Pour sortir de l’impasse, réconcilions la gauche avec la laïcité et la nation

Toutes les gauches en Europe ont été traumatisées par les nationalismes de droite et d’extrême droite du XXe siècle. Sauf le communisme soviétique. Après son écroulement fin des années 80, le néolibéralisme, devenu l’idéologie dominante, s’installe partout. Même les gauches anti-néolibérales sont influencées par l’idéologie libérale. Nous y reviendrons plus loin.

Sur d’autres continents, il en va autrement. En Amérique latine, le patriotisme est très marqué à gauche depuis la résurgence de la « Révolution bolivarienne » à la fin du siècle dernier. Même en Grèce, on ne peut pas comprendre la victoire de Syriza sans la dimension patriotique. Allons au bout du raisonnement, dans le monde actuel, nous disons pas de transformation sociale sans dimension patriotique. C’est déjà ce que disait le grand Jean Jaurès. Il développait l’idée que la transformation sociale et politique en France et en Europe devait lier les ruptures sociales de grande ampleur (y compris, disait-il, de l’entrée de la démocratie dans l’entreprise, ce qu’ont oublié toutes les gauches françaises) avec le patriotisme de gauche contre le nationalisme de droite et d’extrême droite, aujourd’hui alliés au néolibéralisme et que la bourgeoisie utilisera quand bon lui semblera. (suite…)

Après les élections de mars 2015, tout est à reconstruire !

Toutes les gauches reculent. Le parti socialiste a vécu le plus grand basculement vers la droite de son histoire électorale. Sa descente aux enfers est en marche. Avec 13,34 % sous ses couleurs, le PS est en dessous de son plus bas historique des européennes (13,9 %). Il a fallu toute la manipulation du ministère de l’Intérieur et des médias néolibéraux aux ordres pour faire croire qu’il était au-dessus de 20 % grâce à divers amalgames avec le PRG, EELV ou le PCF. Ce parti va donc tenter, pour freiner sa chute, d’entraîner d’autres forces politiques et sociales dans l’abîme en appelant à un rassemblement de toute la gauche sans modifier sa politique néolibérale. Les carriéristes seront bien sûr d’accord. Leurs leaders entreront alors au gouvernement.

La majorité de l’Autre gauche, toujours confuse dans sa stratégie, appuyée sur une alliance sociologique minoritaire sans les ouvriers et les employés (un comble pour ceux qui veulent une transformation sociale et politique par les urnes !), que nous détaillerons plus loin dans ce texte, développe toujours une praxis (dialectique entre la pratique et la théorie) marginalisante. La majorité de l’Autre gauche se console comme elle peut en disant qu’elle a mieux résisté que ce qu’elle avait prévu dans sa désespérance dépressive ! La marche vers sa marginalisation continue. Jean-Luc Mélenchon a donc raison de parler de l’illisibilité de la stratégie du Front de gauche en appelant à un sursaut. Et si on considère que la plupart des composantes de l’Autre gauche rejette la notion d’un prolétariat majoritaire, rejette la nation, la République sociale, la laïcité, il apparaît clair que ces composantes de l’Autre gauche deviennent, à leur corps défendant, les supplétifs du mouvement réformateur néolibéral en empêchant la construction de l’alternative populaire autour de la classe populaire majoritaire (ouvrière et employée) alliée aux couches moyennes intermédiaires (les couches moyennes intermédiaires représentent 24 % de la population et les cadres 15 %). (suite…)

Que faire après une succession de désastres électoraux ?

Cette lancinante question doit être prise à bras le corps. Dire que la transition vers l’après capitalisme doit se faire démocratiquement implique, pour nous, de ne pas continuer à agir comme par le passé. Déjà, Albert Einstein nous avait enseigné que l’« on ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré ». Changer de mode de pensée est en même temps nécessaire mais difficile. Pire, les trois événements de janvier 2015 (les attentats, la victoire électorale de Syriza et la démonstration de force de Podemos du 31) n’ont pas fait bouger la plupart des responsables de l’Autre gauche. Cerise sur le gâteau de la déprime, certains courants de l’Autre gauche s’enfoncent encore plus radicalement dans leurs impasses.

