Après la censure du gouvernement Barnier, la meilleure chose qui pourrait nous arriver est que Macron démissionne

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Macron est le pire président de la 5e République. Son intensification de la politique antisociale, son mépris de classe, sa préparation méticuleuse du développement du Rassemblement National, son action ciblée d’agent du capital, son action de pervers narcissique ont fait reculer la France dans la plupart des compartiments de la politique. Il a intensifié la destruction des points forts du pays et augmenté le nombre de nouvelles faiblesses. Les seuls qui vivent mieux sont ceux qui ont vu tripler leurs dividendes.

Combattre les fausses bonnes idées

Poussée du RN aux Européennes, dissolution tactique de Macron, tripartition sans majorité, tout était prêt pour la censure du gouvernement. La pseudo-habilité du « ni de droite ni de gauche », ou du « on prend ce qui est bon dans la droite et dans la gauche » ou « l’extrême centre contre les extrêmes » ne sont que des discours nihilistes, vides de sens. La société du spectacle ne peut faire illusion que pour une période limitée. 

Tous les conflits sociaux se terminent par la gauche contre l’union de toutes les droites. C’est la loi des conflits sociaux. C’est comme la loi de la gravitation. On ne peut y échapper sur le temps long. « L’extrême centre contre les extrêmes » ne peut pas fonctionner sur le temps long. Ni le Directoire, ni Napoléon III, ni Giscard, ni Macron, ni personne. Merci à Pierre Serna(1)« L’extrême centre ou le poison français » (1789-2019), de Pierre Serna · ReSPUBLICA. et Alain Deneault(2)Vidéos Bing.. Tout simplement parce que c’est un matériau instable dont l’incohérence se voit de plus en plus. Et quand en plus, on est en tripartition sans majorité possible, chaque élément gère des publics contradictoires ou trop peu nombreux.

L’extrême centre dans l’histoire, c’est l’appel au bon sens jamais précisé, c’est le girouettisme qui finit par éclater et enfin c’est un illibéralisme autoritaire. Trois états qui poussent à une fin crépusculaire. Le RN, quant à lui, doit gérer les voix populaires acquises tout en étant conciliant avec le capital qu’il se dispute à l’extrême centre. C’est comme si on était assis sur deux chaises qui s’écartent inexorablement.

Quant à la gauche NFP, pour l’instant, elle n’est soutenue que par 14 à 15 % de la classe populaire ouvrière et employée (soit 21 % des votants donc, pour un score de 28 % des votants toutes classes confondues le 30 juin 2024). Et nous rappelons, car répéter c’est enseigner, que cette classe populaire pèse 45 % de la population active. La gauche NFP n’a pas encore suffisamment engagé une politique d’unification de la classe populaire. On peut donc dire en paraphrasant Bernie Sanders – quand il analysait la défaite du Parti démocrate américain le 5 novembre dernier – que si la gauche oublie la classe populaire, la classe populaire oubliera la gauche(3)Voir notre précédent article https://www.gaucherepublicaine.org/respublica-idees/respublica-debats-politiques/quand-ce-qui-sappelle-la-gauche-abandonne-la-classe-populaire-le-resultat-est-clair-la-classe-populaire-abandonne-la-gauche/7436810.. C’est la raison principale de la poussée de l’illibéralisme autoritaire dans le monde entier.

Oui, l’objectif d’une gauche de gauche(4)Une gauche de gauche n’est ni une gauche de la gauche ni une extrême gauche. C’est une gauche unifiée, qui est vraiment de gauche. C’est celle qui, au pouvoir, réalise les projets qu’elle a soumis aux électeurs. C’est une gauche critique, anticapitaliste, capable d’unifier la classe populaire ouvrière et employée qui, alliée dans un bloc historique populaire avec toutes les couches sociales intermédiaires, prépare l’émancipation intégrale des travailleurs et de leurs familles au sein d’un processus de République sociale.doit se développer.

La gauche a deux maladies, celle de l’alignement capitaliste néolibéral et ordolibéral et celle de l’abandon du primat de la question sociale pour s’abandonner aux politiques identitaires.

D’autant, et il faut le répéter, qu’il n’y a pas de droitisation dans la société. Si vous n’en êtes pas persuadés, nous vous recommandons de lire les études de Vincent Tiberj(5)Vidéos Bing. ou de Peter Turchin(6)Lire le livre « Le chaos qui vient. Elites, contre-élites, et la voie de la désintégration politique » au Cherche Midi.. La droitisation est celle du champ politique et donc des élites politiques. Ce sont bien les échecs cumulés des différentes gauches qui sont la cause du déport d’une partie de la classe populaire vers l’abstention et d’une autre partie vers l’illibéralisme autoritaire (Trump, RN, Meloni, Orban, etc.). Oui, la gauche a deux maladies, celle de l’alignement capitaliste néolibéral et ordolibéral et celle de l’abandon du primat de la question sociale pour s’abandonner aux politiques identitaires.

Et, nous le dirons jamais assez, les politiques identitaires à gauche, cela devient un néolibéralisme progressiste. C’est pourquoi ces politiques ont été déployées par le grand capital lui-même (le wokisme de l’Ivy League – groupe de huit grandes universités privées du Nord-Est des États-Unis financées par le grand capital –, les nominations et les financements publics en France, etc.).  

