Morceaux choisis de Jean Jaurès

« Je me préoccupais surtout d’introduire jusque dans la société d’aujourd’hui des formes nouvelles de propriété, à la fois nationales et syndicales, communistes et prolétariennes, qui fissent peu à peu éclater les cadres du capitalisme. C’est dans cet esprit que lorsque la Verrerie ouvrière fut fondée, je pris délibérément parti contre les amis de Guesde, qui, dans les réunions préparatoires tenues à Paris, voulaient la réduire à n’être qu’une verrerie aux verriers, simple contrefaçon ouvrière de l’usine capitaliste. Je soutins de toutes mes forces ceux qui voulurent en faire et qui en ont fait la propriété commune de toutes les organisations ouvrières, créant ainsi le type de propriété qui se rapproche le plus, dans la société d’aujourd’hui, du communisme prolétarien. J’étais donc toujours dirigé par ce que Marx a nommé magnifiquement l’évolution révolutionnaire. Elle consiste, selon moi, à introduire dans la société d’aujourd’hui des formes de propriété qui la démentent et qui la dépassent, qui annoncent et préparent la société nouvelle, et par leur force organique hâtent la dissolution du monde ancien. Les réformes ne sont pas des adoucissants : elles sont, elles doivent être des préparations. »
Jean Jaurès, République et socialisme ; 17 octobre 1901.

« L’histoire démontre que des formes diverses et même contradictoires ont souvent coexisté : longtemps la production corporative et la production capitaliste ont fonctionné côte à côte : tout le XVIIe et tout le XVIIIe siècles sont faits du mélange des deux, et longtemps aussi le travail libre agricole et le servage avaient coexisté. Et je suis convaincu que dans l’évolution révolutionnaire qui nous conduira au communisme, la propriété collectiviste et la propriété individuelle, le communisme et le capitalisme seront longtemps juxtaposés. C’est la loi même des grandes transformations. »
Jean Jaurès, Question de méthode, 17 novembre 1901.

« Et c’est parce que le socialisme apparaît comme seul capable de résoudre cette contradiction fondamentale de la société présente, c’est parce que le socialisme proclame que la République politique doit aboutir à la République sociale, c’est parce qu’il veut que la République soit affirmée dans l’atelier comme elle est affirmée ici, c’est parce qu’il veut que la nation soit souveraine dans l’ordre économique pour briser les privilèges du capitalisme oisif, comme elle est souveraine dans l’ordre politique, c’est pour cela que le socialisme sort du mouvement républicain…  »
Jean Jaurès,discours du 21/11/1893.

Morceaux choisis de Jean Jaurès exhumés par Bernard Teper