Des nouvelles politiques de l’Indopacifique

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Illustration du XIXème siècle du personnage Sun Wukong, héros principal du roman La Pérégrination vers l'Ouest de Wu Cheng'en.

ReSPUBLICA a déjà publié un premier article sur l’élection présidentielle intitulé « Comment les médias dominants manipulent les résultats électoraux de Taïwan ? ». Vous aurez la suite dans l’article ci-dessous. Mais avant, nous souhaitons commencer par vous donner quelques éléments de l’importance géostratégique de cette portion du monde largement sous-commentée par les occidentaux-centrés.

Importance stratégique de la zone indopacifique

Cette portion du monde est composée de deux sous-ensembles : l’un sino-centré de l’Asie de l’Est et l’océan Pacifique et l’autre indo-centré sur l’Asie du Sud et l’Océanie, avec l’Océan indien bordé par les pays de l’Est africain. Une cinquantaine de pays avec une population de 5,9 milliards d’habitants soit les trois quarts de la planète. Quatre des cinq pays les plus peuplés de la planète font partie de cette région du monde : Inde, Chine, Indonésie et Pakistan. Cette partie du monde possède la moitié de la surface terrestre émergée.

La France possède avec ses DOM et ses TOM 1,65 million d’habitants et 93 % de la zone économique exclusive (ZEE) française sont dans cette région du monde, faisant de la France le deuxième pays du monde sur le plan de la surface maritime. Cette dernière donnée montre l’importance géopolitique française dans cette partie du monde : d’ouest en est, Mayotte (2 députés et 2 sénateurs), la Réunion (7 députés et 4 sénateurs), les Terres australes et antarctiques françaises, la Nouvelle-Calédonie (2 députés et 2 sénateurs), Wallis-et-Futuna (1 député et 1 sénateur) et la Polynésie française (3 députés et 2 sénateurs) jusqu’à l’île Clipperton située à un peu plus d’un millier de km au sud-ouest du Mexique, et bien sûr, les ressources maritimes futures de la ZEE en ligne de mire. À noter que les pays de l’Indopacifique participent en termes de communautés étrangères en France de près 800 000 personnes (dans un ordre décroissant : Comores, Chine, Madagascar, Vietnam, Cambodge, Inde, Sri Lanka, Mozambique, Laos, Afghanistan, Pakistan, etc.).

Pour continuer à comprendre l’importance géostratégique de l’Indopacifique, rappelons que c’est le couloir commercial le plus important du monde. Il y passe par mer les deux tiers des expéditions mondiales de pétrole et un tiers des marchandises ; près de 80 % du pétrole importé par la Chine, 90 % pour la Corée du Sud et le Japon. Tous les pays de l’Indopacifique estiment que le transport maritime est « sacré ». Vous pouvez à partir de là, en regardant une carte, comprendre une partie des conflits potentiels entre les protagonistes. Et c’est pour intégrer les voies maritimes que le concept d’Indopacifique est plus probant que celui d’Asie, qui donne moins d’importance aux deux océans indien et pacifique de la zone indopacifique.

Du point de vue maritime, qui est un sujet géopolitique central de la zone, il faut comprendre que la France, l’Inde et l’Australie contrôlent à eux trois des espaces très importants dans la géopolitique du périmètre. Si on regarde les rapports entre eux de ces trois pays, on remarque la volte-face de l’Australie quant aux achats des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) français, préférant l’achat aux États-Unis. Par contre, la France a réussi à vendre un gros contrat à l’Inde de son avion de combat Rafale.

Maintenant, les lecteurs de ReSPUBLICA comprendront ce qui se joue dans la géopolitique indopacifique. Et ils comprendront alors que la riposte de la Chine par rapport aux actions occidentales s’est concrétisée dans les nouvelles routes de la soie maritimes, à l’intérieur du grandiose projet de l’opération « Une ceinture, une route ». L’objectif de ce projet est la construction progressive d’un nouveau système d’interdépendances économiques, politiques et sécuritaires. Il vise également à renforcer le contrôle de la Chine sur les principales chaînes d’approvisionnement mondiales, avec des escales dans des ports contrôlés majoritairement par la Chine sur les nouvelles routes de la soie maritimes.

Élection de la présidence du Yuan législatif taïwanais

Suite de l’élection de Lai Ching-te, président du Parti démocrate progressiste (DPP en anglais) indépendantiste, à la présidence de Taïwan que nous avons relaté dans un récent article de ReSPUBLICA(1)« Nouvelle rubrique asiatique dans ReSPUBLICA ». : nous avions dit que nous allions vivre un changement, car même si un président indépendantiste va succéder en mai 2024 à une présidente également indépendantiste, le rapport des forces au yuan législatif s’est inversé, puisque Han Kuo-yu et Johnny Chiang, les candidats du Kouomintang (KMT, favorable au dialogue avec la Chine), furent respectivement élus président et vice-président. Les candidats de la majorité présidentielle ont été battus le 1er février dernier par 54 voix contre 51 sur 113 députés. Les 8 députés du Parti populaire taïwanais (PPT) se sont abstenus.

Comme prévu dans notre analyse précédente, le président indépendantiste n’a plus de majorité dans le Yuan législatif avec une présidence favorable au dialogue avec la Chine. Mais pour faire une majorité sur le vote des lois, les 8 députés du parti populaire taïwanais seront indispensablessur chaque vote législatif. On est donc loin de ce qu’auraient souhaité les médias dominants du bloc occidental.Dans la campagne électorale, le KMT a martelé son projet de contrôle et de surveillance de l’action gouvernementale. Nous essaierons d’y revenir lors de la prise de fonction à la présidence de l’île de Lai Ching-te début mai 2024.

Notes de bas de page

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1 « Nouvelle rubrique asiatique dans ReSPUBLICA ».