Oui, l’appel à l’unité de la gauche est indispensable, mais seulement si elle est liée à la lutte contre les deux maladies précitées, qui sont les deux principales causes de division. Oui, il faut une campagne contre-hégémonique, mais seulement si elle est liée à autre chose qu’une simple juxtaposition de propositions programmatiques. Disons-le tout net, le Front populaire, le vrai, celui de 1936, n’avait pratiquement pas de programme sauf la dissolution des ligues factieuses. Cela ne l’a pas empêché d’améliorer sérieusement la situation de la classe populaire grâce à la clarté de sa double besogne(7)Depuis la charte d’Amiens de 1906 de la CGT et dans la pensée de Jean Jaurès, la double besogne consiste en l’articulation des revendications immédiates avec le modèle politique souhaité qui engagera l’émancipation intégrale. et du mouvement social qui l’a épousé avec une ligne stratégique efficace dans sa corbeille de mariés. C’est cela qui compte dans l’histoire, la réalité de la double besogne. C’est la double besogne qui peut devenir désirable et convaincante pour la classe populaire.

Après la censure, penser la quadruple crise

L’appauvrissement du plus grand nombre, l’enrichissement d’une poignée d’ultra-riches, la tentative de dictature médiatique qui passe son temps à nous fabriquer des débats entre des gens qui pensent le même fond politique, une « élite politique » qui veut tout changer pour que rien ne change, ça suffit !

Dans ces moments, le respect de l’autre, le travail de refondation vers l’unité de la classe populaire est indispensable.

Une quadruple crise a été ouverte par le deuxième renversement du gouvernement de la 5e République, crise économique, crise politique, crise de régime, crise institutionnelle. Avec la dissolution et le gouvernement Macron-Barnier-RN, l’histoire s’accélère. Dans ces moments, le respect de l’autre, le travail de refondation vers l’unité de la classe populaire est indispensable. Ainsi, un bloc historique populaire alliant principalement la classe populaire et les couches moyennes intermédiaires, pourrait se constituer contre le bloc bourgeois pour aller vers la seule majorité possible, la majorité absolue pour une autre politique.

Mais Emmanuel Macron nous a fait savoir qu’il ne souhaitait pas démissionner. Il va donc se cramponner au pouvoir contre l’avis majoritaire du peuple. Il va tenter d’utiliser toutes les possibilités illibérales de la Constitution de la 5e République. Même l’article 16 est actuellement en débat chez les constitutionnalistes, c’est tout dire ! En attendant, il essaye par tous les moyens de casser l’unité du NFP, ce qui était déjà son objectif lors de la dissolution du 9 juin 2024. Il invite le PS à discuter, mais pas les autres partis du NFP. Nous devons résister à cette tentative de dislocation de l’unité du NFP. Voilà notre tâche : maintenir l’unité du NFP, mais débattre en son sein pour en modifier la ligne stratégique, pour enfin rassembler la classe populaire ouvrière et employée.

Préparer la suite politique

Comme la dictature du court terme domine les discours de gauche actuellement, avec les succès que l’on sait, nous prenons le parti de la double besogne en alliant les revendications immédiates (par exemple l’abrogation de la loi sur les retraites, l’augmentation des salaires et des cotisations sociales) avec le projet de modèle politique désirable. Nous continuerons notre causerie la semaine prochaine afin de montrer que le point de passage nécessaire pour l’avenir politique d’une gauche de gauche reste son entrée dans un processus d’extension de la République sociale. Nous serons aidés des pensées d’Antonio Gramsci et de Yohann Douet, auteur de « L’hégémonie et la révolution — Gramsci penseur politique » paru en 2023 aux Editions Amsterdam. Mais aussi de Bruno Leipold, professeur de théorie politique à la London School of Economics and political Science, qui réactualise le couple productif de la pensée de Karl Marx d’une part et de la tradition politique républicaine et des théories de la démocratie populaire d’autre part.

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 « L’extrême centre ou le poison français » (1789-2019), de Pierre Serna · ReSPUBLICA.
2 Vidéos Bing.
3 Voir notre précédent article https://www.gaucherepublicaine.org/respublica-idees/respublica-debats-politiques/quand-ce-qui-sappelle-la-gauche-abandonne-la-classe-populaire-le-resultat-est-clair-la-classe-populaire-abandonne-la-gauche/7436810.
4 Une gauche de gauche n’est ni une gauche de la gauche ni une extrême gauche. C’est une gauche unifiée, qui est vraiment de gauche. C’est celle qui, au pouvoir, réalise les projets qu’elle a soumis aux électeurs. C’est une gauche critique, anticapitaliste, capable d’unifier la classe populaire ouvrière et employée qui, alliée dans un bloc historique populaire avec toutes les couches sociales intermédiaires, prépare l’émancipation intégrale des travailleurs et de leurs familles au sein d’un processus de République sociale.
5 Vidéos Bing.
6 Lire le livre « Le chaos qui vient. Elites, contre-élites, et la voie de la désintégration politique » au Cherche Midi.
7 Depuis la charte d’Amiens de 1906 de la CGT et dans la pensée de Jean Jaurès, la double besogne consiste en l’articulation des revendications immédiates avec le modèle politique souhaité qui engagera l’émancipation intégrale.