Numérique : comment réduire son impact environnemental ?

Aujourd’hui, l’usage du numérique est devenu le plus souvent quotidien, que ce soit via nos ordiphones (smartphones) ou via nos ordinateurs et s’avère de plus en plus indispensable à la vie courante : pour un usage professionnel, pour les démarches administratives mais aussi pour nos loisirs. Or, pour que nous puissions en permanence accéder à nos données et naviguer sur le web, le numérique consomme énormément d’énergie(1)Sur cet aspect, voir également « Numérique : le grand gâchis énergétique », Laure Cailloce, Le journal CNRS, 16/05/2018 [en ligne].. De plus, cette consommation est amenée à s’accroître, en raison des nouveaux utilisateurs (notamment dans les pays en développement) mais aussi à cause de notre usage qui s’intensifie : les logiciels deviennent de plus en plus perfectionnés et nous stockons toujours plus de données grâce aux nuages informatiques ou clouds. Ainsi, d’après le rapport Clicking Clean datant de 2017, le secteur informatique représente déjà environ 7 % de la consommation mondiale d’électricité (avec une croissance estimée à 12 % par an). La pollution générée par l’industrie du net et son impact sur le climat seraient également équivalents à ceux du secteur de l’aviation. Pour ce qui concerne la France, l’infrastructure numérique consomme actuellement neuf réacteurs nucléaires, soit 13 % de l’électricité nationale. Quelques chiffres illustrent également l’impact de notre utilisation du web : une simple recherche sur le moteur de recherche Google nécessite la même dépense énergétique que ce qu’il faut pour faire bouillir un demi litre d’eau ; le volume de tweets (plus de 500 millions) envoyés chaque jour génère 10 tonnes de CO2 (soit la dépense énergétique d’un Français chaque année pour se chauffer, se déplacer, s’équiper et manger) et à lui tout seul, le visionnage des vidéos sur Youtube représente 1,2 % de la consommation électrique mondiale (en 2015, le streaming vidéo captait 63 % du trafic mondial et c’était avant le grand boom de Netflix !). Voilà pour ce qui est de l’impact caché ou en tout cas moins visible du numérique, mais il ne faut pas oublier non plus que la place du numérique dans nos vies se répercute aussi physiquement : 930 000 kilomètres (ce qui équivaut à 2,5 fois la distance Terre-Lune) de câbles maillent le fond des océans pour faire transiter nos données dans le monde entier. Par ailleurs, la fabrication de nos équipements informatiques est très polluante : l’exploitation minière pour extraire les métaux rares nécessaires à la conception des nouveaux téléphones (une quarantaine de métaux pour la génération actuelle d’ordiphones contre une vingtaine à peine il y a dix ans !) entraîne déforestation, pollution de l’eau, déchets miniers etc. Les besoins sont tellement grands que même en France, on songe à relancer l’industrie minière (2)Voir à ce sujet : Mauvaises mines. Combattre l’industrie minière en France et dans le monde, Mathieu Brier et Naïké Desquesnes, Z, 2018, 150 p.. Face à ce constat, il existe cependant des solutions et des bonnes pratiques pour réduire son impact environnemental dans le domaine du numérique. En voici quelques unes :

L’équipement

Face à l’obsolescence toujours plus importante de nos appareils électroniques, il faut évidemment commencer par prolonger le plus possible la vie de nos équipements, téléphones et ordinateurs et ne pas céder à la tentation de se procurer la dernière génération d’appareils.

Lorsque celui-ci est endommagé, on peut bien sûr faire appel aux services d’un professionnel mais on peut aussi se rendre dans les « repair cafés»(3)Pour trouver un « repair café » près de chez soi : https://repaircafe.org/fr/ qui ont fleuri un peu partout depuis dix ans. L’idée de ces « repair cafés » est de mutualiser et de transmettre dans un cadre associatif les savoir-faire concernant la réparation de nos objets : chacun peut y trouver sur place du matériel pour l’aider et un expert bénévole pour l’épauler.