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Pour un anticapitalisme laïque : la République sociale

Après l’espoir de la présidentielle de 2012 ouverte par l’Autre gauche, 2014 a sonné le désastre des gauches largement analysé par notre journal dans toutes ses chroniques d’Evariste depuis le 25 mai 2014. Mais janvier 2015 a pulvérisé ce qui restait d’espoir que l’Autre gauche française actuelle puisse construire une alternative au mouvement réformateur néolibéral, laissant comme choix au grand patronat soit la continuation de l’alternance néolibérale PS-UMP soit la reconfiguration d’une nouvelle alliance droite – extrême- droite.

Sur les assassinats des 7, 8, 9 janvier, il faut rappeler que des Français ont tué d’autres Français. Que ceux qui ont été assassinés l’ont été parce qu’ils étaient athées attachés à la liberté d’expression, parce qu’ils étaient policiers, parce qu’ils étaient juifs. Et suite à cela, nous avons vécu une montée des incivilités et des discriminations envers les juifs et les musulmans. Alors qu’il y a eu un gigantesque mouvement populaire lors des rassemblements spontanés des 7, 8 et 11 janvier dont la signification principale était la volonté d’un vivre ensemble entre athées, agnostiques, catholiques, protestants, juifs, musulmans, bouddhistes et autres grâce au principe d’organisation sociale et politique qu’est la laïcité. Et ce n’est pas la triste instrumentalisation politico-médiatique des chefs d’Etat et des médias dominants qui peuvent « cacher », notamment en province, ce gigantesque rassemblement populaire.

Mais peu de commentateurs, peu de responsables politiques, syndicaux ou associatifs sont sortis des systèmes simplistes de la causalité unique. (suite…)

Après janvier 2015, l’Autre gauche dans l’impasse !

Les trois événements de janvier 2015 (les assassinats des 7, 8 et 9 janvier, la victoire électorale de Syriza du 25 janvier, la démonstration de force de Podemos du 31 janvier) n’ont pas appris grand-chose aux gauches françaises. Quant aux dirigeants politiques néolibéraux (François Hollande, le gouvernement Valls et la direction du PS), non contents d’avoir tué, dans le temps présent, l’idée de « gauche » en France, ils ont réagi en rajoutant un « catéchisme républicain » à une école des compétences largement dévouée aux désirs du patronat. À aucun moment, la direction néolibérale autour de François Hollande n’a voulu travailler sur les causes du séisme des 7, 8 et 9 janvier, dont Copenhague a eu droit à une réplique de même nature un mois plus tard. Son appel à des intervenants extérieurs à l’école pour prodiguer le nouveau « catéchisme républicain » n’est pas de bon augure pour la suite de l’histoire.

Quand à l’Autre gauche, elle se réduit de plus en plus à la fraction idéologique de la petite et moyenne bourgeoisie, qui ne possède plus aucune force propulsive pour s’allier avec la classe populaire ouvrière et employée, majoritaire en France, mais dont la plus grande partie s’abstient aux élections en partie par défiance envers elle. Pire, n’ayant rien appris de l’histoire des années 30, cette gauche observe, stupéfaite, que les couches déclassées tant de la classe populaire ouvrière et employée que des couches moyennes intermédiaires, lorgnent de plus en plus vers le FN. Les résultats de la 4e circonscription législative du Doubs sonnent le désastre imminent. Dans une circonscription populaire, le Front de gauche allié au NPA et aux chevènementistes du MRC font 3,6 % ! La voie royale vers la marginalité. (suite…)

