Deux films sur le conflit israélo-palestinien

A voir, l’un sur grand écran et l’autre chez vous.

En France le film documentaire a de plus en plus de public. A commencer dans le milieu cinéphilique. Des festivals entièrement consacrés aux documentaires comme ceux de Lussas, de Marseille et le Cinéma du Réel de Paris ont joué un rôle important dans la multiplication d’événements de ce type à travers l’hexagone.
Les tensions internationales comme celles du Moyen-Orient ont amené les cinéastes à apporter leurs témoignages, leurs prises de position. C’est le cas avec deux films qui en ce début d’année 2013 se sont vus « nominés » aux Oscars d’Hollywood et qui abordaient de deux manières différentes le conflit israélo-arabe. Même s’ils n’ont pas emporté la célèbre statuette dans leur catégorie, on a beaucoup parlé d’eux.

1/ Primé au Festival International de la Production Audiovisuelle (le FIPA) de Biarritz de cette année en tant que reportage, The Gatekeepers est constitué des ix entretiens d’anciens responsables du Shin Beth, le service de renseignement et d’action d’Israël. Dror Moreh, réalisateur israélien de ce film, sans faire un réquisitoire montre la convergence de ces hommes qui font chacun de leur côté un bilan négatif de leur action.Le recrutement d’indicateurs, les interrogatoires, la torture, les frappes ciblées et les dommages collatéraux: depuis plus de 30 ans, Israël s’emploie à renforcer sa sécurité par des méthodes suscitant toujours plus de haine et de vengeance.
Un événement a marqué ces six hommes : l’assassinat du premier ministre Itzhak Rabin en 1995. Il révèle non seulement le laxisme des autorités face à l’extrémisme juif mais tue littéralement leur seul espoir de paix. « Nous sommes devenus cruels envers la population que nous contrôlons sous prétexte de lutter contre le terrorisme », affirme l’un d’eux.
Et pour ces anciens du Shin Beth, Itzhak Rabin aura été le seul des premiers ministres israéliens à s’intéresser au peuple palestinien et à envisager véritablement la mise en place d’un Etat à part entière.

2/ L’autre film, Cinq Caméras brisées, est très original de par sa forme et sa co-réalisation. Avant tout il y a cette somme d’images du célèbre village de Bil’in de la Cisjordanie occupée, proche de Ramallah, qu’un jeune Palestinien, Emad Burnat passionné de vidéo a engrangé tout au long de cinq années passant des vidéos familiales à une relation cinématographique de la vie de son village. Car Bil’in a été le lieu privilégié d’une lutte non violente contre l’occupation israélienne et contre la politique de séparation entre Israéliens et Palestiniens au moyen de murs sophistiqués et accapareurs de parts de territoires du futur Etat de Palestine.
D’où une coréalisation déjà rendue nécessaire par le fait qu’il fallait filmer Emad dans sa vie à la fois familiale et de chroniqueur permanent de cette lutte non-violente, toujours au premier rang, aux côtés de ceux de Bil’in qui seront souvent blessés et parfois tués par les forces de répression israéliennes avec leurs gaz lacrymogènes, balles en caoutchouc et aussi réelles tirées par les jeunes recrues israéliennes. Ce fut l’un des rôles de Guy Davidi, cinéaste israélien qui travailla aussi aux côtés d’Emad pour monter ce film qui s’impose pour ses qualités cinématographiques. Pas étonnant qu’il ait reçu rapidement des prix dans des festivals à travers le monde comme ceux de Sundance aux USA et d’Amsterdam et de se retrouver nominés dans la finale des Oscars de cette année avec le film de Dror Moreh.

On peut encore voir les Cinq Caméras brisées à Paris dans des salles comme l’Espace Saint-Michel ou la Clef et dans des salles de l’Hexagone. Alors ne manquez pas ce film en salles et aussi le DVD de The Gatekeepers qui, lui déjà diffusé sur ARTE, sortira prochainement dans le commerce. Mais il faudra un peu de patience pour ce dernier.

NOTE

  • Pour The Gatekeepers de Dror Moreh, il faut aller sur le site d’ARTE. Fr et sur VOD.Arte. L’annonce de la possibilité de revoir ce documentaire, annoncée prochainement, vous précise que vous serez averti sur votre adresse mail. Un DVD devrait être ensuite mis en vente par ARTE.
  • Cinq caméras brisées, film coréalisé par Emad Burnat et Guy Davidi, est sorti en France le mercredi 20 février 2013en partenariat avec Le Monde, Courrier international, Le blog documentaire,Le Monde libertaire. Et avec le soutien des organisations suivantes : AFPS (Association France Palestine Solidarité), Attac, CVPR-PO (Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche Orient), FIDH, LDH, Plateforme des ONG pour la Palestine, UJFP (Union Juive Française pour la Paix). Pour la diffusion dans les salles du film, prendre contact avec Philippe Hagué (Zeugma Films) : philippe.hague@gmail.com