Nous reprenons ici l’introduction de l’article « L’ABC de la dette contre les peuples », la suite est à découvrir sur le site Internet du CADTM (Comité pour l’abolition des dettes illégitimes).
La Grèce des années 2010 montre comment un pays et un peuple peuvent être privés de liberté à cause du remboursement d’une dette clairement illégitime. Depuis le 19esiècle, de l’Amérique latine à la Chine en passant par Haïti, la Grèce, la Tunisie, l’Égypte et l’Empire ottoman, la dette publique a été utilisée comme arme de domination et de spoliation (Toussaint, 2017). Au bout du compte, c’est la combinaison de l’endettement et du libre-échange qui constitue le facteur fondamental de la subordination d’économies entières à partir du XIXe siècle. Les classes dominantes locales se sont associées aux grandes puissances financières étrangères pour soumettre leur pays et leur peuple à un mécanisme de transfert permanent de richesses des producteurs locaux vers les créanciers qu’ils soient nationaux ou étrangers.
Contrairement à l’idée reçue, ce ne sont généralement pas les pays endettés périphériques qui provoquent les crises de la dette souveraine. Ces crises éclatent d’abord dans les pays capitalistes les plus puissants ou sont le résultat de leurs décisions unilatérales qui entraînent par ricochets des crises de grande ampleur dans les pays périphériques endettés. Ce n’est pas l’excès de dépenses publiques qui amène la dette à des niveaux insoutenables, mais plutôt les conditions imposées par les créanciers locaux et étrangers. Les taux d’intérêt réels étaient abusivement élevés et les commissions prélevées par les banquiers étaient particulièrement élevées. La conséquence était évidente : les pays qui s’endettaient n’étaient pas en mesure de rembourser leurs dettes. Ils devaient constamment recourir à de nouveaux emprunts pour rembourser les anciens. Et quand ils n’y arrivaient pas, les puissances créancières avaient le droit de recourir à une intervention militaire pour se faire rembourser.
Les crises de la dette et leur dénouement sont toujours pilotés par l’action de grandes banques des principales puissances économiques et par les gouvernements qui les soutiennent.
Au cours des deux derniers siècles, plusieurs États ont répudié avec succès des dettes en arguant qu’elles étaient illégitimes ou odieuses. C’est le cas du Mexique, des États-Unis, de Cuba, de la Russie, de la Chine ou du Costa Rica. Les conflits autour du paiement de la dette ont donné lieu à l’élaboration de la doctrine juridique de la dette odieuse qui est toujours d’actualité.
C’est la combinaison de l’endettement et du libre-échange qui constitue le facteur fondamental de la subordination d’économies entières à partir du XIXe siècle.