La protection sociale au cœur de la lutte des classes

Le système français de Sécurité sociale voit le jour au lendemain de la Seconde guerre mondiale avec la parution des ordonnances Laroque du 4 et du 19 octobre 1945 (1)La Sécurité sociale comporte la branche retraites, l’assurance-maladie, la branche famille, les accidents du travail et les maladies professionnelles et la banque de la Sécurité sociale, l’ACOSS. Son budget est de plus de 30 % supérieur au budget de l’État tous ministères confondus. Si on ajoute l’assurance-chômage, l’AGIRC et l’ARRCO, les complémentaires santé, les politiques sociales et certains petits régimes, on obtient alors la protection sociale.. Meurtrie et dévastée par la guerre, humiliée par l’occupation allemande et par ses propres turpitudes vichystes, la France sut trouver chez une poignée de résistants la force d’ériger de la plus éclatante des manières son propre rétablissement moral. Le programme du Conseil National de la Résistance (CNR), également intitulé « Les Jours Heureux », reste à ce jour un acte d’héroïsme patriotique qui n’a d’égale que l’audace de son contenu tant sur le plan économique que social.

Plan :

Rappel des ambitions du CNR

Le mouvement réformateur néo-libéral a engagé un triple mouvement d’étatisation, de privatisation et d’expropriation de la Sécurité sociale

Les pans assurantiels de la Sécurité sociale inscrits dans le projet de contrôle social des travailleurs

Face à cela, le mouvement syndical revendicatif et l’Autre gauche ne sont pas à la hauteur des enjeux

Construire le chemin de l’émancipation qui nous amène à un modèle politique alternatif au capitalisme

Rappel des ambitions du CNR

Ambroise Croizat et Pierre Laroque élaborent donc un plan complet de Sécurité sociale, à savoir un système « visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail avec gestion appartenant aux représentants des assurés et de l’État et une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ».

Tout travailleur exerçant une activité rémunérée donnant lieu à versement de cotisation sociale se voit affilié (ou rattaché) à un régime obligatoire de Sécurité sociale. Originellement Pierre Laroque avait souhaité mettre fin à l’émiettement de la Sécurité sociale entre une pluralité de régimes à base socioprofessionnelle. C’est en ce sens qu’est érigé le Régime général de Sécurité sociale qui, comme son nom l’indique, devait couvrir l’ensemble de la population française sans exclusive.

(suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 La Sécurité sociale comporte la branche retraites, l’assurance-maladie, la branche famille, les accidents du travail et les maladies professionnelles et la banque de la Sécurité sociale, l’ACOSS. Son budget est de plus de 30 % supérieur au budget de l’État tous ministères confondus. Si on ajoute l’assurance-chômage, l’AGIRC et l’ARRCO, les complémentaires santé, les politiques sociales et certains petits régimes, on obtient alors la protection sociale.

Pourquoi la stratégie de Syriza est-elle riche d’enseignements ?

Jusqu’ici la stratégie de la douceur pour faire plier Angela Merkel a échoué. François Hollande pensait que sa victoire électorale dans la deuxième économie de la zone euro lui permettrait d’aller quémander un assouplissement de la politique néolibérale à la chancelière allemande. Un mois après son élection, il acceptait le diktat allemand qui refusait de faire payer ses contribuables. De même Matteo Renzi pensait que sa victoire électorale dans la troisième économie de la zone euro lui permettrait d’aller quémander lui aussi un assouplissement de même nature. Il eut droit à un ridicule plan Juncker. Ce matamore accepta le diktat allemand qui refusait une fois de plus de faire payer ses contribuables.

Alexis Tsipras et de Yannis Varoufakis ne pouvait pas tenter une troisième fois d’engager la stratégie de la douceur car l’économie de la Grèce est encore moins forte que celle de la France et de l’Italie. A noter que ce ne sont plus les banques qui sont majoritaires dans la masse des créances grecques, mais les institutions européennes et donc les Etats de la zone euro (1)Sur 320 milliards d’euros de dette publique grecque, 32 milliards sont détenus par le FMI, 141,8 milliards par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et donc par chaque Etat au prorata de son importance, 27,7 milliards par la BCE, 53 milliards par des États européens ayant accordé des prêts bilatéraux. . D’autre part, l’économie grecque est, selon le ministre grec des finances Yannis Varoufakis, « aux abois » car les échéances des remboursements des dettes sont proches (cet été pour la BCE). (suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 Sur 320 milliards d’euros de dette publique grecque, 32 milliards sont détenus par le FMI, 141,8 milliards par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et donc par chaque Etat au prorata de son importance, 27,7 milliards par la BCE, 53 milliards par des États européens ayant accordé des prêts bilatéraux.