Si on a vraiment besoin d’un nouvel appareil, on peut se le procurer d’occasion ou reconditionné ou mieux encore, le louer ! Pour la première solution, l’entreprise française Remade par exemple est spécialisée dans la réparation et le reconditionnement des célèbres téléphones de la marque à la pomme. Quant à Commown, une société coopérative strasbourgeoise, elle propose de louer des téléphones éthiques (de la marque Fairphone) qui sont conçus pour être réparés facilement et dont les composants sont soit des matériaux recyclés, soit de provenance éthique et des ordinateurs dont elle assure la réparation et le recyclage, permettant de prolonger au maximum leur durée de vie.

Enfin, quand nos appareils sont devenus inutilisables, il faut veiller à les apporter dans des points de collecte afin que les composants puissent être recyclés. En effet, l’ADEME estimait en 2018 que seulement 15 % des ordiphones mis en circulation avaient pu être collectés. Dans le même ordre d’idée, chaque Français conserverait en moyenne 58 kg d’appareils inutilisés.

La messagerie électronique

Les milliers de courriels conservés dans nos adresses électroniques mobilisent l’énergie de serveurs. Il faut donc périodiquement veiller à faire le tri dans sa messagerie et, en particulier, supprimer les courriels lourds, notamment ceux avec des pièces jointes qu’il vaut mieux télécharger et conserver directement sur son ordinateur. En ce qui concerne la transmission de fichiers, il faut utiliser des clefs USB quand c’est possible. Pour éviter d’encombrer sa boîte courriel et celle des autres, on peut également penser à se désabonner de certaines lettres d’informations et limiter le nombre de personnes en copie. Dans un échange de courriels, il n’est pas toujours nécessaire de garder l’historique des réponses (qui augmente le volume du courriel). Enfin, attention aux signatures à rallonge qui comportent des logos ! Mieux vaut adopter une signature sobre afin d’alléger le poids du courriel.

La navigation sur le web

Pour accéder aux sites Internet fréquemment utilisés, il faut éviter de solliciter les serveurs en passant par un moteur de recherche : soit on peut taper directement l’adresse du site, soit on peut se créer une liste de favoris dans son navigateur. La publicité elle aussi mobilise de l’énergie, ce qui donne une raison supplémentaire la bloquer grâce à un bloqueur de publicité (par exemple Ghostery).

Quant au flux vidéo (ou streaming), l’une des manières de baisser sa consommation est de visionner en basse définition (selon Greenpeace, cela permettrait de consommer quatre à dix fois moins d’énergie qu’un visionnage du même fichier en HD). On peut aussi remplacer le visionnage de clips (lorsque le but principal est d’écouter de la musique) par une plate-forme de streaming musical.

L’impression de documents

Outre l’impression recto-verso, on peut aussi penser à télécharger une police écologique comme Ecofont qui consomme moins d’encre !

Penser à l’extinction !

Il est désormais bien connu que les appareils en veille consomment une énergie qui pourrait être économisée : la box Internet, par exemple, peut être éteinte pendant la nuit.

De même, dans nos ordiphones, de nombreuses applications grignotent de la batterie alors que nous n’en avons pas en permanence l’utilité. Pour limiter cela, on peut soit supprimer les applications dont on se sert occasionnellement ou effectuer des réglages dans son ordiphone.

Finalement, n’oublions pas non plus la responsabilité en la matière des grandes entreprises du secteur, notamment les GAFA. Ces dernières pourraient par exemple améliorer les centres de données ou data centers(4)Quelques idées d’améliorations dans cet article : « Les centres de données, grands pollueurs de l’ère numérique ? », 10/02/2017 [en ligne] et réfléchir à la pertinence de sauvegarder ad vitam aeternam des données sur les utilisateurs (on sait par exemple que Facebook garde en mémoire des informations supprimées par ses utilisateurs)…

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 Sur cet aspect, voir également « Numérique : le grand gâchis énergétique », Laure Cailloce, Le journal CNRS, 16/05/2018 [en ligne].
2 Voir à ce sujet : Mauvaises mines. Combattre l’industrie minière en France et dans le monde, Mathieu Brier et Naïké Desquesnes, Z, 2018, 150 p.
3 Pour trouver un « repair café » près de chez soi : https://repaircafe.org/fr/
4 Quelques idées d’améliorations dans cet article : « Les centres de données, grands pollueurs de l’ère numérique ? », 10/02/2017 [en ligne]