La casse du siècle, Pierre-André Juven, Frédéric Pierru, Fanny Vincent, éditions Raison d’Agir

Les éditions Raisons d’Agir viennent de mettre en téléchargement gratuit cet ouvrage. Et ce, pour contribuer à la réflexion sur le système de santé et pour manifester son soutien au service public.

On ne peut que féliciter cette maison d’édition pour cette démarche et les auteurs pour la qualité du travail argumenté et fourni.

Pour présenter ce livre donnons la parole à leurs auteurs : « Ce livre entend offrir une lecture historique et sociologique de la “crise hospitalière”. Cela à partir d’enquêtes empiriques au long cours, essentiellement quantitatives, voire ethnographiques, menées séparément par les 3 auteurs, par des entrées différentes (le financement de l’hôpital, l’organisation et les conditions de travail des soignants, les réformes de l’administration hospitalière ou encore l’impact des instruments de gestion sur les prises en charge), mais aussi à partir des travaux de sciences sociales qui tendent à se multiplier sur le sujet depuis une quinzaine d’années. »

Défenseurs du service public de santé, les auteurs resituent la casse de l’hôpital public dans un cadre qui aborde les problématiques en amont et en aval (virage ambulatoire, médecine de ville, déserts médicaux…). Le tout sans défendre le statu quo des élites mandarinales :

« Notre thèse est la suivante : l’analyse sociologique et historique des réformes hospitalières montre que la domination gestionnaire et austéritaire a tout autant conduit à cette situation de “crise” des hôpitaux que la domination mandarinale et de l’idéologie du “tout hôpital”. »

Après avoir abordé la construction historique de l’hôpital public en France, décrit les dégâts de la rationalisation du travail, pointé les illusions de l’autonomie des établissements et de la technophilie hospitalière, les auteurs nous éclairent sur les mobilisations qui s’intensifient malgré toutes les difficultés. La conclusion à propos d’ « UNE POLITIQUE À INVENTER » ouvre des pistes de contenus revendicatifs et de transformation de l’hôpital public.

Les militants engagés dans les luttes pour la défense des services publics seront frappés par la convergence des problématiques. Encore une fois citons les auteurs :

« À ce titre, l’Hôpital tout comme l’École, et donc leur personnel, connaissent les mêmes tourments : ils ploient sous le poids des attentes sociales et des exigences politiques, chargés qu’ils sont de résoudre la plus grande partie des maux d’une société secouée par la montée des inégalités. » Ce qui est dit là pour l’Hôpital et l’École, peut se décliner dans bien d’autres services publics.

Nous avons beaucoup de réflexions à notre disposition encore faut-il les connaitre, les confronter et collectivement décider des priorités.

« Les forces progressistes disposent d’une quantité de propositions et de réflexions. Tout bien pesé, le problème est plus politique qu’intellectuel : la santé doit enfin devenir un enjeu politique ».

Ce livre, accessible à toutes et tous, pourrait aussi servir de base à des formations syndicales interprofessionnelles, à des sessions d’éducation populaire ancrées dans des territoires en lutte pour défendre l’hôpital, la maternité du coin et au-delà… Car si les mobilisations professionnelles ou territoriales ont bien lieu, il nous reste à construire un TOUS ENSEMBLE ET EN MÊME TEMPS pour construire un service public de santé à la hauteur des besoins des usagers que nous sommes tous et toutes ! Sans se tromper d’objectif :

« Être radical, au sens étymologique, supposerait de remonter à l’amont de l’amont et d’admettre une bonne fois pour toutes que si l’hôpital peut soigner beaucoup de choses, il ne peut en revanche guérir les maux du capitalisme. »