Premiers enseignements de la victoire de Syriza en Grèce pour la situation francaise

Après la crise de 2007-2008 qui a envoyé une onde de choc sur le néolibéralisme mondial, la victoire des amis d’Alexis Tsipras est la première secousse importante pour l’ordolibéralisme européen. L’agenda européen est bouleversé. C’est un tournant historique puisque les deux forces néolibérales (droite et parti socialiste) qui ont gouverné la Grèce depuis 40 ans, ensemble ou séparées, sortent éliminées à court terme de la course au pouvoir.
Qui a gagné ? Une coalition de gauche anti-austérité demandant une relance économique, une relance des bas salaires, une lutte efficace contre le chômage, la restructuration forte de la dette.
Un nouveau rapport des forces est constitué qui permet au moins un espoir que ne permettaient pas les politiques néolibérales.
Le peuple grec a fait le constat que les politiques d’austérité augmentaient la dette, le chômage, la misère, la pauvreté.
Cette victoire ne règle pas la situation mais ouvre un processus bloqué par les néolibéraux de droite et de gauche. Il est à noter que comme les premières « aides » ont surtout permis le remboursement aux banques privées à but lucratif pour les actionnaires, aujourd’hui la grande majorité des créances grecques sont auprès des institutions européennes, ce qui va rendre le rapport de forces d’autant plus violent.

(suite…)

Tirer les enseignements politiques des attentats des 7, 8 et 9 janvier 2015

Ces attentats marqueront l’histoire du combat permanent pour la liberté d’expression, pour la liberté de conscience, pour la laïcité. Nous avons d’abord réagi par un texte paru d’abord dans l’Humanité puis dans ReSPUBLICA. L’émotion suscitée par ce carnage a produit le dimanche 11 janvier 2015 une des plus importantes mobilisations du peuple français. Mais cette réprobation populaire et salutaire n’épuise pas, loin s’en faut, la réflexion nécessaire pour engager une analyse concrète de la situation concrète, phase indispensable pour se poser les questions suivantes : « Que faire ? » et « Comment le faire ? ».
D’autant que si nous louons la mobilisation du 11 janvier 2015 car elle est d’abord une mobilisation populaire de première importance, nous ne pouvons pas nier qu’elle a été l’objet d’une vaste instrumentalisation politico-médiatique par ceux qui entretiennent un environnement propice à de tels actes. Oui, nous avons besoin de mener une analyse indépendante des forces sociales et politiques qui sont responsables de cette situation.
Nous souhaitons donc lancer un appel à une réflexion collective sur la base des points suivants qui sont tous soumis à la délibération démocratique de ceux qui voudront bien s’en saisir. (suite…)

Laïcité : des impasses crépusculaires aux lueurs de l’aube

Note de la Rédaction : Oui, chers amis lecteurs, ReSPUBLICA  fête ses 15 ans en ce début d’année 2015 et nos lecteurs réguliers connaissent les combats laïques que nous ne cessons de mener et relayer depuis le début du siècle ! Cette chronique reprend nos positions sur la question laïque, à la fois en termes de politique française et de géopolitique, pour nous armer non sur un combat partiel mais pour l’intégrer dans une optique de transformation sociale.
Nous ne pouvons ni ne souhaitons courir la totalité des lièvres laïques, mais nous tenions à faire figurer, au sommaire de ce numéro, un texte de Pierre  Hayat relatif  aux nouveaux programmes de l’Education nationale en matière d’« enseignement moral et civique », enjeux de la transmission républicaine, ainsi que celui de Catherine Kintzler, sur la salutaire nécessité de ne pas surévaluer le poids de la croyance dans la tête des citoyens.
Pour l’exception d’Alsace-Moselle,  nous vous signalons deux textes importants qui viennent d’être mis en ligne sur le site conjoint ReSPUBLICA/UFAL “Laïcité sans exceptions” : une lettre ouverte de Patrick Kessel  et l’audition de Michel Seelig à l’Observatoire de la laïcité. Quant à la récente effervescence sur les crèches de Noël, nous renvoyons à un article de notre ami Henri Pena-Ruiz.

