de la valeur de marché des actions détenues, mais celles-ci serait purement comptable car ces actions ne sont pas destinées à être revendues (à l’image des actions détenues par les entreprises, qui n’entraînent de moins-value ou de plus-value qu’en cas de revente).

Par l’ensemble de ces leviers, les caisses, organisations collectives représentatives des salariés, contribuent, avec les salariés des entreprises et les Pouvoirs publics, à la socialisation de l’économie.

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 En moyenne, quand 10 € vont aux salaires super-bruts, 2 vont aux amortissements, 1 à l’investissement, 1 en profit non réinvestis. La valeur ajoutée nette est de 14 moins 2.
2 À noter que la commission économie du PCF est opposée à l’assiette Valeur ajoutée, celle-ci étant censée inciter à des externalisations.
Au contraire, c’est le système actuel qui pousse à l’externalisation, car externaliser un salarié c’est aujourd’hui externaliser les « charges sociales » (assises sur les salaires) en même temps. Plus fondamentalement, cette opposition est l’expression d’un attachement au « salaire socialisé », c’est-à-dire au salariat, le salariat étant devenu « indépassable » idéologiquement à gauche suite au tabou de la propriété.