Qu’ils sont tristes ces groupuscules laïques qui vivent leur combat laïque dépourvu de lien avec la « vraie vie » dans un entre-soi aussi douillet qu’inefficace ! Qu’ils sont tristes ces militants de gauche et d’extrême gauche qui vivent leur combat social et politique englués dans une laïcité d’imposture (laïcité plurielle, ouverte, positive, de reconnaissance, etc.) (1)Cette première dérive, qui existe dans une partie des gauches et de l’extrême gauche, est une véritable imposture au regard de la laïcité. Elle consiste à vouloir étendre aux sphères de l’autorité publique et de constitution des libertés (école, protection sociale, services publics) le régime de la société civile. Elle fait donc de l’opinion religieuse une norme en légitimant la communautarisation du corps politique. qui les coupe des couches populaires qui seules peuvent renverser la table !

Ah ! me direz-vous, vous ne parlez pas de la droite et de l’extrême droite ? Dois-je parler des escrocs ? Aujourd’hui, quand un citoyen de droite ou d’extrême droite parle de laïcité, c’est un escroc ! Demandez-lui s’il est prêt à se mobiliser demain matin à 8h 30 pour supprimer définitivement le financement public des écoles privées confessionnelles ! Pour la droite ou l’extrême droite, l’utilisation du mot laïcité n’est qu’un laïcisme, utilisé contre une seule religion, à savoir l’islam. C’est donc une dérive anti-laïque (2)Cette seconde dérive, propre à la droite et l’extrême droite, est en effet totalement contraire au principe de laïcité. Elle consiste à vouloir durcir l’espace civil en exigeant qu’il se soumette à l’abstention qui devrait régner dans les sphères de l’autorité publique et de constitution des libertés..
Voilà d’où vient la difficulté actuelle du combat laïque. Contrairement à la période antérieure au serment de Vincennes de 1961 durant laquelle le combat laïque se menait contre un seul adversaire, le cléricalisme catholique, le combat laïque actuel doit se battre contre trois adversaires : les cléricalismes religieux, avec comme chef d’orchestre le cléricalisme catholique, principalement de droite et d’extrême droite ; les adeptes de la laïcité d’imposture, que l’on trouve à gauche et à l’extrême gauche ; les adeptes du laïcisme, que l’on trouve à droite et à l’extrême droite.

(suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 Cette première dérive, qui existe dans une partie des gauches et de l’extrême gauche, est une véritable imposture au regard de la laïcité. Elle consiste à vouloir étendre aux sphères de l’autorité publique et de constitution des libertés (école, protection sociale, services publics) le régime de la société civile. Elle fait donc de l’opinion religieuse une norme en légitimant la communautarisation du corps politique.
2 Cette seconde dérive, propre à la droite et l’extrême droite, est en effet totalement contraire au principe de laïcité. Elle consiste à vouloir durcir l’espace civil en exigeant qu’il se soumette à l’abstention qui devrait régner dans les sphères de l’autorité publique et de constitution des libertés.

Bilan 2014 : Les gauches ont rompu avec les couches populaires, la droite et l’extrême-droite s’envoient en l’air

Toutes les gauches sont en implosion. Que décident-elles ? En dehors des amis de Jean-Luc Mélenchon, qui tentent de construire une organisation de type Podemos à la française avec le M6R (1)Voir https://www.gaucherepublicaine.org/respublica/lere-du-peuple-selon-jean-luc-melenchon/7387455 , tous ont décidé de continuer les mêmes lignes et pratiques politiques perdantes. Pour elles, on ne change pas les équipes qui perdent ! Pire, elles sont persuadées que cette déroute de 2014 n’est due qu’à une mauvaise communication ou une mauvaise pédagogie et qu’en expliquant mieux, tout rentrera dans l’ordre. Les augures des élections de 2015 sont encore plus sombres ? aucune importance, au fond de l’impasse, le mur, alors on accélère pour aller vers un crash spectaculaire !
Jamais ne les effleure l’idée que la majorité des ouvriers et des employés (53 % de la population) a très bien compris et qu’elle a décidé, si les gauches ne changent pas de ligne et de pratique politiques, de ne plus voter pour elles et de s’abstenir ! Sans forcément le savoir, elle applique la célèbre formule d’Albert Einstein : On ne résout pas les problèmes avec le mode de pensée qui les a engendrés ! (suite…)

Quelle filiation politique pour penser l’alternative ?

Contrairement à ce qu’affirme le chant de l’Internationale, on ne fait jamais « table rase » du passé. D’abord parce que toutes les transformations culturelles, sociales et politiques s’appuient toujours sur un « déjà là » dans l’ancien monde. Puis, parce que l’évolution de la pensée politique s’effectue toujours par des abondements et des ruptures par rapport à des pensées précédentes.

Pour le premier point, la doctrine néo-libérale, qui s’est mise en ordre de bataille dans la période qui va de 1938 (Colloque Lippmann) à 1947 (Société du Mont-Pèlerin), n’a pas eu de mal à convaincre la bourgeoisie que ce que le prolétariat avait pu obtenir à travers la mise en œuvre du programme du CNR était un « déjà là » pour le socialisme et la démocratie sociale et que son mot d’ordre devait donc être la reprise des « acquis », notamment sociaux. À travers ses relais au sein de l’État, la bourgeoisie a donc engagé une bataille gigantesque sur tous les fronts de la lutte contre l’émancipation des travailleurs, notamment celui de la Sécurité sociale de 1945, pour la détruire petit à petit : 1967, 1983, 1987, 1993, 1995, 2002, 2003, 2004, 2007, 2009, 2014, etc. (1)Lire à ce sujet Les prédateurs de la santé, de Christophe Prudhomme, Catherine Jousse et Bernard Teper, chez 2ème Edition. Le prolétariat ayant perdu son hégémonie et les organisations de la gauche ayant soit trahi, soit jeté leur pensée marxiste en même temps que l’eau polluée du bain stalinien, les travailleurs n’ont pu résister efficacement. Nous reviendrons ultérieurement sur ce point. (suite…)

Notes de bas de page

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1 Lire à ce sujet Les prédateurs de la santé, de Christophe Prudhomme, Catherine Jousse et Bernard Teper, chez 2ème Edition.

Oui M. Taylor, la France est un pays communiste… mais qui a réussi !

Maurice Taylor, patron du fabricant américain de pneus TITAN, a cru jeter cette semaine un beau pavé dans la mare (1)« On ne peut pas acheter Goodyear à cause de vos lois », a déclaré Maurice Taylor, le PDG de Titan, au micro de France Bleu Picardie le 27 novembre dernier. « On doit reprendre au minimum 652 ou 672 ouvriers, c’est impossible ! Le maximum, c’est 333, parce qu’après, ce n’est plus rentable ! […] Les gars vous devez vous réveiller ! Dites aux syndicats s’ils sont si intelligents, qu’ils n’ont qu’à racheter l’usine ! La France est devenue un pays communiste, et quand vous tomberez aussi bas que la Russie, peut-être que vous aurez une chance de repartir. », en affectant de dire tout haut devant les gazettes ce que d’autres penseraient tout bas, ou n’oseraient même plus exprimer du tout. Et le même M. Taylor, de poser avantageusement à l’imprécateur satisfait et sûr de son fait, surfant sur un soi-disant tabou, l’impossibilité absolue de nos jours, de pouvoir seulement penser se réclamer d’une appartenance idéologique qu’il vomit.

Eh bien M. Taylor, chiche ! Votre propos de réac sûr de lui et dominateur, arrogant et donneur de leçons, nous le saisissons au bond. Et il ne nous fait pas peur, ni rentrer d’effroi la tête dans les épaules, de proclamer, si nous ne le faisions pas déjà, que nous sommes en effet atteints de ce mal absolu, effectivement et souvent inavoué, qu’est notre coupable penchant pour cet idéal respectable et ambitieux qui s’appelle le communisme. Avouons-le donc tout net, à la différence de nos dirigeants qui n’en finissent pas de louvoyer : nous relevons votre défi de paraître ce que nous sommes et de ne point nous en cacher.

(suite…)

Notes de bas de page

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1 « On ne peut pas acheter Goodyear à cause de vos lois », a déclaré Maurice Taylor, le PDG de Titan, au micro de France Bleu Picardie le 27 novembre dernier. « On doit reprendre au minimum 652 ou 672 ouvriers, c’est impossible ! Le maximum, c’est 333, parce qu’après, ce n’est plus rentable ! […] Les gars vous devez vous réveiller ! Dites aux syndicats s’ils sont si intelligents, qu’ils n’ont qu’à racheter l’usine ! La France est devenue un pays communiste, et quand vous tomberez aussi bas que la Russie, peut-être que vous aurez une chance de repartir. »

Allocations familiales : décrypter et dépasser le débat binaire

Le gouvernement solférinien social-libéral vient de reprendre une idée du gouvernement de Lionel Jospin à savoir la modulation des allocations familiales. Tout le monde est alors sommé d’être pour ou contre cette mesure indépendamment du problème global. Et chaque journal y va de son sondage envers ses lecteurs : êtes-vous pour ou contre ? Il n’y aurait alors que deux camps : ceux qui sont, concernant cette mesure, pour le gouvernement et ceux qui sont contre. Ceux qui sont pour le gouvernement développent l’idée que cette mesure est une mesure juste puisqu’elle donne plus d’allocations familiales à ceux qui ont moins et moins à ceux qui ont plus (en fait, elle ne ferait que diminuer les allocations de ceux qui ont plus sans abonder ceux qui ont moins !). Ceux qui sont contre reprennent la position de la doctrine sociale de l’Eglise mise en orbite par la droite catholique et donc de fait par l’UNAF, l’UMP et le FN qui s’arqueboutent sur la catégorie « famille » sans répondre à la question sociale des inégalités grandissantes.

Voilà le décor planté avec, comme dans le cas des traités européens et de la zone euro, l’idée qu’il existe deux camps (le camp néolibéral UMP-PS-Église favorable aux traités européens et à la zone euro, et le camp Front national qui y serait hostile). Tous les autres sont sommés de rejoindre l’un ou l’autre camp, indépendamment des raisons qui fondent leurs convictions et du projet global dans lequel cette proposition s’insère. (suite…)

L’ère du peuple, selon Jean-Luc Mélenchon

Le désastre électoral de l’autre gauche aurait pu réveiller ses principaux dirigeants. Mais jusqu’à présent, il n’en a rien été. Jean-Luc Mélenchon est le premier à prétendre tirer les enseignements de cet échec. Il le fait dans un livre, L’ère du peuple (1)Livre paru en octobre 2014 chez Fayard, qui propose un changement de stratégie. Selon nous, l’ouvrage est l’occasion de débattre sans tarder sur le fond. (suite…)

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1 Livre paru en octobre 2014 chez Fayard

Comment les néolibéraux attaquent la sphère de constitution des libertés pour restaurer les profits

Si nous voulons comprendre ce titre pour ensuite appliquer la 11e thèse sur Feuerbach de Karl Marx « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de différentes manières, mais ce qui importe, c’est de le transformer », il convient d’abord de comprendre la cause des actuelles politiques néolibérales pour ensuite voir le lien entre le processus d’émancipation d’une part et le développement de la sphère de constitution des libertés (école, protection sociale et services publics) et enfin détailler le rôle de la bataille pour l’hégémonie culturelle.

(suite…)

L’impensé de toutes les gauches : l’exclusion politique de la classe ouvrière et employée

L’histoire contemporaine est aussi l’histoire d’une inclusion de la classe ouvrière dans la vie politique : celle des partis communistes en général et du PCF en particulier.
Cette histoire a été marquée par l’élection d’une centaine d’ouvriers communistes à l’Assemblée nationale en 1946. Malheureusement, cette inclusion fut réalisée sous direction stalinienne avec donc les conséquences que nous connaissons aujourd’hui. Car pour nous, la critique et donc le combat contre le stalinisme furent nécessaires pour venir à bout de cette doctrine catastrophique. Mais les forces capitalistes et leurs alliées en ont profité pour entraîner les autres gauches à jeter le bébé avec l’eau du bain. Ces autres gauches en profitèrent pour, à la fois : combattre le stalinisme (ce qui nous paraît un combat juste) et engager l’exclusion de la classe ouvrière et employée de la vie politique (politique que nous condamnons).

(suite…)

L’école aujourd’hui au service du néolibéralisme

Que de discours sur l’école repliés sur eux-mêmes comme si l’école se déployait indépendamment du système culturel économique et politique ambiant !  (1)En conclusion d’un rapport sur l’instruction primaire aux États-Unis, Ferdinand Buisson écrivait en son temps, que « l’école n’est pas une institution qui se puisse étudier à part et en soi comme un système de chemins de fer ou de télégraphes » !
Que de propositions de rustines pour enrayer tel ou tel mal de l’école ! Que de discours contre les politiques scolaires qui poursuivent les mêmes desseins que les politiques qu’ils contestent !
Comme d’habitude, insuffisance de l’analyse, confusion sur les causes et sur le rôle de l’école. Depuis trente ans, l’opposition RPR puis UMP versus PS est gangrenée par une pseudo opposition entre l’école néolibérale au service de l’employabilité défini par les patrons et le mouvement réformateur néolibéral de « gôche » qui est censé mettre l’enfant au centre de l’école.
Pour un citoyen de gauche, s’opposer à la première est simple car c’est le projet de la droite. Mais il est plus difficile de s’opposer à la seconde, car c’est la politique de la plupart des gauches y compris des pans entiers de l’Autre gauche.

La première politique revient à concevoir une école à plusieurs vitesses en fonction des besoins patronaux pour mieux exploiter les travailleurs. La deuxième est une école également à plusieurs vitesses mais basée sur un discours d’épanouissement de l’enfant, sur le communautarisme, le pédagogisme (2)Nous appelons pédagogisme, le refus de la liberté pédagogique des enseignants – au même titre que la liberté de prescription des médecins – au nom d’une pédagogie officielle décrétée par des « sciences de l’éducation » déconnectés des savoirs académiques. et la soumission aux forces de la société civile. (suite…)

Notes de bas de page

Notes de bas de page
1 En conclusion d’un rapport sur l’instruction primaire aux États-Unis, Ferdinand Buisson écrivait en son temps, que « l’école n’est pas une institution qui se puisse étudier à part et en soi comme un système de chemins de fer ou de télégraphes » !
2 Nous appelons pédagogisme, le refus de la liberté pédagogique des enseignants – au même titre que la liberté de prescription des médecins – au nom d’une pédagogie officielle décrétée par des « sciences de l’éducation » déconnectés des savoirs académiques.

Que faire ? Révolution ou révélation, il va falloir choisir !

« Ils ne cherchent pas une révolution, mais une révélation » disait Saul Alinsky, dans Rules for radicals, des militants qui veulent des changements rapides et spectaculaires via leur passion pour les grands leaders charismatiques, le romantisme révolutionnaire et les dogmes messianiques.
Bien sûr, pour ceux qui souhaitent la transformation culturelle, sociale et politique, il faut étudier sérieusement Condorcet et la Révolution française, Karl Marx, Friedrich Engels, la rupture sociale et politique du XIXe siècle, Jean Jaurès et la République sociale, Antonio Gramsci et la bataille pour l’hégémonie culturelle, Jean Moulin et le Conseil national de la Résistance. Mais, sans dresser de parallèles abusifs entre la situation des Etats-Unis à la fin des années 60 et celle d’ici et d’aujourd’hui, il faut aussi lire Saul Alinsky pour comprendre ce qu’il ne faut pas faire et ce que nous pouvons faire d’efficace. Et pour comprendre les possibilités ouvertes par une refondation de l’éducation populaire. (suite…)